Macadam 112

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Xavier Emmanuelli

Gérard Miller

s e r u t a n g i s s e d n les gra m a d a c a de m Christophe Ono-dit-Biot

Stéphane Hessel

Franz-Olivier Giesbert

Hubert Reeves

le Dalaï Lama

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Harold Cobert

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Jean-François Kahn

André Comte-Sponville

Irène Frain

Jean Ferrat

numéro 112

Numéro spécial

anniversaire


macadam •numéro 78_Mise en page 1 29/07/10 08:59 Page3

- ÉDITO -

www.macadamjournal.com

Grandes signatures

MACADAM

mensuel [édition mars 2014] LES ARTISANS DU MACADAM

association loi 1901, reconnue d’intérêt général Président : Philippe Muyard 22 rue des Vinaigriers 75010 Paris contact@macadamjournal.com COORDINATION DES VENTES

Christine : 06 41 91 02 01 christine@macadamjournal.com AGENCE DE PARIS

22 rue des Vinaigriers 75010 Paris Permanences le lundi et le mercredi de 11 h à 12 h 30 le vendredi de 14 h à 15 h 30 paris@macadamjournal.com AGENCE DE LYON

Locaux motiv 10 bis rue Jangot 69007 Lyon Permanences le lundi, mercredi, vendredi de 8 h à 9 h lyon@macadamjournal.com DIRECTEUR DE PUBLICATION, RÉDACTEUR EN CHEF

François Fillon RÉDACTION

Philippe Albanel, Marie-Pierre Charneau, Emmanuel Daniel, Gabriel Gaudillat, Michel Hannequart, Vincent Juilliard, Clémence Lambard, Bruno Lapierre, Sophia Metz, Thierry Quintry-Lamothe, Mélanie Rembert, Danièle Rudel-Tessier, Claire Veyriras, Éric Walravens redac@macadamjournal.com RÉVISION

Marie Dominique Bergouignan COUVERTURE

© D.R. GRAPHISME

beau fixe, manufacture d’images SITE WEB

Véronique Guérin ÉDITION

Media Compagnie IMPRESSION

Imprimé dans la communté européenne Dépôt légal à parution ISSN : 1954-166X CPPAP : 1209 I 89259

Macadam nouvelle formule a 7 ans ! 7 ans qu’une poignée de vendeurs lyonnais a cru possible de relancer le premier titre de presse de rue francophone. Pour la plupart, ils avaient connu Macadam à ses débuts, lorsque, dans les années 90, il était incontournable dans toutes les grandes villes françaises. “La grande époque” comme ils aiment à le rappeler. Depuis, beaucoup se sont sortis de la galère grâce au journal. Certains ont rechuté et sont heureux de retrouver le titre toujours présent, comme le bon plan pour rebondir dans les mauvais moments. 7 ans qu’une équipe bénévole anime le journal. Ils sont rédacteurs, photographes, dessinateurs, créateurs de mots croisés... et apportent leur soutien, mois après mois, avec le même bonheur. Pour ce septième anniversaire, nous avons décidé de publier les grandes signatures qui nous ont fait l’honneur d’écrire dans ces numéros passés. De beaux soutiens qui nous ont été apportés... François Fillon Directeur de la rédaction

Macadam, c’est qui ? C’est quoi ? DES VENDEURS COLPORTEURS DE PRESSE Les vendeurs de Macadam ne tendent pas la main. Ils sont vendeurs colporteurs de presse (statut VDI), fiers de leur métier et de leur journal. Acheter « leur » Macadam dont ils participent au choix des sujets et des textes est la plus belle des récompenses et leur donne les moyens de s’insérer socialement et économiquement. COMMENT ÇA MARCHE ? Sur les 3 euros du prix de vente 2 euros minimum, en fonction des villes et du coût de transport, va directement au vendeur. Cela représente son bénéfice sur la vente du journal. 1 euro sert à la fabrication et à la diffusion du journal.

UNE ASSOCIATION SANS BUT LUCRATIF La diffusion est assurée par l’association sans but lucratif Les Artisans du Macadam dont le conseil d’administration est composé à la fois de professionnels des médias et de personnes vendant ou ayant vendu le journal Macadam. L’association a recu l’agrément d’association d’intérêt general. Les personnes offrant des dons à Macadam peuvent déduire 66 % des montants des dons de leurs impôts. Renseignez-vous : 01 40 38 25 20. UNE ÉQUIPE DE PROFESSIONNELS Ponctuellement ou de façon régulière, ils prêtent leur plume et leur temps pour la réalisation de Macadam. Ils sont journalistes, dessinateurs, photographes, directeurs de création ou maquettistes. Ils rivalisent d’enthousiasme et de cœur pour cette belle aventure.

Retrouvez toute l’actualité de Macadam sur www.facebook.com/macadamjournal

Ils nous soutiennent

UN RÉSEAU INTERNATIONAL Macadam est membre – et son unique représentant en France – de l’International Network of Street Papers (INSP), ou Réseau international des journaux de rue. Une reconnaissance pour sa qualité rédactionnelle et son travail auprès de ses vendeurs. Le réseau, dont le siège est situé à Glasgow regroupe 110 journaux de rue, répartis dans 40 pays et sur 5 continents. Ces titres offrent des opportunités de travail à 200 000 personnes et publient 38 millions de journaux chaque année. Macadam a reçu le label "Année européenne de lutte contre l’exclusion sociale".

! Vous voulez aider une personne en difficulté ? Proposez-lui de devenir vendeur de Macadam. Contact : 06 43 70 68 67


L’INVITÉ

JEAN-FRANÇOIS KAHN

MACADAM : Combattre ensemble !

Il faut se battre. Et débattre. Non pas le combat en lieu et place du débat. Non pas le débat conçu comme un combat. Mais le débat comme initiateur des clarifications, comme accoucheur des convergences qui justifient et permettent les justes combats. Combattre quoi, qui ? Non pas l’autre, mais ce qui fait obstacle à la reconnaissance de l’autre. Non pas la différence, mais ceux qui refusent l’intégration des différences. Combattre, non pas motivé par la haine qui nous habite, mais animé par l’amour qui nous porte. Non pour tuer, mais pour permettre de vivre. Oui, combattre… Si j’ai choisi ce mot, c’est parce que je refuse un certain « pacifisme » de la charité, un certain « défaitisme » du compassionnel institutionnalisé. À l’humanitaire « d’après » qui consiste à nourrir les réfugiés que l’on parque, je préfère l’humanisme « d’avant » qui désarme et neutralise les fabricants de troupeaux humains. Lutter appelle l’assistance, se résoudre

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produit l’assistanat. La générosité comme moment d’une bataille, non comme alibi d’une acceptation. L’engagement, entre autre par le don, y compris de soi, non pas le don en tant qu’unique engagement qui permet, en fait, de faire l’économie de soi. Donner comme on frapperait la misère, et pas pour s’excuser

de l’accepter. J’ai aimé l’Abbé Pierre. Beaucoup. Pas Mère Térésa. La fraternité, l’authentique fraternité, c’est cela : moins se consoler mutuellement de l’injustice, que se battre tous ensemble contre l’injustice. Entraide de lutte, pas de résignation.

Journaliste et écrivain, Jean-François Kahn est né le 12 juin 1938 à Viroflay. Fondateur du journal L’Événement du Jeudi puis de Marianne, il a été tête de liste Modem dans le Grand Est aux élections européennes.

© DR

Élu député européen, il a démissionné en faveur de sa colistière. Il vient de publier « Dernières salves » aux éditions Plon.

Car oui, c’est possible, tous ensemble, de changer ce monde. De donner, dans un même élan, à ceux qui n’ont pas le nécessaire, mais, dans un même élan, également, de forcer ceux qui ont trop, ou qui ont tout, à offrir leur superflu. Il faut que j’ai conscience de l’autre pour avoir conscience de moi. Mais ce n’est que dans l’action commune, afin que tous les « autres » soient enfin traités comme des autres « soi », que le « nous » prendra conscience de lui-même. D’où la nécessité du débat et du combat. Jean-François Kahn

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L’INVITÉ

HAROLD COBERT

Ne plus les regarder sans les voir

Longtemps, je suis passé à côté des SDF sans les voir. Ou plutôt, en refusant de les voir. Comme beaucoup d’entre nous, je les ai souvent zappés de mon champ de vision, comme on balaie négligemment une poussière imaginaire sur le revers de sa veste. Comme beaucoup d’entre nous, lorsque l’un d’eux demandait la charité dans le métro, j’ai monté le son de mon baladeur, plongé dans un livre ou journal resté fermé jusqu’alors, comme on barricade une porte ou donne un coup de poing préventif. Et, comme beaucoup d’entre nous, si j’identifiais sa présence depuis le quai, je montais dans un autre wagon. Ignoble. Car ce qu’il y a de pire pour les sans abri, au-delà de la rue, de la misère et de la violence, c’est de ne pas exister dans les regards des autres. D’être relégués au rang d’ectoplasmes invisibles. D’être transparents. De n’être plus qu’une ombre sur un mur. À peine. Et puis, il y a quelques années, j’ai vu s’approcher le moment où j’allais finir par grossir leurs rangs. Cela ne m’est pas arrivé. J’ai eu de la chance, beaucoup de chance. Mais je n’ai jamais oublié ces instants où j’ai cru sombrer dans les marges anonymes et dangereuses de notre société. Un soir, début décembre 2008, je suis tombé par hasard sur un documentaire consacré au Fleuron Saint Jean. Une péniche unique en son genre qui, gérée conjointement par les Œuvres Hospitalières de l’Ordre de Malte et 30 Millions d’amis, est la seule structure à accueillir 365 jours sur 365 les SDF avec leurs chiens, interdits dans tous les autres centres d’héber-

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gement. Et qui offre à bord des consultations vétérinaires gra-

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tuites et un service d’assistance sociale. Ici, les hommes et les femmes des rues ne sont plus des SDF, mais des passagers. Le mot a son importance. Il induit que la misère, elle aussi, peut n’être que passagère.

Durant le reportage, on voyait notamment Pascal, un passager, et Jessica, sa petite bâtarde. Pascal disait qu’elle l’avait sauvé, que sans elle, il se serait Harold Cobert est né en 1974, à Bordeaux. Titulaire d’un doctorat de lettres, il a déjà publié

L’opération coûtant un bras, il envisageait de prendre une chienne plus jeune

un essai consacré à Mirabeau et un premier

pour que Jessica la forme avant de s’en aller définitivement. J’étais bouleversé.

roman, Le Reniement de Patrick Treboc (2007).

Il y avait une charge et une puissance d’amour extraordinaires entre cet homme

Son deuxième roman, Un hiver avec Baudelaire, est publié aux éditions Héloïse d’Ormesson depuis mai 2009. Plongée sans fard dans le quotidien des plus démunis. Il mêle romanesque

et cette chienne. De là est née l’idée d’Un hiver avec Baudelaire, un roman racontant comment un homme devenu SDF est sauvé du naufrage par un chien errant.

et vérité sociale, poésie et âpreté, et rappelle

La littérature ne peut pas changer le monde, ce serait trop beau, mais elle peut

cet équilibre précaire qui régit nos vies. Harold

en modifier notre perception. Et lorsque notre regard sur le monde change,

Cobert réverse une partie de ses droits d’auteurs au Fleuron Saint Jean, une péniche gérée par l’Ordre de Malte et 30 Millions d’Amis, seule structure à accueillir les SDF avec leurs chiens.

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déjà foutu en l’air. Le drame, c’était que Jessica était atteinte d’un cancer.

c’est en quelque sorte le monde qui, lui aussi, change. Pour qu’on ne les regarde plus sans les voir. Harold Cobert


L’ I N V I T É

FRANZ-OLIVIER GIESBERT

Parlonsnous !

Aussi loin que je me souvienne, dans une autre vie, il y a des siècles, les humains, bien qu’affairés, s’arrêtaient parfois en chemin pour parler ou échanger au moins quelques mots. Sur le temps qu’il fait, les dernières nouvelles locales ou les années qui passent.

Il est possible que j’idéalise, mais c’est ainsi que j’imagine la vie à l’âge de pierre, sur l’agora d’Athènes ou au Moyen-âge. Des gens qui, contrairement à aujourd’hui, ne se croisent pas sans se voir et qui ont même, si l’occasion s’en présente, des échanges philosophiques. Si nous avons le don de la parole, c’est pour s’en servir. D’autant que nous avons beaucoup de choses à nous dire. Un misanthrope de talent a écrit : « La parole arrive à faner l’espérance » (Marcel Aymé). Rien n’est plus faux. Elle donne, au contraire, du courage, de la joie et même du bonheur. Il y a plusieurs années, alors que je faisais du jogging dans la forêt de Brotonne, en Normandie, je tombai à des lieues de toute habitation sur un autre coureur à pied. J’eus la malencontreuse idée de lui dire bonjour. Il ne me répondit pas. Il

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eut un regard effrayé, comme s’il allait appeler la police, avant de filer sans demander son reste. J’en ris encore. Jaune, cela va de soi, car ce type de comportement est révélateur de l’autisme débilitant de notre société.

Faut-il incriminer les baladeurs et les nouvelles technologies ? Pas seulement. Nous vivons dans un monde où chacun veut parler, sans avoir nécessairement quelque chose à dire, mais avec l’obsession de ne pas écouter les autres, ce qui est

Franz-Olivier Giesbert est né en 1949.

considéré comme une perte de temps quand on n’a pas résolu la question en

Après avoir collaboré à la page littéraire de

s’enfonçant bien profond les oreillettes de son i.pod. D’où cette cacophonie et ses

Paris-Normandie, il entre au Nouvel Observateur en 1971. Il devient directeur de la rédaction de l’hebdomadaire à partir de 1985. En 1988, il est nommé directeur de la rédaction du Figaro. Depuis 2000, il est directeur du Point. Il a publié plusieurs romans dont L’Affreux (Grand Prix du roman de l’Académie française 1992), La Souille (prix Interallié 1995), Le Sieur Dieu, L’Immortel, Le huitième prophète (2008) et des biographies : François Mitterrand ou La Tentation de l’Histoire (prix Aujourd’hui 1977), Jacques Chirac (1987), Le Président (1990) François Mitterrand, une vie (1996), et La tragédie du Président, (2006).

bruits de volière que fabrique l’humanité pour rien, puisque personne ne s’entend. Faisons un rêve. Comme il y a une journée de la gentillesse, de ceci ou de cela, pourquoi ne pas instituer aussi une journée de la parole ? Une fois par an, au lieu de se fuir les uns les autres dans la rue, on ralentirait le pas, on se regarderait dans les yeux et puis on se parlerait, riches et humiliés, puissants et offensés… Franz-Olivier Giesbert

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L’ I N V I T É

BRUNO ROGER-PETIT Enfant, j’en ai passé des jours et des jours à guetter l’arrivée du printemps dès la

Je trouvais le monde merveilleux et beau

fin du mois de janvier. Chaque dimanche matin, dès le réveil, je me précipitais dans le verger de mes parents afin de scruter avec toute l’attention requise la progression des bourgeons vers leur délivrance printanière. Quand arrivait enfin le mois de mai, je me réjouissais innocemment des beautés de la nature. Je trouvais le monde merveilleux et beau. Je pensais que les amitiés que je nouais au collège de Montfort l'Amaury seraient éternelles, les amours durables. Je croyais à l’amour des hommes entre eux. J’aimais à errer des heures entières sous les arbres fruitiers colorés, m’allonger à l’ombre d’un pommier ou d’un poirier, laissant l’odeur des fleurs éphémères enivrer mes narines enfantines des senteurs du printemps renaissant. Contemplant le soleil ainsi allongé, les bars croisés sous ma tête, j’avais le sentiment de fusionner avec cette nature qui était mienne. Je me disais que mon enfance était heureuse, songeais à mes parents qui ne se disputaient jamais, à cette harmonie simple et tranquille qui régnait au sein de ma famille. Mon père, que l’on appelait « Niki », diminutif de Dominique, et ma mère n’étaient pas des gens qui élèvent la voix, même lorsque les enfants de la famille se chamaillaient, à l’occasion. Sous mes arbres, je revivais les jeux qui étaient nôtres au sein de ma fratrie. Les années passent et je n'ai rien changé de ma perception des choses de la nature. J'éprouve toujours cet impérieux besoin de la nature quand le printemps revient. Dès que possible, je m'évade de Paris pour retrouver mon village, mon clocher, ma maison d'enfance, ma campagne. Voilà ma France. J’aime

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aussi la forêt française. La nouvelle saison arrive, peu à peu. Me promenant au hasard des pas, mes yeux constatent le lent éveil de la nature. L’on distingue un bourgeon de marronnier à peine éclos ici, des feuilles de chêne naissantes là, mais aussi ce rayon de soleil, plus vif que la veille, qui perce des nuages complices pour mieux se frayer passage jusqu’à une clairière accueillante et qui vient s’y poser dans l’attente du promeneur qui sera désireux de profiter de sa douce chaleur. Il fait froid le matin, mais les températures de l’ après-midi sont plus clémentes, ranimant lentement la végétation et la faune frappées rudement ces trois derniers mois par les torpeurs de l’hiver. De temps à autre, parvient à l’oreille le son d’un oiseau qui s’essaie à la mélodie après des semaines d’inactivité. L’humeur de la nature renaissante et l’harmonie

Bruno Roger-Petit intervient régulièrement

qui se dégage d’une forêt ordonnancée par la main de l’homme, lorsque son

sur les différentes chaînes d'information

action contribue à l’émergence de la beauté des choses, sont la source de cette

pour décrypter l'actualité avec son oeil

foi en l’avenir qui jamais ne me quitte. La forêt est un refuge, elle est aussi la source.

impertinent et pertinent. Il a travaillé pour

Il n’est pas au monde d’endroit plus hospitalier, bienveillant et charitable que la

France 2, France 5, BFM, France Inter, Europe 1. Il est aussi journaliste-blogueur sur le Post.fr et Sport 24.com. Il est l'auteur du livre « François Mitterrand 2008 ».

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forêt pour tout esprit désireux de reconstituer ses forces, car sans forces, l’esprit n’est rien. Bruno Roger-Petit


L’INVITÉE

IRÈNE FRAIN « Dans cette Bretagne des années cinquante, on jardine son esprit comme son

La maison de la source

lopin de terre, les livres autant que les fleurs. On enterre les morts comme on travaille le tissu ou la pierre. Dans les règles de l’art. Voici le voyage de l’enfance. » Il y a des années, j’ai habité une maison avec un jardin et un puits. Un minuscule morceau de terre. Par en dessous courait une source.

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Après l’avoir quittée, longtemps je n’ai pu y retourner. La maison m’était interdite. Non qu’elle eût disparu, non que l’accès m’en fût refusé par des propriétaires ombrageux. Simplement, à l’heure où j’avais quitté l’enfance, j’avais dû l’abandonner, elle aussi. Depuis, j’avais construit devant elle une barrière invisible. De loin en loin, je suis revenue dans la ville où elle se trouvait. À chaque passage, très banalement, je constatais les changements qui altéraient ou bouleversaient l’ancienne typographie. Là où il n’y avait autrefois qu’un ruisseau, des champs, je découvrais une bretelle de périphérique, un hypermarché. Des Tex-Mex, des parkings ou des succursales de banque remplaçaient les petites épiceries, les jeux de boules, les cafés,

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les grands jardins maraîchers; des arbres que j’avais connus maigrelets, mal assurés dans leur terreau, bordaient

maintenant les avenues avec tout le sérieux nécessaire, à croire qu’ils avaient toujours été là, solennels et florissants. Cela me touchait à peine. Cette sensation, à chaque retour, était recouverte, submergée par une conviction aussi infantile qu’impossible à mettre en fuite : si les gens de la ville avaient goudronné les champs, rasé les vieilles fermes, englouti le paysage de mon enfance sous des

Femme de lettres, Irène Frain, se consacre totalement à l'écriture après la publication de son roman « Le Nabab » pour lequel elle obtient le prix des Maisons de la presse en 1982. Le début de sa carrière est marqué par son rôle de professeur qu'elle tient au Lycée et à la Sorbonne. En 1976, la jeune femme publie son premier ouvrage « Quand les Bretons peuplaient les mers ».

faire autrement. De la même façon que les arbres, en grandissant, n’avaient rien fait d’autre que leur métier d’arbre, pousser. Mais un lieu était resté intact, j’en étais tout aussi certaine : celui de la maison et du jardin où j’avais moimême grandi. Un secret vivant, intact, inviolé, qui continuait à palpiter derrière le barrage que je m’étais construit pour le protéger. Barrière connue de moi seule, histoire qui ne serait jamais dite, étrangère à

S'ensuit « Les Contes du cheval bleu les jours

tous ces gens, autour de moi, qui entraient, sortaient des magasins, montaient

de grand vent ». En 2009, elle reçoit le grand prix

dans les autobus, couraient à leur travail, ouvraient leur parapluie, allaient à

du roman historique pour son dernier livre

la plage, prenaient un rai de soleil à une terrasse de café. Abandonnés à la

« Les naufragés de l'île Tromelin ».

vie ; laquelle, pareille aux arbres, s’obstinait comme partout à faire son métier

Irène Frain est ambassadrice en faveur de l’enfance

de vie : continuer.

tibétaine au sein de l’association « Aide à l’enfance

Mais in n’était qu’un seul endroit dans la ville où les choses ne continuaient

tibétaine » (www.a-e-t.org). Elle est membre

pas, là-bas, dans la vieille maison au bout de sa venelle, avec sa petite cour

fondateur du Women’s Forum for the Economy and Society, lieu de débat, de partage, de réflexion et d’action qui donne la parole aux femmes sur tous les grands enjeux sociétaux et économiques contemporains (www.womens-forum.com). © François Frain

cataractes de béton et le boutoir de pelleteuses, c’est qu’ils n’avaient pas pu

et son puits. C’était évidemment absurde : depuis le temps (plus de trente-cinq ans), la maison avait été vendue ; à coup sûr, transformée. Peut-être même rasée. Irène Frain

Ce texte est publié en lien avec la revue culturelle à vocation littéraire In Fusion qui publiera son prochain numéro sur le thème de la Bretagne. www.in-fusion.org

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macadam •numéro 73_Mise en page 1 17/02/10 13:44 Page3

L’INVITÉE

IRÈNE FRAIN « Dans cette Bretagne des années cinquante, on jardine son esprit comme son

La maison de la source

lopin de terre, les livres autant que les fleurs. On enterre les morts comme on travaille le tissu ou la pierre. Dans les règles de l’art. Voici le voyage de l’enfance. » Pourtant, c’était plus fort que moi, je n’arrivais pas à me la représenter autrement que figée par un sortilège, plongée dans une sorte de sommeil

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magique qui l’affranchissait des lois du Temps ; et une règle tout aussi énigmatique me défendait, comme dans un conte, d’aller la réveiller. Le jour viendrait, disait aussi le sortilège, un jour sonnerait l’heure. En attendant, ce n’était jamais le jour, jamais l’heure. Chaque fois que je revenais, j’évitais le quartier de la maison au puits. Quelquefois, je m’enhardissais, je tentais de m’en approcher, de braver la défense de la barrière invisible. Au dernier moment, je rebroussais chemin, troublée, fuyarde. Je me sauvais. Jusqu’à cet après-midi d’un solstice d’été où j’ai compris que je ne serais sauvée qu’en ne me sauvant pas ; et qu’il fallait à tout prix, pour pouvoir continuer comme les arbres et la ville, que je regagne la rive ancienne du temps, là où était

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restée l’enfance, là où palpitait son secret si vif, si violent. Cela s’est fait sans réfléchir, j’étais poussée, j’ai trouvé la

passe sans l’avoir cherchée, traversé comme par étourderie le fleuve des années, j’ai descendu la venelle en courant, je suis tombée sur le jardin où par chance, pleuvait ce jour là la lumière d’été. La maison, comme dans mon rêve, n’avait pas été rasée. Le puits était toujours là, avec le dessin du jardin, quelques-uns de ses vieux arbres ; et ses allées.

de son roman « Le Nabab » pour lequel elle obtient le prix des Maisons de la presse en 1982. Le début de sa carrière est marqué par son rôle de professeur qu'elle tient au Lycée et à la Sorbonne. En 1976, la jeune femme publie son premier ouvrage « Quand les Bretons peuplaient les mers ».

constitué mon enfance - détails anecdotiques, insignifiants pour tout autre que moi, une plaque de ciment sortie des mains de mon père, des plantes que je l’avais vu bouturer, les lichens et les scolopendres agrippés au granit du puits, une poutre du grenier, le bois d’une vieille barrière -, ce bonheur fut lui-même bousculé, recouvert par la joie puissante qui saisit alors : l’allégresse d’avoir enfin gagné l’autre rive du temps. Cette maison de la source, je pouvais

S'ensuit « Les Contes du cheval bleu les jours

maintenant l’accueillir dans sa pleine vérité : elle était ma source. Ce que je

de grand vent ». En 2009, elle reçoit le grand prix

venais de retrouver, ce n’étaient pas des souvenirs, mais un trésor infiniment

du roman historique pour son dernier livre

plus précieux, mon matin, ma matrice, mon principe, l’origine de tout ce que

« Les naufragés de l'île Tromelin ».

j’avais aimé, haï, souffert, voulu, refusé, cherché, lu, écrit, imaginé. Le sortilège

Irène Frain est ambassadrice en faveur de l’enfance

était levé, la maison qui m’avait appris le monde recommençait à me parler.

tibétaine au sein de l’association « Aide à l’enfance

Et moi, à l’écouter, à nouveau enfant, suspendue entre deux paroles. Celle,

tibétaine » (www.a-e-t.org). Elle est membre

mourante, du temps d’avant ; et, tantôt ardente, tantôt inquiète, celle des jours

fondateur du Women’s Forum for the Economy and Society, lieu de débat, de partage, de réflexion et d’action qui donne la parole aux femmes sur tous les grands enjeux sociétaux et économiques contemporains (www.womens-forum.com). Ce texte est publié en lien avec la revue culturelle à vocation littéraire In Fusion qui publiera son prochain numéro sur le thème de la Bretagne.

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Mais le plaisir des retrouvailles avec ma matière même de ce qui avait

www.in-fusion.org

qui sous mes yeux naissaient. Alors j’ai répondu à la maison. Dès que je suis sortie de la venelle, j’ai été hantée par le désir de reprendre le monde à sa source, de recommencer à l’écouter ; et ce qu’il me disait, de le raconter. Irène Frain Extrait du récit : « La maison de la source ».

© François Frain

Femme de lettres, Irène Frain, se consacre totalement à l'écriture après la publication


L’INVITÉ

CHRISTOPHE ONO-DIT-BIOT Assez d’entendre les gens se plaindre que le journalisme est mort parce que l’in-

on demande du récit !

formation est la même partout et pour tout le monde, immédiate et superficielle. Assez d’entendre que la globalisation a rétréci la planète et que cela ne sert donc plus à rien d’aller voir sur place, puisque tout vient à nous, via Internet ou Tweeter, en attendant le prochain outil de communication minimale instantanée. Assez de la lassitude qui semble aujourd’hui paralyser le métier, paralyser le lecteur, paralyser le citoyen, qui a le droit d’être informé mais qui n’exerce plus ce droit, car on lui dit que tout est joué, que rien n’a de sens, car dans tous les sens… Il est temps d’administrer un antidote à cette résignation coupable. Pour commencer, voilà du Viagra mental : Joseph Kessel, le résistant, l’aviateur, le parolier du Chant des partisans (« Ami, entends-tu… »), l’auteur du Lion, de l’Armée des ombres, mais, surtout, le journaliste, qui va redonner à tout le monde, croyez-moi, l’envie, le goût et la saveur d’être informé et de vivre l’information. On réédite ses reportages (3 tomes en poche chez Tallandier). Ceux qu’il donna au Matin dans les années 20, 30 et 40. Guerre civile espagnole, naissance de l’IRA, montée du fascisme à Berlin, tensions en Palestine, il a tout couvert… Non seulement c’est passionnant, mais ce qui est absolument fou, c’est que ça sonne contemporain. Envoyé à New York en 1933, il écrit : « On s’était accoutumé

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à considérer les Etats-Unis comme le pays le plus riche et le plus prospère du globe. Il servait d’exemple d’opulence, de possibilités sans fin. Il était l’arbitre économique et financier par-delà les océans. […] Et puis, un jour d’automne, les colonnes gigantesques du plus colossal des édifices humains se mirent à trembler. » Kessel décrit les magasins vides, les Américains qui mendient sur la Cinquième Avenue. L’un d’eux témoigne : « Je vivais bien, j’achetais des

actions à Wall Street. Elles montaient sans cesse. Et puis… » L’homme tape du poing sur la table. Ça ne vous rappelle rien cette « crise gigantesque » ? Trois ans avant, Kessel est à Djibouti, sur la trace des marchands d’esclaves de la mer Rouge. Et met en mots, puissants, le scandale de ce « commerce de

chair humaine ». Le reporter évoque ces « bateaux au fond humide », où « grelottants et captifs, étaient accroupis pêle-mêle des hommes et des femmes ». Ça ne vous fait pas penser à ces migrants d’aujourd’hui, Somalis, Mauritaniens ou Kurdes, qui s’embarquent pour des odyssées mortelles, saignés par des intermédiaires sans foi ni loi ? Ceux que le journaliste Daniel Grandclément avait filmés il y a trois ans, prenant place avec eux sur une barcasse de 10 mètres à peine où s’entassaient plus de 100 passagers battus à coups de ceinChristophe Ono-dit-Biot est né au Havre en 1975. Agrégé de lettres, il est l’auteur de quatre romans, tous publiés chez Plon : • Désagrégé(e) (2000) • Interdit à toute femme et à toute femelle (2002) • Génération spontanée (2004) - ouvrage pour

ture par ces nouveaux négriers que sont les « passeurs ». Au risque de sa vie, ce reporter en avait rapporté un témoignage de première main. Un récit en mots et en images qui nous entraînait au cœur de la détresse humaine. C’est aussi, à sa façon, ce qu’a fait Florence Aubenas dans le Quai de

Ouistreham, menant la vie d’une travailleuse pauvre pour se faire le porte-voix d’un peuple silencieux, au terme de 270 pages qui marquent l’âme, réveillent

lequel il a reçu le prix du Livre de l’été Vol de nuit

la conscience. Preuve qu’à la suite de Kessel, ce journalisme-là, qui emmène

ainsi que le prix littéraire de la Vocation

le lecteur au cœur de l’événement, et qui, par l’intermédiaire d’un grand récit,

• Birmane (2007) - prix Interallié

l’arrache à sa torpeur, lui fait toucher la réalité, a encore de beaux jours devant

Après avoir été grand reporter, il est aujourd’hui

lui quand on voit l’accueil que lui réserve le public. Preuve qu’il y a un désir

rédacteur en chef du service Culture et directeur

d’information autant que d’informer. Preuve que ce métier a encore un sens.

adjoint de la rédaction au Point.

Preuve que le journalisme n’est pas mort. Christophe Ono-dit-Biot

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L’ I N V I T É

J U L I E N

L A U P R Ê T R E

à tous les gens

de coeur

Face à la montée inquiétante de la pauvreté et de l’exclusion en France, aux situations d’extrême dénuement de millions de personnes et des innombrables victimes de catastrophes dans le monde, le Secours populaire se mobilise et agit. Quotidiennement témoins de la réalité de la crise économique et de ses conséquences, les bénévoles du Secours populaire français (SPF) assistent à l’explosion des demandes d’aides et à l’émergence de nouveaux publics – enfants, jeunes, personnes âgées, familles monoparentales, travailleurs précaires, familles d’immigrés… – toujours plus nombreux à passer les portes du SPF. Ils en ont témoigné dans les cahiers « Le dire pour agir » : le Livre porte-voix de la pauvreté*, sorti en 2010, porte sur la scène publique ce que vivent, chaque jour, pauvres et précaires. Durant l’année qui s’est écoulée, le Secours populaire a permis à 2,4 millions de personnes démunies de trouver soulagement, aide réelle et écoute chaleureuse. Aides alimentaire, vestimentaire, d’accès aux soins, soutien à l’insertion socioprofessionnelle, aide au logement, à l’accès à la culture, aux sports, aux loisirs, aux vacances… Les fédérations et comités du SPF rivalisent d’efforts et d’imagination pour endiguer le raz de marée de la misère. Ce travail gigantesque est réalisé grâce au dévouement inconditionnel de plus de 80 000 bénévoles de l’association. L’indépendance du Secours populaire est garante de sa liberté d’action, dans le choix de ses projets ou de ses pratiques de solidarité. Elle se renforce par l’engagement libre et volontaire de tous ses animateurs-collecteurs bénévoles. 2011, « année européenne du bénévolat et du volontariat », doit être, pour l’association, un moment privilégié de promotion du bénévolat avec tous, les enfants, les adultes et, particulièrement, les jeunes. Car la jeune génération, frappée de plein fouet par la montée de la pauvreté, de l’exclusion et de la misère, manifeste dans le même temps sa volonté d’agir, d’être solidaire, pour faire échec à la précarité. Bien au-delà des 80 000 animateurs-collecteurs déjà actifs, ce sont toutes les personnes indignées par la pauvreté et la misère en France et dans le monde qui peuvent s’associer aux projets de solidarité du SPF. Le SPF appelle l’ensemble des gens de cœur, les animateurs des antennes, des comités, des relais, des commissions de travail, chaque bénévole dans chaque département, tous ses partenaires, à faire de cette année un temps fort de recrutement de nouveaux bénévoles et à tout faire pour les accueillir, les impliquer, leur confier des responsabilités. La dure situation vécue par des millions d’enfants et de familles en souffrance l’exige. 2011 doit avoir un écho particulier auprès de chaque animateur-collecteur, pour qu’il soit le promoteur d’un Secours populaire encore plus efficace, à la force d’action amplifiée. 2011 doit voir se renforcer le réseau de nos partenaires dans le monde des entreprises, du sport et du spectacle.2011 doit nous voir accueillir des milliers de jeunes, pour qu’ils mènent, aux côtés des plus anciens, des actions de solidarité de qualité, diversifiée, dynamique et novatrice.2011 doit donner toute leur place aux bénévoles dans les structures et permanences, sur leurs lieux de vie professionnelle et de loisirs. 2011 doit, plus que jamais, voir offrir une place aux personnes accueillies et à leur capacité à agir comme bénévoles de l’association. 2011 doit nous permettre d’atteindre le chiffre des 100 000 bénévoles dont le SPF a besoin. Enfin, 2011 va donner un nouvel élan à la solidarité populaire ! Julien Lauprêtre

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*Livre en vente sur www.secourspopulaire.fr

© DR

Président du Secours populaire français


macadam •numéro 78_Mise en page 1 29/07/10 08:59 Page3

L’INVITÉ

HUBERT REEVES

l ’adieu au pétrole

En ce moment, des plages américaines sont souillées par une marée en noir. C’est un désastre pour tous ceux qui la subissent directement et c’est un deuil pour tout humain qui constate les atteintes aux milieux aquatique et terrestre, et la mort qui rôde sur ces écosystèmes. Quand on voit les spectacles de désolation des oiseaux mazoutés, des pêcheurs sans ressources – et nous ne voyons que la partie émergée de l’iceberg –, on pourrait dire : Vivement la fin du pétrole ! En effet, quand il n’y aura plus de combustibles fossiles, il y aura beaucoup moins d’émissions de gaz carbonique. Attendre sans rien faire la fin totale du pétrole, attendre un siècle la fin du gaz et deux siècles la fin du charbon, ne serait pas raisonnable. Il faut prévoir la fin inéluctable du pétrole : nous aurons épuisé en un siècle ou deux ce que la nature a mis des millions d’années à fabriquer. Le pétrole et ses produits dérivés, ce seront bientôt des souvenirs. D’une part, nous ne sommes pas prêts à nous en passer. Et, d’autre part, il faut nous y préparer, car la pénurie annoncée n’est pas qu’une heureuse perspective. Il est temps de regarder la situation en face. De deux choses l’une, ou nous nous passons d’énergie, ou nous cherchons d’autres sources que les énergies fossiles. La première proposition est irrecevable : il faut permettre les déplacements des humains et des marchandises ; et la seconde n’est pas irréprochable. Il faut admettre que rien n’est parfait ! Ainsi en est-il, par exemple, des agrocarburants. Ceux de la première génération (maïs, colza…) étaient contestables. Et leur contestation est légitime : ils concurrençaient les cultures alimentaires, au point que les habitants des pays les plus pauvres se voyaient privés de nourriture, devenue « hors de prix ». Les agrocarburants de deuxième génération sont du carburant liquide fait à partir des « déchets verts » (par exemple : la paille et autres « résidus » d’exploitation des végétaux). C’est là qu’intervient l’avocat du diable, qui se révèle être celui de la nature. Que deviendraient ces « déchets verts » si nous ne les transformions pas en carburant ? Prenons l’exemple des arbres abattus en forêt. Les copeaux de bois et les branchages sans valeur marchande laissés sur place seraient assaillis par une armée d’insectes et d’autres xylophages. Tout serait décomposé… en éléments fertilisant le sol, ce qui serait une aubaine pour les arbres qui s’installeront en

Hubert Reeves, astrophysicien de renom international,

remplacement des arbres disparus. Prenons l’exemple des récoltes de céréales.

est né à Montréal (Québec) le 13 juillet 1932. Il a étudié

Le blé a puisé dans le sol de quoi élever ses épis : il y a donc prélevé des

au collège Brébeuf, à l’université de Montréal, à l’université

éléments nutritifs. Rendre au sol une partie de ce qu’il a donné permettrait

Cornell (USA), où il a obtenu un doctorat en astrophysique

d’utiliser moins d’engrais chimiques… pour la production desquels il faut de

nucléaire. Il a ensuite enseigné la physique à l’université

l’énergie. Alors, si l’on se donne comme objectif d’aider le sol, il faut admettre

de Montréal tout en étant conseiller scientifique à la Nasa. Il a été directeur de recherches au CNRS de 1966 à 1997. Il est professeur associé au département de physique de l’université de Montréal. Auteur de nombreux ouvrages, dont plusieurs best-sellers, il est aussi un conférencier de talent. Hubert Reeves est président de la ligue Roc pour la préservation de la faune

que le mot « déchet » n’existe pas dans la nature. Elle est une adepte du recyclage et de la fertilisation naturelle. Une conclusion pourrait être : garder les yeux ouverts sur la réalité en portant un regard différent sur la nature …alors tout change… y compris le vocabulaire ! Sans condamner définitivement la piste des agrocarburants, car les conflits d’intérêts nécessitent toujours des compromis et qu’une troisième génération est à l’étude, d’autres pistes sont à explorer, telles

sauvage et de la biodiversité.

celle de la pile à combustible et celles des technologies liées à l’hydrogène.

Pour plus d’informations : www.hubertreeves.info

L’énergie solaire sous toutes ses formes est déjà disponible.

Ligue Roc, 110, bd Saint-Germain, 75006 Paris.

Alors boostons la recherche !

www.roc.asso.fr

Hubert Reeves, astrophysicien

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macadam•numéro 93_Mise en page 1 19/12/11 16:51 Page3

L’ I N V I T É

XAVIER EMMANUELLI

l'atroce liberté des

enfants des rues

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L’exclusion est la pathologie sociale est i l l de notre temps. e anu m m Elle est liée à la paur E vie vreté économique et en Xa cela est accentuée par la crise financière, mais elle est surtout la conséquence de notre mode de vie en milieu urbain…Conséquence des exodes ininterrompus qui depuis des décennies drainent vers les cités des populations nouvelles. Celles-ci abandonnent les rites, rythmes et coutumes des sociétés traditionnelles qui dans une certaine mesure les protégeaient pour venir constituer des villes-monstres, des mégapoles, sur tous les continents, qui rendent chacun étranger à l’autre, et fabriquent des bidonvilles à l’infini. Ce phénomène émergent est universel, ces hommes et ces femmes ne sont plus insérés dans un projet commun de société et se replient sur des agrégats communautaires ou ethniques dans les meilleurs des cas ou, pire, restent aux marges et survivent à la rue, inventant des comportements rudimentaires d’une existence au jour le jour. et h cin e d mé

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LA RUE, UN NON LIEU

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Il est une exclusion intolérable générée par ces vies marginales : celle des enfants ou plus généralement des jeunes mineurs qui tentent eux aussi de survivre sans protection, sans affection, dans la violence d’un monde sans perspective. Ils sont à la rue. Pour diverses raisons, ils n’ont plus de liens familiaux, mais pour la plupart ils sont les victimes des exodes qui ont déraciné leurs parents biologiques. La rue est un non lieu, bien que ce soit un espace de vie, ce n’est pas un espace rassurant, et les enfants qui évoluent sont constamment en danger, ils recherchent d’abord une protection, c’est pourquoi ils vont se constituer en petites bandes, d’abord en groupes erratiques de deux ou trois avant de former une entité plus organisée dès qu’un moins jeune ou un ancien de la rue plus expérimenté en prend la direction. Direction est sans doute un mot fort pour signifier qu’un chef, qu’un caïd, va mener le groupe. Ce groupe, c’est la tentative d’une reconstitution familiale qui permet de se retrouver entre semblables et avoir le sentiment d’être protégé, de se sentir vivant.Mais le prix à payer est très lourd, les grands dominent les petits par la sexualité, comme dans la meute des origines.

AUCUNE TRIBUNE POUR DÉPOSER SA SOUFFRANCE Le corps de l’enfant – groupe ne comprend pas ses limites, c’est pourquoi il n’a pas connaissance de son altération et le perçoit souvent comme une ressource possible, ce qui peut le mener à la prostitution. Mais l’enfant de la rue sait qu’il n’a aucune tribune pour déposer sa souffrance ou son angoisse. Il vit dans un temps qui ne s’écoule pas, où il ne se passe rien. Ce sont toujours les mêmes gestes, les mêmes actes ceux de la répétition, seule une descente de police ou le décès d’un voisin peuvent rompre la monotonie de ce perpétuel présent de la survie. Pourtant ces enfants jouent, c’est même leur caractéristique. Ils grandissent par le jeu dans l’atroce liberté de la rue, du jeu tragique de la vie, et de la mort, dont ils n’évaluent pas l’enjeu. Ils ont tôt fait de repérer les associations de bonne volonté qui tentent de les aider avec plus ou moins de professionnalisme et vont les instrumentaliser dans une démarche ludique et de fait, vont les placer en situation de concurrence.

COLLE, HALLUCINOGÈNE, HÉROÏNE Tous les groupes d’enfants à travers le monde usent de toxiques, colle, amphétamines, hallucinogènes ou de produits plus élaborés, psychotropes ou héroïne. Cette prise de drogue a pour effet de se couper ses sensations, du sommeil, de la fatigue, de la faim, des souvenirs et des messages du corps qui se constitue et que l’enfant ne comprend pas. Elle conduit à des sentiments d’indestructibilité, d’invulnérabilité… elle permet de réaliser les vols et les délits et renforce cette impression irréelle de cache-cache permanent avec le monde des adultes forcément agressif. C’est à ce moment qu’il faut faire preuve d’un grand professionnalisme : l’abandon trop rapide des amphétamines peut donner des états dépressifs, l’abandon des solvants, des états confusionnels et paranoïaques. Il faut du temps pour reconquérir la grammaire du temps, de la persuasion et de l’autorité pour faire accepter les contraintes de l’espace du centre d’hébergement, manifester beaucoup de sympathie et d’affection pour les enfants qui vivent un monde d’émotions. En somme leur faire perdre leur code de survie et cet espace d’évolution du jeu pour les faire évoluer vers une vie sociale. En somme les faire grandir, leur donner des atouts pour devenir des hommes. Xavier Emmanuelli (texte intégral sur : Youphil.com)


L’ I N V I T É

GÉRARD MILLER Au cœur de toute manipulation, il y a - c’est une expression du psychanalyste

Il est si facile de nous manipuler...

Jacques Lacan - un « sujet supposé savoir ». Lacan explique un truc qu’on n’oublie pas une fois qu’on l’a entendu : « Celui à qui on suppose le savoir, celui-là on l’aime. » Car pour être efficace, le savoir n’a pas besoin d’être authentique, fondé, vérifié, non, il suffit qu’il soit… supposé. Regardez ce qui s’est passé en France quand le maréchal Pétain arrive au pouvoir en juin 1940. Dans notre pays, personne ne comprend comment les troupes allemandes ont pu écraser - et en si peu de temps - les troupes françaises. À vrai dire, personne ne comprend plus rien à rien. Et Pétain arrive, auréolé d’une popularité déjà ancienne, et déclare tout de go - c’est son premier discours, juste après la défaite et l’armistice : « Français, Françaises, je sais ce qui s’est passé. » Il ne le sait pas plus que n’importe qui, mais d’emblée le voilà qui se campe dans la position du sujet supposé savoir, et des millions de Français, ceux-là mêmes qui avaient voté pour la gauche et le Front populaire quelques années plus tôt, se tournent, émerveillés, vers cette vieille baudruche qui, de son savoir providentiel, va éclairer le sombre mystère du monde ! Voilà bien un ressort essentiel de la manipulation : moins nous comprenons quelque chose, plus nous sommes prêts à faire confiance au premier venu si seulement il se prétend capable de nous l’expliquer. Mais en fait, nous ne voulons pas obtenir des explications sur

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ce que nous ne comprenons pas, encore moins avoir des preuves

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sur quoi que ce soit. Non, ce que nous voulons, c’est juste avoir… l’assurance que l’autre sait. Qu’on se souvienne du sketch historique de Pierre Dac et Francis Blanche. Pierre Dac est déguisé sur scène en fakir omnivoyant et, à un moment donné, Francis Blanche lui demande : « Pouvez-vous me dire le numéro de la carte d’identité de Madame ? » Pierre Dac réfléchit et répond : « Oui, je le peux. - Vous pouvez le dire ? - Oui, je le peux. » Et Francis Blanche de faire applaudir le public : « Il peut le dire ! Bravo ! » Une telle entourloupe nous amuse, et pourtant… n’est-ce pas ce que nous passons notre temps à faire ? À signer des chèques en blanc au premier venu qui

Gérard Miller est psychanalyste et professeur à l’université Paris 8. Il collabore à l’émission

Cactus sur Paris-Première, à On va s’gêner sur Europe 1 et tient la rubrique J’aurais dû dans l’hebdomadaire La Vie. Il vient de jouer pendant 6 mois au Petit théâtre de Paris Manipulations mode d’emploi, le spectacle qu’il a écrit et créé cet été à Avignon.

nous dit : « Oui, je le peux. » En politique, ce n’est pas ce qui se passe ? 1995, campagne pour l’élection présidentielle : « — Pouvez-vous réduire la fracture sociale ? — Oui, je le peux. 2007 : « - Pouvez-vous augmenter le pouvoir d’achat ? — Oui, je le peux. » Résultat : 19 millions de voix au 1er tour. Gérard Miller

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macadam •numéro 75_Mise en page 1 22/04/10 09:23 Page3

L’ I N V I T É

J E A N F E R R AT

J ’aurais seulement voulu

Qu’aurais-je été qu’aurais-je été S’il ne montait ce chant au travers de ma gorge Témoin de la réalité Du monde de malheur que les hommes se forgent J’aurais simplement voulu être heureux J’aurais simplement voulu La la la la la la la la J’aurais seulement voulu Qu’aurais-je été qu’aurais-je été Sinon cet inconnu qui croit qu’on lui pardonne Pour son accent de vérité De ravir au passant la chanson qu’il fredonne J’aurais simplement voulu être heureux J’aurais simplement voulu La la la la la la la la J’aurais seulement voulu Qu’aurais-je été qu’aurais-je été Sinon cette vallée que tous les vents traversent Mes certitudes ballottées Ces mots à peine éclos à mes lèvres qui gercent J’aurais tant voulu vivre un monde heureux J’aurais seulement voulu

Poète, artiste, Jean Ferrat aura sa vie durant chanté l'amour et l'engagement humain. Une certaine idée de l'homme que nous partageons, à Macadam.

La la la la la la la la J’aurais seulement voulu

En hommage à ce grand nom de la chanson

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je été ». Merci à Colette, sa compagne, et à Gérard

Extrait de J’aurais seulement voulu

Meys, son producteur.

Paroles et musique : Jean Ferrat / © 1980 Productions Alléluia © Alain Marouani

française, nous publions cet extrait de « Qu’aurais-


macadam•numéro 82_79 21/12/10 17:51 Page3

L’ I N V I T É

ANDRÉ COMTE-SPONVILLE

riche et pauvres

On connaît des sociétés sans riches. Pas de sociétés sans pauvres. Cette asymétrie donne à penser. Une société sans riches, c’est une société où tout le monde est pauvre. Tel est l’état originel et durable de l’humanité, au temps du paléolithique (qui constitue, de très loin, la période la plus longue de toute l’histoire de l’humanité). On en trouve encore des exemples dans telle ou telle peuplade primitive, où les gens vivent de la chasse et de la cueillette, ne possèdent pratiquement rien et sont dès lors, quant à leurs possessions, tous égaux. Selon nos critères à nous, ils sont tous pauvres, et même bien plus pauvres, objectivement, que la plupart des pauvres de chez nous. Il est vrai que l’objectivité n’est pas tout, ni même peut-être, dans ces domaines, l’essentiel. Dans une société où il n’y a pas de riches, personne ne se sent pauvre. Ces notions ne prennent sens, pour l’individu, que par comparaison. Être riche, c’est être plus riche que la moyenne. Être pauvre, c’est être moins riche que la plupart. Faut-il pour autant envier l’époque préhistorique, sous prétexte que personne, du moins en ses débuts et selon toute vraisemblance, ne s’y sentait ni riche ni pauvre ? Je n’en crois rien. D’ailleurs qui, aujourd’hui, voudrait vivre comme eux ? Ce qu’il faut comprendre, c’est que la pauvreté, au sens objectif du terme (ne posséder rien ou très peu), est l’état originel de l’humanité. Or, comment en sort-on ? Par l’enrichissement, à quoi chacun est porté d’abord par l’intérêt personnel ou familial, autrement dit par l’égoïsme ou (dès que l’argent se répand) par la cupidité. Engels l’a dit : « La basse cupidité fut l’âme de la civilisation, de son premier jour à nos jours, la richesse, encore la richesse, toujours la richesse, non pas la richesse de la société, mais celle de ce piètre individu isolé, son unique but déterminant. Si l’humanité

a

connu

le

développement

croissant

de

la

science et, en des périodes répétées, la plus splendide floraison de l’art, c’est uniquement parce que, sans eux, la pleine conquête des richesses de notre temps eût été impossible. » On préférerait que les gens travaillent pour l’amour de l’humanité ou de la justice. Mais qui peut y croire ? « La lutte des classes est le moteur de l’histoire », disait Marx. Sans doute, dès que les classes existent. Mais l’égoïsme (le plus souvent dilaté à la taille de la famille) est le moteur de l’économie. Au reste, Marx le dit aussi : les individus ne poursuivent, dans la vie économique, que « leur intérêt particulier ». C’est pourquoi on

© DR

travaille. C’est pourquoi on épargne. C’est pourquoi on investit. C’est pourquoi on André Comte-Sponville est né à Paris, en 1952.

spécule. Alors il y a des riches. Alors les pauvres se sentent pauvres. Mais la société,

Ancien élève de l’École Normale Supérieure

elle, à la considérer globalement, l’est moins. Faut-il le regretter ?

de la rue d’Ulm et agrégé de philosophie,

Où veux-je en venir ? A ceci, que c’est l’égoïsme qui pousse à s’enrichir, et qu’on ne

il a longtemps été maître de conférences

saurait l’éradiquer, à supposer que ce soit possible, sans appauvrir considérablement

à l’Université Paris I (Panthéon-Sorbonne),

nos sociétés. Si je ne peux plus m’enrichir, à quoi bon travailler plus ou mieux que les

dont il démissionna pour pouvoir consacrer

autres ? A quoi bon même, si l’égalité est assurée, travailler encore ? Bref, l’égoïsme

davantage de temps à l’écriture et

est économiquement moteur. C’est pourquoi on ne peut pas compter sur l’économie pour

aux conférences qu’il donne en dehors

aboutir à la justice. Ni sur la justice pour créer de la richesse.

de l’Université. Il est membre du Comité

La solution ? Celle de nos sociétés développées, certes très imparfaites, mais beaucoup

Consultatif National d’Éthique. Il a publié une

moins, toutefois, que toutes les sociétés précédentes : compter sur l’économie pour créer

vingtaine d’ouvrages, dont : Petit traité des

de la richesse (c’est la seule façon de faire reculer la pauvreté), et sur la politique pour

grandes vertus (PUF, 1995, rééd. Points-Seuil) ;

créer de la justice. Comment ? C’est au cœur de nos débats, que je ne saurais trancher

Dictionnaire philosophique (PUF, 2001) ; Le

en quelques lignes. Qu’il me suffise de pointer, pour conclure, deux impasses évidentes :

capitalisme est-il moral ? (Albin Michel, 2004,

compter sur le marché pour créer de la justice (c’est l’impasse ultralibérale), ou sur l’État

rééd. Le Livre de Poche) ; L’esprit de l’athéisme,

pour créer de la richesse (c’est l’impasse collectiviste). Entre ces deux extrêmes, qui sont

Introduction à une spiritualité sans Dieu

deux erreurs, l’espace est grand ouvert : à chacun, avec d’autres, d’y inventer son chemin.

(Albin Michel, 2006, rééd. Le livre de Poche).

André Comte-Sponville

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macadam•numéro 86_84 15/04/11 17:17 Page3

L’ I N V I T É

engagez-

vous !

STÉPHANE HESSEL PERSISTE ET SIGNE

L’ancien résistant évoque les combats à mener dans un livre d’entretiens. C’est le prolongement du pamphlet Indignez-vous !, énorme succès en librairie paru fin octobre. Dans l’ouvrage Engagez-vous ! (éditions de l’Aube, mars 2010), l’ancien résistant Stéphane Hessel évoque, au cours d’un entretien avec Gilles Vanderpooten, les perspectives qui s’offrent à la jeunesse. Et pour une fois, l’éternel optimiste perd son sourire:

« La jeune génération manifeste peu de résistance par rapport à ce qui la scandalise et contre quoi elle devrait réagir », déplore-t-il. En premier lieu, «le scandale» des inégalités sociales, « de la juxtaposition de l’ex-

trême richesse et de l’extrême pauvreté sur une planète interconnectée ». Pour lutter contre, Stéphane Hessel suggère aux jeunes «d’agir pour le

développement en coopération avec les pays pauvres», mais reconnaît la complexité accrue des modes de résistances aux injustices :

« Aujourd’hui, c’est en réfléchissant, en écrivant, en participant démocratiquement à l’élection des gouvernants que l’on peut espérer faire évoluer intelligemment les choses… bref, par une action de très long terme. » L’ENVIRONNEMENT, COMBAT PRIORITAIRE Invité à détailler ses indignations, Stéphane Hessel insiste particulièrement dans ce texte sur la nécessité de défendre l’environnement. Engagé auprès d’Europe Écologie- Les Verts, l’ancien diplomate livre ici sa conversion tardive, qu’il explique en partie par des raisons générationnelles:

« Être écologiste, c’est se rendre compte - ce qui depuis est devenu une évidence - que l’homme n’est pas le maître de la nature mais qu’il est un objet naturel, et par conséquent que l’évolution de la planète est un cadre dans lequel lui-même évolue. » Fervent partisan des institutions internationales, le co-rédacteur de la Déclaration universelle des droits de l’Homme appelle de ses vœux la création d’une Organisation mondiale de l’Environnement (OME) et salue la stratégie de Nicolas Hulot, qui « a eu l’intelli-

gence de ne pas se mettre à l’intérieur d’un parti ». L’IMPORTANCE DE LA SOCIÉTÉ CIVILE Décidément abonné aux formats courts – la conversation d’Engagez-vous ! fait une soixantaine de pages, contre une trentaine pour Indignez-vous!- Stéphane Hessel ne manque pas de rappeler à nouveau l’importance des acquis sociaux de la résistance mais aussi la voie que peut représenter l’économie sociale. Point d’angélisme à cet égard cependant ; l’ami de Claude Alphandéry,

peuvent exister au côté de formes capitalistiques ». Sans relâche, Stéphane Hessel redit sa confiance dans la société civile et les organisations interétatiques. Lui-même engagé auprès de l’ONG Agrisud et du Collegium International éthique et politique, il considère que le changement ne pourra passer que par des actions collectives et pacifiques. Solène Cordier

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© UNESCO - Michel Ravassard

qu’il cite d’ailleurs, est convaincu que «des formes d’économie solidaire


macadam•numéro 100_Mise en page 1 20/07/12 11:29 Page3

L’ I N V I T É

INTERVIEW EXCLUSIVE AVEC

Sa Sainteté .. le Dalai Lama

L’UN DES PLUS GRANDS CHEFS SPIRITUELS DE NOTRE TEMPS, SA SAINTETÉ LE 14E DALAÏ-LAMA, VOYAGE À TRAVERS LE MONDE POUR DIFFUSER SON MESSAGE DE PAIX ET DE RÉCONCILIATION. LORS DE SON RÉCENT PASSAGE AU ROYAUME-UNI, SUR LE THÈME « BE THE CHANGE » (« SOYEZ LE CHANGEMENT »), LE DALAÏ-LAMA A ACCORDÉ UNE INTERVIEW EXCLUSIVE AU RÉSEAU INTERNATIONAL DES JOURNAUX DE RUE (INSP), DONT MACADAM EST MEMBRE. L’INTERVIEW ET LES PHOTOS SONT PUBLIÉES SIMULTANÉMENT DANS TOUS LES JOURNAUX DE RUE DU MONDE.

PAR DANIELLE BATIST, ÉDITRICE INSP NEWS SERVICE PHOTOS : SIMON MURPHY*

© Simon Murphy

IL EST ESSENTIEL DE GARDER ESPOIR ET DÉTERMINATION

Beaucoup de nos 12 000 vendeurs de journaux de rue, à travers 40 pays dans le monde, sont ou ont été sans abri. Buddha a été un sans-abri une grande partie de sa vie et vous, ainsi que beaucoup de Tibétains, avez passé presque toute votre vie en exil. Qu’est-ce qu’être un sansabri pour vous ? Pour les gens qui n’ont pas de maison, c’est presque comme s’ils n’avaient pas de fondations sur lesquelles construire leur vie. Ils n’ont pas d’ancre. C’est très triste. Mais, en prenant un peu de recul, je dirais que la planète entière est notre maison. L’individu peut se trouver dans une situation difficile mais il appartient encore à la société, à l’humanité. Je pense que cela fait partie de la nature humaine de vouloir aider autrui lorsque celui-ci se trouve dans une situation difficile. Donc, de ce point de vue, les sans-abri n’ont pas de maison directe, mais la maison au sens large est encore là... Suite page 18.

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macadam•numéro 100_Mise en page 1 20/07/12 11:29 Page12

L’ I N V I T É

INTERVIEW EXCLUSIVE AVEC

Suite de la page 17. Ceux qui sont sans abri ne devraient pas se sentir désespérés, quelque part moi aussi je suis sans abri. Être sans abri peut parfois avoir un aspect positif : cela peut vous faire réaliser qu’il est possible de trouver une nouvelle maison dans nombre d’endroits différents. Si vous n’avez qu’une seule maison, vous êtes en quelque sorte coincé. Vous avez souvent dit de votre propre situation qu’il était important de garder espoir. D’après votre autobiographie, Au loin la liberté, vous avez écrit en 1953 que vous étiez convaincu que « peu importe à quel point la situation se dégrade, tôt ou tard elle s’améliorera ». Compte tenu de la situation actuelle au Tibet, comment réussissez-vous à persévérer ? J’ai perdu ma liberté à l’âge de seize ans. C’est à ce moment-là que les difficultés ont commencé. Puis, à vingt-quatre ans, j’ai perdu mon pays. Au cours des cinquante-deux dernières années, il y a eu beaucoup de problèmes. La plupart des nouvelles de mon pays ont été très tristes, bouleversantes. En attendant, les Tibétains me font confiance. Je ne peux pas faire beaucoup, et je me sens parfois désespéré, mais comme je l’ai déjà mentionné, c’est bien mieux de garder une attitude positive que de se laisser aller et de perdre tout espoir. Cela n’aiderait pas. Alors je me dis la même chose qu’aux autres : peu importent les difficultés, il faut garder confiance en soi et détermination.

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Lorsque les gens se trouvent dans des situations difficiles, comment peuvent-ils contrôler leurs sentiments de colère, de frustration et de haine ? Nos émotions sont le miroir de notre intelligence. Au niveau intellectuel, nous analysons toutes les situations. Si la situation peut être surmontée, il n’y a pas besoin de se faire de souci. S’il n’est pas

© Simon Murphy

Sa Sainteté .. le Dalai Lama possible de surmonter la situation, cela ne sert à rien de se faire trop de souci, puisque cela ne fait que mener à la frustration et que la frustration ne mène qu’à la colère. C’est donc toujours mieux d’essayer de ne pas trop se faire de souci. L’émotion elle-même ne peut pas être empêchée, mais l’intelligence humaine peut aider. Qu’elles soient créées par Dieu ou par la nature, je pense que les émotions peuvent parfois être très pénibles. Dieu ou la nature nous ont apporté une sorte de contrepoids, qui est l’intelligence. Grâce à elle, nous sommes capables de juger et de mesurer nos réponses. Dans votre autobiographie, vous accusez les médias chinois de duper les gens en déformant la réalité de la situation au Tibet depuis les années 1950. Quelle est l’importance du rôle des médias indépendants dans la société d’aujourd’hui ? Les médias indépendants sont extrêmement importants. Pour moi, les médias sont comme un troisième œil. Parfois, ce troisième œil peut lui-même avoir ses préférences [rire]. Dans ce cas, ça devient un problème. Si les médias commencent par une analyse objective, avant de faire un reportage et de présenter une histoire aux gens, alors leur rôle est extrêmement utile et efficace. Lorsque je rencontre des gens de ce milieu, je leur dis qu’ils devraient mettre leur nez dans les affaires et enquêter sous tous les angles ; ne pas étudier seulement la façade mais aussi derrière. Les gens ont le droit de connaître la vérité. S’ils agissent de cette manière, les médias jouent en effet un rôle tout aussi merveilleux qu’important. Les journaux de rue de l’INSP évoquent des thèmes qui sont souvent oubliés. Quelles sont les histoires les plus importantes qui devraient être racontées sur votre pays ? Il est important de dire que la nature même de la lutte tibétaine est strictement non violente et entièrement fondée sur un esprit de


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réconciliation. C’est pour cela que nous avons besoin d’un soutien international. Nous devons réussir car, si nous échouons, cela encouragera ceux qui prônent d’autres méthodes, basées sur la force et sur la violence. De plus, l’histoire du Tibet n’est pas seulement une question politique, il y a aussi des problèmes environnementaux. Le plateau tibétain [qui fait partie de l’Himalaya] joue un rôle majeur dans le réchauffement climatique. Presque toutes les principales rivières de cette région du monde sont issues du plateau tibétain. La préservation de l’écologie tibétaine n’est donc pas seulement importante pour le peuple tibétain. Plus d’un milliard de personnes dépendent de ces rivières. Une autre priorité est celle de la préservation de la culture tibétaine ; une culture de nonviolence et de compassion. Ce n’est pas seulement une ancienne culture, elle est aussi pleine de sens dans le monde actuel. Nous vivons dans un monde de plus en plus matérialiste, axé sur le consumérisme. Il y a des problèmes moraux, qui peuvent parfois mener à la violence, en particulier chez les jeunes : lorsqu’ils doivent faire face à un problème, la réponse de certains d’entre eux passe de plus en plus par la violence. Les vendeurs de nos journaux de rue font face à différents types de difficultés. Mais lorsqu’on leur demande quel est l’aspect le plus difficile auquel ils sont confrontés, la réponse est souvent la même : le sentiment de solitude. Des officiers bouddhistes vous ont reconnu comme étant le 14e dalaï-lama alors que vous n’aviez que deux ans, vous avez passé votre enfance avec des adultes dans des monastères, vous avez pris l’énorme responsabilité de protéger votre peuple de toute invasion et avez été son chef spirituel à quinze ans. Vous avez dû ressentir la solitude dans votre vie… Quels conseils pouvez-vous donner à nos vendeurs ? Dans mon propre cas, si je me considère seulement comme tibétain ou bouddhiste, cela crée en moi une sorte de distance. Alors je me dis : « Oublions cela, je suis un être humain. Un parmi sept milliards. » En pensant de cette manière, nous devenons tout de suite plus proches. Si les gens mettent l’accent sur leur situation, en pensant « je suis pauvre » ou « je n’ai pas de maison » ou « je suis dans une situation difficile », ils donnent trop d’importance à quelque chose de secondaire. Je pense que c’est aussi une réalité, mais une autre réalité est le fait que nous sommes tous des êtres humains. Un parmi sept milliards sur Terre. Je sais que, d’un point de vue pratique, cela n’est pas d’une grande aide, mais émotionnellement cela peut être très utile. *Le photographe Simon Murphy a fait don de ses photos pour l’interview. Pour en savoir plus sur son travail, visitez www.simonmurphyphotographer.com. Traduction : Olivia Fuller

La Fondartion Groupe SEB SoutiEnt : LES DoiGtS Qui RêvEnt : DES LivRES pouR LE Bout DES DoiGtS Parce que les enfants non-voyants et malvoyants sont d’abord des enfants, ils méritent d’avoir accès à des livres. Pourtant, ils souffrent d’une « pénurie d’ouvrages » selon le dernier rapport de l’Unicef (2013). Les Doigts Qui Rêvent est une maison d’édition associative spécialisée depuis 1994 dans la conception et la production d’albums tactiles et de matériel pédagogique pour TOUS les enfants, y compris ceux qui découvrent le monde du bout des doigts. Les points clé d’un album tactile : n Deux écritures, l’une en gros caractères, l’autre en Braille permettant le partage du même album entre voyants et non-voyants ; n Des illustrations en relief en différentes matières ou en gaufrage pour le plaisir de la découverte comme dans tous les livres pour enfants ; n Une esthétique et beaucoup de soin pour l'envie et le plaisir de toucher et renvoyer une image positive de ces enfants « autrement capables ». En 2014, la Fondation Groupe SEB s’est lancée dans cette aventure au pays des mots, des matières et de la solidarité. Elle apporte un soutien financier pour la production de 4 titres tactiles qui seront fabriqués manuellement par le chantier d’insertion, les Ateliers Pour Voir. Le soutien de la Fondation Groupe SEB vise à donner l’espoir d’un nouveau départ professionnel pour les jeunes et les adultes de l’atelier dans le cadre d’une activité qui a du sens : l’inclusion des enfants non-voyants dans le monde de la lecture.

Retrouvez l’interview dans son intégralité sur : www.macadamjournal.com

Claire Veyriras

© Simon Murphy

La petite chenille qui fait des trous, Eric Carle, Adaptation tactile des Doigts Qui Rêvent, 2012 Créée en 2007, la Fondation Groupe SEB a pour objet la lutte contre l’exclusion. * La Fondation Seb est partenaire de Macadam www.fondation.groupeseb.com


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DÉTENTE

mot mystère

monnaies : un mot de 8 lettres

JOUER par Michel Hannequart, de Ludipresse, www.les-mordus.com Retrouvez l’ensemble des réponses aux jeux de ce magazine sur le site www.macadamjournal.com

mots fléchés AGITÉ GRONDER

CENTRALE NUCLÉAIRE PAGE D'UN JOURNAL

PEUT ÊTRE CAPITEUX PLUS GRAND QUE 0

CHANTER MAL ET FORT BREF MOMENT

MUSE DE L'HISTOIRE

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mots sculptés

MORT D'UNE CELLULE

CANCRE

INDIVIDUS

par Bruno Usannaz, sculpteur et ausculpteur maison, « Maître en mots, spécialiste du mettre en mots ». par Kato, pour les illustrations.

KEPILEPSIE : CONVULSION DE CELUI QUI TRAVAILLE DU CHAPEAU

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RONGÉE

CANAPET : DIVAN OÙ L ' ON S ' OUBLIE

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BOUC - EN - TRAIN : MEMBRE BESOGNEUX D ' UNE ASSOCIATION DE MÂLES FÊTEURS

QUI A VU LE JOUR


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JEUX

CHAQUE MOT À TROUVER EST FORMÉ DES LETTRES DU PRÉCÉDENT, AUXQUELLES ON AJOUTE UNE NOUVELLE LETTRE.

PAR DÉDUCTION, TROUVEZ LE MOT MANQUANT. POUR CHAQUE MOT INDICE, LA PREMIĂˆRE COLONNE VOUS INDIQUE LE NOMBRE DE LETTRES PLACÉES EN MĂŠME POSITION QUE DANS LE MOT MANQUANT. LA SECONDE COLONNE INDIQUE LE NOMBRE DE LETTRES TIRÉES DU MOT MANQUANT MAIS QUI NE SONT PAS PLACÉES EN BONNE POSITION.

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en japonais ce mot signifie chiffre unique. Le jeu est un puzzle à chiffres. Le but du jeu est de remplir la grille avec des chiffres allant

4 7 6

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sudoku ?

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de 1 à 9, en partant de certains chifres déjà disposés dans la grille. La grille est composée de régions de neuf carrés 3x3 formant une grille de 9x9. Chaque ligne, colonne et région ne doit contenir qu’une fois chaque chiffre… bon courage !

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Horizontalement 1. Dent-de-lion - Bout de gâteau. 2. Biens - Croire naïvement. 3. Se racler la gorge Elle se dandine. 4. Os - Occupée. 5. Filin - Prénom. 6. Stratège américain Article - Démonstratif. 7. S'appropria indûment un droit Mouvement nationaliste. 8. Parler avec les mains. 9. Quelquefois fixe - Romains Conjonction. 10. Se calcule à l'aide de tests Redondance. 11. Note - Écot - Affaire d'honneur. 12. Crochets - Expulsé.


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