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VIE PRATIQUE GRANDIR

strictes quant aux heures passées devant un écran. Pas plus de vingt minutes par jour entre 4 et 6 ans, une demi-heure de 6 à 8 ans. Plus tard, il faut savoir s’arranger. Par exemple, proposer trois heures par semaine à l’enfant, qui doit apprendre à gérer son temps entre ordinateur, films et télévision. «L’essentiel est de l’encadrer et de s’intéresser à ce qu’il visionne, souligne Simone Munsch. Dès 6 ans, les parents peuvent le laisser seul devant un film qu’ils connaissent, tout en restant dans les alentours.» Tous les enfants ne sont pas égaux devant les émotions. Et certains peuvent choisir des films qui ne leur correspondent pas. D’où l’importance de dialoguer avec chacun de ce qu’il ressent. Sans toutefois être intrusif, remarque la Française Annie Rolland. Dire, ce film ne me plaît pas, ça m’intéresse ce que tu en penses, j’aimerais comprendre, pourquoi veux-tu regarder? «Et surtout, discuter ensemble après, voire pendant si l’enfant est petit. S’il a trop peur, on arrête. Ce n’est pas la télévision qui décide à la place du spectateur. Son espace ne doit pas être envahi par le petit écran. Si l’enfant devient phobique, c’est un signal d’alarme.» Film et dessin animé ont-ils le même impact? Il semblerait que non, d’après la professeure Simone Munsch. Le bambin s’identifiera plus facilement à un personnage réel. «Surtout s’il s’agit d’un pair.

Entre 4 et 6 ans, un enfant ne devrait pas passer plus de vingt minutes par jour devant la télévision.

Il faut rester plus attentif lorsqu’il s’agit d’un film. Un enfant est souvent attiré par les histoires qui font peur, c’est normal. Il est important de demeurer présent pour le calmer, le prendre dans ses bras.»

«De la violence et du danger dans tout ce qui est vital»

Comme l’indique la psychologue Annie Rolland, on commence très tôt à «toucher du doigt le fait que l’on n’est pas éternel. Ce qui provoque des angoisses.» Le désir de regarder toujours des films avec des héros au destin tragique ne semble pas malsain. «Il y a de la violence et du danger dans tout ce

Un papa inspiré du «Seigneur des anneaux» A 8 ans, Julien* a commencé à avoir un discours étrange après avoir vu «Le seigneur des anneaux». Il s’est mis à déclarer que son personnage favori, l’elfe Legolas, était son père. Comme lui, son héros tire à l’arc. «Pendant une semaine, Julien m’a déclaré qu’à la maison, il vivait en famille d’accueil parce que Legolas et sa femme pensaient qu’il était en danger, relate Caroline*, sa mère. J’étais décontenancée.» Précision: Julien est orphelin de père depuis l’âge de 4 ans. «Cet enfant a connu une tragédie, explique la psychologue Annie Rolland. Il n’a pas de

Migros Magazine 38, 20 septembre 2010

chagrin, il est en colère. Donc, il provoque sa mère. Le fait qu’il choisisse un père immortel dans lequel il se reconnaît puisqu’il tire aussi à l’arc n’est pas un hasard.» Caroline a décidé de ne pas se mêler au jeu. Et chaque fois qu’il lui raconte cette histoire, elle lui dit: «Je ne jouerai pas avec toi. Je suis ta maman.» Julien a fini par passer à autre chose. «Legolas correspondait à un besoin de l’enfant, explique Annie Rolland. Ce passage lui était nécessaire. Son imaginaire l’a aidé à grandir.»

*prénom fictif

qui est vital. Et l’enfant s’intéresse aux secrets de la vie. Il part à leur recherche.» Donc pas de panique si Chérubin ne veut voir que des épisodes de Calimero ou les bêtises du Petit Nicolas. Il ne deviendra ni dépressif ni membre de la pègre. En tout cas pas à cause de l’écran. «Les films ne donnent que de la matière aux émotions qui sont en lui. Les parents doivent contrôler et l’aider à devenir un être civilisé. Il faut avoir confiance en son éducation et en son enfant.» LaprofesseureSimoneMunsch ajoute que films et télévision ne doivent pas être les seules occupations de l’enfant. «Aller trois fois par semaine au cinéma, c’est trop

par exemple. Mais éviter la télévision, cela n’est pas une solution non plus. Les parents ont à proposer d’autres activités.» Rien de tel qu’une jolie histoire racontée par maman ou papa avant de s’endormir, précise-t-elle, préférable à une séance de télévision…

Virginie Jobé Photos Getty

A lire: les chroniques d’Annie Rolland sur le site: www.ricochet-jeunes.org et son livre «Qui a peur de la littérature ado?», Ed. Thierry Magnier. A voir en salle dès le 13 octobre: «Moi, moche et méchant» de Chris Renaud et Pierre Coffin, Universal Pictures.

Fan de «Star Wars» à 4 ans

Mélissa*, 52 ans, se souvient que son fils est tombé à 4 ans sur une vidéo de «Star Wars» et a demandé à la regarder. «Au début, nous étions hésitants avec mon mari. Mais il a tellement insisté que nous avons tenté l’expérience.» A leur grande surprise, le petit Stéphane*, confortablement installé sur le canapé entre ses deux parents, a suivi tout le film. «Dès qu’il avait un peu peur, nous lui disions qu’il était possible d’éteindre, raconte sa maman. Il a tenu bon et a voulu voir la suite.» Stéphane a tellement aimé que ses parents lui ont offert

les figurines du film, avec lesquelles il a reconstitué le film seul dans sa chambre. La psychologue Annie Rolland ne s’en étonne pas. «L’enfant est intéressé par tout ce qui touche au bien et au mal. Il veut savoir qui va triompher. Dans «Star Wars», les personnages tels que Maître Yoda et Anakin Skywalker incarnent des figures héroïques de la joie et de la tristesse. Cela peut jouer comme un mythe pour l’enfant.» Aujourd’hui, à 19 ans, Stéphane garde le souvenir d’une grande émotion et d’une certaine jubilation lorsqu’on évoque «Star Wars».


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