16 | Migros Magazine 27, 4 juillet 2011
Créer sa propre rose? C’est possible! S’il existe déjà plus de dix mille variétés de roses à ce jour, rien n’empêche de rêver d’une nouvelle hybride, inédite, rien qu’à soi. Descente au jardin avec Alain Tschanz, rosiériste à Aclens (VD).
I
l aime dire qu’il est né dans une rose et non dans un chou, contrairement aux autres petits garçons. Des parents rosiéristes, une enfance comme une partie de courate au milieu des tiges et des épines. Quand son frère se spécialise dans la rose moderne, il prend un chemin de traverse, préférant les arabesques de la rose ancienne. «Peu de monde la cultivait en Suisse, ça me titillait aussi pour cette raison. Et puis, ça me permet de créer des jardins évolutifs, de travailler avec des végétaux que j’aime, des plantes romantiques.» Alain Tschanz, 53 ans, le rire prompt, un visage toujours ensoleillé et des pognes charnues qui sentent bon l’humus, est en fait le seul pépiniériste en Suisse à se consacrer entièrement à la rose an-
cienne. Il laisse à d’autres les rosiers à fleurs turbinées, aux coloris insolents et flashy, qu’il faut souvent traiter à longueur d’année. Et, depuis dix ans, reste exclusivement amoureux des volutes sauvages de la rose botanique, des jupons troussés de la rose anglaise, des robes sans chichis de l’églantier. Chaviré par le seul parfum de Rosa multiflora adenochaeta, un rosier grimpant à fleurs pâles. «J’aime la forme simple plutôt que composée. En plus, les abeilles foncent dedans, elles sont contentes. Et cette plante fait de belles fructifications», dit-il, soudain rêveur. Dans sa roseraie à Aclens (VD), 3000 m2 servent d’écrin aux roses de Damas, aux lianes souples des Cuisses de nymphe, aux pompons charnus d’Impératrice Joséphine,
aux grappes florales de Mozart et aux effluves d’encens de Rosa primula, entre autres. Roses à boutons mousseux, à corolles frangées, cascades tendres à feuillage de potentille ou de groseille, aux senteurs de framboise, d’agrume ou de miel.
Sans engrais ni traitement phytosanitaire
En tout, 15 000 rosiers greffés par année pour quelque 850 variétés, qu’il bichonne sans engrais ni traitements phytosanitaires chimiques. «J’observe, je contrôle, j’augmente aussi ma tolérance face à certains insectes. Et surtout, j’ai abandonné certaines variétés trop sensibles aux maladies fongiques.» Au rayon des raretés, le collectionneur est très fier de son rosier d’Afghanistan, Hulthemia persica,
Alain Tschanz, pépiniériste passionné par les roses anciennes.
EN PRATIQUE
Hybrider en trois étapes
➊
En mai-juin, choisir les deux rosiers que l’on a envie de croiser. Sur une fleur de la plante mère, ôter les pétales et les étamines. Et laisser le pistil mûrir un ou deux jours, protégé par un simple voile de gaze. Parallèlement, prélever du pollen de la plante père, que l’on entrepose aussi un ou deux jours avant de le déposer au pinceau sur le pistil. Recouvrir la fleur fécondée d’une protection.