Gar2015 fr

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Réduction du risque de catastrophe : Bilan mondial

Réduction du risque de catastrophe : Bilan mondial

2015

2015 Rendre le développement durable : l'avenir de la réduction des risques de catastrophe


L’UNISDR remercie les organisations dont les logos figurent ci-dessous pour leur aide financière et leur très précieuse contribution à l’élaboration du Bilan mondial 2015 sur la réduction des risques de catastrophe. De généreuses ressources financières ont également été apportées par la Commission européenne (Direction générale de l’aide humanitaire et de la protection civile et Direction générale pour le développement et la coopération), le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) ainsi que par le Gouvernement des États-Unis.

Supports associés au Bilan mondial 2015 •  La version de poche du Bilan mondial 2015 synthétise les principaux résultats et messages du rapport sous une forme concise et accessible. •  Le rapport principal inclut des liens vers des contenus enrichis supplémentaires, tels que des cartes dynamiques, des vidéos, des photos et des études de cas à l’intention des utilisateurs de smartphones et de tablettes numériques. •  Les utilisateurs de tablettes numériques et de smartphones peuvent également profiter de l’application gratuite « GAR for Tangible Earth (GfT) ». •  GfT, ou « gift », est une application autonome entièrement interactive comportant un globe 3D réunissant des décennies de données scientifiques dynamiques, notamment sur les catastrophes couvertes par l’ensemble des Bilans mondiaux. Ces données sont illustrées par des scénarios de risque interactifs, des cartes et des photos et des recherches peuvent être effectuées (y compris en temps réel) par date, lieu, facteur de risque, aléa, catastrophe, etc. •  Une version en ligne du Bilan mondial 2015 est également disponible, qui reprend la plupart des fonctionnalités disponibles dans les supports susvisés, par exemple : Le rapport principal interactif en anglais Le rapport principal en anglais, arabe, chinois, espagnol et russe La version de poche en anglais, arabe, chinois, espagnol, japonais et russe Les annexes Des articles connexes Les rapports nationaux intermédiaires de suivi de la mise en œuvre du Cadre d’action de Hyogo L’accès aux bases de données reprenant les pertes et risques liés aux catastrophes Tous les supports associés au Bilan mondial 2015 sont accessibles à la page suivante :

www.preventionweb.net/gar/


Réduction du risque de catastrophe : Bilan mondial

2015

Rendre le développement durable : l'avenir de la réduction des risques de catastrophe


Le Bilan mondial 2015 sur la réduction des risques de catastrophe comporte des contenus enrichis. Il est jalonné d’icônes virtuelles qui facilitent la connexion avec l’application complémentaire « GAR for Tangible Earth (GfT) » et fournissent des informations complémentaires ainsi que des contenus multimédias. Pour utiliser ces icônes virtuelles, pointez tout d’abord la caméra de votre tablette numérique ou de votre smartphone sur ces dernières (après avoir installé l’application GfT), puis appuyez sur le bouton AR (Augmented Reality) lorsque celui-ci s’affiche. Une série de fonctions d’information dynamique conçues pour enrichir la lecture apparaîtra alors sur votre appareil.

2012 Hurricane Sandy

Icône Terre : permet l’accès à un globe 3D dynamique sur lequel des données géographiques pertinentes pour la section de texte en cours sont activées.

Address disaster risks

Icône Chercheurs : permet d’accéder à des informations concernant les chercheurs ayant contribué à la section en cours, à leurs rapports, à des liens internet et à des vidéos.

Global wealth distribution

Icône Tablette : ouvre des animations dynamiques et des informations supplémentaires concernant les graphiques statiques du Bilan mondial 2015.

Orissa success story

Icône Vidéo : permet l’accès à des vidéos de l’UNISDR et des partenaires pertinentes pour la section de texte en cours.

Media Handbook

Icône Lien internet : permet l’accès à des sites internet externes qui fournissent des informations pertinentes pour la section de texte en cours.

Téléchargement du rapport complet : Pour télécharger l’application, utilisez le code QR figurant à la fin de ce document ou consultez la page www.preventionweb.net/gar. Pour partager vos commentaires et informations concernant le Bilan mondial 2015 sur Twitter et Facebook, veuillez utiliser le hashtag #GAR15. ISBN 978-92-1-132042-8 © Nations Unies 2015. Tous droits réservés. Mentions légales Les opinions exprimées dans cette publication ne reflètent pas nécessairement les positions du Secrétariat de l’ONU. Les termes employés et la présentation des informations n’impliquent en aucun cas l’expression d’une quelconque opinion par le Secrétariat de l’ONU concernant le statut légal de tout pays, territoire, ville ou zone, ou des autorités qui le dirigent, ni concernant le tracé de ses frontières ou de ses limites territoriales. Le contenu de cette publication peut être librement cité à condition de mentionner la source. Citation : UNISDR, 2015. Rendre le développement durable : l’avenir de la réduction des risques de catastrophe. Bilan mondial sur la réduction des risques de catastrophe. Genève, Suisse : Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophe (UNISDR). Design et mise en page : AXIS et ELP, Tokyo, Japon Takae Ooka, New York, États-Unis Rédaction : Christopher J. Anderson, Vienne, Autriche Impression : Imprimerie Gonnet, Belley, France Ce papier contient 60 % de fibres recyclées post-consommation et 40 % de fibres vierges certifiées FSC provenant de forêts correctement gérées.

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Avant-propos

La communauté internationale s’apprête en effet à adopter une série d’objectifs de développement durable ainsi qu’un accord universel sur le climat. La réduction des risques de catastrophe peut largement contribuer à faire progresser ces agendas, car elle présente des liens étroits avec la réduction de la pauvreté, le développement durable et le partage de la prospérité.

ment ceux qui sont les moins à même d’investir dans leur résilience future. Les modèles mondiaux suggèrent que le risque de pertes économiques augmente en raison de l’accroissement rapide de la valeur des actifs soumis à des aléas majeurs. Par ailleurs, une large proportion des pertes demeure associée à de petites catastrophes récurrentes dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, qui endommagent gravement des infrastructures publiques critiques, des habitations et des moyens de production, c’està-dire des piliers essentiels de la croissance et du développement.

Alors que nous nous préparons à la troisième Conférence mondiale sur la réduction des risques de catastrophe qui doit se tenir à Sendai au Japon, il est crucial de comprendre les messages de ce rapport et de prendre les mesures qui s’imposent. De nombreux pays restent sous la menace d’importantes pertes potentielles dues aux catastrophes et les plus touchés sont précisé-

Les gouvernements, la société civile et le secteur privé ont l’opportunité et l’obligation de collaborer et de s’engager à un avenir plus sûr. Un cadre de référence plus inclusif et ambitieux pour la réduction des risques de catastrophe est crucial si nous voulons construire un monde meilleur pour tous. Ensemble, mettons donc tout en œuvre pour garantir un développement résilient et durable.

Cette quatrième édition du Bilan mondial des Nations Unies sur la réduction des risques de catastrophe est publiée à un moment clé pour l’avenir du développement.

Ban Ki-moon Secrétaire général de l’ONU

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La plupart des catastrophes susceptibles de se produire n’ont pas encore eu lieu. Les pertes économiques dues aux catastrophes telles que les séismes, les tsunamis, les cyclones et les inondations atteignent aujourd’hui en moyenne 250 à 300 milliards de dollars américains chaque année. Les pertes futures (pertes annuelles prévisionnelles) sont aujourd’hui estimées à 314 milliards de dollars américains pour les seules zones construites. Ces pertes représentent les réserves que les différents pays devraient constituer chaque année afin de couvrir les pertes futures dues aux catastrophes. (  Chapitre 3)

Tant la mortalité que les pertes économiques associées aux risques extensifs (risques de catastrophe mineurs mais récurrents) sont en augmentation dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. Pour la dernière décennie, les pertes dues à des risques extensifs étaient équivalentes à 94 milliards de dollars américains dans 85 pays et territoires. (  Chapitre  )

Les risques extensifs sont largement responsables de la morbidité et des déplacements dus aux catastrophes et ils suscitent une érosion permanente des actifs du développement tels que les logements, les écoles, les installations médicales, les routes et les infrastructures locales. Le coût des risques extensifs n’est toutefois pas visible et a tendance à être sous-estimé, car il est habituellement absorbé par les ménages et les collectivités à faibles revenus et par les petites entreprises.

Pour les petits États insulaires en développement (PEID), les pertes futures dues aux catastrophes représentent une menace vitale. Par exemple, par comparaison avec l’Europe et l’Asie centrale, les PEID devraient perdre en moyenne chaque année une part 20 fois plus importante de leurs actifs en raison des catastrophes. Les pertes prévisionnelles annuelles dans les PEID sont équivalentes à près de 20 % de leurs dépenses sociales totales, contre seulement 1,19 % en Amérique du Nord et moins de 1 % en Europe et en Asie centrale. (  Chapitre 3)

Certains pays sont confrontés à un déficit de financement : ils ne disposent pas des ressources nécessaires pour se prémunir contre les pertes dues à de grandes catastrophes peu fréquentes. De nombreux pays, dont l’Algérie, le Chili, l’Indonésie, l’Iran, Madagascar, le Pakistan, le Pérou ainsi que de nombreux PEID ne réussiraient pas un test de la résilience budgétaire face à une perte annuelle équivalente à un événement d’une période de retour de 1 sur 100 ans. De plus, leur capacité limitée à se redresser rapidement peut accroître les pertes indirectes dues aux catastrophes de manière signi cative. (  Chapitre 5)

iv


De 1980 à 2012, 42 millions d’années de vie ont été perdus chaque année en raison des catastrophes signalées à l’échelle internationale. La notion d’année de vie humaine fournit une meilleure représentation de l’impact des catastrophes, car elle mesure le temps nécessaire pour produire le développement économique et le progrès social. Plus de 80 % du total des années de vie perdues en raison de catastrophes sont répartis dans des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, ce qui constitue une sérieuse entrave à leur développement socio-économique comparable à des maladies telles que la tuberculose. (   ection  )

Si ce risque était partagé de manière égale au sein de la population mondiale, il serait équivalent à une perte annuelle de près de 70 dollars américains par membre de la population active, ou à deux mois de revenus pour les personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté. Ceci représente un risque vital pour les personnes qui ont déjà du mal à survivre au quotidien. Il s’agit là d’un coût significatif pour le développement, car ces ressources pourraient être utilisées pour des investissements dans les infrastructures, la protection sociale, la santé publique et l’éducation. (  Chapitre 3)

En proportion des dépenses sociales, les pertes annuelles prévisionnelles sont cinq fois plus élevées dans les pays à faible revenu que dans les pays à revenu élevé. Les pays où il est le plus crucial d’investir dans le développement social sont aussi ceux où de tels investissements sont les plus compromis par les risques de catastrophe. (  Chapitre 3)

Ceci est non seulement problématique pour les pays à faible revenu, mais également pour les pays à revenu intermédiaire tels que la Jamaïque et les Philippines ainsi que pour les pays à revenu élevé tels que la Grèce. Bien que des pays tels que la Jamaïque et la Grèce soient exposés à des risques bien moindres par comparaison aux Philippines, les implications globales pour le développement sont très similaires.  lors que le principal dé  pour  la Grèce a trait à la croissance économique, les hilippines doivent quant à elles relever le dé   du développement social. (  Chapitre 5)

Survol du bilan mondial

Le développement durable passe impérativement par la réduction des risques de catastrophe v


Le changement climatique augmentera ces pertes prévisionnelles. À travers l’évolution des températures, des précipitations et du niveau des océans, entre autres facteurs, le changement climatique mondial modifie d’ores et déjà le niveau des aléas et exacerbe les risques de catastrophe. Il est estimé que d’ici à 2050, 40 % de la population mondiale vivra dans des bassins versants soumis à un important stress hydrique, en particulier en Afrique et en Asie. Dans le bassin des Caraïbes, le changement climatique sera à l’origine de 1,4 milliard de dollars américains supplémentaires de pertes annuelles prévisionnelles, pour les seuls dégâts causés par les cyclones. (  Chapitre 3)

L’empreinte écologique de la surconsommation croissante de l’énergie et des ressources naturelles excède aujourd’hui la biocapacité de la planète de près de 50 %. Les zones humides côtières ont décliné de 52 % entre les années 1980 et le début des années 2000. D’autres écosystèmes essentiels qui jouent un rôle de régulation, comme les mangroves et les récifs coralliens, connaissent également une dégradation rapide. (  Chapitre 12)

Les effets du changement climatique ne sont toutefois pas uniformément répartis et a ectent chaque pays de manière di érente.  ar exemple, le risque de dég ts dus au vent  augmenterait de deux fois en Anguilla et de cinq fois à Trinité-et-Tobago. En revanche, le exique béné cierait en réalité d’une réduction des risques. Bien que « le changement climatique aura très vraisemblablement un impact global négatif sur le rendement des principales cultures céréalières en Afrique » (GIEC), une forte variabilité régionale de cette diminution du rendement est à prévoir. Les pertes provoquées par une sécheresse d’une période de retour de 1 sur 25 ans pour la production de maïs au Malawi pourraient être supérieures de 23 % sur la période 2016-2035 par rapport à la période 1981-2010. Étant donné que l’agriculture représente 30 % du PIB du Malawi, ceci pourrait pousser le pays au-delà de son seuil de résilience en termes économiques et de pauvreté. Cependant, dans la  allée du  i  au Kenya ainsi qu’au Niger, où l’agriculture représente respectivement 30 et 38 % du PIB, les pertes diminueraient dans un scénario de changement climatique identique. (  Chapitre 3)

vi


La croissance des inégalités mondiales, l’augmentation de l’exposition aux aléas, l’urbanisation rapide et la surconsommation d’énergie et des ressources naturelles menacent de conduire les risques à des niveaux dangereux et imprévisibles et d’engendrer des

impacts systémiques mondiaux.

Les 2 % les plus riches de la population adulte mondiale détiennent aujourd’hui plus de 50 % de la richesse mondiale, tandis que les 50 % les plus pauvres détiennent moins de 1 % de la richesse mondiale.  La  concentration  croissante  des  richesses,  accompagnée  d’un  e ondrement  des  rémunérations réelles et de coupes dans les dépenses en matière de sécurité sociale, devrait conduire à des inégalités croissantes face aux risques entre les territoires et les groupes sociaux. (  Chapitre  )

Les  secteurs  et  les  territoires  qui  n’o rent  pas  d’avantages  comparatifs  en  termes  de  développement économique sont confrontés à des risques croissants en raison du faible niveau des investissements dans les infrastructures de réduction des risques, d’une absence de protection sociale et environnementale ainsi que de la pauvreté rurale et urbaine. Dans de nombreux pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, le développement urbain est caractérisé par un accès particulièrement inégal à l’espace urbain, aux infrastructures, aux services et à la sécurité. (  Chapitre 11)

Le développement urbain ségrégué génère à son tour de nouvelles formes de

risques de catastrophe. Les ménages à faibles revenus sont fréquemment forcés d’occuper des zones soumises à des aléas où les terres ont peu de valeur, où les infrastructures et la protection sociale sont dé cientes, voire inexistantes, et o  la dégradation de l’environnement  est importante.

Des inégalités croissante face aux risques vii


L’évaluation erronée des risque menace notre avenir Avec la mondialisation croissante de l’économie, les investissements ont tendance à affluer vers les régions qui offrent des avantages comparatifs, notamment une main-d’œuvre bon marché, l’accès aux marchés à l’exportation, les infrastructures et la stabilité. Les décisions d’investissement prennent rarement en compte le niveau des aléas dans ces régions et l’accumulation de gains à court terme continue de l’emporter sur les préoccupations de durabilité. En conséquence, des volumes importants de capitaux continuent d’affluer vers des régions soumises à des aléas, ce qui conduit à une augmentation significative de la valeur des actifs économiques soumis à des aléas. (  Chapitre 10)

Ces 10 dernières années, d’importants progrès ont été réalisés dans le renforcement des capacités de préparation, d’intervention et d’alerte précoce ainsi que dans la réduction de risques spéci ques, selon l’outil HFA Monitor. Les progrès dans la gestion des risques sous-jacents ont toutefois été limités dans la plupart des pays. (   ection  )

L’évaluation erronée des risques  signi e  que  leurs  conséquences  sont  rarement  imputées aux décisions qui génèrent ces risques. Cette absence de responsabilité constitue une incitation au maintien de comportements générateurs de risques, puisque ceux qui tirent pro t de ces risques en supportent rarement les co ts. C’est pourquoi de nouveaux risques sont apparus et se sont développés plus rapidement que n’ont été réduits les risques existants. (  Chapitre 10)

Un  énorme  volume  de  capitaux  devrait  a luer  dans  le  développement urbain au cours des prochaines décennies, en particulier en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne. Environ 60 % des zones appelées à être urbanisées d’ici à 2030 sont encore à construire. Cette croissance interviendra pour une grande part dans des pays qui ne disposent que de peu de moyens pour garantir un développement urbain raisonné en fonction des risques. (  Chapitre 11)

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La gestion des risques, plutôt que la gestion des catastrophes comme

indicateurs des risques non pris en charge, doit aujourd’hui devenir une partie intégrante de l’art du développement : non pas un accessoire au développement, mais bien un ensemble de pratiques ancrées dans son ADN. La gestion des risques inhérents à l’activité socio-économique requiert une triple approche : (  Chapitre 13)

1. la gestion prospective des risques, qui vise à éviter l’accumulation de nouveaux risques ; 2. la gestion corrective des risques, qui cherche à réduire les risques existants ; 3. la gestion compensatoire des risques, dont l’objectif est d’appuyer la résilience des individus et des sociétés face aux risques résiduels qui ne peuvent  tre e icacement réduits.

Les pertes annuelles moyennes mondiales devraient selon les estimations atteindre 415 milliards de dollars américains d’ici à 2030, pour les seuls besoins d’investissement dans les infrastructures urbaines. Cette augmentation des pertes prévisionnelles n’est toutefois pas inévitable. Des investissements annuels de l’ordre de 6 milliards de dollars américains dans des stratégies adéquates de gestion des risques de  catastrophe  pourraient  générer  des  béné ces  de  3 0  milliards  de  dollars  américains  en  termes de réduction des risques, soit une réduction de plus de 20 % des pertes annuelles prévisionnelles.

Un tel investissement annuel dans la réduction des risques de catastrophe représente seulement 0,1 % des 6 000 milliards de dollars américains annuels qui devront être investis dans les infrastructures au cours des 15 prochaines années. Pour de nombreux pays toutefois, ce petit investissement supplémentaire pourrait véritablement faire la différence pour atteindre les objectifs nationaux et internationaux d’éradication de la pauvreté, d’amélioration de la santé et de l’éducation, et de garantie d’une croissance durable et équitable. (  Chapitre 13)

La gestion des risques, plutôt que la gestion des catastrophes – La réduction des risques de catastrophes doit être réinterprétée ix


Sommaire Avant-propos Survol

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Préface

Chapitre 1

Partie I

x

iii

xiii

Introduction : Une histoire dévastatrice

n travail inac evé

25

41

Chapitre 2

Réductions des pertes dues aux catastrophes : une réussite partielle

45

Chapitre 3

Le paysage des risques mondiaux

55

Chapitre 4

Risques extensifs

91

Chapitre 5

La résilience mise à mal

101


Partie II

u c ur de la gestion des ris ues de catastrophe

Chapitre 6

Gouvernance des risques de catastrophe

121

Chapitre 7

Une culture de la prévention et de la résilience

137

Chapitre 8

Gérer les catastrophes

161

Partie III

Soudain le vide

Chapitre 9

Inégalités face aux risques

191

Chapitre 10

Pour quelques dollars de plus : des actifs économiques toujours plus exposés aux aléas

209

Chapitre 11

En zone urbaine : des risques de catastrophe marqués par la ségrégation

225

Chapitre 12

Bienvenue dans l’Anthropocène : surconsommation et biocapacité

241

Chapitre 13

onclusion rendre le développement durable

115

185

Glossaire cron mes emerciements Références Index

259

cclxxxii cclxxxv cclxxxvii ccxcvi cccxxiii xi


L’habillage visuel retenu pour le Bilan mondial (GAR) s’appuie sur l’image d’une personne tenant un parapluie renversé. Le « A » du logo GAR 2015 fait écho à cette symbolique. Le message de ce parapluie renversé est qu’il faut savoir adopter de nouvelles perspectives : il s’agit d’une invitation à la réactivité créatrice face au changement. L’objet le plus simple et le plus courant, envisagé sous un nouvel angle... c’est précisément ainsi qu’ont été réalisées les plus grandes découvertes. Le message est aussi qu’il faut agir pour contrer de nombreuses années de passivité et d’ignorance, et ainsi « renverser » la vapeur. Le temps est venu de sortir du carcan des approches adoptées jusqu’ici. Le Bilan mondial 2015 fournit des informations claires et exploitables concernant les avantages et les inconvénients liés à la réduction des risques de catastrophe, de même qu’une foule d’informations sur la manière dont nous créons et exacerbons involontairement les risques. L’habillage visuel retenu illustre également le message essentiel du Bilan mondial 2015 : « Rendre le développement durable ». Chacun d’entre nous a le pouvoir de collaborer au renforcement de la résilience de nos sociétés, afin de réduire les risques de catastrophe et permettre une utilisation responsable des ressources. Les petits ruisseaux ne font-ils pas les grandes rivières ? Chaque contribution peut certes paraître insignifiante considérée isolément. Grâce au ciment de la coopération, elle peut néanmoins rapidement devenir partie intégrante d’un élan puissant en faveur du bien-être collectif. Le parapluie inversé est donc le symbole d’une autonomisation positive, qui défend la gestion des risques de catastrophe en tant qu’opportunité plutôt que de l’envisager comme un poste de coût, en tant que passerelle vers la possibilité d’un bien-être planétaire, du bien-être pour chaque être humain.

xii


Préface Le Bilan mondial 2015 sur la réduction des risques de catastrophe (GAR15), Rendre le développement durable : l’avenir de la réduction des risques de catastrophe, dont l’élaboration est coordonnée par le Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophe (UNISDR) dans le contexte du Cadre d’action de Hyogo pour 2005-2015 : pour des nations et des collectivités résilientes face aux catastrophes (CAH), en est déjà à sa quatrième édition. Le CAH est un cadre international qui a été adopté en janvier 2005 à Kobe au Japon par 168 États membres de l’ONU avec pour objectif de « réduire de manière substantielle les pertes en vies humaines et les dommages subis par les collectivités et les pays sur les plans social, économique et environnemental à cause des catastrophes ». Tous les deux ans, les gouvernements ont procédé à une auto-évaluation de leurs progrès dans la réalisation de cet objectif à l’aide de l’outil en ligne HFA Monitor. En 2007, l’UNISDR a publié le rapport intitulé Réduction des risques de catastrophe : Bilan mondial 2007, qui évaluait les progrès réalisés durant les deux premières années de mise en œuvre du CAH. Peu après, l’élaboration de la première édition du Bilan mondial (publiée en 2009) a débuté, afin de rassembler et d’analyser les données et les informations relatives aux modèles et aux tendances des risques, aux auto-évaluations des gouvernements et aux défis cruciaux pour la réduction des risques de catastrophe. Ce Bilan mondial 2009, Risques et pauvreté dans un climat en évolution, démontrait que les risques de catastrophe se concentrent de manière disproportionnée dans les pays à faible revenu dans lesquels la gouvernance est faible. Il a également montré comment différents facteurs sous-jacents tels que la planification et la gestion inadéquates du développement urbain, la vulnérabilité des moyens de subsistance en zone rurale, la dégra-

dation de l’environnement, la pauvreté et les inégalités créent des risques de catastrophe supplémentaires pour les communautés et les ménages à faibles revenus. Le Bilan mondial 2009 soulignait par ailleurs que les risques de catastrophe et la pauvreté agissent l’un sur l’autre. À moins de s’attaquer à la pauvreté et aux inégalités, les risques de catastrophe continueront d’augmenter. Dans le même temps, les pertes dues aux catastrophes aggravent les différentes dimensions de la pauvreté et compromettent tout progrès dans la réduction de la pauvreté et la mise en place d’un développement durable. Le Bilan mondial 2009 appelait à une prise en charge de ces facteurs de risque sous-jacents, à travers un alignement des efforts visant la réduction des risques de catastrophe, la lutte contre le changement climatique et la réduction de la pauvreté. Le Bilan mondial 2011, Révéler le risque, redéfinir le développement, s’est appuyé sur les conclusions du Bilan mondial 2009 tout en mettant pour sa part l’accent sur l’identification de politiques publiques efficaces pour aborder le lien entre risques de catastrophe et pauvreté. Il a également analysé les impératifs et contraintes d’ordre politique et économique à prendre en compte pour l’augmentation des investissements publics dans la réduction des risques de catastrophe. À l’aide de modèles de risque probabilistes hybrides et innovants, le Bilan mondial 2011 a établi des profils de risque pour plusieurs pays afin de démontrer dans quelle mesure une approche de la gestion des risques de catastrophe raisonnée en fonction des risques pouvait à la fois maximiser les avantages et réduire les coûts. En s’appuyant sur les recommandations formulées par le Bilan mondial 2009, il soulignait enfin les possibilités d’intégration de la réduction des risques de catastrophe dans les instruments et mécanismes de développement existants, dans les domaines de xiii


la gestion urbaine, de l’environnement, du social et de l’économie. Quant au Bilan mondial 2013, Du partage des risques aux bénéfices partagés : analyse de la rentabilité de la réduction des risques de catastrophe, il mettait pour sa part l’accent sur la relation en général peu explorée entre investissements privés et risques de catastrophe et non plus sur les seuls politiques et investissements publics. Dans la plupart des économies, les investissements publics ne représentent que 15 à 30 % de la formation de capital totale. La manière dont les risques de catastrophe sont pris en charge à l’aide des 70 à 85 % d’investissements restants est par conséquent cruciale. Le Bilan mondial 2013 a montré comment les entreprises peuvent investir dans la gestion de leurs risques de catastrophe afin de réduire les coûts et les interruptions d’activité imputables aux catastrophes, et comment elles peuvent améliorer leurs performances et leur réputation en limitant au maximum les incertitudes. En soulignant l’interdépendance des secteurs public et privé, ce rapport démontrait pourquoi une gestion efficace des risques de catastrophe dans les deux secteurs est essentielle pour la compétitivité, la durabilité et la résilience, et pourquoi il est nécessaire d’adopter une approche plus large de la création de valeur qui prenne également en compte les facteurs de risque sous-jacents. Chaque Bilan mondial a formulé une série de recommandations détaillées. Bien que spécifiques au thème de chaque rapport, elles tendent principalement vers deux axes qui se renforcent mutuellement et sont apparus de plus en plus clairement au fil des rapports, à savoir (1) prendre en charge les facteurs sous-jacents des risques de catastrophe afin d’éviter la création et l’accumulation de nouveaux risques et (2) renforcer la gouvernance des risques de catastrophe afin de permettre ladite prise en charge. Le Bilan mondial 2015 se concentre sur ce dernier axe et défend une large réinterprétation de xiv

Préface

la réduction des risques de catastrophe. Alors que le CAH touche à son terme, le Bilan mondial 2015 remet en question l’approche de la réduction des risques de catastrophe adoptée par le CAH à la lumière des menaces que l’augmentation alarmante des risques de catastrophe fait aujourd’hui peser sur la planète. La section I du Bilan mondial 2015 présente de nouveaux éléments qui viennent éclairer les modèles et les tendances actuels des risques de catastrophe, afin d’évaluer dans quelle mesure les objectifs du CAH ont été atteints. Les sections II et III examinent la pertinence de l’approche de la réduction des risques de catastrophe adoptée jusqu’ici pour faire face à l’augmentation et l’accumulation des risques de catastrophe. La conclusion montre pourquoi la réduction des risques de catastrophe doit aujourd’hui passer de la gestion des catastrophes à la gestion des risques si elle souhaite véritablement contribuer à rendre le développement durable. Des risques de catastrophe toujours en augmentation Le Bilan mondial 2015 arrive à un moment déterminant pour la réduction des risques de catastrophe. Le résultat escompté du CAH n’a été que partiellement atteint. Vingt-cinq ans après l’adoption de la Décennie internationale de la prévention des catastrophes naturelles par les États membres de l’ONU et dix ans après l’adoption du CAH, les risques de catastrophe n’ont pas été réduits de manière significative à l’échelle mondiale. Bien que l’amélioration de la gestion des catastrophes ait conduit à des réductions significatives de la mortalité dans certains pays, les pertes économiques dues aux catastrophes atteignent aujourd’hui en moyenne 250 à 300 milliards de dollars américains chaque année. Plus alarmant encore, tant la mortalité que les pertes économiques associées aux risques extensifs sont en augmentation dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. Au niveau inter-


national, les risques extensifs sont la plupart du temps ignorés. Or, ceux-ci constituent une préoccupation centrale pour les ménages à faibles revenus et les petites entreprises, qui sont tributaires des infrastructures publiques, ainsi que pour les gouvernements locaux qui mettent ces infrastructures à disposition. En effet, environ 42 millions d’années de vie humaine ont été perdus chaque année en raison des catastrophes signalées à l’échelle internationale, une entrave au développement comparable à des maladies telles que la tuberculose. Les risques de catastrophe demeurent disproportionnellement concentrés dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, en particulier dans les petits États insulaires en développement (PEID), et sont par ailleurs amplifiés par le changement climatique. À l’échelle mondiale, les pertes annuelles moyennes (PAM) causées par les séismes, les tsunamis, les cyclones tropicaux et les inondations sont aujourd’hui estimées à 314 milliards de dollars américains pour les seules zones construites. Ces pertes ne cessent de croître et représentent les réserves que les différents pays devraient constituer chaque année afin de couvrir les pertes futures dues aux catastrophes.

une gestion des catastrophes elles-mêmes. En d’autres termes, des actions appropriées et efficaces ont été mises en place afin de renforcer les capacités de préparation et d’alerte précoce et de réduire l’impact des catastrophes grâce à des interventions appropriées. Toutefois, cette approche s’est révélée inappropriée pour la gestion des risques sous-jacents. Étant donné que ces risques résultent du développement, les prendre en charge exige d’agir en faveur de la réduction de la pauvreté, de la planification et la gestion adéquates des zones urbaines, ainsi que de la protection et de la réhabilitation des écosystèmes. C’est dans ce domaine que la plupart des pays ont réalisé le moins de progrès durant la mise en œuvre du CAH. La pleine prise en compte des risques de catastrophe dans le cadre des investissements socio-économiques ou l’intégration des connaissances en matière de risques dans les plans et méthodes de développement demeure l’exception. C’est pourquoi, malgré des améliorations notables dans la gestion des catastrophes, de nouveaux risques sont apparus et se sont développés plus rapidement que n’ont été réduits les risques existants.

Protéger le développement contre lui-même Depuis l’adoption du CAH, l’engagement politique vis-à-vis de la réduction des risques de catastrophe, du développement de dispositions institutionnelles et législatives, de l’amélioration des capacités de préparation et d’alerte précoce, de la production d’informations sur les risques et de la formulation de politiques et de stratégies à tous les niveaux n’a cessé de croître. De ce point de vue, le CAH est clairement une réussite.

Cette approche reflète la manière dont les catastrophes sont perçues, c’est-à-dire comme des menaces et des chocs externes. En conséquence, l’objectif politique de réduction des risques de catastrophe a été interprété comme un objectif de protection du développement socio-économique contre ces menaces externes. Le résultat escompté du CAH n’a pas été atteint parce qu’il n’a pas été compris que les catastrophes résultent également de facteurs sociaux internes au développement. Le développement ne peut être protégé contre lui-même et tant qu’il ne sera pas transformé, les risques de catastrophe continueront donc d’augmenter.

Toutefois, bien que le CAH ait fourni des conseils détaillés pour la gestion des risques sous-jacents, la plupart des pays ont compris et pratiqué la réduction des risques de catastrophe comme

Croissance économique, surconsommation et inégalités Dans sa quête de croissance économique, le modèle de développement actuel génère une xv


surconsommation des ressources naturelles, des inégalités sociales ainsi que des risques de catastrophe supplémentaires, qui ne cessent de s’accumuler. Le Bilan mondial 2015 met en lumière quatre facteurs mondiaux interdépendants qui, à défaut d’être gérés, conduiront vraisemblablement à une dangereuse augmentation des risques.

en termes absolus. Les risques de catastrophe se trouvent donc amplifiés, car les ménages à faibles revenus sont forcés d’occuper des zones soumises à des aléas où les terres ont peu de valeur, où les infrastructures sont déficientes, voire inexistantes, où la protection sociale est absente, et où la dégradation de l’environnement est importante.

Augmentation des risques de catastrophe mondialisés Les décisions d’investissement prennent rarement en compte l’exposition aux aléas ou minimisent exagérément les risques de catastrophe en raison des gains à court terme escomptés. Alors que la concurrence s’intensifie, d’importants flux d’investissement risquent de continuer à affluer dans les zones soumises à des aléas et de conduire à de nouvelles augmentations des risques intensifs. Ces risques deviennent de plus en plus systémiques, car les facteurs de risque et les impacts des catastrophes se répercutent à travers les chaînes d’approvisionnement mondiales et d’un secteur à l’autre.

La consommation excède la biocapacité La surconsommation de l’énergie, de l’eau et d’autres ressources provoquée par la croissance économique excède désormais la biocapacité de la planète, dépasse les limites des systèmes planétaires essentiels et menace la survie de l’être humain. De nombreux écosystèmes qui jouent un rôle vital en termes de protection et de ressources fournies se trouvent dégradés au-delà de toute possibilité de redressement, tandis que l’évolution des températures, des précipitations, du niveau des océans et d’autres facteurs dus au changement climatique mondial modifie les modèles des aléas et amplifie les risques de catastrophe. Ces risques sont de plus répartis de manière inégale. Les secteurs et les territoires à revenu élevé vivent au-dessus de leurs moyens, consomment les ressources environnementales et exportent des risques vers d’autres régions ou en importent.

Croissance des inégalités face aux risques Les inégalités socio-économiques vont vraisemblablement continuer à augmenter et avec elles les risques de catastrophe pour les pays, les communautés, les ménages et les entreprises qui ne disposent que de moyens limités pour gérer leurs risques et renforcer leur résilience. La carte géographique des inégalités face aux risques apparaît à tous les échelons, que ce soit entre les régions et les pays, ou, au sein des pays, entre les villes et les localités. Des villes ségréguées Les risques de catastrophe se concentrent de plus en plus dans des villes soumises à des aléas. Par ailleurs, en particulier dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, la structuration de l’espace urbain accentue les inégalités face aux risques. Au niveau mondial, la population vivant dans des habitats informels continue de croître xvi

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La réduction des risques de catastrophe à la croisée des chemins En 2015, trois processus intergouvernementaux qui s’appuient mutuellement parviendront à leur terme. En mars 2015 se tiendra la troisième Conférence mondiale sur la réduction des risques de catastrophe à Sendai au Japon, où les États membres de l’ONU doivent adopter le cadre qui succédera au CAH. Ce nouveau cadre guidera les différents pays dans la réalisation de l’objectif politique de réduction des risques de catastrophe pour les prochaines années. Le principal résultat de la Conférence 2012 Rio+20 a été la décision des États membres de lancer un processus visant à établir un ensemble d’objec-


tifs de développement durable (ODD) pour septembre 2015, qui doivent s’appuyer sur les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et aboutir au programme de développement pour l’après-2015. La Conférence des Parties (COP 21) à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) de 1992 et la 11e session de la Réunion des Parties (CMP 11) au Protocole de Kyoto de 1997 se tiendront à Paris en décembre 2015 en vue de parvenir à un accord contraignant et universel sur le changement climatique entre l’ensemble des pays. Ces trois processus sont étroitement liés. L’augmentation des risques de catastrophe, le changement climatique ainsi que la pauvreté et les inégalités sont tous des indicateurs d’un développement non durable. Dans le même temps, l’augmentation des pertes dues aux catastrophes et des impacts de ces dernières, amplifiée par le changement climatique, va entraver la capacité de nombreux pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, en particulier des petits États insulaires en développement (PEID), à réaliser les investissements en capital et à consentir les dépenses sociales nécessaires la réalisation des ODD. De ce point de vue, la réduction des risques de catastrophe se trouve à la croisée des chemins : soit elle continue de se concentrer sur la gestion d’un nombre croissant de catastrophes, soit elle décide de mettre l’accent sur la gestion des risques sous-jacents de manière à faciliter un développement durable. Rendre le développement durable Pour éviter une augmentation accélérée des risques de catastrophe, il apparaît de plus en plus unanimement que les facteurs de risque inhérents au développement tels que le changement climatique, la surconsommation des ressources naturelles, la pauvreté et les inégalités

devront être pris en charge. Les valeurs implicites du développement socio-économique semblent bien évoluer, et remettent totalement en question des idées reçues bien ancrées concernant la croissance économique, le bien-être social et les risques de catastrophe. Il est aujourd’hui de mieux en mieux compris qu’au-delà d’un certain seuil, le progrès social et le développement humain ne sont pas tributaires d’une croissance économique et d’une augmentation de la consommation énergétique illimitées, et cette perspective vient éclairer le débat mondial autour du développement durable. On observe un élan croissant venant du secteur privé, des citoyens et des municipalités pour transformer les pratiques de développement dans des secteurs tels que les énergies renouvelables, l’eau et la gestion des déchets, la gestion des ressources naturelles, la construction et les infrastructures écologiques, ainsi que l’agriculture durable. Ces transformations des pratiques de développement peuvent également contribuer à réduire les risques de catastrophe. Par exemple, le passage à une économie à faible émission de carbone réduit le risque d’un changement climatique catastrophique, la protection et la réhabilitation des écosystèmes qui jouent un rôle régulateur peuvent limiter de nombreux aléas et une agriculture raisonnée en fonction des risques peut renforcer la sécurité alimentaire. Toutes les éditions du Bilan mondial ont systématiquement identifié et mis en avant des pratiques de développement transformatrices comportant des avantages connexes en matière de réduction des risques de catastrophe. La gestion des risques de catastrophe au sein même du développement Le Bilan mondial 2015 s’appuie sur ces recommandations et les consolide, en soulignant non seulement combien de telles pratiques transformatrices sont essentielles pour la réduction des risques, mais également comment la gestion efficace des risques au sein du développement xvii


peut jouer un rôle crucial pour rendre le développement durable et réaliser les objectifs des trois nouveaux cadres internationaux en cours de négociation en 2015. La gestion des risques inhérents à l’activité socioéconomique plutôt que l’intégration de la gestion des risques de catastrophe pour protéger contre des menaces externes constitue une approche radicalement différente de la réduction des risques de catastrophe telle qu’elle se pratique actuellement. Cela implique que la gestion des risques, plutôt que la gestion des catastrophes comme indicateurs des risques non pris en charge, doit aujourd’hui devenir une partie intégrante de l’art du développement : non pas un accessoire au développement, mais bien un ensemble de pratiques ancrées dans son ADN. Sans une gestion efficace des risques de catastrophe, le développement durable ne sera pas durable et les ODD ne pourront être réalisés. L’investissement dans la réduction des risques de catastrophe constitue donc une condition préalable au développement durable dans le contexte du changement climatique. Cette condition préalable peut être atteinte et se justifie financièrement. Des investissements annuels mondiaux de seulement 6 milliards de dollars américains dans des stratégies adaptées de gestion des risques de catastrophe peuvent engendrer un bénéfice total de 360 milliards de dollars américains en termes de réduction des risques, soit une réduction de plus de 20 % des pertes annuelles prévisionnelles i. Un tel investissement annuel dans la réduction des risques de catastrophe représente seulement 0,1 % des 6 000 milliards de dollars américains annuels qui devront être investis dans les infrastructures au cours des 15 prochaines années. Pour de nombreux pays toutefois, ce petit investissement supplémentaire pourrait véritablement faire la différence pour atteindre les objectifs nationaux et internationaux d’éradication de la pauvreté, d’amélioration de la santé et de l’éduxviii

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cation, et de garantie d’une croissance durable et équitable. Le message clé du Bilan mondial 2015 est qu’il est essentiel d’adopter un ensemble de stratégies de gestion des risques de catastrophe qui doivent se renforcer mutuellement et imprégner les décisions de développement, afin de faciliter la réussite des trois cadres internationaux en cours de discussion. Sans une gestion efficace des risques de catastrophe, le développement durable ne sera pas durable. L’avenir de la réduction des risques de catastrophe Alors que les risques de catastrophe ont rapidement augmenté durant la mise en œuvre du CAH, la gestion des risques de catastrophe a elle-même rapidement évolué. De nouveaux acteurs, notamment les municipalités, les entreprises et le secteur financier, sont moteurs de changement. Les innovations dans des domaines aussi différents que la gouvernance des risques, la connaissance des risques, l’analyse coûts-avantages et la responsabilité remettent en cause les idées reçues et créent de nouvelles opportunités. Plutôt qu’un programme ou un cadre d’action, le Bilan mondial 2015 présente une discussion sur l’avenir d’une gestion des risques de catastrophe qui intègre en permanence les innovations. L’objectif du rapport est de stimuler la réflexion, le débat et l’amélioration des méthodes employées, alors que les différents pays abordent les défis posés par les nouveaux accords internationaux en matière de réduction des risques de catastrophe, de lutte contre le changement climatique et de développement durable en 2015 et au-delà. Réformer la gouvernance des risques de catastrophe Les différents pays continuent d’avoir besoin d’un secteur spécialisé dans la gestion des catastrophes, afin de se préparer aux catastrophes, urgences et autres accidents (notamment mari-


times, aériens, industriels et environnementaux) et d’intervenir lorsque ceux-ci surviennent. Dans la mesure où les risques continuent de se développer, la nécessité d’un tel secteur se renforce plutôt qu’elle ne décroît. Toutefois, l’intégration de la gestion des risques de catastrophe et des risques climatiques dans le développement nécessite de ne pas être abordée seulement à travers un secteur spécialisé et autonome, mais plutôt à travers un renforcement des outils de gouvernance dans les différents secteurs et territoires afin de limiter à coup sûr la sous-évaluation des risques futurs ainsi que de garantir la transparence et la responsabilité alors que des risques sont créés, transférés et maintenus. Ceci exige d’associer une gestion prospective des risques qui garantit la gestion adéquate des risques dans le cadre de nouveaux investissements, une gestion corrective des risques qui réduit les risques présents pour les actifs existants et une gestion compensatoire des risques pour le renforcement de la résilience à tous les niveaux. De l’information sur les risques à la connaissance des risques Gérer les risques de cette manière exige une meilleure sensibilisation et une meilleure connaissance de ces derniers. La production sociale des informations sur les risques elle-même doit être transformée, avec une évolution de la production d’informations sur les risques proprement dite vers la production d’informations compréhensibles et exploitables par différents types d’utilisateurs, en d’autres termes la connaissance des risques. Un changement de perspective dans la production des informations sur les risques est également nécessaire. Il convient de passer de la mesure du risque en tant que facteur objectif externe pouvant être réduit, à la compréhension du risque en tant qu’opportunité et menace, et à une meilleure identification et estimation des causes et

des conséquences de la création et de l’accumulation des risques. Une sensibilité accrue aux risques extensifs est particulièrement importante. L’omniprésence de cette forme de risque en fait une préoccupation quotidienne pour les ménages, les collectivités, les petites entreprises et les autorités locales. Sa prise en charge peut par conséquent insuffler une demande au sein de la société pour la réduction des risques de catastrophe. Par ailleurs, parce que cette forme de risque est influencée par les vulnérabilités sociales, économiques et environnementales, elle peut être efficacement gérée à travers la combinaison efficace de méthodes prospectives, correctives et compensatoires de gestion des risques de catastrophe. Évaluer les coûts et les avantages La gestion des risques de catastrophe évalue toujours les risques par rapport aux opportunités et les menaces futures par rapport aux besoins actuels. Les coûts et les avantages de la gestion des risques de catastrophe doivent être pleinement pris en compte dans les investissements publics et privés à tous les niveaux, dans le système financier et dans la conception des mécanismes de partage des risques et de protection sociale. À l’heure actuelle, les analyses coûts-avantages se limitent habituellement aux coûts de remplacement évités pour les bâtiments ou les infrastructures endommagés par rapport aux coûts supplémentaires engendrés par la réduction des risques concernés. Les analyses coûts-avantages peuvent être étendues pour mettre en lumière les avantages et les inconvénients de chaque décision, notamment les avantages en aval et les coûts évités en termes de réduction de la pauvreté et des inégalités, de préservation de l’environnement, de développement économique et de progrès social. Elles peuvent aussi permettre d’identifier ceux qui supportent les risques, ceux qui supportent les coûts et ceux qui récoltent les bénéfices. xix


Une telle approche élargie de l’analyse coûtsavantages peut renforcer la visibilité et l’attractivité des investissements dans la gestion des risques de catastrophe, en soulignant leurs impacts positifs sur le développement plutôt que les seuls coûts et pertes évités. Intégrée au système financier, cette approche peut contribuer à déterminer les risques potentiels inhérents à des portefeuilles d’actifs et d’emprunts, dans le cadre de notations de crédit et pour les prévisions économiques, et ainsi à désamorcer le lien dangereux qui existe entre les flux financiers mondiaux et les investissements qui accroissent les risques de catastrophe. Elle peut également fournir une justification pour encourager l’expansion du financement des risques et des mesures de protection sociale auprès des ménages à faibles revenus, des petites entreprises et des autorités locales. Devenir responsable Il ne sera possible d’intégrer pleinement les coûts et les avantages de la gestion des risques de catastrophe dans les décisions d’investissement, le secteur financier et les mécanismes de partage des risques que si les responsables des décisions peuvent être identifiés et mis en face de leurs actes. Si les sociétés deviennent plus attentives aux causes et aux conséquences des risques de catastrophe, la mise en cause des responsabilités deviendra une question sociétale qui peut faire l’objet d’un discours social et de négociations. Ceci peut conduire à un renforcement de la responsabilité non seulement pour les pertes dues aux catastrophes et les impacts de ces dernières, mais également pour la création et l’accumulation de risques futurs, à travers la combinaison de la demande sociale, de cadres normatifs appropriés, de normes adoptées volontairement et d’un meilleur suivi des progrès réalisés par rapport à des références et des objectifs explicites et transparents. xx

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Une force de transformation Alors que toutes ces innovations remettent en question la manière dont les risques de catastrophe ont été gérés jusqu’ici, la réduction des risques de catastrophe a la capacité de devenir une véritable force transformatrice. La réduction de la pauvreté, l’amélioration de la santé et l’éducation pour tous, une croissance économique durable et équitable et la protection de l’environnement dépendent à présent de la façon dont les gouvernements, les entreprises, les investisseurs, les organisations de la société civile, les ménages et les individus gèrent quotidiennement les risques de catastrophe. Le renforcement de la réduction des risques de catastrophe est essentiel si l’on veut rendre le développement durable. Le Bilan mondial 2015 en quelques mots Le Bilan mondial 2015 s’adresse à tous ceux qui s’engagent pour le développement durable, la réduction des risques de catastrophe et la lutte contre le changement climatique. Il comporte un certain nombre de nouveaux concepts ainsi que des contenus enrichis. L’impact des catastrophes mesuré en années de vie humaine Cette édition introduit la notion d’années de vie humaine comme nouvelle méthode de mesure de l’impact d’une catastrophe. Cette notion représente le temps nécessaire à la production du développement économique et du progrès social, un temps qui est perdu en cas de catastrophe. Les années de vie humaine perdues, que ce soit à cause de catastrophes, de maladies ou d’accidents, constituent par conséquent une manière de mesurer les entraves au développement qui va au-delà des mesures traditionnelles telles que la mortalité et les pertes économiques. Elle permet de prendre pleinement et clairement la mesure réelle des pertes dues aux catastrophes et elle permet des comparaisons avec d’autres défis en matière de développement.


Des mesures de risque comparables au niveau mondial La cartographie et la compréhension des risques mondiaux ont été grandement améliorées par la dernière version du modèle de risque mondial du Bilan mondial. Celui-ci estime à présent les risques associés aux tremblements de terre, cyclones tropicaux, tempêtes, tsunamis et inondations pour tous les pays du monde. Par ailleurs, les risques associés aux cendres volcaniques dans la région Asie-Pacifique, à la sécheresse dans différents pays d’Afrique subsaharienne et au changement climatique dans plusieurs pays ont été calculés. L’utilisation de la même méthodologie, des mêmes procédés mathématiques et du même modèle d’exposition pour le calcul probabiliste des risques pour tous les aléas permet de comparer les niveaux de risque entre différents pays ou régions, pour les différents types d’aléas et pour des indicateurs de développement tels que les investissements en capital et les dépenses sociales ii. Aléas et risques volcaniques Une analyse scientifique majeure des aléas et risques volcaniques a été réalisée pour le Bilan mondial par des institutions scientifiques nationales et internationales de premier plan. Pour la première fois, le Bilan mondial 2015 comporte une section consacrée aux aléas et risques volcaniques, qui synthétise les principales conclusions de cette analyse. Couverture accrue des données relatives aux risques extensifs L’une des principales contributions des différents Bilans mondiaux a été de révéler les risques extensifs à travers une approche novatrice qui permet aux différents pays d’enregistrer systématiquement et à tous les niveaux leurs pertes dues à des catastrophes. Les éléments apportés par le Bilan mondial 2015 concernant les risques extensifs constituent un nouveau pas significatif vers la compréhension de cette forme de risques à l’échelle mondiale. Le Bilan mondial 2015 présente désormais des données systématiques

et comparables concernant les pertes dues aux catastrophes pour 85 pays et territoires, contre 56 pays et territoires en 2013, 22 en 2011 et seulement 13 en 2009 iii. Mesurer la résilience financière La disponibilité de mesures des risques de catastrophe comparables à l’échelle mondiale a permis les premières estimations de la résilience financière des gouvernements. Les différents pays ont subi des tests de stress afin de déterminer s’ils résisteraient aux pertes occasionnées par une catastrophe d’une période de retour de 1 sur 100 ans, et leurs déficits de financement ont été estimés. Par ailleurs, le Bilan mondial 2015 met à jour les conclusions initialement présentées par le Bilan mondial 2009 concernant l’impact des pertes dues aux catastrophes sur le développement à moyen terme, en particulier dans les pays dont l’économie est modeste et vulnérable. Une évaluation par les pairs des progrès réalisés Les précédentes éditions du Bilan mondial ont analysé les résultats des auto-évaluations des progrès des gouvernements réalisées à l’aide de l’outil HFA Monitor. Le quatrième cycle des évaluations à l’aide de l’outil HFA Monitor (2013-2015) était encore en cours au moment de la rédaction du Bilan mondial 2015 et un nombre insuffisant de rapports d’avancement était finalisé pour permettre une analyse mondiale. Le Bilan mondial 2015 a donc analysé les progrès réalisés sur la base d’une évaluation générale des différentes priorités d’action du CAH avec évaluation par les pairs, qui complète les résultats des précédents cycles d’évaluation de la mise en œuvre du CAH. Les 22 indicateurs de base du CAH ont été divisés en treize domaines d’analyse, plus quatre domaines supplémentaires pour les éléments du CAH qui n’étaient pas explicitement mesurés par les indicateurs de base. L’évaluation des progrès a été coordonnée par des organisations appartenant au système des Nations Unies, par la Banque mondiale, par l’OCDE et par d’autres institutions possédant une expertise spécifique dans chaque xxi


secteur. À l’issue d’un appel à contributions ouvert, plus de 200 rapports ont été reçus et un rapport de synthèse a été préparé et évalué par des pairs pour chaque domaine d’analyse. L’avenir de la réduction des risques de catastrophe En partenariat avec le PNUD et des institutions académiques de premier plan en Afrique, en Asie et sur le continent américain, un programme innovant de séminaires consacrés à L’avenir de la gestion des risques de catastrophe a réuni plus de 100 chercheurs et professionnels entre avril 2013 et octobre 2014. Cette réflexion collective sur les défis qui se posent actuellement en matière de réduction des risques de catastrophe est venue éclairer les objectifs et la structure du Bilan mondial 2015, en particulier ses résultats et recommandations iv. Utilisation du Bilan mondial 2015 Le Bilan mondial 2015 est structuré autour d’un ensemble de documents de référence issus de contributions ou de travaux commandités ainsi que de données sur les risques et les catastrophes. Pour cette édition du Bilan mondial, les recherches et les études de cas développées ont été plus poussées que jamais. Tous les supports et données sont disponibles via la version interactive du Bilan mondial 2015 à l’adresse internet www.preventionweb.net/gar15. La version imprimée du Bilan mondial 2015 est disponible dans les six langues de l’ONU (arabe,

xxii

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chinois, anglais, français, russe et espagnol). Le rapport principal comporte des fonctions de réalité virtuelle qui permettent aux utilisateurs de tablettes et de smartphones d’accéder à des supports électroniques supplémentaires, par exemple des cartes dynamiques, des vidéos, des photos et des études de cas. La version de poche du Bilan mondial 2015 présente les principaux résultats et messages du rapport sous une forme concise et accessible. Les données concernant les risques et les pertes dues aux catastrophes produites pour le Bilan mondial 2015 sont disponibles sur une nouvelle plate-forme interactive à travers le site PreventionWeb ainsi que via l’application Tangible Earth (premier globe numérique interactif au monde) et GAR for Tangible Earth (GfT), une application autonome entièrement interactive destinée aux utilisateurs de tablettes et de smartphones.

Notes i Les estimations varient selon le rapport coûts-avantages

(RCA) et le taux d’actualisation appliqués.

ii Pour en savoir plus concernant la méthodologie et les

résultats du modèle de risque mondial, voir l’annexe 1.

iii Pour de plus amples informations concernant les bases

de données sur les pertes dues aux catastrophes ainsi que l’analyse des risques extensifs, voir l’annexe 2.

iv Pour une synthèse de toutes les contributions et de

toutes les discussions de cette série de réunions, voir l’annexe 4.




Introduction : Une histoire dévastatrice

1.1

Dis-astrum et kata-strophe

Les catastrophes ont jusqu’ici été interprétées comme des menaces externes pour le développement. C’est pourquoi les risques de catastrophe produits par le développement lui-même n’ont pas été efficacement pris en compte. Aux premières heures du 26 décembre 2004, un séisme d’une magnitude de 9,1 (le troisième en termes de puissance jamais enregistré sur un sismographe) survenait entre l’île de Simeulue et les côtes indonésiennes1. Ce séisme déclencha une série d’énormes tsunamis qui frappèrent la côte de Sumatra ainsi que la plupart des pays qui bordent l’océan Indien. Ces tsunamis furent d’une telle violence qu’ils engendrèrent, selon les estimations, la perte de 230 000 vies humaines dans 14 pays, en particulier en Indonésie, au Sri Lanka, en Thaïlande et en Inde, mais également jusqu’en Somalie. Des tsunamis dévastateurs se sont produits tout au long de l’histoire. Le mot tsunami vient du japonais. Il a été formé par la combinaison de tsu, qui signifie « port », et de nami, qui signifie « vagues ». Le tsunami le plus destructeur de l’histoire du Japon est survenu le 15 juin 1896 et a causé la perte de 22 000 vies humaines2. Déclenché par un séisme au large de la côte de Sanriku, ses vagues ont atteint une hauteur de 40 mètres, détruisant tout sur leur passage. Les séismes et les tsunamis qui ont englouti le port de Callao au Pérou en 1746 et Lisbonne en 1755 n’ont pas manqué de retenir l’attention de penseurs du Siècle des lumières tels que Voltaire ou Rousseau et ont suscité la réflexion quant aux causes des catastrophes (UNISDR, 2011a). Dans

Chapitre 1

l’océan Indien, l’éruption du Krakatoa du 27 août 1883 a déclenché d’énormes tsunamis. Le 28 décembre 1908, le séisme et le tsunami de Messine dans la Méditerranée ont causé la mort d’environ 123 000 personnes en Sicile et en Calabre et ont été considérés comme la catastrophe la plus dévastatrice de ce type jusqu’aux événements survenus dans l’océan Indien en 2004 (Figure 1.1). 2004 Indian Ocean tsunami

La population côtière des îles de Simeulue et Andaman a en grande partie échappé à l’impact du tsunami survenu dans l’océan Indien en 2004. Une bonne compréhension des tsunamis et de la manière adéquate d’y faire face était profondément ancrée dans leur culture : l’évacuation vers les terres à plus haute altitude a été immédiate. Cependant, dans d’autres lieux, le tsunami a frappé des populations locales et des touristes étrangers inconscients de ce type de danger et ignorant les réactions adéquates. Un système d’alerte précoce pour les tsunamis, incluant l’éducation et la préparation de la popuFigure 1.1 Séisme et tsunami dévastateurs de Messine (1908)

(Source : Miller, 1909.)

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lation de manière à ce que celle-ci sache comment réagir après un séisme, aurait permis à des centaines de milliers de personnes d’évacuer les zones touchées et de survivre à ces catastrophes. Un système d’alerte aux tsunamis est opérationnel dans le bassin du Pacifique depuis 19493. En revanche, aucun système d’alerte précoce de ce type n’avait été développé dans l’océan Indien, et pour la plupart des populations côtières vivant dans cette région en 2004, l’expérience des réactions adéquates face à un tsunami avait depuis longtemps disparu des mémoires. Huit mois après les tsunamis de l’océan Indien, un phénomène tout aussi dévastateur, mais d’un tout autre ordre, allait frapper de l’autre côté du globe. Le 29 août 2005, l’ouragan Katrina (Figure 1.2) frappait les zones côtières des États américains de Louisiane et du Mississippi, coûtant la vie à 1 833 personnes et causant des dégâts estimés à 125 milliards de dollars américains4. 2005 Hurricane Katrina

Figure 1.2 Ouragan Katrina

Lorsqu’il a touché le sol, Katrina était un ouragan important de catégorie 3. Il ne s’agissait pas d’un phénomène exceptionnel. En fait, les ouragans Andrew et Charley, qui ont respectivement frappé la Floride en 1992 et 2004, et l’ouragan Camille, qui a frappé le Mississippi en 1969, ont engendré des vents beaucoup plus forts et dans le cas des tempêtes de Floride, une pression au centre plus basse que pour l’ouragan Katrina (NOAA, 2005). Par ailleurs, contrairement aux tsunamis de l’océan Indien, l’ouragan Katrina n’avait rien d’inattendu. Des systèmes d’alerte précoce pour les ouragans existent dans le bassin Atlantique depuis le XIXe siècle. L’ouragan Katrina est survenu au beau milieu de la saison des ouragans dans cette zone et a touché le sol dans une région qui est coutumière de ce type de phénomènes. De même, la série de catastrophes qui a frappé la Nouvelle-Orléans, détruisant les digues qui protégeaient la ville contre les inondations et mettant à mal les services publics et le réseau de transport, n’aurait pas dû prendre la population par surprise. La majeure partie de la ville de la Nouvelle-Orléans se trouve sous le niveau de la mer et était considérée comme un lieu à haut risque en termes de catastrophes. L’Agence fédérale de gestion des situations d’urgence (Federal Emergency Management Agency, FEMA) avait déjà développé des scénarios qui modélisaient les conséquences d’une rupture des digues qui protégeaient la ville. Le 26 août, trois jours avant que l’ouragan Katrina ne touche le sol, des avertissements avaient été lancés et les gouverneurs des États de Louisiane et du Mississippi avaient déclaré l’état d’urgence (Moynihan, 2009). Toutefois, environ 100 000 personnes ne purent être évacuées à temps par les autorités municipales, étatiques et fédérales, sur une population totale d’environ 1,3 million d’habitants (Tierney, 2008).

(Source : NASA5.)

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Lorsque le maire de la Nouvelle-Orléans donna finalement l’ordre d’évacuation au matin du 28 août, soit vingt-quatre heures avant que l’ouragan ne


touche le sol, une part significative de la population à faibles revenus habitant les zones exposées aux inondations de la Nouvelle-Orléans n’avait toujours accès à aucun moyen d’évacuation. Les plans d’urgence de la ville supposaient une évacuation en automobile. Les personnes ne disposant pas d’un véhicule, notamment les personnes âgées et les personnes souffrant d’un handicap, ou encore les personnes ne disposant pas des ressources nécessaires pour utiliser les moyens de transport et se payer une chambre d’hôtel, n’avaient pas été prises en compte par ces plans. Cet échec des autorités fédérales, étatiques et municipales face à un aléa prévisible et à des risques parfaitement identifiés, empêchant une intervention efficace et laissant pour compte tant de personnes, s’explique par de nombreuses raisons. Le travail de la FEMA était passé au second plan dans le sillage des attaques du World Trade Center du 11 septembre 2001 et la priorité n’était plus à la préparation à des aléas physiques tels que les ouragans, mais à la protection contre d’autres menaces. À tous les niveaux, les organisations chargées de la gestion des situations d’urgence ne disposaient plus des ressources ni du personnel suffisants. Mais au-delà des faiblesses institutionnelles et des défaillances de l’administration, la catastrophe a révélé l’historique des inégalités qui ont contribué à façonner la vulnérabilité de la ville face à cet ouragan ainsi que la réponse des autorités. À certains égards, la problématique semble avoir persisté

dans le cadre du redressement de la Nouvelle-Orléans, avec la reproduction et la reconstruction de nouvelles vulnérabilités (Encadré 1.1). À première vue, les catastrophes provoquées par les tsunamis de l’océan Indien et par l’ouragan Katrina semblent être des épisodes différents d’une même histoire de catastrophes violentes et destructrices : elles sont les manifestations d’événements naturels qui nous dépassent et emportent de nombreuses vies humaines tout en semant la désolation. Mais malgré les similitudes, ces deux catastrophes révèlent deux scénarios très différents. À bien des égards, les catastrophes survenues dans l’océan Indien représentent un dis-astrum (« mauvaise étoile » en latin), soit l’impact d’un événement naturel peu fréquent et inattendu, d’une ampleur extraordinaire et indépendant de toute action humaine. Dans Timée, Platon écrit : « L’humanité a connu des destructions nombreuses et diverses. Nous le savons parce que ceux qui en ont été les témoins et ont survécu nous ont transmis le message. À présent, ces récits ressemblent à des légendes, mais leur véracité réside dans les mouvements des corps célestes qui se répètent sur des périodes suffisamment longues ». Dans le cas d’aléas aussi extrêmes, l’ampleur des risques de catastrophe dépend plus de l’exposition à ces aléas que de la vulnérabilité. En d’autres

Encadré 1.1 Reconstruction de la vulnérabilité sociale à la Nouvelle-Orléans

La défaillance des structures de protection contre les inondations, l’incapacité à anticiper la catastrophe ainsi qu’une mauvaise gestion de l’intervention ont exacerbé et amplifié la vulnérabilité sociale et les inégalités qui préexistaient à la Nouvelle-Orléans (Levitt et Whitaker, 2009 ; Tierney, 2006 ; Amnesty International, 2010 ; Masozera et al., 2007). Après l’ouragan Katrina, le processus de reconstruction et le secteur de la construction proprement dit ont joué un rôle clé dans la reproduction des inégalités et de la vulnérabilité sociale (Jenkins et al., 2012). En 2011, six ans après la catastrophe, le salaire moyen à la Nouvelle-Orléans était inférieur de 6 % à la moyenne américaine et le taux de pauvreté était de 29 %, c’est-à-dire près du double de la moyenne américaine de 15,9 %. Les données récentes montrent que la Nouvelle-Orléans arrive en deuxième position de toutes les grandes villes américaines en termes d’inégalités6. De 1999 à 2011, le revenu médian des ménages a diminué de 9 % tandis que les inégalités de revenus entre blancs ont augmenté de 50 % (Bishaw, 2012; GNOCDC, 2013).

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termes, tous ceux exposés aux tsunamis étaient en danger, indépendamment de leurs revenus, de leur origine ethnique ou de leur classe sociale (UNISDR, 2011a). La seule stratégie de gestion des risques de catastrophe envisageable aurait été de réduire l’exposition grâce à une évacuation rapide – ce qui n’aurait été possible que grâce à des systèmes d’alerte précoce fiables et à une préparation efficace des collectivités exposées – et de compenser ensuite les pertes grâce à des polices d’assurance ou d’autres instruments de financement des risques. En revanche, la catastrophe de la Nouvelle-Orléans constitue quant à elle une kata-strophe (καταστροφh : « renversement » en grec) prévisible, tragique et une issue désastreuse à un long drame. Même si l’ouragan Katrina était bel et bien un phénomène violent, ce sont bien les risques créés tout au long de l’histoire de la Nouvelle-Orléans, et plus précisément la vulnérabilité des laissés-pour-compte et l’absence de mesures efficaces pour leur venir en aide, qui expliquent l’ampleur de la catastrophe. Rebuilding post-Katrina

Dans le cas d’ouragans de catégorie 3 affectant un nombre de personnes similaire, environ 46 % des variations du risque de mortalité s’expliquent par la vulnérabilité (UNISDR, 2011a). Ceci signifie que si des mesures efficaces sont prises pour faire face à la vulnérabilité socio-économique et pour renforcer la résilience, les risques de catastrophe peuvent être réduits de façon significative. Les catastrophes telles que celle qui a frappé la Nouvelle-Orléans en 2005 ne sont pas exclusivement imputables à des événements naturels extrêmes ou à un « mauvais astre », mais plutôt à un manque de volonté politique et économique de réduire les risques. Exposure vs Vulnerability

28

Chapitre 1

Le risque de catastrophe est habituellement considéré comme la conjugaison de la gravité et de la fréquence de l’aléa, du nombre de personnes et d’actifs soumis à l’aléa et de la vulnérabilité de ces derniers ou des dégâts qu’ils sont susceptibles de subir. De ce point de vue, les notions de dis-astrum et de kata-strophe ne constituent pas des types de catastrophe opposés ou exclusifs l’un de l’autre, mais plutôt des strates différentes du risque. Les strates du risque les plus intensives, qui se caractérisent par une fréquence très faible et des pertes très importantes et sont normalement associées à des aléas extrêmes tels que les tsunamis de l’océan Indien, renvoient à la notion de dis-astrum. Les strates du risque les plus extensives, qui se caractérisent par une fréquence élevée et par des pertes de faible gravité et sont associées à des aléas localisés et récurrents tels que les crues éclairs, les glissements de terrain et les tempêtes, renvoient à la notion de kata-strophe. Pour les strates du risque les plus intensives, l’équation du risque est dominée par l’aléa et l’exposition à ce dernier, tandis que la vulnérabilité joue un rôle plus important pour les strates du risque les plus extensives. Le profil de risque de la plupart des pays comporte différentes strates de risque. Toutefois, dans la plupart des contextes, la gestion des risques de catastrophe a été abordée en interprétant les catastrophes selon la notion de dis-astrum, c’est-à-dire comme un ensemble de méthodes destinées à protéger le développement contre des menaces exogènes plutôt qu’à prévenir ou éviter la création et l’accumulation de risques dans le cadre même du développement. Cette interprétation a largement influencé les méthodes de gestion des risques de catastrophe et leur efficacité dans la réalisation de l’objectif politique de réduction des risques de catastrophe.


1.2

turé autour d’un résultat escompté, de trois objectifs stratégiques et de cinq priorités d’action (Figure 1.3).

Entrée en scène du CAH

L’expérience acquise sur plusieurs décennies de gestion des catastrophes et des risques a permis de définir un agenda pour la réduction des risques de catastrophe, à savoir le Cadre d’action de Hyogo (CAH). Le 17 janvier 1995, le grand tremblement de terre de Hanshin dévastait le port de Kobe au Japon (UNISDR, 2013a). Dix ans après la catastrophe (23 jours après l’impact des tsunamis de l’océan Indien et 223 jours avant que l’ouragan Katrina ne touche le sol à la Nouvelle-Orléans), 168 États membres de l’ONU se réunissaient à Kobe pour adopter un nouveau cadre international pour la réduction des catastrophes, baptisé Cadre d’action de Hyogo pour 2005-2015 (CAH). Hyogo Framework for Action

Intitulé Pour des nations et des collectivités résilientes face aux catastrophes, le CAH était struc-

La Conférence mondiale de Kobe avait été planifiée bien avant les tsunamis de l’océan Indien et le CAH n’était pas le premier accord international à aborder le problème des risques de catastrophe. Depuis 1979, plusieurs accords internationaux et cadres politiques ont été développés afin d’encadrer les efforts mondiaux et nationaux dans la réduction des risques de catastrophe (Encadré 1.2). Toutefois, l’ampleur des catastrophes de l’océan Indien et l’assistance humanitaire mondiale apportée ont suscité un vif intérêt politique pour le CAH, ce qui n’aurait peut-être pas été le cas en l’absence de telles catastrophes. Ces 25 années d’accords internationaux illustrent un engagement politique croissant, bien que parfois symbolique, des États membres de l’ONU en matière de réduction des risques de catastrophe (Olson et al., 2011). Toutefois, 25 ans après la déclaration de la DIPCN, 20 ans après la Stratégie de Yokohama, 15 ans après le lancement de

Figure 1.3 Cadre d’action de Hyogo

Résultat escompté Réduire de manière substantielle les pertes en vies humaines et les dommages subis par les collectivités et les pays sur les plans social, économique et environnemental à cause des catastrophes.

Objectifs stratégiques Intégration de la réduction des risques de catastrophe aux politiques et plans de développement durable.

Mise en place et renforcement des institutions, mécanismes et capacités permettant d'accroître la résilience face aux aléas.

Intégration systématique des approches de réduction des risques de catastrophe dans la m ise en œuvre des programmes de préparation aux catastrophes, d'intervention et de redressement.

Priorités d'action 1. Veiller à ce que la réduction des risques de catastrophe soit une priorité nationale et locale et à ce qu'il existe, pour mener à bien les activités correspondantes, un cadre institutionnel solide.

2. Mettre en évidence, évaluer et surveiller les risques de catastrophe et renforcer les systèmes d'alerte rapide.

3. Utiliser les connaissances, l'innovation et l'éducation pour instaurer une culture de la sécurité et de la résilience à tous les niveaux.

4. Réduire les facteurs de risque sous-jacents.

5. Renforcer la préparation en prévision des catastrophes afin de pouvoir intervenir e icacement à tous les niveaux  lorsqu'elles se produisent.

(Source : UNISDR, 2005.)

29


Encadré 1.2 Accords internationaux visant la réduction des risques de catastrophe

Dès 1979, un groupe d’experts constitué par l’Organisation des Nations Unies pour les secours en cas de catastrophe (UNDRO) arrivait à la conclusion suivante : « nous réalisons aujourd’hui également que les conséquences réelles et potentielles des aléas naturels deviennent tellement graves et tellement mondialisées qu’il conviendra d’accorder une place beaucoup plus importante à la prévention des catastrophes et à la planification des interventions » (UNDRO, 1980). Près d’une décennie plus tard, l’Assemblée générale des Nations Unies déclarait les années 90 Décennie internationale de la prévention des catastrophes naturelles (DIPCN) et définissait cinq objectifs spécifiques, notamment « diffuser des informations sur les techniques courantes et nouvelles concernant les mesures à prendre pour évaluer et prévoir les catastrophes naturelles et en atténuer les effets » et développer « des programmes d’assistance technique et de transfert de technologie, des projets de démonstration et des activités éducatives et formatrices conçus en fonction de catastrophes spécifiques et des sites vulnérables, et évaluer l’efficacité de ces programmes ». En 1991, l’Assemblée générale relevait qu’environ 100 États avaient mis en place des stratégies nationales afin de réaliser les objectifs de la DIPCN et convoquait une Conférence mondiale qui s’est tenue en juin 1994 à Yokohama au Japon. La Stratégie de Yokohama pour un monde plus sûr qui en résulta soulignait l’importance de la prévention des catastrophes, de l’atténuation de leurs conséquences et de la préparation à ces dernières, ainsi que le caractère insuffisant de mesures visant exclusivement l’intervention requise une fois les catastrophes survenues. Le passage de l’intervention en cas de catastrophe à la réduction des risques de catastrophe connut une nouvelle avancée avec la Stratégie internationale de prévention des catastrophes (ISDR) lancée en 1999 afin de prendre le relais de la DIPCN et de développer la Stratégie et le Plan d’action de Yokohama. En 2002, le Plan de mise en œuvre du Sommet mondial pour le développement durable énonçait en outre qu’ « une approche intégrée, prenant en considération tous les risques et associant toutes les parties pour s’attaquer aux problèmes de vulnérabilité, d’évaluation des risques et de lutte contre les catastrophes, y compris la prévention, l’atténuation des effets, l’organisation préalable, les interventions en cas de catastrophe et les opérations de relèvement après les catastrophes, est un élément essentiel à la construction d’un monde plus sûr au XXIe siècle ». En 2004, l’Assemblée générale des Nations Unies convoquait une deuxième Conférence mondiale sur la réduction des risques de catastrophe qui a eu lieu en 2005 à Kobe afin de développer la Stratégie de Yokohama et le Plan d’action de Johannesburg. La Déclaration de Hyogo qui en a résulté mettait en avant la réduction des vulnérabilités et le renforcement de la résilience des nations et des collectivités « au cours du cycle de prévention des catastrophes, qui comprend la prévention proprement dite, la préparation et l’intervention en cas d’urgence, ainsi que le relèvement et la remise en état ». Figure 1.4 De l’intervention en cas de catastrophe à la réduction des risques de catastrophe

1965

Rés. 2034 La résolution 2034 de l'Assemblée générale des Nations Unies sollicite l'assistance des États membres en cas de catastrophe naturelle et les invite à informer le Secrétaire général du type d'aide d'urgence qu'ils sont en mesure d'apporter.

1971

Rés. 2816 Création de l rganisation des  ations Unies pour les secours  en cas de catastrophe (U D )

1989

Rés. 44/236 L'Assemblée générale proclame la Décennie internationale de la prévention des catastrophes naturelles, qui commence le     1er janvier 1990.

1999

Rés. 54/219 La résolution 54/129 du 22 décembre 1999 de l'Assemblée générale approuve la Stratégie internationale de prévention des catastrophes ( D ) qui succède à la Décennie internationale de  la prévention des catastrophes naturelles.

2005

Rés. 60/195 L'Assemblée générale fait siens la Déclaration de Hyogo et le Cadre d action de Hyogo 2005 2015 : pour des nations et des  collectivités résilientes face aux catastrophes tels qu'ils ont été adoptés à la Conférence mondiale sur la réduction des  catastrophes, tenue à  obe (Hyogo,  apon) du 1  au 22 anvier  2005, et rappelle la Déclaration commune de la séance spéciale  consacrée à la catastrophe dans l océan  ndien : réduction des  risques pour un avenir plus s r.

1979

Rés. 34/55 L ssemblée générale « se félicite de la décision prise par le Conseil  d'administration du PNUD [...] d'envisager d'inclure dans ses programmes nationaux et régionaux des activités de coopération technique relatives à la planification préalable et à la prévention des catastrophes ».

1994

Rés. 49/22 A La Conférence mondiale s est tenue à  o ohama, au  apon, du 23 au 2  mai  1 . La résolution  22  approuve la  tratégie de  o ohama et son  lan  d action adoptés lors de cette Conférence mondiale.

2001

Rés. 56/195 L'Assemblée générale prie les institutions compétentes du système des Nations Unies d'aider à réaliser les objectifs de la Stratégie et de faire le bilan de la mise en œuvre de la  tratégie de  o ohama pour un monde plus s r.

(Source : adapté à partir de la Bibliothèque virtuelle de l’UNISDR.) (Source : Commission du droit international, 2013.)

30

Chapitre 1


l’ISDR et 10 ans après l’adoption du CAH, la persistance évidente des risques de catastrophe et des pertes dues aux catastrophes laisse entière la question de la réalisation du principal objectif du CAH, à savoir « réduire de manière substantielle les pertes en vies humaines et les dommages subis par les collectivités et les pays sur les plans social, économique et environnemental à cause des catastrophes », et par conséquent la question de l’adéquation de la façon dont la réduction des risques de catastrophe a été comprise et mise en œuvre par la plupart des pays. Addressing risk

1.3

L’émergence d’un secteur spécialisé dans la gestion des risques de catastrophe

Au niveau national et international, la gestion des catastrophes a progressivement laissé la place à la gestion des risques. La pierre angulaire de cette évolution est le cycle de gestion des catastrophes. Naissance d’un système national Le 13 novembre 1985 en Colombie, le volcan Nevado del Ruiz entrait en éruption. Malgré les multiples avertissements d’activité volcanique adressés au gouvernement par des organisations scientifiques depuis le mois de septembre de cette année ainsi que la cartographie des aléas, la population locale a été avertie, mais pas évacuée. Dans la ville d’Armero, quelque 20 000 personnes perdirent la vie sur une population totale de 29 000 habitants, comme ce fut le cas aussi pour 1 500 personnes à Chinchiná, non loin de là. Armero disaster

Une semaine plus tôt, 100 otages (dont 11 juges) trouvaient la mort alors que les forces armées co-

lombiennes, plus précisément le groupe de guérilla M-19, mettaient un terme au siège du palais de justice de Bogota (Procuraduría General de la Nación, 2005). Le gouvernement a largement été tenu responsable des vies humaines perdues lors de ces deux événements. Dans le cas de la catastrophe volcanique, le gouvernement a été mis en cause pour de multiples défaillances dans l’identification des risques, l’alerte précoce, la préparation, l’évacuation et l’intervention (Zeiderman et Ramirez Elizalde, 2010). Quatre années plus tard, en 1989, le système national pour la prévention des catastrophes et l’intervention était créé dans le cadre d’une réforme ambitieuse de la gestion des risques de catastrophe (Gouvernement de la Colombie, 1988). Ce système national visait une meilleure gestion des catastrophes et intégrait alors l’organisation de défense civile du pays. Il établissait également la réduction des risques de catastrophe comme un objectif politique et accordait explicitement la priorité à un éventail beaucoup plus large de méthodes de gestion des risques de catastrophe. En outre, il introduisait une approche systémique innovante de la gouvernance des risques qui a été intégrée horizontalement à travers les ministères, et verticalement à travers les autorités régionales, départementales et locales, et qui définissait des rôles spécifiques pour les institutions scientifiques et techniques, la Croix-Rouge et d’autres organisations non gouvernementales. La création du système national colombien et la déclaration de la DIPCN, intervenues au même moment, ont marqué un changement de paradigme dans la gouvernance des risques de catastrophe par les différents pays (Gouvernement de la Colombie, 1988 ; Banque mondiale, 2012) et ont symbolisé l’émergence d’un secteur spécialisé dans la gestion des risques de catastrophe. Cette évolution a été consacrée avec l’adoption du CAH en 2005. 31


Emergency management

Gestion de l’urgence Dans la plupart des pays, le secteur de la gestion des risques de catastrophe trouve ses origines dans les institutions, les législations et politiques, les dispositions administratives et les systèmes créés afin d’intervenir en cas de catastrophe ou de crise et de gérer ces dernières. Le concept de défense civile est apparu à la suite du bombardement de zones civiles durant la Première Guerre mondiale et en 1935, un service de défense civile était mis en place par le Ministère de l’intérieur du Royaume-Uni. Les États-Unis firent de même en 1941 avec la création de l’Office of Civilian Defense7. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, l’objectif principal de la défense civile, particulièrement en Europe, devint la protection de la population contre les armes nucléaires. Mais lorsque la guerre froide prit fin, le nouvel objectif devint alors la protection de la population contre les aléas tels que les inondations, les séismes et les tempêtes, et dans les années 2000, la protection contre les attaques terroristes. Ces évolutions successives se sont manifestées aux États-Unis à travers le regroupement, en 1979, des différentes agences de défense civile au sein de la FEMA, qui fut ensuite intégrée au Département de la sécurité nationale (Department of Homeland Security) au lendemain des attaques du 11 septembre 2001 à New York et à Washington, D.C. Les énormes catastrophes associées aux sécheresses et aux conflits en Afrique subsaharienne, aux inondations, aux cyclones et aux conflits au Bangladesh, ou encore aux séismes survenus au Pérou en 1970, au Nicaragua en 1972 et au Guatemala en 1976, ont fait comprendre la nécessité d’un renforcement de la coordination internationale des interventions et des secours en cas de catastrophe (Hannigan, 2012 ; FAO, 2010 ; Bamidele, 2011 ; CEPAL, 1973 ; CEPAL, 1976 ; Commission européenne et Comunidad Andina, 2006). Ce renfor32

Chapitre 1

cement a été soutenu par la création de l’Organisation des Nations Unies pour les secours en cas de catastrophe (UNDRO) en 1971, afin de coordonner les interventions internationales en cas de catastrophe et de conflit (Hannigan, 2012). Les caractéristiques des outils de gouvernance développés pour la gestion des interventions allaient influencer l’approche ultérieure de la gestion des risques de catastrophe. Ces outils de gouvernance furent adoptés afin de protéger les sociétés contre ce qui était perçu comme des menaces externes pour les civils et pour la sécurité nationale. Les catastrophes étaient précisément perçues comme telles, tout comme les accidents technologiques, maritimes et aériens ou encore les impacts des conflits. Elles étaient considérées comme des événements extrêmes et imprévisibles, comme l’illustre parfaitement un slogan du début des années 90 de l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS) : « Les catastrophes ne préviennent pas : soyez préparés ». Une intervention efficace face à de telles menaces externes exigeait, à tous les niveaux, des institutions et des mécanismes toujours plus sophistiqués, professionnels et compétents sur le plan technique, ce qui a conduit à la structuration d’un secteur spécifique doté de ses propres principes, dogmes, signes et symboles distinctifs. Dans certains pays, les organisations de défense et de protection civile étaient des structures militaires, tandis que dans d’autres elles relevaient du ministère de l’intérieur, qui est également responsable des forces de l’ordre, des services d’intervention d’urgence et de la sécurité nationale. Le secteur et les institutions qui le composent ont démontré une résilience institutionnelle remarquable et une capacité à s’adapter à l’évolution des circonstances et des besoins, comme l’illustre le passage successif des situations de guerre à la menace nucléaire, puis aux catastrophes et enfin au terrorisme. Ceci met en lumière un secteur


consolidé qui défend non seulement la sécurité nationale, mais également ses propres intérêts, à travers une communication, une identité et une gestion d’image qui lui sont propres. Normes et réglementations En parallèle à l’évolution de la gestion des situations d’urgence, les différents pays ont adopté d’autres types d’outils de gouvernance afin de gérer les risques de catastrophe, notamment des normes légales et des standards dans des domaines tels que la santé publique, l’environnement, la planification et la construction.

Londres en 1854, le docteur John Snow utilisa une cartographie des cas de choléra pour remonter à la cause de l’épidémie, à savoir l’eau contaminée d’un seul puits qui se trouvait dans Broad Street (Figure 1.5). Ceci permit non seulement de déterminer les causes du choléra, mais également d’introduire des règles de santé publique au Royaume-Uni qui réduisirent de façon spectaculaire les risques d’épidémies dévastatrices. Figure 1.5 Foyers de choléra dans le quartier de Broad Street à Londres en 1854

Les sociétés ont de tout temps adapté leurs méthodes agricoles, de construction et autres à la gestion des risques de catastrophe en fonction d’une variété de contraintes environnementales, technologiques, socio-économiques et politiques. Dans le sillage de grandes catastrophes, il est fréquemment arrivé de revoir les méthodes de construction ou les règles d’urbanisme et d’aménagement du territoire avec pour objectif de réduire les risques. Par exemple, au lendemain du tremblement de terre de 1746 à Lima, au Pérou, le Vice-Roi José Antonio Manso de Velasco fit appel au mathématicien français Louis Godin afin de développer un plan de reconstruction pour la ville. Bien qu’il n’ait jamais été pleinement mis en œuvre, le plan de Louis Godin comprenait des spécifications détaillées pour l’élargissement des rues et la réduction de la hauteur des bâtiments afin d’éviter les dégâts potentiellement causés par d’autres séismes (UNISDR, 2011a). Il s’agit là de l’un des premiers exemples de planification de la reconstruction qui intègre des codes de planification et de construction raisonnés en fonction des risques.

Les travaux de Louis Godin et John Snow reflètent le changement de perspective intervenu durant le Siècle des lumières en Europe, quand les catastrophes commencèrent à être vues comme le résultat du comportement humain plutôt que comme un châtiment divin. Dès lors qu’il a été compris que les risques de catastrophe pouvaient résulter des activités sociales et économiques, l’adoption de cadres réglementaires visant à gérer les risques s’est progressivement généralisée, en particulier dans les pays à revenu élevé.

À partir du XIXe siècle, les pays industrialisés ont commencé à codifier les méthodes de réduction des risques et à les intégrer à des normes légales et à des standards tout en s’appuyant sur les connaissances scientifiques. Par exemple, durant l’épidémie de

Le premier code de construction parasismique définissant des limites chiffrées a été adopté par une commission italienne à la suite du séisme de Messine en 1908. Le Ministère de l’intérieur japonais a quant à lui adopté un coefficient sismique

(Source : http://scienceline.org/2010/05/john-snows-maps-of-the-broad-streetcholera-outbreak.)

33


et une limitation de la hauteur des bâtiments en 1923, et à la suite du séisme de Santa Barbara en 1925, les États-Unis d’Amérique ont introduit des dispositions de conception parasismique au code de la construction (Uniform Building Code) de 1927 (FEMA, 1998). Au moment de la déclaration de la DIPCN, la plupart des pays à revenu élevé ainsi que de nombreux pays à revenu intermédiaire et à faible revenu avaient mis en place des normes et des réglementations afin de gérer les risques de catastrophe dans différents secteurs. Dans les pays à revenu élevé en particulier, les réglementations se sont révélées très efficaces dans la réduction progressive des risques, par exemple grâce au remplacement des bâtiments et infrastructures vulnérables par des constructions respectant des normes plus strictes. De la gestion de l’urgence à la gestion des risques de catastrophe Durant les années 70, la gestion des risques de catastrophe a progressivement émergé comme secteur spécialisé. Les travaux du monde univer-

sitaire (Hewitt, 1983), des professionnels de la construction (Davis, 1978) et des spécialistes de la gestion progressive des situations d’urgence (Cuny, 1983) démontraient tous que la gestion des situations d’urgence n’était qu’une seule composante d’une approche plus large intégrant des mesures de réduction des risques avant même que les catastrophes ne surviennent ainsi que durant les phases de redressement et de reconstruction après les catastrophes. Un cycle de gestion des catastrophes fut présenté pour la première fois et adopté en 1975 (Baird et al., 1975). Très concret, il répartissait les actions de réduction des risques, de préparation, d’intervention et de redressement selon quatre phases inscrites dans un processus cyclique (Figure 1.6). Au moment de la Conférence internationale sur la mise en œuvre du programme d’atténuation des effets des catastrophes qui s’est tenue à Ocho Rios, en Jamaïque, en 1984, un secteur global spécialisé dans la gestion des risques de catastrophe commençait progressivement à se dessiner (Virginia Polytechnic Institute, 1985). À cette époque, les organisations de gestion progres-

Figure 1.6 Le premier cycle de gestion des catastrophes et son interprétation actuelle

INTERVENTION (après la catastrophe) Intervention d'urgence CYCLE DE GESTION DES CATASTROPHES (b)

RECONSTRUCTION CATASTROPHE

C A T A T T R O P H E

ATTÉNUATION ET PRÉVENTION

PRÉPARATION AU SECOURS

RÉHABILITATION

Intervention à une catastrophe spécifique Intervention /Secours

Préparation

Réhabilitation

Atténuation

(Évaluation des risques / Prévention)

SECOURS

Reconstruction

ALERTE vant a catastrop e réduction des ris ues

Redressement après la catastrophe

ATTÉNUATION DES IMPACTS et PRÉPARATION AUX CATASTROPHES (après la catastrophe)

(Source : Baird et al., 1975 et Khan et al., 2008.)

34

Chapitre 1


sive des situations d’urgence de pays tels que la Jamaïque et les Philippines avaient déjà commencé à adopter le cycle de gestion des catastrophes et à élargir leur mission pour inclure les phases de prévention des catastrophes, d’atténuation de leurs effets, de redressement et de reconstruction. Au moment de la création du système national colombien, l’idée que les gouvernements devaient adopter cette approche plus complète de la gestion des catastrophes plutôt que simplement s’attacher à la gestion des situations d’urgence se généralisait progressivement. C’est ainsi que le système national colombien devint une référence pour son approche systémique innovante. Son adoption ayant de plus coïncidé avec la déclaration de la DIPCN, il influença la manière dont les autres pays abordèrent la gestion des risques de catastrophe, tout d’abord en Amérique latine (Lavell et Franco, 1996) puis dans d’autres régions. De nombreux pays réformèrent leurs outils de gouvernance à la suite de grandes catastrophes (Wilkinson et al., 2014), en adoptant fréquemment les principes dont le système colombien avait été le pionnier grâce à l’appui essentiel de fervents défenseurs nationaux et régionaux desdits principes. Le Nicaragua adopta par exemple de nouvelles dispositions en 2000 à la suite des catastrophes provoquées en 1998 par l’ouragan Mitch (Gouvernement du Nicaragua, 2005). L’Inde lui emboîta le pas après le super-cyclone d’Orissa de 1999 et le séisme de Gujarat de 2001 (Gouvernement de l’Inde, 2014). Le Sri Lanka et l’Indonésie introduisirent pour leur part des réformes après le tsunami de l’océan Indien en 2004. Dans le même temps, des organisations régionales telles que le CEPREDENAC, la CDERA, le SOPAC et le SAARC Disaster Management Centre (SDMC), des centres techniques tels que l’ADPC et des programmes régionaux fixant un calendrier précis tels que le PREDECAN furent créés8.

Des organisations multilatérales, notamment la Commission européenne (ECHO), le PNUD (BCPR) et la Banque mondiale (GFDRR) commencèrent également à créer des unités spécialisées associant des fonctions de gestion des situations d’urgence, de redressement après une catastrophe et des activités de réduction des risques de catastrophe. La DIPCN, le Plan d’action de Yokohama et le CAH ont permis de consolider et de légitimer ce secteur émergent de la gestion des risques de catastrophe à l’échelle mondiale, régionale et nationale, et de lui donner les moyens d’agir. Les trois objectifs stratégiques du CAH reflètent implicitement la logique du cycle de gestion des catastrophes. L’objectif central visant le renforcement des institutions et des outils de gouvernance appuie les deux autres objectifs, qui sont conçus pour intégrer la réduction des risques de catastrophe dans le développement durable et dans des mesures de préparation, d’intervention et de redressement efficaces.

1.4

Les limites de la gestion des catastrophes

Ces dernières années, la compréhension du rôle de la vulnérabilité et de l’exposition s’est progressivement améliorée, suggérant que le développement lui-même crée des risques de catastrophe. Néanmoins, les méthodes de gestion des risques de catastrophe n’ont pas été adaptées. Il n’est guère surprenant que ce soit la Colombie, l’un des premiers pays à avoir créé un secteur de la gestion des risques de catastrophe à part entière en 1989, qui soit également le premier à identifier les limites d’une approche de la gestion des risques de catastrophe fondée sur le cycle de gestion des catastrophes. En 2010 et 2011, le phénomène d’oscillation australe El Niño (ENSO) s’est révélé relativement fort, sans toutefois pouvoir être qualifié d’exception35


nel, en Colombie. Le pays a alors connu non pas une grande catastrophe unique, mais des milliers de petits événements extensifs étalés sur une période de 18 mois et qui ont affecté 93 % des 1 041 municipalités du pays (UNISDR, 2013a), provoquant plus de 6 milliards de dollars américains de pertes directes. Ces événements ont remis en question l’efficacité des méthodes de gestion des risques de catastrophe utilisées et ont révélé la réalité sous-jacente d’une accumulation de risques de catastrophe exacerbée par les déplacements et l’insécurité associés à un conflit civil permanent et par des investissements dans la reconstruction qui reproduisaient parfois les risques de catastrophe. En 2012, la Colombie a initié des réformes et a adopté une nouvelle législation (Encadré 1.3). La plupart des pays auraient eu bien du mal à gérer la série incessante de catastrophes qui a frappé la Colombie en 2010 et 2011. Toutefois, bien que le cas de la Colombie soit tout à fait particulier, il a mis au jour les failles de l’approche jusqu’ici adoptée pour la réduction des risques de catastrophe dans les autres pays et régions. Des études soulignant que le risque est endogène aux changements socio-économiques, territoriaux et environnementaux ont été publiées depuis les années 70 et 80 (Zobler, 1976 ; Quarantelli, 1978 ; Davis, 1978 ; Hewitt, 1983 ; Watts, 1983 ; Maskrey, 1989) et ont progressivement influencé la littérature académique (Wisner et al., 2003 ; Lavell, 2003 ; Weber, 2006 ; Cannon, 2008 ; AragónDurand, 2009 ; Cutter, 2014 ; Van Niekerk, 2014) et les agendas de la recherche scientifique (ICSULAC, 2010 ; IRDR, 2013). Tous les éléments réunis par les éditions successives du Bilan mondial (UNISDR, 2009a, 2011a, 2013a) confirment que les catastrophes sont les manifestations de problèmes de développement non résolus (Hagman, 1984) et constituent donc les indicateurs d’un modèle de développement erroné et intenable qui s’appuie sur une croissance illimitée, les inégalités et la surconsommation. L’exposition et la 36

Chapitre 1

vulnérabilité ainsi que les aléas eux-mêmes (à travers le changement climatique et la dégradation de l’environnement) sont socialement construits à travers des facteurs de risque sous-jacents, notamment le développement économique mondialisé, la pauvreté et les inégalités, la planification et la gestion inadéquates du développement urbain, la dégradation de l’environnement et le changement climatique. ENSO losses

Les nouveaux modèles et les nouvelles tendances des pertes et des risques liés aux catastrophes reflètent l’influence de ces facteurs. En particulier, l’augmentation des pertes et des dégâts causés par les catastrophes extensives fournit la preuve empirique que les risques de catastrophe sont les indicateurs endogènes d’un développement erroné qui manque son but, de processus socioéconomiques intenables et de sociétés mal adaptées. Les risques de catastrophe représentent un problème construit socialement sous l’influence de processus sous-jacents dont la négligence engendre des « kata-strophes » prévisibles et toujours tragiques. L’Objectif stratégique n° 1 du CAH, à savoir « l’intégration de la réduction des risques de catastrophe dans les politiques, les programmes et les plans de développement durable », ainsi que la Priorité d’action n° 4 qui vise à réduire les facteurs de risque sous-jacents ont clairement créé l’espace permettant de prendre en compte les facteurs de risque sous-jacents. Le CAH tranchait tout aussi clairement à travers ses autres priorités d’action. La Priorité d’action n° 1 du CAH appelait par exemple les gouvernements à « manifester la ferme volonté politique qui est nécessaire pour promouvoir la réduction des risques de catastrophe et intégrer celle-ci dans les programmes de développement ». Quant à la priorité d’action n° 2, elle conseillait aux institutions qui s’occupent des questions d’urbanisme d’« informer le public


Encadré 1.3 Des conséquences aux causes en Colombie

Comme souligné dans ce chapitre, la création du Système national colombien pour la prévention des catastrophes et l’intervention (SNPAD) en 1989 (Banque Mondiale, 2012) a marqué l’émergence d’une approche structurée de la gouvernance des risques de catastrophe. Toutefois, bien que cette approche ait conduit à des réductions de la mortalité due aux catastrophes, les pertes économiques ont poursuivi leur tendance à la hausse au cours des 40 dernières années (Figure 1.7). Il apparaît donc évident qu’il reste des lacunes à combler et des défis à relever (Cardona et al., 2005). Alors que les responsabilités avaient été décentralisées, l’engagement faisait fréquemment défaut au niveau des autorités locales, qui ne disposaient par ailleurs pas de moyens financiers et techniques suffisants. L’adoption et la mise en œuvre de plans locaux de gestion des risques de catastrophe étaient limitées aux grands centres urbains, ce qui créait une dépendance vis-à-vis de l’échelon national. Il n’y avait ni mécanisme de transfert des risques, ni stratégies claires de financement des risques n’étaient en place. C’est pourquoi des agences spécialisées telles que le Fonds pour la reconstruction et le développement social dans les régions productrices de café (FOREC) ont dû être créées à la suite de grandes catastrophes telles que celles associées au séisme de 1999, qui a affaibli l’agence nationale de gestion des risques de catastrophe. Dans le même temps, cette agence avait été transférée du cabinet du président vers le ministère de l’intérieur, ce qui avait réduit son pouvoir et son influence politique. La gestion des risques de catastrophe était principalement interprétée en termes de préparation aux catastrophes et de redressement plutôt qu’en termes de prévention et de réduction des risques. L’intégration des risques de catastrophe dans l’aménagement du territoire, la gestion environnementale et la planification du développement socio-économique était plus symbolique que réelle. L’implication du secteur privé était limitée et la responsabilisation des intervenants était globalement insuffisante. En 2012, ces carences ont été prises en compte par une nouvelle loi (INGENIAR, 2010) qui fait de la gestion des risques de catastrophe une responsabilité de l’État ainsi que de la population dans son ensemble. Cette nouvelle loi s’appuie sur trois processus clés : la connaissance des risques, la gestion des risques et la gestion des catastrophes, avec un accent particulier sur la gestion prospective des risques. La responsabilité ultime de la gestion des risques de catastrophe incombe à nouveau au Président de la République (Gouvernement de la Colombie, 2012). À travers cette loi de 2012, la Colombie a franchi un second pas en tant que pionnière de la gouvernance des risques de catastrophe. Les prochaines années nous diront si ces dispositions vont se révéler efficaces10. Figure 1.7 Réduction des risques de catastrophe et évolution des pertes en Colombie (en dollars américains constants 2012)9 Pertes en millions de dollars américains

Nombre de personnes tuées

2 500

0 000 Nombre de personnes Armero tuées Pertes en millions de dollars américains Politique appropriée de gestion des risques de catastrophe

2 000

1 500

La Niña Armenia

20 000

Saison des pluies

1 000

15 000 2 0 5 10 000

Girón

Páez

25 000

500

5 000

Création du Fonds national Création du Système national Programme national pour pour les secours en cas de catastrophe colombien pour la prévention la prévention des catastrophes (décret 1547) 1er code de construction des catastrophes et l'intervention et l'intervention (PNPAD) parasismique colombien (loi 1400) (SNPAD) (article 70 (décret 93) Révision des codes du décret-loi 919 de 1989) de construction

2008

20 10 20 12

1994

20 05

1985

19 98

1979 1981

19 89

1975

19 84

Manizales

Cadre d'action de Hyogo

Nouvelle loi 1523 de 2012 mettant en place la Politique nationale de gestion des risques de catastrophe. Mise en avant du développement durable Création du Fonds d'adaptation (Source : UNISDR, informations issues des bases de données nationales sur les pertes (décret  1 )  3e code de construction dues aux catastrophes ; Banque mondiale, 2012 ; Gouvernement de la Colombie, 2010 ; parasismique colombien rapport Colombie dans le cadre du cycle d’évaluation 2011-2013 du CAH ; López, 2009 ; AIS, 2014.)

(Source : Commission du droit international, 2013.)

37


des possibilités de réduction des risques de catastrophe préalablement à tout projet de construction, ou à tout achat ou vente de terrain ». Toutefois, peu de pays ont emprunté cette voie. Le CAH a plus généralement été abordé à travers la perception sous-jacente des catastrophes comme des éléments externes à gérer, des chocs exogènes et imprévisibles qui affectent des systèmes économiques et des sociétés dont le fonctionnement est autrement tout à fait normal, des « dis-astrum » plutôt que des « kata-strophe » (Lavell et Maskrey, 2014). L’intitulé du CAH met en avant le renforcement de la résilience face aux catastrophes plutôt que le renforcement de la résilience dans le cadre du développement. L’interprétation des catastrophes comme des chocs exogènes est l’un des fondements du cycle de gestion des catastrophes qui, comme son nom l’indique, s’articule autour des catastrophes en tant qu’événements. Bien que le cycle de gestion des catastrophes ait été et demeure toujours séduisant pour sa simplicité et sa logique interne, celui-ci encourageait et justifiait l’expansion syncrétique des organisations de gestion des situations d’urgence pour englober d’autres aspects de la gestion des risques de catastrophe tels que la prévention, la réduction et le redressement. Les différentes responsabilités à l’égard de ces autres aspects, telles que décrites dans le CAH et les cadres internationaux qui l’ont précédé, ont été simplement ajoutées aux outils de gouvernance visant la gestion des situations d’urgence. C’est ainsi que la réduction des risques de catastrophe continue d’être principalement comprise et pratiquée comme une gestion des catastrophes et comme une série d’instruments et de mécanismes administratifs dont l’objectif est de protéger le développement contre des menaces externes tangibles. En toute logique, si les risques de catastrophe sont conceptua38

Chapitre 1

lisés comme des menaces exogènes, alors des instruments peuvent être conçus afin de nous en protéger. Par exemple, des notions telles que la protection financière sous-entendent la protection des finances publiques contre des menaces externes plutôt que la reconnaissance de l’impact de l’utilisation de ces finances publiques en termes de réduction ou de génération des risques de catastrophe. Par définition, interpréter les risques de catastrophe de cette manière affaiblit la responsabilisation vis-à-vis des risques créés. En dernière analyse, cette approche de la réduction des risques de catastrophe renferme une contradiction fondamentale : elle vise précisément à protéger le modèle de développement qui est à l’origine des risques créés. C’est pourquoi augmenter les investissements visant à protéger le développement sans prendre en charge dans le même temps les facteurs de risque sous-jacents revient à consentir des efforts toujours plus importants pour des résultats toujours moindres et des progrès décevants. Les risques de catastrophe continueront d’être produits plus rapidement qu’ils ne sont réduits. Le CAH a généré des investissements et un engagement significatifs dans la réduction des risques de catastrophe à tous les niveaux, notamment de la part des gouvernements nationaux, des autorités municipales, des fournisseurs de services, des organisations non gouvernementales, des institutions scientifiques et techniques, des organisations régionales et internationales comme du secteur privé. Des réussites nombreuses et parfois spectaculaires ont été obtenues dans la prise en compte de risques spécifiques, par exemple la réduction radicale de la mortalité due aux cyclones tropicaux au Bangladesh. Toutefois, ces réductions bien réelles des risques de catastrophe réalisées dans le cadre du CAH se heurtent à présent à une déferlante d’accu-


mulation de nouveaux risques. Étant donnés les éléments toujours plus nombreux qui attestent des risques systémiques à l’échelle planétaire, il existe une possibilité bien réelle de voir les risques de catastrophe atteindre un paroxysme au-delà duquel les efforts et les ressources nécessaires pour les réduire dépasseront les capacités des générations futures. Systemic approaches to DRM

Notes 1 Source : Service géologique des États-Unis, http://earthquake. usgs.gov/ (consultation le 27 novembre 2014). 2 Sources pour toutes les données relatives au tsunami japonais de 1896 : http://earthquake.usgs.gov/earthquakes/world/events/ 1896_06_15.php; http://ngm.nationalgeographic.com/1896/09/ japan-tsunami/scid-more-text; http://www.sozogaku.com/fkd/en/ cfen/CA1000616.html (consultation le 27 novembre 2014). 3 http://data.worldbank.org/ (consultation le 1er juillet 2014). 4 Sources pour toutes les données internationales relatives aux pertes dues aux catastrophes (sauf indication contraire) : Centre de recherche sur l’épidémiologie des catastrophes (CRED), EM-DAT, http://www.cred.be/. 5 http://www.nasa.gov/mission_pages/hurricanes/archives/2005/ h2005_katrina.html (consultation le 27 novembre 2014).

Si les risques de catastrophe constituent des indicateurs endogènes d’un modèle de développement erroné, tout progrès dans la réalisation de l’objectif politique de réduction des risques de catastrophe dépendra d’une transformation de ce modèle. Si le monde souhaite survivre au-delà du milieu du XXIe siècle et éviter une kata-strophe mondiale, il sera nécessaire de réaliser des avancées concluantes sur la voie qui a été la moins suivie dans le cadre du CAH et d’élaborer une nouvelle approche de la gestion des risques de catastrophe.

6 http://www.bloomberg.com/visual-data/best-and-worst/mostincome-inequality-us-cities (consultation le 27 novembre 2014). 7 http://www.presidency.ucsb.edu/ws/?pid=16117 (consultation le 23 novembre 2014). 8 Centro de Coordinación para la Prevención de los Desastres Naturales en América Central (CEPREDENAC), Caribbean Disaster Emergency Management Agency (CDERA), Secretariat of the Pacific Community (SOPAC), South Asian Association for Regional Cooperation (SAARC), El Proyecto Apoyo a la Prevención de Desastres en la Comunidad Andina (PREDECAN). 9 Sauf indication contraire, l’ensemble des graphiques et des figures de ce rapport qui présentent les pertes économiques et s’appuient sur les bases de données nationales s’entendent en dollars américains 2012. 10 Avec les informations complémentaires d’entretiens personnels avec Omar Dario Cardona (août et septembre 2014).

39



Partie I

Un travail inachevĂŠ

41


Alors que le CAH touche à son terme, tout semble indiquer que son résultat escompté, à savoir « réduire de manière substantielle les pertes en vies humaines et les dommages subis par les collectivités et les pays sur les plans social, économique et environnemental à cause des catastrophes », n’a été que partiellement atteint. La mortalité due aux catastrophes demeure élevée : 1,6 million de personnes ont trouvé la mort dans les catastrophes signalées à l’échelle internationale depuis le lancement de la DIPCN en 1990, soit une moyenne d’environ 65 000 décès par an. Ce chiffre demeure toutefois largement inférieur à la moyenne de 1,24 million de décès survenant chaque année à la suite des accidents de la route1 ou à la moyenne de 1 million de décès dus chaque année à la tuberculose. De ce point de vue, la mortalité due aux catastrophes pourrait être considérée comme un problème mondial moins important que certaines maladies ou certains accidents. Les pertes économiques dues aux catastrophes signalées à l’échelle internationale ont également connu une augmentation constante depuis 1990, pour atteindre une moyenne annuelle estimée à 200 milliards de dollars américains (Munich Re., 2013). Ceci ne représente toutefois qu’une fraction du PIB mondial, qui frôlait les 75 000 milliards de dollars américains en 20132 et ne provoque clairement pas le même degré d’inquiétude que les

4 000 milliards de dollars américains engloutis par le secteur bancaire durant la crise financière mondiale de 2007-2009 (FMI, 2009). L’une des raisons pour lesquelles les pertes dues aux catastrophes n’ont pas suscité la même urgence politico-économique pour régler le problème que dans le cas des risques de maladie ou des risques financiers réside peut-être dans la manière dont celles-ci sont mesurées. Concrètement, les catastrophes touchent des ménages, des collectivités et des pays à travers l’impact combiné de la mortalité, de la morbidité et des dégâts causés aux habitations, aux infrastructures et au secteur de l’agriculture. La mesure séparée de la mortalité et des pertes économiques ne parvient pas à capturer la pleine dimension des catastrophes. Pour combler cette lacune et à des fins illustratives, la notion d’années de vie humaine peut être utilisée pour fournir une meilleure représentation de l’impact des catastrophes, car elle mesure le temps nécessaire pour produire le développement économique et le progrès social. Les années de vie humaine perdues, que ce soit à cause de catastrophes, de maladies ou d’accidents, constituent par conséquent une manière de mesurer les entraves au développement socio-économique (Encadré I.1). Lorsque les pertes dues aux catastrophes sont exprimées en années de vie humaine comme mesure

Encadré I.1  Une mesure innovante de l’impact des catastrophes

La méthode classique de mesure des préjudices causés par les catastrophes passe par l’analyse séparée, d’une part, du nombre de décès, de blessés et d’autres préjudices subis par les populations, et d’autre part, des préjudices financiers causés par les catastrophes naturelles. Une nouvelle méthode de mesure de l’impact des catastrophes cherche à surmonter de nombreuses difficultés précédemment identifiées dans la littérature scientifique, notamment la difficulté à évaluer l’impact global des catastrophes, la nécessité de conduire des analyses coûts-avantages prenant en compte différents impacts des catastrophes et le problème de l’évaluation des préjudices compte tenu de leur valeur dans les contextes spécifiques à différents pays. En dépit de certaines différences conceptuelles, la nouvelle approche proposée est similaire au calcul par l’Organisation mondiale de la santé des années de vie corrigées du facteur invalidité (AVCI) perdues en raison de maladies et de blessures3. Toutes les mesures de l’impact des catastrophes sont converties en « années de vie » afin de permettre une comparaison mondiale des tendances d’évolution des pertes dues aux catastrophes. L’avantage de cette nouvelle mesure est qu’elle rend compte de l’impact plus général des catastrophes sur le bien-être humain et qu’elle permet une comparaison de ces impacts à travers la planète4. (Source : Noy, 2015.)

42

Partie I


commune (Noy, 2014), leur ampleur potentielle apparaît beaucoup plus clairement. Entre 1980 et 2012, plus de 1,3 milliard d’années de vie humaine ont été perdues dans le monde en raison des catastrophes signalées à l’échelle internationale (Ibid.), soit une moyenne annuelle de 42 millions d’années de vie humaine. Exprimées de cette manière, les pertes dues aux catastrophes sont plus ou moins équivalentes aux 43 millions d’années de vie humaine perdues chaque année à cause de la tuberculose, environ 20 % inférieures aux années de vie perdues à cause du paludisme et représentent environ la moitié des 90 millions d’années de vie perdues à cause du VIH/sida5. Les grandes catastrophes telles que le séisme de Christchurch ou les inondations de Bangkok en 2011 peuvent engendrer la perte d’un nombre significatif d’années de vie humaine au sein d’un seul pays. La Nouvelle-Zélande a perdu un total de près de 200 000 années de vie humaine à la suite du séisme de février 2011, ce qui représente environ 17 jours par habitant. En Thaïlande, 4,76 millions d’années de vie ont été perdues en 2011 dans les crues du fleuve Chao Phraya, ce qui représente environ 26 jours par personne (Noy, 2015).

Dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, les pertes sont généralement plus élevées que dans les pays à revenu élevé. En Chine, 557 438 270 années de vie ont été perdues entre 1990 et 2012, ce qui représente une perte de 162 jours par habitant (Figure I.1). En Turquie, le nombre total d’années de vie perdues au cours de la même période s’élève à plus de 4 millions, soit 25 jours par personne (Noy, 2015). Ces chiffres sont encore plus élevés si l’on inclut les années de vie perdues à cause des catastrophes signalées à l’échelle nationale. À l’échelle mondiale, les années de vie perdues en raison des catastrophes extensives représentent 20 % supplémentaires par rapport aux catastrophes signalées à l’échelle internationale et cette augmentation peut atteindre 130 % dans les pays à faible revenu. En Indonésie, par exemple, le calcul des années de vie perdues sur la base des données nationales pour la période 1990-2012 indique plus de 25 millions d’années de vie perdues, soit 42 jours par personne. Les petits États insulaires en développement comme les Tuvalu dans le Pacifique Sud subissent des pertes par habitant significativement plus importantes, de l’ordre de 4 ans par habitant depuis 1980 (Noy, 2015).

Figure I.1 Années de vie perdues en Chine (1990-2012) ota des années de vie perdues

ombre d années de vie perdues pour 100 000 abitants 5 000

0 000 000 our 100 000 abitants Dégâts Personnes touchées Nombre de morts

50 000 000

500 000 500

0 000 000

000 2 500

0 000 000

2 000 20 000 000

1 500 1 000

10 000 000

500

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

(Source : Noy, 2015.)

43


Figure I.2 Répartition des années de vie perdues en fonction du niveau de revenu nnées de vie perdues en 100 0 0 0 0 50 0 0 20 10

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 Faible

Intermédiaire de la tranche inférieure

Intermédiaire de la tranche supérieure

Moyenne

Élevé

(Source : Noy, 2014.)

Ces chiffres montrent clairement que les pertes dues aux catastrophes constituent un défi mondial pour le développement économique et le progrès social tout aussi crucial que les maladies, mais également qu’il s’agit d’un défi inégalement partagé. Plus de 90 % du total des années de vie perdues en raison de catastrophes sont répartis dans des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire (Figure I.2). En particulier, les années de vie perdues par habitant sont plus élevées dans les pays à faible revenu (Figure I.3). Figure I.3 Années de vie perdues en fonction de la population (1990-2012) nnées de vie perdues pour 100 000 abitants

Notes

50 000 0 000

1 Aide-mémoire de l’OMS n° 358, mars 2013 : http://www.who.int/ mediacentre/factsheets/fs358/fr/.

0 000

2 Données de la Banque mondiale : http://data.worldbank.org/ indicator/NY.GDP. MKTP.CD/countries/1W?display=graph.

20 000

3 http://www.who.int/topics/global_burden_of_disease/fr (consultation le 3 janvier 2015).

10 000

Élevé

Intermédiaire de la Intermédiaire de la tranche supérieure tranche inférieure

Pays à revenu

(Source : UNISDR, données de Noy, 2014.)

44

Partie I

Bien que les risques de catastrophe soient un problème universel qui affecte toutes les régions du monde et tous les niveaux de revenu, ces résultats suggèrent qu’en termes de défis pour le développement, ceux-ci pèsent plus lourdement sur les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, où ils sont concentrés. Comme examiné en détail dans les différents chapitres de cette section, ce sont précisément ces pays qui devront substantiellement augmenter leurs investissements et leurs dépenses sociales s’ils souhaitent réaliser les Objectifs de développement durable, alors même que ce sont également ces pays qui souffriront le plus de l’augmentation des risques de catastrophe.

Faible

4 Pour de plus amples informations concernant la méthodologie, voir Noy, 2014. 5 Calculs réalisés à l’aide des données AVCI de l’OMS : http://www. who.int/healthinfo/global_burden_disease/estimates/en/index2. html.


Chapitre 2

RĂŠduction des pertes dues aux catastrophes : une rĂŠussite partielle

45


Vingt-cinq ans après l’adoption de la Décennie internationale de la prévention des catastrophes naturelles (DIPCN) par les États membres de l’ONU et dix ans après l’adoption du CAH, les risques de catastrophe n’ont pas été réduits de manière significative à l’échelle mondiale. Bien que l’amélioration de la gestion des catastrophes ait conduit à des réductions significatives de la mortalité dans certains pays, les pertes économiques dues aux catastrophes atteignent aujourd’hui une moyenne de 250 à 300 milliards de dollars américains chaque année.

2.1

Sauver des vies

Au cours de la dernière décennie, la mortalité due aux catastrophes a été réduite de façon spectaculaire dans certains pays et régions. Tous les pays n’ont toutefois pas été en mesure de réduire les vulnérabilités liées à la mortalité due aux catastrophes plus rapidement que n’augmentait la population soumise à des aléas. Le super-cyclone qui a frappé l’État d’Odisha en Inde les 29 et 30 octobre 1999 a coûté la vie à 9 843 personnes. Quatorze ans plus tard, en octobre 2013, les pertes humaines ont pu être limitées à 47 personnes lorsque le cyclone Phailin, tout aussi puissant, balaya la même région. Cette réduction spectaculaire de la mortalité due aux catastrophes a été attribuée aux améliorations de la gestion des risques de catastrophe mises en place par le Gouvernement de l’État d’Odisha (GFDRR, 2013a ; PNUE, 2013). Orissa success story

L’Autorité de gestion des catastrophes de l’État d’Odisha (OSDMA) a été mise en place peu après le super-cyclone de 1999 (GFDRR, 2013a). Celle-ci a fait construire 200 abris anticycloniques et a développé des systèmes d’alerte précoce. Au cours de la dernière décennie, la mortalité due aux catastrophes a été réduite de façon spectaculaire dans certains pays et régions comprenant des réseaux de communication permettant d’avertir à la fois les collectivités exposées et les pêcheurs se trouvant en mer. Des digues furent construites pour la pro46

Partie I - Chapitre 2

tection contre les ondes de tempête et les inondations côtières. Lorsque des cyclones sont attendus, le niveau des réservoirs est désormais diminué afin de limiter les inondations à l’intérieur des terres. Dans le même temps, la vulnérabilité des zones urbaines a été évaluée et des codes de construction ont été introduits (GFDRR, 2013a ; PNUE, 2013). Par ailleurs, l’exactitude des prévisions établies par l’Institut météorologique indien (Indian Meteorological Department) a été grandement améliorée. En 2013, des avertissements ont été diffusés quatre jours avant que le cyclone Phailin ne touche le sol, ce qui constitue une amélioration significative par rapport au délai d’avertissement de deux jours donné en 1999 (PNUE, 2013). Enfin, le cyclone a touché le sol durant une période préélectorale, ce qui signifie que le gouvernement national et le gouvernement d’État ont tous deux déployé toutes les ressources disponibles afin de garantir une bonne gestion de la catastrophe et de limiter autant que possible ses impacts. Le cas d’Odisha illustre une tendance modélisée dans le Bilan mondial 2011 (UNISDR, 2011a), à savoir l’amélioration des conditions du développement et le renforcement de la gestion des catastrophes, qui conduisent à une réduction spectaculaire de la mortalité, du moins pour les événements où un avertissement est possible. À l’échelle mondiale, le risque de mortalité modélisé associé aux inondations et aux cyclones tropicaux a atteint un pic au cours de l’année 2000 avant d’entamer une diminution, selon les estimations1. En Asie de l’Est et dans le Pacifique2, par exemple, le nombre de personnes exposées aux inondations et aux cyclones tropicaux chaque année a augmenté d’environ 70 % depuis 1980, tandis que le risque de mortalité modélisé a


diminué de moitié, selon les estimations (UNISDR, 2011a). Cependant, en Afrique subsaharienne, les estimations indiquent que le risque de mortalité modélisé pour les inondations a connu une augmentation constante depuis 1980 (UNISDR, 2011a) parce que l’augmentation de la population exposée ne s’est pas accompagnée d’une réduction proportionnelle de la vulnérabilité. Tous les pays n’ont pas été en mesure de réduire les vulnérabilités liées à la mortalité due aux catastrophes plus rapidement que n’augmentait la population soumise à des aléas. Le risque de mortalité due aux catastrophes est étroitement corrélé au niveau de revenu et à la qualité de la gouvernance. Depuis 1990, près de 90 % des cas de mortalité enregistrés pour les catastrophes signalées à l’échelle internationale concernent les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire (Figure 2.1). Figure 2.1 Distribution de la mortalité due aux catastrophes selon le revenu (1990-2013) 100 % 90 % 80 % 70 % 60 %

Pays à revenu élevé Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure Pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure Pays à faible revenu

50 % 40 % 30 % 20 % 10

(Source : UNISDR, données EM-DAT.)

Confrontés à un nombre similaire de personnes soumises à des aléas et à des aléas de même gravité, les pays à faible revenu où la gouvernance est plus faible peuvent s’attendre à une augmentation des taux de mortalité sur plusieurs ordres de grandeur (UNISDR, 2009a). Ceci a été tragiquement confirmé avec les 138 366 décès causés selon les estimations par le cyclone Nargis lorsqu’il a frappé le Myanmar en 2008. 2008 Cyclone Nargis

De nombreux pays ont réalisé des progrès significatifs en termes de développement humain, de réduction de la pauvreté et pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). De 1990 à 2010, la proportion des personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté a été réduite de plus de moitié et est passée d’environ 43 % à un peu plus de 20 %3. Depuis 1990, la proportion de personnes vivant avec moins de 1,25 dollar américain par jour est passé de 51 % à 30 % en Asie centrale et de 56 % à 48 % en Afrique subsaharienne (ONU, 2014). Au cours de la même période, la mortalité avant l’âge de cinq ans est passée de 178 à 109 décès pour 1 000 naissances en Afrique subsaharienne et de 116 à 61 décès pour 1 000 naissances en Asie du Sud (Ibid.). La mortalité due aux catastrophes doit normalement diminuer à mesure que les conditions du développement s’améliorent et que la vulnérabilité est réduite. Les chances sont plus grandes de disposer de routes pour permettre les évacuations, de pouvoir apporter une assistance médicale rapide aux personnes touchées et que le niveau d’alphabétisation et d’enseignement primaire des populations soit suffisant pour que celles-ci comprennent les avertissements et les plans de préparation aux catastrophes. L’augmentation des revenus et le renforcement de la gouvernance sont également allés de pair avec l’amélioration de la gestion des catastrophes. Comme discuté dans la section II de ce rapport, les progrès réalisés par les systèmes d’alerte précoce, qui vont du suivi plus précis des événements météorologiques à l’augmentation importante de l’accès aux téléphones portables, tout comme de véritables améliorations de la préparation aux catastrophes et des moyens d’intervention, signifient qu’alors que les populations étaient souvent prises par surprise par les aléas, il existe à présent des plans d’intervention qui permettent une évacuation rapide vers des abris et des zones sûres. L’expérience d’Odisha n’est pas un cas isolé. Plusieurs autres pays à faible revenu et à revenu inter47


médiaire ont également réalisé des progrès spectaculaires dans la réduction du risque de mortalité depuis le lancement de la DIPCN (Encadré 2.1). Early warning: Sri Lanka

Les systèmes d’alerte précoce pour les tsunamis peuvent également être un moyen efficace de sauver des vies. L’un des résultats tangibles de l’adoption du CAH a été la création d’un Système d’alerte aux tsunamis et d’atténuation de leurs effets dans l’océan Indien. Toutefois, l’efficacité du système n’a pas été testée pour des tsunamis du type de celui survenu en 2004. Néanmoins, en dépit d’exceptions notables, l’alerte précoce est rarement efficace dans le cas des séismes. Les populations ne meurent pas dans les séismes : elles meurent dans les bâtiments qui s’effondrent ou prennent feu à la suite des séismes, et le temps est rarement suffisant pour évacuer vers des zones sûres et des abris. Par conséquent, nombre des améliorations apportées à la gestion des catastrophes qui se sont révélées si efficaces afin de réduire la mortalité due aux inondations et aux tempêtes n’ont pas permis d’obtenir les mêmes résultats dans le cas des séismes. Depuis 1990, environ 85 % des cas de mortalité enregistrés pour des séismes concernent les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire (Figure 2.4). Dans ces pays, le nombre des bâtiments soumis à des aléas augmente de façon exponentielle avec la rapidité du développement économique et la croissance urbaine. Toutefois, la qualité de la gouvernance urbaine, notamment l’application des codes de construction et des normes urbanistiques, est généralement plus faible que dans les pays à revenu élevé (UNISDR, 2009a). Par exemple, même dans un pays à revenu intermédiaire tel que la Turquie, le séisme de 1999, qui 48

Partie I - Chapitre 2

a coûté la vie à 17 000 personnes, a révélé que 65 % des immeubles d’appartements d’Istanbul et d’autres villes avaient été construits sans respecter les codes de construction locaux. Ce lourd tribut en vies humaines met donc en lumière un système inefficace d’application des codes, en partie à cause d’une corruption répandue qui explique que les personnes chargées de l’inspection aient fermé les yeux sur ces constructions déficientes (Moullier, 2014). Dans les pays à faible revenu en particulier, une proportion considérable du développement a lieu dans le secteur informel, par définition non réglementé. La situation est plus critique dans des pays comme Haïti, qui subissent rarement d’importants séismes et connaissent donc mal les risques (Neumayer et al., 2012), ce qui réduit un peu plus encore les chances d’une gestion urbanistique et d’une réglementation de la construction raisonnées en fonction des risques. En conséquence, alors que le développement économique peut conduire à un recul de la mortalité liée aux conditions météorologiques, il peut également faire augmenter la mortalité due aux séismes, étant donné que l’augmentation rapide de l’exposition excède la réduction des vulnérabilités obtenue en améliorant les normes en matière de construction et de gestion urbanistique. Lorsque le revenu d’un pays augmente, ces normes tendent à s’améliorer. Cependant, cela ne se traduit pas par une réduction visible de la mortalité à court terme. Il peut falloir des décennies avant de récolter les fruits de l’amélioration de la réglementation urbanistique et des normes de construction et d’enfin observer une réduction des pertes dues aux catastrophes, car il faut pour cela atteindre un nombre important de nouveaux bâtiments et un développement urbain raisonné en fonction des risques. Par conséquent, les pays qui ont introduit un nouveau code de construction parasismique dans le cadre du CAH n’observeront probablement pas les résultats de leurs efforts avant le milieu du siècle. Alors que le nombre des


Encadré 2.1 Vies sauvées

En règle générale, les pays qui sont parvenus à réduire significativement la mortalité due aux catastrophes ont également réussi à améliorer la gestion des catastrophes dans le contexte plus large de progrès des indicateurs du développement. Au Bangladesh, par exemple, un programme innovant d’abris anticycloniques a permis de réduire radicalement la mortalité due aux cyclones tropicaux depuis les années 1970. Au cours des dernières quatre décennies, le Bangladesh a été frappé par trois cyclones tropicaux d’envergure : Bhola (1970), Gorky (1991) et Sidr (2007). 2007 Cyclone Sidr Bhola a causé 300 000 décès selon les estimations et Gorky a été responsable de la perte de plus de 138 866 vies humaines. Quant à Sidr, le tribut payé en vies humaines n’était « que » de 4 234 personnes. Dans le même temps, la grande réussite du Bangladesh dans la réduction de la mortalité due aux cyclones tropicaux a été permise non seulement par les abris anticycloniques, mais également par une amélioration lente mais continue de l’éducation de base, de la santé et de l’assainissement, ainsi que par la réduction du nombre des personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté (Figure 2.2).

Figure 2.2 Progrès d’une sélection d’indicateurs de développement humain au Bangladesh

Figure 2.3 Recul de la pauvreté et de la mortalité avant l’âge de cinq ans au Mozambique

Bang ades sanitaires

Mozambique : taux de mortalité avant l'âge de cin ans pour 1 000 naissances

amé ioration des insta ations de a popu ation a ant acc s

70

00

60

250

50

200

40

150

30

100

20

50

10 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010

2013

Bang ades écart de pauvreté 1 25 do ar américain par our ppa

1

30

0

25

50

20

0

15

0

10

20

5

10 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010

(Source : UNISDR, données de la Banque mondiale.)

0 1992 1994 1996 1998 2000 2002 200

200

200

2010

201

Mozambique : écart de pauvreté à 1,25 dollar américain par our ppa

2013

1

0 1992 1994 1996 1998 2000 2002 200

200

200

2010

201

(Source : UNISDR, données de la Banque mondiale.)

En février et mars 2000, le Mozambique a subi d’importantes inondations qui ont touché plus de 4,5 millions de personnes et causé au moins 800 décès. Alors que les inondations de janvier 2013 n’étaient pas aussi graves que celles de 2000, le nombre des personnes décédées et touchées a été réduit de près de 90 %. Une réduction constante de la pauvreté extrême au Mozambique est allée de pair avec un recul spectaculaire du taux de mortalité avant l’âge de cinq ans, qui constitue un indicateur clé de l’Objectif n° 4 des OMD (Figure 2.3). Le pays est également parvenu à réduire significativement la mortalité due aux catastrophes au cours des 20 dernières années. De même, les ouragans survenus à Cuba en 1926 et 1932 ont respectivement causé environ 600 et 2 500 décès. En revanche, l’ouragan Dennis de 2005 n’a coûté la vie qu’à 16 personnes et l’ouragan Sandy de 2012 n’a causé que 11 décès.

49


Figure 2.4 Mortalité due aux séismes en fonction du niveau de revenu (1990-2013) 100

Pays à revenu élevé

0

Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure

0

Pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure

0 0

Pays à faible revenu

50

Non classés

0 0 20 10

(Source : UNISDR, données EM-DAT.)

bâtiments se trouvant dans des zones soumises à des séismes a considérablement augmenté depuis 1990, la mesure dans laquelle cette augmentation a été compensée par la réduction de la vulnérabilité reste floue. Les tendances de la mortalité due aux séismes n’ont pas été modélisées dans le Bilan mondial 2011 en raison de problèmes au niveau des données sous-jacentes. Étant donnée la fréquence peu élevée des séismes majeurs, il est difficile d’établir des comparaisons longitudinales entre les impacts d’événements similaires dans une même région, comme cela a été possible dans le

cas d’Odisha ou du Bangladesh. Des événements tels que le séisme de San Francisco en 1906 ou le séisme de Tokyo en 1923 ne se sont fort heureusement pas reproduits à ce jour. Dans le même temps, la mortalité due aux catastrophes se concentre principalement sur les catastrophes très intensives (Figure 2.5). Plus de 45 % de la mortalité totale due aux catastrophes depuis 1990 se concentre sur seulement quatre événements, à savoir le cyclone Gorky au Bangladesh en 1991, les tsunamis de l’océan Indien en 2004, le cyclone Nargis au Myanmar en 2008 et le séisme en Haïti en 2010. Bien que la mortalité puisse paraître en augmentation, cette tendance n’est pas statistiquement significative et change en fonction de la période choisie et des catastrophes intensives spécifiques survenues au cours de cette période.

2.2

Réduction des pertes économiques ?

Les pertes économiques augmentent en termes absolus. En revanche, en termes relatifs, l’augmentation mondiale des pertes économiques

Figure 2.5 La mortalité due aux catastrophes se concentre sur un petit nombre d’événements intensifs Nombre de personnes tuées 250 000 Aléas géophysiques (séismes, tsunamis et volcans)

Séisme et tsunami de l'océan Indien (2004)

Aléas météorologiques (dont climatiques et hydrologiques) Linéaire (TOUS) 200 000

Cyclone du Bangladesh (1991)

Séisme d’Haïti (2010)

Cyclone du Myanmar (2008)

150 000

100 000 R² = 0,0406

50 000

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

2004

(Source : UNISDR, informations issues des bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes.)

50

Partie I - Chapitre 2

2006

2008

2010

2012

2013


dues aux catastrophes n’est pas statistiquement significative. Toutefois, dans certaines régions, les pertes ont entravé la croissance du PIB. Alors qu’en termes absolus les pertes économiques se concentrent dans les pays à revenu élevé, en termes relatifs elles demeurent un problème beaucoup plus considérable pour les pays à revenu faible. La plupart des pays à revenu élevé disposent d’une réglementation de qualité et ont consenti des investissements afin de réduire de manière significative les strates les plus extensives des risques de catastrophe associés aux pertes survenant avec une courte période de retour. Par ailleurs, les citoyens de ces pays bénéficient d’un niveau élevé de protection sociale, notamment de services d’urgence et une couverture médicale efficaces, ce qui signifie que les pays à revenu élevé représentent moins de 12 % des cas de mortalité due aux catastrophes signalés à l’échelle internationale (Figure 2.1). Toutefois, alors même que les investissements dans la réduction des risques et les réglementations ont permis de réduire les risques extensifs, la valeur des actifs se trouvant dans des zones soumises à des aléas a augmenté, générant ainsi un accroissement des risques intensifs. Par exemple, les investissements dans des mesures de réduction des risques afin de protéger une plaine inondable contre une inondation d’une période de retour de 1 sur 20 ans peut avoir encouragé la poursuite du développement dans cette plaine inondable d’une manière qui accroît en réalité les risques associés à une inondation d’une période de retour de 1 sur 200 ans.

revanche, dans les pays où l’exposition aux aléas est élevée, les pertes semblent augmenter plus rapidement dans les pays à revenu élevé que dans les pays à revenu intermédiaire. Ceci reflète probablement le fait que dans les pays soumis à des aléas extrêmes avec un niveau élevé de risques intensifs, la réduction de la vulnérabilité est moins efficace pour réduire les risques que dans les pays présentant des risques plus extensifs. La tendance à l’accroissement de l’exposition aux aléas qui conduit à une augmentation des risques de pertes économiques a été modélisée dans le Bilan mondial 2011 (UNISDR, 2011a). Par exemple, selon les estimations, les risques de pertes économiques en cas de cyclone ont augmenté de 265 % depuis 1980 au sein de l’OCDE, de 181 % en Afrique subsaharienne et de 150 % dans toutes les autres régions. L’augmentation a été considérée comme plus élevée (262 %) dans les pays à revenu élevé que dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (165 %), les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (152 %) et les pays à faible revenu (155 %). Ces tendances modélisées semblent être confirmées par les données historiques sur les pertes. En termes absolus, plus de 60 % des pertes économiques signalées à l’échelle internationale se concentrent au sein de l’OCDE et d’autres pays à revenu élevé, ce qui reflète la concentration des actifs économiques (Figure 2.6). Figure 2.6 Pertes économiques dues aux catastrophes en fonction du niveau de revenu (1990-2013) 100 0

La relation n’est pas linéaire. Par exemple, la manière dont les pertes augmentent avec la richesse peut dépendre du niveau d’exposition aux aléas (Schumacher et Strobl, 2008). Dans les pays où l’exposition aux aléas est faible, les pertes semblent augmenter rapidement avec le développement économique pour ensuite chuter. En

0 0 0 50 0

Pays à revenu élevé Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure Pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure Pays à faible revenu Non classés

0 20 10

(Source : UNISDR, données EM-DAT.)

51


pertes estimées à 14 milliards de dollars américains, et le typhon Haiyan en novembre, avec des pertes de 13 milliards de dollars américains.

Selon Munich Reinsurance (Munich Re, 2013), les pertes globales et les pertes assurées ont connu une augmentation constante depuis 1980, pour atteindre une moyenne annuelle de 200 milliards de dollars américains en 2012 (Figure 2.7). Ceci concorde avec les chiffres de Swiss Reinsurance (Swiss Re, 2014a), qui indiquent également que les pertes économiques dues aux catastrophes suivent une tendance à la hausse jusqu’à atteindre une moyenne annuelle d’environ 200 milliards de dollars américains.

Les pertes économiques sont certes en augmentation en termes absolus, mais il s’agit là du reflet de l’augmentation du PIB (Neumayer et Barthel, 2010). Ceci confirme les résultats d’autres études (UNISDR, 2009a) qui démontrent qu’une fois corrigée de l’inflation et exprimée en proportion du PIB mondial, l’augmentation globale des pertes économiques dues aux catastrophes n’est pas statistiquement significative.

2013 Typhon Haiyan

Toutefois, il importe de relever certaines variations régionales à cet égard. Entre 1980 et 2010, le PIB par habitant a augmenté de 703 % en Asie de l’Est et dans le Pacifique et de 293 % en Asie du Sud. Ce développement a excédé la croissance de l’exposition dans les deux régions, ce qui signifie que les risques de pertes économiques ont en réalité diminué en termes relatifs. En revanche, dans les régions où la croissance économique est moins dynamique, par exemple l’OCDE, les risques de pertes économiques ont augmenté plus rapidement que le PIB par habitant.

En 2013, des pertes économiques dues aux catastrophes inférieures à la moyenne ont été enregistrées avec des estimations allant de 140 milliards de dollars américains (Swiss Re, 2014a) à 190 milliards de dollars américains (Aon Benfield, 2013). Les catastrophes qui ont eu les impacts économiques les plus importants en 2013 ont été les inondations d’Europe centrale en mai et juin, avec des pertes économiques totales estimées à 22 milliards de dollars américains (Encadré 2.2), un séisme survenu en Chine en avril, avec des

Figure 2.7 Pertes globales et pertes assurées dans le monde (1980-2013) Milliards de dollars américains 400 Pertes assurées (valeurs 2013)* Pertes globales (valeurs 2013)* *Pertes corrigées de l'inflation selon l'indice des prix à la consommation.

300

200

100

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

(Source : Munich Re, 2013: Geo Risks Research, NatCatSERVICE, à partir de janvier 2014.)

52

Partie I - Chapitre 2

1998

2000

2002

2004

2006

2008

2010

2012


Encadré 2.2 Inondations d’Europe centrale

À l’occasion d’un printemps inhabituellement humide en Europe centrale, le niveau des eaux souterraines était élevé et les sols étaient déjà saturés lorsque des précipitations d’un niveau exceptionnel sont survenues fin mai et début juin 2013, conduisant à de graves crues de l’Elbe et du Danube ainsi que de leurs affluents. Des précipitations d’une période de retour de 100 ans ont été enregistrées7, nécessitant l’évacuation de 52 500 personnes rien qu’en Allemagne et causant la mort de 25 personnes en République tchèque, en Allemagne et en Autriche. Les pertes économiques totales à travers l’Europe centrale ont été estimées entre 14,7 et 22 milliards de dollars américains (EM-DAT8 ; Munich Re, 2014 ; Zurich Insurance, 2014). Les événements de 2002 et 2013 représentent de loin les deux plus importantes inondations subies par l’Allemagne depuis 1900 (EM-DAT, 2014). Bien que de nombreuses zones furent touchées tout aussi sévèrement voire plus en 2013 qu’en 2002, la réduction des pertes suggère que des investissements ont été consentis dans la réduction des risques (Munich Re, 2014; Zurich Insurance 2014). Toutefois, le fait que 10 des 11 catastrophes subies par l’Allemagne atteignant le seuil du milliard de dollars américains soient survenues après 1990 indique clairement que les risques sont en augmentation.

Figure 2.8 Pertes économiques en fonction de la taille de l’économie (PIB) et du niveau de revenu (1990-2013) % du PIB 0,18 0,16 0,14 0,12 0,10 0,08 0,06 0,04 0,02

Pays à faible revenu

Pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure

Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure

Pays à revenu élevé

(Source : UNISDR, données EM-DAT et Banque mondiale.)

Dans le même temps, alors qu’en termes absolus les pertes économiques se concentrent dans les pays à revenu élevé, en termes relatifs elles demeurent un problème beaucoup plus considérable pour les pays à revenu faible (Figure 2.8). Ceci confirme que les pays qui ont le plus besoin d’investir dans des moyens supplémentaires, de nouvelles infrastructures, dans le développement des services sociaux et le développement économique continueront de rencontrer les difficultés les plus importantes à moins de réduire les risques de catastrophe. Pour ces pays, le développement sans la réduction des risques de catastrophe n’est pas durable.

Notes 1 Voir Figure 2.11, Bilan mondial 2011 (UNISDR, 2011a), http:// www.preventionweb.net/english/hyogo/gar/2011/en/what/chapter2_2_3.html. 2 Régions de la Banque mondiale. 3 Données de la Banque mondiale : http://data.worldbank.org. 4 www.ioc.tsunami.org. 5 Voir l’étude de cas sur le système d’alerte sismique précoce du Mexique au chapitre 7. 6 Dans la Figure 2.5 et les graphiques suivants, il est possible de déterminer si une tendance est significative ou non en prenant le carré du coefficient de corrélation r (R2), qui donne le coefficient de détermination. R2 est une mesure statistique qui indique si une donnée est adaptée à un modèle statistique. Le coefficient de détermination est généralement compris entre 0 et 1. Plus il est élevé, plus les données sont adaptées à la régression. 7 https://www.zamg.ac.at/cms/de/klima/news/wetter-beruhigtsich-allmaehlich (consultation le 23 décembre 2014). 8 www.emdat.be. 9 www.emdat.be.

53


54


Chapitre 3

Le paysage des risques mondiaux

55


Les pertes observées jusqu’ici peuvent expliquer le passé, mais elles n’apportent pas nécessairement un éclairage pertinent pour l’avenir. La plupart des catastrophes susceptibles de se produire n’ont pas encore eu lieu. À l’échelle mondiale, les pertes annuelles moyennes (PAM) prévisionnelles causées par les cyclones tropicaux (vents et ondes de tempête), les séismes, les tsunamis et les inondations sont aujourd’hui estimées à 314 milliards de dollars américains pour les seules zones construites. Ce risque constitue un véritable défi pour l’agenda mondial du développement durable.

3.1

Accumulation des coûts prévisibles

Les pertes observées jusqu’ici peuvent expliquer le passé, mais elles n’apportent pas nécessairement un éclairage pertinent pour l’avenir. La plupart des catastrophes susceptibles de se produire n’ont pas encore eu lieu (UNISDR, 2013a). L’évaluation probabiliste des risques simule les catastrophes qui, sur la base des connaissances scientifiques, sont susceptibles de survenir. En conséquence, une telle évaluation des risques résout le problème posé par les limites des données historiques. Même en disposant de données historiques concernant les inondations et les sécheresses extrêmes couvrant un siècle entier pour

un pays donné, tout modèle établi à partir de ces données ne serait pas capable de prévoir les événements extrêmes similaires à ceux survenus au cours des 1 000 dernières années (Figure 3.1). Les modèles probabilistes « complètent » par conséquent les données historiques en reproduisant la physique des phénomènes étudiés et en recréant l’intensité d’un grand nombre d’événements synthétiques. À ce titre, ils fournissent une image plus complète de l’ensemble des risques futurs que ne le font les données historiques. Bien que les données et les connaissances scientifiques utilisées demeurent incomplètes, ces modèles peuvent néanmoins fournir, pour peu que leur degré d’incertitude soit reconnu, de pré-

Figure 3.1 Limitations de l’échantillon des données disponibles concernant les aléas

Données à long terme

1250

1300

1350

Aléas extrêmes

(Source : GFDRR, 2014.)

56

Partie I - Chapitre 3

1400

Taille d'échantillon

1450

1500

1550

1600

1650

1700

1750

Périodes de retour des aléas à long terme (par date)

1800

1850

1900

1950

2000


cieuses indications quant à l’« ordre de grandeur » vraisemblable des risques.

un risque vital pour les personnes qui ont déjà du mal à survivre au quotidien.

Les résultats des modèles de risque probabilistes sont en principe présentés à travers des mesures telles que les pertes annuelles moyennes (PAM). Ces PAM représentent les pertes moyennes prévisionnelles annualisées sur une longue période.

Pour les revenus plus élevés, ces pertes ne sont pas vitales, mais sont néanmoins comparables aux autres causes potentielles d’une perte de revenu disponible pour les ménages. Par exemple, aux États-Unis d’Amérique, le prix de l’électricité a augmenté de 0,24 dollar américain par kilowattheure en 2011, ce qui signifie que la facture mensuelle de chaque ménage a en moyenne augmenté de 24 dollars américains par an4. Si le risque était partagé de manière égale par l’ensemble de la population mondiale, et en supposant un nombre moyen de trois personnes par ménage5, chaque ménage devrait constituer une réserve de 210 dollars américains par an pour couvrir les pertes potentielles dues aux catastrophes, c’està-dire neuf fois la réduction du revenu disponible des ménages engendrée par l’augmentation du coût de l’électricité.

Elles représentent les réserves que les différents pays devraient constituer chaque année afin de couvrir les coûts des catastrophes futures en l’absence de polices d’assurance adéquates ou d’autres mécanismes de financement des risques de catastrophe. Les risques de catastrophe doivent être envisagés comme des coûts prévisibles (décrits comme « une nouvelle catégorie d’actifs toxiques » dans le Bilan mondial 2013). Lorsqu’un pays ignore les risques de catastrophe et leur permet de s’accumuler, il compromet son potentiel de développement socio-économique. En revanche, lorsque ce pays investit dans la réduction des risques de catastrophe, il peut alors réduire les pertes potentielles auxquelles il est confronté au fil du temps et libérer des ressources indispensables pour le développement. À l’échelle mondiale, les pertes annuelles moyennes (PAM) prévisionnelles causées par les cyclones tropicaux (vents et ondes de tempête), les séismes, les tsunamis et les inondations sont aujourd’hui estimées à près de 314 milliards de dollars américains pour les seules zones construites1. Elles représentent les réserves à constituer chaque année dans le monde afin de couvrir les pertes futures associées à ces aléas. Si ce risque était partagé de manière égale au sein de la population mondiale, il serait équivalent à une perte annuelle de près de 70 dollars américains par membre de la population active2, ou à deux mois de revenus pour les personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté3. Ceci représente

Au niveau macro-économique, les PAM mondiales sont presque équivalentes au PIB des économies à revenu élevé telles que la Nouvelle-Zélande ou le Koweït, ou à 10 fois le revenu national brut du Niger6. Elles sont également significativement plus élevées que le coût de la violence armée hors conflit7, qui est actuellement estimé à une fourchette comprise entre 95 et 163 milliards de dollars américains (Déclaration de Genève, sans date). Les PAM mondiales sont également supérieures au coût total estimé des conflits armés sur le continent africain depuis 1990 (IANSA et al., 2007) et représentent près de 40 fois la valeur des investissements internationaux consacrés à la lutte contre le VIH/sida en 2013 (ONUSIDA, 2014). Elles sont significativement supérieures aux investissements totaux consacrés à l’eau et à l’assainissement en Chine ou en Inde. Plus significatif encore, elles sont presque équivalentes au financement annuel mondial estimé nécessaire dans des domaines tels que les infrastructures de transport ou l’éducation afin de réaliser les objectifs de développement durable (ODD) (CNUCED, 57


2014). À moins d’être pris en compte, les coûts prévisibles représentés par les risques de catastrophe menaceront par conséquent la réalisation des ODD. Les PAM ont été calculées dans le cadre du nouveau modèle de risque mondial, le premier de sa

catégorie à fournir une couverture mondiale pour de multiples aléas. Bien qu’un nombre croissant d’évaluations de risques soient aujourd’hui réalisées pour des aléas spécifiques et des portefeuilles d’actifs soumis à ces derniers, il a jusqu’ici été difficile d’estimer les risques de catastrophe mondiaux en raison d’importantes lacunes géo-

Encadré 3.1  Modèle de risque mondial encadré par l’UNISDR

Depuis 2011, l’UNISDR dirige l’élaboration d’un modèle multi-aléa de risque mondial en partenariat avec des organisations scientifiques et techniques de premier plan9. L’objectif est de fournir des mesures relativement générales des risques de catastrophe, qui soient comparables, accessibles à tous et qui couvrent les différents pays et catégories d’aléa afin de sensibiliser les différents acteurs vis-à-vis des risques de catastrophe. Ceci comble une lacune majeure dans la compréhension des risques. La plupart des évaluations probabilistes du risque ont été développées à des fins commerciales pour le secteur de l’assurance ainsi que pour couvrir des risques spécifiques, principalement dans les pays à revenu élevé. Toutefois, ces évaluations sont rarement accessibles, car elles reposent sur des modèles propriétaires. Alors qu’un nombre croissant de modèles de risque accessibles à tous sont aujourd’hui développés, l’utilisation de différentes méthodologies et ensembles de données complique les comparaisons. Dans le cadre de l’évaluation menée par l’UNISDR, des modèles probabilistes des aléas ont été développés pour les séismes, les cyclones tropicaux et les ondes de tempête, les tsunamis et les crues des rivières à l’échelle mondiale, pour les cendres volcaniques dans la région Asie-Pacifique et pour la sécheresse dans certaines régions d’Afrique. Un modèle d’exposition mondial pour les zones construites a été développé avec une résolution de 1 km x 1 km le long des lignes côtières et de 5 km x 5 km ailleurs. Des fonctions de vulnérabilité adéquates ont été utilisées sur la base des connaissances de spécialistes dans chaque région. Les impacts du changement climatique sur les aléas cycloniques dans les Caraïbes ainsi que sur la sécheresse en Afrique ont également été modélisés. La plate-forme ouverte de modélisation des risques multi-aléa CAPRA10 est utilisée pour le calcul des risques. À ce stade, le modèle du risque d’inondation est encore en cours de finalisation, ce qui signifie que les estimations de ce risque présentées dans ce chapitre doivent être considérées comme provisoires et susceptibles d’être modifiées. La principale mesure du modèle de risque mondial utilisée dans ce rapport est le montant des pertes annuelles moyennes (PAM), c’est-à-dire la prime de risque pure (normalisée en fonction de la valeur ou des actifs exposés). Cette mesure représente les pertes annuelles moyennes prévisionnelles lorsque tous les événements susceptibles de survenir au cours d’une longue période sont pris en compte. Il s’agit d’une mesure synthétique peu sensible aux incertitudes. Contrairement aux estimations historiques, les PAM prennent en compte toutes les catastrophes susceptibles de survenir à l’avenir, y compris les pertes très intensives pour de longues périodes de retour, et surmontent donc les limitations associées aux estimations qui s’appuient sur les données historiques sur les pertes dues aux catastrophes. L’autre mesure utilisée représente les pertes maximales probables (PMP), c’est-à-dire les pertes maximales prévisibles pour une période donnée. En principe, les PMP permettent de déterminer l’ampleur des réserves qu’une compagnie d’assurance ou un gouvernement doit constituer pour pouvoir faire face aux pertes. La probabilité fait référence à la fréquence ou à la période de retour des pertes associées aux différents aléas. La notion de période de retour est fréquemment mal comprise. Lorsqu’une perte a une période de retour de 500 ans, cela ne signifie pas que la perte survient tous les 500 ans. Si la perte survenait aujourd’hui, cela ne signifierait pas qu’elle se produirait à nouveau dans 500 ans. Cela signifie simplement qu’en moyenne, l’aléa survient une fois tous les 500 ans. Par exemple, si nous disposions de statistiques concernant les pertes de différentes intensités sur une période de 1 000 ans (Figure 3.2), nous pourrions voir que neuf pertes excèdent une intensité de 60 sur cette période. Les intervalles entre ces pertes fluctuent entre 60 et 200 ans. Toutefois, les pertes d’une intensité de 60 ont été dépassées en moyenne tous les 100 ans : c’est précisément là la notion de période de retour. Exprimée d’une manière différente, la probabilité annuelle d’une perte excédant une intensité de 60 est de 0,1 %. Les PMP pour différentes périodes de retour peuvent par conséquent être exprimées comme la probabilité d’excéder un montant de pertes donné sur différentes périodes (Tableau 3.1). Même dans le cas d’une période de retour de 1 000 ans, il existe donc toujours une probabilité de 5 % d’excéder un niveau de PMP au cours d’une période de 50 ans. Cette mesure est par exemple pertinente pour les planificateurs et les concepteurs de projets d’infrastructure, où des investissements peuvent être réalisés pour une durée prévisionnelle de 50 ans. Dans le cadre du développement de modèles de risque, de nombreux ensembles de données sont utilisés. Le niveau d’incertitude est directement lié à la qualité de ces données. Durant le développement d’un modèle, les avis de spécialistes ainsi que des approximations sont fréquemment utilisés en l’absence de données empiriques et les résultats sont

58

Partie I - Chapitre 3


graphiques et de l’utilisation d’ensembles de données et de méthodologies différents par les évaluations mondiales couvrant chaque aléa8. En utilisant la même méthodologie, les mêmes calculs et le même modèle d’exposition afin de calculer le risque pour tous les aléas, le nouveau modèle de risque mondial (Encadré 3.1) permet

de comparer le niveau du risque dans les différents pays ou régions, ainsi que pour différents types d’aléa. Il permet ainsi une meilleure cartographie et compréhension des risques mondiaux, une estimation de l’ordre de grandeur des pertes dans chaque pays et un calcul de la contribution de chaque aléa en termes de risque.

Figure 3.2 Périodes de retour Ampleur des pertes 120

110

60

70

200

120

190

70

80

100

80

60

40

20

1000

1200

Pertes

Seuil

1400

1600

1800

2000

Période entre les pertes

Année

(Source : UNISDR.)

très sensibles à la plupart de ces hypothèses et variations dans les données utilisées. C’est pourquoi tous les chiffres présentés dans ce chapitre pour les PAM et les PMP doivent être considérés comme des indicateurs de l’ordre de grandeur des risques et non comme des valeurs exactes. Par exemple, les courbes des PMP développées pour les mêmes modèles d’aléas et d’exposition changent lorsque des fonctions de vulnérabilité différentes sont utilisées, bien que l’ordre de grandeur demeure le même (Figure 3.3). L’amélioration de la qualité des données et les progrès réalisés dans les connaissances scientifiques et les méthodologies de modélisation réduisent le niveau d’incertitude. Il est néanmoins crucial d’interpréter les résultats de n’importe quelle évaluation de risque sans perdre de vue certaines incertitudes inévitables. Tableau 3.1 Probabilités de différentes périodes de retour PMP pour différentes périodes de retour

Probabilité de dépassement des pertes par an

25 50

Probabilité de dépassement des pertes sur une période de 20 ans

Probabilité de dépassement des pertes sur une période de 50 ans

5

Pertes [millions de dollars américains] 000 Courbe des PMP utilisant les fonctions de vulnérabilité CIMNE & INGENIAR 2 500 Courbe des PMP utilisant les fonctions de vulnérabilité des experts de la région Asie-Pacifique 2 000 1 500

2

100

1

250

0 0

1

500

0 20

10

1 000

0 10

(Source : UNISDR.)

Figure 3.3 Sensibilité des résultats à la qualité des données utilisées

1

1 000

2

5

500

500

1 000

(Source : CIMNE-INGENIAR, 2014.)

1 500

2 500 2 000 Période de retour (années)

59


Les données relatives aux PAM mondiales illustrent la répartition des risques de catastrophe à travers les différents pays, les niveaux de revenu, les zones géographiques et les types d’aléa. Elles permettent donc d’établir un classement des différents pays en fonction du niveau de risque et d’effectuer des comparaisons. Toutefois, étant donnés les limitations liées à leur précision mondiale et leur manque de granularité, elles ne sont pas appropriées pour le développement de stratégies de gestion des risques nationales ou locales détaillées, notamment des programmes de financement des risques. Elles peuvent toutefois être utilisées par les gouvernements pour établir un profil de risque national initial, afin d’encourager le développement d’évaluations détaillées dans des secteurs et des territoires spécifiques pouvant servir de base à des stratégies d’investissement publiques et privées ainsi qu’à la conception de programmes de financement des risques. L’estimation des PAM mondiales est extrêmement prudente pour trois raisons. Tout d’abord, les PAM n’englobent pas tous les aléas et les secteurs pertinents. Elles ne représentent que les risques matériels directs pour les bâtiments résidentiels et commerciaux, les écoles, les hôpitaux et d’autres bâtiments publics et industriels. Elles n’englobent pas les risques pour des infrastructures telles que les routes et les ponts, les ports et les aéroports, les réseaux de distribution d’énergie, d’électricité et de télécommunication, les barrages et les mines, ou encore pour l’agriculture. Par ailleurs, elles ne prennent en compte qu’un certain nombre d’aléas mondiaux potentiels. Si les risques associés aux tempêtes extra-tropicales, aux conséquences du gel et de la neige, aux tempêtes de sable et aux tornades étaient également pris en compte, les chiffres seraient beaucoup plus élevés. Deuxièmement, les risques extensifs, associés aux petits événements localisés et fréquents, ne sont pas pris en compte. L’analyse de 85 séries de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes présentée au chapitre 4 montre que cette 60

Partie I - Chapitre 3

strate de risque peut représenter jusqu’à 40 % des pertes économiques, en particulier dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. Troisièmement, les PAM ne prennent pas en compte les pertes et les impacts indirects. Bien qu’il soit difficile d’établir une valeur mondiale, les éléments fournis pour des pays spécifiques montrent que ces pertes indirectes peuvent excéder les coûts directs, en particulier lorsqu’une économie est peu résiliente. Par comparaison au revenu de référence en l’absence de catastrophe, l’impact d’une catastrophe majeure peut conduire à une réduction du PIB allant jusqu’à 20 % au cours des années qui suivent un événement dévastateur. Un exemple fréquemment cité est l’impact de l’ouragan Mitch au Honduras en 1998. Les pertes directes subies par les zones construites lors du séisme d’Haïti en 2010 représentaient 80 % des pertes directes totales et 47 % de l’ensemble des pertes directes et indirectes (Gouvernement de la République d’Haïti, 2010), ce qui illustre bien que les pertes subies par les zones construites en cas de catastrophe ne représentent qu’une partie des pertes totales. Quant aux inondations de mai 2014 en Serbie, les pertes pour les zones construites représentaient 54 % des pertes directes totales et seulement 31 % de l’ensemble des pertes directes et indirectes, auxquelles le secteur agricole contribuait à hauteur de 8 % (Gouvernement de la République de Serbie, 2014).

3.2

Un défi pour les investissements en capital et les dépenses sociales

En termes absolus, les PAM mondiales se concentrent dans les grandes économies à revenu élevé exposées à des aléas. Toutefois, par rapport aux investissements en capital ou aux dépenses sociales annuels, de nombreux pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, en particulier les petits États insulaires en développement (PEID), présentent la plus importante concentration de risques.


Les risques de catastrophe ne sont pas uniformément répartis à travers la planète, mais reflètent la construction sociale des aléas, de l’exposition et de la vulnérabilité dans les différents pays sous l’effet de différents facteurs de risque (UNISDR, 2009a). À l’échelle mondiale, la distribution des PAM reflète la valeur et la vulnérabilité des actifs concentrés sur les lignes côtières soumises à des cyclones ou des tsunamis, le long de lignes de faille sismiques ou dans les bassins versants soumis aux inondations.

les États-Unis d’Amérique (Figure 3.4). Toutefois, le caractère disproportionné des risques qui pèsent sur les pays à faible revenu par rapport à la taille de leur économie ou à la valeur de leurs actifs a été reconnu à de maintes reprises (UNISDR, 2009a; 2011a; 2013a). Par rapport aux investissements en capital annuels, par exemple, de nombreux pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, en particulier les petits États insulaires en développement (PEID), présentent la plus importante concentration de risques (Figure 3.5).

En termes absolus, les PAM mondiales se concentrent dans les grandes économies à revenu élevé soumises à des aléas telles que le Japon et

Multi-hazard AAL

Figure 3.4 Pertes annuelles moyennes multi-aléa mondiales

Pertes annuelles moyennes (PAM) multi-aléa

[millions de dollars américains] Séismes, inondations, vents cycloniques, ondes de tempête et tsunamis < 146 146-244 244-420 420-927 927-3 300 >3 300

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial.)

Figure 3.5 Pertes annuelles moyennes multi-aléa mondiales par rapport aux investissements en capital11

Pertes annuelles moyennes (PAM) multi-aléa relatives

en pourcentage des investissements en capital Séismes, inondations, vents cycloniques, ondes de tempête et tsunamis Aucune donnée sur la FBCF < 0,5 0,5-1 1-5 5-10 10-20 20-100

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

61


Le niveau des risques de catastrophe dans un pays donné est par conséquent non seulement influencé par les PAM en termes absolus, mais également par la manière dont les risques de catastrophe sont susceptibles de compromettre les investissements en capital et les dépenses sociales.

risquent des pertes cinq fois plus importantes que les pays à revenu élevé (Figure 3.7).

La valeur des actifs mondiaux12 est largement concentrée dans des régions telles que l’Asie de l’Est et le Pacifique, l’Europe et l’Asie centrale, ainsi que l’Amérique du Nord13. Toutefois, en termes relatifs et selon les estimations, l’Amérique latine et les Caraïbes perdraient chaque année une part quatre fois plus élevée de leurs actifs par rapport à l’Europe et à l’Asie centrale et une part deux fois plus élevée par rapport aux pays de l’Amérique du Nord (Figure 3.6)14.

La relation entre les PAM et les actifs est essentielle afin d’évaluer la nécessité d’une gestion corrective des risques de catastrophe, en d’autres termes la nécessité d’investissements visant à protéger ou à moderniser les actifs immobiliers existants soumis à des aléas. En particulier, les pays qui présentent un ratio très élevé des PAM par rapport aux actifs doivent investir dans la gestion corrective des risques afin d’éviter de perdre des actifs essentiels pour le développement. Ceci est particulièrement important pour les pays où la croissance est atone et où les investissements sont faibles, et qui éprouveraient des difficultés à remplacer les actifs perdus en raison de catastrophes.

La comparaison des différents niveaux de revenu révèle que les PAM des pays à revenu élevé sont environ 25 fois plus élevées que celles des pays à faible revenu. Toutefois, par rapport à leurs actifs et selon les prévisions, les pays à faible revenu

Les différents pays doivent également prendre en considération la relation entre les PAM et les investissements en capital (formation brute de capital fixe ou FBCF). D’une manière générale, les capacités d’investissement en capital des pays à

Figure 3.6 Pertes annuelles moyennes multi-aléa par rapport aux actifs par région

Actifs [milliers de milliards de dollars américains]

Pertes annuelles moyennes - PAM [milliards de dollars américains] 180

Asie de l'Est et Pacifique 95

120

60

Europe et Asie centrale 84

Amérique du Nord 62

Moyen-Orient et Afrique du Nord 11 0,5

Amérique latine et Caraïbes 19 Asie du Sud 7

Afrique subsaharienne 4 1

1,5

2

2,5 PAM / Actifs [%]

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

62

Partie I - Chapitre 3


Figure 3.7 Pertes annuelles moyennes multi-aléa par rapport aux actifs et en fonction du niveau de revenu

Actifs [milliers de milliards de dollars américains]

Pertes annuelles moyennes - PAM [milliards de dollars américains] 300

200

Pays à revenu élevé 202

Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure 61

100

Pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure 14 0,1

0,2

0,3

Pays à faible revenu 1 0,4

0,5

0,6

0,7 PAM / Actifs [%]

(Source : modèle de risque mondial du Bilan mondial.)

faible revenu sont inférieures à celles des pays à revenu élevé. Toutefois, les risques de catastrophe peuvent représenter une proportion beaucoup plus élevée desdits investissements dans les pays à faible revenu, ce qui constitue un défi pour leur développement économique. Le niveau des investissements en capital par rapport aux actifs existants est très différent en fonction du niveau de revenu : il représente environ 30 % dans les pays à faible revenu, contre seulement 10 % dans les pays à revenu intermédiaire et 5 % dans les pays à revenu élevé. Par conséquent, les nouveaux investissements annuels consentis par les pays à faible revenu représentent une part significative de leurs actifs totaux. Un ratio élevé des PAM par rapport aux investissements en capital représente une menace pour le développement futur. La gestion prospective des risques revêt donc une importance capitale afin de garantir que les nouveaux investissements n’augmentent pas les risques de catastrophe. D’une région à l’autre, les investissements en capital varient de 12 à 33 % du PIB15 ; les PAM va-

rient donc significativement en termes relatifs. En Asie du Sud, les PAM représentent près de 5 % des investissements en capital annuels, contre seulement 1,23 % en Europe et en Asie centrale (Figure 3.8). En Europe et en Asie centrale, les PAM représentent un pourcentage plus faible des investissements en capital annuels qu’en Asie de l’Est et dans le Pacifique. Toutefois, les investissements en capital annuels en Europe et en Asie centrale représentent actuellement un peu plus d’un quart de ceux consentis en Asie de l’Est et dans le Pacifique. Comme indiqué plus haut, ceci souligne l’importance d’investir dans la gestion corrective des risques de catastrophe dans les pays où l’économie est atone, car les risques de catastrophe peuvent venir éroder leur potentiel de croissance déjà limité. Des risques significatifs pèsent également sur les investissements en capital dans les autres régions. Les investissements en capital annuels en Amérique latine et dans les Caraïbes sont actuellement inférieurs au tiers de ceux consentis en Asie de 63


Figure 3.8 Pertes annuelles moyennes multi-aléa par rapport aux investissements en capital par région

Investissements en capital [milliards de dollars américains]

Pertes annuelles moyennes - PAM [milliards de dollars américains] 180

Asie de l'Est et Pacifique 02

120

Europe et Asie centrale 0 2

Amérique du Nord 5

60

Amérique latine et Caraïbes 1 20 Afrique subsaharienne 303 0,5

Asie du Sud 627

Moyen-Orient et Afrique du Nord 763 1

1,5

2

2,5

3

3,5

4

4,5

5

PAM / Investissements en capital [%]

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

l’Est et dans le Pacifique. Toutefois, les PAM représentent plus de 3 % de ces investissements, contre 1,89 % en Asie de l’Est et dans le Pacifique. Ceci constitue un frein significatif au développement futur. Les investissements en capital annuels sont environ 10 fois plus importants dans les pays à revenu élevé que dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure. Toutefois, par rapport aux investissements en capital, les PAM de ces régions sont comparables, ce qui indique que les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure auront plus de difficultés à atteindre leurs objectifs de développement (Figure 3.9). Dans de telles circonstances, une croissance soutenue est impossible, a fortiori une croissance durable. En Asie, par exemple, les PAM du Myanmar représentent 30 % des investissements en capital annuels du pays. Elles représentent respectivement 14 et 10 % aux Philippines et au Cambodge. En Amérique latine, les PAM du Honduras et du Guatemala représentent respectivement près de 64

Partie I - Chapitre 3

18 % et environ 10 % des nouveaux investissements en capital. Les risques de catastrophe constituent également un défi en termes de développement social. Alors qu’en termes absolus, les dépenses sociales sont les plus faibles en Asie du Sud, les PAM y représentent plus de 10 % de ces dépenses. Les risques de catastrophe menacent donc précisément les dépenses sociales dans les pays dont les moyens sont les plus limités et où la nécessité d’investir est la plus grande. Par exemple, les dépenses sociales en Afrique subsaharienne représentent un peu plus de 1 % de celles de l’Asie de l’Est et du Pacifique, ou environ 3 % de celles de l’Amérique latine et des Caraïbes. Toutefois, les PAM en Afrique subsaharienne sont équivalentes à près de 3 % de cet investissement limité. De même, alors que les dépenses sociales annuelles sont environ 400 fois plus importantes dans les pays à revenu élevé que dans les pays à faible revenu, les PAM dans les pays à faible revenu sont équivalentes à environ 22 % des dépenses


sables à la réalisation des objectifs de développement durable, ceci souligne une fois de plus que ces objectifs ne peuvent être atteints à moins de prendre en compte les risques de catastrophe.

sociales, contre seulement 1,45 % dans les pays à revenu élevé (Figure 3.10). Étant donné que les dépenses consacrées à la protection sociale, à la santé publique et à l’éducation sont indispen-

Figure 3.9 Pertes annuelles moyennes multi-aléa par rapport aux investissements en capital et en fonction du niveau de revenu

Investissements en capital [milliards de dollars américains]

Pertes annuelles moyennes - PAM [milliards de dollars américains] 300

200

Pays à revenu élevé 0

Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure 5

100

Pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure 1 25 Pays à faible revenu 432

1

1,5

2

2,5

3

PAM / Investissements en capital [%]

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

Figure 3.10 Pertes annuelles moyennes multi-aléa par rapport aux dépenses sociales et en fonction du niveau de revenu

Dépenses sociales [milliards de dollars américains]

Pertes annuelles moyennes - PAM [milliards de dollars américains] 00

Pays à revenu élevé 1 0 2

100

Pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure 2 51 Pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure 399 5

10

15

Pays à faible revenu 34 20

25

0

PAM / Dépenses sociales [%]

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

65


Plusieurs pays plus importants tels que le Myanmar, Madagascar, les Philippines et le Honduras sont confrontés à des défis particulièrement difficiles à cet égard, car les PAM représentent près de 55 % des dépenses sociales au Honduras, près de 69 % aux Philippines, plus de 80 % à Madagascar et 200 % au Myanmar (Figure 3.11). Dans les pays d’Amérique latine tels que l’Équateur, le Guatemala et le Pérou, les PAM représentent plus de 15 % des dépenses sociales annuelles.

3.3

Profils de risques spécifiques par aléa

Les différents aléas peuvent être considérés comme représentant différentes strates de risque et sont par conséquent associés à plusieurs niveaux de fréquence et d’impact. Il importe de comprendre l’impact de ces différents aléas et leurs interdépendances avec les facteurs de vulnérabilité et d’exposition afin de créer des modèles de risque spécifiques.

Les chiffres des PAM utilisés pour ces estimations agrègent les pertes annuelles prévisionnelles liées aux différents aléas (Figure 3.12), qui représentent différentes strates de risque. Par exemple, la fréquence des tsunamis est habituellement très faible alors que leurs impacts sont importants, tandis que les cyclones tropicaux sont beaucoup plus fréquents et engendrent habituellement des impacts modérés à élevés. Les séismes sont moins fréquents, mais peuvent causer des pertes plus importantes, c’est-à-dire causer des préjudices significatifs sur des superficies importantes, tandis que les inondations sont plus fréquentes. En revanche, les tsunamis affectent habituellement une superficie relativement limitée au-delà de la ligne côtière. Ces différences de fréquence et de superficie touchée déterminent la contribution des différents aléas dans les PAM mondiales. Par exemple, même s’il contribue à seulement 0,29 % dans les PAM mondiales, le risque de tsunami peut avoir un impact local dévastateur comme l’ont montré les événements survenus dans l’océan Indien en 2004 et au Japon en 2011.

Figure 3.11 Top 15 : pertes annuelles moyennes multi-aléa par rapport aux dépenses sociales (à l’exclusion des PEID)

PAM

[millions de dollars américains] Myanmar Madagascar

20

Honduras

[millions de dollars américains] 10

243

Philippines

293 11 1

812

Bangladesh

1

0

République Démocratique Populaire Lao

225

Cambodge

251

50 0

Bhoutan

177

Gabon

20

Afghanistan

239

Pérou Guatemala Équateur

0 771 1

0 1 125 1

2 0 5

Émirats Arabes Unis

754

25

Malawi

32

198

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

66

Partie I - Chapitre 3

PAM / Dépenses sociales

Dépenses sociales

[%]

50

100

150

200

250


Figure 3.12  Contribution de chaque aléa aux PAM mondiales

Inondations 104 milliards de dollars américains 33 %

Tsunamis 3,7 milliards de dollars américains 1% Ondes de tempête 49,8 milliards de dollars américains 16 %

Séismes 113 milliards de dollars américains 36 %

Vents 44 milliards de dollars américains 14 %

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial.)

Séismes Les séismes sont peu fréquents, mais peuvent engendrer des pertes importantes sur une superficie considérable. Au Japon et sur les côtes pacifiques des États-Unis d’Amérique et du Chili, le risque de séisme est caractérisé par la concentration très importante d’actifs dans des zones à forte activité sismique. Toutefois, la vulnérabilité des actifs immobiliers est faible grâce à des normes de construction satisfaisantes, une longue histoire sismique et une solide gouvernance. Dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire tels que le Bangladesh, la Chine, l’El Salvador, l’Iran, le Népal, les Philippines et la République dominicaine, la vulnérabilité des actifs immobiliers contribue de façon beaucoup plus importante aux risques. Les aléas sismiques dépendent de l’ampleur et de la localisation des séismes potentiels, de leur fréquence et des propriétés des roches et des sédiments traversés par les ondes sismiques. Des séismes tectoniques peuvent survenir partout où une faille active existe et leur ampleur dépend de la superficie du plan de faille rompu. Bien que les séismes ne puissent pas être prévus, l’analyse scientifique peut fournir des informations concernant la fréquence potentielle et la magnitude de ces événements. Les séismes peuvent également déclencher des aléas secondaires, par exemple des glissements de terrain, la liquéfaction du sol ou encore des tsunamis.

Le risque de séisme contribue à hauteur de 113 milliards de dollars américains aux PAM mondiales. À titre indicatif, ce chiffre est équivalent aux dépenses publiques annuelles en matière d’éducation pour l’ensemble du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, ou à 50 % des dépenses de santé publique en Amérique latine et dans les Caraïbes. Les pays où les PAM sont les plus élevées en termes absolus sont les États-Unis d’Amérique, le Japon et l’Italie. Cependant, par rapport aux actifs et aux investissements en capital, le risque est significativement plus élevé dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire (Figure 3.13). Au niveau des régions, c’est sur l’Amérique latine et les Caraïbes ainsi que sur le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord que pèsent les risques les plus élevés en termes relatifs. Dans ces régions, les PAM dues aux séismes sont respectivement équivalentes à 1,6 et 1 % des investissements en capital, contre 0,6 % en Europe et en Asie centrale et 0,4 % en Amérique du Nord16. Il s’agit de régions où les actifs immobiliers soumis à des aléas se développent dans le contexte d’une réglementation insuffisante et où une gestion prospective des risques de catastrophe est essentielle afin d’éviter leur accumulation. Les pays à revenu intermédiaire tels que le Honduras, le Guatemala, le Pérou et le Tadjikistan présentent tous un ratio élevé des PAM par rapport aux investissements en capital. Le risque de séisme est également devenu un problème important pour les pays qui ont connu une récession économique sévère et où les investissements en capital ont été fortement réduits. Par exemple, les investissements en capital annuels de la Grèce s’élèvent aujourd’hui approximativement à seulement 2,5 % des actifs immobiliers, c’est-à-dire un peu plus de la moitié du niveau observé dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure tels que le Pérou. Par conséquent, les PAM dues aux séismes atteignent à pré67


Figure 3.13 Top 15 : PAM dues aux séismes par rapport aux actifs (à l’exclusion des PEID) PAM

[millions de dollars américains] Honduras 0

Équateur

12

Grèce

5 10

Guatemala

02

El Salvador

250

Kirghizistan

2

Colombie

1 0

Tadjikistan Géorgie

Afghanistan

[%]

2

4

10

5

Pérou

Chili

PAM / Actifs

Actifs

[millions de dollars américains]

2

5

2 2 05 11 12 1 2 12 15 1 1 5 20 5

1

5

2

2

15

1

01

Iran (République islamique d')

1 1

20

Nicaragua

73

5

Arménie

45

22

0

5

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

sent 10 % des investissements en capital annuels de la Grèce. Earthqua e ris profiles

Quant aux PMP, une perte équivalente à plus de 8 % de la valeur des actifs de la Grèce (Figure 3.14) et plus de 300 % des investissements en capital annuels a une probabilité de 4 % sur une période de 20 ans. Les PAM du pays sont également équivalentes à près de 2,5 % du revenu national brut (RNB). On ne peut établir clairement si ce coût prévisible a été pris en compte lorsque la communauté internationale a consenti 200 milliards d’euros de prêts à la Grèce afin de soutenir son économie entre 2010 et 2012. En réalité, le risque de séisme pourrait bien avoir des répercussions sur le système financier et devenir de plus en plus systémique. La Figure 3.14 présente les 15 pays (à l’exclusion des PEID) susceptibles de perdre la part la plus élevée d’actifs avec une probabilité de 10 % sur 68

Partie I - Chapitre 3

une période de cinquante ans (PMP pour une période de retour de 500 ans). Comme on peut Figure 3.14 Top 15 : PMP dues à des séismes d’une période de retour de 500 ans par rapport aux actifs (à l’exclusion des PEID) PMP pour une période de retour de 1 sur 500 ans par rapport aux actifs [%] 4

8

Honduras Équateur Géorgie Colombie Grèce Pérou El Salvador Slovénie Tadjikistan Guatemala Lesotho République Arabe Syrienne Malawi État de Palestine Japon

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial.)

12


niques a été observée dans le Pacifique occidental (Figure 3.15). Les tempêtes les plus faibles surviennent à proximité de l’équateur, lorsqu’elles se trouvent dans les premiers stades de leur développement ; lorsqu’elles traversent des terres et perdent de leur puissance ; et aux latitudes moyennes, là où la température de l’eau est plus basse17. Dans de nombreux pays, les risques sont lourdement influencés par la concentration des actifs économiques et de la population le long des côtes, c’est-à-dire l’exposition de ces derniers à des aléas. Dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire toutefois, la vulnérabilité des actifs immobiliers est un facteur de risque important dont l’impact augmente encore dans le cas des cyclones de faible intensité (UNISDR, 2011a).

le constater, ces pertes potentielles sont importantes et représentent de 2 à 12 % des actifs totaux de ces pays. Ces pertes sont équivalentes à respectivement 800 % des investissements en capital annuels de Trinité-et-Tobago, 100 % de ceux du Pérou et 90 % de ceux du Japon. Afin d’éviter un risque systémique, il importe de prendre en compte ces coûts prévisibles lors de l’octroi de prêts internationaux ou du recours à d’autres instruments financiers. Cyclone ris profiles

Cyclones tropicaux Les pertes annuelles moyennes mondiales dues aux vents cycloniques et aux ondes de tempête sont estimées à 80 milliards de dollars américains, ce qui équivaut à 1,4 fois les dépenses totales de santé publique en Afrique ou 85 % des dépenses combinées de l’Australie et de la NouvelleZélande en matière d’éducation publique.

Les vents forts et la faible pression de l’air dans l’œil d’une tempête peuvent également provoquer des ondes de tempête atteignant jusqu’à 10 mètres de haut. Contrairement aux vents, les ondes de tempête ne peuvent causer des dégâts significatifs que le long des côtes, en fonction de la pente du fond marin dans la zone où le cyclone touche le sol (Graham et Riebeek, 200619). Les ondes de tempête peuvent être extrêmement destructrices et les pertes sont fortement dépen-

L’intensité des cyclones tropicaux est déterminée par la vitesse des vents, qui touchent à la fois les zones côtières et l’intérieur des terres. Historiquement, la plus forte concentration de vents cyclo-

Figure 3.15 Historique du parcours des cyclones tropicaux dans le monde

c e e de Sa ir Simpson c assi ication de ’intensité des ouragans épression tropica e

emp te tropica e

1

2

3

4

5

(Source : NASA .) 18

69


dantes de l’exposition, en particulier dans les zones dépourvues de structures de protection côtières. Cyclone tracks

Comme dans le cas des séismes, les PAM dues aux cyclones tropicaux (vents et ondes de tempête) se concentrent, en valeur absolue, dans de grands pays tels que le Japon et les États-Unis d’Amérique, où les actifs soumis à des aléas sont importants (Figure 3.16). Elles n’y représentent toutefois que respectivement 1 et 2 % de leurs investissements en capital. En revanche, bien que les PAM des Philippines représentent moins d’un quart de celles des États-Unis d’Amérique, elles y correspondent à près de 12 % des investissements. À l’exception des PEID, les Philippines et Madagascar sont les pays où la part la plus importante des investissements en capital est soumise à des risques, ce qui souligne à nouveau l’importance d’une gestion prospective des risques de catastrophe.

L’estimation précise du risque d’onde de tempête exige des données détaillées concernant l’exposition et la morphologie du sol marin. Des évaluations de risque détaillées sont par exemple nécessaires dans les zones soumises aux ondes de tempête telles que Belize City (Encadré 3.2). sunami ris profiles

Tsunamis Les PAM mondiales dues aux tsunamis sont estimées à 530 millions de dollars américains. Ce chiffre est significativement inférieur à celui obtenu pour les autres aléas, car l’impact des tsunamis est très localisé le long des côtes. De plus, bien que les tsunamis soient très destructeurs, ils sont également très peu fréquents. Plus de 80 % des tsunamis sont causés par des séismes. Cependant, d’autres phénomènes tels que les glissements de terrain ou les éruptions volcaniques sous-marins et subaériens peuvent également provoquer des tsunamis ou contribuer

Figure 3.16 Top 15 : PAM dues aux cyclones tropicaux par rapport aux investissements en capital (à l’exclusion des PEID) PAM

Investissements en capital

[millions de dollars américains] Philippines Madagascar

1 20

Taïwan, province de Chine Japon

0 22

55

5

5 2 2 2 10 52 5

République Populaire Démocratique de Corée RAS de Hong Kong, Chine

[millions de dollars américains]

5 1 012

5 5

Bangladesh

5

Myanmar États-Unis d'Amérique

2 2 55

Nouvelle-Zélande

1 1 1

2

0 0

2

5 0

Mozambique

0

5

Honduras Inde

1

Australie

1 205

Mexique

716

5 2 251 2 5 22

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

70

Partie I - Chapitre 3

PAM / Investissements en capital [%]

5

10

15


Encadré 3.2 Risque de vents forts et d’ondes de tempête à Belize City

Dans le cadre d’une évaluation soutenue par la Banque interaméricaine de développement, les PAM dues aux cyclones tropicaux (ouragans) à Belize City ont été estimées à 37 millions de dollars américains (ERN-AL, 2010). À travers la collecte d’informations détaillées sur les catégories de bâtiments, la topographie et la bathymétrie, il a été possible d’identifier les zones à risque vis-à-vis des ouragans (vents et ondes de tempête). Risques liés aux cyclones tropicaux - Ondes de tempêtes (PAM par bâtiment)

Risques liés aux cyclones tropicaux - Vents forts (PAM par bâtiment)

PAM Relatives [%] 0 - 0,68

0,69 - 1,20

1,21 - 1,70

1,71 - 2,30

Dans le cas des ondes de tempête (carte de gauche), seules les zones à faible altitude situées à une certaine distance de la côte sont soumises à un risque, alors que les risques liés aux vents sont répartis à travers la ville (carte de droite). Ces résultats ont servi de base à l’élaboration d’un plan d’intervention d’urgence conçu par l’Organisation nationale de gestion des situations d’urgence (NEMO, National Emergency Management Organization). Des activités de formation ont par ailleurs été menées avec de nombreuses institutions afin d’évaluer les aléas et les risques à travers une approche probabiliste. Les risques ont été évalués sur la base du niveau actuel des aléas ainsi que de scénarios futurs de changement climatique.

2,31 - 4,28

Résultats Valeur exposée Perte annuelle moyenne

millions de dollars américains millions de dollars américains

12 0 37,36 2,91

PMP Période de retour Années 250 500

Perte millions de dollars américains

12 5 1 10

1 000

50 1

1 500

5 5 25

% 2 22 01 0 25

(Source : CIMNE-INGENIAR, 2014.)

à leur occurrence. Par exemple, le tsunami survenu en 1998 en Papouasie-Nouvelle-Guinée, qui a coûté la vie à 2 182 personnes (EM-DAT, 201420), a été provoqué par un glissement de terrain sous-marin, lui-même déclenché par un séisme. Dans les régions telles que l’Indonésie orientale (Løvholt et al., 2012 et 2014) et les Caraïbes (Harbitz et al., 2012), les tsunamis dus à des glisse-

ments de terrain et à des éruptions volcaniques sont plus fréquents et contribuent à une part significative des risques. En haute mer, la vitesse des vagues d’un tsunami peut dépasser les 970 km/h. Lorsqu’un tsunami touche le sol, la hauteur des vagues peut atteindre 30 mètres au-dessus du niveau de la mer, 71


voire plus. La vitesse des vagues d’un tsunami et la distance parcourue à l’intérieur des terres dépendent de la topographie de la zone côtière et de la couverture terrestre21. Les vagues du tsunami de Tohoku au Japon en 2011 ont atteint 10 m de haut et ont touché plus de 400 km de côtes22. Étant donné que les tsunamis les plus importants n’endommagent pas simplement les actifs matériels situés à proximité des côtes, mais les détruisent entièrement, le risque de tsunami est lourdement influencé par l’exposition. Ceci est confirmé par les résultats du modèle de risque mondial, qui montrent que le risque de tsunami est concentré dans un nombre relativement faible de pays (Figure 3.17). D’un point de vue géographique, l’Asie de l’Est et le Pacifique présentent de loin les PAM dues aux tsunamis les plus élevées en termes absolus. En particulier, les PAM dues aux tsunamis sont beaucoup plus élevées au Japon que partout ailleurs.

Figure 3.17 Top 15 : PAM dues aux tsunamis (à l’exclusion des PEID) PAM [millions de dollars américains] 50

100

150

200

000

Japon États-Unis d'Amérique RAS de Hong Kong, Chine Chine Australie Indonésie Philippines Nouvelle-Zélande Inde Taïwan, province de Chine Colombie Chili RAS de Macao, Chine Égypte Pérou

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial.)

Étant donné que le risque de tsunami ne constitue qu’une petite part du risque multi-aléa, il n’est pas directement comparable aux dépenses sociales ou aux investissements en capital, que ce soit par région ou par niveau de revenu.

de leurs actifs en raison du risque de tsunami sur une période de 50 ans (PMP pour une période de retour de 500 ans). Ceci inclut des territoires tels que Macao et Hong-Kong, où les actifs sont lourdement concentrés le long des côtes, ainsi que des pays plus vastes tels que les Philippines ou la Nouvelle-Zélande (Figure 3.18).

L’impact potentiel des tsunamis sur une économie, que ce soit au niveau local, national ou même mondial, ne peut toutefois pas être ignoré étant données les répercussions engendrées dans les pays où des installations sensibles telles que des centrales nucléaires sont installées en zone côtière. Ceci a été mis en lumière par le tsunami de Tohoku en 2011, qui a causé environ 130 milliards de dollars américains de dégâts aux bâtiments et un total de 210 milliards de dollars américains de préjudices économiques directs, notamment pour les infrastructures et le secteur de l’agriculture (GFDRR, 2012a). Il existe une probabilité de 10 % qu’un certain nombre de territoires et de pays perdent une part significative

Crues des rivières Les inondations touchent plus de personnes dans le monde que n’importe quel autre aléa. Celles-ci peuvent prendre de nombreuses formes, notamment les crues éclairs, les inondations côtières, les inondations dues au ruissellement et les inondations pluviales. Dans le cadre de cette analyse, le risque d’inondation23 est calculé en ne prenant en compte que les crues des rivières et la mesure d’intensité utilisée est la profondeur de l’eau. Pour les inondations fréquentes à petite échelle, les risques peuvent être estimés statistiquement à l’aide des données historiques. En revanche, pour les grandes inondations, une approche probabiliste est nécessaire.

72

Partie I - Chapitre 3


Figure 3.18 Top 15 : PMP dues à des tsunamis d’une période de retour de 500 ans par rapport aux actifs PMP pour une période de retour de 500 ans

Actifs

[millions de dollars [millions de dollars américains] américains]

RAS de Macao, Chine

1 12

RAS de Hong Kong, Chine

11 1

Japon

5

0,5

1

[%] 1,5

2

25

0

1 250 0

2 8

Philippines

05

255 20

Tonga

1 0 5

Palaos

0

Îles Salomon Nouvelle-Zélande

PMP pour une période de retour de 1 sur 500 ans / Actifs

1 1

5

Indonésie

550

Micronésie (États Fédérés de)

2

Vanuatu

05 2 2

5

1 2 10

Papouasie-Nouvelle-Guinée

58

01

Kiribati

1

5 5

Colombie

10

5

Australie

5 2

1 5

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

Les risques d’inondation devraient être gérés à travers des mesures prospectives telles que la planification de l’aménagement du territoire. Néanmoins, le développement continu de l’immobilier industriel, commercial et résidentiel dans des plaines inondables ainsi que le changement climatique ont fait des inondations un risque très dynamique. Des mesures correctives telles que des protections contre les inondations peuvent éviter les pertes jusqu’à un certain seuil et des pays comme le Japon ou les Pays-Bas ont consenti des investissements majeurs à cet effet. Les protections contre les inondations peuvent toutefois encourager la poursuite du développement dans les plaines inondables, avec des conséquences dévastatrices en cas d’événement grave et peu fréquent excédant le seuil de protection. En revanche, le risque d’inondation dans les pays à faible revenu reflète fréquemment un manque de moyens permettant d’investir dans la protection contre les inondations. iver oods ris profiles

Comme l’ont montré les crues du fleuve Chao Phraya en Thaïlande en 2011, les inondations peuvent être corrélées à d’importantes pertes équivalentes à celles causées par les séismes ou les cyclones tropicaux. Les inondations de Thaïlande ont également révélé un risque pour les chaînes d’approvisionnement mondiales lorsque des entreprises sont concentrées dans des plaines inondables (UNISDR, 2013a ; CEO Risk Forum, 2012). Une analyse récente des « zones à risque cachées » sur les marchés émergents a révélé que d’autres pays peuvent subir des pertes potentielles encore plus importantes que celles de la Thaïlande à la suite d’inondations (Swiss Re, 2012) : la Chine arrive en tête, suivie par le Brésil, la Russie et l’Inde (Figure 3.19). Les inondations causent également des pertes majeures dans les pays à revenu élevé. Alors que le préjudice économique annuel moyen causé par les inondations au Royaume-Uni est par exemple de l’ordre de 250 millions de dollars américains (Penning-Rowsell, 2014), ce pays a connu en 2012 la deuxième année la plus humide jamais 73


Figure 3.19 Classement des zones à risque face aux inondations sur les marchés émergents

Top 10 Top 20 Top 30 Classements inférieurs Non pris en compte

(Source : Swiss Re, 2012.)

enregistrée (derrière 2007) avec des pertes dues aux inondations atteignant approximativement 1,8 milliard de dollars américains. Selon les estimations du RMS UK Inland Flood Model, près de la moitié des pertes annuelles moyennes prévisionnelles dues aux inondations seraient imputables à des crues de grands fleuves, le reste étant réparti entre les crues de petites rivières et de ruisseaux, les crues éclairs, les inondations pluviales et les précipitations importantes et localisées (RMS, 2013). Le gouvernement britannique lui-même estime qu’environ 2,4 millions de propriétés sont soumises à un risque de crue ou d’inondation côtière au cours d’une année (National Audit Office, 2014). Le risque d’inondation contribue à hauteur de 104 milliards de dollars américains aux PAM mondiales. À titre indicatif, ce chiffre est équivalent à deux fois les dépenses de santé publique au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, ou 30 % des dépenses de l’Amérique latine et des Caraïbes en matière d’éducation publique. Les pays où les PAM sont les plus élevées en termes absolus sont la Chine, les États-Unis d’Amérique 74

Partie I - Chapitre 3

et l’Inde. Toutefois, par rapport à leurs actifs, c’est un autre groupe de pays de l’Asie du Sud-Est qui affiche les PAM les plus élevées dues aux crues des rivières, à savoir le Myanmar, la République démocratique populaire lao et le Cambodge (Figure 3.20). Par rapport aux investissements en capital, de nombreux pays à faible revenu et à revenu intermédiaire de la tranche inférieure présentent un niveau élevé de PAM dues aux inondations (Figure 3.21) parce qu’ils n’ont pas pu consacrer les mêmes investissements que les pays à revenu élevé à des systèmes de protection contre les inondations. Par exemple, les PAM dues aux inondations au Myanmar et en Somalie représentent plus de 20 % des investissements en capital de ces pays. Ceci souligne l’importance d’une gestion prospective des risques afin de protéger les nouveaux investissements. Les PAM dues aux inondations représentent également une part importante des dépenses sociales. Le Myanmar est par exemple confronté à des PAM équivalentes à environ 200 % de ses dépenses sociales totales (Figure 3.22). La République


démocratique populaire lao, le Bangladesh, le Cambodge et le Bhoutan sont tous confrontés à des PAM qui représentent environ un tiers de leurs dépenses sociales.

Ceci signifie que les inondations représentent un défi significatif tant en termes d’investissements en capital que de développement social pour de nombreux pays à faible revenu et à revenu inter-

Figure 3.20 Top 15 : PAM dues aux inondations par rapport aux actifs (à l’exclusion des PEID) PAM

[millions de dollars américains] Myanmar

1 5

1 5

220

21 2

Cambodge

251

2

0

Guyane française

1

1

00

2

1 55

Viet Nam

22 5

5

Somalie

2

0

République de Moldova

101

Hongrie

0

[%] 0

0

1

12

2

Bhoutan

Serbie

02

0

République démocratique populaire lao

Bangladesh

PAM / Actifs

Actifs

[millions de dollars américains]

11 0

1

5

15

5 2

1 0

Népal

143

5

Iraq

344

1 2 500

Tadjikistan

20 5

République démocratique du Congo

2

02

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

Figure 3.21 Top 15 : PAM dues aux inondations par rapport aux investissements en capital (à l’exclusion des PEID) PAM

Myanmar

[millions de dollars américains]

1 5

Somalie

2

Cambodge

251

Swaziland

[%] 15

20

25

0

1

2

5 21 2 1

Bangladesh

2

5

220

550

22 5

0

République de Moldova

101

1

Malawi

2

500

Bhoutan

55

1 01

Tadjikistan Lesotho

10

2

15

Viet Nam

5

1

Hongrie

République démocratique populaire lao

PAM / Investissements en capital

Investissements en capital

[millions de dollars américains]

2

1 200 0

Érythrée

13

Ukraine

1 15

22

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

75


Figure 3.22 Top 15 : PAM dues aux inondations par rapport aux dépenses sociales (à l’exclusion des PEID)

PAM

[millions de dollars américains] Myanmar République démocratique populaire lao Bangladesh

PAM / Dépenses sociales

Dépenses sociales [millions de dollars américains]

1 5

10

220

50

50

[%] 100

150

200

2

Cambodge

251

Bhoutan

55

Gabon

200

0 1 0

République centrafricaine

5

40

Madagascar

36

2

Malawi

24

1

Guinée

1

15

Pakistan

10 0

02

Viet Nam

22 5

21 5 1

Népal

143

1 5

Congo

126

12 1

Érythrée

13

130

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

médiaire de la tranche inférieure, qui ne sont pas en mesure de réaliser les investissements requis dans des systèmes de protection contre les inondations. Dans ces pays, l’augmentation des investissements dans la gestion des risques d’inondation constituera par conséquent une condition préalable à la réalisation des objectifs de développement durable.

3.4

La vulnérabilité des petits États insulaires en développement

De par leur taille, leur localisation et leur profil économique, les PEID se trouvent particulièrement affectés par les risques de catastrophe. Par rapport à leurs actifs, à leurs investissements et à leurs dépenses sociales, ils sont exposés aux pertes potentielles les plus élevées pour plusieurs aléas. Les petits États insulaires en développement (PEID)24 sont confrontés à des risques disproportionnellement élevés. Par exemple, les PEID devraient perdre chaque année une part 20 fois 76

Partie I - Chapitre 3

plus importante de leurs actifs par rapport à l’Europe et à l’Asie centrale. Ils arrivent également en tête de tous les classements des risques par pays par rapport aux investissements en capital ou aux dépenses sociales. Leurs pertes annuelles moyennes combinées représentent 10 % de leurs investissements en capital annuels totaux, contre moins de 2 % en Asie de l’Est et dans le Pacifique, et environ 1,2 % en Europe et en Asie centrale (voir Figure 3.8 à la section 3.2 ci-dessus). De même, les PAM dans les PEID sont équivalentes à près de 20 % de leurs dépenses sociales totales, contre seulement 1,19 % en Amérique du Nord et moins de 1 % en Europe et en Asie centrale. Certains pays comme les Bahamas et Antigua-etBarbuda présentent un ratio extraordinairement élevé des PAM par rapport aux dépenses sociales (Figure 3.23). Dans cinq PEID, les PAM sont équivalentes à plus de 100 % du montant que ces pays sont actuellement capables ou désireux de consacrer à l’éducation, à la santé et à la protection sociale.


Figure 3.23 Top 15 : PAM multi-aléa par rapport aux dépenses sociales dans les PEID

PAM

[millions de dollars américains] Bahamas

Dépenses sociales [millions de dollars américains]

21 0 269

102

Saint-Kitts-et-Nevis

82

73

Dominique

69

66

Sainte-Lucie

47

55

Vanuatu

67

87

Saint-Vincent-et-les-Grenadines

2 24

[%]

100

200

300

5

Antigua-et-Barbuda

Porto Rico

PAM / Dépenses sociales

1 37

Tonga

33

5

Haïti

204

368

Belize

94

200

Fidji

132

05

Bermudes

61

1 5

Grenade

30

74

Jamaïque

462

1 51

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

Dans le cas des séismes, les PAM représentent plus de 20 % des investissements de Trinité-etTobago et plus de 10 % de ceux de Saint-Kitts-etNevis. Sur une période de 50 ans, les deux pays font face à une probabilité de 10 % de perdre environ 27 % de leurs actifs totaux à la suite d’un séisme (Figure 3.24). Dans le cas des cyclones tropicaux, presque tous les pays affichant les PAM les plus élevées par rapport aux investissements en capital, aux actifs et aux dépenses sociales sont des PEID (Figure 3.25).

ondes de tempête est supporté par les Bahamas, Montserrat et la Dominique (Figure 3.26). Figure 3.24 Top 15 : PMP dues à des séismes d’une période de retour de 500 ans par rapport aux actifs dans les PEID

PMP pour une période de retour de 1 sur 500 ans / Actifs [%] Saint-Kittset-Nevis

5

10

15

20

25

30

Trinité-etTobago Anguilla Montserrat Dominique

À cause d’une exposition côtière élevée, les ondes de tempête contribuent largement aux PAM dues aux cyclones tropicaux dans les PEID. En revanche, elles ne représentent qu’une faible part des PAM globales dues aux cyclones dans les grands pays, où les vents peuvent affecter non seulement les côtes, mais également l’intérieur des terres sur d’importantes superficies. Alors que les Îles Caïmanes et Antigua-et-Barbuda affichent les PAM dues aux vents cycloniques les plus élevées en termes relatifs, le risque relatif le plus élevé lié aux

Îles Vierges Britanniques Aruba Guadeloupe Haïti Antigua-etBarbuda Barbade Grenade Martinique Sainte-Lucie Tonga

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

77


Quant au risque de tsunami, des PEID tels que les Tonga, Palaos, les Îles Salomon et le Vanuatu se classent également en tête des PAM par rapport aux actifs. Bien que les PAM semblent relativement faibles par rapport aux autres aléas (Figure 3.27), le risque de tsunami est significatif tant en termes absolus que relatifs dans les zones côtières qui sont directement exposées. Sachant que dans les PEID, une grande partie des infrastructures sensibles et des moyens de transport se trouve dans des zones côtières (UNISDR, 2013a), l’impact d’un tsunami peut être significatif. Global temperature anomalies

3.5

Impacts supplémentaires du changement climatique

Bien que le changement climatique puisse engendrer une réduction des pertes prévisionnelles dans certaines régions, pour d’autres, il modifie le profil des aléas et accroît la vulnérabilité, et par conséquent les pertes globales prévisionnelles. Celles-ci seront en particulier significatives dans les Caraïbes. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a souligné le peu de confiance accordé aux augmentations observées à long terme (c’est-à-dire, sur une période de

Figure 3.25 Top 15 : PAM dues aux cyclones tropicaux par rapport aux dépenses sociales, aux investissements en capital et aux actifs

[%] 20

40

60

80

100

Bahamas

Antigua-et-Barbuda

Dominique

Tonga

Vanuatu

Porto Rico

Palaos

Saint-Kitts-et-Nevis

Sainte-Lucie

Philippines

Fidji

Îles Salomon

Madagascar Saint-Vincentet-les-Grenadines Belize

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

78

Partie I - Chapitre 3

PAM / Dépenses sociales PAM / Investissements en capital PAM / Actifs

300


40 ans ou plus) dans l’activité des cyclones tropicaux (intensité, fréquence et durée) après la prise en compte de l’évolution des moyens d’observation. Il est vraisemblable que la fréquence mon-

diale des cyclones tropicaux va soit diminuer soit demeurer essentiellement inchangée. Toutefois, la vitesse maximale des vents des cyclones tropicaux devrait vraisemblablement augmenter, bien que

Figure 3.26 Top 15 : PAM dues aux cyclones tropicaux (ondes de tempête et vents cycloniques) par rapport aux actifs dans les PEID PAM (ondes de tempête) / Actifs [%] 1

2

PAM (vents) / Actifs [%]

3

1

Bahamas

Îles Caïmanes

Montserrat

Antigua-etBarbuda

Dominique

Îles Turques et Caïques

Nouvelle Calédonie

Bahamas

Îles Vierges Américaines

Îles Vierges Américaines

Antigua-etBarbuda

Îles Vierges Britanniques

Anguilla

Montserrat

Tonga

Porto Rico

Vanuatu

Palaos

Guadeloupe

Tonga

Îles Caïmanes

Guadeloupe

Fidji

Nouvelle Calédonie

Sainte-Lucie

Vanuatu

Saint-Vincentet-les-Grenadines

Anguilla

Îles Salomon

Dominique

2

3

4

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial.)

Figure 3.27 Top 15 : PMP dues à des tsunamis d’une période de retour de 500 ans par rapport aux actifs dans les PEID PMP pour une période de retour de 1 sur 500 ans

Actifs

[millions de dollars américains]

[millions de dollars américains]

8

1 0

Palaos

4

0

Îles Salomon

14

Tonga

Micronésie (États Fédérés de)

2

1

Vanuatu

4

2 10

Papouasie-Nouvelle-Guinée

58

01

Kiribati

1

595

Guadeloupe

19

1 11

Nouvelle Calédonie

8

1 11

Îles Marshall

0,4

Polynésie Française

11

22 002

Samoas Américaines

1

1

Antigua-et-Barbuda

PMP pour une période de retour de 1 sur 500 ans / Actifs [%]

0,2

0,4

0,6

0 25

Fidji

2

11 5 1

Porto Rico

15

25 0 0

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial.)

79


cette augmentation puisse ne pas être observée dans tous les bassins océaniques (GIEC, 2012). Dans les Caraïbes, les risques associés aux vents des cyclones tropicaux ont été recalculés sur la base des trajectoires cycloniques prévisionnelles dans le bassin nord-atlantique, simulées à l’aide de scénarios de changement climatique allant jusqu’à 2055 (CIMNE-INGENIAR, 2014a) et avec pour hypothèse une exposition et une vulnérabilité constantes. Dans la plupart des pays, les PAM augmentent lorsqu’on prend en compte le changement climatique (Figure 3.28). Pour le bassin des Caraïbes dans son ensemble, le changement climatique accroît les pertes annuelles moyennes prévisionnelles dues aux seuls vents de 1,4 milliard de dollars américains, en excluant la varia-

tion des PAM associées aux ondes de tempête provoquées par l’élévation du niveau des océans. Les pays des Caraïbes étant collectivement responsables d’une faible part des émissions mondiales de gaz à effet de serre, cette augmentation des PAM de 1,4 milliard de dollars américains soulève d’importantes questions quant à la responsabilité pour les risques créés et à l’identification des responsables tenus de payer pour ces pertes supplémentaires. olcanic ris profiles

Dans certains pays, l’impact du changement climatique est très significatif. Par exemple, les PAM imputables aux vents cycloniques sont multipliées par deux en Anguilla et par cinq à Trinitéet-Tobago en raison du changement climatique.

Figure 3.28 PAM dues aux vents des cyclones tropicaux dans les Caraïbes et en Amérique centrale, avec et sans changement climatique PAM [millions de dollars américains] 500

1 000

1 500

2 000

000

Porto Rico Bahamas Guadeloupe République Dominicaine Mexique Îles Caïmanes Jamaïque Martinique Cuba Antigua-et-Barbuda Îles Vierges Américaines Îles Vierges Britanniques Bermudes Honduras Trinité-et-Tobago Saint-Kitts-et-Nevis Haïti Barbade Aruba Venezuela (République Bolivarienne du)

(Source : CIMNE-INGENIAR, 2014.)

80

Partie I - Chapitre 3

Sans prendre en compte le changement climatique En prenant en compte le changement climatique

5 000


En revanche, le Mexique bénéficierait en réalité d’une réduction des PAM, ce qui montre que les effets du changement climatique ne sont pas uniformément répartis et affectent chaque pays de manière différente.

3.6

Risques volcaniques

Les nouveaux résultats des évaluations des risques volcaniques montrent que bien que les pertes prévisionnelles puissent être inférieures à celles provoquées par d’autres aléas à l’échelle mondiale, elles peuvent néanmoins se révéler significatives dans les régions touchées. Par ailleurs, la retombée des cendres volcaniques peut affecter l’activité économique et l’environnement bien au-delà du site où survient la catastrophe. Il existe 1 551 volcans terrestres connus pour avoir été actifs au cours des 10 000 dernières années (l’Holocène), pour un total de 9 444 éruptions. Depuis 1950, 31 volcans sont en moyenne entrés en éruption chaque année. Les volcans les plus actifs se situent à l’intersection de plaques tectoniques, là où la croûte terrestre est soit créée soit consumée (GVM, 2014a). Les volcans sont associés à de multiples aléas, notamment les coulées et déferlantes pyroclastiques, les cendres et téphras volcaniques (grandes quantités de roches fragmentées violemment projetées), les lahars et les coulées (mélanges destructeurs de débris volcaniques et d’eau qui se déplacent à grande vitesse), les avalanches de débris, les glissements de terrain et les tsunamis, les gaz et aérosols volcaniques, les coulées de lave, les séismes et la foudre. Chacun de ces aléas affecte les populations, les terres agricoles, les zones construites ou encore les transports (par exemple l’aviation) de manières très différentes. Par exemple, les personnes vivant à proximité d’un volcan peuvent être soumises aux risques

directs liés aux coulées pyroclastiques, aux avalanches ou aux lahars. À l’autre extrême, les nuages de cendres volcaniques dans l’atmosphère ainsi que les retombées de cendres volcaniques peuvent avoir un impact à des centaines voire des milliers de kilomètres du lieu d’une éruption. À l’heure actuelle, plus de 800 millions de personnes dans 86 pays vivent dans un rayon de 100 km d’un volcan susceptible d’entrer en éruption (GVM, 2014a). Les pays comptant les plus importantes populations exposées sont l’Indonésie, les Philippines et le Japon. Dans certains petits pays toutefois, une proportion plus élevée de la population est exposée, par exemple plus de 90 % au Guatemala et en Islande (GVM, 2014a). Cinq grandes éruptions dominent l’historique de mortalité directement associé aux volcans. Celles-ci sont toutes survenues depuis la fin du XVIIIe siècle, avec une mortalité allant de 15 000 à 60 000 personnes par éruption25. Les éruptions volcaniques ont également contribué de manière indirecte à d’importantes pertes en vies humaines, par exemple en induisant une variabilité climatique dans d’autres régions et en provoquant par conséquent la famine (UNISDR, 2011a). Selon l’indice d’exposition de la population26, 4 % seulement des volcans du monde représentent 61 % de la population exposée. Le classement des 10 volcans à forte exposition se concentre en Indonésie, au Mexique, aux Philippines et au Japon. Si l’on prend en compte le nombre de volcans actifs dans le pays, le niveau de l’aléa27 et la population exposée vivant dans un rayon de 30 km de chaque volcan, environ 95 % de la population exposée à un aléa volcanique est concentrée dans sept pays, à savoir l’Indonésie, les Philippines, le Japon, le Mexique, l’Éthiopie, le Guatemala et l’Italie. Environ deux tiers du total de la population exposée sont concentrés en Indonésie. 81


Par exemple, à Naples en Italie (Figure 3.29), plus de 2 millions de personnes vivent très proches de trois volcans actifs (le Vésuve, le Campi Flegrei et l’Ischia). Mount Ontake eruption

50 000 vies au cours du dernier siècle (Auker et al., 2013). Néanmoins, certains volcans à forte exposition ne font toujours pas l’objet d’un suivi. Par exemple, 5,7 millions de personnes vivent dans un rayon de 10 km du champ volcanique de Michoacán-Guanajuato au Mexique, qui ne dispose actuellement d’aucun système de surveillance au sol.

Figure 3.29 Image satellite de la région de Naples Ischia

Naples

Vesuve

(Source : GVM, 2014a.)

Des pays relativement petits comme les PEID (Figure 3.30) présentent la part la plus élevée de population exposée à un aléa volcanique. Étant donné que la mortalité imputable à des volcans correspond à un petit nombre d’éruptions, le risque de catastrophe volcanique est toutefois particulièrement idiosyncratique et difficile à modéliser. Par exemple, l’éruption relativement modeste du Nevado del Ruiz en Colombie en 1985 a causé la mort de plus de 23 000 personnes, jusque dans des villes situées à 45 km en raison des lahars. Malgré la croissance démographique, le nombre de décès par éruption a radicalement reculé au cours des dernières décennies, ce qui suggère une amélioration du suivi des volcans, de l’évaluation des aléas et de la sensibilisation, de l’alerte précoce, des prévisions, de la communication et de la préparation vis-à-vis de volcans spécifiques. Selon les estimations, ces différentes mesures ont en fait permis de sauver environ 82

Partie I - Chapitre 3

Risques de pertes économiques liés aux éruptions volcaniques Les éruptions volcaniques ont des impacts économiques croissants. Par exemple, les pertes causées par l’éruption du Merapi en Indonésie en novembre 2010 sont estimées à 3,12 milliards de dollars américains (Surono et al., 2012). L’éruption du volcan Eyjafjallajökull en Islande en 2010 a sérieusement perturbé le trafic aérien dans l’Atlantique Nord et en Europe en provoquant la dispersion de fines cendres volcaniques dans l’atmosphère jusqu’à des milliers de kilomètres du volcan. Les pertes économiques mondiales qui ont résulté de cette éruption modeste ont atteint environ 1,7 milliard de dollars américains pour le seul secteur de l’aviation (UNISDR, 2013a) et ont été estimées à un total de 5 milliards de dollars américains après prise en compte de l’impact sur les entreprises et les chaînes d’approvisionnement internationales (Ragona et al., 2011). Les cendres volcaniques sont l’aléa volcanique le plus répandu. Les éruptions volcaniques génèrent des nuages de convection composés de gaz, de cendres et de fragments de roches qui peuvent se propager sur des centaines de kilomètres, en fonction de l’ampleur de l’éruption et de la vitesse et de la direction des vents dominants. Selon l’intensité des retombées de cendres volcaniques (c’est-à-dire de 1 mm à 200 mm) et l’environnement exposé, les impacts peuvent être très divers et aller de la perturbation du trafic et du transport aérien à des problèmes de santé, la contamination des sols et de l’eau, la dégradation des récoltes, l’endommagement


autres aléas. Dans la région de l’Asie et du Pacifique, le Japon présente les PAM les plus élevées associées à des dégâts structurels causés par des cendres volcaniques, à savoir plus de 11 milliards de dollars américains. Il est suivi par l’Indonésie avec près de 6 milliards de dollars américains. Toutefois, les pertes relatives sont plus élevées dans les petits pays tels que le Vanuatu et la Papouasie-Nouvelle-Guinée (Figure 3.32)28.

d’équipements et de machines, ou encore l’effondrement de toits. La probabilité d’une retombée de cendres peut être estimée sur la base de la distribution géographique des volcans et de leur potentiel d’éruption ainsi que des vents dominants durant les différentes saisons (Figure 3.31). Le risque de retombée de cendres peut être estimé selon la même approche que pour les

Figure 3.30 Top 20 des pays et territoires : part de la population exposée à un aléa volcanique

Pourcentage de la population exposée 10

20

30

40

50

60

70

80

90

100

Sainte-Hélène, Ascension et Tristan da Cunha Sainte-Lucie Saint-Kitts-et-Nevis Sao Tomé-et-Principe Dominique Montserrat Saint-Vincent-etles-Grenadines Grenade Açores El Salvador Samoas américaines Samoa Îles Canaries Costa Rica Martinique Nicaragua Guatemala Vanuatu Arménie Comores

(Source : UNISDR, données GVM 2014.)

83


Figure 3.31 Carte mondiale de probabilité des retombées de cendres et cartes régionales pour l’Asie du Sud-Est et l’Amérique centrale

100 ans

1 000 ans

10 000 ans

Philippines

Papouasie Nouvelle Guinée

Indonésie

R

é

é

ss

s

s

é s

ss

é

s 1

.

(Source : GVM, 2014b.)

Figure 3.32 PAM dues aux retombées de cendres volcaniques par rapport aux investissements en capital dans la région Asie-Pacifique29

PAM

Indonésie Vanuatu Japon

5 2 3 11 2

[millions de dollars américains] 2 219 10 52 5

Philippines

558

55

Papouasie-Nouvelle-Guinée

14

2

5

Nouvelle-Zélande

63

Îles Salomon

1

1

Fédération de Russie

88

50 2

Taïwan, province de Chine

3

2 2

0 0

(Source : UNISDR, données 2014 de Geoscience Australia et CIMNE-INGENIAR.)

84

Partie I - Chapitre 3

PAM / Investissements en capital

Investissements en capital

[millions de dollars américains]

[%]

0,5

1

1,5

2

2,5


21st Century drought

3.7

Risques de sécheresse agricole

Dans plusieurs pays, les pertes causées par la sécheresse agricole présentent non seulement un risque pour l’économie nationale, mais engendrent également des effets dévastateurs pour la population rurale. Selon les prévisions, le changement climatique induira une modification des tendances de sécheresse agricole. La sécheresse agricole est probablement le risque de catastrophe qui trouve le plus largement son origine dans le fonctionnement social (UNISDR, 2011a). Hormis une pluviométrie insuffisante, la sécheresse agricole est associée à d’autres facteurs tels que la température et le vent, qui influencent l’évapotranspiration et la capacité du sol à retenir l’humidité. Bien que la sécheresse agricole survienne lorsque la teneur en eau du sol est insuffisante pour répondre aux besoins d’une culture particulière à un moment et à un endroit précis, elle est également associée à des facteurs tels que la dégradation des terres, un aménagement du territoire et des systèmes de culture inappropriés, l’extraction excessive des eaux souterraines et le surpâturage. Les ménages et les collectivités à faibles revenus des zones rurales n’ont parfois pas d’autre choix que de cultiver des terres sans valeur, dégradées et exposées à la sécheresse, ou d’y faire paître leur bétail. Ils disposent par ailleurs de peu de moyens pour mobiliser des ressources : ils sont donc vulnérables face aux plus petits déficits de production et sont peu résilients. Les impacts directs de la sécheresse agricole sont la réduction de la productivité des récoltes, des pâturages et des forêts ainsi que du niveau de l’eau, l’augmentation du risque d’incendie, l’endommagement de la flore ainsi que de l’habitat de la faune et des poissons, et l’augmentation de la mortalité du bétail et de la faune. Les impacts indirects comprennent la réduction des revenus

issus de l’agriculture et l’augmentation des prix des produits alimentaires et du bois de construction, ce qui engendre des impacts plus larges tels que la malnutrition (en particulier chez les enfants), l’augmentation du chômage, les migrations, la réduction des recettes fiscales et le risque de saisies pour les prêts bancaires octroyés aux agriculteurs. Bien que les sécheresses agricoles puissent persister durant plusieurs années, même une sécheresse courte et intense peut nuire considérablement à l’économie locale (FAO, 2013a). En Afrique subsaharienne, 1 % seulement des zones cultivées sont irriguées (Ward et al., 2014), tandis que 52 % des terres sont plus ou moins dégradées (Erian et al., 2014). Malgré une augmentation de la productivité, le retard total en termes de productivité entre la région et les pays en développement dans leur ensemble continue de se creuser (Figure 3.33). Figure 3.33 Indice de productivité multifactorielle Indice de productivité multifactorielle (1961-1965 = 100) 200 Ensemble des pays en développement Afrique subsaharienne 150

100

50 1961

1966

1971

1976

1981

1986

1991

1996

2001

2006

2011

(Source : USDA Economic Research Service.)

Dans de nombreux pays à faible revenu de cette région, l’agriculture demeure un secteur économique essentiel. Dans de nombreux pays où l’activité économique et l’emploi se concentrent dans l’agriculture, tels que l’Érythrée et l’Éthiopie, une part significative de la population est sous-alimentée et une part significative des zones couvertes par la végétation est touchée par une dégradation importante et par la sécheresse agricole (Tableau 3.2). 85


Tableau 3.2 Agriculture, dégradation des terres et sécheresse en Afrique subsaharienne Population agricole

Valeur ajoutée de l'agriculture

Emploi dans l'agriculture

(% du total)

(% du PIB)

(% des emplois totaux)

Angola

69

10

Bénin

44

Burundi

Pays

Niveau d'insécurité alimentaire

Couvert végétal gravement touché

(prévalence de la sous-alimentation en pourcentage de la population)

(% de la superficie touchée par la dégradation des terres et la sécheresse agricole)

5

24

1,3

32

43

6

4,7

89

35

90

67

1,1

Tchad

66

14

83

29

5,1

République démocratique du Congo

57

43

70

N/A

0,3

Érythrée

74

15

N/A

61

24,7

Éthiopie

77

42

79

37

18,3

Guinée

80

13

82

15

1,2

Libéria

62

53

49

29

7,4

Madagascar

70

29

80

27

1,4

Mali

75

39

66

7

7,1

Mozambique

76

32

81

37

1,0

Nigéria

25

33

45

7

12,2

Sierra Leone

60

44

69

29

11,3

Soudan

80

24

80

39

7,3

Tanzanie

73

27

77

33

1,1

Ouganda

74

23

66

30

0,7

Remarque : les données qui ne figurent pas au tableau n’étaient pas immédiatement disponibles. (Source : UNISDR, données 2014 de la FAO et Erian et al., 2014.)

Dans ces pays, la sécheresse agricole présente non seulement un risque pour l’économie nationale, mais engendre également des effets dévastateurs pour la population rurale. Au Malawi, par exemple, l’agriculture représente environ 30 % du PIB. Selon les estimations, les pertes annuelles dues à la sécheresse représentent environ 1 % du PIB et les pertes maximales probables (PMP) dues à une sécheresse d’une période de retour de 1 sur 25 ans représentent 10 % du PIB. 86

Partie I - Chapitre 3

De plus, une sécheresse d’une période de retour de 1 sur 25 ans aggraverait la pauvreté de 17 %, ce qui signifierait que 2,1 millions de personnes supplémentaires passeraient en dessous du seuil de pauvreté (Banque mondiale et al., sans date). La situation est tout aussi critique en Afrique de l’Ouest. Pour le millet uniquement, le Mali est par exemple confronté à une probabilité de 10 % de subir des pertes de production s’élevant à 48 millions de dollars américains ou plus sur une période


dérablement d’une région à l’autre et la production de maïs en Afrique de l’Est pourrait même augmenter (GIEC, 2014).

de 50 ans (Figure 3.34). Au Sénégal, les pertes pour la production de millet pour la même période de retour s’élèvent à 15 millions de dollars américains ou plus.

Au Kenya, au Malawi et au Niger, les revenus de l’agriculture contribuent respectivement à 30 %, 30 % et 38 % du PIB. Les estimations des pertes annuelles moyennes (PAM) avec et sans changement climatique à court terme aboutissent à des résultats différents pour les trois pays (Figure 3.35). Alors que la production de maïs au Malawi devrait être

Selon le GIEC, le changement climatique aura très vraisemblablement un impact global négatif sur le rendement des principales cultures céréalières en Afrique, avec une forte variabilité régionale de cette diminution du rendement (GIEC, 2014). Cette réduction du rendement varierait toutefois consiFigure 3.34 Probabilité de pertes de production en Afrique de l’Ouest Probabilité de dépassement par an 0,80

Sénégal

Niger

Mali

0,70 0,60

Période de retour de 1 sur 2 ans

0,50 0,40 0,30 0,20

Période de retour de 1 sur 10 ans

0,10

50

100

150

200

250

300

350

Pertes [millions de dollars américains]

150 millions de dollars américains (Source : Jayanthi, 2014.)

Figure 3.35 PAM dues à la sécheresse et PMP pour une période de retour de 100 ans, avec et sans changement climatique PAM dues à la sécheresse

dues une séc eresse d une période de retour de 1 sur 100 ans

mi ions de do ars américains 40

30

20

1

10

2

3

du

B

4

5

6

7

Millet Niger Maïs Malawi Maïs a ée du i révisions court terme avec e c angement c imati ue 201 20 5

en a bservations istori ues 1

1 2010

100 ertes dues un événement d une période de retour de 1 sur 100 ans ou probabi ité de 1 de dépasser ces pertes c a ue année

(Source : Jayanthi, 2014.)

87


duction du maïs (Tableau 3.3) et potentiellement pousser des pays tels que le Malawi au-delà de leur seuil de résilience économique ainsi qu’en termes de pauvreté.

confrontée à des PAM plus élevées avec le changement climatique, le Kenya et le Niger montrent une réduction des PAM pour le même scénario de changement climatique, tant en termes absolus qu’en pourcentage du PIB, respectivement pour la production de maïs et de millet.

En revanche, le changement climatique pourrait avoir un impact positif, respectivement sur le rendement du maïs et du millet au Kenya et au Niger (Jayanthi, 2014). Les résultats montrent également que l’impact du changement climatique pourrait varier en fonction de l’intensité de la sécheresse.

Par exemple, les pertes provoquées par une sécheresse d’une période de retour de 1 sur 25 ans sur la production de maïs au Malawi seraient supérieures de 23 % sur la période 2016-2035 par rapport à la période 1981-2010 sur la base des scénarios de changement climatique à court terme (Figure 3.36).

Par exemple, le risque de sécheresse agricole pour le maïs dans la Vallée du Rift au Kenya devrait reculer à court terme (2016-2035) sous l’impact du changement climatique. Dans un scénario de

Le changement climatique pourrait engendrer des pertes supplémentaires significatives pour la pro-

Figure 3.36 Pertes pour la production de maïs au Malawi par rapport à la production nationale 2007 (en tonnes) Probabilité de dépassement par an 0 5 angement c imati ue 201 20 5 0

Données de référence modélisées à l'aide des données historiques Pertes historiques

0 25

Période de retour de 1 sur 5 ans

02

0 15

Période de retour de 1 sur 10 ans

01

0 05

50 000

100 000

150 000

200 000

150 millions de dollars américains

250 000

00 000

50 000

00 000

50 000

500 000

Pertes pour la production de maïs au Malawi (tonnes) c i res de production 200

(Source : Jayanthi, 2014.)

Tableau 3.3 Estimation des pertes pour la production de maïs au Malawi, avec et sans changement climatique

Probabilité de dépassement

Période de retour

0,02

1 sur 50 ans

00

0,05

1 sur 20 ans

2 5 00

0,1

1 sur 10 ans

102 00

Pertes annuelles moyennes

PAM

(Source : Jayanthi, 2014.)

88

Partie I - Chapitre 3

Pertes de référence (1981-2010) (tonnes)

115

Pertes en prenant Pertes en prenant en compte le Pertes de référence en compte le changement climatique (% de la production changement climatique (% de la production totale de maïs en 2007) (2016-2035) (tonnes) totale de maïs en 2007) 55

1 5

1 00 55 00

5

15 500

2

2 055


changement climatique, les PMP pour une sécheresse d’une période de retour de 100 ans reculeraient de 866 440 tonnes (niveau de référence) à 351 225 tonnes. Selon les projections, les pertes annuelles moyennes (PAM) s’élèvent donc à 48 463 tonnes (1,78 % de la production totale de maïs dans la province de la Vallée du Rift en 2012), soit une réduction de pas moins de 38 % par rapport à la valeur de référence, c’est-à-dire des PAM s’élevant à 78 190 tonnes (2,86 % de la production totale de maïs dans la province de la Vallée du Rift en 2012 - voir tableau 3.4).

Alors que les pertes dues à des sécheresses fréquentes (période de retour inférieure à 5 ans) seraient similaires aux pertes observées pour la période 1981-2010, les pertes dues à des sécheresses plus sévères et moins fréquentes seraient significativement plus faibles (Figure 3.37). Par exemple, une perte de récolte de 390 000 tonnes dont la probabilité actuelle est de 1 sur 20 ans aurait une probabilité d’occurrence de 1 sur 100 ans dans le scénario de changement climatique à court terme.

Tableau 3.4 Estimation des pertes pour la production de maïs dans la Vallée du Rift au Kenya, avec et sans changement climatique

Probabilité de dépassement

Période de retour

0,01

1 sur 100 ans

0,02

1 sur 50 ans

0,05

1 sur 20 ans

0,1

Pertes de référence (1981-2010) (tonnes)

Pertes en prenant Pertes en prenant en compte le Pertes de référence en compte le changement climatique (% de la production changement climatique (% de la production totale de maïs en 2012) (2016-2035) (tonnes) totale de maïs en 2012)

0

1

125

25

1 5

12

0

15

2

00

10

1 sur 10 ans

2 5 125

10

1

00

0,2

1 sur 5 ans

1 1 00

5

11

20

Pertes annuelles moyennes

PAM

0

51 225

1

1 0

2

(Source : Jayanthi, 2014.)

Figure 3.37 Pertes probables pour la production de maïs dans la Vallée du Rift au Kenya, avec et sans changement climatique

Probabilité de dépassement par an 0 5 angement c imati ue 201 20 5 0

Données de référence modélisées à l'aide des données historiques Pertes historiques

0 25

Période de retour de 1 sur 5 ans

02

0 15

Période de retour de 1 sur 10 ans

01

0 05

200 000

00 000

00 mi ions de do ars américains

00 000

00 000

1 000 000

1 200 000

Pertes pour la production de maïs au Kenya (tonnes) c i res de production 200

(Source : Jayanthi, 2014.)

89


Notes : 1  Les PAM mondiales causées par les séismes et les cyclones tropicaux ont changé par rapport aux chiffres publiés dans le Bilan mondial 2013 en raison de modifications méthodologiques dans l’évaluation des aléas sismiques et cycloniques. Des informations détaillées concernant les améliorations apportées à la méthodologie sont disponibles à l’annexe 1 et dans les publications CIMNEINGENIAR 2014. 2  Personnes âgées de 15 à 64 ans, basé sur des données des Nations Unies ; voir http://esa.un.org/unpd/wpp/index.htm. 3  Définition du seuil de pauvreté selon la Banque mondiale : personnes vivant avec moins de 1,25 dollar américain par jour. 4  Calculs réalisés sur base des données du département américain d’information sur l’énergie (EIA, Energy Information Administration) : http://www.eia.gov.

16  Voir l’annexe 1 pour de plus amples informations concernant les risques spécifiques à différents aléas et pour des graphiques présentant les principales mesures du développement socio-économique. 17  Le modèle de risque du Bilan mondial 2015 considère uniquement les cyclones tropicaux (c’est-à-dire les ouragans de l’échelle Saffir Simpson), ce qui inclut les vents forts et les ondes de tempête. Les autres circulations tropicales telles que les dépressions ou tempêtes tropicales ne sont pas prises en compte. Ces types d’événements sont généralement associés à des vents moins rapides. Leurs effets sont donc généralement moins dévastateurs et n’engendrent pas des ondes de tempête. Bien que des tempêtes potentiellement intenses puissent survenir à proximité de l’équateur comme ce fut le cas avec le typhon de catégorie 5 Bopha sur l’île de Mindanao en 2012, des cyclones tropicaux ne surviennent en principe pas à ces latitudes. Ceci s’explique par l’effet de Coriolis ainsi que par la rotation horaire des tempêtes dans l’hémisphère austral et anti-horaire dans l’hémisphère septentrional, sans traversée possible. 18  http://www.earthobservatory.nasa.gov/IOTD/view.php7id =7079.

5  Basé sur les données de recensement du Gouvernement des ÉtatsUnis d’Amérique : https://www. census.gov/hhes/families/data/ cps2012.html.

19  Hurricanes: The Greatest Storms on Earth. http://earthobservatory.nasa.gov/Features/Hurricanes/ (consultation le 10 décembre 2014).

6  Basé sur les données de la Banque mondiale : http://data.worldbank.org/.

20 http://www.emdat.be.

7  Définie comme la violence criminelle armée dans des situations qui ne sont pas identifiées comme des conflits ou des conflits armés. 8 Par exemple, modèles Global Earthquake (http://www.globalquakemodel.org) ou Deltares (http://www.deltares.nl/en). 9 Le modèle de risque mondial a été élaboré en partenariat avec 20 institutions. Le modèle de risque probabiliste couvrant tous les aléas a été développé et exploité par le CIMNE et INGENIAR LTDA via la plate-forme de modélisation CAPRA. Le modèle d’exposition à l’échelle mondiale a été développé par le PNUE-GRID et le CIMNE en collaboration avec WAP-MERR, le Centre commun de recherche de l’UE, Kokusai Kogyo et la Beijing Normal University. Les modèles d’aléas ont été développés par le CIMNE et INGENIAR LTDA (cyclones et séismes, avec les apports de la GEM pour les séismes), la CIMA Foundation et le PNUE-GRID (inondations), NGI et Geoscience Australia (tsunamis et volcans) et GVM et Geoscience Australia (volcans). La vulnérabilité a été modélisée par le CIMNE et INGENIAR LTDA pour l’Amérique latine et les Caraïbes, ainsi que par Geoscience Australia pour la région Asie-Pacifique. Dans les autres régions, les fonctions de vulnérabilité HAZUS développées par USGS ont été utilisées. Les évaluations des risques de sécheresse agricole ont été réalisées par l’ACSAD et FEWSNET. Les évaluations par les pairs ont été menées par l’OMM (modèles des aléas hydrométéorologiques), l’UNESCO (modèles des aléas géologiques) ainsi que par un groupe de spécialistes de l’exposition aux aléas et des aléas sismiques. Pour de plus amples détails concernant les différents partenaires et leurs contributions, voir l’annexe 1. 10 http://www.ecapra.org/. 11  Tout au long de ce chapitre, les investissements en capital font référence à la formation brute de capital fixe (FBCF) basé sur les données de 2013. 12 Les actifs font ici référence au patrimoine immobilier d’un pays, c’est-à-dire les bâtiments résidentiels et commerciaux, les écoles et les hôpitaux, sur la base du modèle d’exposition (voir l’annexe 1 pour de plus amples détails). 13  Toutes les régions sont envisagées conformément à la classification des pays et régions établie par la Banque mondiale. Voir http:// data.worldbank.org/about/country-and-lending-groups. 14  Voir l’annexe 1 pour les résultats complets des évaluations de risque par région. 15 http://data.worldbank.org/.

90

Partie I - Chapitre 3

21 http://www.ready.gov/tsunamis. 22 http://www.jma.go.jp/jma/en/Activities/jishintsunami/ jishintsunami_low2.pdf. 23 Les résultats provisoires présentés ici donnent un aperçu des risques liés aux crues des rivières. Hormis la profondeur de l’eau, d’autres facteurs ont également une influence considérable sur les pertes subies, ce qui signifie qu’il existe ici une plus grande incertitude par rapport aux autres aléas. 24  La plupart des PEID se trouvent dans la région de l’Amérique latine et des Caraïbes ou en Asie de l’Est et dans le Pacifique. 25 Les cinq éruptions historiques responsables de la majorité des décès sont les suivantes : Tambora, Indonésie, 1815 (60 000 décès) ; Krakatoa, Indonésie, 1883 (36 417 décès) ; Montagne Pelée, Martinique, 1902 (28 800 décès) ; Nevado del Ruiz, Colombie, 1985 (23 187 décès) ; Unzen, Japon, 1792 (14 524 décès). 26  Élaboré par Aspinall et al. (2011), l’indice d’exposition de la population (IEP) est l’un des principaux indices utilisés pour évaluer les risques volcaniques. Il analyse la population vivant dans un rayon de 10, 30 et 100 km d’un volcan, et applique ensuite une pondération en fonction des statistiques historiques de distribution des décès à une distance donnée des volcans. L’IEP est divisé en sept niveaux allant des zones peu peuplées aux zones très densément peuplées. Les résultats de l’indice montrent que seulement 4 % des volcans représentent 60 % du total de la population exposée. 27  Un indice d’aléa volcanique (VHI) a également été élaboré afin de caractériser le niveau de l’aléa sur la base de la fréquence historique des éruptions, de l’explosivité volcanique modale et maximale, et de la présence de courants de densité pyroclastiques, de lahars et de coulées de lave. Seule la moitié des volcans historiquement actifs disposent d’un historique d’éruption suffisamment détaillé pour permettre le calcul du VHI. 28  Pour cette estimation des pertes, une méthodologie simplifiée d’analyse multi-échelle simulant les retombées de cendres volcaniques a été utilisée pour la modélisation probabiliste de l’aléa dans la région Asie-Pacifique (méthode différente de celle utilisée pour l’élaboration des cartes de la Figure 3.35). 29  Il convient de relever que cette valeur représente exclusivement les pertes dues aux dégâts structurels, c’est-à-dire une fraction seulement des pertes économiques potentielles susceptibles d’être causées par les retombées de cendres volcaniques. Les pertes causées au secteur de l’aviation par les nuages de cendres sont également exclues.


Chapitre 4

Risques extensifs

91


Contrairement aux risques intensifs, les risques extensifs sont plus étroitement liés aux inégalités et à la pauvreté qu’aux lignes de faille sismiques ou aux trajectoires des cyclones. Dans de nombreux cas, l’aléa, l’exposition et la vulnérabilité sont simultanément configurés par les facteurs de risque sous-jacents. Les risques extensifs sont par ailleurs eux-mêmes une caractéristique importante de la pauvreté.

4.1

Des risques extensifs qui augmentent

Les risques de catastrophe extensifs sont amplifiés par des facteurs tels que la planification et la gestion inadéquates du développement urbain, la dégradation de l’environnement, la pauvreté et les inégalités, la vulnérabilité des moyens de subsistance des populations rurales et une faible gouvernance. C’est pourquoi les risques extensifs continuent d’augmenter. La strate des risques extensifs correspond aux pertes à taux de fréquence élevé et de faible gravité. D’une manière générale, cette strate n’est pas capturée par la modélisation des risques mondiaux et les pertes ne sont pas signalées à l’échelle internationale. L’un des principaux apports du Bilan mondial (UNISDR, 2009a, 2011a, 2013a) a été de mettre en lumière les coûts prévisibles associés à cette strate de risque, qui tendent à être absorbés par les ménages et les collectivités à faibles revenus, par les petites entreprises ainsi que par les autorités locales et nationales, et qui constituent un facteur déterminant de pauvreté (UNISDR, 2009a). Les risques extensifs se manifestent à travers un grand nombre de catastrophes récurrentes à petite échelle et de faible gravité, principalement associées à des crues éclairs, des glissements de terrain, des inondations urbaines, des tempêtes, des incendies et d’autres événements localisés. Par ailleurs, les dégâts causés par les orages et la foudre viennent de plus en plus souvent augmenter les pertes extensives en provoquant des feux de friche1. Les risques de catastrophe extensifs sont amplifiés par des facteurs tels que la planification et la 92

Partie I - Chapitre 4

gestion inadéquates du développement urbain, la dégradation de l’environnement, la pauvreté et les inégalités, la vulnérabilité des moyens de subsistance des populations rurales et une faible gouvernance. Cette strate de risque est caractéristique des établissements urbains informels et des zones rurales à faibles revenus (UNISDR, 2009a). Dans les villes, par exemple, la pauvreté force les ménages à faibles revenus à occuper des terres ayant peu de valeur, susceptibles d’être exposées à des inondations, à des glissements de terrain et à d’autres aléas (Wamsler, 2014). Les établissements informels sont habituellement caractérisés par des habitations extrêmement vulnérables et un manque d’infrastructures propres à réduire les risques, telles que les égouts (Mitlin et Satterthwaite, 2013). Dans le même temps, le développement urbain spéculatif, qui peut conduire à l’asphaltage de zones vertes dans les villes en rapide expansion et à des affaissements de terrain en raison de l’extraction excessive des eaux souterraines, peut également accroître la fréquence et la gravité des inondations urbaines (UNISDR, 2013a). Contrairement aux risques intensifs, les risques extensifs sont moins étroitement liés aux lignes de faille sismiques et aux trajectoires des cyclones qu’aux inégalités et à la pauvreté. Dans de nombreux cas, l’aléa, l’exposition et la vulnérabilité sont simultanément construits par les facteurs de risque sous-jacents. Par exemple, toutes les municipalités du Panama signalent des pertes dues à des catastrophes extensives, même si le pays se trouve au sud de la ceinture des ouragans des Caraïbes et que les séismes y sont rares. Étant donné que les notions de risques extensifs et de risques intensifs font simplement référence à des strates de risque différentes, tout


seuil quantitatif qui les distingue est arbitraire. Le Bilan mondial a utilisé un seuil de perte déterminé statistiquement (Encadré 4.1), pour lequel un nombre minimal de catastrophes cumule la

mortalité et les dégâts économiques maximaux qui soient possibles (UNISDR, 2011a, annexe II). Il aurait été tout aussi valable de déterminer un seuil sur la base des périodes de retour.

Encadré 4.1 Risques intensifs et extensifs : des empreintes différentes

Les variables utilisées pour définir le seuil entre les pertes dues à des catastrophes intensives ou extensives sont la mortalité et la destruction des habitations. Statistiquement, le seuil est fixé comme suit : Mortalité : moins de 30 décès (catastrophe extensive) ; à partir de 30 décès (catastrophe intensive). Habitations détruites : moins de 600 habitations détruites (catastrophe extensive) ; à partir de 600 habitations détruites (catastrophe intensive). Ce seuil s’est révélé fiable, alors même que les bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes ne cessent de s’enrichir. Comme le montre le cas de l’Indonésie, les catastrophes extensives et intensives possèdent des empreintes très différentes (Figure 4.1). Figure 4.1 Empreintes des catastrophes extensives et intensives en Indonésie (1990-2013) Mortalité

[nombre de décès enregistrés] 0 / No data <1 1 - 10 10 - 100 100 - 1 000 1 000 - 10 000 > 10 000

Catastrophes extensives

Catastrophes intensives

(Source : CIMNE-INGENIAR, 2014.)

93


Encadré 4.2 Comprendre les pertes et les risques depuis la base : comptabilisation des pertes nationales

Afin de mettre au jour les risques extensifs, un nombre croissant de pays dans le monde adoptent une méthodologie simple et bien définie pour l’enregistrement, l’analyse et la présentation des catastrophes qui surviennent et des pertes qu’elles engendrent au niveau local, à travers une définition standardisée des aléas, des impacts et d’autres indicateurs3. Étant donné que les informations concernant les pertes sont obtenues au niveau des unités administratives locales, il est possible d’enregistrer les pertes associées à un très grand nombre de petites catastrophes extensives qui ne sont pas signalées à l’échelle internationale et n’apparaissent donc pas dans les autres bases de données sur les catastrophes. Suivant une progression qui s’apparente au développement de la puissance de traitement des ordinateurs, le nombre des pays qui collectent systématiquement des données concernant les pertes dues aux catastrophes a plus ou moins doublé tous les deux ans depuis les premiers efforts consentis en ce sens en Amérique latine dans les années 90. Le Bilan mondial 2015 contient des données collectées à l’aide de la même méthodologie et des mêmes paramètres pour 82 pays et 3 États (Tamil Nadu et Odisha en Inde, et Zanzibar en Tanzanie). Parmi les pays ayant publié des données au cours des deux dernières années figurent les Comores, Madagascar, Maurice et les Seychelles dans l’océan Indien ; le Maroc et la Tunisie en Afrique du Nord ; le Niger, le Sénégal, la Sierra Leone et le Togo en Afrique de l’Ouest ; la Barbade, Grenade, Sainte-Lucie, Saint-Kitts-et-Nevis, SaintVincent et Trinité-et-Tobago dans les Caraïbes ; le Cambodge, l’État de Palestine et le Pakistan en Asie ; et l’Albanie, l’Espagne, la Serbie et la Turquie en Europe (Figure 4.2). Figure 4.2 Augmentation du nombre de bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes contribuant à l’élaboration des Bilans mondiaux Albanie

Turquie

Fréquence des catastrophes

Niger

Espagne

Dégâts aux habitations

Sénégal

Dégâts aux habitations dus aux inondations

État de Palestine

Fréquence des inondations

Madagascar

Fréquence des feux de forêts

Dégâts aux cultures

Pakistan Élevé

Moyen

Faible 0 - Aucune donnée

Dégâts aux habitations

Mortalité dues aux inondations

(Source : UNISDR, informations issues des bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes.)

94

Partie I - Chapitre 4


Au moment de l’adoption du CAH, la mortalité, les dégâts matériels et les pertes économiques imputables aux risques extensifs n’étaient pas encore pris en compte dans les rapports nationaux ou internationaux, excepté dans certains pays latino-américains2. En conséquence, cette strate de risque demeurait largement invisible. Toutefois, depuis 2007, des efforts soutenus ont été consentis afin d’assister les différents pays dans l’enregistrement systématique des pertes locales dues aux catastrophes (UNISDR, 2009a, 2011a, 2013a), ce qui a permis d’obtenir des éléments de preuve systématiques et comparables concernant l’ampleur des risques extensifs pour plus de 80 pays (Encadré 4.2). Étant donné que 95 % de ces bases de données ont été construites selon une approche et

une méthodologie comparables, le contenu peut être analysé dans une perspective mondiale. National disaster loss databases

Le Tableau 4.1 montre que 99,1 % des pertes signalées au niveau local par ces 85 pays et États correspondent à des risques extensifs, dont 96,4 % résultent de phénomènes météorologiques. Les pertes économiques dues aux catastrophes extensives représentent plus de 45 % du total des pertes cumulées. Dans ces pays, les catastrophes extensives sont responsables de seulement 14 % de la mortalité

Tableau 4.1 Données nationales sur les pertes dues aux catastrophes pour 85 pays et États4

Type de risque

Type d'événement Hydrométéorologique

Extensif

Géologique

Fiches de données 5

Intensif

5 3

10

100

2

Nombre de morts

%

10 11

10 515

Total Hydrométéorologique

%

81

Géologique

566

1

Total

015

100

Habitations détruites 1

2 1 1

111 5 2 5

1 5 2

11 1

Habitations endommagées 1

%

10 21

1

1 2 2

2

100

1 15 52

100

33

5 25

63

53

21

1

21

100

10 15

11

100

10

20

6 100

5 01 01 1 0 1 5

Pertes économiques

(en millions de dollars américains)

2 1

1

100

1 10 2

1

% 5 5,2

115

1 0 2

100 38

211

16

2 250

100

(Source : UNISDR, informations issues des bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes.)

Figure 4.3 Mortalité due aux catastrophes extensives, 1990-2013 (65 pays et 2 États)5 Nombre de morts 6 000

R² = 0,665

5 000

4 000

3 000

2 000

1 000

1990

1995

2000

2005

2010

2013

(Source : UNISDR, informations issues des bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes.)

95


totale due aux catastrophes. Toutefois, depuis 1990, la mortalité due aux catastrophes extensives a pratiquement quadruplé dans les pays qui disposent de données cohérentes couvrant cette période (Figure 4.3), et cette tendance est statistiquement significative.

significative de la mortalité est observée pour les événements ayant provoqué moins de 100 décès.

Une tendance similaire peut être observée pour les catastrophes à petite échelle dans les données mondiales sur les pertes dues aux catastrophes (Figure 4.4). Une augmentation statistiquement

Bien que les risques extensifs ne soient responsables que d’un faible pourcentage de la mortalité, ils sont associés à une morbidité et à des déplacements beaucoup plus importants

La mortalité due aux catastrophes extensives augmente également en fonction de la taille de la population (Figure 4.5).

Figure 4.4 Mortalité due aux catastrophes signalées à l’échelle internationale (événements ayant provoqué moins de 100 décès) Nombre de morts 6 000 Tous aléas confondus

Aléas hydrométéorologiques

Aléas géologiques

5 000

4 000 R2 = 0,4928

R² = 0.4896 3 000

2 000

1 000 R2 = 0,0686 1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

2004

2006

2008

2010

2012 2013

(Source : UNISDR, données EM-DAT.)

Figure 4.5 Mortalité due aux catastrophes extensives en fonction de la population (65 pays, 2 États) Nombre de morts par million d’habitants 5 4,5 R² = 0,518 4 3,5 3 2,5 2 1,5 1 0,5

1990

1995

2000

2005

(Source : UNISDR, informations issues des bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes.)

96

Partie I - Chapitre 4

2010

2013


(Figure 4.6), qui concourent directement à renforcer la pauvreté. Les risques extensifs provoquent une érosion importante des actifs du développement. Les rapports montrent que la majorité des dégâts et pertes depuis 1990 est associée à des catastrophes extensives dans les pays qui disposent de données cohérentes (Figure 4.7). Les risques extensifs constituent donc une préoccupation centrale pour les ménages à faibles reve-

nus et les petites entreprises, qui sont tributaires des infrastructures publiques, ainsi que pour les gouvernements locaux qui mettent ces infrastructures à disposition. Les pertes signalées montrent toutes une tendance à la hausse statistiquement significative depuis 1990 (Figure 4.8). Dans une certaine mesure, cette tendance reflète une amélioration des comptes rendus dans certains pays. Toutefois, une analyse plus poussée montre que ce biais n’a qu’une influence limitée à modérée sur la tendance globale6.

Figure 4.6 Pourcentage de personnes blessées et déplacées signalées dans le cadre des catastrophes extensives (65 pays, 2 États) Personnes blessées

Personnes déplacées (évacuées et réinstallées)

12%

40% 60% 88%

Catastrophes extensives Catastrophes intensives

(Source : UNISDR, informations issues des bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes.)

Figure 4.7 Pourcentage des dégâts et pertes dus à des catastrophes extensives (65 pays, 2 États) 100 % 90 % 80 % 70 % 60 % 50 % 40 % 30 % 20 % 10 %

Dégâts aux habitations Extensives

Dégâts aux routes (en mètres)

Distribution d’eau

Égouts

Centres d’enseignement

Installations médicales

Fourniture d’électricité et d’énergie

Intensives

(Source : UNISDR, informations issues des bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes.)

97


Figure 4.8 Dégâts dus à des catastrophes extensives signalés pour les habitations, les structures scolaires et médicales et la production agricole (65 pays et 2 États) Dégâts signalés sur les habitations

Dégâts signalés sur les structures scolaires

1 200 000

8 000 7 000

1 000 000

6 000 800 000

5 000 4 000

600 000 R² = 0,5449

3 000

400 000

R² = 0,3841

2 000 1 000

200 000

1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010

1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010

2013

Dégâts signalés sur l’agriculture (en hectares)

Dégâts signalés sur les structures médicales

16 000 000

900

14 000 000

800

2013

700

12 000 000

600

10 000 000

500

8 000 000

400

R² = 0,4041

6 000 000

300

4 000 000

200

2 000 000

100 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010

2013

R² = 0,7414

1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010

2013

(Source : UNISDR, informations issues des bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes.)

4.2

Des capacités de développement et des progrès compromis

Les pertes dues aux catastrophes extensives sont largement responsables de la morbidité et des déplacements dus aux catastrophes et provoquent une érosion continue des actifs du développement. Ceci pose un défi particulier pour la réalisation des objectifs de développement dans les régions déjà frappées par les inégalités sociales et l’exclusion. Les risques extensifs représentent un défi particulier pour la réalisation des objectifs de développement dans les régions déjà caractérisées par les inégalités sociales et l’exclusion. Le manque d’infrastructures y constitue déjà un facteur sousjacent de vulnérabilité à l’origine de risques de catastrophe, et affaiblit la résilience. La perte des rares infrastructures existantes en raison de catastrophes aggrave encore la situation et en98

Partie I - Chapitre 4

gendre un cercle vicieux. Par exemple, le manque de structures médicales primaires accroît la vulnérabilité des ménages à faibles revenus frappés par des inondations. Les ménages touchés par la maladie sont naturellement moins résilients face aux pertes provoquées par les catastrophes, et les dégâts causés à ces structures, voire leur destruction, aggravent encore le problème. La valeur économique de ces actifs sociaux est significative. Alors que les pertes économiques dues aux catastrophes intensives sont généralement évaluées par les gouvernements ou les organisations internationales et que les pertes assurées sont évaluées par le secteur de l’assurance, le coût économique des risques extensifs reste encore largement à prendre en compte et se trouve au final absorbé par les plus faibles, ce qui aggrave la pauvreté. Les estimations du coût de ces catastrophes non signalées mettent en lumière des pertes économiques croissantes et lar-


gement ignorées depuis 1990 ainsi qu’un facteur de pauvreté très insuffisamment pris en compte. En 2012, EM-DAT a signalé des pertes économiques à hauteur de 157 milliards de dollars américains, une estimation inférieure à celles publiées par Swiss Re (186 milliards de dollars américains), Munich Re (160 milliards de dollars américains) et Aon (200 milliards de dollars américains). Si le coût économique des actifs sociaux perdus dans les catastrophes extensives dans 82 pays (Figure 4.9) est extrapolé à l’échelle mondiale, les pertes économiques directes seraient environ 60 % plus élevées que celles signalées à l’échelle internationale à travers la base de données EMDAT, soit un total d’environ 250 milliards de dollars américains pour 2012. Cette perte totale représente 0,33 % du PIB mondial, 1,4 % des investissements mondiaux en capital et une perte annuelle de plus de 35 dollars américains par habitant7. Pour les 1,4 milliard de

personnes qui vivent en dessous du seuil de pauvreté avec un revenu de moins de 1,25 dollar américain par jour8, la perte est équivalente à près de 8 % de leur revenu annuel. En particulier, ces pertes représentent une sérieuse érosion des investissements publics dans certains des pays qui disposent des moyens les plus limités pour investir. Par exemple, les pertes annuelles historiques moyennes dues aux catastrophes à Madagascar depuis 2001 sont équivalentes à environ 75 % des investissements publics moyens annuels pour la même période9 ; au Salvador, elles représentent près de 60 %, et au Vanuatu, elles dépassent 40 %. Le chapitre 2 a montré comment différents pays ont partiellement réussi à réduire la mortalité due aux catastrophes intensives à travers l’amélioration de la gestion des catastrophes. En revanche, le niveau croissant des risques extensifs montre que les différents pays n’ont pas été capables de

Figure 4.9 Pertes économiques signalées à l’échelle internationale et pertes supplémentaires signalées à l’échelle nationale dans 82 pays, 1990-2013

Milliards de dollars américains 70 Pertes supplémentaires issues des fichiers nationaux Pertes signalées par EM-DAT 60

50

40

30

20

10

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

(Source : EM-DAT et bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes.)

99


prendre en charge les facteurs de risque sous-jacents. L’augmentation des risques au niveau local infirme les succès de la réduction de la mortalité due aux catastrophes dans certains pays. C’est dans la réduction des pertes subies au niveau des actifs socio-économiques des collectivités que les différents pays ont réalisé le moins de progrès dans le cadre du CAH.

cours desquels plus de 8 700 personnes sont décédées, environ 4 500 personnes ont été blessées et près de 42 000 habitations ont été détruites.

L’augmentation des risques extensifs menace les efforts de réduction de la pauvreté et de réalisation des objectifs de développement durable en matière de pauvreté et de développement social, et souligne que comprendre et pratiquer la réduction des risques de catastrophe comme une gestion des catastrophes ne s’est pas révélé efficace pour éviter la création et l’accumulation de risques. Cette problématique sera explorée plus en détail dans les sections II et III de ce rapport.

5  Les deux États auxquels les Figures 4.3, 4.5, 4.6 et 4.7 font référence sont les États indiens d’Odisha et de Tamil Nadu.

2 http://www.desenredando.org/public/libros/1999/edete/. 3  Pour de plus amples informations concernant les bases de données nationales sur les pertes et les données utilisées dans ce rapport, voir le site www.desinventar.net. 4  82 pays et 3 États (Odisha et Tamil Nadu en Inde, et Zanzibar en Tanzanie) au total et pour des périodes variables. Pour accéder aux bases de données sur les pertes dues aux catastrophes et pour de plus amples informations concernant les pays et États inclus, voir le site www.desinventar.net.

6  Seul un très petit groupe de pays présente une tendance à la hausse qui peut être associée à une amélioration des comptes rendus, mais la population de ces pays et les impacts signalés sont faibles en comparaison de la majorité des pays disposant de bases de données sur les pertes dues aux catastrophes. Les pays où le biais des comptes rendus est limité comptent plus de 95 % de la population représentée (1,6 milliard) et 74 % de l’ensemble des rapports de l’échantillon. Les rapports sur les impacts de la mortalité montrent des évolutions similaires et stables, et les rapports sur d’autres types d’impacts montrent une augmentation légèrement supérieure, ce qui suggère que l’amélioration des comptes rendus doit être considérée comme l’une des causes de la hausse, mais avec une influence modérée à faible. Pour en savoir plus, voir l’annexe 2. 7 Produit intérieur brut (PIB) et formation brute de capital fixe (FBCF) 2013.

Notes

8  Données des Indicateurs du développement de la Banque mondiale : http://data.worldbank.org/.

1 Une nouvelle analyse des données nationales sur les pertes dues aux catastrophes montre qu’entre 1980 et 2013, 41 pays ont signalé un total de plus de 6 000 événements liés à des orages, au

9  Les investissements publics ont été calculés comme la moyenne du pourcentage annuel des investissements publics par rapport au PIB de 2001 à 2011, sur la base des données de la Banque mondiale.

100

Partie I - Chapitre 4


Chapitre 5

La rĂŠsilience mise Ă mal

101


Dans les pays où les PAM excèdent significativement les principaux indicateurs de progrès économique, tels que la croissance annuelle moyenne du PIB, les taux d’épargne nationaux ou le ratio des nouveaux investissements en capital par rapport aux actifs existants, il est impossible de garantir une croissance ne serait-ce que soutenable, pour ne pas dire durable. Lorsqu’un pays n’est pas capable d’absorber les pertes dues aux catastrophes, son économie peut être gravement perturbée. Un nombre significatif de pays est confronté à ce défi, même pour des événements dont la période de retour est de 50 à 100 ans. Dans les pays à faible revenu, et en particulier dans les PEID dont l’économie est modeste, les pertes dues aux catastrophes peuvent mettre à mal la résilience de l’économie, c’est-à-dire sa capacité à absorber les pertes et à se redresser. On ne dispose pas de données et d’éléments de preuve suffisants afin de montrer si la résilience économique a augmenté ou diminué depuis l’adoption du CAH. Les éléments existants concernant la distribution des risques et la capacité des différents pays à absorber les pertes mettent toutefois en lumière des différences nationales importantes en termes de niveau de revenu, de couverture d’assurance, de taille et de profil de l’économie et de capacité financière.

5.1

Les défis de la résilience au niveau national

Une économie peut être lourdement perturbée lorsqu’elle présente un ratio élevé des PAM par rapport à la valeur de ses actifs et de ses réserves. De même, la croissance économique future peut être compromise en présence d’un ratio élevé des PAM par rapport aux investissements en capital et aux réserves. Le développement social sera compromis lorsque le ratio des PAM par rapport aux dépenses sociales est élevé. Capacité de développement futur Les PAM peuvent être interprétées comme un coût, étant donné que les ressources utilisées pour couvrir les pertes dues aux catastrophes pourraient être utilisées pour le développement. 102

Partie I - Chapitre 5

Comme souligné au chapitre 3, dans certaines régions et pour certains niveaux de revenu, en particulier dans les PEID et certains pays à faible revenu, les estimations des PAM représentent une part significative des investissements en capital et des dépenses sociales, et les dépassent dans certains cas. Dans ces pays, les PAM sont aussi souvent significatives par rapport à d’autres indicateurs de progrès économique, tels que l’existence de réserves ou de taux d’épargne nationaux. Dans de telles circonstances, il est impossible de garantir une croissance ne serait-ce que soutenable, pour ne pas dire durable. Au final, la capacité d’un pays à se développer de manière durable dépendra de la combinaison de ces différents facteurs. Une économie peut être lourdement perturbée lorsqu’elle présente un ratio élevé des PAM par rapport à la valeur de ses actifs et de ses réserves. De nombreux pays ne seront pas en mesure de couvrir leurs PAM grâce aux réserves nationales, ce qui peut avoir un impact sur leur capacité à investir dans le développement socio-économique. Les pays qui disposent de réserves importantes seront mieux à même d’absorber les PAM, même élevées. De même, la croissance économique future peut être compromise en présence d’un ratio élevé des PAM par rapport aux investissements en capital et aux réserves. Le développement social sera compromis lorsque le ratio des PAM par rapport aux dépenses sociales est élevé. Au final, les pays où le développement et la réalisation des ODD seront les plus compromis par les risques de catastrophe sont ceux où les PAM représentent une part élevée des trois postes susvisés (Figure 5.1).


Figure 5.1 Pays présentant un ratio élevé des PAM par rapport aux dépenses sociales, aux actifs et réserves, et aux investissements en capital et réserves Indice 80

Indice 60

40

20

10

20

30

40

50

60

70

80

90

Madagascar Honduras Jamaïque Grèce Philippines Haïti Guatemala Iran

(République Islamique d’)

Viet Nam Japon Inde États Unis d’Amérique Nouvelle Zélande Chine Allemagne Impact sur les capacités de développement

Impact sur les dépenses sociales Impact sur les actifs et les réserves brutes

Indice = indice composite compris entre 1 (faible impact) et 100 (impact sévère)

Impact sur les investissements en capital et les réserves totales

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

Les pays où le développement est compromis comprennent non seulement les pays à faible revenu tels que Madagascar et Haïti, mais également des pays à revenu intermédiaire tels que le Honduras, la Jamaïque et les Philippines ainsi que des pays à revenu élevé tels que la Grèce. Bien que la Jamaïque et la Grèce présentent des PAM relatives beaucoup plus faibles que les Philippines, le Honduras ou Madagascar, les implications négatives pour le développement sont très similaires. Dans le même temps, alors que c’est la

croissance économique qui est la plus menacée en Grèce, c’est le développement social qui l’est le plus aux Philippines. Résilience budgétaire Budgétiser les pertes dues aux catastrophes sur la base des PAM est essentiel, mais ne suffit pas. Les PAM représentent une moyenne annuelle : elles ne garantissent pas la résilience économique et budgétaire face à des événements d’envergure pour les pays qui ne possèdent pas la résilience 103


budgétaire requise pour faire face à des pertes extrêmes mais peu fréquentes. La résilience budgétaire est généralement définie à travers les réserves internes et externes permettant d’absorber les chocs dus aux catastrophes. Une fois les réserves nationales épuisées, une approche courante consiste à puiser dans des budgets discrétionnaires, qui auront été le cas échéant préalablement constitués en vue du développement. Dans d’autres cas, les pays font appel aux prêts d’institutions financières internationales ou multilatérales pour se redresser, à la réallocation de fonds et à la réduction des capacités d’emprunt futures pour le développement, entravant ainsi la croissance future. Dans la plupart des pays à revenu élevé, une part significative des pertes économiques est assurée. Par exemple, lors des tempêtes de grêle survenues en juillet 2013 en Allemagne et en France, 3,8 milliards de dollars américains de pertes étaient assurés selon les estimations, sur un total de 4,8 milliards de dollars américains ; 1,9 milliard de dollars américains était également assuré sur un total de 4,7 milliards de dollars américains de pertes lors des inondations survenues en juin 2013 au Canada (Swiss Re, 2014a). En outre, malgré leur importance en valeur absolue, ces pertes sont rarement significatives par comparaison aux investissements en capital annuels de ces pays. En revanche, de nombreux pays à revenu plus faible et dont les économies sont plus modestes, notamment les pays les moins avancés (PMA) et les PEID, se trouvent confrontés à de sérieux défis compte tenu de la hausse des pertes économiques. Dans ces pays, la plupart des risques ne sont pas assurés et les gouvernements ne disposent pas des réserves financières ou de l’accès au financement des imprévus qui permettraient d’absorber les pertes, de se redresser et de reconstruire. Par exemple, bien que les estimations concernant les pertes totales causées par le typhon Haiyan varient, les observateurs conviennent tous que les pertes assurées ne représentent qu’une faible 104

Partie I - Chapitre 5

fraction des pertes globales en raison d’une faible pénétration des compagnies d’assurance dans la région. Par exemple, AIR Worldwide estime les dégâts totaux à une fourchette comprise entre 6,5 et 14,5 milliards de dollars américains, dont seulement 300 à 700 millions de dollars américains seraient assurés1. En fait, un nombre considérable de pays sont confrontés à un déficit de ressources pour les événements dont les périodes de retour sont inférieures à 100 ans. Par exemple, alors que le Canada et les États-Unis d’Amérique n’auraient des difficultés à absorber que l’impact de pertes correspondant à une période de retour de 1 sur 500 ans, l’Algérie, la Bolivie, le Chili, l’Indonésie, l’Iran, Madagascar, le Mozambique et le Pakistan auraient du mal à trouver les ressources requises pour absorber l’impact d’un événement d’une période de retour de seulement 1 sur 3 à 25 ans (Williges et al., 2014). Il est évident que les risques financiers sont considérables pour ces pays. Un nombre très significatif de pays ne réussiraient notamment pas un test de stress de leur capacité financière à absorber l’impact de pertes correspondant à une période de retour de 1 sur 100 ans (Figure 5.2)2. Country financing gap

Les investissements limités dans la réduction des risques existants et dans la prévention de la création de nouveaux risques, auxquels s’ajoutent une disponibilité limitée de réserves, de conventions de crédit pour les coûts prévisibles, de polices d’assurance et un faible accès à des options de financement d’urgence, conduisent à ce que beaucoup de PEID notamment soient soumis à des risques élevés et caractérisés par une faible résilience économique. Dans l’océan Indien, le calcul des risques à Madagascar, à Maurice, aux Comores et à Zanzibar (Figure 5.3) a constitué une première étape dans l’identification du seuil de perte au-delà duquel ces pays auraient des difficultés à financer le redressement. Dans ces pays, des pertes correspondant à une période de


retour de 500 ans exigeraient des ressources équivalentes à 7 à 18 % du PIB (Williges et al., 2014). Les pays qui présentent un important déficit budgétaire sont généralement incapables d’affecter des fonds à la prise en charge d’importantes pertes

en cas de catastrophe et doivent par conséquent utiliser d’autres mécanismes, notamment l’imposition, les crédits nationaux et internationaux, les réserves étrangères, les obligations d’État, l’assistance internationale et les instruments de financement du risque. En utilisant tous ces mécanismes

Figure 5.2 Pays confrontés à un déficit de financement pour des pertes associées à un événement d’une période de retour de 1 sur 100 ans

Déficit pour un événement d'une période de retour de 1 sur 100 ans

[2005, millions de dollars américains] <146 147-244 245-420 421-927 928-3 300 >3 300 Pas de déficit pour un événement d'une période de retour de 1 sur 100 ans Données peu fiables pour les pays ayant enregistré moins de 5 événements avec des pertes économiques

(Source : Williges et al., 2014.)

Figure 5.3 Risques de catastrophe à Zanzibar, à Maurice, à Madagascar et aux Comores

Fréquence de dépassement des pertes [1/an]

Période de retour (années)

100

10 fois par an

10

0,1

Catastrophes intensives

1

Période de retour de 1 sur 10 ans

Période de retour de 1 sur 10 000 ans

0,01

Catastrophes extensives

1

0,1

10

0,01

100

0,001

1 000 Madagascar

0,0001

Maurice

10 000

Comores Zanzibar

0,00001 0,001

100 000 0,01

0,1

1

1 million de dollars américains

10

100

1 000

1 milliard de dollars américains

10 000

100 000

Pertes économiques

[millions de dollars américains]

(Source : UNISDR, données du CIMNE.)

105


de financement, Maurice demeurerait néanmoins confrontée à un déficit de ressources pour n’importe quelle perte due à des vents cycloniques et un séisme d’une période de retour de 62 ans ou plus (Figure 5.4). La période de retour est de seulement 24 ans pour Madagascar et de 28 ans pour les Comores (Mochizuki et al., 2014). Une capacité limitée à absorber les pertes peut accroître le coût économique indirect d’une catastrophe et ralentir le redressement (UNISDR, 2013a). Par exemple, les perturbations du secteur des transports en raison de retards dans les opérations de reconstruction à l’issue d’une catastrophe peuvent avoir un impact sur toute une série d’autres secteurs, comme le secteur manufacturier et le commerce de détail. L’accès à des mécanismes de financement ex ante peut toutefois prévenir ce problème (Williges et al., 2014). Par exemple, en supposant qu’un financement de la reconstruction est disponible au Cambodge 6 mois à 1 an après une catastrophe3, l’accès à un financement ex ante, par exemple une convention de crédit pour les coûts prévisibles visant à faciliter un redressement plus rapide, contribuerait à limiter la baisse de la production économique à travers tout un

éventail de secteurs, à hauteur de plus de 1 million de dollars américains dans le commerce de détail, de près de 6 millions de dollars américains dans le secteur des transports et de 7,5 millions de dollars américains dans le secteur manufacturier (Ibid.). En plus des mécanismes de financement ex ante, les investissements dans des mesures de réduction des risques de catastrophe devraient réduire significativement l’impact négatif des catastrophes sur la croissance économique (UNISDR, 2013a). Des analyses antérieures ont montré, par exemple, qu’un événement d’une période de retour de 1 sur 100 ans au Honduras pourrait engendrer des pertes directes atteignant 33 % ainsi que des pertes indirectes supplémentaires et cumulées allant jusqu’à 24 % du PIB. De nouvelles simulations de la croissance réelle du PIB après des impacts historiques de catastrophes au Honduras (avec et sans investissement préalable dans la réduction des risques de catastrophe) montrent que ces pertes pourraient être réduites de manière importante en investissant dans la réduction des risques4. Il est intéressant de relever que les simulations montrent également que dans un pays tel que le Honduras, où des catastrophes très intensives surviennent

Millions de dollars américains

Figure 5.4 Déficit de financement face aux risques de vents cycloniques et de séismes à Maurice

Assistance

Crédit national

Emprunts obligataires

Ponction

IFM

Déficit de financement

350 300 250 200 150 100 50 0 10

20

30

40

50

60

70 Période de retour

(Source : Mochizuki et al., 2014.)

106

Partie I - Chapitre 5


relativement fréquemment, même des investissements plus importants visant à réduire le risque d’événements à grande échelle se justifient du point de vue financier et économique. Dans les pays où les investissements sont très faibles, le redressement peut nécessiter des années lorsqu’une catastrophe détruit une part significative des actifs. Les pays dont l’économie est modeste et vulnérable présentent une rési-

lience particulièrement faible, car la totalité de leur économie peut être dévastée. Si leur marge de manœuvre budgétaire est également limitée, ils peuvent aussi rencontrer des difficultés à financer le redressement (UNISDR, 2009a). L’effet cumulatif des pertes dues aux catastrophes sur le capital fixe peut être dramatique dans les PEID tels que le Vanuatu (Figure 5.5) ou dans les petits pays tels que le Belize5. Selon les estimations, le

Figure 5.5 Croissance économique nationale avec et sans pertes dues aux catastrophes Millions de dollars américains 4 000 Formation brute de capital fixe

Maldives

3 500

Formation brute de capital fixe Pertes économiques - Toutes catastrophes confondues

3 000

Catastrophes engendrant des pertes économiques

Millions de dollars américains 1 800

Vanuatu

1 600 1 400 1 200

2 500

1 000 1 500

800

2 000

600

1 000

400

500

200

1975

1980

1985

1990

1995

2000

2005

1975

2010

Iles Caïmanes

Millions de dollars américains 18 000 16 000

1980

1985

1990

1995

2000

2005

Millions de dollars américains 4 000

2010 Belize

3 500

14 000

3 000

12 000

2 500

10 000 1 500

8 000

2 000

6 000

1 000

4 000

500

2 000 1975

1980

1985

1990

1995

2000

2005

Millions de dollars américains 18 000 000

1975

2010 Chine

16 000 000

1980

1985

1990

1995

2000

2005

Millions de dollars américains 350 000

2010 Mexique

300 000

14 000 000 250 000

12 000 000 10 000 000

200 000

8 000 000

150 000

6 000 000

100 000

4 000 000 50 000

2 000 000

1975

1980

1985

1990

1995

2000

2005

2010

1975

1980

1985

1990

1995

2000

2005

2010

(Source : Baritto, 2014, données EM-DAT et Banque mondiale.)

107


Belize a perdu près de 18 % de ses investissements cumulés depuis 1970, en raison des catastrophes qui l’ont frappé au cours des 20 dernières années. Pour le Vanuatu, le chiffre est de pas moins de 24 % des investissements depuis 1970. Même dans les petits États insulaires à revenu élevé, les pertes économiques peuvent avoir un effet très perturbateur sur le développement économique. Par exemple, les Îles Caïmanes ont subi des pertes significatives à la suite de l’ouragan Ivan en 2004 et leur économie ne s’est pas encore pleinement redressée, ce qui a conduit à une réduction des investissements cumulés de près de 23 % depuis 1970.

La Anemona est une communauté de près de 200 familles à la périphérie de San Salvador, qui est née d’une catastrophe (Figure 5.6). Lorsque l’ouragan Ida a balayé le Salvador en 2009, la population de La Anemona a subi de lourdes pertes et a décidé de quitter ses anciennes habitations. Les terres que ces familles ont choisies sont dépourvues des infrastructures et services de base ainsi que de titres fonciers, mais ce sont les seules terres inoccupées qu’elles ont pu trouver6. Figure 5.6  La Anemona, El Salvador

En revanche, de grandes économies telles que la Chine et le Mexique semblent disposer d’une capacité suffisante pour absorber les pertes liées à un grand nombre d’événements, sans effet significatif sur la croissance économique au cours des années qui suivent l’événement. Alors que le CAH touche à son terme, il apparait également de plus en plus évident que les pertes dues aux catastrophes ont un impact négatif sur les perspectives de croissance à long terme des pays dont les liquidités et les actifs sont limités (Hochrainer, 2009 ; Noy, 2009), en dépit d’augmentations potentielles à court terme du PIB dues aux efforts de reconstruction et d’importantes injections de liquidités dans l’économie locale (Kim, 2010 ; Cavallo et al., 2009 ; Albala-Bertrand, 1993 et 2006 ; Skidmore et Toya, 2002). Par exemple, les simulations de l’impact des cyclones pour différents pays montrent que les performances économiques à moyen terme seraient affectées défavorablement par les pertes dues aux catastrophes (UNISDR, 2013a).

5.2

Sans aucun chez-soi

Lorsque des catastrophes touchent des populations déjà vulnérables, les modèles de migration et de déplacement eux-mêmes peuvent devenir les facteurs de nouveaux risques. 108

Partie I - Chapitre 5

(Source : Lynette Wilson/Episcopal News Service.)

Près de 90 % des terres du Salvador et plus de 95 % de sa population sont considérées comme soumises à des risques de catastrophe.7 Les exemples de communautés telles que celle de La Anemona abondent, et montrent des modèles similaires de création de nouveaux risques à travers les migrations et les déplacements (Encadré 5.1). Les nouvelles données mondiales permettent une mise à jour des estimations du nombre de personnes déplacées par des catastrophes (IDMC, 2014). Les chiffres ne sont pas encourageants, en particulier pour les catastrophes liées à des phénomènes météorologiques, car ils montrent clairement une tendance à la hausse (Figure 5.7) avec 143,9 millions de personnes déplacées par des catastrophes pour la seule période comprise entre 2008 et 2012. Les déplacements sont en particulier associés aux catastrophes liées à des phénomènes météorologiques (Figure 5.8). Les estimations internatio-


Encadré 5.1 Mobilité et vulnérabilité en Alaska

Le peuple Kigiqitamiut, une petite communauté Iñupiat de la mer de Béring en Alaska, avait pour habitude de recourir à la mobilité comme stratégie d’adaptation, ayant depuis des siècles mené un mode de vie nomade fondé sur la pêche et la chasse. Mais au début du XXe siècle, le gouvernement a encouragé leur sédentarisation (Marino, 2011), créant ainsi de nouveaux risques en enfermant le peuple Kigiqitamiut dans un mode de vie sédentaire au sein d’un environnement exposé à des aléas et créant une dépendance vis-à-vis de produits non locaux. Au cours des dernières décennies et malgré la mise en place de mesures de protection, des habitations et des infrastructures de base ont été détruites par la réduction des glaces marines, des vents et des tempêtes plus fréquents, une érosion côtière accrue et une recrudescence des inondations (Ibid.). Aujourd’hui, le changement climatique vient s’ajouter aux défis rencontrés par cette communauté et la question de la relocalisation de tout le village de Shishmaref est devenue une préoccupation majeure, qui s’est traduite par la création de la Shishmaref Erosion and Relocation Coalition en 2001 (USGAO, 2009). La relocalisation de Shishmaref ne va toutefois pas sans obstacle. Tout d’abord, le coût est estimé à environ 180 millions de dollars américains pour seulement 609 habitants (Ibid.). Bien que la législation américaine prévoie des dispositions pour le « redressement à travers la reconstruction », aucune disposition claire n’existe pour les cas où une relocalisation complète est requise. Dans le cas de Shishmaref, une reconstruction in situ ne serait pas durable à long terme compte tenu de l’élévation du niveau de la mer et de l’érosion côtière. Enfin, le manque de coordination entre les différents acteurs et les agences gouvernementales constitue également un obstacle à une relocalisation efficace (Marino, 2011). Le cas du peuple Kigiqitamiut montre que des changements sociaux radicaux peuvent être attendus et que des investissements ne devront pas seulement être réalisés dans les PEID et les pays à faible revenu. À Shishmaref, une communauté minoritaire marginalisée au sein de l’un des pays les plus riches du monde, les prédictions concernant les risques climatiques sont déjà devenues une réalité. D’autres régions du monde pourraient bientôt suivre.

et la dynamique complexe des migrations et des déplacements, les projections quantitatives des tendances futures présentent un faible niveau de

nales des tendances et modèles de déplacement sont rendues difficiles par le peu de données disponibles. Étant donné le caractère multivariable Figure 5.7 Personnes déplacées par des catastrophes depuis 1970 80 000 000 Aléas météorologiques

Aléas géologiques

70 000 000

60 000 000

50 000 000

40 000 000 R2 = 0,346

30 000 000

20 000 000

10 000 000 R2 = 0,099

1970

1975

1980

1985

1990

1995

2000

2005

2010

2013

(Source : IDMC, 2014.)

109


Figure 5.8 Personnes déplacées par des phénomènes météorologiques et des aléas géophysiques Millions 50

40

30 19,3 38,3

20

31,7 10 16,7

2008

15,3

15,3

1,5

4

1,1

0,7

2009

2010

2011

2012

Aléas météorologiques

Aléas géophysiques

(Source : IDMC, 2014.)

confiance, même si les observateurs conviennent que le changement climatique aura un impact sur les déplacements futurs et sur leur profil (GIEC, 2014 ; Gemenne, 2010). Lorsque des données sont disponibles, elles soulignent que l’impact des catastrophes va bien audelà de la perte immédiate d’actifs. Les estimations indiquent par exemple, que 165 millions de personnes ont été déplacées par des catastrophes entre 2008 et 2014 (IDMC, 2014). Bien que la mobilité, les migrations et les déplacements puissent parfois être les conséquences de catastrophes, ils peuvent également être les facteurs de nouveaux risques de catastrophe (OIM, sans date). L’investissement et le développement économique dans les régions soumises à des aléas attirent des populations dans ces endroits. En conséquence, la population dans les régions soumises à des aléas augmente proportionnellement plus rapidement qu’ailleurs (UN-HABITAT, 2010 ; UNISDR, 2011a ; Lall et Deichmann, 2011). La mobilité humaine a toujours été une stratégie de gestion du risque environnemental et des ressources naturelles (Oteros-Rozas, 2012 ; 110

Partie I - Chapitre 5

Warner et al., 2012 ; Castillo, 2011). Mais de plus en plus souvent, les risques sociaux et politiques quotidiens s’ajoutent aux pressions qui pèsent sur les groupes marginaux au sein de la société et les incitent à la migration (Schensul et Dodman, 2013). Les déplacements locaux peuvent également augmenter l’exposition et la vulnérabilité aux aléas en augmentant la pression sur des ressources déjà fragiles (de Sherbinin et al., 2007 ; UNISDR, 2009a ; Peduzzi, 2010) et les déplacements urbains constituent un facteur particulièrement important de risques de catastrophe (GIEC, 2014). Lorsque des établissements informels sont démolis pour laisser la place à des centres commerciaux, des appartements de luxe et des hôtels (Menon-Sen et Bhan, 2008), des populations sont fréquemment déplacées vers d’autres sites soumis à des aléas. Les migrations et les déplacements mettent donc en lumière le rôle important que la vulnérabilité continuera de jouer dans l’augmentation des risques de catastrophe au cours des années à venir. Ageing and climate change

Le cas des personnes âgées Hormis les migrations et les déplacements, l’évolution démographique continuera à façonner les modèles et les tendances des risques, notamment des risques complexes et systémiques. Le vieillissement de la population dans les pays de l’OCDE, mais également dans certaines économies émergentes, signifie qu’une part croissante des populations touchées va dépasser la barre des 60 ans, ce qui augmentera le nombre des décès et les impacts à long terme sur le bien-être et les moyens de subsistance d’une grande partie de la population. Des événements récents montrent que cette tendance est déjà d’actualité : 71 % des décès cau-


sés par l’ouragan Katrina et près de 50 % de ceux causés par l’ouragan Sandy concernaient des personnes de 60 ans ou plus (Parry, 2013). Durant les vagues de chaleur telles que celle qu’a connue l’Europe en 2003, la plupart des décès concernaient des personnes âgées (OCDE, 2014a).

5.3

Les défis de la résilience au niveau international

L’écart croissant entre la demande d’intervention face aux catastrophes et les fonds mondiaux disponibles souligne la nécessité d’une réduction efficace des risques de catastrophe. Le manque de ressources est significatif dans plusieurs pays, même pour des événements relativement fréquents. Il existe également un manque de ressources humanitaires qui peut s’exprimer comme la différence entre les pertes estimées et les fonds fournis par la communauté humanitaire internationale. Bien qu’il ait été internationalement reconnu que les interventions et les secours en cas de catas-

trophe ne constituent pas un pilier durable de la gestion des risques de catastrophe, les chiffres récents rappellent cruellement que le déficit humanitaire continue de se creuser (Figure 5.9). Alors que les demandes de financement humanitaire ont plus que quadruplé au cours des 20 dernières années, l’écart entre les fonds demandés et les fonds fournis s’est creusé de plus de 800 %. En d’autres termes, les besoins de financement mondiaux augmentent, tandis que les capacités nationales et internationales pour y répondre ne croissent pas à la même vitesse. Plutôt que de justifier la nécessité de plus d’assistance humanitaire, ceci justifie plutôt l’investissement dans la réduction des risques de catastrophe. Au final, le manque croissant de ressources humanitaires n’est pas tenable et une approche reposant principalement sur l’intervention une fois les catastrophes survenues est de plus en plus vouée à l’échec. Au niveau mondial, les manques de ressources varient de manière significative pour différentes strates de risque (Figure 5.10). Par exemple,

Figure 5.9 Fonds demandés et reçus via les appels des Nations Unies (Procédure d’appel global (CAP) et appels éclairs) Milliards de dollars américains 15 Fonds demandés

Écart

Fonds reçus

12

9

6

3

1992

1995

1998

2001

2004

2007

2010

2013

(Source : UNOCHA, 2014a.)

111


Figure 5.10 Manques de ressources pour différentes strates de risque au niveau mondial Coût mondial (2005, milliards de dollars américains) Périodes de retour

5

10

15

20

25

250 - 500

100 - 250

50 - 100 Maximum (pas de plafond) iveau de ré érence p a ond de 25 mi iards

10 - 50

inimum p a ond de 5 mi iards

(Source : Hochrainer-Stigler et al., 2014.)

combler les ressources manquantes causées par les pertes d’une période de retour de 10 à 50 ans exigerait plus de 2,5 milliards de dollars américains par an à l’échelle mondiale (Hochrainer-Stigler et al., 2014). Ceci repose sur l’hypothèse que le montant maximal qu’un pays peut recevoir est plafonné, comme cela est habituellement le cas auprès des réassureurs (versements moyens). En supposant que les versements qui peuvent être faits à un pays ne sont pas plafonnés, les besoins de financement augmentent de manière spectaculaire, allant de 3,3 milliards de dollars américains par an pour une perte correspondant à une période de retour de 10 à 50 ans jusqu’à plus de 20 milliards de dollars américains par an pour une perte correspondant à une période de retour de 250 à 500 ans.

112

Partie I - Chapitre 5

Notes 1 http://www.air-worldwide.com/Press-Releases/AIR-EstimatesInsured-Losses-from-Super-Typhoon-Haiyan-at-Between-USD300-Million-and-USD-700-Million. 2 Les calculs reposent sur les résultats du modèle de risque mondial de l’UNISDR pour les séismes, les cyclones tropicaux, les ondes de tempête et les tsunamis. Les estimations des pertes causées par des inondations ont été obtenues en associant les observations empiriques sur le terrain et les courbes de perte paramétrées. Ces résultats ne doivent pas être utilisés pour des analyses approfondies au niveau national. Pour de plus amples informations sur la méthodologie, voir Williges et al., 2014 et Hochrainer-Stigler et al., 2014. 3 Informations fournies par l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA) dans le cadre de l’élaboration du Bilan mondial 2015. Les simulations ont été réalisées à l’aide du modèle DR2AD amélioré de la JICA, un modèle économique qui permet aux décideurs politiques d’évaluer les impacts des catastrophes et les avantages des investissements dans la réduction des risques de catastrophe à différents moments. 4 Un calcul similaire avait été réalisé pour le Bilan mondial 2009. Les résultats obtenus à l’époque ont été confirmés par cinq années supplémentaires de données et l’analyse a été mise à jour. 5 http://episcopaldigitalnetwork.com/ens/2013/06/25/natural-disasters-displacement-perpetuate-poverty-in-el-salvador/. 6 http://www.pnud.org.sv/2007.




Partie II

Au cœur de la gestion des risques de catastrophe

115


Depuis la déclaration de la DIPCN en 1990 et en particulier depuis l’adoption du CAH en 2005, le secteur de la gestion des risques de catastrophe a connu une croissance exponentielle tant en termes d’ampleur que de visibilité. On peut considérer que le secteur de la gestion des risques de catastrophe a pour la première fois pris conscience de sa propre existence lors de la Conférence internationale sur la mise en œuvre du programme d’atténuation des effets des catastrophes qui s’est tenue à Ocho Rios, en Jamaïque, en 1984 (Virginia Polytechnic Institute, 1985). Pourtant, seuls 51 participants internationaux assistèrent à cette conférence, ce qui illustre la taille modeste du secteur à cette époque. En revanche, la quatrième session de la Plate-forme mondiale pour la réduction des risques de catastrophe qui s’est tenue à Genève en mai 2013 a attiré plus de 3 500 participants, dont 172 délégations gouvernementales, 240 organisations non gouvernementales, 175 entreprises, 30 parlementaires issus de 26 pays ainsi que des représentants de gouvernements locaux et du monde scientifique et académique. Sur une période de 30 ans, la taille du secteur s’est développée selon deux axes. PreventionWeb, le portail mondial pour l’information sur la gestion des risques de catastrophe hébergé par les Nations Unies recense à présent 32 600 professionnels actifs dans le secteur de la gestion des risques de catastrophe, contre 5 000 en 20061. Ceci ne représente qu’une faible proportion des personnes qui travaillent effectivement dans le secteur au niveau national ou local. Selon PreventionWeb, 1 127 conférences, séminaires, ateliers et autres événements ont été tenus en 2013, contribuant à établir des liens au sein du secteur et à en favoriser l’intégration, ce qui ne représente encore une fois qu’une petite proportion des événements organisés au niveau national et local. À mesure du développement du secteur, les autoévaluations préparées par les gouvernements 116

Partie II

à l’aide de l’outil HFA Monitor (UNISDR, 2011b ; 2013b ; 2013c ; UNISDR et al., 2009) ont montré un énorme investissement des gouvernements à travers de nouvelles lois et instruments, des politiques, des affectations de budget, des systèmes d’information, des mécanismes d’alerte précoce, la préparation aux catastrophes, et dans une moindre mesure, la gestion corrective des risques de catastrophe. Les rapports d’avancement dans le cadre du CAH ont souligné que les gouvernements se sont non seulement engagés vis-à-vis de l’objectif politique de réduction des risques de catastrophe, mais ont également consenti des efforts considérables pour la réalisation de cet objectif. Hyogo Framework for Action

Depuis 2007, 146 gouvernements ont participé à au moins un cycle d’évaluation du CAH à l’aide de l’outil en ligne HFA Monitor. Pour le cycle 20112013, 136 pays ont soumis des rapports et les gouvernements ont signalé un niveau croissant de mise en œuvre du CAH (Figure II.1) au fil du temps. Le cycle d’évaluation 2013-2015 est en cours pour la préparation du cadre devant succéder au CAH et les rapports nationaux contribueront à donner une image complète des progrès réalisés dans la mise en œuvre du CAH. Il est malgré tout difficile d’évaluer dans quelle mesure les progrès signalés à travers l’outil HFA Monitor ont véritablement conduit à des résultats mesurables en termes de réduction des risques de catastrophe. En d’autres termes, même si le succès retentissant du CAH en tant que catalyseur de l’action ne fait aucun doute, l’efficacité de toutes les actions menées demeure quant à elle beaucoup moins claire. L’outil HFA Monitor s’articule autour de 22 indicateurs de base qui couvrent cinq priorités d’action. Ces indicateurs de base sont généraux : ils synthé-


Figure II.1 Progrès dans la mise en œuvre du CAH (2007-2013) Note moyenne de progrès 3,5

3,4

3,3

3,2

3,1

3

2,9

Outils de gouvernance et institutionnels 2007-2009

2009-2011

Identification du risque et alerte précoce

Connaissance et éducation

2011-2013

Risque sous-jacent

Préparation et intervention

Domaines de priorité du CAH

(Source : UNISDR, 2013a.)

tisent les consignes beaucoup plus spécifiques fournies par le CAH concernant les activités clés et font référence à de multiples domaines de la politique publique et des actions menées par les différents acteurs. HFA Query Builder

C’est pourquoi les rapports d’avancement permettent rarement de déterminer clairement quelles actions ont apporté une réelle contribution aux progrès signalés pour chaque indicateur de base, et par qui celles-ci ont été menées. Pour nombre de ces activités principales, on ne sait pas si des progrès ont réellement été réalisés. En conséquence, lorsque les risques de catastrophe ont été réduits, il est souvent difficile de déterminer quels sont les politiques, les stratégies ou les instruments qui ont contribué à cette réduction. En même temps, les indicateurs de base mesurent les initiatives visant la réduction des risques de

catastrophe plutôt que les résultats effectivement obtenus. Par exemple, l’outil HFA Monitor fournit des informations concernant l’adoption de nouvelles politiques nationales (moyen mis en œuvre), mais ne prévoit aucune mesure du degré de mise en œuvre de ces politiques (résultat) ou de la véritable réduction de risque obtenue (résultat). Par conséquent, bien que l’élan du secteur de la gestion des risques de catastrophe au cours du CAH soit indéniable, son efficacité demeure incertaine. Le développement d’initiatives n’indique pas nécessairement l’obtention des résultats souhaités. En outre, bien que l’outil HFA Monitor identifie les initiatives menées dans le secteur de la gestion des risques de catastrophe, il n’intègre pas nécessairement les actions menées dans le cadre des agendas pour l’environnement, la réduction de la pauvreté, l’énergie ou la lutte contre le changement climatique susceptibles d’avoir contribué à la réduction des risques de catastrophe, ou encore les actions d’autres acteurs, notamment du secteur privé et de la société civile. 117


Le corpus des rapports d’avancement nationaux soumis dans le cadre de l’évaluation du CAH constitue à présent l’ensemble d’informations le plus complet concernant la mise en œuvre du CAH par les différents pays. Vues dans une perspective plus large cependant, ces informations se limitent largement au CAH lui-même. L’outil HFA Monitor documente de véritables réalisations dans le développement des politiques, des lois, des systèmes d’information et des cadres institutionnels recommandés par le CAH, mais pas la réalisation de l’objectif politique de réduction des risques de catastrophe. Lorsque les succès remportés dans la mise en œuvre de certains éléments du CAH se combinent à des succès dans la réduction des risques de catastrophe, il existe une réelle possibilité que le secteur de la gestion des risques de catastrophe s’illusionne. La croissance rapide du secteur et ses succès apparents dans la mise en œuvre du CAH ont généré une hyperréalité qui s’auto-alimente (Baudrillard, 1994 ; Eco, 1986)2. Dans cette hyperréalité, la perception de progrès et de réalisations dans la gestion des catastrophes contraste avec le manque de progrès dans la prise en charge des facteurs de risque sous-jacents. Afin de déterminer plus clairement si les initiatives décrites à travers l’outil HFA Monitor ont bien conduit aux résultats escomptés et d’identifier les facteurs de succès communs et les défis, une ana-

lyse par les pairs a été demandée dans le cadre de l’élaboration du Bilan mondial 2015 afin de compléter les résultats des évaluations menées à l’aide de l’outil HFA Monitor (Encadré II.1). L’évaluation par les pairs a comblé de nombreuses lacunes en termes de connaissances. D’une manière générale, des indicateurs de résultat systématiques et comparables font pourtant toujours défaut. Leur définition permettrait une évaluation plus rigoureuse des résultats réellement obtenus pour chaque priorité d’action, par exemple le nombre de bâtiments construits conformément à des codes de manière à résister aux catastrophes, la proportion de bassins hydrographiques protégés, la couverture des systèmes d’alerte précoce ou encore la proportion des investissements publics ou privés raisonnés en fonction des risques. C’est pourquoi l’évaluation repose encore trop sur des éléments anecdotiques, à partir desquels des tendances plus générales doivent être induites. Cette section du rapport utilise les éléments de l’évaluation par les pairs ainsi que les résultats de l’outil HFA Monitor afin d’examiner plus en profondeur le secteur de la gestion des risques de catastrophe. Le chapitre 6 examine comment et pourquoi la compréhension et la pratique de la gestion des risques de catastrophe comme une gestion des catastrophes ne se sont pas révélées efficaces afin de prévenir et éviter la création et l’accumulation de risques. Le chapitre 7 analyse

Encadré II.1  Évaluation par les pairs des progrès dans la réalisation du résultat escompté du CAH

Les 22 indicateurs de base du CAH ont été divisés en treize domaines de recherche, avec quatre domaines supplémentaires couvrant des sujets qui n’étaient pas explicitement prises en compte par les indicateurs de base, à savoir les risques interconnectés et interdépendants, les investissements privés dans la réduction des risques de catastrophe, l’adaptation au changement climatique et son atténuation, et les standards et mécanismes normatifs pour la gestion des risques de catastrophe. Les évaluations ont été coordonnées par des organisations des Nations Unies, la Banque mondiale, l’Organisation de coopération et de développement économiques et d’autres institutions, en fonction de leur expertise sectorielle spécifique. À l’issue d’un appel à contribution ouvert, plus de 200 rapports ont été reçus et un rapport de synthèse a été préparé et évalué par des pairs pour chaque domaine d’analyse3.

118

Partie II


la production sociale des informations sur les risques et remet en question l’efficacité de la sensibilisation et de l’information du public dans la génération d’une culture de prévention. Le chapitre 8 examine le renforcement de la gestion des catastrophes, tout en soulignant les défis qui subsistent en matière de redressement à l’issue de catastrophes.

Notes 1 www.preventionweb.net. 2  Baudrillard (1994) a défini l’hyperréalité comme « la génération par les modèles d’un réel sans origine ou réalité ». Eco (1986) le rejoint en suggérant que l’hyperréalité fait désirer la réalité et suscite la fabrication d’une fausse réalité à consommer comme réelle dans le but de satisfaire ce désir. 3  Pour la liste complète des domaines de recherche et les notes conceptuelles correspondantes, voir http://www.preventionweb. net/english/professional/networks/private/hfa-thematic-review.

119



Chapitre 6

Gouvernance des risques de catastrophe

121


Le modèle de gouvernance des risques de catastrophe proposé par le CAH est l’un des domaines dans lesquels les différents pays rapportent les progrès les plus importants. Des efforts ont été consentis non pas par une minorité, mais par une large majorité de pays. Bien qu’encore inachevé, le passage de la gestion des situations d’urgence à la gestion des risques de catastrophe s’accélère. Dans la pratique toutefois, la plupart des ressources continuent d’être investies dans le renforcement des moyens de gestion des catastrophes et les succès dans l’application des politiques, des normes et des réglementations visant à gérer et à réduire les risques à travers les différents secteurs du développement restent limités.

6.1

Rôle catalyseur du CAH

Des progrès significatifs ont été réalisés dans certains domaines. Plus de 100 pays ont aujourd’hui pris des dispositions institutionnelles spécifiques pour la réduction des risques de catastrophes. Depuis 2007, plus de 120 pays ont mené des réformes légales ou politiques, plus de 190 pays ont mis en place des points focaux pour la réduction des risques de catastrophe et 85 d’entre eux ont créé des plateformes nationales impliquant les différents acteurs concernés. La gouvernance désigne les différents moyens par lesquels un gouvernement, le secteur privé et d’une manière générale l’ensemble des individus et institutions au sein d’une société s’organisent pour gérer leurs affaires communes (PNUD, 2010). Le concept de gouvernance englobe des mécanismes formels et explicites tels que la législation, les politiques, les normes contraignantes et les procédures administratives à travers lesquelles les sociétés sont organisées, ainsi que tout l’éventail des dispositions informelles et implicites qui président aux relations sociales, économiques et politiques ainsi qu’à la gestion du territoire et des ressources1. Les outils de gouvernance évoluent au fil du temps dans le contexte plus large de l’économie politique, en reflétant la manière dont les relations sociales, économiques et politiques se nouent et s’entrelacent dans l’espace et dans le temps pour 122

Partie II - Chapitre 6

incarner les valeurs symboliques qui les justifient et découlent de principes tels que la démocratie, la liberté, les droits de l’homme ou l’État-nation (Ishiwatari, 2013). Au sein de cette définition générale de la gouvernance, la gouvernance des risques de catastrophe désigne les dispositions particulières mises en place par les sociétés afin de gérer les risques de catastrophe (UNISDR, 2011a ; PNUD, 2013a ; Gall et al., 2014a), dans le contexte plus large de la gouvernance des risques (Renn, 2008). Ceci reflète comment le risque est valorisé parmi l’ensemble des préoccupations socio-économiques (Holley et al., 2011). Par exemple, l’adoption et l’application par un pays d’un code de construction parasismique reflètent tout autant l’importance de bâtiments sûrs pour le développement économique et le bien-être social que pour la protection contre les risques sismiques. Le CAH a largement mis l’accent sur différents aspects de la gouvernance (Encadré 6.1), notamment le développement de cadres institutionnels et législatifs, l’affectation des ressources et la mobilisation des collectivités. Le modèle de gouvernance des risques de catastrophe proposé par le CAH a été influencé par l’approche adoptée par la Colombie en 1989 et ultérieurement par de nombreux autres pays à faible revenu et à revenu intermédiaire (avec d’importantes variations). Ce modèle met en avant une approche systémique intégrée horizontalement et verticalement ainsi qu’une solide coordination entre les différents


Encadré 6.1  Activités principales liées à la gouvernance des risques de catastrophe dans le CAH

Cadres institutionnels et législatifs nationaux : (a) Appuyer la création de mécanismes nationaux intégrés de réduction des risques de catastrophe, notamment de programmes nationaux plurisectoriels, [...] avec des responsabilités bien précises [...] de l’échelon national à l’échelon local, afin de faciliter la coordination entre les différents secteurs. Les programmes nationaux devraient aussi faciliter la coordination intersectorielle, notamment la poursuite d’un dialogue très ouvert aux niveaux national et régional pour sensibiliser les secteurs concernés. (b) Intégrer la gestion et la réduction des risques, selon ce qu’il convient, dans les politiques et les plans de développement des pouvoirs publics à tous les échelons notamment dans les stratégies de lutte contre la pauvreté et dans les politiques et les plans sectoriels et plurisectoriels. (c) Adopter une législation à l’appui de la réduction des risques de catastrophe en prévoyant notamment des règlements et des mécanismes de nature à encourager le respect de ces dispositions et à inciter à entreprendre des activités de réduction des risques et d’atténuation des effets, ou modifier, au besoin, la législation existante. (d) Compte tenu de l’importance et de la diversité des profils et évolutions des risques au niveau local, recourir à la décentralisation en confiant la responsabilité de la réduction des risques de catastrophe et les ressources prévues à cet effet aux autorités infranationales ou locales compétentes, selon le cas. Ressources (e) Évaluer les ressources humaines disponibles pour la réduction des risques de catastrophe à tous les niveaux et élaborer des plans et des programmes de renforcement des capacités afin de pourvoir aux besoins actuels et futurs dans ce domaine. (f) Prévoir des ressources pour l’élaboration et l’application de politiques, programmes, lois et règlements concernant la réduction et la gestion des risques de catastrophe dans tous les secteurs, à tous les échelons de l’administration et dans tous les budgets pertinents en fonction d’un ordre de priorité clairement établi. (g) Les gouvernements devraient manifester la ferme volonté politique qui est nécessaire pour promouvoir la réduction des risques de catastrophe et intégrer celle-ci dans les programmes de développement. Participation des collectivités (h) Encourager les collectivités à participer aux activités de réduction des risques de catastrophe par différents moyens − adoption de politiques spécifiques, promotion du travail en réseau, gestion stratégique du volontariat, attribution de fonctions et de responsabilités, délégation des pouvoirs nécessaires et mise à disposition des ressources voulues. (CAH, 2005)

secteurs et la délégation des responsabilités au niveau local sur la base du principe de subsidiarité. Il met l’accent sur l’adoption de réglementations et d’autres mécanismes afin d’assurer le respect des règles mises en place, notamment à travers des mesures incitatives. Le modèle recommande également l’allocation de budgets spécifiques à la réduction des risques de catastrophe et met en avant la participation des bénévoles et des collectivités. Dans le même temps, il souligne l’importance de l’intégration de la réduction des risques de catastrophe dans les politiques de développement, notamment les politiques de

réduction de la pauvreté, sur la base d’une ferme volonté politique. Les 302 rapports d’autoévaluation préparés à l’aide de l’outil HFA Monitor2, les Bilans mondiaux sur la réduction des risques de catastrophe publiés par les Nations Unies en 2009, 2011 et 2013 ainsi que l’Examen à mi-parcours du CAH (UNISDR, 2011b) et d’autres analyses publiées grâce à l’outil HFA Monitor (UNISDR, 2011c, 2013b, 2013c ; UNISDR et al., 2009) ont fourni un compte rendu détaillé pays par pays de la manière dont les États participants ont investi dans 123


la plupart (mais non l’intégralité) de ces activités clés. Parmi les mesures prises figurent la formulation de législations et de politiques nationales, la création de cadres institutionnels, la décentralisation des responsabilités auprès des autorités locales et la création de budgets spécifiques. Lorsqu’il est compris comme un instrument de formulation de politiques et d’organisation institutionnelle, le modèle de gouvernance des risques de catastrophe proposé par le CAH est l’un des domaines dans lesquels les différents pays signalent les progrès les plus importants (Figure 6.1). Selon l’outil HFA Monitor, plus de 100 pays ont aujourd’hui pris des dispositions institutionnelles spécifiques pour la gestion des risques de catastrophe. Entre 2007 et 2014, plus de 120 pays ont mené des réformes légales ou politiques, plus de 190 pays ont mis en place des points focaux pour la réduction des risques de catastrophe et 85 d’entre eux ont créé des plateformes nationales impliquant les différents acteurs concernés (PNUD, 2014a). Au cours des deux dernières années, au moins huit pays ont mis en place de nouveaux cadres légaux pour la gestion des risques de catastrophe. Le Bhoutan (Gouvernement du Bhoutan, 2013) et le Burkina Faso (Gouvernement du Burkina Faso, 2014) ont par exemple appliqué plusieurs prinFigure 6.1 Progrès réalisés vis-à-vis de la priorité d’action n° 1 du CAH

Niveau des progrès [1 à 5]

Niveau moyen des progrès au cours du CAH

3,5

3,4

3,3

Dans le même temps, et comme souligné dans le chapitre 1, l’évolution du secteur, qui reposait initialement sur des organisations de gestion des situations d’urgence, signifie que la gestion des risques de catastrophe a été principalement comprise et pratiquée comme une gestion des catastrophes. Pour différentes raisons, cette approche ne s’est pas révélée efficace pour la réalisation de l’objectif politique de réduction des risques de catastrophe.

6.2

3,2

3,1

3

cipes légaux afin de réformer leurs dispositions institutionnelles, notamment la division des pouvoirs entre les différents intervenants, et ont renforcé les mécanismes nationaux. En décembre 2013, le Paraguay a décidé de réformer sa politique nationale de réduction des risques de catastrophe en s’appuyant sur quatre piliers, à savoir le renforcement des moyens institutionnels, l’augmentation des moyens de financement, l’amélioration de l’éducation, de la communication et de la participation des citoyens dans la réduction des risques de catastrophe, et l’amélioration de l’acquisition et de la gestion des connaissances et des technologies (Gouvernement du Paraguay, 2013). Ces éléments attestent de progrès extraordinaires sur une courte période de temps, et des efforts ont été consentis non pas par une minorité, mais par une large majorité de pays. Ils reflètent la manière dont les différents pays ont pu utiliser le CAH pour favoriser toute une série d’actions ainsi qu’une sensibilisation et un engagement accrus vis-à-vis de la réduction des risques de catastrophe. Bien qu’encore incomplète, la transition de la gestion des situations d’urgence à la gestion des risques de catastrophe initiée après l’adoption de la DIPCN s’est accélérée dans le cadre du CAH (Gall et al., 2014a).

2007-09

2009-11

2011-13

Gestion prospective des risques de catastrophe : un fossé entre le discours et la pratique

Cycle d’évaluation des progrès du CAH (Source : UNISDR, données de l’outil HFA Monitor.)

124

Partie II - Chapitre 6

Bien que de nombreuses politiques, législations et organisations aient été développées et mises


en place, un fossé subsiste entre la théorie et les dispositions formelles, d’une part, et la pratique concrète de la gestion des risques de catastrophe, d’autre part. Dans les années 1990, le travail de réseaux de recherche sur les catastrophes tels que LA RED en Amérique latine, PeriPeri U en Afrique subsaharienne, Duryog Nivaran en Asie du Sud3 (Lavell, 2004 ; Gellert-de Pinto, 2012 ; PeriPeri U, sans date) et d’autres encore a influencé à la fois la Stratégie de Yokohama et le CAH, en mettant en évidence que les catastrophes sont les indicateurs de problèmes non résolus dans le domaine social et en matière de développement, et en démontrant que la réduction des risques de catastrophe n’était pas possible à moins de prendre en charge les facteurs de risque sous-jacents (Gall et al., 2014a). La Priorité d’action n° 1 du CAH appelait à l’intégration de la réduction des risques de catastrophe dans les stratégies de réduction de la pauvreté et les autres stratégies de développement sur la base d’une ferme volonté politique des gouvernements. Tout en reflétant ces activités clés définies par le CAH, les outils de gouvernance adoptés par de nombreux pays ont de plus en plus largement souligné l’importance de prendre en charge les facteurs de risque sous-jacents. Ces dernières années, de nombreuses organisations nationales de gestion des catastrophes ont été rebaptisées « systèmes de gestion des risques de catastrophe ». Les plans, stratégies et politiques régionaux et nationaux ont accordé une place croissante à la réduction des risques plutôt qu’à la gestion des catastrophes, à la gestion prospective plutôt que simplement corrective des risques de catastrophe, et à la protection des ménages et collectivités vulnérables et non des seuls actifs économiques et infrastructures stratégiques (PNUD, 2014a). Malheureusement, nombre de ces engagements légaux et politiques ne se sont pas traduits par de réelles priorités et de réels investissements.

L’examen des informations qualitatives dans les rapports d’avancement établis dans le cadre du CAH (UNISDR, 2014a) révèle un fossé entre le discours et la pratique, et la persistance de la gestion des catastrophes et de la gestion corrective des risques au détriment de la prise en charge des facteurs de risque sous-jacents. Bien qu’elles adoptent des formulations qui cadrent avec la gestion prospective des risques, la plupart des nouvelles lois adoptées continuent d’être largement centrées sur la gestion des catastrophes. La priorité accordée à la gestion prospective des risques est habituellement limitée, comme le montre le niveau de réalisation systématiquement faible de la Priorité d’action n° 4 du CAH qui ressort des rapports nationaux (UNISDR, 2009a, 2011a, 2013a). En d’autres termes, la gestion des risques de catastrophe est devenue synonyme d’interventions visant la réduction des risques existants et spécifiques, telles que la construction de protections contre les inondations, le renforcement ou la modernisation des infrastructures, et la mise aux normes des écoles et des hôpitaux, pour ne citer que quelques exemples (Lavell et Maskrey, 2014). Dans la pratique toutefois, la plupart des ressources et des efforts continuent d’être investis dans le renforcement des moyens de gestion des catastrophes (Gall et al., 2014a). Dans le même temps, le secteur n’a d’une manière générale développé que des relations limitées avec les secteurs du développement, sur lesquels il possède peu d’influence. Par ailleurs, l’autorité politique, les outils de gouvernance et les compétences techniques requises pour ce faire ont fréquemment fait défaut. Les politiques, plans et investissements de développement qui génèrent et accumulent les risques continuent à bénéficier d’un soutien politique dans de nombreux pays, par exemple lorsqu’ils sont jugés capables de doper la croissance économique (PNUD, 2014a). La gestion prospective des risques de catastrophe exige généralement des investissements moindres, 125


mais des ressources et un soutien politiques plus importants que la gestion corrective des risques de catastrophe. Dans la mesure où la gestion des risques de catastrophe a été comprise et mise en pratique comme une série d’instruments et de mécanismes administratifs visant à protéger le développement contre des menaces exogènes, un tel soutien politique a rarement été obtenu. Dans le même temps, les secteurs du développement ont également tendance à comprendre la gestion des risques de catastrophe comme une gestion des catastrophes et non comme une gestion prospective des risques. Par conséquent, le secteur de la gestion des risques de catastrophe a rencontré peu de succès dans la prise en compte de ses priorités et n’est pas parvenu à garantir l’adoption de politiques, de normes et de réglementations de gestion et de réduction des risques par les autres ministères. De même, l’implication du secteur privé a été limitée dans la plupart des pays, excepté dans le cadre de la responsabilité sociale des entreprises. En effet, la ferme volonté politique requise par le CAH pour promouvoir la réduction des risques de catastrophe et intégrer celle-ci dans les programmes de développement s’est rarement matérialisée. La pratique de la gestion prospective des risques de catastrophe demeure plus symbolique que réelle. Alors que le CAH touche à son terme, il est difficile d’identifier des pays dans lesquels le renforcement de la gouvernance des risques de catastrophe a clairement influencé l’orientation du développement.

6.3

Un engagement politique et économique éphémère

Dans le sillage d’une catastrophe, la gestion des risques occupe naturellement le devant de la scène. Au quotidien toutefois, l’importance d’investir dans la réduction des risques ne figure habituellement pas à l’agenda politique. 126

Partie II - Chapitre 6

L’importance politique du secteur de la gestion des risques de catastrophe est éphémère dans la plupart des pays. Lorsque des catastrophes à grande échelle menacent le développement, le secteur jouit d’un solide soutien politique et de l’allocation de budgets. Avant et après d’importantes catastrophes, le secteur est fréquemment relégué au second plan politique et économique par les gouvernements, alors que d’autres priorités et crises se font plus urgentes. Ce soutien politique et économique éphémère au secteur est le reflet de son approche, centrée sur la protection du développement contre des catastrophes perçues comme des événements occasionnels plutôt que sur la gestion des risques qui sont générés et accumulés en permanence. Les catastrophes extensives qui surviennent régulièrement dans la plupart des pays n’ont qu’un impact localisé et affectent généralement les ménages à faibles revenus, les petites entreprises et les infrastructures locales, c’est pourquoi ils se traduisent rarement par un impératif politique et économique national de gestion des risques de catastrophe (UNISDR, 2011a). Le caractère éphémère de cet impératif se reflète dans un financement inadéquat du secteur de la gestion des risques de catastrophe et dans des investissements insuffisants dans des ressources humaines et institutionnelles limitées. Au niveau national, certains pays ont mis en place des mécanismes budgétaires qui garantissent un certain niveau de ressources au secteur de la réduction des risques de catastrophe. Les Philippines ont par exemple prévu un pourcentage d’allocation imposé par une loi, le Japon a adapté sa politique budgétaire et le Mexique réserve spécialement des fonds à cet effet (FISCR et PNUD, 2014). Toutefois, dans de nombreux pays, le secteur est tributaire des ressources de fonds d’urgence et de réserve, qui ne sont alimentés que lorsqu’une importante catastrophe survient. Via l’outil HFA Monitor, certains pays ont signalé des ressources


insuffisantes ne serait-ce que pour maintenir des capacités d’intervention de base. La dépendance vis-à-vis de fonds d’urgence encourage une forme de matérialisme humanitaire par lequel les catastrophes elles-mêmes deviennent des produits capables d’influencer la consolidation des ressources et pouvoirs institutionnels. Le caractère éphémère de cet impératif politique et économique se reflète à tous les échelons. Au niveau international, les ressources affectées à la gestion des risques de catastrophe ne représentent qu’une faible fraction de celles destinées aux interventions en cas de catastrophe, qui elles-mêmes ne représentent qu’une faible proportion de celles réservées à l’assistance au développement (Figure 6.2). En moyenne, environ 1 % seulement du budget international total de l’aide au développement est alloué à la gestion des risques de catastrophe (Kellett et Sparks, 2012) et 75 % de ce budget sont alloués à seulement quatre pays (Ibid.).

6.4

Une décentralisation à plusieurs vitesses

Malgré le consensus sur le rôle essentiel des autorités locales dans la gestion des risques de catastrophe, les efforts visant à renforcer leurs capacités demeurent limités à une poignée de pays.

Dans les cas où un impératif politique national de réduction des risques de catastrophe a été identifié, la mise en œuvre a fréquemment été compromise par de faibles capacités du niveau local. Par exemple, le Ministère de l’économie et des finances du Pérou travaille depuis 2007 à l’intégration de la gestion des risques de catastrophe dans la planification et l’évaluation des investissements publics. La mise en œuvre de cette politique a toutefois été entravée par de faibles capacités au niveau des autorités régionales et locales, dans lesquelles la plupart des investissements publics sont planifiés et mis en place. Un problème répandu signalé par de nombreux pays à travers l’outil HFA Monitor est le manque général de mise en œuvre des lois et des politiques publiques (UNISDR, 2009a, 2011a, 2013a). Des politiques publiques et des lois sont fréquemment développées, mais ont du mal à se doter de mécanismes de mise en œuvre. Ceci est particulièrement manifeste au niveau local. Dans de nombreux pays, la responsabilité première de la gestion des risques de catastrophe est dévolue aux municipalités. De nombreuses grandes villes dans lesquelles les municipalités disposent de ressources suffisantes ont pu tirer pleinement parti de cette décentralisation. L’un des succès obtenus durant la mise en œuvre du

Figure 6.2 Part de l’aide au développement allouée à la prévention et à la préparation aux catastrophes 3,6 % Prévention et préparation aux catastrophes

Aide totale au développement 1 2 mi iards de dollars américains pour les catastrophes internationales

24,8% Reconstruction et réhabilitation

69,9% Intervention d’urgence

(Source : GFDRR, 2012b.)

127


CAH est l’engagement croissant des municipalités vis-à-vis de la gestion des risques de catastrophe, tous niveaux de revenu confondus, d’Istanbul à Medellín et de San Francisco à Manille. Le nombre croissant des villes signataires de la campagne « Pour des villes résilientes » de l’ONU témoigne de cette réussite4. Certaines de ces municipalités ont démontré une plus grande efficacité que leurs homologues nationaux et deviennent des modèles et des leaders en matière de réduction des risques de catastrophe. En revanche, de nombreuses petites municipalités, en particulier dans les zones rurales, ne disposent pas des capacités nécessaires pour mettre en œuvre une gestion des risques de catastrophe ni même une gestion élémentaire des situations d’urgence (UNISDR, 2011a). Par exemple, bien que la gestion des risques de catastrophe soit légalement intégrée à la planification du développement au niveau municipal depuis 2002 en Afrique du Sud, les capacités des municipalités demeurent limitées (Scott et Tarazona, 2011 ; Botha et van Niekerk, 2013 ; Johnson, 2011). De même, un grand nombre de municipalités colombiennes a mandaté des comités locaux pour la réduction des risques de catastrophe, mais seule une fraction d’entre eux a développé des plans d’intervention (Scott et Tarazona, 2011). Bien qu’il soit amplement reconnu que les autorités locales devraient jouer un rôle essentiel dans la gestion des risques de catastrophe, peu d’éléments

montrent de réels efforts concertés pour renforcer leurs capacités en dehors de quelques pays qui disposent d’institutions de formation exclusivement réservées à cet effet (Encadré 6.2). Making Cities Resilient campaign

Dans de nombreux pays, la décentralisation de la réduction des risques de catastrophe auprès des autorités locales peut par conséquent devenir une faiblesse plutôt qu’une force et représente une autre manifestation de l’hyperréalité dans laquelle les capacités de gestion des risques de catastrophe existent sur le papier, mais pas sur le terrain. Dans certains pays, les structures locales de réduction des risques de catastrophe ont été mises en place en parallèle des autorités locales, ce qui compromet un peu plus l’efficacité des unes et des autres. Par ailleurs, bien que les outils de gouvernance des risques de catastrophe se fassent l’écho du CAH dans de nombreux pays en appelant explicitement à la participation des collectivités, la plupart des progrès réalisés dans la réduction participative des risques de catastrophe au niveau local se sont limités à des projets ou programmes spécifiques à court terme, souvent appuyés par des organisations non gouvernementales. La gestion participative des risques de catastrophe est peut-être devenue une autre

Encadré 6.2 Investissements de l’Inde dans le renforcement des capacités

En Inde, l’Institut national de gestion des catastrophes (NIDM), créé par la loi de 2005 sur la gestion des catastrophes, assume la responsabilité nationale du développement des ressources humaines, du renforcement des capacités, de la formation et de la promotion des politiques dans le domaine de la gestion des risques de catastrophe. Dans le cadre de ce mandat, l’institut fournit un cours de base en ligne sur la gestion intégrale des risques de catastrophe ainsi que des cours spécialisés sur la réduction participative des risques de catastrophe (CBDRR), le changement climatique et les risques de catastrophe, la gestion des risques sismiques, la sécurité urbaine et les questions de genre dans le cadre du redressement et de la reconstruction (NIDM, 2013). Le NIDM a également publié de nombreux manuels de formation en ligne, notamment un guide étape par étape pour le développement des plans de gestion des catastrophes au niveau d’un village (NIDM, 2012a), des modules de formation des formateurs sur la réduction et la gestion des risques d’inondation (NIDM, 2012b) et la réduction des risques urbains (NIDM, 2014), ainsi qu’ un manuel d’assistance psychosociale en cas de catastrophe (Satapathy et Subhasis, 2009).

128

Partie II - Chapitre 6


hyperréalité : elle semble en apparence omniprésente à tous les niveaux alors qu’en réalité, les moyens donnés aux collectivités se sont révélés plus symboliques que réels (Maskrey, 2011).

6.5

Des capacités de réglementation limitées

Une réglementation efficace et des investissements destinés à la gestion corrective des risques de catastrophe ont permis à de nombreux pays à revenu élevé de réduire leurs risques de catastrophe. Dans beaucoup de pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, la qualité de la réglementation n’est cependant pas suffisante pour une application efficace des normes. L’outil HFA Monitor a également permis d’identifier des progrès continus dans l’adoption de normes et de codes dans des domaines tels que l’aménagement du territoire, la construction et l’environnement. Dans les pays à revenu élevé, les lois, les normes, les standards et la régulation peuvent être (et ont été) des mécanismes efficaces de gestion des risques de catastrophe grâce à des facteurs

tels que des cadres institutionnels solides, des mécanismes de responsabilisation et des voies de recours, la libre circulation de l’information et une culture générale de respect des règles (FISCR et PNUD, 2014). En particulier, l’application réussie de normes de façon volontaire requiert un processus de certification digne de confiance (CEE-ONU, 2014). La combinaison d’une réglementation efficace et d’investissements importants dans la gestion corrective des risques de catastrophe a permis à de nombreux pays à revenu élevé de réduire les strates de risque les plus extensives. Au Japon, par exemple, l’investissement continu dans la protection contre les inondations ainsi que dans la réglementation a permis une réduction spectaculaire des zones inondées et de la mortalité (Figure 6.3). En revanche, dans beaucoup de pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, la qualité de la réglementation n’est pas suffisante pour une application efficace des normes. Dans nombre de ces pays, la faible responsabilisation des autorités locales vis-à-vis du gouvernement central, du gouvernement vis-à-vis des citoyens et entre les

Figure 6.3 Réduction réussie des inondations au Japon Nombre de morts dus aux inondations

Tendance

Zones inondées [ha]

6 000

350 000

300 000

5 000

250 000 4 000 200 000 3 000 150 000 2 000 100 000 1 000

1946

50 000

1950

1954

1958

1962

1966

1970

1974

1978

1982

1986

1990

1994

1998

2002

2006

2009

(Source : UNISDR, données de Takyea Kimio, JICA.)

129


différents secteurs gouvernementaux compromet l’efficacité des normes, des lois et des politiques (Coskun, 2013). Par exemple, alors que la plupart des lois sur la réduction des risques de catastrophe prévoient l’une ou l’autre forme de mandat pour la participation des femmes et des groupes vulnérables, il s’agit le plus souvent de la formulation d’aspirations générales dépourvues de mécanismes spécifiques d’implémentation (FISCR et PNUD, 2014). En conséquence, l’adoption de meilleurs codes de construction ou de réglementations environnementales dans les pays à faible revenu peut donner l’impression d’une véritable gestion des risques de catastrophe alors qu’en réalité les risques ne cessent de s’accumuler (Wamsler, 2006). En particulier, lorsqu’une part significative du développement économique et urbain se met en place de manière informelle (soit dans un secteur informel proprement dit ou en raison de la corruption et d’un manque de respect des règles dans le secteur formel), les instruments tels que les codes de construction et les plans de zonage ne sont efficaces que dans des zones et des secteurs très limités, le plus souvent des niches à revenu élevé et des secteurs économiques stratégiques.

La plupart des bâtiments en dehors de ces niches et secteurs ne bénéficient pas d’une conception technique adéquate, la majeure partie de l’urbanisation est non planifiée et les autorités locales disposent de peu de moyens pour promouvoir et faire respecter les normes. De plus, l’adoption de codes et de normes trop rigoureux peut aller à l’encontre de l’effet souhaité en provoquant un développement accru dans le secteur informel, parce que les ménages à faible revenu et les petites entreprises ne sont pas en mesure de supporter les coûts associés au respect des codes de construction dans des zones destinées à une utilisation résidentielle ou commerciale. Enfin, les responsabilités quant aux décisions prises en matière de développement urbain, à l’application des codes de construction ou à l’aménagement du territoire ne sont pas toujours clairement définies, comme constaté au lendemain de la tempête Xynthia survenue en France en 2010 (Encadré 6.3). 2010 Storm Xynthia

Encadré 6.3 Répercussions légales après la tempête Xynthia5

Le 28 février 2010 à deux heures du matin, une forte tempête frappait la côte atlantique française. Xynthia associait une onde de tempête à une marée haute : les vagues élevées ont eu raison des protections contre les inondations tout au long de la côte, de la région de Bordeaux en Gironde jusqu’à l’estuaire de la Loire. Plus de 50 000 hectares de terres furent inondés et 47 personnes trouvèrent la mort. Environ 10 000 personnes furent forcées d’évacuer leur domicile sur la côte atlantique. La commune de La Faute-sur-Mer en Vendée a compté 29 décès, dont 28 dans une zone de 3 hectares baptisée « la cuvette de la mort » par les médias et les autorités politiques. Quatre ans après Xynthia, le procureur de la République a identifié une urbanisation excessive comme cause de ces pertes importantes et en a attribué la responsabilité au maire et à l’adjointe au maire de La Faute-sur-Mer. Le risque d’inondation était connu comme étant élevé dans la zone, mais ces informations avaient été délibérément cachées par les autorités afin de permettre la construction de plus de 200 nouvelles habitations dans des zones soumises aux inondations de La Faute-sur-Mer. En conséquence, le maire de la ville a été condamné à quatre ans de prison. D’autres fonctionnaires sont actuellement jugés et encourent une peine d’emprisonnement de 5 ans ainsi que des amendes allant jusqu’à 75 000 euros.

130

Partie II - Chapitre 6


6.6

Corruption : une vérité qui dérange

La corruption dans les zones soumises à des aléas contribue directement à accroître la vulnérabilité et l’exposition des actifs et des populations. Les pays où la corruption est importante et dans lesquels le cadre réglementaire est faible rencontreront des difficultés à réduire leurs risques de catastrophe. Bien que le CAH fournisse des consignes détaillées concernant les dispositions institutionnelles et législatives, les allocations de budget et les capacités locales, il n’établit pas clairement la responsabilisation et la transparence comme des prérequis pour une gouvernance efficace des risques de catastrophe. Il n’aborde pas non plus le défi posé par la corruption. Or, il est indispensable de tenir compte de ces problématiques et des réalités sociales et institutionnelles qui les accompagnent pour que la gestion des risques de catastrophe soit efficace (Wisner et al., 2003 ; UNISDR, 2009a ; Kelman, 1998). La place limitée, voire inexistante, laissée aux citoyens pour s’exprimer et le manque de responsabilisation des décisionnaires vis-à-vis des personnes qu’ils représentent ont été identifiés comme des facteurs de risque sous-jacents (UNISDR, 2009a). Il s’agit également d’une caractéristique courante des pays en situation de conflit. De nombreux pays qui figurent dans le haut du classement des indices de risques de catastrophe et de vulnérabilité se trouvent dans une situation de conflit ou postérieure à un conflit (Maplecroft, 2014 ; UNU, 2013). La corruption influence à la fois la production de risques de catastrophe et l’impact des catastrophes. À l’échelle mondiale, la corruption a atteint une ampleur telle qu’elle mine les efforts de développement (Lewis et Kelman, 2012) : les produits mondiaux des activités criminelles, de la corruption et de l’évasion fiscale qui circulent librement à travers les frontières internationales sont estimés entre 1 000 et 1 600 milliards de dol-

lars américains par an (Nations Unies et Banque mondiale, 2007). De 2003 à 2012, les flux financiers illicites des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire s’élevaient à 6 600 milliards de dollars américains, soit près de 10 fois l’aide au développement (GFI, 2014). La corruption durant les catastrophes et à l’issue de ces dernières a été bien étudiée (Ambraseys et Bilham, 2011 ; Lewis, 2011 ; FISCR 2011 ; Lewis et Kelman, 2012). Par exemple, une étude menée sur la corruption et l’occurrence de catastrophes aux États-Unis entre 1990 et 2002 conclut que des taux élevés de crimes et délits liés à la corruption dans le Mississippi, en Floride et dans le Dakota du Sud présentent une corrélation avec un grand nombre de catastrophes survenues dans ces trois États ainsi qu’à travers les États-Unis (Leeson et Sobel, 2008). Cette corrélation s’explique par les opportunités de corruption suscitées par l’afflux d’importantes sommes dans le cadre de l’aide humanitaire et par des contrats de construction lucratifs à l’issue des catastrophes (Ibid.) En revanche, les différentes manières dont les pratiques de corruption modèlent la vulnérabilité et l’exposition et déterminent le niveau des risques ne sont pas aussi bien comprises. Au niveau sectoriel ou au niveau local, les pratiques de corruption peuvent accroître les risques de catastrophe en affaiblissant la culture de respect des règles essentielle à l’efficacité des codes, normes et mécanismes de réglementation similaires. Le secteur de la construction est l’un des plus importants pour la gestion des risques de catastrophe. Il est aussi l’un des plus touchés par la corruption (Transparency International, 2005). Les contrats publics de construction sont estimés à 4 000 milliards de dollars américains par an dans le monde et une part significative de ces dépenses se perd dans la corruption, à hauteur de 10 à 30 % de la valeur de chaque projet selon les estimations (Ibid.) La corruption dans les zones soumises à des aléas contribue directement à accroître la vulnérabi131


lité et l’exposition des actifs et des populations (Lewis, 2011). Par exemple, à l’issue du séisme du Sichuan en Chine en 2008, l’insuffisance des fonds pour la construction d’écoles aurait compromis le respect des normes de conception et des codes de réglementation (Pei, 2007 ; Lewis, 2011). Alors que de nombreux bâtiments plus anciens ont résisté au séisme sans trop de dommages, plus de 7 000 classes construites plus récemment se sont effondrées, provoquant une mortalité élevée. Une école a rapporté le décès de 900 enfants dans le séisme (Lewis, 2011).

blement plus de difficultés à gérer efficacement leurs risques.

6.7

Les temps changent

Les outils de gouvernance adoptés par de nombreux pays, qui s’appuient largement sur des organisations spécialisées de gestion des situations d’urgence, ne sont pas toujours adaptés pour réduire les risques de catastrophe. L’approche de la gouvernance basée sur le cycle de gestion des catastrophes et représentée par un secteur spécialisé dans la gestion des risques de catastrophe pourrait bien avoir atteint ses limites, alors qu’un nouveau paradigme de la gouvernance demeure encore à définir.

Étant donné que les risques de catastrophe sont configurés par les aléas et l’exposition ainsi que par la vulnérabilité, il n’existe pas de corrélation directe entre les risques de catastrophe et le niveau de la corruption (Figure 6.4). Par exemple, le Japon et l’Érythrée ou la Grenade et Haïti sont des paires de pays qui présentent des niveaux relativement similaires de risques de catastrophe (PAM par rapport aux actifs exposés).

La gestion des situations d’urgence est un domaine technique spécialisé qui couvre non seulement les catastrophes, mais également les accidents technologiques, marins et aéronautiques, les troubles civils et d’autres événements. Toutefois, les outils de gouvernance nécessaires à la gestion efficace des situations d’urgence ne sont pas forcément appropriés pour faire face aux défis posés par le

Toutefois, Haïti et l’Érythrée présentent un niveau de corruption beaucoup plus élevé que le Japon et la Grenade et rencontreront donc vraisemblaFigure 6.4 Contrôle de la corruption et risques de catastrophe Contrôle de la corruption [estimation]

Corruption faible

2,0

Norvège

Suisse

Nouvelle-Zélande

1,5

Aruba

Japon

1,0

Palaos

Grenade 0,5

Saint-Kitts-et-Nevis Porto Rico

Belize

Anguilla

Dominique Bahamas

Antigua-et-Barbuda

Vanuatu

Îles Caïmanes

Tonga

Corruption élevée

Philippines -0,5 Haïti

-1,0 -1,5 -2,0

Arabie saoudite

Guinée équatoriale Érythrée

-2,5

République démocratique populaire lao

Chine

0,1

Myanmar

Ouzbékistan

République populaire démocratique de Corée 0,2

0,3

1

1,5

2

2,5

3

3,5

4

4,5

5 / cti s

(Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de la Banque mondiale.)

132

Partie II - Chapitre 6


développement urbain et la gestion environnementale. En termes clairs, bien que les corps de sapeurspompiers puissent être parfaitement capables de venir en aide aux victimes d’inondations qui se trouvent sur leur toit ou aux victimes de séismes prisonnières de structures qui se sont effondrées, ces capacités et les dispositions institutionnelles et législatives sur lesquelles elles reposent n’ont pas grand-chose à voir avec les exigences nécessaires pour traiter des questions telles que l’aménagement du territoire ou la gestion de l’eau. Alors que la gestion des situations d’urgence a pu évoluer en tant que secteur autonome affrontant les défis posés par l’intervention en cas d’accident, de catastrophe technologique ou encore de conflit, les outils de gouvernance requis afin de gérer les risques de catastrophe doivent par définition être intégrés aux outils grâce auxquels les différents pays gèrent le développement socio-économique (PNUD, 2014a). À mesure que des responsabilités supplémentaires ont été confiées à ces organisations spécialisées de gestion des situations d’urgence dans le cadre de leur évolution vers des systèmes de gestion des risques de catastrophe, les outils de gouvernance adoptés par de nombreux pays sont devenus inappropriés. En d’autres termes, bien que des dispositions spécialisées et bien délimitées visant la gouvernance des risques de catastrophe puissent être appropriées pour la gestion des situations d’urgence et des catastrophes, d’autres aspects de la gestion des risques de catastrophe dépendent amplement de la qualité globale de la gouvernance pour réaliser leurs objectifs (PNUD, 2014a ; Lavell et Maskrey, 2014). Bien que le renforcement de la gouvernance des risques de catastrophe puisse avoir joué un rôle de catalyseur dans les progrès réalisés en matière de gestion des catastrophes et avoir contribué à une réduction significative de la mortalité dans certains pays, il n’a pas garanti l’efficacité et le succès dans les domaines du CAH qui relèvent de la gestion prospective des risques. Les défaillances actuelles de la gouvernance risquent de se répercuter et

d’affecter les générations futures. C’est le cas avec la crise financière de 2008, qui est le résultat de plusieurs décennies d’incapacité à réguler efficacement des marchés et des mécanismes financiers toujours plus interdépendants (Turnbull et Pirson, 2011). Lorsque les multiples miroirs de l’hyperréalité qui règne dans le secteur de la gestion des risques de catastrophe se brisent pour laisser apparaître de véritables catastrophes, il devient évident que la gestion des risques ne peut être séparée de la gouvernance plus large du développement socio-économique, tout comme les risques de catastrophe sont endogènes aux processus socio-économiques qui les configurent au fil du temps. Les capacités de gestion des risques de catastrophe ne peuvent être renforcées de manière isolée sans lien avec les contraintes de gouvernance d’ordre plus large, par exemple le peu de place laissé aux citoyens pour s’exprimer, le manque de responsabilisation, les faibles ressources des autorités locales, le dysfonctionnement des systèmes judiciaires, les conflits sociaux ou encore les crises économiques. À mesure que cette hyperréalité se révèle à travers l’expérience acquise en matière de risques et de catastrophes, de nouvelles formes de gestion des risques de catastrophe, de nouveaux acteurs et de nouvelles formes de gouvernance apparaissent progressivement. Le secteur traditionnel de la gestion des risques de catastrophe partage désormais un riche espace avec le secteur du changement climatique, les ministères des finances et de la planification, le secteur privé et les municipalités, entre autres intervenants et acteurs. La création de la CCNUCC en 1994 en tant que mécanisme international visant à s’attaquer au changement climatique mondial a rapidement fait émerger un secteur spécialisé dans le changement climatique. Le changement climatique est un facteur sous-jacent des risques de catastrophe et de nombreux plans d’adaptation au changement climatique intègrent une forte composante de ges133


tion des risques de catastrophe (GIEC, 2012 ; SEI, 2014 ; PNUD, 2014a). Toutefois, ce secteur qui est habituellement ancré dans les ministères de l’environnement n’est dans la plupart des pays que faiblement intégré avec le secteur de la gestion des risques de catastrophe (SEI, 2014), à l’exception notamment des petits États insulaires du Pacifique (UNDESA, 2014a). Le secteur du changement climatique a toutefois remporté plus de succès dans l’obtention de ressources et d’un soutien politique et concurrence à présent le secteur de la réduction des risques de catastrophe en termes de visibilité et de prépondérance. L’adaptation au changement climatique est par conséquent devenue un nouvel espace de gouvernance des risques de catastrophe. Dans le même temps, un défi majeur subsiste, à savoir la réconciliation des arènes politiques de la réduction des risques de catastrophe et de l’adaptation au changement climatique, ainsi que celles de l’atténuation du changement climatique, de la croissance économique et du développement durable (SEI, 2014). Ces dernières années, tant le secteur de la réduction des risques de catastrophe que celui du changement climatique ont manifesté un intérêt croissant pour le financement des risques. Les ministères des finances, les autorités de réglementation du secteur de l’assurance, les institutions financières internationales ainsi que les compagnies d’assurance et de réassurance et les services de modélisation des catastrophes (Arnold, 2008 ; Cummins et Mahul, 2009 ; Muir-Wood, 2011 ; GFDRR, 2014b) ont également renforcé leur implication dans le développement et l’extension des mécanismes de financement des risques tels que les polices d’assurance, le financement des coûts prévisibles et les obligations catastrophes, y compris dans des dispositions régionales telles que le CCRIF et PCRAFI6. Ces mécanismes ont pour objectif explicite de protéger le développement socioéconomique contre les chocs externes et peuvent être considérés comme une modernisation de la logique du cycle de gestion des catastrophes. Dans le même temps, les ministères des finances et de 134

Partie II - Chapitre 6

la planification ont également œuvré à la promotion de nouvelles approches de la gouvernance des risques de catastrophe reposant sur la planification et l’évaluation des investissements publics (Lavell, 2014 ; GFDRR, sans date ; UNISDR, 2009a et 2011a) et ont répondu aux préoccupations concernant la durabilité des investissements publics et la qualité des dépenses publiques. Depuis que les grandes catastrophes qui ont frappé le Japon et la Thaïlande en 2011 ont mis au jour les risques qui existent pour les chaînes d’approvisionnement mondiales, l’intérêt pour la réduction des risques de catastrophe s’est développé au sein des entreprises et plus récemment dans le secteur financier (Ingirige et al., 2014 ; UNISDR, 2013a). Ceci a conduit à un grand nombre d’initiatives cherchant à développer de nouvelles formes de gouvernance des risques qui impliquent à la fois les entreprises, les gouvernements, les investisseurs et les autorités de réglementation financières, par exemple l’innovant programme R!SE ou les initiatives « 1-in-100 », qui cherchent à favoriser des investissements raisonnés en fonction des risques7. De plus, les grandes villes fournissent désormais des espaces où les secteurs public et privé, la gestion des risques de catastrophe et l’adaptation au changement climatique commencent à converger. Les réglementations des gouvernements ont également été complétées par une série de normes sur base volontaire couvrant la réduction des risques de catastrophe, et ne se limitant pas à des domaines spécifiques au secteur tels que les habitations privées, les réseaux et plateformes de transport, les écoles, les équipements électrotechniques des hôpitaux et d’autres infrastructures sensibles, mais englobant également des domaines intersectoriels tels que la gestion de l’environnement (Figure 6.5), la responsabilité sociale des entreprises et le maintien de l’activité (CEE-ONU, 2014). Les organisations tant publiques que privées ont commencé à appliquer des normes qui associent la gestion des risques à des codes de conduite environnementaux et sociaux et à des principes dans des domaines


Figure 6.5 Adoption de normes de systèmes de management environnemental Nombre de certifications 350 000 Moyen-Orient 300 000

Asie Centrale et du Sud Asie de l'Est et Pacifique Europe

250 000

Amérique du Nord méri ue centra e / du Sud Afrique

200 000

150 000

100 000

50 000

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

(Source : ISO, 2014.)

aussi variés que le logement, la gestion des zones protégées, l’industrie et la gestion de portefeuilles d’investissements. Des codes régissant la responsabilité sociale et environnementale sont de plus en plus adoptés par les entreprises afin de renforcer leur proposition de valeur (CEE-ONU, 2014).

catastrophe pourrait bien avoir atteint ses limites, alors qu’un nouveau paradigme de la gouvernance reste encore à définir.

Notes

L’approche de la gestion des risques de catastrophe adoptée jusqu’ici est aujourd’hui remise en question par ces efforts innovants, dont la plupart sont actuellement en phase d’exploration plutôt que de consolidation. Alors que le CAH touche à son terme, la gestion des risques de catastrophe se trouve par conséquent à la croisée des chemins. Des catastrophes telles que le typhon Haiyan qui a frappé les Philippines en 2013 ne peuvent que déchirer le voile de l’hyperréalité et montrer que même des pays possédant des outils de gouvernance des risques de catastrophe apparemment complets et mûrement réfléchis sont confrontés au défi d’une accumulation continue de risques. L’approche de la gouvernance basée sur le cycle de gestion des catastrophes et représentée par un secteur spécialisé dans la gestion des risques de

1 http://iog.ca/defining-governance. 2 Pour de plus amples informations concernant les rapports locaux, nationaux et régionaux établis dans le cadre du CAH, voir la page http://www.preventionweb.net/english/hyogo/progress/ ?pid:73&pil:1. 3 www.duryognivaran.org. 4 http://www.unisdr.org/campaign/resilientcities. 5 Sources : http://www.nat-hazards-ear th-syst-sci.net/11/2321/2011/nhess11-2321-2011.pdf; http://www.bbc.com/news/world-europe-30453552; http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/12/12/xynthial-ancien-maire-de-la-faute-sur-mer-condamne-a-quatre-ans-deprison-ferme_4539436_3244.html (consultation le 11 janvier 2015). 6 Pour de plus amples informations sur le CCRIF (Caribbean Catastrophe Risk Insurance Facility), voir la page http://www. ccrif.org/content/about-us. En ce qui concerne le PCRAFI (Pacific Catastrophe Risk Assessment and Financing Initiative), voir la page http://pcrafi.sopac.org/ (consultation le 28 août 2014). 7 Pour de plus amples informations concernant ces initiatives, voir le site www.theriseinitiative.org ainsi que la page http://www. un.org/climatechange/summit/action-areas.

135



Chapitre 7

Une culture de la prévention et de la résilience ?

137


Les investissements dans la sensibilisation du public, l’éducation et l’évaluation des risques ont augmenté. Toutefois, ces efforts prennent rarement en compte les contraintes socio-économiques pesant sur la réduction des risques de catastrophe ou les opportunités sacrifiées lorsque ces risques ne sont pas pris en charge. Par conséquent, le volume sans cesse plus important des informations sur les risques n’a généralement pas été transformé en connaissance du risque.

7.1

De Ratnapura au fleuve Chao Phraya

Lorsque la sensibilisation aux risques est limitée, les personnes qui sont exposées à des aléas sont d’autant moins motivées à investir dans la réduction de leurs niveaux de risque. Il est impossible pour un résident du district de Ratnapura au Sri Lanka de ne pas avoir conscience du risque de catastrophe. Depuis 1990, Ratnapura a signalé le nombre stupéfiant de 2 601 événements catastrophiques extensifs. Cela représente en moyenne plus de 100 phénomènes par an qui ont endommagé ou détruit 23 000 foyers, affecté plus d’un million de personnes et érodé les infrastructures locales essentielles1. Le district de Ratnapura est hautement soumis aux catastrophes, notamment aux inondations et aux glissements de terrain (OXFAM, 2006). 13 % des zones de faible altitude de ce district sont généralement affectées par les inondations durant les périodes de fortes précipitations (UN-Habitat, 2009). De plus, l’augmentation des précipitations annuelles et des variations de température a entraîné une hausse du nombre de glissements de terrain durant la dernière décennie (Rathnaweera et al., 2012). Ratnapura n’est qu’un exemple parmi des milliers de villes confrontées dans le monde entier à des catastrophes extensives récurrentes. Les habitants de ces régions sont en général parfaitement conscients des risques auxquels ils sont confrontés. Toutefois, leur choix quant au lieu dans lequel ils vivent et travaillent est souvent contraint par des facteurs socio-économiques, comme le manque d’accès à des terres plus sûres, la nécessité de rester à proximité des opportunités d’emploi, l’insuffisance des investissements dans les infrastructures de réduc138

Partie II - Chapitre 7

tion des risques par les autorités locales et nationales et, parfois, la discrimination. Du fait de ces opportunités limitées, les personnes confrontées à des risques extensifs récurrents n’ont généralement pas d’autre choix que de vivre avec ces risques et de devoir faire face régulièrement à des pertes et des dommages provoqués par des catastrophes. Contrairement à Ratnapura, il est probable que seules de rares entreprises ayant construit des usines sur les plaines inondables du fleuve Chao Phraya en Thaïlande aient été parfaitement informées du risque auquel elles étaient confrontées avant les inondations majeures de novembre 2011. Le risque d’inondation dans le bassin n’avait jamais fait l’objet d’une modélisation et l’ampleur de la catastrophe a pris les entreprises internationales, le gouvernement et le secteur de l’assurance par surprise. En se répercutant sur les chaînes d’approvisionnement mondiales, la catastrophe a affecté la production dans le monde entier et s’est traduite par des pertes massives. Le manque à gagner total en termes de bénéfice d’exploitation pour les seules entreprises Toyota et Honda a été respectivement estimé à 1,25 milliard et 1,4 milliard de dollars américains (UNISDR, 2013a). En dépit de l’ampleur de ces pertes, rares sont les entreprises qui ont décidé de se relocaliser dans des zones moins risquées de Thaïlande ou d’autres pays. D’après une étude réalisée en 2012 auprès d’entreprises japonaises de Bangkok, près de 80 % d’entre elles ont décidé de rester au même endroit, tandis que 16 % s’étaient déjà relocalisées dans d’autres villes de Thaïlande ou envisageaient de le faire, 6 % des entreprises ayant quant à elles prévu de partir pour l’étranger (Gouvernement du Japon, 2012). Toutes les entreprises de la région sont désormais entièrement conscientes des risques


d’inondation. Bien qu’il ne soit pas toujours question de choix, notamment du fait des contraintes financières (Ibid.), pour la plupart des entreprises, les opportunités de création de valeur qu’offre une région donnée l’emportent sur les coûts prévisibles de futures inondations.

Au titre de la Priorité d’action n° 3, le CAH a accordé une importance considérable à l’amélioration de la sensibilisation aux risques et de l’information afin de contribuer à l’adoption d’une culture de la prévention des catastrophes et de la résilience (Encadré 7.1).

La sensibilisation, l’identification, la compréhension et l’estimation des risques de catastrophe se trouvent incontestablement au cœur de la gestion des risques de catastrophe. Lorsqu’ils ne sont pas conscients des risques auxquels ils sont confrontés, l’on peut difficilement s’attendre à ce que des ménages, des entreprises ou des gouvernements investissent dans la réduction de leurs niveaux de risque.

Les rapports d’avancement dans le cadre du CAH soulignent que les pays ont réalisé des progrès notables dans ce domaine. Toutefois, ces progrès restent généralement inférieurs à la moyenne constatée pour l’ensemble des priorités d’action (Figure 7.1). À quelques exceptions notables près, les citoyens, les entreprises et les autres acteurs de la plupart des pays sont rarement en mesure d’accéder aux informations sur les risques avant de prendre des décisions d’investissement ou de s’engager dans des opérations immobilières. Comme indiqué ci-après, la production d’informations sur les risques s’est largement développée et est allée de pair avec un renforcement de la collaboration entre les institutions scientifiques et techniques. Cependant, rares sont les informations qui parviennent aux utilisateurs dans un format susceptible d’éclairer leurs décisions (CDKN, 2014).

Toutefois, les exemples de Ratnapura et du fleuve Chao Phraya démontrent que le risque de catastrophe n’est pas un effet externe objectif et concret qui doit être réduit. De même, la sensibilisation aux risques ne conduit pas nécessairement à des investissements dans la gestion des risques de catastrophe. Le risque ne peut se comprendre qu’à la lumière de la relation dynamique existant entre les ménages, les entreprises ou les gouvernements exposés et vulnérables et la probabilité d’aléas d’intensités et d’ampleurs différentes. Tandis que la sensibilisation aux risques peut constituer une condition préalable, l’importance que les individus accordent à la gestion des risques qui les concernent ne peut être appréhendée qu’en prenant en compte la gamme complète des contraintes socio-économiques, territoriales et environnementales auxquelles ils sont confrontés ou des opportunités qui leur sont offertes.

7.2

7.3

L’expérience du risque de catastrophe

La sensibilisation aux risques est un processus dynamique qui dépend dans une large mesure Figure 7.1 Progrès dans la sensibilisation aux risques Niveau des progrès [1 à 5] 3,5

Niveau moyen des progrès au cours du CAH

3,4 3,3 3,2

Le défi de l’information

Tandis que sont aujourd’hui produites plus d’informations sur les risques de catastrophe que jamais, elles ne sont pas nécessairement mises à la disposition des ménages, des entreprises et des investisseurs.

3,1 3 2,9 2,8 2,7

2007-09

2009-11

2011-13

Cycle d'évaluation des progrès du CAH (Source : UNISDR, données de l’outil HFA Monitor.)

139


Encadré 7.1  Sensibilisation aux risques et information

Gestion et mise en commun de l’information (a) Fournir aux habitants, en particulier dans les zones à haut risque, des informations faciles à comprendre sur les risques de catastrophe et les moyens de protection possibles, afin de les encourager à prendre des mesures pour réduire les risques et devenir plus résilients et de leur en donner la possibilité. Il faudrait communiquer notamment des informations sur les savoirs traditionnels et autochtones pertinents, et sur le patrimoine culturel en les adaptant aux différents publics visés et en tenant compte des facteurs culturels et sociaux. (b) Renforcer les réseaux intersectoriels et interrégionaux d’experts, de gestionnaires et de planificateurs spécialisés dans les catastrophes, et mettre sur pied des dispositifs permettant d’utiliser les compétences disponibles lorsque des organismes ou autres acteurs importants élaborent des plans locaux de réduction des risques, ou renforcer les dispositifs déjà en place. (c) Favoriser et améliorer le dialogue et la coopération entre les scientifiques et les professionnels qui s’emploient à réduire les risques de catastrophe et encourager l’instauration de partenariats entre les parties prenantes, notamment celles qui s’occupent des aspects socio-économiques de la question. (d) Promouvoir l’utilisation et l’application à un coût raisonnable des technologies modernes d’information, de communication et d’observation spatiale et des services connexes ainsi que des observations terrestres à l’appui de la réduction des risques de catastrophe, notamment pour la formation et pour la mise en commun de l’information et sa diffusion auprès des différentes catégories d’utilisateurs. (e) À moyen terme, créer, aux niveaux local, national, régional et international, des répertoires, des inventaires et des systèmes et services de mise en commun de l’information d’utilisation facile afin de permettre l’échange de renseignements sur les bonnes pratiques, sur les technologies de réduction des risques de catastrophe d’un bon rapport coût-efficacité et simples à mettre en œuvre, et sur les enseignements tirés de l’expérience au sujet des politiques, plans et mesures de réduction des risques de catastrophe. (f) Les institutions qui s’occupent des questions d’urbanisme devraient informer le public des possibilités de réduction des risques de catastrophe préalablement à tout projet de construction, ou à tout achat ou vente de terrain. (g) Mettre à jour une terminologie internationale type relative à la réduction des risques de catastrophe et ce au moins dans toutes les langues officielles de l’ONU ; cette terminologie, qui devra être diffusée largement, sera utilisée pour l’élaboration des programmes et la mise en place des institutions, ainsi que dans le cadre des opérations, des travaux de recherche et des programmes de formation et d’information du public. Sensibilisation du public (p) Mobiliser les médias en vue de promouvoir une culture de la résilience face aux catastrophes et une forte participation des collectivités à des campagnes permanentes d’éducation du public et à des consultations organisées dans toutes les couches de la société. (CAH, 2005)

de l’expérience acquise en matière de catastrophes. Elle varie donc à travers le temps et l’espace. La sensibilisation aux risques et leur compréhension semblent être fondamentalement liées à l’expérience. Par exemple, le Japon présente le plus haut niveau d’exposition aux aléas du monde et a été confronté à des catastrophes répétées depuis des millénaires. Du fait de cette expérience, les risques sont largement connus des citoyens et des autorités publiques, la recherche dans le domaine 140

Partie II - Chapitre 7

de l’identification et de l’estimation des risques est une priorité et la connaissance des risques imprègne les stratégies et les politiques de gestion des risques de catastrophe à tous les niveaux. La durabilité des efforts mis en œuvre dépend d’une gestion saine des risques de catastrophe. Il est en revanche probable que la sensibilisation aux risques de catastrophe des ménages, des entreprises et des gouvernements dans les pays peu exposés aux aléas et rarement confrontés à des catastrophes ne bénéficie pas de cette expérience


essentielle. Quel que soit le degré d’information dont dispose le public sur les aléas, la gestion des risques de catastrophe est bien moins susceptible de représenter un impératif politique et économique fort dans ces pays (Neumayer et al. 2012). Experiencing disaster risk

Au niveau mondial, la sensibilisation aux risques de catastrophe n’est pas systématiquement évaluée et il est difficile de déterminer dans quelle mesure elle a évolué depuis l’adoption du CAH ou la déclaration de la DIPCN. Toutefois, le nombre de catastrophes signalées aux niveaux national et international affiche une solide tendance à la hausse depuis 1990 (Figure 7.2), ce qui pourrait indiquer qu’un plus grand nombre d’individus ont été directement confrontés à des manifestations du risque. Les catastrophes intensives de grande ampleur assorties de conséquences socio-économiques majeures contribuent incontestablement à la sensibilisation aux risques, du moins à court terme, et sont susceptibles de produire du changement. Comme indiqué au Chapitre 1, la nécessité de réformer les outils de gouvernance des risques émerge souvent dans le sillage de catastrophes majeures. Ce changement ne se limite pas aux gouvernements. Par exemple, l’impact des catastrophes de 2011 au Japon et en Thaïlande

sur les chaînes d’approvisionnement mondiales (UNISDR, 2013a) a certainement donné lieu à une plus grande sensibilisation aux risques de catastrophe et à un plus grand niveau d’implication à cet égard dans le secteur privé. Tandis que ce processus de sensibilisation (Encadré 7.2) continue à se développer, les risques de catastrophe et ceux liés au climat figurent désormais en bonne place sur les écrans radars des cadres dirigeants des sociétés multinationales. La poursuite du processus de sensibilisation aux risques à moyen et long termes semble dépendre de la fréquence des catastrophes. Lorsque les catastrophes intensives sont très rares, comme dans le cas des tsunamis de l’océan Indien, la sensibilisation aux risques de catastrophe est susceptible de faiblir d’une génération à l’autre. Pour citer un exemple extrême, il est très peu probable que la sensibilisation aux risques de séisme soit encore solide au sud-est de l’Angleterre en conséquence du séisme qui a frappé Canterbury le 21 mai 1382. Du fait de la migration, des populations qui vivent dans une région pendant des décennies peuvent en effet ignorer les risques liés à des catastrophes survenues des siècles auparavant. De plus, une plus grande mobilité géographique signifie désormais que les individus vivent, travaillent et se déplacent fréquemment loin des régions et des risques de catastrophe qu’ils connaissent bien.

Figure 7.2 Enregistrements de catastrophes dans les bases de données mondiales (à gauche) et nationales (à droite) Catastrophes (niveau national)

Fiches de données (comme approximation des occurrences)

500

25 000

400

20 000

300

15 000

200

10 000

100

5 000

1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010

2013

1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010

2013

(Source : UNISDR, données EM-DAT et bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes.)

141


Encadré 7.2 Accroître la sensibilisation aux risques de catastrophe et aux risques liés au climat

Près de 70 % des entreprises qui ont participé à une enquête récente réalisée par le Carbon Disclosure Project (CDP) ont identifié des risques manifestes pour le maintien des activités de leurs chaînes d’approvisionnement et, par conséquent, pour leurs sources de revenus, en raison du changement climatique et des événements climatiques extrêmes qui en découlent (CDP, 2013). Plus important encore, plus de la moitié de ces risques ont déjà affecté ces entreprises ou devraient le faire dans les cinq prochaines années (Ibid.). Les enquêtes locales de nature similaire reflètent ces résultats obtenus à l’échelle mondiale et indiquent que la sensibilisation aux risques liés au climat, en particulier, progresse dans le monde entier. Par exemple, parmi les quelque 300 entreprises qui ont participé à une enquête annuelle sur le changement climatique à Hong Kong, 82 % ont identifié les interruptions des activités liées à un climat extrême comme des risques critiques, contre « seulement » 44 % en 2010 (BEC CCBF, 2014). Il est toutefois probable que les entreprises les plus petites ne soient pas aussi conscientes de l’ampleur potentielle des risques liés au climat (Ceres, 2013). Parmi les 184 entreprises interrogées dans le secteur de l’assurance, seules 23 grandes entreprises avaient élaboré une « stratégie spécifique et complète pour faire face au changement climatique » (Ibid., p. 7). Les approches des autres entreprises vont de la perception du changement climatique comme un risque inhérent intégré à leurs stratégies de gestion des risques à un aspect environnemental négligeable pour leurs affaires.

Comme le souligne le cas de Ratnapura, les catastrophes extensives influencent incontestablement la sensibilisation aux risques d’une manière bien plus concrète dans les localités où elles se produisent. Par ailleurs, du fait de leur fréquence, ce degré de sensibilisation est peu susceptible de décroître. En revanche, comme ces catastrophes affectent essentiellement des ménages et des collectivités à faibles revenus, ainsi que des petites entreprises et des infrastructures locales, plutôt que des intérêts politiques et économiques stratégiques, elles sont moins susceptibles d’accroître le degré de priorité accordé à la gestion des risques de catastrophe au niveau national (UNISDR, 2011a). Dans le même temps, les opportunités permettant de gérer les risques sont souvent sérieusement limitées au niveau local. Supply chains

7.4

La course au scoop

L’intérêt des médias pour les catastrophes est éphémère et les reportages sur leurs causes et leurs impacts sont susceptibles de renforcer leur 142

Partie II - Chapitre 7

perception en tant que phénomènes exogènes au développement. Le monde évolue rapidement au fur et à mesure que la connectivité progresse et la télévision mondiale, l’internet et les médias sociaux deviennent omniprésents. Les images de catastrophes survenant à n’importe quel endroit du globe sont désormais transmises et diffusées dans le monde entier, en temps réel. De la même manière, les impacts des catastrophes se répercutent sur les chaînes d’approvisionnement et de valeur mondiales. Une sensibilisation aux risques plus globale semble voir le jour sans nécessairement se fonder sur l’expérience des catastrophes dans des régions spécifiques. Cette sensibilisation mondiale aux risques s’est vue renforcer par la menace d’un changement climatique catastrophique, dans la mesure où le risque de catastrophe a été de plus en plus présenté comme étant synonyme de changement climatique. Les médias du monde entier mettent cependant l’accent sur les événements catastrophiques majeurs plutôt que sur les processus et les facteurs sous-jacents qui génèrent et accumulent les risques de catastrophe. Comme les ressources destinées au secteur de la gestion des risques


de catastrophe, la couverture médiatique des catastrophes et l’intérêt qu’elles suscitent sont éphémères : ils explosent lorsque surviennent des événements majeurs, par exemple à la suite des tsunamis de l’océan Indien en 2004 et du séisme de l’est japonais en 2011, mais s’éteignent entre deux événements (Encadré 7.3).

Depuis la déclaration de la DIPCN, la production et la diffusion d’informations sur les risques et la réduction des risques de catastrophe connaissent une croissance phénoménale (UNISDR, 2014c). Toutefois, on mesure mal de quelle façon cette évolution contribue à une meilleure sensibilisation aux risques de catastrophe.

Dans un tel contexte, tandis que les médias mondiaux sont susceptibles d’accroître la sensibilisation aux risques, ils peuvent aussi avoir tendance à renforcer la perception des catastrophes en tant qu’événements exogènes et à dissimuler ainsi les facteurs par lesquels le modèle de développement génère et accumule les risques. Par ailleurs, alors que ces facteurs sont rendus visibles par la survenue de catastrophes extensives, la sensibilisation aux risques qui en résulte se limite dans une large mesure au niveau local.

Tandis que le secteur de la gestion des risques de catastrophe s’est développé et se structure autour de différentes communautés de pratique, notamment la gestion de l’urgence, la gestion participative des risques de catastrophe, l’assurance et le financement du risque2, le volume d’informations produites et échangées a augmenté de façon exponentielle, facilité par l’expansion de l’internet depuis le début des années 1990. PreventionWeb répertorie désormais 6 587 organisations qui ont fait la promotion de la réduction des risques de catastrophe par l’intermédiaire de leurs sites internet, parmi lesquelles 1 093 organes de presse et d’information, soutenues sur les plans régional et thématique par des portails d’information dédiés et des centres de documentation en ligne tels que le CRID en Amérique latine, PreventionWeb lui-même, Pacific Disaster Net et d’autres. (UNISDR, 2014c).

Media handbook

7.5

Des informations mais pas de communication

Les informations sur les risques sont produites et diffusées à grande échelle, mais leur portée et leur impact sur la perception des risques et les niveaux de sensibilisation restent méconnus.

De nombreux réseaux formels et informels offrent désormais des canaux destinés au partage et à

Encadré 7.3 La mortalité liée aux catastrophes et les médias

L’espace réservé à la mortalité dans les médias n’est pas proportionnel au nombre de décès qui surviennent en réalité (Bomlitz et Brezis, 2008). La mortalité liée aux drogues illicites, aux accidents de la route, aux substances toxiques et aux homicides est surreprésentée (Frost et al., 1997), à l’instar des aléas tels que le SRAS et le bioterrorisme. En revanche, des causes de mortalité plus courantes, telles que le sida, la sédentarité et le tabagisme, sont sous-représentées (Bomlitz et Brezis, 2008). D’une manière générale, les médias tendent à ignorer les changements latents (Glantz, 1999), même si les menaces que représentent des évolutions telles que la perte de biodiversité, le changement climatique, la désertification, l’appauvrissement de la couche d’ozone stratosphérique, la déforestation tropicale, la destruction de la mangrove et du corail, l’érosion des sols, la pollution des sols et des eaux, la surpêche, les espèces invasives (Meadows et al., 1972 ; Turner, 2008 ; Randers, 2008 et Rockström et al., 2009), ainsi que d’autres facteurs mondiaux, sont susceptibles d’accroître les risques de catastrophe jusqu’à des niveaux alarmants. Ces changements progressifs passent inaperçus, jusqu’à ce qu’ils atteignent un seuil spécifique et entraînent des évolutions brutales dans l’environnement, ou qu’ils soient mis au jour par une catastrophe (Maskrey, 1999). C’est seulement alors que les médias leur accordent une attention.

143


la diffusion des informations au sein du secteur. De plus, tandis qu’il n’existait qu’une poignée de programmes de formation spécialisés dans le domaine de la réduction des risques de catastrophe en 1990, on répertorie aujourd’hui plus de 100 programmes de master consacrés à ce secteur dans toutes les régions (Holloway, 2014). Par conséquent, la croissance exponentielle de la production et de l’échange des informations sur la gestion des risques de catastrophe est incontestable. En revanche, il reste difficile de déterminer combien ces informations se diffusent en dehors du secteur pour atteindre d’autres domaines sociaux, économiques et politiques. Par ailleurs, il est encore plus difficile de savoir à quel point ces informations ont réellement engendré des changements et une transformation des pratiques de développement. Comme indiqué au Chapitre 1, certaines des activités principales proposées par le CAH en ce qui concerne les informations sur les risques, par exemple : « Les institutions qui s’occupent des questions d’urbanisme devraient informer le public des possibilités de réduction des risques de catastrophe préalablement à tout projet de construction, ou à tout achat ou vente de terrain », étaient perspicaces et susceptibles de directement influencer et transformer le fonctionnement des marchés fonciers et les processus d’évaluation des risques de catastrophe. Peu d’éléments laissent pourtant supposer que cette activité essentielle ait jamais été traduite en actions. En revanche, des progrès beaucoup plus importants ont été accomplis dans le domaine de la diffusion des informations par l’intermédiaire de programmes de sensibilisation du public. Selon l’outil HFA Monitor, le nombre de pays disposant de systèmes d’information sur les risques et de mécanismes de diffusion dynamique des informations a augmenté au cours des deux dernières périodes de rapport (2009-2013) avec certaines différences régionales notables. En Afrique, les obstacles cités incluent notamment le manque 144

Partie II - Chapitre 7

de capacités, de financement et de connectivité à l’internet, et de nombreux pays sont confrontés à des problèmes de durabilité. En Asie, certains pays à faible revenu semblent disposer de systèmes plus sophistiqués que les pays à revenu élevé. Dans la plupart des pays (UNISDR, 2014c ; SCI, 2014), l’existence d’un site internet est souvent considérée comme attestant de celle d’un système d’information sur les catastrophes. L’augmentation du nombre de sites internet proposant des informations sur les risques ou de celui des experts qui participent à des conférences régionales et internationales donne incontestablement l’impression d’une meilleure sensibilisation aux risques, mais, comme l’indique l’introduction de la présente section du rapport, il se peut qu’elle ne fasse tout simplement que renforcer l’hyperréalité du secteur. Rares sont les éléments indiquant à quel point les ménages, les entreprises et les institutions publiques d’autres secteurs consultent ces sites ou permettant de déterminer si les informations disponibles peuvent être traduites en actions. De nombreux pays ont également utilisé des campagnes médiatiques (presse écrite, radio, télévision) pour sensibiliser le public. Cependant, la diffusion des informations est généralement unidirectionnelle et reflète les priorités et la vision du secteur, et non les besoins en matière d’informations des personnes exposées aux risques. Par définition, les campagnes médiatiques sont généralement simples et génériques. Elles mettent souvent l’accent sur la sensibilisation aux aléas et aux catastrophes en tant que phénomènes exogènes, plutôt que sur les processus de création et d’accumulation des risques construits par la société. Les contraintes et les opportunités associées à la gestion des risques, les droits des personnes exposées ou la responsabilité des gouvernements locaux et nationaux sont rarement mentionnés, tandis que les besoins spécifiques des femmes, des personnes âgées, des personnes


handicapées et des enfants n’ont que rarement été mis en lumière. Dans le même temps, un nombre important de gouvernements considère toujours les informations sur les risques ou même sur les pertes dues aux catastrophes comme des informations sensibles du point de vue de la sécurité nationale, ce qui signifie qu’elles ne sont pas diffusées ou mises à la disposition des citoyens. Cette attitude ne permet pas d’établir une culture de la prévention et de la résilience, puisqu’elle ne donne pas aux ménages et aux entreprises exposés les capacités nécessaires pour gérer leurs risques à la lumière d’un plus vaste contexte d’opportunités et de contraintes socio-économiques. Dans de nombreux secteurs, les opportunités de gain économique à court terme l’emportent encore fréquemment sur les risques à long terme. Une culture de la prévention et de la résilience pourra seulement voir le jour si les informations permettent d’évaluer de façon transparente et complète les coûts et les avantages de la gestion des risques de catastrophe et si un système de responsabilisation qui prévoit des mesures incitatives et encourage le respect des obligations est mis en œuvre (OCDE, 2014b). Information and communication

7.6

L’éducation comme outil de gestion efficace des risques

L’éducation, et plus particulièrement l’enseignement scolaire formel, offre une base solide pour aider les individus à comprendre les risques de catastrophe. Un programme adapté peut favoriser une amélioration notable de la sensibilisation aux risques. Au Népal, les familles affectées par les inondations et les glissements de terrain sont moins nombreuses dans les villages qui affichent le plus grand nombre d’années de scolarisation moyennes (KC, 2013), et en Thaïlande, les consé-

quences sur le bien-être, notamment en termes de pertes de revenu, sont moins sévères pour les communautés qui bénéficient des plus hauts niveaux d’éducation (Garbero et Muttarak, 2013). Les implications politiques de ces résultats sont claires : il a été démontré que les investissements dans l’éducation, notamment celle des filles, réduisent la vulnérabilité et devraient ainsi être présentés comme un investissement stratégique essentiel dans la réduction des risques de catastrophe (Muttarak et Lutz, 2014). Tandis que l’éducation générale formelle jette les bases de la structure cérébrale synoptique et des compétences cognitives et de résolution des problèmes qui l’accompagnent, elle génère également les capacités de lecture et de calcul et la pensée abstraite nécessaires pour mieux comprendre les informations sur les risques, notamment les messages d’alerte précoce et les plans d’évacuation (Ibid.). En d’autres termes, l’éducation facilite l’acquisition de connaissances dans un large éventail de domaines directement liés à la vulnérabilité individuelle et communautaire, notamment les pratiques de santé et d’alimentation, et elle favorise la connaissance directe des aléas. Par ailleurs, l’éducation peut améliorer le statut socio-économique des individus et des familles et contribuer ainsi à une meilleure gestion des risques de catastrophe grâce à des revenus plus élevés, à un meilleur accès à l’information et à des réseaux sociaux plus solides (Ibid.). De récentes études qui comparent les niveaux d’éducation nationaux avec le risque de mortalité indiquent que les pays dont les niveaux d’éducation sont les plus élevés, notamment parmi les femmes et les jeunes filles, sont confrontés à une mortalité moins importante en cas de catastrophe (KC, 2013 ; Striessnig et al., 2013). Par exemple, il s’avère que les niveaux d’éducation et les taux de mortalité sont fortement corrélés en ce qui concerne les risques de catastrophe liée au climat dans 56 pays qui subissent en moyenne une ou plusieurs catastrophes chaque année (Figure 7.3). 145


Figure 7.3 Mortalité due aux catastrophes liées au climat et éducation des femmes à Cuba, en République dominicaine et en Haïti orta ité / opu ation initia e

risques de catastrophe dans l’éducation et la formation (Encadré 7.4).

Remarque : le graphique illustre les décès en milliers sur les niveaux de population de 1980 (axe y) proportionnellement aux niveaux d’enseignement secondaire et supérieur chez des femmes âgées de 20 à 39 ans (axe x) pour 56 pays subissant en moyenne une ou plusieurs catastrophes chaque année. (Source : Pichler et Striessnig, 2014.)

Depuis 2005, une multitude de matériels pédagogiques ont été élaborés sous la forme de brochures, de guides de l’enseignant et de guides de réforme des programmes en différentes langues3. Toutefois, le contenu et la qualité des matériels éducatifs portant sur la réduction des risques de catastrophe n’ont pas été sérieusement examinés et l’adoption des matériels existants par les institutions scolaires ne fait l’objet d’aucun suivi. Il est donc difficile d’évaluer les progrès réalisés, de déterminer l’efficacité des efforts de réforme des programmes pour y inclure des considérations relatives aux risques, ou encore d’identifier les domaines dans lesquels ces efforts ont été vains et les raisons de ces échecs.

Tandis que l’éducation est en soi essentielle pour la réduction des risques de catastrophe, le CAH a proposé différentes activités principales dans le cadre de la Priorité d’action n° 3 qui se rapportent spécifiquement à l’intégration de la réduction des

De par sa nature même, l’élaboration des programmes permet difficilement à un cadre tel que le CAH d’exercer une influence notable sur le processus décisionnel. D’une part, les programmes sont révisés et adaptés tous les 5 à 10 ans, ce qui ne cor-

2 1 Haïti

0 -1

épub i ue ominicaine

-2 -3

uba

-4 -5 -6

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

roportion de emmes de 20 ans a ant au moins un niveau d enseignement secondaire

Encadré 7.4 Activités principales liées à l’éducation et à la formation dans le CAH

(h) Promouvoir l’intégration de la question de la réduction des risques de catastrophe dans les sections pertinentes des programmes d’enseignement à tous les niveaux et l’utilisation d’autres voies, officielles et officieuses, pour informer les jeunes et les enfants. Promouvoir la démarche consistant à faire de la réduction des risques de catastrophe un élément à part entière des programmes de la Décennie des Nations Unies pour l’éducation en vue du développement durable (2005-2015). (i) Promouvoir l’exécution de programmes locaux d’évaluation des risques et de préparation aux situations de catastrophe dans les écoles et les établissements d’enseignement supérieur. (j) Promouvoir l’exécution, dans les écoles, de programmes et d’activités visant à apprendre aux élèves comment réduire au minimum les effets des aléas. (k) Élaborer des programmes de formation et d’enseignement consacrés à la gestion et à la réduction des risques de catastrophe à l’intention de publics précis (planificateurs du développement, responsables des opérations d’urgence, agents des administrations locales, etc.). (l) Promouvoir l’exécution de projets de formation au niveau des collectivités, en prenant en considération le rôle que les volontaires peuvent jouer, selon le cas, aux fins du renforcement des capacités disponibles au niveau local pour faire face aux catastrophes et en atténuer les effets. (m) Veiller à ce que les femmes et les groupes vulnérables aient accès dans des conditions d’égalité à une formation et à une éducation appropriées dans ce domaine. Promouvoir la sensibilisation aux sexospécificités et aux particularités culturelles en inscrivant ces questions aux programmes d’éducation et de formation consacrés à la réduction des risques de catastrophe. (CAH, 2005)

146

Partie II - Chapitre 7


respond pas nécessairement aux cycles courts des projets visant à sensibiliser les élèves aux risques. D’autre part, il est souvent difficile d’aligner les orientations génériques et globales du CAH sur les contextes infranationaux dans lesquels les programmes sont généralement élaborés. Près de 72 % des pays qui élaborent des rapports par le biais de l’outil HFA Monitor indiquent toutefois que la réduction des risques de catastrophe est d’une manière ou d’une autre intégrée au programme éducatif national, en précisant que ce domaine est abordé dans le cadre de l’enseignement primaire de façon légèrement plus conséquente que dans celui de l’enseignement secondaire, universitaire ou professionnel. Seul un tiers des pays environ déclare avoir intégré la réduction des risques de catastrophe à tous les niveaux de l’éducation, y compris dans les programmes de formation professionnelle (UNICEF et UNESCO, 2014). Tandis que les études systématiques portant sur l’évolution des perceptions sont rares, certains éléments portent à croire que les exercices de préparation et de simulation organisés dans les écoles (Encadré 7.5) sont susceptibles de contribuer de façon notable à la sensibilisation aux risques, notamment parmi les enfants et les adolescents.

L’engagement des enfants dans la gestion des catastrophes à l’école, y compris au travers de l’évaluation des risques et de la résolution active des problèmes, établit les fondements de la pensée critique et entraîne une volonté croissante de relever d’autres défis. Le fait d’impliquer les étudiants et les familles dans la planification du maintien des activités éducatives est également susceptible de contribuer à réduire le taux de décrochage scolaire lorsqu’une catastrophe se produit (UNICEF et UNESCO, 2014). Resilient city: Lourdes

Plutôt que de promouvoir la réduction des risques de catastrophe comme une matière autonome, combiner ce domaine à des sujets connexes, tels que le changement climatique, permet d’exploiter des synergies manifestes. Le Cambodge promeut par exemple la mise en œuvre d’un programme combinant la réduction des risques de catastrophe et l’adaptation au changement climatique qui réduit la pression sur ce que l’on considère comme un programme scolaire déjà surchargé. Il existe d’autres exemples où le domaine de la réduction des risques de catastrophe a été associé à des thèmes tels que les conflits et la construction de la

Encadré 7.5 Le rôle des enfants dans le renforcement de la préparation

Les États-Unis et l’Australie ont élaboré des matériels pédagogiques qui encouragent l’esprit d’initiative auprès des élèves dans le domaine de la préparation aux catastrophes et leur enseignent comment partager ces informations avec d’autres. Le fait de considérer les enfants comme des acteurs du changement, et non comme des objets qu’il convient de protéger, peut amplifier la portée de l’éducation et son impact. Plusieurs programmes ont été élaborés en vue de renforcer la sensibilisation des enfants et leurs capacités dans le domaine de la RRC, notamment les programmes de sécurité à l’école de Save the Children ou la Charte des enfants pour la réduction des risques de catastrophe ( Children in a Changing Climate Coalition, 2011). En France, l’initiative Memo’Risks a été mise en œuvre dans le bassin de la Loire en 2004. Elle rassemble les autorités locales et les écoles dans le cadre d’un projet visant à évaluer la sensibilisation aux risques de catastrophe locaux (UNISDR et al., 2010). Les étudiants s’associent aux maires des communes locales pour étudier et cartographier les risques et analyser le niveau de préparation aux catastrophes et la connaissance des risques de la population locale. Les résultats de ces études offrent ensuite une précieuse source de données relatives aux perceptions et aux niveaux de connaissance des risques de la population locale. Le processus de collecte, de présentation et de publication des résultats permet aux autorités locales d’accroître la sensibilisation au travers des médias, d’augmenter la participation des collectivités à la réduction des risques de catastrophe et d’offrir une base aux campagnes d’information ciblées sur les risques de catastrophe (Ibid.) 4.

147


paix, le développement durable, d’autres risques localisés courants, ainsi qu’à des facteurs de risque socio-économiques et politiques sous-jacents. Malheureusement, la nature isolée du secteur de la gestion des risques de catastrophe et les rivalités institutionnelles avec d’autres secteurs tels que le changement climatique peuvent constituer des obstacles pour ce type d’intégration. Lessons save lives

7.7

Vivre dans un monde modélisé

La production d’informations sur les risques s’est considérablement développée au cours du temps et elle s’accompagne de communautés de pratique associées, d’une plus grande disponibilité des données et d’un renforcement des capacités scientifiques et techniques de transformer ces données en informations sur les risques. Parallèlement au développement du secteur de la gestion des risques de catastrophe dans son ensemble, on constate une croissance tout aussi exponentielle du nombre d’individus et d’institutions impliqués dans l’évaluation des risques. À tous les niveaux, la production d’informations sur les risques s’est largement développée, et est allée de pair avec une croissance équivalente de la taille des communautés de pratique associées, des données disponibles et des capacités scientifiques et techniques de transformer ces données en informations sur les risques. La série de réunions intitulées « Comprendre le risque », organisées depuis 2010 par la Banque mondiale5, souligne l’émergence d’une communauté de pratique de plus en plus vaste et spécialisée dans ce domaine. Il semble que la gestion des risques de catastrophe se fait de plus en plus dans le cadre d’un monde modélisé. Jusqu’au début des années 90, le secteur de l’assurance fondait principalement ses décisions 148

Partie II - Chapitre 7

commerciales sur des approches actuarielles utilisant des données historiques. L’utilisation de modèles de risques de catastrophe dans ce secteur s’est considérablement développée après l’ouragan Andrew qui a frappé la Floride en 1992 et a entraîné des pertes assurées beaucoup plus importantes que celles qui étaient attendues sur la base de l’expérience historique (GFDRR, 2014a). Peu de temps après que l’ouragan ait touché le sol, la société AIR, une entreprise spécialisée dans la modélisation des risques, a modélisé et estimé les pertes assurées. Celles-ci étaient nettement plus importantes que toutes les pertes subies par le passé et plus proches des pertes réellement entraînées par l’ouragan. L’arrivée d’ordinateurs personnels puissants au début des années 90 a introduit l’ère de la modélisation mathématique des risques de catastrophe à l’aide d’approches probabilistes. À la suite de l’ouragan Andrew, le secteur de l’assurance a commencé à investir lourdement dans la modélisation des risques afin de calculer les primes de façon appropriée et de se protéger contre l’insolvabilité. À quelques rares exceptions près6, la modélisation probabiliste des risques était essentiellement limitée au secteur de l’assurance et aux entreprises spécialisées dans la modélisation des risques jusqu’à l’introduction du CAH. Tandis que la plupart des gouvernements nationaux et locaux et des organisations internationales et non gouvernementales procédaient à des évaluations des risques, celles-ci étaient généralement qualitatives (c’est-à-dire qu’elles mettaient en lumière des domaines de risque faible, moyen ou élevé) ou déterministes (calculant les risques de façon quantitative pour un scénario de catastrophe particulier) par nature et limitées par la disponibilité de données historiques. Le CAH a apporté des directives détaillées portant sur les activités principales du processus d’évaluation des risques dans le cadre des Priorités d’action n° 2 et 3 (Encadré 7.6).


Encadré 7.6  Activités principales liées à l’évaluation des risques dans le CAH

Évaluation des risques aux niveaux national et local (a) Dresser des cartes des risques assorties d’informations connexes, les mettre à jour périodiquement et les diffuser largement auprès des décideurs, du grand public et des collectivités menacées, selon une présentation appropriée. (b) Mettre au point des ensembles d’indicateurs des risques de catastrophe et de la vulnérabilité aux échelons national et infranational qui permettront aux décideurs d’évaluer les conséquences des catastrophes aux niveaux social, économique et environnemental, et en diffuser les résultats aux décideurs, au grand public et aux populations menacées. (c) Recueillir, analyser, résumer et diffuser régulièrement des informations statistiques sur les catastrophes qui se produisent, leurs conséquences et les pertes qu’elles occasionnent, au moyen de mécanismes internationaux, régionaux, nationaux et locaux. Capacités (i) Appuyer la mise en place et la pérennisation des infrastructures et des capacités scientifiques, technologiques, techniques et institutionnelles nécessaires pour étudier, observer, analyser, cartographier et, lorsque cela est possible, prévoir les aléas naturels et les aléas connexes, les facteurs de vulnérabilité et les conséquences des catastrophes. (j) Appuyer la création de bases de données pertinentes et l’amélioration de celles qui existent déjà ainsi que l’échange et la diffusion, sans restriction ni contrepartie, des données aux fins de l’évaluation, de la surveillance et de l’alerte rapide, selon qu’il convient, aux niveaux international, régional, national et local. (k) Appuyer les efforts de perfectionnement des méthodes et des moyens scientifiques et techniques d’évaluation des risques, de surveillance et d’alerte rapide par la recherche, la conclusion de partenariats, la formation et le renforcement des capacités techniques. Favoriser l’application des méthodes d’observation de la Terre in situ ou depuis l’espace, des technologies spatiales, de la télédétection, et des systèmes d’information géographique, le recours à la modélisation et aux études prédictives pour ce qui concerne les aléas et le recours à la modélisation et à la prévision dans les domaines météorologique et climatique, l’utilisation des outils de communication et la réalisation d’analyses coûts-avantages des évaluations des risques et de l’alerte rapide. (l) Mettre en place les moyens nécessaires pour recueillir, analyser, résumer, diffuser et échanger des informations et données statistiques sur la cartographie des aléas, les risques de catastrophe, ainsi que les conséquences des catastrophes et les pertes qu’elles occasionnent, ou renforcer ceux qui existent déjà ; appuyer l’élaboration de méthodes communes pour évaluer et surveiller les risques. Risques régionaux et risques transfrontières (m) Rassembler des informations et des données statistiques sur les risques de catastrophe, les conséquences des catastrophes et les pertes qu’elles occasionnent, et ce, au niveau régional, et les présenter sous une forme normalisée, selon qu’il convient. (n) Coopérer aux niveaux régional et international, selon qu’il convient, pour évaluer et surveiller les risques régionaux ou transfrontières, et échanger des informations et donner rapidement l’alerte au moyen de mécanismes appropriés tels que, notamment, ceux qui sont prévus pour gérer des bassins hydrographiques. Recherche (n) Améliorer les méthodes d’évaluation prévisionnelle des différents risques et d’analyse des coûts et avantages socio-économiques des mesures de réduction des risques à tous les niveaux ; intégrer ces méthodes dans les processus décisionnels aux échelons régional, national et local. (o) Renforcer les capacités scientifiques et techniques disponibles pour réaliser les études et pour mettre au point et appliquer les méthodes et les modèles permettant d’évaluer les facteurs de vulnérabilité face aux aléas géologiques, météorologiques, hydrologiques et climatiques, ainsi que les conséquences de ces aléas, et notamment améliorer les capacités de surveillance ainsi que les évaluations au niveau régional. (CAH, 2005)

149


Depuis l’adoption du CAH, la production d’informations sur les risques par les institutions scientifiques et techniques du secteur public, les universités et les organisations internationales s’est développée à un rythme effréné (GFDRR, 2014a). Cette croissance a notamment bénéficié d’une plus grande disponibilité des informations de télédétection, des logiciels et des plateformes à code source ouvert, des médias sociaux, des sources d’informations participatives et des téléphones portables, ainsi que de l’augmentation exponentielle de la puissance informatique. Il y a par ailleurs une plus grande convergence entre les efforts d’évaluation des risques mis en œuvre dans les secteurs de l’assurance et de la modélisation des catastrophes et ceux du secteur public et du monde universitaire. Des progrès notables ont ainsi été réalisés dans chaque composante essentielle du processus d’évaluation des risques (Figure 7. 4).

pour modéliser l’exposition mondiale avec une précision toujours plus grande. Aux plans national et infranational, les données et les informations issues des ministères (notamment les services statistiques, les ministères des transports et de l’infrastructure et les ministères de l’éducation et de la santé) sont de plus en plus souvent libérées7 et regroupées dans le but de comprendre l’exposition d’une collectivité, d’une ville ou d’un pays. Au niveau des villes et des collectivités, la popularité grandissante des sources d’information participatives a également favorisé la collecte de données relatives à l’exposition, ainsi que la réalisation d’études sur les impacts des catastrophes et leur cartographie en temps réel, notamment après le séisme qui a frappé Haïti ou les inondations survenues au Pakistan en 2010 (Degrossi et al., 2014 ; Chohan et al., 2011). Des applications telles que OpenStreetMap (Encadré 7.7) contribuent à renforcer l’omniprésence de ces informations.

Figure 7.4 Progrès dans l’identification et l’évaluation des risques

Dans le même temps, le nombre et la fonctionnalité des outils et des modèles permettant d’identifier, d’analyser et de gérer les risques ont augmenté ; par ailleurs, les données et les outils relatifs aux risques sont de plus en plus souvent disponibles gratuitement pour les utilisateurs, suivant une tendance mondiale plus importante en faveur d’un libre accès aux données. Plus de 80 ensembles logiciels, dont la plupart sont à code source ouvert, sont désormais disponibles gratuitement pour évaluer les risques d’inondation, de tsunami, de cyclone (vent et onde de tempête) et de séisme, et au moins 30 d’entre eux sont d’un usage répandu (GFDRR, 2014a). Des progrès significatifs ont également été accomplis en termes d’amélioration des outils géospatiaux à code source ouvert tels que QGIS, GeoNode et PREVIEW, qui permettent de lever certains obstacles financiers au développement des informations sur les risques aux niveaux national et infranational.

Niveau des progrès [1 à 5]

Niveau moyen des progrès au cours du CAH

3,5

3,3

3,1

2,9

2,7

2,5

2007-09

2009-11

2011-13

Cycle d'évaluation des progrès du CAH Priorité d’action n° 2 du CAH : Mettre en évidence, évaluer et surveiller les risques de catastrophe et renforcer les systèmes d’alerte précoce. (Source : UNISDR, données de l’outil HFA Monitor.)

Des progrès notables ont été réalisés dans la création et la mise à disposition d’un accès libre à de nombreuses données mondiales et nationales essentielles pour comprendre les aléas. Une meilleure disponibilité des données mondiales sur la population, les types de bâtiment, l’imagerie satellite etc. ouvrent des opportunités majeures 150

Partie II - Chapitre 7

Depuis la publication d’une première analyse mondiale des risques multi-aléa par le PNUD en 2004 (PNUD, 2004), les modèles conçus pour


OpenStreetMap Encadré 7.7 OpenStreetMap

OpenStreetMap est une base de données géographiques en ligne qui réunit une communauté mondiale de plus de 1,5 million de contributeurs et dont l’objectif est d’élaborer une carte du monde gratuite et ouverte. Le principe est que tout un chacun peut contribuer à l’enrichissement de la base de données et que cette dernière peut être utilisée par n’importe quel outil ou dans le cadre de n’importe quelle analyse. C’est pourquoi elle est également appelée « le Wikipédia des cartes ». Créée au Royaume-Uni en 2004 en réaction aux restrictions d’utilisation et/ou de disponibilité des données géographiques à travers le monde, OpenStreetMap réunit des organisations et des technologies qui cherchent à mieux faire comprendre aux citoyens les risques posés par les aléas naturels et les impacts du changement climatique. (Source : Simpson, 2014. Pour en savoir plus, voir le site http://www.openstreetmap.org/.)

mettre en perspective les tendances mondiales et régionales dans le domaine des risques de catastrophe sont également devenus plus sophistiqués et, comme souligné dans le Chapitre 3 du présent rapport, ils adoptent désormais des approches probabilistes. Les données sur les pertes dues aux catastrophes se sont également considérablement améliorées. Comme mentionné dans le Chapitre 4, plus de 85 bases de données nationales relatives aux pertes et aux dommages dus aux catastrophes existent à ce jour, alors qu’il n’en existait que 12 en 2005. De la même manière, des efforts ont été mis en œuvre pour améliorer l’interopérabilité des données sur les pertes dues aux catastrophes issues des bases de données nationales et mondiales au travers du développement de normes communes8 et d’identifiants uniques tels que GLIDE9. Dans plusieurs pays, la compilation des données sur les pertes dues aux catastrophes a ouvert la voie à une approche plus large de la gestion des risques de catastrophe, notamment l’évaluation probabiliste des risques et le dialogue avec les ministères des finances et de la planification (Encadré 7.8).

7.8

De la rigueur dans la science

On sait encore peu de choses sur la façon dont les informations sur les risques produites depuis l’adoption du CAH permettent réellement d’éclairer les décisions en matière de dévelop-

pement. Même au sein de la communauté de la gestion des risques de catastrophe, les nouvelles informations scientifiques ne sont pas appliquées de façon cohérente. « … En cet empire, l’Art de la Cartographie fut poussé à une telle Perfection que la Carte d’une seule Province occupait toute une Ville et la Carte de l’Empire toute une Province. Avec le temps, ces Cartes Démesurées cessèrent de donner satisfaction et les Collèges de Cartographes levèrent une Carte de l’Empire, qui avait le Format de l’Empire et qui coïncidait avec lui, point par point. Moins passionnées pour l’Étude de la Cartographie, les Générations Suivantes réfléchirent que cette Carte Dilatée était inutile et, non sans impiété, elles l’abandonnèrent à l’Inclémence du Soleil et des Hivers. Dans les Déserts de l’Ouest, subsistent des Ruines très abîmées de la Carte. Des Animaux et des Mendiants les habitent. Dans tout le Pays, il n’y a plus d’autre trace des Disciplines Géographiques11. » En principe, l’information sur les risques devrait offrir une base fondamentale pour accroître la sensibilisation et éclairer les décisions relatives aux politiques, aux pratiques, aux investissements et aux mesures mises en œuvre dans le domaine de la gestion des risques de catastrophe aux niveaux local et mondial, y compris la création d’applications financières de transfert du risque et de plans d’urgence permettant de faire face aux éventuelles catastrophes. 151


Encadré 7.8  La compréhension des risques du point de vue des décideurs politiques

Une récente initiative en faveur du « Renforcement des capacités afin d’accroître l’investissement public pour une intégration de l’adaptation au changement climatique et de la réduction des risques de catastrophe », qui couvrira près de 40 pays d’ici la fin de 2015, aide les pays à comprendre et à gérer les risques de catastrophe d’une façon plus complète que jamais10. Cette initiative dirigée par l’UNISDR et soutenue par la Commission européenne, en partenariat avec plusieurs agences internationales et institutions universitaires, soutient les pays au travers d’une approche intégrale qui couvre la responsabilisation en matière de pertes dues aux catastrophes, l’évaluation probabiliste des risques, l’analyse économique et l’élaboration de politiques publiques. Par exemple, à Maurice, un total de 1 105 cartes de données sur les pertes dues aux catastrophes en 1980-2013 ont été enregistrées, avec des pertes économiques totales estimées à 59 millions de dollars américains. 82 % de ces pertes ont été identifiés comme étant imputables aux seuls cyclones. L’évaluation probabiliste des risques présentée ci-dessous a ainsi permis de calculer la perte annuelle moyenne et la perte maximale probable attribuables aux cyclones tropicaux, respectivement estimées à 87 millions dollars américains (PAM) et 1,7 milliard de dollars américains (PMP) pour des catastrophes d’une période de retour de 100 ans. Alors que ces chiffres ont souligné la nécessité de réduire les risques liés aux cyclones tropicaux, ils n’ont pas offert à eux seuls des orientations politiques. Par conséquent, une évaluation complète des politiques et une analyse économique ont été réalisées et ont révélé que le pays serait confronté à des difficultés pour gérer les pertes dues aux cyclones et aux séismes dont les périodes de retour sont de 62 à 87 ans seulement. Il s’avère ainsi que l’Île Maurice doit investir aussi bien dans la réduction des risques de catastrophe que dans des mécanismes de financement des risques, notamment l’assurance. Des analyses coûts-avantages probabilistes ont ensuite été réalisées afin d’appuyer la prise de décisions concrètes et spécifiques telles que, notamment, la rénovation des logements, tandis qu’un examen approfondi du système financier public a été entrepris. Ces mesures ont permis au gouvernement de déceler d’importantes lacunes, en particulier l’absence d’une politique d’investissement sensible aux risques cohérente dans tous les secteurs pertinents, notamment pour l’infrastructure sensible, ainsi que l’insuffisance des mécanismes de financement d’urgence. À Maurice, l’analyse des pertes dues aux catastrophes et des informations sur les risques du point de vue des décideurs politiques, notamment des planificateurs financiers, a souligné l’importance d’une approche intégrée de la réduction des risques de catastrophe et a abouti à des recommandations concrètes du ministère des finances. (Source : UNISDR. Pour en savoir plus, voir l’annexe 3.)

Globalement, les informations sur les risques devraient être prises en compte dans le cadre des accords internationaux et des politiques portant sur les priorités en matière de développement. Dans le secteur de l’assurance, la quantification des risques de catastrophe est essentielle du fait que la solvabilité de la plupart des compagnies d’assurance dommages est fortement influencée par leur exposition aux risques de catastrophe. Au travers de leurs ministères des finances ou de la planification, les gouvernements devraient utiliser les informations sur les risques pour éclairer les décisions d’investissement public et évaluer leur résilience budgétaire face à des catastrophes majeures (UNISDR, 2011a). Dans le secteur de la construction, la quantification de l’aléa potentiel attendu au cours de la vie d’un bâtiment, d’un 152

Partie II - Chapitre 7

pont ou d’une infrastructure sensible devrait orienter la création et la modification des codes de construction. Dans les secteurs de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme, une analyse du risque d’inondation, par exemple, devrait orienter l’investissement dans la protection contre les inondations, induire des changements de zonage et, éventuellement, conduire à une modification du calcul des primes d’assurance (GFDRR, 2014a). Au sein des collectivités soumises à des aléas, les informations sur les risques devraient étayer les initiatives locales de gestion des risques de catastrophe. Enfin, dans les secteurs privé et financier, ces informations devraient non seulement éclairer les décisions relatives à la planification du maintien des activités, mais elles devraient également influencer la planification


commerciale, l’investissement et la gestion des risques (UNISDR, 2013a). Dans la pratique toutefois, et comme le souligne le court texte de Jorge Luis Borges, la communauté grandissante des spécialistes de l’évaluation des risques semble investir davantage dans l’augmentation de la précision et de la rigueur des modèles de risque et des évaluations que dans l’élaboration d’informations compréhensibles, susceptibles d’être traduites en actions et répondant aux besoins des utilisateurs. Déterminer combien les informations sur les risques produites depuis l’adoption du CAH se diffusent réellement en dehors de cette communauté de pratique pour imprégner les efforts de développement sectoriel et territorial ou même le secteur principal de la gestion des risques de catastrophe reste difficile (CDKN, 2014). En réalité, la croissance exponentielle des informations sur les risques a pour effet de créer un jeu de reflets élaboré au sein d’une pièce remplie de miroirs. À l’intérieur de la communauté de pratique, il semble que l’on dispose de possibilités croissantes de produire des informations sur les risques en plus grande quantité et de meilleure qualité. Cependant, depuis l’extérieur, les informations sur les risques restent perçues comme une denrée exotique. En dehors du secteur de l’assurance, les cas dans lesquels les informations sur les risques ont été entièrement intégrées au processus de prise de décisions restent l’exception et non la règle (Encadré 7.9). Différentes raisons semblent expliquer ce décalage. Les informations sur les risques produites par le secteur de l’assurance et de l’industrie de la modélisation des catastrophes restent, dans une large mesure, détenues en tant que propriété intellectuelle au sein de chaque entreprise et sont rarement accessibles aux gouvernements, aux entreprises ou aux ménages. Les informations reposent sur des modèles exclusifs, et même en mettant les résultats à la disposition de tous, il

ne sera pas nécessairement facile de déterminer comment les données ont été transformées et quelles hypothèses ont été formulées pour générer des estimations du risque. L’importance que revêt la publication d’articles au sein de revues scientifiques pour la communauté académique entrave également l’accès aux informations sur les risques. Pour de nombreux modélisateurs et chercheurs universitaires, la publication devient un objectif en soi plutôt qu’un moyen de présenter des résultats de façon ouverte en vue de leur application et de leur diffusion. Les revues scientifiques étant généralement lues exclusivement par d’autres scientifiques, les informations se diffusent en circuit fermé. Le fait que la majeure partie de la littérature scientifique soit publiée en anglais réduit encore les possibilités d’application dans des pays non anglophones. La nécessité de rendre les ensembles de données fondamentaux générés au travers de processus d’évaluation des risques plus ouverts et plus accessibles en vue de leur réutilisation et de leur adaptation n’a pas été suffisamment soulignée, ce qui se traduit par un gaspillage de ressources attribuable à la production répétée des mêmes ensembles de données (GFDRR, 2014a). Les évaluations des risques et des aléas sont généralement dirigées par des scientifiques et des ingénieurs bien intentionnés plutôt que par les utilisateurs et les décideurs qui doivent pouvoir accéder à des informations pertinentes sous différents formats. Or, trop souvent, la production d’informations sur les risques reste dictée par l’offre et non par la demande, ce qui signifie que même lorsque les décideurs sont conscients de la nécessité de disposer d’informations sur les risques, celles-ci ne sont généralement pas disponibles sous une forme exploitable. Les ministres des finances, par exemple, sont susceptibles d’être intéressés par des indicateurs tels que les pertes annuelles moyennes (PAM) ou 153


Encadré 7.9 Évaluation des risques à l’appui de l’élaboration d’une stratégie intégrale de gestion des risques de catastrophe à Manizales, en Colombie

À Manizales, en Colombie, un ensemble complet d’évaluations probabilistes des risques a été réalisé afin d’élaborer une stratégie intégrale de gestion des risques de catastrophe. Celle-ci implique notamment la rénovation des structures existantes, la mise à niveau d’un programme d’assurance municipal contre les séismes et la réalisation d’une analyse coûts-avantages des mesures de réduction des risques structurels et de l’aménagement du territoire. Une évaluation probabiliste du risque sismique a été utilisée pour étalonner le code de construction parasismique afin de l’adapter à des micro-zones sismiques locales, aussi bien pour les bâtiments que pour les réseaux d’eau et d’assainissement. Le risque d’inondation pour le bassin de Chinchiná a été évalué sur la base de 30 années de données relatives aux précipitations. L’analyse du risque de glissement de terrain fondée sur des informations détaillées relatives à l’occupation des sols, à la topographie et à la géologie a été utilisée pour étayer les applications d’aménagement urbain. Par ailleurs, le risque probabiliste lié aux cendres volcaniques a été analysé pour le volcan Ruiz situé à 30 km au sud-est de Manizales. En fin de compte, le programme d’assurance municipal volontaire de Manizales a été élaboré sur la base de cette évaluation des risques multi-aléa. Dans le cadre de ce programme novateur, les groupes à revenus intermédiaires et élevés souscrivent des polices, tandis que les propriétaires à faibles revenus sont subventionnés par d’autres propriétaires et le gouvernement local, lequel intervient en tant qu’intermédiaire.

1,3 PAM relatives [%]

1,2

5,1

1,1

0 - 0,1 0,1 - 0,26 0,26 - 0,5

1 5,05

0,9 0,8

0,5 - 1 1 - 2,25

0,7

5

0,6 0,5

4,95

0,4 0,3

4,9

0,2 0,1 0,01

-75,6

Distribution des PAM en termes relatifs pour les actifs immobiliers de Manizales

-75,55

-75,5

-75,45

-75,4

-75,35

-75,3

-75,25

Carte des aléas liés à l'épaisseur des cendres volcaniques (m)

(Source : Salgado et al., 2014a et 2014b.)

les pertes maximales probables (PMP) afin d’estimer les conséquences fiscales potentielles des catastrophes ou d’évaluer les coûts et les avantages d’un investissement dans la réduction des risques de catastrophe. Ils ont besoin de chiffres, pas de cartes. À l’inverse, les responsables de la planification chargés d’élaborer les plans locaux d’aménagement du territoire ou de zonage ont besoin de cartes des risques et des aléas, et non de chiffres (GFDRR, 2014a). Les indices ou les évaluations relatifs aux risques mondiaux sont utiles pour comparer les niveaux de risque d’un pays à l’autre, mais ils sont trop généraux pour éclai154

Partie II - Chapitre 7

rer des décisions relatives à l’aménagement aux niveaux national et local. Dans tous les cas, les décideurs sont susceptibles d’ignorer les incertitudes inhérentes à la modélisation. Un modèle de risque peut produire des résultats extrêmement précis. Il peut indiquer, par exemple, qu’une inondation d’une période de retour de 1 sur 100 ans affectera 388 123 personnes. En réalité toutefois, la précision du modèle et des données n’est capable d’offrir qu’une estimation de l’ordre de grandeur. Dans le même temps, du fait de l’attention constamment accordée à la gestion des catas-


trophes plutôt qu’aux risques de catastrophe, la demande d’informations sur les risques de la part des gouvernements peut être faible. De nombreuses évaluations des risques s’inscrivent dans le cadre de projets ponctuels, notamment dans le contexte des opérations de redressement après une catastrophe, et même la maintenance des bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes est exposée à des problèmes de durabilité (Wirtz et al., 2014 ; Gall et al., 2014). Tandis que les organisations internationales ont soutenu la réalisation d’évaluations des risques dans de nombreux contextes impliquant des risques élevés et de faibles revenus (GFDRR, 2014a), les institutions nationales ne se les approprient que rarement et elles ne contribuent que peu à la sensibilisation aux risques au sein du pays, tout simplement en raison de l’absence d’une infrastructure de recherche sous-jacente pour soutenir de tels efforts (Gall et al., 2014b). La capacité à produire et à utiliser des informations sur les risques varie considérablement d’un pays à l’autre. Sans surprise, l’outil HFA Monitor souligne que les pays à revenu élevé disposant de solides communautés scientifiques et techniques ont été en mesure d’accomplir des progrès notables dans la surveillance et la prévision des aléas et dans l’élaboration d’évaluations des risques aux niveaux national et local, tandis que de nombreux pays à faible revenu n’ont simplement pas les capacités nécessaires pour parvenir à de telles évolutions. Dans ce contexte, la couverture des informations sur les risques reste lacunaire d’un point de vue géographique et permet davantage de saisir des opportunités associées à des projets ponctuels que de répondre à de réels besoins. Et même lorsque les institutions nationales disposent de ces informations, les mécanismes visant à garantir leur disponibilité et exploitation au niveau local manquent souvent, notamment en raison de la faiblesse de la plupart des autorités locales en dehors des principales villes (CDKN, 2014).

Des données ouvertes et liées, les médias sociaux et les sources d’informations participatives pourraient potentiellement combler ces lacunes. Mais le fait de considérer les données comme une source de pouvoir et de revenus et comme un bien social continue de générer des tensions. De nombreux obstacles juridiques doivent encore être levés vis-à-vis de la transformation des données exclusives en vue de devenir des informations libres et ouvertes (GFDRR, 2014a). Un autre des problèmes identifiés par l’outil HFA Monitor concerne l’absence de standards approuvés ou d’approches normalisées. Cela signifie que les volumes considérables d’études et d’analyses réalisées au niveau national par des universités, des instituts de recherche et d’autres organismes ne produisent pas de résultats harmonisés. À Padang, en Indonésie, par exemple, ce ne sont pas moins de douze différentes évaluations des risques de tsunami qui ont été réalisées, chacune produisant des résultats différents (Løvholt et al., 2014). Dans de nombreuses autres régions soumises aux tsunamis, en revanche, pas une seule évaluation n’a été réalisée. La langue, la terminologie et la traduction sont autant d’obstacles au partage et à l’utilisation des informations sur les risques. Tandis que les efforts internationaux mis en œuvre dans le cadre de l’UNISDR et du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ont permis d’élaborer une terminologie standardisée, des termes tels que la vulnérabilité, la résilience et l’atténuation sont utilisés de manières très différentes au sein des différentes communautés. Lorsque ces termes sont traduits dans d’autres langues, cette divergence s’accroît encore davantage. Dans la pratique, les services nationaux de météorologie et de géologie sont rarement intégrés et utilisent fréquemment des concepts et des méthodes différents pour évaluer les risques. Il est ainsi particulièrement complexe de réaliser une évaluation des risques multi-aléa. Les risques 155


multiples ou en chaîne liés à des aléas en cascade et technologiques sont de plus en plus courants, ce qui signifie qu’une évaluation des risques portant sur un seul aléa n’est généralement pas pertinente pour les décideurs chargés de la gestion des risques dans son ensemble. De plus, le fait de ne pas prendre en considération le spectre complet des risques est en réalité susceptible de contribuer à les augmenter. Par exemple, des structures lourdes en béton reposant sur un niveau de parking construit sur un sol meuble peuvent offrir une protection contre les vents cycloniques, mais s’avérer mortelles en cas de séisme (GFDRR, 2014a). En raison de ces difficultés, rares sont les exemples (Encadré 7.10) dans lesquels les décideurs ont efficacement intégré les informations sur les risques aux processus quotidiens de planification, de rè-

glementation et de prise de décisions. La connaissance des risques implique que la société s’approprie les informations de façon à faciliter la gestion des risques. De ce point de vue, l’augmentation de la production d’informations sur les risques durant le CAH n’a pas nécessairement conduit à une plus grande connaissance des risques ni à une amélioration de la gestion des risques (Gall et al., 2014b). L’offre croissante d’informations de plus en plus sophistiquées et précises sur les risques demeure une denrée exotique qui reste dans une grande mesure coupée des principales préoccupations sociales, économiques et territoriales. Tout comme les cartographes décrits par Jorge Luis Borges, les responsables de la modélisation des risques des temps modernes sont trop souvent déconnectés des besoins de leurs utilisateurs potentiels.

Encadré 7.10  Traduire les données sur les risques en connaissances exploitables

Au Pérou, toutes les informations sur les aléas issues du modèle de risque sismique national sont intégrées à la base de données du système d’investissement public national (Sistema Nacional de Inversión Pública), ce qui facilite l’échange des résultats avec la communauté scientifique, les autorités publiques et le grand public. Les résultats d’une évaluation probabiliste des risques sismiques réalisée pour 1 540 écoles et 42 hôpitaux à Lima et Callao sont utilisés par le ministère de l’éducation afin de compléter le recensement des infrastructures au niveau du pays et de concevoir le plan national des infrastructures scolaires (GFDRR, 2014a ; AIFDR, 2013). Les activités de modélisation des aléas tels que les séismes, les tsunamis et les éruptions volcaniques mises en place par le dispositif australien-indonésien pour la réduction des risques de catastrophe ont permis au gouvernement de mieux comprendre le profil de risque du pays, lequel a étayé à son tour l’élaboration d’importantes directives politiques au plan national, notamment le Plan directeur présidentiel indonésien de 2012 pour la réduction des risques de catastrophes liées aux tsunamis (GFDRR, 2014a). Dès 1987, la France a adopté une loi qui donne à chaque citoyen le droit d’être informé de son exposition aux risques majeurs (Gouvernement de la France, 2004), des dommages prévisibles, des mesures de prévention susceptibles de réduire la vulnérabilité et des dispositifs de protection et de redressement disponibles auprès du gouvernement en cas d’urgence. Depuis 1990, les autorités locales sont contraintes de fournir ces informations en ligne (Gouvernement de la France, 1990). Depuis 2009, l’ONG internationale ACTED collabore étroitement avec le Gouvernement de l’Ouganda dans le cadre de la gestion du système d’alerte précoce de sécheresse à Karamoja (DEWS). Ce système collecte et analyse des données portant sur des indicateurs clés afin de prévoir la sécheresse dans la province de Karamoja, une région très exposée aux sécheresses cycliques. Des bulletins mensuels alertent les communautés, les districts et les acteurs du développement du risque de sécheresse et suggèrent de prendre les mesures de préparation adéquates (ACTED, 2012). En Colombie, la fourniture d’informations sur les risques est désormais une obligation légale qui impose aux autorités d’informer pleinement tous les citoyens et les résidents des niveaux de risque de catastrophe, des mesures de gestion des catastrophes, des efforts de réhabilitation et de construction, ainsi que de l’ensemble des financements reçus, gérés et engagés (Gouvernement de la Colombie, 2012).

156

Partie II - Chapitre 7


7.9

La production sociale de l’information sur les risques

Le rôle des contraintes socio-économiques auxquelles font face les ménages, les entreprises ou les gouvernements et celui des opportunités qui leur sont offertes doivent être davantage pris en compte pour comprendre les risques et choisir des stratégies de gestion des risques de catastrophe. L’expérience montre qu’il est peu probable qu’une évaluation purement technique des risques, aussi sophistiquée et avancée soit-elle, déclenche la mise en œuvre d’actions capables de réduire les risques. Des évaluations efficaces des risques produisent des informations ciblées, fiables, compréhensibles et exploitables. Par exemple, la campagne « Build Back Better » (Reconstruire en mieux) dirigée par le gouvernement indonésien au lendemain du séisme qui a frappé Padang en 2009 a montré de façon probante que des mesures d’éducation correctement ciblées et la transmission efficace d’informations pertinentes sur les risques sont susceptibles d’accroître la sensibilisation aux aléas et à leurs impacts potentiels (GFDRR, 2014a). En revanche, la principale hypothèse de la campagne — selon laquelle une plus grande sensibilisation inciterait la population de l’ouest de Sumatra à investir dans des bâtiments plus sûrs — s’est avérée inexacte. En réalité, les habitants des zones les plus affectées ont fait preuve d’une plus grande résistance au changement que ceux des zones moins touchées, ce qui reflète leur plus grande exposition à d’autres risques et, par conséquent, des contraintes accrues en termes de changement. L’influence du séisme sur le recours à des pratiques de construction sûres semble se limiter à ceux qui ont vécu une expérience directe traumatisante durant le séisme, en se retrouvant par exemple coincés ou blessés à la suite de la chute de débris.

Indonesia: Anggin’s story

Tandis que le risque peut être objectivé à travers des indicateurs tels que les pertes annuelles moyennes (PAM) ou les pertes maximales probables (PMP), ou par le biais de cartes, ces paramètres ne deviennent utiles que s’ils sont adaptés sur le plan social. Le risque étant construit par la société, il s’agit d’une condition essentielle pour transformer la manière dont sont évaluées les contraintes et les opportunités socio-économiques que doivent surmonter ou saisir les ménages, les entreprises ou les gouvernements. On ne peut déterminer qu’un risque est ou non acceptable ou qu’une stratégie est parfaitement adaptée pour la gestion des risques qu’à la lumière de la relation existant entre les différents acteurs et de telles opportunités et contraintes. Les évaluations locales des risques quotidiens et des risques de catastrophe, par exemple, illustrent la façon dont la prévalence des aléas immatériels et des événements récurrents de faible ampleur s’inscrit dans un environnement au sein duquel les menaces sont multiples et non différenciées (Figures 7.5 et 7.6). Elles indiquent par ailleurs que, selon leur niveau de revenu, les ménages ont une perception très différente du risque. Tant le risque que la production d’informations sur les risques sont une construction de la société. Au-delà des obstacles majeurs à leur utilisation (décrits en détail à la Section 7.8), les informations sur les risques n’engendrent que trop rarement des changements dans la manière dont sont gérés les risques, précisément parce que le risque de catastrophe est présenté comme étant un effet externe que l’on peut mesurer et réduire, et non comme l’une des différentes variables d’un complexe réseau social, économique, politique et culturel de contraintes et d’opportunités (UNISDR, 2011a). Le risque devient alors technique, neutre et objectif, déconnecté de ses facteurs sous-jacents. 157


Figure 7.5 Menaces hautement prioritaires signalées par des collectivités dans dix pays d’Amérique latine12 Fréquence 000 000 000 5 000 000 000 2 000 1 000 Inondations

Criminalité et violence

Tempêtes

Glissements de terrain et avalanches

Sécheresses

Pollution environnementale

Séismes

Incendies

Alcoolisme

Températures extrêmement basses

Accidents de la route

Violence domestique

Autres

(Source : Gibson, 2014.)

Figure 7.6 Perception des pertes en fonction du niveau de revenu déclaré

Beaucoup plus pauvres que la moyenne

Plus pauvres que la moyenne

À peu près dans la moyenne

Mieux lotis que la moyenne

Seul un groupe, à savoir les personnes qui se considèrent comme beaucoup mieux loties que la moyenne nationale, perçoit une diminution des pertes.

Beaucoup mieux lotis que la moyenne

-0,1

0

0,1

En baisse

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

Perception des pertes dues aux catastrophes

0,9

1,0

1,1

1,2 En hausse

(Source : GNDR, 2013.)

En conséquence, les évaluations des risques, notamment dans le secteur privé, ont tendance à mettre l’accent sur les aléas, l’exposition et la vulnérabilité physique, plutôt que sur la vulnérabilité socio-économique et la résilience, sur les risques intensifs extrêmes, plutôt que sur les risques extensifs récurrents, et sur les applications visant à protéger le développement contre des menaces externes, plutôt que sur celles qui permettent de le transformer. Par exemple, ces évaluations sont censées identifier des niveaux de protection 158

Partie II - Chapitre 7

optimum pour l’infrastructure stratégique et sensible essentielle à l’économie d’un pays, de déceler des possibilités de transfert des risques et de protection financière, ou d’éclairer les décisions relatives aux moyens de préparation et d’alerte précoce en cas de catastrophe intensive (GFDRR, 2014a). Comme indiqué dans le Chapitre 4 du présent rapport, il a été accordé une attention bien moindre à l’évaluation des risques extensifs. Mal-


gré l’ampleur des pertes et des impacts associés, ces risques ne sont toujours pas pris en compte et restent dans une large mesure invisibles puisque les catastrophes remettent rarement en cause des intérêts économiques et politiques stratégiques (Encadré 7.11). Dès lors, tandis qu’une meilleure interopérabilité, un accès ouvert aux données, la durabilité et les capacités sont autant de facteurs susceptibles de faciliter l’utilisation et l’interprétation utile des informations sur les risques, il convient d’adopter une approche différente pour la production de ces informations.

Dans tous les cas, les risques impliquent des opportunités tout autant que des coûts pour différents acteurs. Une usine construite dans une région qui, bien qu’elle soit soumise aux aléas, offre une main-d’œuvre à faible coût et un bon accès au marché peut constituer une opportunité pour les propriétaires et les investisseurs. En revanche, les dommages occasionnés par une catastrophe affecteront non seulement l’entreprise, mais ils pèseront également sur les travailleurs qui risquent de perdre temporairement ou définitivement leur emploi, sur l’économie locale, ainsi que sur le gouvernement notamment à travers la baisse de ses recettes fiscales. Les informations sur les

Encadré 7.11  Une odeur de brûlé

Des incendies catastrophiques ont dévasté les villes de Rome en 64, de Londres en 1666, de Chicago en 1871 et de Boston en 1872 ; l’incendie de San Francisco en 1906 a détruit près de 95 % de la ville, tandis que celui qui a ravagé Tokyo en 1923 a tué près de 40 000 personnes. La mise en œuvre de codes de construction modernes, l’aménagement du territoire, la création et le développement des services d’urgence, une plus grande responsabilisation des citoyens et la règlementation des assurances ont largement contribué à reléguer les incendies urbains catastrophiques au rang des souvenirs. Du point de vue du risque intensif, le problème a été résolu (GFDRR, 2014a). Les données nationales sur les pertes dues aux catastrophes offrent cependant une version très différente. Le nombre d’incendies survenant dans des établissements urbains informels et des villages ruraux est en hausse, et les dommages causés aux logements augmentent depuis 1990. À Odisha et Tamil Nadu, en Inde, par exemple, les incendies sont responsables de 13 % de l’ensemble des dommages causés aux logements depuis 1990 et sont en augmentation (Figure 7.7). Figure 7.7  Nombre de logements endommagés et détruits à Tamil Nadu et Odisha (1990-2013) 25 000

20 000

15 000 R² = 0,0162

10 000

5 000

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

2004

2006

2008

2011

(Source : UNISDR, données nationales sur les pertes.)

159


risques doivent clairement identifier le preneur de risque, le bénéficiaire, le payeur et, par conséquent, le propriétaire du risque. Elles doivent également indiquer les avantages et les coûts liés à l’investissement dans la gestion des risques de catastrophe. En d’autres termes, afin de transformer les informations sur les risques en connaissance des risques, les paramètres fondamentaux qui permettent de déterminer les responsabilités doivent être précisés de façon à offrir des dispositifs incitant clairement à gérer les risques et à garantir la conformité réglementaire. La compréhension actuelle des différents groupes qui ont des intérêts directs dans les résultats de la gestion des risques est bien trop vague. Par exemple, les investissements privés et le secteur privé englobent les petites et moyennes entreprises, les exploitants agricoles, les commerçants et les ouvriers du secteur informel, les ménages et les individus, les entreprises nationales et les multinationales, les banques d’investissement et les gestionnaires d’actifs, les assureurs et un vaste éventail de prestataires de services pour chacun de ces groupes.

doit ouvrir ses portes ; alors seulement une réelle culture de la prévention et de la résilience pourra voir le jour.

Notes 1  Toutes les informations sont issues des bases de données nationales sur les pertes dues aux catastrophes. Voir le site www.desinventar.net pour une présentation générale et des liens vers les sites internet et les données nationales. 2 PreventionWeb recense 95 communautés de pratique dans le domaine de la réduction des risques de catastrophe ; voir www. preventionweb.net. 3 Pour de plus amples informations, voir la page http:www.// preventionweb.net/english/themes/education. 4  Pour en savoir plus, voir http://www.memorisks.org/index.htm. 5  Trois forums « Comprendre le risque » ont été organisés à ce jour (2010, 2012 et 2014). Pour en savoir plus, voir https://www.understandrisk.org/node/4889. 6  En 1997, l’Agence fédérale de gestion des situations d’urgence (FEMA) des États-Unis a publié Hazus97, la première version de Hazards US (Hazus), un ensemble logiciel d’estimation des pertes dues aux aléas naturels basé sur un système d’information géographique (SIG). 7  Les données libérées se rapportent aux informations qui étaient à une époque inaccessibles du fait de leur présentation, des politiques publiques, des systèmes, etc., mais qui sont désormais mises à la disposition des utilisateurs, soit en tant qu’ensembles de données identifiables et exploitables soit (dans de nombreux cas) en tant qu’ensembles de données techniquement ouverts. 8 http://www.irdrinternational.org/projects/data.

Pour que les informations sur les risques jouent un tel rôle, elles doivent se trouver au cœur du développement et au sein des contraintes et des opportunités socio-économiques qui structurent la gestion des risques. La pièce remplie de miroirs

160

Partie II - Chapitre 7

9 http://glidenumber.net/glide/public/search/search.jsp. 10 Pour de plus amples informations sur cette initiative, voir l’annexe 3. 11  Suarez Miranda, 1658 ; texte cité dans Borges, J.L., 1998 : p. 325. 12  Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, Colombie, Équateur, Paraguay, Pérou, Uruguay et Venezuela.


Chapitre 8

GĂŠrer les catastrophes

161


8.1

De l’alerte précoce aux systèmes d’alerte précoce

Le développement et la mise en place de systèmes d’alerte précoce sont l’un des domaines où les progrès les plus importants ont été réalisés dans le cadre de la mise en œuvre du CAH. Les améliorations réalisées en matière de suivi et de prévision des risques, la qualité des données satellite ainsi que l’augmentation de la puissance informatique et de la connectivité ont entraîné la transformation du domaine de l’alerte précoce à travers le monde. En dépit de progrès notables, des lacunes persistent toutefois : l’intégration d’informations complètes sur les risques aux systèmes d’information sur lesquels reposent les alertes aux aléas reste faible et les alertes ne fournissent que rarement des informations sur le niveau du risque et les actions possibles en dehors des messages d’évacuation. La première Conférence internationale sur les systèmes d’alerte précoce pour la prévention des catastrophes naturelles s’est tenue à Potsdam (Allemagne) en 1998. Elle a permis de définir les bases conceptuelles et programmatiques pour le développement de systèmes d’alerte précoce. Une étude réalisée pour cette conférence (Maskrey, 1997) a introduit l’idée selon laquelle un système d’alerte précoce devait aller bien audelà d’un simple mécanisme visant à émettre des alertes au sujet d’aléas imminents. Pour qu’une alerte précoce devienne un système, quatre sous-systèmes intégrés sont nécessaires : un sous-système d’alerte permettant de surveiller les aléas et d’émettre des prévisions et des alertes ; un sous-système d’information sur les risques au sein duquel des scénarios de risque peuvent être produits pour les régions et les populations susceptibles d’être touchées ; un sous-système de préparation qui indique les actions à mettre en œuvre afin de réduire les pertes et les dommages 162

Partie II - Chapitre 8

et un sous-système de communication qui permet de transmettre en temps voulu des informations sur les événements imminents et les risques et de communiquer des stratégies de préparation appropriées aux personnes exposées. De ce point de vue, l’efficacité d’un système d’alerte précoce ne doit pas tant être évaluée sur le fait que des alertes sont générées per se que sur la façon dont ces alertes facilitent la prise de décisions appropriées et opportunes par les personnes les plus exposées (Maskrey, 1997). En 2003, lorsque la deuxième Conférence internationale sur les systèmes d’alerte précoce s’est tenue en Allemagne, cette approche systémique de l’alerte précoce était déjà devenue orthodoxe et a influencé la législation nationale, notamment la loi sur le Système national intégré d’informations sur la sécheresse (NIDIS) de 2006 (Loi publique 109-430) aux États-Unis d’Amérique1. Un nouvel élan en faveur du développement de systèmes d’alerte précoce a été initié en 2004 par les tsunamis de l’océan Indien qui ont mis en lumière le nombre de vies qui auraient pu être sauvées si un système régional d’alerte précoce aux tsunamis avait existé. En conséquence, le sujet de l’alerte précoce figurait en bonne place à l’ordre du jour de la deuxième Conférence mondiale sur la prévention des catastrophes organisée en 2005 et il a fait l’objet d’une attention soutenue dans le CAH, qui reprend le nouveau concept des systèmes d’alerte précoce dans les activités principales de la Priorité d’action n° 2 (Encadré 8.1). Les rapports d’auto-évaluation des gouvernements élaborés à l’aide de l’outil HFA Monitor montrent des progrès notables par rapport au troisième indicateur de base de la Priorité d’action n° 2 : des systèmes d’alerte précoce en place pour tous les aléas majeurs, notamment pour prévenir les collectivités (Figure 8.1). Depuis 2007, chaque période de rapport biennale a montré que des progrès croissants étaient réalisés, bien que


Encadré 8.1 Activités principales liées aux systèmes d’alerte précoce au titre de la Priorité d’action n° 2 du CAH

(d) Mettre en place des systèmes d’alerte précoce axés sur les populations, qui, en particulier, permettent d’alerter en temps voulu les personnes menacées en leur adressant des messages qui leur soient compréhensibles, tiennent compte des caractéristiques des publics visés (démographie, sexe, culture et moyens de subsistance), donnent des instructions sur la marche à suivre en cas d’alerte et contribuent au bon déroulement des opérations menées par les responsables des interventions en cas de catastrophe et les autres décideurs. (e) Mettre en place, revoir périodiquement et gérer des systèmes d’information dans le cadre des systèmes d’alerte précoce afin d’assurer la rapidité et la coordination des interventions en cas d’alerte ou de situation d’urgence. (f) Mettre en place les moyens institutionnels nécessaires à la bonne intégration des systèmes d’alerte précoce dans les processus d’élaboration des politiques et de prise de décisions des pouvoirs publics et dans les systèmes de gestion des situations d’urgence au niveau aussi bien national que local, ainsi qu’à leur vérification régulière et à l’évaluation périodique de leur efficacité. (g) Appliquer les textes issus de la deuxième Conférence internationale sur les systèmes d’alerte précoce, tenue à Bonn (Allemagne) en 2003, notamment en renforçant la coordination et la coopération entre tous les secteurs et acteurs concernés le long de la chaîne de l’alerte précoce afin que les systèmes d’alerte soient pleinement efficaces. (h) Appliquer la Stratégie de Maurice pour la poursuite de la mise en œuvre du Programme d’action de la Barbade pour le développement durable des petits États insulaires en développement, notamment en mettant en place des systèmes d’alerte précoce efficaces ou en renforçant les systèmes existants et en prenant d’autres mesures pour faire face aux catastrophes et en atténuer les effets. (CAH, 2005)

Figure 8.1 Progrès dans le domaine de l’alerte précoce Niveau des progrès [1 à 5]

Niveau moyen des progrès au cours du CAH

3,6 3,4 3,3 3,2 3,1 3 2,9

2007-09

2009-11

2011-13

Cycle d'évaluation des progrès du CAH Indicateur de base 2.3 du CAH : un système d’alerte précoce prenant en considération tous les aléas et permettant de prévenir les collectivités. (Source : UNISDR, données de l’outil HFA Monitor2.)

l’indicateur utilisé soit trop générique pour saisir combien ces progrès ont été réellement accomplis dans chacune des activités principales répertoriées ci-dessus. Le développement et la mise en place de systèmes d’alerte précoce ont été cités à de multiples reprises comme l’un des domaines dans

lesquels les plus grands progrès ont été accomplis au sein du CAH (OMM, 2011 ; 2014a ; UNISDR, 2013b ; 2011b). Les succès remportés au Bangladesh, au Chili, en Inde, aux Philippines et dans d’autres pays montrent que des alertes et une communication rapides et efficaces, associées à des informations sur les risques et à une bonne préparation de la population réduisent significativement la mortalité due aux catastrophes. La troisième Conférence internationale sur les systèmes d’alerte précoce organisée en Allemagne en 2006 a profité de l’élan initié par le CAH et, sous le slogan « Du concept à l’action », a documenté plus d’une centaine d’initiatives visant à développer des systèmes d’alerte précoce à différents niveaux (UNISDR et Gouvernement de l’Allemagne, 2006). Early warning: Costa Rica

En particulier, les rapports d’avancement dans le cadre du CAH signalent des réussites dans le développement de systèmes d’alerte précoce qui correspondent plus étroitement aux besoins locaux. Par exemple, l’Australie signale que 163


chaque État et chaque territoire sont désormais en mesure d’adapter les messages principaux aux conditions locales et aux plans d’évacuation. Le système d’alerte précoce axé sur les citoyens qui a été élaboré au Sri Lanka implique des équipes de volontaires qui emploient des méthodes de communication locales. En Thaïlande, des volontaires ont été formés dans les villages pour surveiller les aléas et transmettre des alertes précoces en temps voulu. Des difficultés techniques, institutionnelles et sociales rencontrées dans le développement et le maintien de ces systèmes sont souvent signalées, conjointement avec le caractère isolé des villages et les contraintes liées au terrain qui compliquent le franchissement du dernier kilomètre. De nombreux pays font également état de contraintes financières et de capacités humaines limitées ainsi que d’une dépendance vis-à-vis de l’aide internationale pour financer et maintenir leurs systèmes, notamment lorsqu’il s’agit de mettre à niveau l’équipement permettant de surveiller les aléas et de transmettre les alertes (OMM, 2014a). Un recadrage de l’alerte précoce Depuis la troisième Conférence internationale sur les systèmes d’alerte précoce, les changements rapides dans les domaines de la technologie de l’information et de la communication ont bouleversé de nombreuses hypothèses qui structuraient jusque-là l’élaboration des systèmes d’alerte précoce.

La sophistication croissante des dispositifs de surveillance et de prévision hydrométéorologiques a augmenté considérablement les chances de pouvoir alerter les populations de façon précise de la survenue d’un cyclone tropical, d’une tempête, d’une inondation, d’une sécheresse, d’un tsunami et d’autres aléas. La disponibilité toujours plus grande de données satellite haute résolution, associée à la croissance exponentielle de la puissance informatique et à l’élaboration de modèles prédictifs, ont transformé les capacités d’alerte aux aléas depuis l’adoption du CAH. Ces avancées technologiques ont bénéficié d’une meilleure coopération internationale (Encadré 8.2). Dans le même temps, les informations météorologiques, notamment, sont devenues omniprésentes au travers des médias mondiaux et de l’internet. L’on dépend de moins en moins des canaux officiels pour obtenir des prévisions relatives aux aléas, bien que cette situation génère de nouveaux problèmes quant à la précision des informations communiquées, notamment lorsque des renseignements contradictoires sont disponibles venant de sources apparemment crédibles. Un deuxième changement encore plus marquant est lié à la croissance exponentielle de la connectivité mondiale grâce à l’accès à l’internet et aux médias sociaux, en particulier par l’intermédiaire des téléphones portables. À l’échelle mondiale, les taux de pénétration du téléphone portable atteignent désormais 96 %. L’on compte aujourd’hui près d’un téléphone portable par personne sur la planète, avec des taux d’abonnement de près de

Encadré 8.2  Système mondial de traitement des données et de prévision (SMTDP)

Le Système mondial de traitement des données et de prévision (SMTDP) produit et diffuse des analyses et des prévisions météorologiques et climatiques qui permettent aux Services météorologiques et hydrologiques nationaux (SMHN) de fournir des prévisions météorologiques de haute qualité, des alertes et d’autres services d’information liés à la météo, à la qualité environnementale et au climat, et ce 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Son système à trois niveaux - centres météorologiques mondiaux (CMM), centres météorologiques régionaux spécialisés [CMRS ; y compris les centres climatiques régionaux (CCR)], et centres météorologiques nationaux (CMN) - fournit un appui aux SMHN et à leurs capacités d’alerte précoce. La précision et la précocité accrues des prévisions d’événements climatiques à fort impact ont apporté une contribution majeure en matière d’alerte précoce.

164

Partie II - Chapitre 8


90 %, et ce même dans les pays à faible revenu (UIT, 2013). En Afrique subsaharienne, par exemple, le taux de pénétration des téléphones portables était d’environ 10 % au commencement du CAH. Il atteint désormais près de 80 % (Deloitte, 2012). Ce phénomène augmente considérablement la possibilité de communiquer en temps voulu des alertes directement aux personnes exposées, tout en ouvrant la voie à la transmission d’alertes entre pairs au-delà des frontières nationales (Gow et Waidyanatha, 2011). Dans la mesure où la transmission d’alertes par téléphone portable facilite la mise en œuvre opportune de mesures de préparation par les ménages et les entreprises, elle contribue à réduire les risques et à éviter la perte de vies humaines. Par exemple, des alertes précoces aux tsunamis sont désormais émises par le biais des réseaux mobiles au Mexique (Encadré 8.3) et au Japon. Global Forecasting

Au Sri Lanka, le Centre de gestion des catastrophes a lancé le réseau d’alerte aux catastrophes et aux

situations d’urgence (DEWN ; Purasinghe, 2014). Après une période d’essai prometteuse, le système est devenu opérationnel en janvier 2009. Les messages sont envoyés au personnel d’urgence qui se charge de vérifier l’information et de diffuser des alertes à l’intention du public. Des alertes de masse sont transmises au travers de la diffusion cellulaire, une technologie qui n’est pas affectée par la congestion des réseaux, tandis que des messages sont envoyés à certains groupes par SMS. Les alertes sont envoyées en trois langues locales et peuvent être reçues aussi bien sur un smartphone que sur un téléphone de base, ou par un système d’alarme équipé d’un dispositif lumineux et d’une sirène pour les espaces publics (GSMA, 2013 ; Purasinghe, 2014). Big data for a better world

Les téléphones portables sont de plus en plus utilisés pour transmettre des prévisions météorologiques et climatiques aux agriculteurs, pour fournir des informations relatives aux prix du marché, pour accéder aux marchés et même souscrire

Encadré 8.3 Alerte précoce aux séismes au Mexique

En 1985, le séisme de Michoacán a frappé la ville de Mexico et fait près de 10 000 morts et 30 000 blessés. La catastrophe a accru la sensibilisation aux risques de séisme et suscité un intérêt en faveur de la mise en œuvre de systèmes d’alerte précoce aux séismes. La principale source sismique des séismes qui affectent la ville de Mexico est la faille de Guerrero qui longe la côte pacifique du Mexique. Compte tenu du temps nécessaire pour que les ondes sismiques atteignent la ville de Mexico à partir de la côte, il est possible d’émettre des alertes précoces qui laissent aux individus quelques minutes pour se déplacer vers un lieu plus sûr du bâtiment ou, dans certains cas, l’évacuer. Le Système d’alerte sismique de la ville de Mexico, géré par le CIRES, a été élaboré en 1991 et un système similaire (SASO) a été mis en place à Oaxaca en 2003. Ces deux systèmes font désormais partie du Système d’alerte précoce sismique du Gouvernement fédéral mexicain (SASMEX). À ce jour, soixante-seize stations de surveillance sismique sont réparties le long de la faille de Guerrero, et des alertes sont transmises à plusieurs villes importantes. Le SASMEX émet deux types d’alertes : les alertes « publiques » ou d’urgence pour le risque de mouvements de forte intensité et des messages « préventifs » ou d’avertissement pour les mouvements d’intensité modérée. Depuis sa création, le SASMEX a émis 34 alertes d’urgence et 72 messages d’avertissement. Par exemple, en 1995, un séisme d’une magnitude de 7,3 s’est produit à 300 km de la ville de Mexico. Une alerte d’urgence a été émise 72 secondes avant que les ondes sismiques ne secouent la ville, ce qui a facilité l’évacuation partielle des bâtiments publics, des écoles, des immeubles résidentiels et des systèmes de transport public. Le nombre de personnes qui ont reçu l’alerte et ont eu la possibilité d’agir en conséquence est estimé à 2 millions. (Sources : Cuellar et al., 2010 ; Singh et Perez-Campos, sans date3.)

165


une assurance4. Il s’agit de changements radicaux puisque la communication d’informations d’alerte précoce aux collectivités isolées et rurales soumises aux aléas était encore décrite comme un défi de taille en 20065. Ces sauts technologiques ont transformé le paysage des systèmes d’alerte précoce et vont continuer de le faire. De nouvelles technologies et de plus grands efforts de coopération transfrontalière pour la surveillance des aléas, les prévisions et les alertes précoces continuent à voir le jour (OMM, 2014a). Par ailleurs, les technologies qui se sont avérées efficaces dans un contexte donné ont parfois été mises sur le marché en vue d’une utilisation dans des applications plus larges, par

exemple dans les systèmes d’alerte précoce aux inondations (Encadré 8.4). Le système de surveillance télémétrique du barrage d’Inguri en Géorgie a servi de prototype pour développer un système d’alerte précoce en cas de rupture du barrage (Chelidze, 2013). En Italie, la surveillance des inondations en Ombrie a servi de base au développement d’un système d’alerte précoce intégré pour les inondations et les glissements de terrain (Molinari et al., 2013). Flood prediction

Les plates-formes et initiatives de production participative telles que OpenStreetMap et Usha-

Encadré 8.4 Progrès dans le domaine de l’alerte précoce en Europe et en Afrique

Le système d’alerte précoce de la Belgique, utilisé depuis une décennie, repose sur une technologie avancée de surveillance et de prévision en temps réel qui offre des cartes des zones exposées aux inondations en haute résolution, tandis que des modèles de simulation sont utilisés pour évaluer les impacts. Des alertes sont envoyées par SMS et par courriel, puis publiées sur un portail internet que le public consulte fréquemment en période d’inondations. Les opérateurs du système d’alerte précoce qui fonctionne 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, collaborent étroitement avec l’équipe de gestion des crises de la protection civile, qui assure à son tour le lien avec un mécanisme de réponse couvrant plusieurs secteurs et plusieurs niveaux. En revanche, il manque toujours des cartes dynamiques des zones inondées et, du fait de la conception principalement verticale de ce système, la plupart des autorités locales et des comités de la protection civile restent peu familiarisés aux informations qu’il génère. D’une manière générale, l’état de préparation reste limité. Le système d’alerte précoce de l’Égypte est fondé sur l’analyse historique des tempêtes et des crues éclair, tandis que la connaissance locale des zones exposées est utilisée comme source de données qualitatives. Ce système a permis d’émettre efficacement des alertes aux crues éclair en se basant sur la prévision des précipitations. Les alertes sont communiquées aux autorités de gestion des catastrophes qui sont ainsi en mesure de mettre en œuvre des actions opportunes telles que des barrages routiers ou la libération des eaux de trop-plein des barrages sur la base de protocoles de prise de décisions consensuels. Ce système est toutefois confronté à des difficultés opérationnelles et techniques, du fait notamment de coupures électriques et d’une faible coopération avec les collectivités locales. Le système d’alerte précoce du Mali repose en grande partie sur une bonne compréhension des facteurs sousjacents du risque d’inondation et de l’impact des inondations sur les économies locales et sur la biodiversité. Ces informations sont présentées dans un atlas des risques d’inondation afin d’être utilisées au niveau local. Des cartes et des prévisions des inondations sont élaborées à l’aide d’images satellite des zones inondées et des alertes sont diffusées de façon très anticipée par téléphone, à la radio et sur l’internet6. Même si le système d’alerte précoce est toujours à l’essai, si la résolution et la précision des données doivent être améliorées et si des scénarios relatifs à la sécurité alimentaire et aux épidémies doivent encore être inclus, il s’agit d’une solution qui implique fortement les collectivités locales. Les informations d’alerte précoce qui sont élaborées en fonction des besoins des utilisateurs finaux et présentées dans un format qui leur est adapté intègrent des connaissances locales et soutiennent la pratique traditionnelle de prise de décisions basée sur des calendriers pastoraux et des pratiques au niveau local et mêlent ainsi science moderne et savoir-faire traditionnel en matière de gestion des risques. (Source : Cools et Innocenti, 2014.)

166

Partie II - Chapitre 8


hidi ont favorisé l’implication de milliers de volontaires et d’experts lors des séismes qui ont frappé le Chili et Haïti et lors des inondations survenues au Pakistan en 2010. Ces innovations remettent également en question les hypothèses conventionnelles en matière de systèmes d’alerte précoce (Keim et Noji, 2011). Lorsque le concept a été initialement proposé en 1997, les systèmes d’alerte précoce étaient conçus comme des chaînes verticalement intégrées au sein desquelles la défaillance d’un seul maillon de la chaîne limitait son efficacité et pouvait même conduire à la défaillance de l’intégralité du système (UNISDR, 2011a ; OMM, 2014a). Associées à une connectivité mobile en constante progression et à l’omniprésence des informations relatives à la surveillance et à la prévision des aléas, la production participative a aujourd’hui bousculé ce concept et ouvert la voie à des systèmes intégrés de façon plus horizontale, dont l’évolution est de type organique. Des alertes précoces pour la vulnérabilité et les risques ? Dans le même temps, toutefois, de nombreux obstacles à la mise en œuvre de systèmes d’alerte précoce efficaces persistent (UNISDR, 2009a). Tandis que des avancées majeures ont été réalisées dans le domaine de la surveillance et de la prévision des aléas et dans l’émission des alertes (EEA, 2013), les progrès accomplis en matière d’intégration de stratégies appropriées d’information sur les risques et de gestion des risques aux efforts d’alerte précoce et de préparation sont restés moins nombreux (OMM, 2014a ; Molinari et al., 2013). Il existe encore d’importantes lacunes dans le domaine de la surveillance des aléas, en particulier dans les pays à faible revenu pour lesquels il peut s’avérer difficile de maintenir les infrastructures techniques et institutionnelles nécessaires. De la même manière, les liens et les mesures de coordination entre les services géologiques et hydrométéorologiques et les organisations chargées de la gestion des risques de catastrophe peuvent être

inappropriés. Certains pays à faible revenu n’ont pas les capacités institutionnelles et techniques nécessaires pour développer une approche de l’alerte précoce prenant en considération tous les aléas, tous les secteurs et tous les niveaux (OMM, 2014a ; Molinari et al., 2014). Les alertes ne sont toujours pas standardisées aux niveaux national et international et peuvent donc s’avérer incomplètes ou inefficaces. De plus, la prolifération d’informations d’alerte qui véhiculent différents messages est susceptible d’affaiblir leurs effets et leur autorité. Comme indiqué dans le Chapitre 6, les capacités des autorités locales peuvent s’avérer insuffisantes, les plans de préparation locaux peuvent n’exister que sur le papier et les rôles et les responsabilités peuvent ne pas être clairement définis à tous les niveaux. La transmission d’informations d’alerte au-delà des frontières nationales constitue également un défi politique dans certaines régions. Les conflits civils ou militaires diminuent non seulement l’efficacité des alertes précoces, mais également celle des efforts de réduction des risques de catastrophe en général (OMM, 2014a). En particulier, les progrès ont été inégaux dans deux principaux sous-systèmes d’alerte précoce. D’une part, les informations sur les risques (lorsqu’elles sont disponibles) ne sont pas suffisamment intégrées aux informations d’alerte aux aléas. En dépit d’exceptions telles que le Système d’alerte précoce contre la famine7, le domaine de l’alerte précoce continue à accorder davantage d’importance à la surveillance et à la prévision des aléas et peut ignorer ou sous-estimer le rôle capital de l’exposition et de la vulnérabilité en termes de niveaux de risque (Encadré 8.5). En fin de compte, les alertes précoces relatives à la vulnérabilité sont aussi importantes que celles qui ont trait aux aléas si l’on veut éviter que les pertes dues aux catastrophes ne se traduisent en impacts. Comme l’illustrent les catastrophes récurrentes qui affectent la Corne de l’Afrique, l’alerte précoce n’est pas efficace lorsque le manque chro167


Encadré 8.5  Absence de développement dans la région du Chaco en Bolivie

Les habitants de la région du Chaco dans le sud-est de la Bolivie savent ce que signifie l’absence de développement. Dans les municipalités de Huacareta (Chuquisaca), Caraparí et Entre Ríos (Tarija), par exemple, respectivement 82 %, 51 % et 43 % de la population vit dans une pauvreté extrême et les taux de mortalité infantile fluctuent entre 64 et 72 pour 1 000 naissances vivantes. Pendant la période du phénomène d’oscillation australe El Niño (ENSO) qui a touché la région en 2009 et 2010, la baisse des précipitations a commencé à engendrer des problèmes de disponibilité de nourriture et d’accès à l’alimentation, en compromettant les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire. L’accès à l’eau et aux installations sanitaires de base était limité, ce qui a conduit à une plus grande incidence des problèmes de santé, notamment pour les habitants des zones les plus isolées. À la suite des alertes relatives au déficit de précipitations et aux faibles températures de fin 2009, une évaluation réalisée par des experts externes a mis l’accent sur les variations de précipitations moyennes. En réalité, cette évaluation aurait dû porter principalement sur les facteurs sous-jacents du risque : de mauvaises conditions des sols, une dégradation biophysique et environnementale et des difficultés socio-économiques, autant de facteurs qui ont en fin compte donné lieu au constat officiel d’un « déficit humanitaire » concernant plus d’un tiers de la population rurale du Chaco vers la fin du mois de septembre 2010. Lorsque les catastrophes sont considérées comme des interruptions de la vie normale et du développement, les risques quotidiens et extensifs ne sont pas reconnus comme des indicateurs parce qu’ils appartiennent justement à cette normalité dans des régions telles que le Chaco. Dans le Chaco, loin d’être précoces, les alertes relatives à une crise imminente n’ont ainsi été transmises que trop tard. (Source : adaptée de Reyes et Lavell, 2012.)

nique de moyens de subsistance atteint un point de bascule, en exerçant une pression extrême sur les prix de l’alimentation, sur la survie du bétail et sur la disponibilité de l’eau et de la nourriture. Au moins 13 millions d’individus au sud de l’Éthiopie, au centre et au sud de la Somalie et au nord du Kenya ont été touchés par la sécheresse en 2011-2012. Le conflit armé qui sévit dans la région a entraîné une vulnérabilité écologique et économique chronique, qui a envenimé la crise et limité les possibilités offertes aux individus en termes de survie et de redressement (Slim, 2012). D’autre part, afin d’être efficaces, les alertes précoces ne doivent pas seulement prévoir un aléa, mais elles doivent également inclure une information à valeur ajoutée en ce qui concerne les risques susceptibles de se produire et les actions qui peuvent être mises en œuvre. Même si les alertes peuvent désormais être directement transmises par SMS et permettre de franchir les obstacles à la communication rencontrés sur le « dernier kilomètre », elles n’offrent que rarement des informations sur le niveau de risque. Celles-ci dépendent 168

Partie II - Chapitre 8

d’une connaissance détaillée et approfondie des environnements locaux au sein desquels les conséquences sont attendues et des stratégies locales de gestion des risques de catastrophe. Comme décrit au Chapitre 1, le fait que les plans d’évacuation pour la Nouvelle-Orléans aient supposé que chacun possédait un véhicule a rendu inefficace l’alerte précoce relative à l’ouragan Katrina pour une partie de la population exposée. Pour être efficaces, les systèmes d’alerte précoce doivent tenir compte de la manière dont les ménages et les collectivités exposés aux aléas gèrent les risques et de leur niveau de vulnérabilité et de résilience. Cette compréhension dépend quant à elle du fait que les autorités locales ou les agences locales chargées de la gestion des catastrophes disposent des compétences et de la volonté nécessaires pour s’impliquer auprès des ménages et des collectivités à faibles revenus. L’absence de progrès dans ces deux domaines signifie que des alertes précoces opportunes et précises qui parviennent aux populations exposées peuvent échouer à déclencher la mise en


œuvre d’actions efficaces, notamment dans le contexte d’aléas qui évoluent lentement et dans des régions où la pauvreté est marquée par un risque quotidien et extensif. Les informations d’alerte précoce n’offrent des possibilités que si les ménages et les collectivités concernés ont la capacité d’agir en conséquence.

8.2

Préparation à l’intervention

La Priorité d’action n° 5 du CAH semble être le domaine dans lequel les plus grands progrès ont été accomplis. De nombreuses réalisations du CAH sont liées à des améliorations du niveau de préparation, généralement combinées à une alerte précoce plus efficace. De réelles améliorations ont été constatées en termes de préparation aux catastrophes, tandis que des investissements considérables ont été réalisés pour mettre en œuvre les capacités nécessaires. Bien qu’il soit possible de parvenir à un niveau de préparation efficace à l’aide des outils de gouvernance fruits de la gestion des situations d’urgence, des contraintes locales en termes de capacités et de ressources continuent à freiner les progrès dans plusieurs pays. La préparation face à des risques extensifs qui évoluent lentement reste en particulier un défi. La première priorité du secteur de la gestion des risques de catastrophe L’état de préparation a été défini comme : « la connaissance et les capacités développées par les gouvernements, les professionnels des organisations de l’intervention d’urgence, les communautés et les individus, de manière à anticiper efficacement et à réagir face aux impacts de phénomènes dangereux ou de conditions dangereuses probables, imminents ou en cours » (UNISDR, 2009b). Les activités de préparation sont une composante essentielle de la gestion corrective des risques de catastrophe en ce sens que certains risques,

notamment ceux associés à la mortalité et à la morbidité, peuvent être réduits au travers de mesures d’anticipation et d’intervention. En d’autres termes, si une population préparée est en mesure d’évacuer une zone avant la survenue d’une inondation majeure, des vies seront épargnées et le risque de mortalité et de morbidité sera par conséquent réduit. Dans le même temps, la préparation s’inscrit dans une démarche de gestion compensatoire des risques et aide à renforcer la résilience. Une aide d’urgence bien organisée, qui repose sur des plans d’urgence, est susceptible d’aider les ménages et les entreprises à limiter les pertes dues aux catastrophes, à se relever plus rapidement et à éviter que les pertes ne se traduisent en impacts plus vastes, telles qu’une augmentation de la pauvreté ou une détérioration de la santé, de l’alimentation ou de l’éducation. Dès les années 1980, il a été reconnu que l’état de préparation était un principe fondamental pour la gestion efficace de l’urgence. Au niveau international, la résolution 46/182 de 1991 de l’Assemblée générale des Nations Unies a reflété la nécessité de se préparer à intervenir et s’est traduite par la création de dispositifs tels que le Coordinateur des secours d’urgence (CSU) de l’ONU, le Comité permanent interorganisations (CPI) et la Procédure d’appel global (CAP) en tant que mécanismes de coordination visant à soutenir le CSU. Durant cette période on a également vu la naissance du Programme de formation à la gestion des catastrophes (UNDMTP)8 en 1990, le Groupe consultatif international de recherche et de sauvetage (INSARAG) en 1991, et le Système des Nations Unies pour l’évaluation et la coordination en cas de catastrophe (UNDAC) en 1993 (CPI-PAM, 2014). De même, la question de la préparation se trouve au cœur de tous les cadres internationaux de réduction des risques de catastrophe depuis la déclaration de la DIPCN et elle a été intégrée à la Priorité d’action n° 5 du CAH (Encadré 8.6). 169


Encadré 8.6  Activités principales liées à l’état de préparation aux catastrophes dans le CAH

(a) Renforcer au plan de la politique générale et aux plans technique et institutionnel les capacités de gestion des situations de catastrophe aux niveaux régional, national et local, notamment celles liées aux technologies, à la formation et aux ressources humaines et matérielles. (b) Favoriser et appuyer le dialogue, l’échange d’informations et la coordination entre les organismes et les institutions responsables des systèmes d’alerte rapide, de la réduction des risques de catastrophe, des interventions en cas de catastrophe et du développement notamment, à tous les niveaux, afin de promouvoir une approche globale de la réduction des risques de catastrophe. (c) Renforcer les démarches régionales coordonnées ou, au besoin, concevoir des démarches de ce type, et élaborer des politiques, mécanismes opérationnels, plans et systèmes de communication régionaux, ou améliorer ceux qui existent déjà, afin de se préparer et garantir une intervention efficace et rapide dans les situations où les moyens nationaux sont insuffisants. (d) Élaborer des plans et politiques de préparation aux situations de catastrophe et d’intervention d’urgence à tous les niveaux ou, lorsque de tels dispositifs existent déjà, les revoir et les mettre à jour périodiquement, en s’intéressant tout particulièrement aux zones et aux groupes les plus vulnérables. Promouvoir dans le cadre de la préparation aux situations de catastrophe l’organisation périodique d’exercices, notamment d’évacuation, afin d’assurer la rapidité et l’efficacité des interventions ainsi que de la distribution des vivres et autres secours essentiels selon les besoins au niveau local. (e) Promouvoir la création de fonds d’urgence, là où cela est nécessaire et selon les besoins, afin de financer les interventions en cas de catastrophe ainsi que les mesures de redressement et de préparation. (f) Instituer des mécanismes spécifiques pour obtenir des parties prenantes concernées, y compris des collectivités, qu’elles participent activement à la réduction des risques de catastrophe et qu’elles prennent les choses en main, notamment sur la base du volontariat. (CAH, 2005)

La Priorité d’action n° 5 du CAH a été le domaine dans lequel les progrès les plus importants semblent avoir été accomplis (Figure 8.2). Les rapports d’avancement dans le cadre du CAH soulignent que l’état de préparation à l’intervention a constitué la première priorité du secteur de la gestion des risques de catastrophe dans de nombreux pays. De nombreux succès obtenus durant la mise en œuvre du CAH sont associés à des améliorations de l’état de préparation, généralement combinées à une alerte précoce plus efficace. Des réductions considérables de la mortalité liée aux catastrophes ont notamment été constatées dans des pays tels que le Bangladesh, le Mozambique, l’Inde et Cuba, tel que l’indique le Chapitre 2. Cependant, dans la plupart des pays, de réelles améliorations ont été constatées en termes de préparation aux catastrophes et des investissements considérables ont été réalisés afin de mettre en œuvre les capacités nécessaires. 170

Partie II - Chapitre 8

Comme indiqué dans le Chapitre 6, la gestion des risques de catastrophe a généralement été comprise et mise en œuvre comme une gestion des catastrophes, notamment au sein des organisations internationales. Par exemple, les programmes de gestion des risques de catastrophe de l’UNICEF accordent une attention soutenue à la sécurité à l’école, aux exercices d’intervention en cas d’urgence, à la compréhension de l’état de préparation et aux compétences vitales9. Les organisations régionales ont également joué un rôle majeur dans le soutien apporté au programme de préparation de leurs pays membres et dans l’élaboration des dispositifs d’aide régionaux. Par exemple, l’Accord de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) sur la gestion des catastrophes et les interventions d’urgence aide les États membres à renforcer leurs capacités d’intervention sousrégionales en cas d’urgence, notamment au travers de l’élaboration d’accords de veille régionale


Figure 8.2 Progrès signalés par rapport aux indicateurs de base de la Priorité d’action n° 5 du CAH

Niveau des progrès [1 à 5]

Niveau moyen des progrès au cours du CAH

Niveau des progrès [1 à 5]

3,6

3,6

3,5

3,5

3,4

3,4

3,3

3,3

3,2

3,2

3,1

3,1

3

3

2,9

2007-09

2009-11

2011-13

2,9

Cycle d'évaluation des progrès du CAH

2007-09

Indicateur de base 5.1 du CAH : Des mécanismes et des moyens politiques, techniques et institutionnels solides sont en place pour la gestion des risques de catastrophe, dans une optique de réduction des risques.

Niveau des progrès [1 à 5]

3,6

3,6

3,5

3,5

3,4

3,4

3,3

3,3

3,2

3,2

3,1

3,1

3

3

2007-09

2009-11

2011-13

Cycle d'évaluation des progrès du CAH Indicateur de base 5.3 du CAH : Des réserves financières et des mécanismes d'urgence sont en place pour appuyer une ss .

2011-13

Indicateur de base 5.2 du CAH : Des programmes de préparation aux catastrophes et des plans d'intervention d'urgence sont en place à tous les niveaux administratifs ; des exercices de formation et de simulation sont organisés périodiquement.

Niveau des progrès [1 à 5]

2,9

2009-11

Cycle d'évaluation des progrès du CAH

2,9

2007-09

2009-11

2011-13

Cycle d'évaluation des progrès du CAH Indicateur de base 5.4 : Des procédures sont en place pour échanger des informations pertinentes pendant et après les catastrophes.

(Source : UNISDR, données de l’outil HFA Monitor.)

et de la coordination des interventions conjointes de secours et d’urgence en cas de catastrophe (CPI-PAM, 2014). L’état de préparation aux catastrophes a été renforcé par le biais d’exercices d’intervention en cas d’urgence, qui sont désormais exécutés régulièrement au sein des écoles et dans d’autres contextes (UNISDR, 2013b). Par exemple, la municipalité de Quito en Équateur réalise des exercices d’intervention et des simulations au niveau institutionnel et au sein des collectivités et des écoles.

À Bhubaneswar, en Inde, des exercices d’intervention sont organisés aux niveaux de la ville, des quartiers et des collectivités, ainsi que dans les écoles et les collèges (SCI, 2014). Les programmes de gestion des risques de catastrophe au niveau des collectivités (CBDRM) ont également joué un rôle majeur dans le renforcement de l’état de préparation. La plupart de ces programmes englobent généralement une forte composante dédiée aux efforts locaux de sensibilisation aux risques (Shaw, 2013). Du fait 171


des importantes contraintes socio-économiques auxquelles sont fréquemment confrontées les collectivités locales (Maskrey, 1989 et 2011), ces programmes peuvent ne contribuer qu’à la marge à la prise en charge des facteurs de risques sousjacents (SCI, 2014). Toutefois, alors que de nombreux programmes sont de courte durée, plusieurs exemples illustrent l’efficacité de certains programmes de CBDRM en termes d’amélioration de l’état de préparation et de l’alerte précoce (Encadré 8.7). L’urgence à se préparer Plusieurs facteurs peuvent expliquer les progrès réalisés dans le domaine de la préparation aux catastrophes. Contrairement à d’autres investissements réalisés dans la réduction des risques de catastrophe, une réponse efficace est politiquement visible et représente par conséquent un solide impératif politique. Comme l’a indiqué le Bilan mondial 2011, les États soumis aux aléas dont le poids électoral est important ont deux fois plus de chances que leurs catastrophes soient officiellement déclarées que les États d’une importance moindre ; pour chaque déclaration de catastrophe, un Président américain peut s’attendre à

une hausse d’un point des voix qu’il obtiendra au scrutin dans l’État en question (Reeves, 2010). À l’inverse, la réponse désastreuse apportée lors de l’ouragan Katrina a eu des conséquences politiques négatives pour les administrations municipales, étatiques et fédérales. Dans le même temps, l’état de préparation représente une évolution relativement naturelle des interventions d’urgence. Avec l’attention portée aux plans de secours et aux exercices d’évacuation, à la logistique et aux stocks, aux équipes de recherche et de secours en place et formées, aux casques de sécurité et aux uniformes, il s’agit d’une extension des interventions d’urgence dans la phase pré-catastrophe du cycle de gestion des catastrophes. L’état de préparation peut être à la fois géré et mis en œuvre au travers des outils de gouvernance fruits de la gestion des situations d’urgence. Contrairement à la gestion corrective des risques de catastrophe, l’état de préparation ne requiert pas d’investissements majeurs. Les ressources nécessaires pour élaborer des plans de secours, former le personnel et les élèves et organiser des

Encadré 8.7  Alerte précoce et état de préparation au niveau des collectivités

Chaque année, le Viet Nam est confronté à des tempêtes, des inondations et d’autres aléas occasionnant des pertes économiques annuelles de l’ordre de 1 % à 1,5 % de son PIB (GFDRR, 2013b ; Nguyen, 2011). En 2009, le gouvernement a présenté un projet sur 12 ans visant à renforcer la gestion des risques de catastrophe au niveau des collectivités (GFDRR, 2013b ; Nguyen, 2011 ; AMDI, 2013). Les agences internationales ont ainsi collaboré avec le gouvernement vietnamien pour permettre aux collectivités de se préparer aux catastrophes et de réduire les risques plus efficacement. La formation organisée au niveau des collectivités et l’intégration de la prévention des catastrophes au programme scolaire ont permis aux populations vulnérables d’élaborer des stratégies de préparation, tandis que la résilience d’infrastructures telles que les routes rurales et les systèmes d’irrigation a été renforcée (ADPC, 2008 ; AMDI, 2013). Un nouveau projet de CBDRM est en cours au Myanmar, où la population est exposée aux cyclones, aux séismes, aux tsunamis et aux tempêtes. Le Gouvernement du Myanmar a élaboré un Plan d’action pour la réduction des risques de catastrophe, mis en œuvre de 2013 à 2015 en partenariat avec différents organismes des Nations Unies (PNUD, 2013b). Ce programme a pour principal objectif de former 60 000 ménages dans le domaine de la CBDRM d’ici à 2015. Il consistera notamment à accroître la sensibilisation aux aléas naturels au sein des collectivités, à former les habitants aux premiers secours, aux mesures d’alerte précoce et aux interventions de recherche et de secours, et à améliorer les méthodes et les normes de construction dans les zones rurales vulnérables (Gouvernement du Myanmar, 2012 ; PNUD, 2013b).

172

Partie II - Chapitre 8


exercices d’évacuation dans des écoles exposées aux séismes, par exemple, sont infiniment moins conséquentes que celles qui doivent être investies dans la rénovation de la structure d’une école afin de la rendre plus sûre. De la même manière, l’état de préparation ne requiert pas le même investissement en capital politique que la gestion prospective des risques de catastrophe, qui impliquerait de s’assurer de la disponibilité de terrains sûrs, dans des lieux appropriés, pour construire des écoles. Dans le même temps, et comme indiqué précédemment, l’état de préparation a non seulement été intégré au CAH et aux cadres qui l’ont précédé dans le domaine de la réduction des risques de catastrophe, mais il a également été soutenu par un autre ensemble de mécanismes internationaux élaborés à travers la résolution 46/182 de l’Assemblée générale des Nations Unies. D’une manière générale, ces mécanismes ont bénéficié de financements plus stables et plus conséquents et d’un soutien plus marqué de la part des gouvernements donateurs que les dimensions plus prospectives du CAH. Fait important, la priorité accordée à l’état de préparation aux catastrophes repose sur des succès réguliers qui font l’objet d’une large promotion, par exemple la réduction considérable de la mortalité occasionnée par le cyclone Phailin qui a frappé l’État d’Odisha en Inde en 2013, par rapport à celle attribuable au super-cyclone de 1999. Tandis que la plupart de ces succès devraient être attribués à une amélioration des indicateurs du développement, c’est l’état de préparation aux catastrophes qui a su tirer profit des retombées politiques. Tout n’est pas rose Dans le même temps, se préparer aux catastrophes n’est pas chose facile. Les rapports d’avancement dans le cadre du CAH soulignent que certains pays à faible revenu restent confrontés à des difficultés pour créer et maintenir les

capacités nécessaires. Par exemple, entre autres obstacles majeurs à l’amélioration des mesures de préparation, l’Indonésie mentionne l’absence de ressources, y compris les ressources humaines, l’expertise, les budgets, l’équipement et les installations, au niveau local, ainsi que la dépendance persistante vis-à-vis du niveau national pour la planification des efforts de préparation (UNISDR, 2014a). En effet, le risque de mortalité reste élevé dans certains pays, comme cela a été tragiquement illustré au Myanmar en 2008. L’insuffisance de capacités est souvent beaucoup plus marquée dans les pays confrontés à un conflit armé ou civil. De plus, comme l’a montré l’exemple de l’ouragan Katrina, les capacités sont susceptibles de ne pas être aussi solides qu’on ne le croit, même dans les pays les plus riches du monde. Les bases d’un programme efficace de préparation et d’intervention en cas de catastrophe s’établissent au niveau local. Des régions bien préparées peuvent généralement réduire considérablement leurs pertes en cas de catastrophe, même si les structures nationales de gestion des situations d’urgence s’effondrent ou ne sont pas en mesure de répondre efficacement. À l’inverse, même les programmes nationaux de gestion des catastrophes les mieux conçus peuvent s’avérer inefficaces si les capacités de préparation sont faibles ou inexistantes au niveau local. Comme indiqué dans le Chapitre 6, les capacités locales sont souvent inégales, puisqu’elles sont plus solides dans des centres urbains disposant d’autorités municipales puissantes et plus faibles dans les zones isolées et rurales. Plus fondamentalement, une littérature importante (Quarantelli, 1986 ; Yodmani, 2001 ; Pandey et Okazaki, 2005) a démontré comment les plans de secours et les dispositifs d’intervention intégrés verticalement semblent généralement s’inscrire davantage dans une culture du commandement et du contrôle en matière de gestion des 173


situations d’urgence et suivre des idées reçues en ce qui concerne les interventions, au lieu de s’adapter aux besoins exprimés et aux exigences du terrain. Les plans de préparation et d’intervention peuvent refléter des préjugés et des stéréotypes bien ancrés concernant la population affectée (Tierney, 2008) ou ne pas prendre en compte les spécificités et la complexité des scénarios de risques locaux ou des stratégies locales de gestion des risques (CPI-PAM, 2014). Par conséquent, les interventions en cas de catastrophe peuvent engendrer des effets imprévus ou négatifs au niveau local. La plupart du temps, les catastrophes deviennent elles-mêmes des simulacres, des événements configurés et amplifiés par les médias et par les stéréotypes et les idées reçues, plutôt que par la réalité de la situation sur le terrain. Par exemple, dans le cas de l’ouragan Mitch qui a frappé le Honduras en 1998, tandis que les médias internationaux ont dépeint un pays intégralement ravagé, la plupart des dommages se concentraient en réalité sur quelques villes (UNISDR, 2011a). Dans le cas des glissements de terrain qui ont affecté l’État de Vargas au Venezuela en 1999, il a été établi que les 30 000 décès annoncés n’ont en réalité pas dépassé

le nombre de 700 (UNISDR, 2009a). Les interventions en cas de catastrophe (Encadré 8.8) échouent généralement à prendre en compte les besoins locaux et à y répondre, précisément parce qu’elles réagissent à un simulacre de catastrophe et non à aux conditions locales réelles (Maskrey, 1996). Des plans de préparation sont souvent mis en place en vue de prendre en charge des risques intensifs peu fréquents, tout en ignorant les risques extensifs locaux récurrents. Le fait que le volume des interventions et du support fournis aux localités affectées par une catastrophe soit généralement proportionnel au nombre de décès et non à celui des survivants est l’un des reflets de ce décalage. Les plans de préparation soutenus par des ONG au travers de mécanismes tels que les EVC (évaluation de la vulnérabilité et des capacités) se fondent généralement davantage sur les stratégies et les besoins locaux. Ils sont toutefois souvent élaborés dans le cadre de projets ou de programmes à court terme qui ont du mal à s’inscrire dans la durée. Tel qu’il est actuellement défini, l’état de préparation semble par ailleurs mis en question par des risques multi-aléa et concaténés de plus en plus complexes qui caractérisent désormais les vastes

Encadré 8.8  Catastrophes et simulacres: l’expérience du tsunami dans l’océan Indien

Le fait que les plans nationaux ne correspondent que rarement aux réalités locales n’a rien de nouveau. En revanche, dans le domaine des interventions en cas de catastrophe, tout comme dans celui de la gestion des risques de catastrophe dans une perspective plus large, la diversité locale des conditions et des besoins est régulièrement oubliée puisque les visions nationales sont susceptibles d’être biaisées en faveur de la concrétisation d’objectifs humanitaires, y compris la distribution de biens tels que des bateaux (TEC, 2007). À la suite du tsunami de 2004 dans l’océan Indien, certains aspects hautement politisés ou conflictuels du point de vue social tels que les droits fonciers, le droit fiscal et les relations entre les genres ont été insuffisamment pris en compte par les agences chargées des interventions de secours. Elles ne disposaient en général d’aucun dispositif efficace pour garantir une appropriation des interventions au niveau local et ont souvent considéré les pays affectés comme des « états en déliquescence » et sapé ainsi les capacités locales et nationales en offrant des programmes de soutien non sollicités et fréquemment mal conçus (TEC, 2006). À l’inverse, l’action internationale s’est avérée plus efficace dans les cas où ce sont les acteurs locaux qui ont dirigé les efforts d’intervention tout en bénéficiant d’un support approprié (TEC, 2007). Malheureusement, l’allocation des fonds et du personnel a été trop souvent « dictée par les politiques et les ressources financières, et non par l’évaluation et les besoins » (Ibid.). Ces politiques n’étaient pas uniquement internationales. Les interventions internationales mises en œuvre à la suite du tsunami ont été également fortement affectées par des dirigeants régionaux et nationaux indécis et protectionnistes (TEC, 2006).

174

Partie II - Chapitre 8


zones urbaines et les régions (CPI-PAM, 2014). En réalité, le risque est aujourd’hui multidimensionnel dans de nombreux contextes et il ne peut être couvert par des plans de secours élaborés en réponse à un aléa unique.

typhon Haiyan a été le plus fort cyclone tropical ayant jamais touché le sol aux Philippines, puisqu’il l’a frappé à cinq reprises dans les îles de Samar, Leyte, Cebu et Iloilo (Figure 8.3)10. Typhoon Haiyan

2004 Indian Ocean tsunami

Enfin, comme souligné dans le Chapitre 6, hormis quelques exceptions notables telles que le Fonds national du Mexique pour la prévention des catastrophes et les lignes budgétaires dédiées dans des pays tels que les Philippines ou l’Indonésie, la plupart des agences chargées de la gestion des catastrophes dépendent dans une grande mesure des financements d’urgence. De ce fait, ils ne disposent généralement pas des ressources nécessaires pour la mise en œuvre des activités de préparation.

8.3

Maintenir les mauvaises habitudes ou reconstruire en mieux ?

Même si les opérations de redressement et de reconstruction après une catastrophe font partie intégrante du cycle de gestion des catastrophes et de la réduction des risques de catastrophe, le CAH ne fournit pas de directives détaillées dans ce domaine. Par rapport à d’autres aspects du CAH, les progrès restent globalement limités. Des améliorations peuvent être observées en matière d’intégration de la réduction des risques de catastrophe aux évaluations des besoins et aux cadres de redressement après une catastrophe. Toutefois, dans de nombreuses situations, la volonté de reconstruire en mieux cède rapidement la place aux mauvaises habitudes. Le redressement après une catastrophe : un défi constant La plupart des habitants de Guiuan étaient en plein sommeil lorsqu’une violente tempête a frappé la petite ville de la province de Samar oriental, aux Philippines, à 4 h 40 le 8 novembre 2013. Le

Figure 8.3 Le typhon Haiyan touchant le sol et les destructions occasionnées

(Source : NOAH, 2014.)

(Source : Russel Watkins/ Department for International Development)

Classé comme super-typhon de catégorie 5, il a frappé la région des Visayas orientales et la ville de Tacloban avant d’atteindre la mer de Chine méridionale et d’affecter la Chine, Taïwan et le Viet Nam. À ce jour, le nombre de victimes est porté à 7 98611, plus de 1 000 personnes sont toujours portées disparues (NDRRMC, 2014) et 4,1 millions d’autres ont été déplacées (FISCR, 2014). Les pertes économiques totales ont été évaluées à 10 milliards de dollars américains, soit plus de dix fois les pertes associées au typhon Bopha de 2012, connu localement aux Philippines sous le nom de Pablo (EM-DAT, 2014 ; UNISDR, 2014b). 175


Sur les 4,1 millions de personnes déplacées, à peine plus de 100 000 ont été en mesure d’accéder à des refuges (DSWD et al., 2014). Les 4 autres millions de personnes ont été hébergés au sein de familles d’accueil ou dans d’autres hébergements privés temporaires (Ibid.). Toutefois, six mois après la catastrophe, plus de 2 millions de personnes vivaient toujours dans des hébergements temporaires (Ibid.). Outre les problèmes de logement, l’accès à l’éducation, les services de santé, le transport, les marchés et les revenus ainsi que certains régimes fonciers ambigus ont empêché le retour des personnes déplacées (Ibid.). Il est depuis longtemps reconnu que de nouvelles vulnérabilités peuvent être engendrées dans l’intervalle entre le déplacement initial et le redressement puis la reconstruction d’une région à plus long terme (Berke et al., 1993 ; Ingram et al., 2006 ; Brookings, 2008 ; CPI, 2009). Dans le cas du typhon Haiyan, sur les 776 millions de dollars américains demandés pour le redressement, seuls 61 % des fonds avaient été reçus en août 2014 (UNOCHA, 2014b). Tandis que le redressement bénéficie d’une attention plus soutenue et d’un financement plus conséquent que d’autres stratégies de gestion des risques de catastrophe (Kellett et Caravani, 2013 ; UNISDR, 2011a), les ressources affectées à ce domaine restent insuffisantes et cet écart est susceptible de se creuser davantage au fur et à mesure qu’augmente le coût humain et économique des catastrophes (IDMC, 2014 ; Swiss Re, 2014a). Bien que le redressement et la reconstruction aient toujours été décrits comme faisant partie intégrante du cycle de gestion des catastrophes et de la réduction des risques de catastrophe, le CAH n’accorde pas à ces domaines une attention particulière. Dans le cadre de la Priorité d’action n° 4 du CAH, seule l’une des activités principales se rapporte spécifiquement au redressement, à savoir : 176

Partie II - Chapitre 8

(h) Intégrer, dans les programmes de redressement et de remise en état faisant suite à une catastrophe, des mesures de réduction des risques et exploiter les possibilités qui s’offrent durant la phase de redressement pour développer les capacités qui permettront de réduire les risques de catastrophe à long terme, notamment par la mise en commun des compétences, des connaissances et des enseignements tirés de l’expérience. (CAH, 2005) Par rapport à d’autres domaines d’activité, les progrès mondiaux dans ce domaine ont été limités (Figure 8.4). Figure 8.4 Progrès réalisés dans l’intégration de la RRC au processus de redressement et de remise en état

Niveau des progrès [1 à 5]

Niveau moyen des progrès au cours du CAH

3,4 3,3 3,2 3,1 3 2,9 2,8 2,7

2007-09

2009-11

2011-13

Cycle d'évaluation des progrès du CAH Indicateur de base 4.5 du CAH : les mesures de RRC intégrées au processus de redressement et de remise en état après une catastrophe. (Source : UNISDR, données de l’outil HFA Monitor.)

Tout comme le domaine de la préparation, alors que le redressement a été inclus dans le CAH, son développement a été autant influencé si ce n’est plus par d’autres cadres politiques. Par exemple, l’International Recovery Platform (IRP) a été annoncé lors de la deuxième Conférence mondiale sur la prévention des catastrophes organisée à Kobe au Japon comme mécanisme visant à identifier des lacunes et des contraintes rencontrées lors du redressement après une catastrophe et à encourager le développement d’outils, de ressources et de capacités pour un redresse-


ment résilient. L’IRP vise à offrir une source internationale de connaissances relatives aux bonnes pratiques en matière de redressement12. Peu de temps après, le Comité permanent interorganisations (CPI) a créé un Groupe de travail thématique sur le redressement précoce (CWGER) dans le cadre d’une nouvelle approche visant à améliorer la coordination au sein du système des Nations Unies et entre les Nations Unies et d’autres acteurs après des catastrophes majeures. Dans le même temps, le soutien accordé aux efforts nationaux de planification et d’élaboration de programmes dans le domaine du redressement a constitué une composante importante du Dispositif mondial de réduction des effets des catastrophes et de redressement (GFDRR), de l’ancien Bureau de la prévention des crises et du redressement du PNUD (BCPR) et de divisions similaires au sein d’autres organisations régionales et internationales. Dans le même temps, le PNUD, la Banque mondiale et l’Union européenne ont uni leurs forces afin d’élaborer une approche commune pour l’évaluation des besoins en matière de redressement : le Cadre d’évaluation des besoins et de redressement après une catastrophe (PDNA/RF). À la recherche d’espace Lorsqu’une catastrophe se produit, une quantité phénoménale de risques accumulés est libérée. D’une part, cette puissante énergie est destructrice. Mais, d’autre part, elle génère un espace au sein duquel peuvent émerger de nouvelles opportunités. La manière dont cet espace peut être utilisé constitue le défi fondamental du redressement après une catastrophe. L’expérience acquise dans le domaine du redressement et de la reconstruction souligne combien il est difficile d’exploiter les opportunités qui se présentent dans l’intervalle suivant une catastrophe et de veiller à ce que les nouveaux développements préviennent et évitent les risques de catastrophe plutôt qu’ils ne les reconstruisent. Un premier ensemble de problèmes fait précisément référence à la longueur de cet intervalle entre

la destruction occasionnée par la catastrophe et les nouveaux développements. Ce phénomène est parfois décrit en tant qu’intervalle entre le secours et le redressement ou en tant que passage de la phase de secours à celle du développement (Buchanan-Smith et Maxwell, 1994; Longhurst, 1994). Fondamentalement, plus cet intervalle est long, plus il est probable que les pertes affectant des actifs tels que les logements, les biens et le bétail, ainsi que les décès ou les blessures pour les ménages ; l’équipement, les stocks et les installations pour les entreprises ; ou les infrastructures et les installations pour les autorités locales se traduisent par des conséquences à plus long terme. Certains éléments du Bilan mondial 2009 démontrent que si les pertes ne sont pas amorties par des mesures de redressement rapides, l’ampleur de la pauvreté s’accroît, l’éducation, la santé et l’alimentation souffrent et les indicateurs sociaux se détériorent. Le Bilan mondial 2011 souligne le déficit budgétaire auquel peuvent être confrontés les gouvernements s’ils ne parviennent pas à limiter les pertes dues aux catastrophes, tandis que le Bilan mondial 2013 indique que de nombreuses petites entreprises ne se redressent jamais de ces pertes (UNISDR, 2009a, 2011a, 2013a). Par conséquent, le redressement soulève des questions fondamentales en termes de gestion compensatoire des risques, en particulier sur l’existence ou non de mécanismes visant à aider les ménages, les entreprises et les gouvernements à compenser rapidement les pertes et à reprendre leurs activités avant que ces pertes ne se traduisent par des conséquences négatives à long terme sur le développement. Il s’agit d’une question complexe puisque, en fin de compte, le redressement des ménages, des entreprises et des gouvernements est interdépendant. La possibilité de redémarrer une activité, par exemple, dépend du rétablissement de l’alimentation électrique, du réseau d’eau, des télécommunications et du transport, autant d’aspects susceptibles de relever de la responsabilité des autorités locales ou des prestataires de services publics. Le redres177


sement des ménages dépend de la reprise d’activités créatrices d’emplois et de revenus. Un deuxième ensemble de problèmes se rapporte à la gestion prospective des risques : qu’il soit ou non possible dans l’intervalle après une catastrophe de se développer d’une façon qui évite de reconstruire les risques. En révélant les risques, les catastrophes dévoilent leurs facteurs sous-jacents et peuvent faire du changement une nécessité. Comme souligné dans le Chapitre 1, il existe de nombreux exemples historiques d’évolution des pratiques de construction ou de conception urbaine, notamment, qui ont impliqué l’intégration de mesures visant à réduire les risques. Ce type de changement reste cependant une exception et il semble que le risque soit beaucoup plus souvent reconstruit, littéralement brique après brique. Les ménages à faibles revenus et les petites entreprises, en particulier, sont souvent confrontés à des contraintes majeures lorsqu’il s’agit de modifier la manière dont ils gèrent leurs risques, et peuvent être réticents à risquer l’expérience. S’agissant des gouvernements et des entreprises, la modification des structures et des procédures administratives et des processus de planification qui existaient avant une catastrophe n’est pas si aisée. Par conséquent, l’option par défaut est souvent de revenir aux mauvaises habitudes. Le fait d’utiliser l’espace du redressement pour transformer et réorienter le développement de façon à réduire les risques futurs demeure compliqué, puisqu’il faut obtenir le consensus d’un grand nombre d’acteurs, notamment des gouvernements, des organisations internationales et régionales qui apportent des financements et des conseils techniques, des ménages et des entreprises affectés, des prestataires de services publics et d’autres. Les organisations internationales, les donateurs bilatéraux et multilatéraux ainsi que les organisations non gouvernementales ont également leurs propres objectifs et entretiennent des relations de clientèle au plan national. De plus, il existe un dilemme entre la nécessité d’agir rapide178

Partie II - Chapitre 8

ment afin de réduire l’espace entre les secours et le redressement dans les meilleurs délais et celle de planifier les interventions avec soin afin d’éviter de reconstruire les risques. La fenêtre d’opportunités de mise en œuvre d’un changement innovant commence à se fermer assez rapidement après l’impact initial d’un aléa, et les politiques normales lui succèdent fréquemment. Ainsi, dans de nombreux cas, l’élan permettant de tirer profit d’une catastrophe en tant qu’opportunité en vue de parvenir à une transformation plus vaste est perdu (GFDRR, 2014c ; GFDRR et al., 2013 ; GFDRR et al., 2014). Revenus et gouvernance Dans tous les pays, les processus de redressement sont fortement conditionnés par des facteurs tels que les revenus et la gouvernance. Comme l’illustrent les chemins très différents qu’ont suivi les processus de redressement au Chili et Haïti à la suite des séismes de 2010 (Encadré 8.9), la manière dont chaque pays intègre les questions de la gestion tant compensatoire que prospective des risques au processus de redressement dépend bien plus de la force de son économie et de la qualité de sa gouvernance en temps normal que du volume d’aide extérieure qu’il reçoit. La plupart des difficultés qui persistent dans le redressement et la reconstruction après une catastrophe sont moins liées à des aspects techniques tels que la finance ou la qualité des données utilisées pour les évaluations qu’aux cultures politiques et économiques préexistantes dans les pays concernés, qui peuvent inclure des mandats institutionnels conflictuels et opaques, et aux relations de pouvoir entre les différents groupes socio-économiques. En plus des objectifs nébuleux, voire contradictoires, des différentes unités et agences administratives, des intérêts nationaux et sectoriels divergents peuvent réduire l’efficacité des efforts de reconstruction et de redressement (GFDRR, 2014c). Par conséquent, des pays qui ont déjà mis en place des mécanismes compensatoires, tels qu’une as-


Encadré 8.9  Redressement au Chili et à Haïti

Au début de 2010, deux séismes d’une magnitude exceptionnellement élevée ont frappé Haïti et le Chili à deux mois d’intervalle. Le séisme de magnitude 7,0 qui a touché Haïti a laissé la capitale Port-au-Prince en ruines. Quelque 222 570 personnes ont été tuées et l’économie a été dévastée. Le séisme de magnitude 8,8 survenu au Chili a également occasionné des dommages majeurs, bien que le nombre de victimes se soit limité à 562. Le récit de chacune de ces catastrophes, en revanche, était complètement différent. La faible mortalité au Chili reflète l’application de longue date des codes de construction parasismique. À l’inverse, le dernier séisme majeur survenu à Haïti datait de 1842 et les efforts de réduction des risques de catastrophe étaient davantage centrés sur les cyclones récurrents que sur les séismes. Les pertes économiques directes enregistrées au Chili, qui ont atteint 30 milliards de dollars américains, ont été près de quatre fois supérieures à celles subies par Haïti, estimées à 7,8 millions de dollars américains, ce qui met en évidence le contraste existant entre la valeur des actifs exposés dans l’un des pays à plus haut revenu13 et ceux d’un pays à plus faible revenu dans les Amériques. Toutefois, tandis qu’au Chili ces pertes représentaient seulement 15 % du PIB du pays (CEPAL, 2010), les pertes bien plus faibles subies par Haïti équivalaient à 120 % de son PIB de 200914. Du fait de son économie en grande partie préservée, de la bonne qualité de sa gouvernance15 et de son expérience dans la gestion des catastrophes liées aux séismes, le Chili s’est relevé relativement rapidement. À l’inverse, cinq années après la catastrophe, affaibli par une économie dévastée et une piètre gouvernance et sans expérience récente dans la gestion des séismes, Haïti ne s’est toujours pas relevé. Les efforts visant à reconstruire en mieux sont rapidement tombés à l’eau (GFDRR, 2014c). Ces deux récits illustrent l’influence du niveau de développement économique et de la qualité de la gouvernance d’un pays sur sa capacité à se relever rapidement tout en évitant d’engendrer de nouveaux risques.

surance efficace16, et qui sont en mesure d’amortir rapidement les pertes se redresseront beaucoup plus vite que les autres. Ces mécanismes peuvent inclure l’assurance et la réassurance, les fonds catastrophe, les arrangements de financement en cas d’urgence conclus avec des institutions financières multilatérales et des solutions basées sur le marché telles que les obligations catastrophe (UNISDR, 2011a et 2013a). Alors que le CAH touche à son terme, et comme souligné dans le Chapitre 5, de nombreux pays à faible revenu et à revenu intermédiaire restent toutefois confrontés à un déficit budgétaire, même lorsqu’ils sont touchés par des catastrophes moins intensives. Financer le redressement Le manque de moyens financiers est fréquemment cité comme un obstacle aux efforts visant à reconstruire en mieux (UNISDR, 2013b ; GFDRR, 2014c). Près d’un tiers des rapports d’avancement transmis à l’aide de l’outil HFA Monitor mentionnent le financement en tant que premier obstacle à l’intégration de la réduction des catastrophes aux efforts

de redressement et de reconstruction. Comme souligné dans le Bilan mondial 2011, le fait de reconstruire en mieux présente pourtant généralement un rapport avantages-coûts très attractif. Cela permet non seulement de réduire les futurs niveaux de risque, mais également de limiter le déficit budgétaire auquel seraient exposés les pays pour amortir les futures pertes (Williges et al., 2014). En d’autres termes, ces efforts sont susceptibles d’accroître la résilience économique et fiscale d’un pays et de lui offrir la possibilité d’absorber les pertes occasionnées par des événements d’une période de retour plus longue. Par exemple, la période de retour d’un événement générateur de pertes se traduisant par un déficit budgétaire pour l’Équateur pourrait être modifiée de plus de 50 ans (Figure 8.5). De la même manière, grâce à l’approche qui consiste à reconstruire en mieux, le déficit de plus de 3 milliards de dollars américains du Pakistan pourrait passer d’un événement générateur de pertes d’une période de retour de 1 sur 100 ans (voir Figure 5.2, Chapitre 5) à un événement d’une période de retour de 1 sur 143-157 ans. 179


Figure 8.5 Différence de déficit budgétaire par rapport à la période de retour passant du scénario des « mauvaises habitudes » à l’approche visant à « reconstruire en mieux »

i érence entre e scénario des mauvaises abitudes et approc e visant reconstruire en mieu (années) 1 15

5

15 2 15

2

5 Aucune donnée

Données peu fiables pour les pays a ant enregistré moins de 5 événements avec des pertes économi ues

(Source : Williges et al., 2014.)

Building back better

Dans le même temps, les mécanismes de financement des risques sont normalement conçus pour protéger les finances publiques contre des événements intensifs. Généralement, aucun mécanisme de protection n’est en place dans le cas des catastrophes extensives multiples qui occasionnent la grande majorité des dommages causés aux logements, à l’agriculture et aux infrastructures locales. Par conséquent, tandis que les gouvernements et les grandes entreprises peuvent recourir à l’assurance pour se protéger, les ménages à faibles revenus et les petites entreprises continuent à absorber les pertes persistantes liées aux risques extensifs. De la même manière, l’aide internationale est uniquement disponible pour soutenir les efforts de redressement engagés à la suite des catastrophes de plus grande ampleur. En général, les pays qui disposent déjà de cadres politiques et règlementaires efficaces, ainsi que de stratégies et de mécanismes financiers visant à prévenir la création de nouveaux risques de catastrophe, peuvent profiter pleinement de la 180

Partie II - Chapitre 8

phase d’après catastrophe pour transformer le développement, tandis que la fenêtre d’opportunités s’ouvre et se ferme rapidement pour ceux qui n’ont réalisé que peu de progrès dans la mise en œuvre de mesures de gestion des risques de catastrophe avant la survenue d’une catastrophe. Lessons on disaster recovery

Par exemple, en 2007, le principe qui consiste à veiller à l’intégration des mesures de réduction des risques dans les efforts de redressement et de reconstruction des biens publics essentiels a été introduit dans les Arrangements relatifs aux interventions de secours et de redressement après une catastrophe naturelle (NDRRA) d’Australie dans le but de réduire les futures pertes dues aux catastrophes et les coûts de la reconstruction (Gouvernement de l’Australie, sans date). À la suite du cyclone Oswald en 2013, les Gouvernements du Queensland et de l’Australie ont lancé le Queensland Betterment Fund, un fonds conjoint spécifique de 80 millions de dollars australiens visant à financer de nouvelles normes applicables à la reconstruction des actifs (Encadré 8.10).


Encadré 8.10  Exemples d’efforts visant à reconstruire en mieux dans l’État du Queensland, en Australie

Le Queensland Betterment Fund vise à couvrir la différence de coût entre la restauration ou le remplacement d’un bien public essentiel en vue de le remettre dans l’état qui était le sien avant la catastrophe et sa restauration et son remplacement selon une norme plus résistante aux catastrophes. Parmi les principaux projets financés par ce fonds de 80 millions de dollars australiens figurent les améliorations apportées à la conception de différents projets impliquant la distribution d’eau (The Gayndah Water Supply Intake), des ponts (George Bell Crossing) et des routes (Gayndah-Mundubbera Road, Round Hill Road, Upper Mount Bentley Road). Ces projets réduisent les risques en sécurisant les routes d’accès à des collectivités qui se sont retrouvées isolées à la suite de précédentes catastrophes et en protégeant l’infrastructure de télécommunications essentielle, pour ne citer que deux exemples.

Des données pour l’évaluation et la planification du redressement Les évaluations des besoins et les cadres de redressement après une catastrophe constituent indéniablement des instruments fondamentaux pour parvenir à un consensus sur la façon d’accélérer autant que possible les efforts de redressement et d’intégrer des mesures de réduction des risques. Tandis que de bonnes évaluations ne garantissent pas nécessairement un redressement efficace, des évaluations insuffisantes ou inexactes se traduiront très probablement par une réponse et des efforts de redressement inappropriés (GFDRR, 2014a). Sans surprise, la fiabilité, la pertinence et la disponibilité des données en temps voulu sont aussi essentielles que l’efficacité de la coordination des efforts entre les gouvernements nationaux, les autorités locales, les organisations internationales et les acteurs non gouvernementaux, en particulier avec les ménages, les entreprises et les collectivités affectés (IRP, 2014). Comme c’est le cas pour les systèmes d’alerte précoce, la manière dont les données sont collectées a fait l’objet d’une transformation technologique majeure depuis l’adoption du CAH. Les médias sociaux permettent désormais aux collectivités du monde entier d’ajouter et de diffuser de grands volumes de données et de collecter et d’échanger des informations (Gundecha et Liu, 2012). Les études réalisées au Japon en 2011 indiquent qu’une partie importante de la population compte sur les médias sociaux pour obtenir des informations sur les

catastrophes (Peary et al., 2012). Les informations indiquant l’intensité des séismes au Japon sont produites quasiment en temps réel sur l’internet par des sources d’information participatives (IRP, 2014). Plusieurs pays ont reconnu le potentiel de ces mécanismes d’échange d’informations accéléré et ont élaboré les politiques et les cadres juridiques et règlementaires pertinents (IRP, 2014). Par exemple, à la suite du séisme qui a frappé Christchurch en 2011, le Gouvernement de la NouvelleZélande a développé l’Open Access and Licensing Framework (le cadre de libre accès et d’accréditation) pour surmonter les obstacles rencontrés par les prestataires de services publics en raison de la confidentialité des informations sur la propriété (Ferreira et al., 2013). Au Brésil, les efforts visant à permettre l’échange d’informations entre les autorités de la défense civile, les autorités municipales et les acteurs locaux ont été traduits dans la nouvelle politique nationale de protection civile et de défense et par une loi complémentaire consacrée à cette question et adoptée en 2013 (Otoni de Araujo et al., 2013). Reconstruire en mieux ou maintenir les mauvaises habitudes ? De véritables progrès ont été accomplis en vue de garantir l’intégration de la réduction des risques de catastrophe dans les évaluations des besoins et dans les cadres de redressement. L’analyse de vingt évaluations des besoins après une catastrophe réalisées dans seize pays entre 2004 et 181


Encadré 8.11 Réduction des risques de catastrophe axée sur le redressement et institutionnalisation au Mozambique

À la suite de l’élan et de l’impulsion donnés par le redressement après les inondations massives de 2007 au Mozambique, le gouvernement a fait de la résilience des collectivités et de la réduction de la vulnérabilité une composante clé de son Plan directeur pour la prévention des catastrophes et l’atténuation de leurs effets. Le redressement, la résilience et le développement sont également intégrés dans les efforts visant à présenter aux exploitants agricoles des cultures qui résistent à la sécheresse, à les former à la construction de systèmes de capture d’eau de pluie de petite échelle en utilisant des matériaux locaux et à les sensibiliser à l’importance du reboisement des berges. En dépit des précipitations abondantes, le nombre de personnes affectées a considérablement diminué jusqu’en 2012/2013, lorsque des inondations majeures ont montré que des efforts supplémentaires seraient encore nécessaires pour réduire les vulnérabilités. Par la suite, l’Institut national pour la gestion des catastrophes (INGC) a été mandaté pour coordonner la réinstallation des personnes déplacées depuis les berges du fleuve Zambèze en l’absence d’un ministère du logement. Près de 8 000 familles ont bénéficié d’une aide gouvernementale et internationale dans le cadre de la construction de logements, d’écoles et de cliniques sur des zones plus élevées à l’aide de matériaux plus résistants, bien que le gouvernement ait été contraint de reconnaître l’importance constante des structures plus proches du fleuve pour assurer la pérennité des moyens de subsistance existants. Par ailleurs, 776 comités communautaires ont depuis été formés et équipés pour utiliser le système d’alerte aux inondations afin d’évacuer les populations vulnérables. Au plan institutionnel, les pratiques de gestion des risques de catastrophe sont désormais bien établies dans le cadre du leadership de l’INGC et les responsabilités relatives au redressement après une catastrophe fusionnent de plus en plus avec les plans de développement d’autres institutions gouvernementales (GFDRR, 2014c).

2011 révèle que près de la moitié recommande et encourage l’intégration de la réduction des risques aux efforts de redressement. Ces principes incluent la prise en charge de mesures structurelles et non structurelles, l’amélioration de l’état de préparation et l’intégration de la gestion des risques à l’ensemble des secteurs et à tous les niveaux de la gouvernance. La quasi-totalité des récentes évaluations des besoins après une catastrophe formule des recommandations spécifiques pour l’intégration de la réduction des risques de catastrophe aux stratégies de redressement sectorielles (Encadré 8.11), en veillant en particulier à ce que les infrastructures sociales et matérielles endommagées, telles que les écoles, les installations médicales, les logements et les réseaux de transport, soient reconstruits conformément à des standards améliorés et renforcés (GFDRR, 2014c). L’intégration de slogans tels que « reconstruire en mieux » à ces évaluations et aux efforts de redressement est toutefois rarement opérationnelle à moins d’être pleinement prise en considération 182

Partie II - Chapitre 8

dans les plans et budgets de redressement et, au final, dans une approche plus complète de la gestion des risques de catastrophe. L’une des approches couramment adoptées après une catastrophe majeure consiste à centraliser les responsabilités relatives au redressement et à la reconstruction au sein d’une agence ad hoc. Tandis que cette option est susceptible d’accélérer le redressement et de garantir le respect de meilleures normes, elle peut en réalité affaiblir le rôle des structures administratives responsables des efforts continus de développement et de réduction des risques de catastrophe. Une fois le redressement jugé terminé et l’agence ad hoc démantelée, de nombreux pays ne continuent pas forcément à reconstruire en mieux, mais renouent plutôt avec les mauvaises habitudes. Flood warning in Mozambique

Par exemple, l’Autorité pour la reconstruction et la remise en état après le séisme (ERRA) au Pakistan est parvenue à intégrer de façon notable la


réduction des risques de catastrophe aux efforts de redressement après le séisme de 2005 : plus de 85 % des logements reconstruits étaient en effet conformes aux nouvelles normes parasismiques. Cette approche n’a ensuite toutefois pas été transférée vers l’Agence nationale de gestion des catastrophes (NDMA) créée en 2007, ce qui a freiné l’intégration de la réduction des risques de catastrophe aux efforts de redressement après les inondations de 2010 (GFDRR, 2014c). À l’inverse, le redressement en Indonésie à la suite des tsunamis de 2004 a conduit à une meilleure inclusion de la réduction des risques de catastrophe dans les efforts de redressement, et cette approche a été par la suite appliquée à la suite du séisme de 2006 à Yogyakarta et au centre de Java, du séisme de 2009 à l’ouest de Sumatra et de l’éruption volcanique de 2010 à Merapi. De la même manière, les efforts mis en œuvre par le Mozambique en vue d’institutionnaliser la réduction des risques de catastrophe et de garantir son intégration aux efforts de redressement se sont renforcés mutuellement (GFDRR, 2014c). Même lorsqu’il est mis en œuvre, le concept de reconstruire en mieux est susceptible de se limiter aux améliorations structurelles apportées aux bâtiments ou à des éléments spécifiques de l’infrastructure, sans qu’aucune attention ne soit accordée à la prise en charge des facteurs sous-jacents qui ont construit le risque en premier lieu. Au lendemain du séisme qui a frappé le Cachemire en 2005, les espoirs selon lesquels des conséquences partagées combleraient le fossé politique entre le Pakistan et l’Inde sont restés vains (ODI, 2013). À l’inverse, la région d’Aceh est parvenue à tirer profit de l’opportunité de reconstruire non seulement son infrastructure, mais également les bases de la société d’Aceh après le tsunami de l’océan Indien en 2004 (Ibid.).

a été entravée par la même conception des catastrophes selon laquelle le CAH a été interprété et qui explique pourquoi si peu de progrès ont été accomplis dans le domaine de la gestion prospective des risques de catastrophe. Si les catastrophes sont considérées comme des chocs exogènes, le redressement et la reconstruction sont avant tout envisagés comme un processus de retour à la normale, plutôt qu’un processus de transformation du développement et des facteurs sous-jacents du risque.

Notes 1 http://www.gpo.gov/fdsys/pkg/PLAW-109publ430/pdf/PLAW109publ430.pdf. 2  http://www.preventionweb.net/applications/hfa/qbnhfa/ home. 3  Pour en savoir plus, voir http://www.cires.org.mx/sasmex_es.php (consultation le 11 décembre 2014). 4 http://www.howwemadeitinafrica.com/how-mobile-phonesare-transforming-african-agriculture/8704 (consultation le 11 janvier 2015). 5  Ce défi a été abordé lors de la troisième Conférence internationale sur les systèmes d’alerte précoce (EWC III) qui s’est tenue à Bonn (Allemagne) du 27 au 29 mars 2006. 6 www.opidin.org. 7 http://www.fews.net/. 8 Le Programme de formation à la gestion des catastrophes (UNDMTP) a été lancé dans les années 1990 comme initiative conjointe de l’UNDHA et du PNUD au nom du Comité permanent interorganisations. À la suite de la mise en œuvre du CAH en 2005, l’UNDMTP a été relancé en tant qu’Initiative pour le renforcement des capacités d’intervention en cas de catastrophe (CADRI). 9 http://www.unicef.org/education/bege_61691.html. 10 http://www.metoffice.gov.uk/weather/tropicalcyclone/2013/ haiyan (consultation le 10 octobre 2014). 11 www.em-dat.be. 12 http://www.recoveryplatform.org/about_irp. 13 Le Chili est devenu un pays à revenu élevé en 2013 (http://data. worldbank.org/news/new-country-classifications). 14 http://www.unodc.org/lpo-brazil/es/frontpage/2010/03/18-cepal-sismo-en-haiti-retrocedio-lucha-contra-la-pobreza-en-una-decada.html (consultation le 11 janvier 2015). 15 http://info.worldbank.org/governance/wgi/index.aspx#home.

En fin de compte, l’intégration de la réduction des risques de catastrophe aux efforts de redressement et de reconstruction après une catastrophe

16  À la suite des séismes qui ont frappé Christchurch, les mesures de redressement ont été en partie paralysées en raison des difficultés rencontrées pour obtenir le règlement des sinistres par les assurances.

183



Partie III

Soudain, le vide

185


Le 26 juillet 2005, la ville de Mumbai a été paralysée par de graves inondations. Le réseau de distribution d’eau, les systèmes d’assainissement, tous les modes de transport public, l’alimentation électrique et les télécommunications ont arrêté de fonctionner dans de nombreuses zones (Revi, 2005). Quelque 1 150 personnes ont trouvé la mort (Carpenter, 2006), des trains ont déraillé et certaines parties de la ville ont été englouties par les plus fortes précipitations de toute l’histoire de Mumbai (Hallegatte et al., 2010 ; Ranger et al., 2011 ; Dossal, 2005). Le gouvernement municipal de Mumbai, en place depuis 150 ans, n’était pas préparé et n’a pas été en mesure d’organiser une intervention efficace. De nombreuses institutions administratives et politiques se sont retrouvées paralysées, comme en état de choc (Ibid.). Pourtant, la vie a continué dans la ville, aucune émeute n’a éclaté et les habitants se sont rapidement organisés pour intervenir et se redresser1. Cet événement ainsi que ses conséquences immédiates ont souligné non seulement des limites, mais également l’existence d’une culture civique. Les inondations de 2005 ont touché une ville de près de 13 millions de personnes2. Mumbai compte désormais plus de 20 millions d’habitants (UNDESA, 2014b), et cette croissance rapide se caractérise Figure III.1  Mumbai au début du XXe siècle

(Source : Bartholomew, 1908.)

186

Partie III

encore par de fortes inégalités. Les établissements et marchés informels et les piètres infrastructures publiques coexistent avec une économie dynamique et une solide classe moyenne. D’ici à 2020, la ville devrait compter la plus forte densité de population au monde (Ibid.). La ville de Mumbai est elle aussi confrontée aux défis liés à la gestion des risques. À la fin du XIXe siècle, des défaillances en matière de gestion urbanistique, de réglementation et d’investissement public ont engendré une épidémie dévastatrice de peste bubonique (Gandy, 2008 ; Christakos et al., 2007). Les risques révélés par les inondations de 2005 ont été construits d’une manière très similaire. En 1908, Arthur Crawford, conseiller municipal de 1865 à 1871, a publié des plans de renouvellement urbain qui prévoyaient des logements, un réseau de distribution d’eau et des systèmes d’assainissement et de gestion des déchets appropriés (Crawford, 1908). Il avait déjà suggéré des plans similaires pendant son mandat, mais ceux-ci avaient été rejetés par de riches propriétaires et des fonctionnaires directement concernés. Par conséquent, la peste bubonique qui a fait rage dans la ville pendant près d’une décennie, jusqu’en 1906, a entraîné des pertes humaines considérables et a sévèrement affecté l’économie, la cohésion sociale et l’image de la ville (Dossal, 2005). Mumbai a continué de se développer rapidement au cours du XXe siècle tout en restant soumise à une multitude d’aléas physiques et technologiques, notamment les séismes, les cyclones, les ondes de tempête, les glissements de terrain, les orages et les inondations locales, l’élévation du niveau des océans, la sécheresse et les accidents nucléaires et industriels. Avec les inondations de 2005, les avantages stratégiques et compétitifs offerts par l’emplacement, l’histoire et la concentration de capitaux, de ressources humaines et de technologies qui en résulte semblent avoir été remplacés par une accumulation dramatique de risques systémiques et caractéristiques (Revi, 2005).


Aujourd’hui, plus de la moitié de la population vit dans des établissements informels (Bertaud, 2011). Les investissements publics dans les infrastructures tentent de rattraper le temps perdu. Les services de base et les services publics tels que la fourniture continue d’énergie et d’eau, la gestion des eaux usées et la collecte des déchets sont inexistants ou en dessous des niveaux acceptables dans de nombreuses parties de la ville, notamment dans les établissements informels (Agarwal, 2011 ; Subbaraman et al., 2012). Le gouvernement municipal réglemente et investit dans un environnement caractérisé par des changements continus et erratiques en matière de démographie, d’exigences et de perspectives (Bertaud, 2011). De plus, il est contraint de composer avec la corruption (Gandy, 2012). La prochaine catastrophe est déjà en train de se préparer. Le cas de Mumbai offre juste un petit aperçu des limites de l’approche actuelle de la gestion des risques de catastrophe, ainsi que de ce à quoi commence à ressembler la « nouvelle normalité » d’un risque de catastrophe accéléré. La Section II du présent rapport met en lumière l’efficacité du CAH pour encourager la réalisation d’investissements majeurs de la part des pays et des organisations régionales et internationales dans la gestion des catastrophes. Les différentes priorités d’action identifiées dans le CAH ont différents degrés de complexité et offrent, par conséquent, différentes possibilités de prise en charge. De plus, le secteur de la gestion des risques de catastrophe a réalisé des progrès significatifs dans les domaines où il bénéficie d’outils de gouvernance appropriés (PNUD, 2014a). Comme indiqué dans les Chapitres 1 et 6, bien que le CAH ait créé l’espace permettant de s’attaquer aux risques sous-jacents, en particulier à travers l’Objectif stratégique n° 1 et la Priorité d’action n° 4, cette opportunité n’a été que partiellement explorée par les gouvernements et les organisations régionales et internationales. Les rapports

d’avancement dans le cadre du CAH ont régulièrement souligné un faible niveau de réalisation pour la Priorité d’action n° 4. L’évolution, la consolidation et l’expansion particulières du secteur de la gestion des risques de catastrophe depuis ses origines dans la gestion des situations d’urgence ont conduit à le comprendre et à le mettre en œuvre en tant que gestion des catastrophes (Enia, 2013 ; Hewitt, 2013 ; UNISDR, 2013a ; 2011a). Si les catastrophes sont considérées comme des menaces exogènes, alors la priorité est accordée aux politiques, aux plans, aux stratégies et à d’autres instruments conçus pour protéger les personnes et leurs biens de telles menaces, et non pour prendre en charge la création et l’accumulation des risques au sein du développement. En conséquence, il semble que l’Objectif stratégique n° 1 du CAH, à savoir l’intégration de la réduction des catastrophes dans les politiques de développement durable et la planification, n’a été que partiellement réalisé. La création et l’accumulation de nouveaux risques de catastrophe, notamment des risques extensifs, semblent surpasser les efforts croissants visant à protéger le développement contre ces risques. Comme souligné dans la Section I du présent rapport, même si le CAH touche à son terme, les risques de catastrophe demeurent un défi de plus en plus important, notamment pour les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. Les risques extensifs d’aujourd’hui peuvent par ailleurs devenir les risques intensifs de demain. Néanmoins, cette lacune apparente masque une réalité plus complexe. Les innovations et les progrès réalisés dans d’autres domaines, notamment ceux liés au changement climatique, à l’environnement, à l’eau, à l’aménagement du territoire et à la durabilité, ont conduit à l’adoption de politiques et de pratiques qui présentent des avantages directs ou indirects pour la réduction des risques de catastrophe, même si elles ne sont pas présentées comme telles. Du fait de l’attention accordée par le secteur de la gestion des risques de catas187


trophe à la préparation aux situations d’urgence et à la gestion des catastrophes, ces pratiques sont toutes trop rarement documentées par l’outil HFA Monitor. Bien que la vague de création et d’accumulation de risques semble continuer à monter, on observe désormais dans certains secteurs un intérêt croissant pour une transformation du développement qui certains des facteurs de risque sous-jacents. Inquiétudes et incertitudes Malheureusement, de plus en plus d’éléments attestent du fait que, en dépit de cet intérêt, le monde sera confronté à une accélération rapide des risques de catastrophe au cours des prochaines décennies. Malgré l’introduction d’indicateurs alternatifs pour évaluer les progrès réalisés dans le développement, tels que l’Indice de développement humain (PNUD, 2014b), l’Indicateur véritable du progrès (Talberth et al., 2007), le Rapport mondial sur le bonheur (Helliwell et al., 2013) ou l’Indice du progrès social (Porter et al., 2014), les décisions des gouvernements et des investisseurs restent fortement déterminées par le PIB par habitant, le taux de croissance du PIB, les notations de crédit et le retour sur le capital investi à court terme, plutôt que par les mesures de la durabilité ou de l’équité. Le modèle du développement demeure essentiellement fondé sur la croissance économique et se caractérise par des contradictions et des approches intenables, notamment la surconsommation des ressources naturelles et la production d’inégalités. Ces 25 dernières années, l’économie mondiale a doublé, environ 60 % des écosystèmes du monde ont été dégradés et les bénéfices de la croissance ont été distribués de façon inégale : la moitié de la population mondiale la moins bien lotie se partage désormais à peine 1 % de la richesse mondiale. Même au sein des pays à revenu élevé, des écarts considérables en termes de richesse et de bien-être persistent entre riches et pauvres. Tandis que ces tendances évoluent, le consensus politique et so188

Partie III

cial quant aux avantages du développement laisse la place à des incertitudes et des inquiétudes croissantes, notamment en ce qui concerne les risques de catastrophe grandissants. L’exposition croissante des actifs économiques Le PIB mondial par habitant a augmenté de 122 % de 1990 à 20103. Avec la mondialisation croissante de l’économie, les investissements ont tendance à affluer vers les régions qui offrent des avantages comparatifs en termes d’accumulation de capital, notamment une main-d’œuvre bon marché, l’accès aux marchés à l’exportation, les infrastructures, la stabilité et d’autres facteurs. Comme souligné dans le Bilan mondial 2013 (UNISDR, 2013a), les décisions d’investissement prennent rarement en compte le niveau des aléas dans ces régions ou l’ignorent en raison des profits à court terme qui peuvent être réalisés. Cette situation a conduit à des flux considérables de capitaux vers des régions soumises à des aléas et à une importante augmentation de l’exposition des actifs économiques aux séismes, aux tsunamis, aux ondes de tempête, aux inondations et à d’autres aléas. Dans le même temps, le risque qui en résulte se mondialise puisque les causes et les impacts des catastrophes se répercutent au travers des chaînes d’approvisionnement mondiales et que les impacts qui affectent des secteurs de plus en plus intégrés s’étendent à d’autres. Des inégalités croissantes face aux risques La concentration des capitaux génère des inégalités sociales et territoriales. Les 2 % les plus riches de la population adulte mondiale détiennent aujourd’hui plus de 50 % de la richesse mondiale (Davies et al., 2012), tandis que les 50 % les plus pauvres détiennent moins de 1 % de la richesse mondiale (Credit Suisse, 2013). Ce ratio se traduit par un coefficient de Gini de 0,893, où 0 correspond à l’égalité parfaite et 1 à l’inégalité parfaite. En d’autres termes, le monde s’approche de ce que l’on peut considérer comme étant des niveaux absolus d’inégalité (Davies et al., 2012). Les secteurs et les territoires qui n’offrent pas d’avantages com-


paratifs en termes d’accumulation de capital sont laissés de côté. Dans ces régions, le risque de catastrophe est associé à une absence de développement caractérisée par le faible niveau des investissements dans les infrastructures de réduction des risques, une absence de protection sociale et environnementale et une pauvreté rurale et urbaine. La géographie des inégalités face aux risques apparaît à tous les échelons, que ce soit entre les régions et les pays, au sein des pays ou même entre les villes et les localités. Un développement urbain ségrégué L’urbanisation est le reflet de la croissance économique. La croissance urbaine en elle-même peut contribuer à la concentration des risques dans des régions soumises à des aléas. Toutefois, dans la plupart des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, elle se caractérise également souvent par un accès inégal à l’espace urbain, aux infrastructures, aux services et à la sécurité, du fait que le capital urbain spéculatif est investi dans des enclaves modernes, tandis que la majorité de la population à faibles revenus n’accède qu’à une urbanisation informelle ou de mauvaise qualité. Globalement, près d’une personne sur sept vit dans des logements surpeuplés et de mauvaise qualité, et dispose d’un faible accès aux services (Mitlin et Satterthwaite, 2013). Cela engendre de nouvelles formes de risques de catastrophe, tant extensifs qu’intensifs, les ménages à faibles revenus étant forcés d’occuper des zones soumises à des aléas dans lesquelles les terres ont peu de valeur, où les infrastructures et la protection sociale sont déficientes, voire inexistantes, et où la dégradation de l’environnement est importante. Changement climatique La croissance économique demande une augmentation de la consommation énergétique, qui dépend toujours dans une large mesure des combustibles fossiles et se traduit par une hausse des émissions de gaz à effet de serre. Tandis que les émissions de gaz à effet de serre produites par les pays de l’Annexe I4 du Protocole de Kyoto ont baissé de 9,6 %

entre 1990 et 20115, les niveaux des émissions mondiales ont augmenté au cours de la même période et pendant la majeure partie de 2013 (OMM, 2014b), ce qui s’est traduit par des concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère dépassant de près de 40 % les niveaux de l’ère préindustrielle (GIEC, 2013). Les émissions d’environ 50 % de l’ensemble des pays dépassent les seuils mondiaux établis à ce jour (PNUD, 2014b). Par conséquent, à travers l’évolution des températures, des précipitations et du niveau des océans, le changement climatique mondial contribue à transformer les aléas et amplifie les risques de catastrophe. Le changement climatique transfère les risques puisque de nombreux territoires parmi les plus touchés sont ceux qui ont le moins contribué au problème. Dans le même temps, le changement climatique est aussi un métafacteur de risque puisque ses causes et ses conséquences sont mondiales. Surconsommation La croissance économique dépend également d’une consommation croissante des ressources environnementales, notamment de l’eau douce et des ressources forestières et marines. Des 140 pays pour lesquels des données sont disponibles, 59 % affichent une empreinte écologique supérieure à la biocapacité mondiale, et 49 pays sur 172 consomment davantage d’eau douce que le seuil mondial ne le permet (PNUD, 2014b). De nombreux écosystèmes qui jouent un rôle vital en termes de protection et d’approvisionnement sont dégradés au-delà du point de rupture, ce qui peut amplifier le niveau des aléas, accroître la vulnérabilité et mettre à mal la résilience. Tout comme le changement climatique, la consommation des ressources environnementales est un reflet des inégalités. De nombreux secteurs et territoires qui présentent des niveaux de revenu élevés vivent au-dessus de leurs moyens et comptent sur la consommation des ressources environnementales d’autres régions. Évolutions démographiques L’évolution démographique, y compris les changements liés aux migrations et aux déplacements, 189


influence également les modèles et les tendances en matière de risques de catastrophe. D’ici à 2050, la population mondiale atteindra 9,2 milliards d’habitants (Lutz et al., 2014) et le pourcentage de la population vieillissante (de plus de 60 ans) dans les pays à revenu élevé devrait atteindre 32 % (UNDESA, 2013). Tandis que la population mondiale devrait culminer à 9,4 milliards d’habitants en 2070 avant d’entamer un léger déclin vers la fin du siècle (Lutz et al., 2014), les pays et les régions dotés de populations jeunes qui se développent rapidement verront probablement leur exposition aux aléas s’accroître, notamment dans les zones urbaines. En raison des risques de catastrophe spécifiques que pose l’évolution démographique, les pays et les régions dont les populations sont vieillissantes et en déclin seront probablement confrontés à une plus grande vulnérabilité et à une moindre résilience. La course à la compétitivité Au sein du modèle de développement actuel, les entreprises et les pays s’efforcent constamment de rester compétitifs. En réduisant les coûts de la main-d’œuvre dans le cas des entreprises, ou en augmentant les dépenses dans le domaine du bien-être social et de la protection dans le cas des gouvernements, cette course à la compétitivité et cette volonté d’attirer des investissements sont susceptibles d’accroître la vulnérabilité et de réduire la résilience de larges pans de la population active. À l’inverse, toutefois, promouvoir une utilisation plus efficace de l’énergie et des ressources afin de réduire les coûts favorise l’investissement dans des technologies susceptibles de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de soulager les écosystèmes. Un chemin tortueux et plein d’incertitudes Ces facteurs de risque mondiaux sont étroitement liés et interdépendants. Ils façonnent de plus en plus des réalités locales telles que la situation de Mumbai. La perception d’une complexité croissante, de l’interconnectivité et de la dépendance des réalités locales vis-à-vis des processus mon190

Partie III

diaux érode la capacité des acteurs locaux à gérer leurs risques et augmente les incertitudes et les inquiétudes. En raison des multiples boucles de rétroaction qui existent entre ces différents facteurs et de leur caractère non linéaire, même une légère modification de l’évolution de l’un d’entre eux est susceptible d’engendrer des changements inattendus et radicaux pour un autre. Tandis que les incertitudes et les inquiétudes remplacent les certitudes et la sécurité à l’avenir, il se peut que la réduction des risques de catastrophe connaisse un passage à vide. Prédire quel sera l’impact du changement climatique mondial, de l’augmentation de la consommation d’énergie ou de l’accroissement démographique dans 20, 50 ou 100 ans devient une sorte d’obsession sociale susceptible d’avoir un effet paralysant. En fin de compte, si le système planétaire doit s’écrouler, pourquoi investir dans la gestion des risques d’aujourd’hui ? Dans le même temps, toutefois, les acteurs économiques ne se contentent pas de réagir passivement face au changement, ils le façonnent. Comprendre les forces économiques, politiques et sociales qui favorisent actuellement les risques peut également aider à identifier les lacunes et les points d’inflexion où le changement devient possible.

Notes 1  http://lsecities.net/media/objects/articles/maximum-city/en-gb (consultation le 11 janvier 2015). 2  Municipal Corporation of Greater Mumbai, Recensement de la population : http://www.mcgm.gov.in/irj/portal/anonymous/qlvitalstatsreport. 3  Données des Indicateurs du développement de la Banque mondiale : http://data.worldbank.org. 4  Les pays de l’Annexe I comprennent les pays industrialisés membres de l’OCDE en 1992, ainsi que les économies en transition, notamment la Fédération de Russie, les États baltes et plusieurs États d’Europe centrale et orientale. Pour la liste complète des pays de l’Annexe I, voir http://unfccc.int/parties_and_observers/parties/annex_i/ items/2774.php. 5  http://unfccc.int/ghg_data/ghg_data_unfccc/items/4146.php.


Chapitre 9

Inégalités face aux risques

191


La concentration des capitaux génère des inégalités sociales et territoriales. Le monde s’approche de ce que l’on peut considérer comme le niveau absolu des inégalités et les secteurs et territoires qui n’offrent pas d’avantages comparatifs en termes d’accumulation de capital sont délaissés. Dans ces régions, les risques de catastrophe sont associés à une absence de développement caractérisée par un faible niveau des investissements dans les infrastructures de réduction des risques, une absence de protection sociale et environnementale ainsi que par la pauvreté rurale et urbaine.

9.1

Pauvreté multidimensionnelle, risques quotidiens et catastrophes

un âge moyen de 82 ans. À seulement 12 km toutefois, à Calton (Glasgow), l’âge moyen de décès chez les hommes est de 54 ans (Gouvernement de l’Écosse, 2009). L’espérance de vie des hommes à Calton est inférieure à celle observée dans la bande de Gaza (71 ans)1, ou en Iraq où elle atteint 66 ans après 20 années de sanctions et de guerre2. Seuls 12 pays d’Afrique subsaharienne, notamment la Sierra Leone, le Tchad et la République démocratique du Congo, affichent une espérance de vie inférieure à celle de Calton pour la population

La pauvreté multidimensionnelle qui existe dans les zones soumises à des aléas signifie que les risques quotidiens prennent la forme de risques de catastrophe extensifs. Dans la riche ville de Lenzie, en Écosse (East Dunbartonshire), la population masculine vit jusqu’à Encadré 9.1 Risques quotidiens et extensifs à Calton

Calton est un quartier défavorisé de Glasgow, en Écosse. La pauvreté, la drogue et l’alcool, la criminalité et les problèmes de santé y sont endémiques. Pas moins de 44 % des habitants sont en incapacité de travail et 37 % font partie d’un ménage sans emploi (Gouvernement de l’Écosse, 2009). Pourtant, à quelques pas de là se trouve le quartier commercial le plus huppé de Glasgow : l’illustration même des inégalités les plus criantes dans un mouchoir de poche. En Écosse, la mortalité due aux maladies respiratoires et hépatiques, aux accidents, aux troubles liés à la drogue et à l’alcool, à l’automutilation et aux agressions dans les quartiers défavorisés tels que celui de Calton est supérieure d’un ordre de grandeur par rapport aux quartiers les moins défavorisés selon l’indice écossais de privations multiples (SIMD) (Tableau 9.1). Tableau 9.1 Mortalité masculine (0 à 64 ans, pour 100 000 habitants) pour une sélection de causes dans chaque quintile de l’indice SIMD (2000-2002) Troubles Troubles mentaux et mentaux et Automutilations, comportementaux comportementaux liés à la liés à la etc. consommation consommation de drogue d'alcool

Quintile SIMD

Maladies chroniques des voies respiratoires inférieures

5 (les moins précarisés)

3

6

11

11

2

2

0

4

5

11

17

18

4

5

1 1

Maladies hépatiques chroniques

Accidents

Agressions

3

7

16

17

24

5

8

2

12

29

21

31

11

11

4

1 (les plus précarisés)

18

61

27

48

29

20

11

Ensemble de l'Écosse

9

23

18

26

10

9

3

(Source : UNISDR, données de l’indice SIMD4.)

L’importante précarité qui touche le quartier de Calton coïncide également avec des risques de catastrophe extensifs (Lindley et al., 2011). Hormis les inégalités et la pauvreté, la conception inappropriée des réseaux d’assainissement de la ville et les petits cours d’eau qui la traversent engendrent des inondations régulières (Cashman, 2007). La réduc-

192

Partie III - Chapitre 9


masculine3. Étant donnés les liens entre pauvreté et risques de catastrophe, il n’y a guère lieu d’être surpris lorsque l’on constate que Calton subit également des inondations régulières (Encadré 9.1). Le cas de Calton illustre parfaitement comment le manque de ressources financières, associé à d’autres facteurs liés à la pauvreté tels que l’impuissance, l’exclusion, le faible niveau d’alphabétisation et la discrimination concourent à la création des risques au quotidien. Viennent s’ajouter les problèmes de santé, la criminalité, la toxicomanie, les violences domestiques et la privation de logement (Wilkinson et Marmot, 2003), qui ne font que renforcer la pauvreté. La corrélation entre pauvreté et espérance de vie est particulièrement prononcée dans les pays à

faible revenu. Par exemple, Lilongwe, Conakry, N’Djamena, Banjul et Kigali affichent toutes une espérance de vie à la naissance inférieure à 50 ans (Mitlin et Satterthwaite, 2013). Au Tchad, en Sierra Leone, au Burundi et au Mali, le taux de mortalité avant l’âge de cinq ans des populations urbaines est terriblement élevé avec plus de 150 décès pour 1 000 naissances, contre moins de 10 décès pour 1 000 naissances dans les pays à revenu intermédiaire et à revenu élevé (Ibid.). Toutefois, comme l’illustre le cas du quartier de Calton, une faible espérance de vie est liée à ces conditions de risques quotidiens élevés, même dans les pays les plus riches du monde. Il est à présent généralement compris que les ménages et les collectivités à faibles revenus supportent une part disproportionnée des pertes

tion des plaines inondables le long de la rivière Clyde a par ailleurs renforcé les risques d’inondation dans la zone (Figure 9.1). Figure 9.1 Le centre-ville de Glasgow à la fin du XVIIIe siècle et au début du XXIe siècle

1795 - J. Gillies, Bibliothèque nationale d'Écosse

2015 - Service cartographique, 2015

(Source : Bibliothèque nationale d’Écosse ; Service cartographique5.)

En 2002, Calton et Shettleston, un autre quartier de Glasgow où la population vivant des aides sociales est estimée à 80 % et ne dispose généralement pas d’une couverture d’assurance (Tufail et al., 2004), figuraient parmi les zones les plus touchées par les inondations (Cashman, 2007). Shettleston a également subi des inondations extensives répétées entre 1993 et 2005 (Werritty et al., 2007). Une étude de l’impact des inondations menée en 2006 a révélé un très faible niveau d’intervention des services d’urgence à Shettleston par rapport aux autres zones touchées (Ibid.), ce qui reflète sans doute la privation de droits de la population de ce quartier. Après les inondations de 2002, le Metropolitan Glasgow Strategic Drainage Partnership (MGSDP, 2012a) a mis en œuvre des mesures de réduction des risques d’inondation d’une période de retour de 1 sur 200 ans, notamment la construction de 4,5 km de digues et de six stations de pompage souterraines, la création de réservoirs dans trois bassins versants et la plantation de milliers d’arbres et arbustes (MGSDP, 2012b). Toutefois, dans des quartiers tels que Calton et Shettleston, les risques d’inondation sont tout autant liés à la vulnérabilité sociale qu’aux aléas.

193


et des impacts dus aux catastrophes (UNISDR, 2009a ; Rentschler, 2013 ; Lewis, 2011 ; Donner et Rodriguez, 20116 ; Benson et Clay, 2004 ; DFID, 2004; PNUD, 2004 ; Wisner et al., 2003 ; Baker, 2012 ; PNUD, 2014a). Toutefois, tout comme à Calton, les risques de catastrophe sont non seulement modelés par le manque de ressources financières, mais également par toute une série de facteurs socio-économiques qui déterminent les droits et les capacités de la population (Shepherd et al., 2013). L’accès aux services, le droit de s’exprimer sur le plan politique et le statut socio-économique ont un impact direct sur les risques de catastrophe et la résilience (Satterthwaite et Mitlin, 2014). Les facteurs clés dans les quartiers défavorisés comprennent la faible qualité des habitations et leur manque de sécurisation, l’accès limité aux services de base tels que les soins médicaux, les transports publics et les moyens de communication ainsi qu’aux infrastructures telles que les réseaux de distribution d’eau, l’assainissement, le drainage et les routes, un patrimoine limité et l’absence de protection sociale (Ibid.). Des taux de mortalité et de morbidité plus élevés chez les enfants, les per-

sonnes âgées et les femmes sont directement liés à ces différents facteurs de pauvreté (Anderson, 1994 ; IASC, 2006 ; Benson et Bugge, 2007 ; Aldrich et Benson, 2008 ; Walden et al., 2009 ; UNISDR, 2009a ; Banque mondiale, 2010 ; Nilufar, 2012 ; Shepherd et al., 2013). Les populations frappées par la pauvreté multidimensionnelle risquent davantage de vivre dans des zones soumises à des aléas et disposent de moins de moyens pour investir dans des mesures de réduction des risques. C’est ainsi que les risques quotidiens donnent lieu à des risques de catastrophe extensifs (Figure 9.2), ce qui conduit à l’accumulation de risques intensifs dans les régions soumises à des séismes, des cyclones tropicaux et d’autres aléas majeurs. Compte tenu du manque d’accès à des mécanismes d’assurance et de protection sociale et de la difficulté générale à mobiliser des ressources afin d’absorber les pertes, les dégâts causés aux habitations, aux infrastructures locales, au bétail et aux cultures conduisent à toute une série d’impacts et renforcent la pauvreté (UNISDR, 2009a ; Baez et al., 2009). Les catastrophes extensives

Figure 9.2  Risques de catastrophe et pauvreté

Processus mondiaux

Facteurs de risque sous-jacents

Développement économique et territorial inégal

Exposition croissante des populations et des actifs économiques aux aléas

Augmentation des inégalités socio-économiques

Absence de responsabilité et cohésion sociale limitée

Effondrement des systèmes planétaires et changement climatique

Mauvaises planification et gestion du développement urbain Moyens de subsistance ruraux vulnérables

Le lien entre risques et pauvreté Risques extensifs et intensifs

Pertes dues aux catastrophes

Exposition des populations et actifs vulnérables aux aléas fréquents de faible gravité et aux aléas peu fréquents mais graves

Mortalité, dégâts aux habitations, infrastructures locales, morbidité, bétail et cultures

Risques quotidiens

Conséquences de la pauvreté

Insécurité alimentaire, criminalité, maladies, pollution, accidents, assainissement et eau propre insuffisants

Impacts à court et long terme sur le revenu, la consommation, la protection sociale et l'égalité

Déclin des écosystèmes Protection sociale faible

(Source : UNISDR.)

194

Partie III - Chapitre 9

Pauvreté multidimensionnelle Pauvreté financière, précarité, exclusion, illettrisme, discrimination Opportunités limitées d'accéder à des actifs ou de les mobiliser


récurrentes érodent le patrimoine des ménages et augmentent les risques tout en réduisant la résilience. Dans le cas des populations qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, dont la capacité à accumuler ou obtenir des ressources est particulièrement limitée, les risques de catastrophe continueront d’être un facteur qui non seulement reflète, mais également renforce, la pauvreté. Par exemple, les inondations et les sécheresses qui touchent le Mexique contribuent largement à réduire le développement humain et à renforcer la pauvreté. Entre 2000 et 2005, l’impact des catastrophes sur le développement humain a été équivalent à la perte de deux années de progrès en moyenne et l’impact sur la pauvreté a été équivalent à une augmentation de 1,5 % à 3,7 % (Rodriguez-Oreggia et al., 2012). Les études microéconomiques montrent également que les catastrophes intensives ont un impact disproportionné sur les ménages les plus pauvres, qui ont tendance à perdre une proportion plus élevée de leurs actifs productifs. De la même manière, ces ménages sont généralement moins à même de mobiliser les ressources nécessaires pour absorber les pertes et se redresser. C’est ainsi que les catastrophes intensives peuvent conduire à une aggravation de la pauvreté et des inégalités, et avoir des impacts à long terme sur la santé, l’éducation, la nutrition et la productivité. À l’issue du séisme survenu en 2007 au Pérou, tant la pauvreté mesurable que la pauvreté subjective (c’est-à-dire la pauvreté telle que perçue par les populations touchées) ont augmenté considérablement dans la région d’Ica, la plus gravement touchée du pays (Lucchetti, 2011). Aux Philippines, l’analyse des données pluviométriques et des modèles de consommation des ménages montre que même des écarts limités, mais plus fréquents par rapport à la pluviométrie normale ont un impact direct sur le bien-être des ménages pauvres, en particulier ceux des zones rurales qui disposent d’un accès limité aux marchés (Safir et al., 2013).

Les impacts sur la santé se sont également révélés significatifs, en particulier pour les jeunes enfants et les personnes âgées. Après l’ouragan Mitch, la probabilité de sous-alimentation chez les enfants a presque quadruplé dans les régions touchées et les enfants avaient 30 % de chances en moins d’être emmenés chez le médecin en cas de maladie (Baez, 2007). Dans de nombreuses villes des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, la faiblesse et le manque de ressources des autorités locales les empêchent de gérer les processus qui créent et accumulent les risques de catastrophe et de fournir une protection sociale (UNISDR, 2009a, 2011a, 2013a ; Mitlin et Satterthwaite, 2013). Alors que les dépenses annuelles des autorités locales (Figure 9.3) dans un pays à revenu élevé tel que le Danemark peuvent dépasser les 12 000 dollars américains par habitant, dans de nombreux pays à faible revenu, elles sont inférieures à 5 dollars américains par habitant (Satterthwaite et Dodman, 2013). Ceci implique qu’une gouvernance locale insuffisante est à la fois un facteur de pauvreté et un facteur de risque. Bien que l’impact des catastrophes sur la pauvreté ait été largement documenté, il reste encore à reconnaître que les risques de catastrophe, et en particulier les risques extensifs, sont ancrés dans l’ADN de la pauvreté et des inégalités. En d’autres termes, ils sont enracinés dans la pauvreté : ils ne lui sont pas externes. Les études de la répartition géographique des risques continuent le plus souvent à présenter les impacts des catastrophes et du changement climatique comme une simple fonction de l’exposition aux aléas des populations à faibles revenus. Par exemple, une projection récente indique que 325 millions de personnes extrêmement pauvres vivront dans les 49 pays les plus soumis aux aléas en 2030, et que par conséquent l’élimination de la pauvreté est impossible à défaut de s’attaquer aux catastrophes (Shepherd et al., 2013). Cette lo195


Figure 9.3 Dépenses annuelles des autorités locales par habitant Dépenses annuelles des autorités locales par personne (dollars américains, ppa) 2 000

000

000

000

10 000

12 000

Danemark Suède Pays-Bas États-Unis d'Amérique Suisse Espagne Chine Brésil Turquie Argentine Mexique Égypte Indonésie Ouganda Iran (République islamique d') Népal Kenya Cambodge Togo Mauritanie ppa parité de pouvoir d ac at données de 2010

(Source : United Cities and Local Government, 2010.)

gique peut toutefois être explorée sous un angle différent. Si la pauvreté pouvait être réduite, les pertes et les impacts dus aux catastrophes le seraient également. Les risques de catastrophe, et plus particulièrement les risques extensifs, sont intrinsèques à la pauvreté.

9.2

Inégalités et risques de catastrophe

Les inégalités sont omniprésentes dans les processus sociaux qui sous-tendent la relation entre risques de catastrophe et pauvreté. Elles renforcent le manque de ressources financières et créent un processus d’exclusion sociale et politique. Il en résulte un manque de cohésion sociale qui contribue aux risques de catastrophe en compromettant la responsabilisation et en permettant la corruption. En Turquie, un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, les inégalités de revenus ont diminué au cours des 30 dernières années. Toutefois, la situation de départ était particulièrement 196

Partie III - Chapitre 9

critique et le pays arrive encore aujourd’hui en deuxième position du classement des pays de l’OCDE où les inégalités de revenus sont les plus importantes7. Alors que le nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté a connu une diminution radicale au cours des 10 dernières années, ce même seuil de pauvreté n’a cessé d’augmenter en Turquie. Pour 2013, les calculs donnent 509 dollars américains par mois, un montant significativement supérieur au seuil de pauvreté officiel8. Les inégalités et la pauvreté sont les plus importantes dans les régions du sud et de l’est du pays, qui sont moins peuplées que les régions urbanisées du nord et de la côte ouest. À l’exception des pertes associées à l’important séisme d’Izmit en 1999, les pertes dues aux catastrophes reflètent généralement la distribution des inégalités (Figure 9.4). Les inégalités sont omniprésentes dans les processus sociaux et les dynamiques de pouvoir qui sous-tendent la relation entre risques de catas-


Figure 9.4 Inégalités et pertes dues aux catastrophes en Turquie

ROUM

GINI

BUCAREST Calarasi

Égalité parfaite - 0

Constanta

Giurgiu Alexandrie

BULGARIE

0

Varna

Bourgas

Naltchik

0 1

Mer Noire

Inégalité parfaite - 1 Istanbul Bursa

GÉORGIE

Batoumi

AZ ARM

Erzurum

AZE

Sivas

Nakhitchevan

Izmir

Diyarbakir

Konya Seyhan

Ourmia

Dahûk Hassaké Alep

CHY

Limassol

Deir ez-Zor

IRAK

Hama

Tartous

Homs

Samarra

LIB

Tripoli

Bakouba BAGDAD

DAMAS Zahlé B'abda BEYROUTH BeyrouthSidon

Ramadi

Damas

ROUM

Pertes estimées [millions de dollars américains] Maïkop

BUCAREST Calarasi

Constanta

Giurgiu Alexandrie

BULGARIE

Varna

Mer Noire

Bourgas

Tcherkessk

FÉDÉRATION DE RUSSIE 150 50 50

< 10 10 0 0 150

Razgrad Lovec

Naltchik

BB

esinventar 201

GÉORGIE

Batoumi

Istanbul

Erzurum

Nakhitchevan

Diyarbakir

Konya Seyhan Alep Idleb

Kilomètres

Kyrenia NICOSIE Nicosie

CHY

Paphos

Limassol

Hama

Tartous

Mossoul

Erbil

Racca

Kirkouk

RÉPUBLIQUE ARABE SYRIENNE

Lattaquié Famagouste

Ourmia

Dahûk Hassaké

100 200

IRA

Van

Kayseri

Antalya

AZE

Sivas

Eskisehir

Izmir

AZ ARM

EREVAN

ANKARA

Bursa

TBILISSI

Trébizonde

Samsun

Izmit

Nazran Vladikavkaz

Soukhoumi

Source

Kardjali

Edirne

GRE

0

Erbil

Kirkouk

RÉPUBLIQUE ARABE SYRIENNE

Lattaquié Famagouste

Mossoul

Racca

Idleb Kyrenia NICOSIE Nicosie Paphos

IRA

Van

Kayseri

Antalya

201 TBILISSI

EREVAN

ANKARA

Eskisehir

Source

Trébizonde

Samsun

Izmit

Nazran Vladikavkaz

Soukhoumi

0 1

Kardjali

Edirne

GRE

Tcherkessk

FÉDÉRATION DE RUSSIE

0

Razgrad Lovec

Maïkop

Deir ez-Zor

IRAK

lement parce qu’elles renforcent le manque de ressources financières (PNUD, 2013b), mais également à travers d’autres processus d’exclusion sociale et politique qui affectent aussi les familles de la classe moyenne inférieure dans les sociétés avec des niveaux d’inégalité élevés. De tels niveaux d’inégalité et le manque de cohésion sociale peuvent contribuer aux risques de catastrophe en érodant la responsabilisation, en permettant la corruption et en mettant à mal le contrat social capable d’inciter à des comportements propres à réduire les risques. Comme exposé dans d’autres chapitres de cette section du rapport, les inégalités redistribuent également les risques de catastrophe à travers des processus tels que le développement économique inégal, la ségrégation urbaine et la surconsommation des ressources. Les inégalités face aux risques de catastrophe sont par conséquent une caractéristique inhérente aux inégalités plus larges qui existent sur le plan social, économique et politique.

Homs

Samarra

LIB

Tripoli

DAMAS Zahlé B'abda BEYROUTH BeyrouthSidon Damas

Bakouba BAGDAD Ramadi

[Source : UNISDR, informations issues de la Banque de données turque sur les catastrophes (TABB) et de l’OCDE.]

trophe et pauvreté. Les inégalités (Encadré 9.2) influencent les risques de catastrophe non seu-

Les inégalités d’accès aux infrastructures, aux services et à la protection sociale ont une influence sur la résilience de différents groupes et individus au sein de la société lorsque ceux-ci sont touchés par les pertes dues aux catastrophes. Les inéga-

Encadré 9.2 Dimensions des inégalités

Les inégalités revêtent plusieurs dimensions qui vont au-delà de la simple distribution inégale des revenus. Nombre de ces dimensions peuvent avoir un impact plus significatif sur les risques de catastrophe que les seules inégalités de revenus. Les inégalités de patrimoine font habituellement plus particulièrement référence au logement et à la sécurité de l’emploi, mais peuvent également faire référence aux actifs productifs dans les collectivités agricoles ou aux marchandises et à l’épargne dans les collectivités qui reposent sur le commerce. Les inégalités de droits font référence à l’accès inégal aux services publics et à la protection sociale ainsi qu’aux inégalités dans l’application de l’État de droit. Des inégalités politiques existent partout dans le monde et se traduisent par des moyens d’action politiques inégaux pour différents groupes et individus au sein d’une société. Enfin, les inégalités sociales sont fréquemment directement liées à l’occupation de l’espace (par exemple établissements urbains informels) et influencent les autres dimensions des inégalités, notamment la capacité des individus et des groupes à s’assurer un revenu régulier, à accéder aux services et à faire entendre leur voix sur le plan politique. L’impact direct que le statut social a souvent sur la capacité des individus ou groupes à gérer les risques et à développer leur résilience est régulièrement sous-estimé dans les recherches, et en particulier dans les évaluations quantitatives de la vulnérabilité face aux catastrophes. Les différentes dimensions des inégalités qui influencent les risques de catastrophe à tous les niveaux doivent recevoir plus d’attention afin de mieux comprendre la création et l’accumulation des risques de catastrophe. (Source : Satterthwaite et Mitlin, 2014.)

197


lités d’accès à la terre, aux revenus et aux actifs influencent la manière dont les ménages et les collectivités peuvent gérer les risques de catastrophe. Enfin, les inégalités de protection, à travers les droits, les lois et les réglementations, ainsi que les inégalités dans la liberté d’expression et la responsabilisation ont un impact sur la capacité des différents pays à affronter les facteurs de risque sous-jacents (UNISDR, 2009a, 2011a). Au niveau mondial, les inégalités sociales et les inégalités de revenus sont reconnues comme ayant une relation directe avec les risques macroéconomiques de crises budgétaires et de chômage (WEF, 2014). À tous les niveaux, les inégalités facilitent également, à travers une responsabilisation inefficace et une corruption accrue, le transfert des risques de catastrophe de ceux qui tirent parti de la prise de risques vers d’autres secteurs et groupes de population qui en supportent les coûts (Birdsall et Londoño, 1997 ; Kawachi et al., 1997 ; Banque mondiale, 2004 ; Hulme et Green, 2005 ; UNISDR, 2013a). Des inégalités importantes limitent donc à la fois la croissance économique et la cohésion sociale (Persson et Tabellini 1991 ; Birdsall et Londoño, 1997 ; Deninger et Squire 1998 ; Easterley 2002 ; Piketty, 2014). Par ailleurs, les inégalités extrêmes peuvent se révéler être un sérieux problème de

gouvernance mondiale en soi, car elles peuvent porter atteinte à la cohésion sociale jusqu’au point de ne plus prendre en compte des problématiques telles que les risques de catastrophe sur la base de valeurs et de priorités communes (Wilkinson, 2005 ; Fajnzylber et al., 2002).

9.3

border la pauvreté A et les inégalités dans le cadre du CAH ?

Des succès ont été remportés dans la réduction de la pauvreté et des inégalités. Ces progrès n’ont toutefois majoritairement pas trouvé leur origine dans le secteur de la gestion des risques de catastrophe lui-même, mais ont été permis par d’autres secteurs, principalement l’agriculture, la sécurité alimentaire et la protection sociale. Le CAH ne mentionne pas les inégalités comme un facteur de risques de catastrophe. Toutefois, dans sa Priorité d’action n° 4, il inclut différentes activités qui visent directement la réduction de la vulnérabilité et le renforcement de la résilience sociale des ménages et des collectivités (Encadré 9.3). Bien que les rapports d’autoévaluation nationaux montrent une amélioration dans ces domaines entre les cycles d’évaluation 2011 et 2013, ils révèlent des réalisations globalement très limitées

Encadré 9.3  Activités principales liées à la vulnérabilité sociale et à la résilience dans le CAH

(d) Promouvoir la sécurité alimentaire, facteur important de la résilience des collectivités face aux aléas, particulièrement dans les zones sujettes aux sécheresses, aux inondations, aux cyclones et autres aléas qui peuvent compromettre les moyens de subsistance fondés sur l’agriculture. (g) Améliorer l’application des mécanismes de protection sociale afin d’aider les populations démunies, âgées ou handicapées et les autres groupes qui sont frappés par les catastrophes. Renforcer les programmes de redressement, notamment les programmes de formation psychosociale, dans le but d’atténuer les dommages psychologiques subis par les populations vulnérables, en particulier les enfants, à la suite des catastrophes. (i) Tâcher de faire en sorte, selon qu’il convient, que les programmes en faveur des personnes déplacées n’aggravent pas les risques et la vulnérabilité face aux aléas. (j) Promouvoir la diversification des sources de revenu pour les populations des zones à haut risque afin qu’elles soient moins vulnérables face aux aléas et veiller à ce que le revenu de ces populations et leurs biens ne soient pas menacés par des politiques et des processus de développement qui accroissent leur vulnérabilité face aux catastrophes. (CAH, 2005)

198

Partie III - Chapitre 9


régions ainsi qu’une protection sociale accrue. La plupart de ces progrès n’ont pas trouvé leur origine dans le secteur de la gestion des risques de catastrophe lui-même, mais ont été permis par d’autres secteurs, principalement l’agriculture, la sécurité alimentaire et la protection sociale.

(Figure 9.5), bien en dessous du score moyen obtenu pour les différentes priorités d’action. Figure 9.5 Progrès dans l’intégration de la réduction des risques de catastrophe au développement social Niveau des progrès [1 à 5]

Niveau moyen des progrès au cours du CAH

3,4 3,3

Global food security

3,2 3,1

Sécurité alimentaire La sécurité alimentaire s’est améliorée au cours des dernières décennies. Depuis 1990, le taux mondial de sous-alimentation a chuté de 18,7 % à 11,3 % (FAO et al., 2014) et 52 pays sont parvenus à atteindre les objectifs fixés en matière d’élimination de la faim dans les objectifs du Millénaire pour le développement. Néanmoins, les estimations actuelles indiquent que plus de 800 millions de personnes dans le monde souffrent encore chroniquement de sous-alimentation (Ibid.) et les progrès sont extrêmement contrastés d’une région à l’autre. L’Afrique subsaharienne présente toujours des taux de sous-alimentation plus élevés que les autres régions, tandis que la situation en Asie de l’Ouest s’est en fait détériorée (Figure 9.6).

2,9 3 2,8 2,7 2,6

2007-09

2009-11

2011-13

Cycle d'évaluation des progrès du CAH Indicateur de base 4.2 du CAH : implémentation de politiques et plans pour le développement social, en vue de réduire la vulnérabilité des populations les plus à risque. (Source : UNISDR, données de l’outil HFA Monitor.)

Comme pour les autres activités principales du CAH, l’absence d’indicateurs de résultat cohérents rend l’évaluation des progrès difficile. Différents éléments indiquent toutefois une amélioration de la sécurité alimentaire dans de nombreuses

Figure 9.6 Tendances de la sous-alimentation : des différences régionales

ourcentage de a popu ation sou rant de sous a imentation 5

10

15

20

25

Afrique subsaharienne

35 33,3

23,8

Caraïbes

27,0

20,1

Asie du Sud

15,8

Océanie

14,0

Asie de l'Est

6,3

Caucase et Asie centrale

8,7 7,4

5,1

15,7

30,7

10,3

Asie de l'Ouest

24,0

23,2

10,8

Asie du Sud-Est

Amérique latine

30

14,1 14,4

1990-1992 2012-2014 Cible OMD

(Source : FAO et al., 2014.)

199


Cette coexistence de progrès d’une part et de défis persistants d’autre part démontre qu’un engagement politique soutenu ainsi que des investissements majeurs dans des modes de production et de consommation alimentaires raisonnés en fonction des risques seront nécessaires pour parvenir à une sécurité alimentaire durable à l’échelle mondiale (UNISDR, 2013a ; FAO et al., 2014). À la lumière de processus tels que la dégradation continue des terres, l’épuisement des ressources en eau douce, l’appauvrissement de la biodiversité ou encore le changement climatique, les défis vont vraisemblablement se renforcer à l’avenir. Protection sociale La protection sociale a reçu un soutien financier significatif de l’aide internationale. Par exemple, la Banque mondiale a à elle seule alloué un budget annuel moyen de 1,72 milliard de dollars américains à la protection sociale entre 2007 et 2013 et a approuvé 273 projets dans 93 pays pour une valeur totale de 12 milliards de dollars américains au cours de la même période. Différentes initiatives de gestion prospective des risques de catastrophe sont parvenues à réduire efficacement la vulnérabilité en combinant la gestion des risques de catastrophe à la réduction de la pauvreté (UNISDR, 2011a ; Arnold et al., 2014 ; GFDRR, 2014d). Le Chars Livelihood Programme (CLP9) au Bangladesh est un exemple d’une telle initiative et prévoit la combinaison de travaux publics de réduction des risques d’inondation avec des transferts d’actifs (tant en espèces qu’en nature), le développement du marché, la diversification des moyens de subsistance et une série de projets de développement social visant à construire à long terme la résilience et la prospérité des collectivités vivant sur les chars soumis à des aléas au nord-ouest du Bangladesh (GFDRR, 2013c ; Conroy et al., 2010). La combinaison d’un soutien social intensif et ciblé et d’un développement économique au niveau des particuliers, des 200

Partie III - Chapitre 9

ménages et des collectivités a permis une véritable réduction de la vulnérabilité (GFDRR, 2014d ; Conroy et al., 2010). Chars Livelihood Programme

Toutefois, la protection sociale a généralement été plutôt utilisée pour absorber les pertes dues aux catastrophes que comme un outil de gestion prospective des risques de catastrophe (Newsham et al., 2011). Par exemple, plusieurs initiatives de développement participatif visant à réduire la pauvreté et la vulnérabilité sont parvenues à réduire les risques de catastrophe, alors qu’il ne s’agissait pas de leur objectif initial (Banque mondiale, 2006), principalement en renforçant la résilience grâce au réseau et aux infrastructures disponibles durant les situations d’urgence (GFDRR, 2014d). Un domaine de la protection sociale dans lequel des progrès adéquats n’ont pas été réalisés est la protection et l’implication des personnes handicapées. Les programmes de réduction des risques de catastrophe qui ciblent les personnes handicapées demeurent l’exception. Dans le secteur de l’éducation, par exemple, la réduction des risques de catastrophe peut certes être enseignée aux enfants des écoles, mais la plupart des enfants souffrant d’un handicap ne sont pas scolarisés10. Les initiatives les plus récentes visant à comprendre la problématique du handicap et à s’y attaquer dans le contexte des catastrophes et de la gestion des risques de catastrophe ont pris pour référence la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, qui souligne que les États Parties « prennent toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection et la sûreté des personnes handicapées dans les situations de risque, y compris les catastrophes naturelles11». Sur la base de cet engagement, des efforts ont été récemment consentis afin de prendre en compte les risques plus impor-


tants qui pèsent sur les personnes handicapées ainsi que sur les personnes âgées en cas de catastrophe, et de permettre aux personnes handicapées de contribuer aux efforts de réduction des risques de catastrophe.

9.4

Renforcer la résilience socio-économique à travers des mécanismes de partage des risques financiers

Des progrès significatifs ont été réalisés en matière de financement des risques. Malgré un intérêt croissant des gouvernements, du secteur privé et des organisations internationales, la capacité des instruments financiers classiques à garantir le bien-être de chacun demeure pourtant limitée dans de nombreux pays. Dans le cadre de la Priorité d’action n° 4, le CAH a aussi reconnu le rôle que pouvaient jouer les mécanismes de partage des risques financiers, bien que le lien n’ait pas été explicitement établi avec les inégalités et la vulnérabilité (Encadré 9.4). Malheureusement, ces activités principales ne se reflètent pas dans l’indicateur de base du CAH pour la protection sociale ni dans aucun autre indicateur de base relevant de la Priorité d’action n° 4. Étant donné le lien évident entre la protection financière et la résilience, ces activités vont toutefois être examinées dans ce chapitre. À nouveau, l’absence d’indicateurs de résultat cohérents rend l’évaluation des progrès difficile, mais le suivi permis par l’outil HFA Monitor fournit des éléments qui attestent de certaines

innovations et suggèrent que des progrès significatifs ont été réalisés dans ce domaine. En tant que mécanisme de protection du développement socio-économique contre des menaces exogènes, le financement des risques a suscité un intérêt croissant de la part des gouvernements, du secteur privé et des organisations internationales telles que la Banque mondiale et l’OCDE. La couverture des actifs et des opérations commerciales contre les risques remonte au XVIIe siècle, où il s’avéra nécessaire de protéger les navigateurs contre les risques encourus. Née dans un café de Londres en 1688, alors que la marine marchande cherchait à protéger ses bâtiments et leurs cargaisons, la vente de polices d’assurance contre les risques de catastrophe est devenue un important secteur d’activité. Au début du XXe siècle, les gouvernements ont commencé à promouvoir l’assurance comme moyen de renforcer la résilience et d’éviter les pressions sociales liées à l’indemnisation. Le premier programme d’assurance gouvernemental fut le Federal Crop Insurance Program mis en place par les États-Unis dans les années 1930, qui cherchait à protéger les exploitants agricoles contre le double effet de la crise de 1929 et du Dust Bowl (GFDRR, 2014b), une période de sécheresses et de tempêtes de poussières associée à des méthodes agricoles inappropriées qui a débuté en 1934 et qui s’est prolongée jusque dans les années 1940. Au début du XXIe siècle, plusieurs marchés nationaux de l’assurance étaient parvenus à maturité, par exemple au Japon, aux États-Unis (plus particulièrement en Californie), en Turquie et en Mongolie, mais seul un nombre limité de pays à reve-

Encadré 9.4  Activités principales liées au partage des risques financiers dans le CAH

(k) Promouvoir la mise en place de mécanismes de partage des risques financiers, notamment de régimes d’assurance et de réassurance contre les catastrophes. (m) Mettre au point des instruments financiers nouveaux et originaux pour gérer les risques de catastrophe et en promouvoir l’application. (CAH, 2005)

201


nu élevé avaient recours à des polices d’assurance contre les risques de catastrophe pour couvrir les risques supportés par le gouvernement et pour garantir des liquidités suffisantes en cas de situation d’urgence à grande échelle (GFDRR, 2014b). La plupart de ces pays payaient des primes d’assurance afin d’appuyer la reconstruction d’infrastructures publiques endommagées à l’issue de catastrophes, par exemple le Fonds national des catastrophes naturelles pour le Mexique (FONDEN). Plus récemment, les réserves nationales et régionales contre les risques supportés par les gouvernements ont tenté de maintenir un niveau suffisant de liquidités face à toute une série de besoins potentiels à l’issue de catastrophes, garantissant ainsi la stabilité budgétaire en cas de catastrophe et pour les années qui suivent (Ibid.). L’intérêt pour les produits d’assurance, à la fois en tant que moyens de renforcer la résilience face aux catastrophes et en tant que mesures incitatives à l’investissement dans la réduction des risques de catastrophe, s’est développé depuis l’adoption du CAH. À travers les rapports d’avancement nationaux établis dans le cadre du CAH, les différents pays ont exposé les politiques spécifiques adoptées afin d’étendre leurs couvertures d’assurance, par exemple à travers des mandats ou des protections obligatoires. Aux niveaux national et régional, les programmes de mutualisation des risques et les obligations catastrophes deviennent de plus en plus courants pour la gestion des risques. Toutefois, seule une minorité de pays ont pleinement développé des mécanismes qui permettent d’accéder au marché des capitaux pour le financement des risques (Figure 9.7). Le principal défi signalé par les différents pays est le manque de capacités sur leur marché national de l’assurance ou une connaissance limitée des coûts et avantages de l’assurance contre les risques de catastrophe par les bénéficiaires potentiels. Les principales caractéristiques et les hypothèses qui sous-tendent l’assurance contre les 202

Partie III - Chapitre 9

catastrophes pour les propriétaires, les entreprises et les gouvernements ont connu une évolution radicale au fil des années souvent dictée par des innovations dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire qui ont suscité le développement de nouvelles approches (Figure 9.8). Depuis 2005, ces innovations ont repoussé les limites des programmes d’assurance existants et ont permis l’accès à différents types d’instruments financiers, notamment des obligations catastrophes paramétrables, des produits dérivés météorologiques, des conventions de crédit pour coûts prévisibles spécifiques aux catastrophes et des systèmes régionaux de mutualisation des risques, même dans les pays à faible revenu (UNISDR, 2011a ; 2013a ; GFDRR, 2014b). Les nouveaux programmes comprennent des produits de micro-assurance fréquemment proposés par des organisations de la société civile et répondent aux besoins des collectivités à faibles revenus et des petits exploitants agricoles, des commerçants et des petites entreprises, ainsi que des programmes régionaux tels que le Dispositif d’assurance catastrophes naturelles pour les Caraïbes (CCRIF) et l’Initiative d’évaluation et de financement des risques de catastrophe dans le Pacifique (PCRAFI ; GFDRR, 2014b). Figure 9.7 Progrès dans l’assurance et le financement des risques Nombre de pays disposant de mécanismes opérationnels 60 50 40 30 20 10

4.2.5 - Micro-assurance

2009-2011

(Source : UNISDR.)

5.3.3 - Assurance et réassurance

2011-2013

5.3.4 - Obligations catastrophes et autres mécanismes des marchés financiers


Protection sociale liée aux catastrophes

Figure 9.8 Principales étapes dans l’évolution du financement et de l’assurance des risques de catastrophes depuis 2000

Premier système de protection contre les catastrophes en Éthiopie pour le programme PSNP

Assurance agricole

Premier projet pilote indien d'assurance liée à un indice et basée sur les conditions météorologiques (ICIC-Lombard General Insurance Co)

Le projet pilote HARITA mené en Éthiopie donne naissance à l'initiative R4, en s'appuyant sur les structures du programme PSNP (Productive Safety Net Program)

en a et t iopie assurance du bétail liée à un indice

nde programme d'assurance des récoltes à grande échelle basé sur les conditions météorologiques

iet am pro et pi ote d'assurance agricole

Assurance des risques pour les biens immobiliers

Mongolie : programme d'assurance du bétail lié à un indice

a wan programme d'assurance contre les séismes pour l'immobilier résidentiel

Financement et assurance des risques de catastrophe souverains

Groupement turc d'assurance contre les catastrophes (TCIP)

1999

Dialogue international

Projet pilote HARITA mené en Éthiopie, comportant une option d'assurance professionnelle pour les agriculteurs

ndonésie microassurance Programme roumain contre les d'assurance contre inondations les catastrophes

Création du groupement indonésien de réassurance contre les séismes (MAIPARK)

ani a es en o ombie assurance immobilière contre les séismes

e i ue première obligation catastrophe souveraine de istoire 1 0 mi ions de dollars américains)

2000

2001

Création du Bureau des ations nies pour la réduction des risques de catastrophe

2002

2003

2004

2005

2006

2007

a awi produits dérivés climatiques liés à un indice

2008

Micro-assurance CLIMBS aux Philippines

La BID Des pays lance un produit d'Amérique centrale de crédit préventif se oignent au . pour les catastrophes naturelles L'Agence japonaise de coopération internationale (JICA) lance un produit de crédit préventif pour les catastrophes e i ue assurance nature es S des excédents de sinistre Création à caractère indemnitaire de l'African Risk Capacity pour les actifs publics

Dispositif d'assurance catastrophes naturelles pour les Caraïbes

1 onds nationa des catastrophes naturelles pour e e i ue

Mécanisme d'assurance des risques de catastrophe pour l'Europe du Sud-Est et le Caucase

Initiative d'évaluation et de financement des risques de catastrophe dans le Pacifique et projet pilote d'assurance des risques de catastrophe

La Banque mondiale lance un produit de crédit préventif pour les catastrophes naturelles (prêt avec tirage en cas de catastrophe)

t iopie projet d'assurance liée à un indice de sécheresse

Création de l'Organisation de micro-assurance contre les risques de catastrophe (MiCRO)

Produit dérivé climatique le plus important ce our rugua avec la Banque mondiale pour intermédiaire

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Dialogue de Sendai

Cadre d'action de Hyogo Création du Dispositif mondial de réduction des e ets des catastrophes et de re vement Création de la Munich Climate Insurance Initiative par Munich Re

L'Alliance des petits États insulaires S S propose un dispositi à guichets multiples pour traiter les pertes et les dommages causés par es c angements c imati ues

Groupe Le Rapport des champions sur le politiques développement mondial 2014 Le G20 inscrit le financement souligne l'importance du financement et l'assurance des risques de catastrophe à son agenda et de l'assurance des risques de catastrophe e orum économique mondial publie le rapport intitulé ision or anaging atura isaster is Cadre méthodologique OCDE / G20

(Source : GFDRR, 2014b.)

203


Plusieurs pays ont mené des réformes institutionnelles afin d’appuyer l’intégration du financement des risques de catastrophe dans une approche stratégique plus large de la gestion des risques de catastrophe (Ghesquiere et Mahul, 2010 ; Banque mondiale, 2013 ; GFDRR, 2014b). Les ministères des finances prennent de plus en plus souvent l’initiative de développer des programmes d’assurance et de crédit nationaux et régionaux, et les gouvernements développent de nouvelles dispositions institutionnelles, par exemple des comités nationaux de gestion des risques où siègent des superviseurs du secteur de l’assurance, des agences de gestion des catastrophes et les différents ministères de tutelle compétents (Ibid.). Des comités nationaux de gestion des risques tels que celui déjà créé à Singapour sont aujourd’hui considérés comme un nouvel outil possible de gouvernance des risques de catastrophe en Jamaïque, au Maroc et au Rwanda (Ibid.). Des défis subsistent pourtant. À l’échelle mondiale, la fourniture de produits d’assurance est de mieux en mieux capitalisée, alors que seule une faible proportion des ménages dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire dispose d’une couverture d’assurance contre les catastrophes (Lloyd’s, 2012). Des modèles de risque détaillés ne sont toujours pas disponibles pour nombre de ces pays, ce qui signifie que les risques pourraient être mal évalués et tarifés. Par ailleurs, la concurrence risque de peser à la baisse sur les primes, jusqu’à des niveaux intenables. Parallèlement, les risques dans certaines régions et dans certains secteurs se développent jusqu’à des niveaux qu’il devient impossible d’assurer (The Geneva Association, 2013). La question de savoir qui paie et qui bénéficie des polices d’assurance contractées devient encore plus cruciale dans de telles circonstances, alors que les gouvernements deviennent de facto les assureurs de dernier recours et que leurs engagements implicites signifient que les risques créés deviennent une charge pour l’État (UNISDR, 2013a). 204

Partie III - Chapitre 9

9.5

Un avenir d’inégalités

Si les inégalités continuent de croître, elles pourraient bien devenir une force déstabilisante au niveau mondial et se manifester non seulement par une augmentation des risques de catastrophe, mais également par une diminution de la capacité à gérer ces risques. Si les inégalités sont un facteur d’augmentation des risques de catastrophe, les projections n’invitent pas à l’optimisme. Les inégalités pourraient bien continuer de se creuser, tant du point de vue socio-économique que territorial. Alors que les capitaux affluent dans les secteurs et les sites compétitifs qui offrent des opportunités de gain à court terme, les secteurs et les sites moins compétitifs sont délaissés. Exactement comme au Monopoly, là où il y a des gagnants, il y a également par définition des perdants. Tout progrès réalisé dans la prise en charge de la vulnérabilité et le renforcement de la résilience sociale, y compris les progrès obtenus à travers le financement des risques, pourrait bien être inefficace si les inégalités continuent d’augmenter. Socialement, le fossé entre ceux qui ont accès aux capitaux et ceux qui dépendent d’un salaire pour faire face à leurs besoins continue de se creuser. Partout dans le monde, la richesse n’a cessé de se concentrer depuis 1990 (Davies et al., 2012 ; Piketty, 2014 ; Crédit Suisse, 2013). Elle est distribuée de manière très différente d’une région à l’autre, bien que la plupart présentent d’importantes inégalités (Figure 9.9). L’augmentation des inégalités de revenus est étroitement liée à la course à la compétitivité, qui pousse les entreprises à comprimer les salaires réels dans de nombreux secteurs tandis que les gouvernements réduisent les dépenses en matière de protection sociale (OIT, 2013 ; UNISDR, 2013a). En conséquence, le salaire d’une large partie de la population n’a pas suivi la croissance


Global wealth distribution Figure 9.9 Distribution mondiale de la richesse

Revenu journalier supérieur 200 do ars américains

(Source : UNISDR, données issues du site www.worldmapper.org.)

économique, les avantages liés aux capitaux accumulés n’ont pas percolé jusqu’à la base et les conditions de travail se sont précarisées pour un grand nombre de personnes. Par exemple, l’augmentation de la productivité du travail a été plus de deux fois supérieure à celle des salaires dans les pays développés entre 1999 et 2011 (OIT, 2013). Dans le même temps, de nouveaux secteurs compétitifs de l’économie mondiale, tels que les biotechnologies et les nanotechnologies, ne semblent vraisemblablement pas appelés à générer à l’avenir une importante demande de personnel non qualifié ou peu qualifié (Castells et al., 2012). Aux États-Unis, la productivité du travail a augmenté de 75 % dans le secteur non agricole entre 1980 et 2011, tandis que les salaires ont augmenté de seulement 35 %. En Chine, où le niveau des salaires a triplé au cours de la dernière décennie, le PIB a augmenté encore plus rapidement : il résulte donc que la proportion des salaires par rapport au PIB a diminué (OIT, 2013). De longue

date, la tendance des bénéfices des entreprises est à la hausse et celle des salaires à la baisse. L’écart des revenus entre les 10 % les mieux payés et les 10 % les moins bien payés s’est creusé (Ibid.). Plus important peut-être, la richesse médiane mondiale (comme approximation de la richesse de la classe moyenne) a connu une diminution constante depuis 2010 (Figure 9.10), ce qui souligne que la reprise économique après la crise financière de 2008 a pour le moins été de courte durée. Cette tendance mondiale pourrait bien persister, avec une augmentation constante des inégalités au cours des décennies à venir (OCDE, 2011 ; Piketty, 2014). Cette accentuation des inégalités se poursuivra étant donné que la production économique mondiale (et par conséquent le niveau des revenus) devrait continuer de croître moins rapidement que le rendement des capitaux (figure 9.11). En d’autres termes, ceux qui dépendent des revenus du travail pour assurer leur bien-être auront encore plus de difficultés à créer ne serait-ce qu’un petit patrimoine. 205


Figure 9.10 Seuil minimal de richesse des premiers 50 %, 10 % et 1 % des détenteurs de la richesse mondiale (année de base 2008 = 100)

140 130 120 110 100 90 80 70 Richesse minimale du premier % Richesse minimale des 10 premiers % Richesse médiane

60 50

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

(Source : Crédit Suisse, 2014.)

Si les inégalités continuent de se creuser de cette manière, la classe moyenne croissante, même constituée de professionnels qualifiés, ne sera pas en mesure de constituer un patrimoine de la même manière que ceux qui disposent de capitaux (Piketty, 2014). 21st Century capital

Au niveau des ménages, la classe moyenne continuera de détenir la majorité de ses actifs sous la forme de biens immobiliers (logements) et de force de travail (investissements dans l’éducation et les compétences). Ceci accroît de manière disproportionnée leur exposition relative et leur vulnérabilité face aux aléas par comparaison à ceux dont la richesse dépend de capitaux financiers. Par conséquent, les inégalités de revenus croissantes se manifesteront par des inégalités croissantes face aux risques de catastrophe. Par exemple, la maison d’une famille de la classe moyenne américaine représente plus de 50 % de la valeur totale des actifs de cette famille 206

Partie III - Chapitre 9

(Trawinski, 2013). En l’absence d’une couverture d’assurance, tout préjudice causé à cet actif par une catastrophe pourrait avoir raison du patrimoine de cette famille et restreindre sa capacité à accumuler des actifs à l’avenir, ses différents membres étant forcés de consacrer leur épargne à un autre logement. Le pourcentage des propriétaires disposant d’une assurance contre les inondations en Louisiane au moment de l’ouraFigure 9.11 Croissance économique et revenus du capital

Taux de rendement annuel ou taux de croissance annuel 6%

5%

4%

3%

2%

1%

Taux de rendement brut sur le capital (avant impôt) Taux de croissance de la production mondiale

1700 -1820

1820 -1913

(Source : Piketty, 201412.)

1913 -1950

1950 -2012

2012 -2050

2050 -2100


gan Katrina n’était que de 7,3 % dans certains des contés les plus durement touchés (Kunreuther et Pauly, 2006). Si le rendement des capitaux continue d’augmenter plus rapidement que la croissance économique, les inégalités pourraient bien devenir une force déstabilisante au niveau mondial et se manifester non seulement par une augmentation des risques de catastrophe, mais également par une diminution de la capacité à gérer ces risques. De même, si les inégalités constituent un défi pour la gouvernance mondiale, elles constituent également un défi pour la gestion des risques de catastrophe. Si les pays compétitifs qui réussissent sont capables d’investir plus largement dans la réduction des risques de catastrophe alors que leurs homologues moins compétitifs ne peuvent le faire, les inégalités face aux risques de catastrophe continueront de se creuser.

Notes 1  Données de 2013. Source : base de données du Rapport sur le développement humain 2014 (PNUD). 2 Données de 2012. Source : indicateurs d’espérance de vie de l’OMS. 3 Données de 2012. Source : indicateurs d’espérance de vie de l’OMS. 4 http://www.scotland.gov.uk/Topics/Statistics/SIMD tion le 11 janvier 2015).

(consulta-

5  Cartes fournies à l’UNISDR par la Bibliothèque nationale d’Écosse et le Service cartographique en janvier 2015. 6 http://www.prb.org/Publications/Articles/2011/disaster-risk. aspx (consultation le 3 décembre 2014). 7  Coefficient de Gini, données de la Banque mondiale et de l’OCDE, 2011. 8  Pour les données originales issues de la Turkish Union Survey, voir http://www.hurriyetdailynews.com/poverty-threshold-continues-to-rise-in-turkey.aspx?pageID=238&nid=53256 (consultation le 11 janvier 2015). 9  http://clp-bangladesh.org/work/overview (consultation le 3 janvier 2015). 10 http://www.eenet.org.uk/resources/eenet_newsletter/eer1/ page24.php (consultation le 11 janvier 2015). 11 http://www.un.org/disabilities/default.asp?id=271. 12  Pour les données en consultation libre sur lesquelles s’appuie l’analyse de Piketty, voir http://piketty.pse.ens.fr/fr/capital21c.

207



Chapitre 10

Pour quelques dollars de plus : des actifs économiques toujours plus exposés aux aléas

209


Alors que les investissements continuent d’affluer vers les régions qui offrent des avantages comparatifs en termes d’accumulation de capitaux, l’exposition des actifs économiques aux séismes, aux tsunamis, aux ondes de tempête, aux inondations et aux autres aléas ne peut que continuer d’augmenter. Bien que plusieurs pays cherchent aujourd’hui à intégrer les risques de catastrophe dans la planification des investissements publics, le peu d’informations appropriées sur les risques et les moyens limités au niveau local demeurent des contraintes importantes. Par ailleurs, étant donnée l’interconnexion croissante des systèmes urbains, des chaînes d’approvisionnement mondiales et des flux financiers, les risques de catastrophe deviendront toujours plus systémiques.

10.1

Avantages comparatifs ou coûts prévisibles ?

Les risques de catastrophe sont rarement clairement portés à la connaissance des investisseurs et ne sont fréquemment découverts que lorsqu’une catastrophe survient. Ces risques affectent non seulement les grandes entreprises, mais également les économies nationales qui reçoivent les investissements, les petites et moyennes entreprises et la force de travail. Les avantages comparatifs offerts aux investisseurs vont donc de pair avec des coûts prévisibles cachés. La Slough Trading Company Limited a été fondée en 1920. En 1925, elle créa l’un des premiers parcs immobiliers industriels du monde dans la périphérie ouest de Londres au Royaume-Uni. Figure 10.1 Façade art déco des bureaux de Berlei au sein du parc Slough Trading Estate (aujourd’hui démolie)

[Source : http://modernism-in-metroland.tumblr.com/ost/46923045449 (consultation le 11 janvier 2015).]

210

Partie III - Chapitre 10

En fournissant des bâtiments industriels prêts à l’emploi dotés de bureaux de style art déco côté rue, de connexions ferroviaires réservées et de leur propre centrale électrique, cette société a rapidement attiré les investissements des entreprises. En 1932, des sociétés de premier plan telles que Citroën, Gillette, Johnson & Johnson, Mars et Berlei s’étaient installées dans ce parc industriel, qui accueille aujourd’hui 400 entreprises issues d’un large éventail de secteurs, notamment l’automobile, la transformation alimentaire, l’ingénierie, les biotechnologies, les produits pharmaceutiques, la logistique, les technologies de l’information et les télécommunications. Quatrevingt-dix ans après sa création, ce parc industriel demeure le plus important d’Europe appartenant à une seule société1. À bien des égards, le parc Slough Trading Estate a marqué l’entrée dans une ère de développement économique et territorial totalement libre et flexible spatialement, débarrassé des contraintes liées à l’emplacement et la disponibilité des matières premières, de l’énergie (en particulier du charbon), des services de transport maritime et fluvial et de la main-d’œuvre. Ce parc industriel préfigurait un modèle d’accumulation flexible (Harvey, 1989) dans lequel les investissements étaient attirés vers des sites offrant la combinaison de différents avantages objectifs, par exemple des espaces industriels prêts à l’emploi dotés d’infrastructures énergétiques et de communication spécifiquement construites à leur intention, d’un accès aux marchés, d’une importante main-


d’œuvre qualifiée ainsi que d’autres qualités intangibles, notamment en termes d’esthétique. Le design art déco qui caractérisait de nombreux bâtiments industriels et résidentiels du parc Slough Trading Estate dans l’entre-deux-guerres projetait clairement une image résolue de modernité qui, il y a 90 ans, collait parfaitement à l’esprit de ce modèle émergent de développement économique. Dans l’économie mondialisée actuelle, les pays et les villes de toutes les régions se font concurrence pour attirer les investissements directs étrangers (IDE) à travers le même mélange d’avantages objectifs, notamment une maind’œuvre bon marché, l’accès aux marchés à l’exportation, des infrastructures subventionnées et des avantages intangibles tels que la qualité de vie et les loisirs. Comme l’a souligné le Bilan mondial 2013 (UNISDR, 2013a), le niveau des risques de catastrophe auxquels ces sites sont exposés est toutefois rarement clairement porté à la connaissance des investisseurs et fréquemment négligé dans le cadre des investissements publics visant à créer les infrastructures nécessaires ou dans le cadre des investissements privés qui s’ensuivent. Étant donné que les investissements privés sont majoritaires, la manière dont ils sont réglementés, favorisés et suivis a un impact important sur les risques de catastrophe liés à l’exposition croissante des actifs économiques aux aléas (UNISDR, 2013a). De nombreux sites qui sont parvenus à attirer d’importants investissements, par exemple Miami (Encadré 10.1), se trouvent dans des régions soumises à des aléas. Alors que l’architecture art déco du parc Slough Trading Estate a été largement ignorée et n’a pas été appréciée à sa juste valeur3, elle a par contre été mise en avant à Miami afin de projeter un mode de vie empreint de tranquillité et d’attirer les investissements. Étant donné que l’impératif de gagner quelques dollars de plus l’emporte fréquemment sur les considérations de durabilité, les risques de catastrophe intensifs ne cessent de croître.

Ce modèle de développement économique et territorial augmente l’exposition des capitaux et des flux économiques mondiaux aux aléas tels que les séismes, les tsunamis, les inondations et les cyclones tropicaux. Les risques de catastrophe qui en résultent ne sont toutefois souvent découverts par les investisseurs que lorsqu’une catastrophe majeure survient, comme l’ont appris à leurs dépens Toyota, Honda, Nissan, Texas Instruments et Hewlett-Packard à la suite des inondations survenues en 2011 en Thaïlande (Airmic Technical, 2013). Les risques n’affectent toutefois pas que les entreprises. Ils ont également un impact sur les économies nationales qui reçoivent les investissements (en particulier lorsqu’il s’agit de petites économies peu diversifiées telles que celles des PEID), le secteur des petites et moyennes entreprises qui est au service des grandes entreprises, ainsi que la main-d’œuvre qui peut être affectée directement ou indirectement (UNISDR, 2013a). Dans les régions attractives, mais soumises à des aléas, les avantages comparatifs offerts aux investisseurs vont de pair avec des coûts prévisibles cachés. Des risques mal évalués Tout risque offre des opportunités et des gains tout en menaçant dans le même temps d’engendrer des pertes et des impacts négatifs. L’évaluation des risques de catastrophe, et par conséquent leur valorisation dans le cadre des décisions, est toujours le reflet d’un arbitrage entre les opportunités et les menaces basé sur les informations disponibles ainsi que sur des normes et des règles mises en place par les sociétés pour exploiter les gains réalisés ou payer les coûts engendrés. À ce titre, il existe une grande différence entre ceux qui supportent volontairement les risques dans leur quête d’opportunités et ceux qui sont involontairement contraints de les supporter. Actuellement, l’absence de mise en cause de la responsabilité dans la plupart des sociétés lorsque des risques sont générés soit par négligence soit de façon délibérée signifie que le lien 211


Encadré 10.1 Risque d’élévation du niveau de l’océan et investissements à Miami

À Miami, l’élévation du niveau de l’océan et les ondes de tempête régulières se combinent à une géologie exceptionnelle et à un réseau d’assainissement insuffisant, ce qui conduit à des inondations récurrentes dans certaines parties de la ville et à la pollution des réserves en eau potable. À l’avenir, l’élévation du niveau de l’océan, qui devrait selon les estimations atteindre environ 60 cm d’ici à 2060 (WRI, 2014 ; Figure 10.2), va engendrer la disparition de certaines parties de l’un des ports de croisière les plus courus du monde ainsi que du front de mer de la ville et de son parc immobilier haut de gamme (Carter et al., 2014 ; WRI, 2014). Figure 10.2 Élévation du niveau de l’océan à Miami Impact des inondations après une élévation du niveau de l'océan d'environ 60 cm

Niveau actuel de l'océan

Miami Beach

Zones inondées

Hauteur maximale : 609

Hauteur minimale : 0 Centimètres

(Source : Peter Harlem, Florida International University.)

est rarement établi entre ces risques et les décisions qui leur ont donné naissance. Dans le même temps, cette absence de responsabilité constitue une incitation perverse au maintien de ces comportements générateurs de risques. En effet, ceux qui tirent profit de ces risques en supportent rarement les coûts. Ce sont d’autres secteurs de la société et territoires qui sont contraints de 212

Partie III - Chapitre 10

supporter ces coûts, de même que le patrimoine naturel où, comme le souligne le chapitre 12, ils s’accumulent pour former une dette laissée en souffrance que ni la planète ni la société mondiale ne peuvent continuer à absorber. Il manque également des éléments de preuve. À l’heure actuelle, la gestion des risques de catas-


Les ondes de tempête telles que celle survenue durant l’ouragan Wilma en 2005 vont vraisemblablement se faire plus fréquentes. Pour une élévation du niveau de l’océan de seulement 30 centimètres le long de la côte du comté de Miami-Dade, la probabilité d’une onde de tempête d’environ 2,1 mètres telle que celle observée durant l’ouragan Wilma devrait passer de 1 sur 76 ans à 1 sur 21 ans (WRI, 2014). Les nouveaux développements industriels et résidentiels n’ont pourtant aucun mal à trouver des investisseurs ainsi que le soutien politique et réglementaire nécessaire (Bunten et Khan, 2014 ; Goodell, 2013). En outre, une centrale nucléaire vieillissante située au sud de Miami et construite en 1972 alors que les effets du changement climatique n’étaient pas aussi bien compris qu’aujourd’hui risque d’être affectée par une élévation du niveau de l’océan de seulement quelques centimètres au cours des années à venir (Figure 10.3). La construction de deux nouveaux réacteurs a pourtant été défendue par le gouverneur de Floride pas plus tard qu’en mai 20142 et est en cours d’examen par le Sénat malgré le fait que cette centrale a déjà été touchée par des phénomènes météorologiques, particulièrement durant l’ouragan Andrew en 1992 (Kopytko et Perkins, 2011 ; US Nuclear Regulatory Commission, 1994). Figure 10.3 Centrale nucléaire de Turkey Point menacée par l’élévation du niveau de l’océan à Miami Impact des inondations après une élévation du niveau de l'océan d'environ 60 cm

Niveau actuel de l'océan

Centrale nucléaire de Turkey Point

Zones inondées

(Source : Peter Harlem, Florida International University.)

trophe doit reposer encore beaucoup sur des éléments anecdotiques et des indicateurs approximatifs afin de démontrer ses avantages en termes économiques, politiques et sociaux pour la croissance économique, le bien-être humain et social et le développement durable. Dans le même temps, le coût des risques quotidiens et extensifs supportés par les ménages à faibles revenus et les

petites entreprises est encore plus mal compris que celui des risques intensifs. En conséquence, les risques de catastrophe demeurent mal évalués à tous les niveaux : par les propriétaires de petites entreprises, par les ménages à faibles revenus et les autorités locales ainsi que par les grandes entreprises, les investisseurs, les collectivités à revenus élevés et les gouvernements nationaux. 213


Une trop grande négligence des risques D’une manière générale, les opportunités d’accumulation de capitaux à court terme continuent de l’emporter sur la considération de la durabilité, ce qui engendre une négligence généralisée de tous les risques futurs, notamment des risques de catastrophe. L’évaluation inadéquate des risques de catastrophe et des externalités plus larges liées à l’activité économique signifie que les risques de catastrophe sont minimisés afin de maximiser les gains à court terme (UNISDRa, 2013). Par ailleurs, il n’existe aucun mécanisme de responsabilisation vis-à-vis des investissements qui génèrent des risques de catastrophe et sont réalisés par les gestionnaires d’importants fonds, de banques, d’entreprises et de compagnies d’assurance, de plus en plus souvent en coopération avec les autorités locales et les gouvernements nationaux (Ibid.). Lorsque les mesures de gestion des risques (notamment les réglementations et les investissements publics) sont appliquées de manière incohérente, elles peuvent également être contreproductives (Burby, 2006 ; Bagstad et al., 2007). Certaines politiques locales ou nationales visant à attirer les investissements et à stimuler la croissance économique génèrent de nouveaux risques ou accroissent les risques existants, et vont ainsi directement à l’encontre des politiques de réduction des risques de catastrophe compromettant de ce fait une gestion efficace des risques, ou inversement (UNISDR, 2013a ; Stehr, 2006 ; Berke et al., 2014 ; Burby et al., 1999). À bien des égards, les éléments qui incitent le secteur financier à mal évaluer les risques de catastrophe ou d’autres externalités l’emportent sur les éléments qui pourraient l’inciter à ne pas le faire. Dans ce secteur, la rentabilité repose sur la volatilité, tandis que la stabilité et la sécurité rendent plus difficile la génération de gains à court terme (UNISDR, 2013a). En d’autres termes, la manière dont le secteur contribue à l’accumulation des risques découle de sa nature même. 214

Partie III - Chapitre 10

Ce cercle vicieux est aggravé par le fait que les mesures actuelles de réussite tant pour les acteurs privés que pour les gouvernements sont incompatibles avec des objectifs tels que l’équité et la biocapacité. Aussi longtemps que le profit et le rendement à court terme des investissements constituent des indicateurs clés de performance, les risques générés ailleurs dans la société par des investissements à haut rendement seront ignorés ou minimisés. Si la principale mesure du succès est la croissance du PIB, les questions d’équité sociale ou le fossé croissant entre l’empreinte écologique et la biocapacité sont relégués au second plan. Cette quête de croissance économique fausse fréquemment les priorités, en canalisant l’attention des gouvernements sur le service de la dette plutôt que sur le service au citoyen. Fin 2010, la dette publique mondiale totalisait 41 000 milliards de dollars américains (PNUE et Global Footprint Network, 2012), portant gravement atteinte aux notations de crédit de nombreux pays (Ibid.). Cette situation compromet naturellement les dépenses publiques et conduit à une spirale de déresponsabilisation. Éviter les réglementations En outre, les paradis fiscaux et les instruments financiers qui permettent aux particuliers, aux entreprises et aux gouvernements de canaliser des fonds illicites ou de détourner des revenus légaux afin d’éviter le paiement de taxes et d’impôts échappent à la plupart des formes de réglementation. L’ampleur des flux financiers illicites et de la corruption est significative. Le FMI estime que les centres financiers délocalisés où les règles juridiques sont limitées détenaient 5 000 milliards de dollars américains d’actifs et de passifs à la fin 2009, tandis que les actifs et les passifs transfrontaliers combinés des États-Unis, de la France et de l’Allemagne s’élevaient à 8 000 milliards de dollars américains (Gonzalez et Schipke, 2011). D’autres estimations de l’ampleur de l’exploitation financière par les multinationales des centres financiers délocalisés pour la gestion de leurs actifs bancaires et de leurs investissements étrangers


Dans un contexte d’interdépendance économique croissante, la concentration des actifs économiques et des activités dans des zones soumises à des aléas accroît la complexité des risques.

trophes subies dans un secteur ont à présent tendance à se répercuter sur d’autres secteurs et provoquent une cascade d’impacts, une sorte de réaction en chaîne. La concentration des actifs économiques et des activités dans des zones soumises à des aléas va de pair avec l’interdépendance économique croissante, la complexité des chaînes de valeur et par conséquent la complexification des risques. L’intégration mondiale des chaînes de valeur et d’approvisionnement signifie que des catastrophes relativement localisées peuvent avoir des répercussions au-delà des frontières d’un pays sur les marchés régionaux et mondiaux, créant ainsi de nouveaux risques et renforçant la vulnérabilité d’autres économies nationales face aux interruptions d’activité et à la volatilité (UNISDR, 2013a). Par exemple, après le grand séisme de l’est du Japon, Merck a dû interrompre la production dans sa seule usine fabriquant le pigment Xirallic utilisé dans les peintures automobiles (SCOR, 2013), avec des répercussions à travers les chaînes d’approvisionnement pour le secteur automobile d’autres régions.

Dans le même temps, l’interdépendance des économies mondiales augmente et se complexifie. C’est pourquoi les pertes dues à des catas-

Cette complexité et cette interdépendance des risques ont été définies par différentes notions, par exemple celles d’hyper-risques (Beck, 2009 ;

atteignent pas moins de 18 000 milliards de dollars américains, ce qui est plus ou moins équivalent au quart du PIB mondial (Shaxson, 2012). Les données récentes montrent que les flux financiers illicites atteignent des niveaux significatifs dans plusieurs pays (Figure 10.4). En mars 2014, la 130e Assemblée de l’Union interparlementaire a adopté à l’unanimité une résolution pour un développement résilient face aux risques qui appelle explicitement les parlementaires à « faire de la lutte contre la corruption et les flux financiers illicites une priorité, ces pratiques nuisant considérablement à la mobilisation et à la bonne affectation des ressources4 ».

10.2

Risques en cascade

Figure 10.4 Flux financiers illicites en pourcentage de la consommation

Pourcentage de la consommation > 16 14-16 12-14 10-12 7-10 5-7 3-5 1-3 <1 Aucune donnée

(Source : GFI, 2014.)

215


Ray-Bennett et al., 2014), d’effets en cascade (McGee et al., 2014), de défaillances en en cascade (Buzna et al., 2007), de catastrophes en cascade (Haavisto et al., 2013) et de défaillances synchrones (Kent, 2011). Ces termes sont habituellement employés lorsque des infrastructures et des systèmes sensibles cessent de fonctionner pendant les catastrophes : ils expriment le fait que les préjudices directs subis par les actifs matériels créent des pertes supplémentaires et des impacts en aval, et déclenchent le cas échéant d’autres pertes directes à travers de nouvelles catastrophes. Habituellement, ces systèmes cessent de fonctionner pour toute une série de secteurs et de régions et pour des durées variables, posant des défis majeurs au secteur de la réduction des risques de catastrophe (OCDE, 2014a). L’évolution rapide des technologies de l’information et de la communication, qui constitue un facteur clé de compétitivité (Morris, 2010 ; Acemoglu et Robinson, 2012 ; WEF, 2013), est également devenue un facteur de concentration sociale et territoriale de l’activité économique ainsi que des risques. Par exemple, 95 % de la capitalisation du marché mondial des actions se concentrent dans seulement 24 villes, ce qui rend le secteur des services financiers potentiellement plus vulnérable que d’autres secteurs moins concentrés (Dobbs et Reemes, 2012). Bien que ce secteur soit moins dépendant des infrastructures de transport telles que les ports et les autoroutes, il est hautement vulnérable aux interruptions dans la fourniture d’énergie, pour les transactions électroniques, le fonctionnement des serveurs et la transmission des données. Face à ce risque, la société d’investissement Black Rock, dont la plate-forme gère plus de 13 000 milliards de dollars américains d’actifs, a mis en place de multiples redondances au niveau des serveurs, des systèmes de refroidissement et des systèmes d’alimentation, pour être capable de basculer les services et les activités de la côte Est à la côte Ouest des États-Unis en cas de catastrophe5. 216

Partie III - Chapitre 10

10.3

Prise en compte des risques pour les investissements publics et privés dans le CAH

La manière dont les différents pays ont pris en compte le niveau d’exposition croissant dans le cadre du CAH n’a pas été évaluée à l’aide d’indicateurs de résultat cohérents à l’échelle mondiale. Par conséquent, les progrès réalisés sont mal compris et la plupart des innovations semblent largement extérieures au secteur de la gestion des risques de catastrophe. Bien que le CAH n’aborde pas explicitement le défi posé par l’augmentation de l’exposition provoquée par la concentration économique et la création de valeur dans des régions soumises à des aléas, la priorité d’action n° 4 suggère une série d’activités principales qui se rapportent indirectement à la gestion des risques dans les secteurs productifs et la planification du développement économique, notamment à travers la protection des infrastructures et des partenariats publicprivé (Encadré 10.2). Comme dans d’autres domaines, l’absence d’indicateurs de résultat cohérents rend difficile l’évaluation systématique des progrès réalisés par rapport à ces activités principales : les rares innovations observées sont largement externes au secteur de la gestion des risques de catastrophe et n’ont pas été identifiées dans les rapports d’avancement établis dans le cadre du CAH. Infrastructures et installations sensibles Il est difficile de trouver des données concernant les progrès réalisés dans la conception et la construction des infrastructures et des installations sensibles de manière à réduire les risques de catastrophe. Les grands projets d’infrastructure intègrent normalement des spécifications de résistance aux aléas à leur conception et leur construction. Comme le Japon l’a toutefois découvert à ses dépens à la suite du grand séisme et tsunami de l’est du Japon, ces spécifications peuvent ne pas


Encadré 10.2 Activités principales liées au développement économique dans le CAH

(ii) Pratiques en matière de développement social et économique (f) Protéger et améliorer les équipements collectifs et les infrastructures matérielles essentiels [...] par une conception adaptée, une remise à niveau ou des travaux de reconstruction afin de les rendre suffisamment résilients face aux aléas. (iii) Aménagement du territoire et autres mesures techniques (o) Prendre systématiquement en compte les risques de catastrophe dans les procédures de planification des grands projets d’infrastructure, et notamment les inclure parmi les critères de conception, d’approbation et d’exécution et les éléments pris en considération sur la base des études d’impact social, économique et environnemental. (CAH, 2015)

suffire à garantir la protection contre les catastrophes les plus graves. Les codes de construction et de sécurité peuvent de cette façon créer un faux sentiment de sécurité et encourager en fait des investissements accrus dans des zones soumises à des aléas, contribuant ainsi à augmenter les risques intensifs (Hallegatte et al., 2010). Les progrès signalés par les gouvernements dans l’évaluation des risques de catastrophe associés à des projets immobiliers majeurs, en particulier les investissements d’infrastructure de grande envergure, indiquent des réussites limitées dans ce domaine (Figure 10.5). Figure 10.5 Progrès dans l’évaluation de l’impact des grands projets de développement en termes de risques de catastrophe Niveau des progrès [1 à 5]

Niveau moyen des progrès au cours du CAH

3,4 3,3 3,2 3,1 3 2,9 2,8 2,7

2007-09

2009-11

2011-13

Cycle d'évaluation des progrès du CAH (Source : UNISDR, données de l’outil HFA Monitor.)

Bien que les grands projets d’infrastructure confiés à des entreprises de construction multinationales soient susceptibles d’être réalisés en

conformité avec les normes de résistance aux aléas, les dégâts croissants causés aux habitations, aux infrastructures locales, aux écoles et aux structures médicales par les catastrophes extensives montrent que dans la pratique, les autorités responsables de l’aménagement du territoire et des normes de construction de nombreux pays à faible revenu et à revenu intermédiaire n’appliquent pas les politiques et les normes (UNISDR, 2013a). De nombreux rapports d’avancement nationaux établis dans le cadre du CAH soulignent la nécessité de revoir régulièrement et d’améliorer les codes et les standards de résistance aux aléas. Le Bangladesh signale un manque de compétences et de ressources humaines pour contrôler la conformité et imposer le respect des normes, tandis que l’Argentine indique que la spéculation immobilière et la corruption découragent le respect des normes. Le Népal souligne quant à lui que les règles obligatoires définies au niveau national ne donnent pas toujours lieu à l’adoption effective de codes au niveau local. Les pays latino-américains tels que le Pérou, le Costa Rica, le Guatemala et le Panama ont consenti des efforts soutenus afin d’inclure les risques de catastrophe comme critère dans la planification et l’évaluation des projets d’investissement publics (Lavell, 2014 ; GIZ, 2012 ; UNISDR, 2011a). Même si ces processus sont confrontés à des difficultés telles que la disponibilité restreinte d’informations appropriées sur les risques et les moyens limités au niveau local, ils constituent clairement des initiatives innovantes afin de 217


prendre systématiquement les risques en compte dans le cadre de la construction des infrastructures et des installations publiques. Dans certains secteurs, des progrès semblent avoir été réalisés. Par exemple, 77 pays signalent la mise en œuvre d’actions de sécurisation des hôpitaux et d’amélioration de leur préparation aux situations d’urgence et aux catastrophes. Plus de 50 des 195 États membres de l’OMS sur le continent américain, en Asie du Sud-Est, en Asie centrale, dans la région de la Méditerranée orientale et en Europe ont mis en œuvre des actions dans le cadre de l’initiative Safe Hospitals, et un grand nombre d’entre eux ont adopté des règles et des programmes de sécurisation des hôpitaux6. Vingt pays ont officiellement adopté une politique nationale de sécurisation des hôpitaux et 17 ont officiellement mis en place des programmes nationaux à cette fin. Fin 2012, 32 pays du continent américain avaient déjà adopté l’initiative Safe Hospitals et avaient commencé l’évaluation de leurs hôpitaux à l’aide de l’Index de sûreté des hôpitaux (HSI). En avril 2013, l’OMS signalait que plus de 1 800 hôpitaux avaient été évalués à l’aide de cet outil.

Dans de nombreux pays, des investissements sont également consentis afin de renforcer ou de moderniser des infrastructures sensibles, de réduire les risques de catastrophe et d’augmenter les budgets destinés à cette fin (Encadré 10.3). Différents exemples ont démontré que les investissements dans la réduction des risques de catastrophe peuvent réduire les pertes subies à l’issue de catastrophes majeures, en particulier dans les pays qui ont la capacité financière de consentir ces investissements. Dans plusieurs pays, des éléments indiquent également des investissements majeurs dans la modernisation d’installations sensibles, par exemple des écoles, sur la base d’évaluations des aléas et des risques et dans le contexte de projets bénéficiant d’un soutien international (Encadré 10.4). Par ailleurs, des pays tels que le Japon abordent désormais la gestion des risques de catastrophe selon les différentes strates de risque afin d’éclairer les décisions sur le développement côtier (Encadré 10.5).

Encadré 10.3  Investissements dans la réduction des risques en Allemagne et au Mexique

En termes hydrologiques, les inondations survenues en 2013 en Allemagne ont été encore plus sévères que celles observées en 2002 (Merz et al., 2014). Toutefois, dans certaines villes, la construction de protections contre les inondations a joué un rôle essentiel dans la réduction des pertes. En 2002, Dresde et les régions avoisinantes qui longent l’Elbe ont subi des pertes atteignant près de 300 millions de dollars américains pour les seuls bâtiments résidentiels (Thieken, 2009). À l’issue de la catastrophe, les autorités de Dresde ont développé des cartes des aléas pour les inondations d’une période de retour de 20 et 100 ans, ont adopté des mesures de protection contre les inondations d’une période de retour de 500 ans et ont étendu les plaines inondables. En conséquence, la ville est parvenue à éviter de lourdes pertes lors des inondations du printemps 2013. « Les volumes d’eau ont été gérés grâce à la combinaison de différentes installations qui protègent le centre historique de la ville » (Zurich Insurance, 2014), ce qui fait de cette ville un bon exemple de gestion des risques de catastrophe. Des investissements majeurs ont été réalisés dans la réduction des risques d’inondation dans l’État de Tabasco, au Mexique, après des inondations dévastatrices en 2007. C’est ainsi que les inondations d’une ampleur similaire survenues en 2010 n’ont endommagé et détruit qu’un quart du nombre des habitations touchées en 2007. Le coût total estimé des dommages et pertes a été réduit de plus de 2,8 milliards de dollars américains en 2007 à seulement 569 millions de dollars américains en 2010. Il s’agit d’une réduction équivalente à 7,8 % du PIB de cet État mexicain7.

218

Partie III - Chapitre 10


Encadré 10.4 Application d’évaluations des risques sismiques pour la modernisation d’infrastructures publiques à Istanbul

Une série d’évaluations des aléas et des risques, notamment une étude de microzonage des aléas sismiques et une évaluation des risques menées par la municipalité d’Istanbul en coopération avec l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA) a permis d’éclairer les investissements dans la réduction des risques sismiques à Istanbul. Ces évaluations ont été menées à la suite des séismes dévastateurs d’Izmit-Kocaeli et de Düzce en 1999, qui ont coûté la vie à plus de 17 000 personnes et occasionné environ 20 millions de dollars américains de pertes directes. Cette initiative bénéficiait par conséquent pleinement du soutien des autorités municipales et du public. Les résultats de ces évaluations ont été intégrés au plan directeur urbanistique de la ville pour la gestion des risques de catastrophe et appliqués dans le cadre du projet d’atténuation des risques sismiques et de préparation aux situations d’urgence d’Istanbul (ISMEP). Lancé en 2006, ce projet couvre une période de 14 ans et est doté d’un budget de 1,5 milliard d’euros. En 2014, un total de 1 162 bâtiments publics, dont 726 écoles, 39 hôpitaux (Figure 10.6), 59 centres médicaux et 80 autres installations publiques identifiées comme prioritaires, ont été rénovés ou modernisés et 218 écoles considérées impropres à la modernisation (sur la base d’analyses coûts-avantages) ont été reconstruites8. Figure 10.6 Modèle structurel du projet de modernisation, de L’ISMEP et son évolution au fil du temps montrent restauration et de renforcement de l’hôpital de for- comment les évaluations des aléas et des risques mation et de recherche de l’université de Marmara à peuvent aider une municipalité à comprendre la finaliser en 2014

(Source : municipalité d’Istanbul9.)

Investissements commerciaux raisonnés en fonction des risques Le rôle du secteur privé tant dans la création des risques de catastrophe que dans leur gestion n’a jamais été pleinement explicité par le CAH. Toutefois, dans le cadre de la priorité d’action n° 4, le CAH prévoyait une activité principale liée au secteur privé : (l) Favoriser l’instauration de partenariats entre le secteur public et le secteur privé afin de faire participer plus activement ce dernier aux activités de réduction des risques de catastrophe ; encourager le secteur privé à promouvoir une culture de la prévention des catastrophes en s’intéressant davantage aux activités à entreprendre en prévision des catastrophes, par exemple, aux évaluations des risques et aux sys-

gravité des risques et susciter des actions de réduction des risques sur le terrain. Les risques sismiques continuent toutefois d’augmenter à Istanbul en raison des nouvelles constructions qui répondent à la croissance de la population et aux migrations internes, et des difficultés rencontrées afin de faire respecter les plans d’aménagement du territoire et les règles de construction (GFDRR, 2014c). La modernisation des structures existantes ne résout pas le problème des nouveaux risques créés au quotidien par l’urbanisation.

tèmes d’alerte précoce, et en y consacrant des ressources. (CAH, 2005) Malheureusement, cette activité n’était pas reprise dans les indicateurs de base, ce qui signifie que sa réalisation n’a pas été évaluée par l’outil HFA Monitor. Il ressort toutefois clairement des rapports d’avancement établis dans le cadre du CAH que les entreprises, les investisseurs et les assureurs n’ont pas reçu un rôle clair et explicite dans le secteur de la réduction des risques de catastrophe au niveau national (UNISDR, 2013b). Très peu de programmes nationaux plurisectoriels ou de comités ont une représentation du secteur privé. Des éléments indiquant que les entreprises privées et les investisseurs prennent bien les risques 219


Sendai City Encadré 10.5 Stratégies de gestion des risques de catastrophe en fonction des différentes strates de risque

Le grand séisme de l’est du Japon en mars 2011 était un aléa d’une ampleur sans précédent. Il a atteint une magnitude de 9,0 et le tsunami qu’il a déclenché a affecté d’importantes zones de la région de T ho u.  vant cet événement, les évaluations des risques dans cette région reposaient  sur des données historiques limitées concernant les séismes et les tsunamis et ne pouvaient donc prévoir l’intensité du séisme ni la hauteur et l’ampleur du tsunami. Les vagues de ce dernier ont inondé des zones supposées être protégées par des digues et en plusieurs endroits un faux sentiment de sécurité créé par les cartes d’aléas a empêché une évacuation et une intervention dans les temps. L’échec des stratégies de réduction des risques mises en place à T ho u a donné lieu à la formation d’un comité  technique au sein du Conseil central de gestion des catastrophes. Un rapport établi par ce comité en septembre 2011 a introduit une approche de la gestion des risques de tsunami fondée sur des strates de risque (Gouvernement du Japon, 2011), qui a rapidement été traduite dans une loi, le Tsunami DRR Regional Development Act de décembre 201110. Cette loi est déjà appliquée dans plusieurs régions, notamment la ville de Sendai (Figure 10.7). Figure 10.7 Stratégie de préparation et d’intervention en cas de tsunami de la ville de Sendai Réinstallation

Protection contre un tsunami de niveau 2 (niveau maximal)

Évacuation Protection

Intérieur des terres

Protection contre un tsunami de niveau 1 (tsunami d'une période de retour maximale de 1 sur 100 ans

Réinstallation à l'intérieur des terres

Élévation de la route Est de Sendai

Élévation de la route de la préfecture

Site d'évacuation

Parc situé sur une colline pour l'évacuation

Forêt de protection Digue

Itinéraire d'évacuation

Plage Canal

Mer

[Source : ville de Sendai, 2014 (adaptation par l’UNISDR).]

La stratégie de niveau 1 de gestion des tsunamis vise la strate de risque la plus extensive (probabilité élevée et pertes potentielles faibles) tandis que la stratégie de niveau 2 est conçue pour les strates de risque intensives (probabilité faible et pertes potentielles élevées). Le niveau 1 se concentre sur les mesures structurelles, par exemple les digues et la protection par les forêts, tandis que le niveau 2 combine des mesures structurelles avec d’autres stratégies de gestion des risques, avec comme fondement la planification de l’évacuation (Tableau 10.1). Tableau 10.1 Stratégies de niveaux 1 et 2 de gestion des tsunamis Intensité

Tsunami de niveau 1

Période de retour de 10 100 ans

Objectifs

Moyens de mise en œuvre

· Protéger les vies humaines

· Mesures structurelles telles que murs de protection marins et digues

· Protéger les actifs et les activités économiques · Protéger les vies humaines

Tsunami de niveau 2

Période de retour de 100 1 000 ans

· Réduire les pertes économiques · Éviter les impacts en cascade · Améliorer la résilience

[Source : Gouvernement du Japon, 2011 (adaptation par l’UNISDR).]

220

Partie III - Chapitre 10

· Mesures structurelles telles que murs de protection marins et digues

· Planifier l'évacuation


de catastrophe en compte lorsqu’ils décident où investir apparaissent à présent, en particulier après les catastrophes qui ont frappé le Japon et la Thaïlande en 2011 (UNISDR, 2013a ; Ingirige et al., 2014). Risk sensitive business

Au niveau international, ce n’est qu’en 2010 que le Groupe consultatif du secteur privé pour la réduction des risques de catastrophe a été créé11, et ce n’est qu’encore plus récemment que des initiatives visant à faciliter des investissements commerciaux raisonnés en fonction des risques ou l’enregistrement des risques de catastrophe dans le secteur financier ont commencé à apparaître13. Ces initiatives, et d’autres, montrent à présent que le secteur privé craint de plus en plus que l’augmentation des risques de catastrophe menace la durabilité de leurs investissements. Risk and investment

Bien que l’Assemblée générale de l’ONU ait dès 1999 demandé un renforcement des interventions face aux situations d’urgence complexes 14, le CAH a fourni peu de consignes et a accordé peu d’attention à la question des risques complexes et émergents. Une seule activité principale relevant de la priorité d’action n° 2 faisait référence à cet élément :

dans ce domaine n’ont pu être évalués. Afin d’élaborer des stratégies, certains pays commencent à présent à réaliser des exercices afin d’identifier les risques émergents qui n’ont pas été modélisés (Kent, 2011). Par exemple, le Royaume-Uni utilise la méthodologie du pire scénario raisonnablement envisageable pour identifier les risques émergents et les situations potentielles d’urgence à grande échelle, notamment le risque de crise nucléaire similaire à celle de Fukushima Daiichi au Japon en 2011 (Gouvernement du Royaume-Uni, 2011). Cette méthode a été revue en juillet 2014 afin d’identifier les points à améliorer dans le cadre du processus national d’évaluation des risques du Royaume-Uni15. Malgré l’existence de nouvelles approches pour l’identification des risques émergents, ces processus en sont toutefois encore à leurs balbutiements.

10.4

Planifier depuis l’avenir ?

Les facteurs de risque étant très interdépendants, traiter les risques selon une approche spécifique à chaque aléa revient à ignorer une grande part des événements qui ne se sont pas encore produits, mais qui se produiront certainement dans le futur.

(o) Effectuer des travaux de recherche et d’analyse sur les modifications à long terme et les problèmes nouveaux susceptibles d’accroître les facteurs de vulnérabilité et les risques ou la capacité de réaction des autorités et des collectivités face aux catastrophes et communiquer les résultats de ces travaux. (CAH, 2005)

En 2011, le Myanmar a approuvé une loi qui définit des zones économiques spéciales avec des mesures incitatives comprenant une exonération des taxes durant cinq ans, 50 % d’exonération d’impôt durant cinq ans pour les produits exportés à l’étranger et les bénéfices réinvestis des exportations étrangères, une exonération de cinq ans pour les droits de douane sur une série de produits approuvés, et l’octroi d’un bail de 30 ans pour la location d’un terrain.

Les indicateurs de base du CAH ne faisaient pas référence à des risques émergents, à long terme ou complexes, ce qui signifie que les progrès réalisés

Les PAM du Myanmar s’élèvent à 2 milliards de dollars américains et sont principalement associées à des cyclones tropicaux, des inondations 221


et des séismes. En 2008, le cyclone tropical Nargis a largement dévasté les zones proches de la future zone économique spéciale de Thilawa (Figure 10.8), qui doit accueillir des entreprises du secteur du textile, de la production manufacturière et des hautes technologies, ainsi qu’un port de haute mer. Figure 10.8 Emplacement de la zone économique spéciale de Thilawa ARUNACHAL PRADESH

Mé k ong

utre Brahmapo

Ga n g e

INDE

n

zi

Tracé indien Tracé chinois

Myitkyina

Y ag

CHINE BHOUTAN THIMPHOU

CHINE

BANGLADESH

Xi

S alo ue n

Haka

Irrawaddy

DACCA

Sagaing

Golfe du B e n g a l e Sittwe

Magway

VIET NAM

Taunggyi Loikaw

Kyaukpyu

ng

Jia

NAYPYIDAW

R É P. D É M . P O P. L A O VIENTIANE

Pathein

Pégou Rangoun

Pa-an

Thilawa

Moulmein

Mer d' A n d a m a n

Dawei Tavoy

THAÏLANDE

BANGKOK CAMBODGE

INDE

Cyclone tropical Nargis 2 mai 200

0

100

200

Golfe de Thaïlande

Kilomètres

[Source : UNISDR, données de l’UNOCHA, 2013.)

Bien qu’une évaluation d’impact environnemental ait été menée dans le cadre de la planification de cette zone économique spéciale, les risques potentiels de catastrophe pour la zone et pour les entreprises qui investissent ne sont pas explicitement décrits (Myanmar and Japan Consortium for Thilawa Special Economic Zone Development Project, 2013). Il semble que les leçons tirées des inondations du fleuve Chao Phraya en Thaïlande en 2011 n’aient pas été entièrement assimilées par les investisseurs potentiels16. 222

Partie III - Chapitre 10

Si les gouvernements, les entreprises et les investisseurs continuent d’ignorer ou de minimiser les conséquences de l’augmentation continue de l’exposition aux aléas de l’économie mondiale, d’autres chocs similaires à ceux qui ont frappé le Japon et la Thaïlande en 2011 surviendront vraisemblablement à nouveau. Par exemple, si l’économie mondiale connaissait une croissance moyenne de 4 % par an pour les 30 prochaines années et que la distribution des capitaux entre les zones soumises aux aléas et les autres demeure inchangée, le volume des capitaux soumis à des aléas et par conséquent à des risques de catastrophe intensifs aura environ doublé d’ici à 2040. Si les aléas et la vulnérabilité augmentent également en raison du changement climatique et d’autres facteurs, alors les risques pourraient augmenter de manière exponentielle. La plupart des évaluations des risques ont encore tendance à s’appuyer sur des modèles linéaires dont la capacité à identifier et gérer des risques complexes et interdépendants est limitée (OCDE, 2014a). Malgré le caractère interdépendant de nombreux facteurs de risque, ces évaluations gèrent les risques liés à un aléa en particulier en ignorant la façon dont différents facteurs ont une influence les uns sur les autres et comment les impacts d’un aléa peuvent déclencher d’autres impacts liés à un autre aléa (Shimizu et Clark, 2014). Cela signifie ignorer une bonne part des événements qui ne se sont pas encore produits, mais qui se produiront certainement dans le futur. Bien qu’il existe clairement un élan dans le secteur privé mondial en faveur de l’évaluation des risques pour les chaînes d’approvisionnement lors de la prise de décisions d’investissement, il reste à démontrer si ces efforts suffiront à gérer les risques dus à l’exposition croissante des actifs suscitée par la concentration économique et les investissements. Quant à savoir si les pays qui se font concurrence pour attirer les investissements directs étrangers vont commencer à effectivement utiliser la gestion des risques de catas-


trophe comme avantage compétitif plutôt que de cacher les risques aux investisseurs potentiels, la question demeure entière. La tentation de gagner quelques dollars de plus continue souvent de l’emporter sur la planification à long terme et la durabilité dans les zones fortement soumises à des aléas.

Notes 1  http://www.segro.com/Slough/About (consultation le 11 janvier 2015). 2 http://www.world-nuclear-news.org/NN-Turkey-Point-expansion-gets-Florida-state-approval-1405141.html (consultation le 11 janvier 2015). 3 http://www.c20society.org.uk/news/slough-town-hall-listingrefused-dcms-overturns-english-heritages-advice-again (consultation le 11 janvier 2015).

6  Progrès présentés lors de la 4e session de la Plate-forme mondiale pour la réduction des risques de catastrophe http://www. preventionweb.net/globalplatform/2013/programme/sideevent/ view/498. 7  Chiffres tirés d’un exposé de Salvador Pérez Maldonado (Ministère des finances du Mexique) lors de la première session du Comité préparatoire de la Conférence mondiale sur la réduction des risques de catastrophe organisée à Genève en juillet 2014. 8  Communication personnelle et chiffres du Département de suivi et d’évaluation du Gouvernorat d’Istanbul, 26 novembre 2014. 9  Communication personnelle et chiffres de Kazim Gokhan Elgin, directeur du Département de suivi et d’évaluation du Gouvernorat d’Istanbul, 26 novembre 2014. 10 http://www.mlit.go.jp/sogoseisaku/point/tsunamibousai.html. 11 www.unisdr.org/partners/private-sector. 12 www.preventionweb.net/rise/home. 13 www.un.org/climatechange/summit/action-areas/resilience1-in-100-initiative/. 14  Résolution 46/182 de l’Assemblée générale de l’ONU.

4 http://www.ipu.org/conf-e/130/Res-2.htm.

15  Pour en savoir plus sur le processus national d’évaluation des risques au Royaume-Uni, voir https://www.gov.uk/risk-assessmenthow-the-risk-of-emergencies-in-the-uk-is-assessed (consultation le 11 janvier 2015).

5 http://www.datacenterdynamics.com/focus/archive/2014/03/ blackrock-measuring-risk-data-center (consultation le 11 janvier 2015).

16 http://myanmarthilawa.com/content/three-japanese-industrial-biggies-will-launch-special-economic-zone-myanmar (consultation le 11 janvier 2015).

223



Chapitre 11

En zone urbaine : des risques de catastrophe marqués par la ségrégation

225


L’urbanisation est le reflet de la croissance économique : elle conduit fréquemment à la concentration des risques dans des zones soumises à des aléas. Par ailleurs, dans la plupart des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, elle est souvent caractérisée par un accès inégal à l’espace urbain, aux infrastructures, aux services et à la sécurité. Ceci génère de nouvelles formes de risques de catastrophe, aussi bien extensifs qu’intensifs, en particulier pour les établissements informels, où les infrastructures et la protection sociale sont déficientes, voire inexistantes, et où la dégradation de l’environnement est importante. Bien que le CAH ait fait la part belle à des initiatives nationales de développement urbain raisonné en fonction des risques et que des succès aient été remportés, l’expansion rapide des populations urbaines et la faible réglementation des flux d’investissement demeurent des défis importants, en particulier dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire.

11.1

Blade Runner et la ville du futur

Les investissements spéculatifs ciblent les des enclaves urbaines modernes, alors que la population à faibles revenus, largement majoritaire, n’a accès qu’à une urbanisation informelle ou insalubre. La concentration des investissements dans les centres urbains favorise le développement de risques intensifs, tandis que les importantes inégalités de revenus qui existent en milieu urbain déterminent des formes de risques extensifs. Blade Runner est un film de science-fiction néonoir réalisé en 1982, dont l’action se déroule dans un Los Angeles de fiction de 2019. Il dépeint des zones urbaines invivables, où l’élite réside dans des gratte-ciels scintillants tandis que le peuple survit au niveau du sol dans un environnement de décombres toxique, pollué et dangereux. Comme son nom l’indique, la science-fiction est simplement de la fiction. Il est fort peu vraisemblable que la vie à Los Angeles ou dans une quelconque autre grande métropole ressemble, d’ici à 2019, à ce que dépeint le film Blade Runner. La réalité a pourtant tendance à imiter l’art. Les tendances actuelles du développement urbain suggèrent un avenir qui évoque certains éléments du monde imaginé par le film Blade Runner (Figure 11.1). Par exemple, plusieurs grandes villes d’Afrique subsaharienne sont en train d’être réimaginées, 226

Partie III - Chapitre 11

avec pour ambition de devenir de véritables aimants à investissements (Encadré 11.1). Les plans élaborés promettent des villes intelligentes et écologiques. Ils ambitionnent de moderniser les villes africaines et de les transformer en passerelles pour les investissements internationaux. Il est naturellement nécessaire d’attirer les investissements. Il reste toutefois à déterminer si ces plans bénéficieront à la population urbaine des établissements informels, qui vit en dessous du seuil de pauvreté et avec un accès minimal aux services urbains (Watson, 2014). Croissance économique et risques de catastrophe intensifs Croissance économique et urbanisation vont de pair. En règle générale, les pays où le PIB par habitant est le plus élevé sont également ceux Figure 11.1  L’environnement urbain de Los Angeles en 2019 tel qu’imaginé dans le film Blade Runner.

(Source : http://img.4plebs.org/boards/tg/image/1397/22/1397229362415.jpg1.)


Encadré 11.1  L’avenir urbain en Afrique

Au cours des 5 à 6 dernières années, de nouvelles visions du développement urbain ont guidé les plans urbanistiques de plusieurs villes africaines. Les grands projets menés au sein des centres urbains existants2 ou de villes satellites entièrement nouvelles s’inspirent des réalisations urbaines haut de gamme de villes telles que Dubaï, Londres et Singapour, avec une implication significative du secteur privé. Parmi ces développements et centres commerciaux figurent Hope City, un projet immobilier de 10 milliards de dollars américains situé à la périphérie d’Accra au Ghana, ainsi que Tatu City, qui doit être construite sur des terres productrices de café dans la périphérie de Nairobi (Figure 11.2). Ces nouvelles villes hypermodernes permettraient à ceux qui y vivent et y travaillent d’éviter en garde partie les infrastructures dysfonctionnelles, l’insécurité et la pauvreté qui caractérisent de nombreuses zones urbaines existantes, conformément à certaines des idées mises en avant par les défenseurs d’une nouvelle génération de « charter cities »3. À l’heure actuelle, même si ces plans ont suscité l’intérêt des promoteurs immobiliers et des investisseurs, la plupart ont été freinés par des litiges et des procès liés à l’acquisition des terres, au financement et à la réinstallation des populations. Quant à savoir si ces plans bénéficieront à la population urbaine qui vit actuellement dans des établissements informels situés dans des zones recherchées à proximité des centres urbains, la question demeure entière. Figure 11.2  Hope City (Accra) et Tatu City (Nairobi) Hope City, Accra

Tatu City, Nairobi

(Source : Watson, 2014.)

Un scénario plus probable est l’émergence de nouveaux établissements informels à la périphérie des nouvelles villes construites. Les investissements publics affectés à ces nouveaux projets réduiront encore les liquidités disponibles pour la mise en place des infrastructures et services de base, et risquent d’aggraver la ségrégation sociale et spatiale. (Source : Watson, 2014.)

où la proportion la plus élevée de la population vit dans les villes (Satterthwaite et Mitlin, 2014 ; Figure 11.3). Dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, l’urbanisation rapide est généralement associée à une croissance économique tout aussi rapide (GIEC, 2014). Ainsi, la croissance urbaine s’accompagne d’investissements internationaux et accroît la valeur des actifs situés dans des zones soumises à des aléas, telles que les côtes et les bassins versants exposés à des cyclones et des tsunamis. Selon une récente

analyse des risques couvrant 616 grandes métropoles totalisant une population de 1,7 milliard de personnes (soit près de 25 % de la population mondiale) et représentant environ la moitié du PIB mondial, les risques d’inondation menacent davantage de personnes que n’importe quel autre aléa (Swiss Re, 2014b). Les inondations provoquées par les crues des rivières et des fleuves menacent plus de 379 millions de résidents urbains, tandis que les séismes et les vents violents pourraient affecter respectivement 283 millions et 157 millions de personnes (ONU-Habitat, 2014). 227


Figure 11.3 Population urbaine (% du total) et PIB par habitant Pourcentage de population urbaine

RAS de Hong Kong, Chine

100

RAS de Macao, Chine Qatar

Belgique

Venezuela (République bolivarienne du)

Australie

90

R² = 0,364

80

Jordanie

Liban

Luxembourg

Bahreïn

Djibouti

70

Irlande

60

Gambie Libéria

50

Haïti

Nicaragua

Seychelles Kazakhstan

Bénin

Guinée-Bissau

Guinée équatoriale

République centrafricaine Saint-Kitts-et-Nevis

Madagascar

30

Guyana Afghanistan

20

10

Suisse

Autriche

Italie

Sao Tomé-et-Principe

40

Norvège

Allemagne

Malawi Burundi

Îles Salomon

Niger Éthiopie Ouganda

Antigua-et-Barbuda

Tonga

Sri Lanka Sainte-Lucie

Trinité-et-Tobago

Papouasie-Nouvelle-Guinée

1 000

10 000

100 000

1 000 000

PIB par habitant (en dollars américains 2013) (Source : UNISDR, données de la Banque mondiale.)

Des villes entières ou des quartiers de ces dernières sont donc soumis à des aléas intensifs (UNISDR, 2011a ; 2013a). Comme souligné dans le Chapitre 10, les risques de catastrophe sont rarement pris en compte dans les décisions d’investissement, alors que les municipalités peuvent se trouver dépassées face à un développement urbain rapide et se révéler incapables de gérer cette croissance. Par exemple, sur les 611 villes comptant plus de 750 000 habitants en 2010, 47 avaient vu leur population multipliée par 20 depuis 1960. Pour 120 d’entre elles, la population avait plus que décuplé (GIEC, 2014). Dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, de nombreuses municipalités ne contrôlent plus tout à fait le développement urbain (Ibid.). Ségrégation urbaine, inégalités et risques de catastrophe extensifs Les capitaux ont de tout temps afflué vers les villes afin d’assurer la construction des habitations, la mise à disposition des services et des infrastructures nécessaires, et ainsi permettre la 228

Partie III - Chapitre 11

production, la consommation et le fonctionnement des municipalités. Toutefois, le développement urbain est devenu un canal de plus en plus important pour l’accumulation de capitaux ellemême. Depuis les années 1970, le développement urbain a attiré plus de capitaux que n’importe quel autre secteur productif (Harvey, 1985). Le développement urbain spéculatif est par conséquent devenu propice à la création et au transfert des risques de catastrophe (UNISDR, 2013a). L’expansion rapide des zones urbaines crée également ses propres risques, alors que l’environnement et les écosystèmes se dégradent et que la pauvreté et les inégalités donnent naissance à de nouvelles formes de risques extensifs. L’augmentation de la population et de sa densité dans les villes signifie non seulement qu’un plus grand nombre de personnes sont soumises à des aléas, mais également que les caractéristiques des écosystèmes et de l’environnement se trouvent modifiées, ce qui accroît potentiellement les risques de catastrophe (Donner et Rodriguez, 2008).


Par exemple, l’expansion urbaine à faible densité est un mécanisme qui contribue directement ou indirectement à accroître les risques de catastrophe. L’extension des surfaces revêtues et donc imperméables accroît les pics de ruissellement en cas de tempêtes et amplifie par conséquent les risques d’inondation. La plupart des projets immobiliers spéculatifs destinés aux ménages à moyens revenus reproduisent l’aménagement du territoire inefficace des périphéries urbaines (Encadré 11.2), qui gaspille les terres disponibles et l’énergie, et est intenable à long terme. L’expansion des villes risque également d’épuiser des ressources, telles que l’eau, dans les régions avoisinantes et contribue à la dégradation de la biodiversité et des écosystèmes (GIEC, 2014). Enfin, l’expansion tentaculaire des zones urbaines engendre d’importants coûts supplémentaires. Le coût des services publics peut augmenter de 10 % à 30 %, tandis que le coût des transports et des déplacements peut augmenter de 50 % (Global Commission on the Economy and Climate, 2014). La combinaison du développement urbain spéculatif et de la faiblesse des capacités de réglementation abordée dans le Bilan mondial 2013 (UNISDR, 2013a) conduit à une ségrégation sociale et spatiale croissante des risques en milieu urbain, en particulier dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. Ces conditions peuvent contribuer à la prolifération d’autres problèmes, par exemple la criminalité, le chômage élevé chez les jeunes et l’instabilité politique, qui exacerbent tous les vulnérabilités et les tensions sociales. Il en résulte un cercle vicieux générateur de risques (ONU-Habitat, 2014a). Cette problématique revêt différentes formes. Le système de l’apartheid en Afrique du Sud était un cas extrême de ségrégation spatiale à grande échelle cautionné par le gouvernement. Il existe toutefois d’autres cas de ségrégation qui prennent une forme plus subtile. La destruction des favelas par le gouvernement brésilien dans les années 1960 avec le déplacement des habi-

tants vers d’autres ghettos en est un exemple. À plus petite échelle, plus de 2 000 familles à faibles revenus ont été expulsées de zones résidentielles à revenus élevés et moyens à Santiago au Chili entre 1979 et 1985, avec pour objectif officiel de créer des quartiers présentant des profils socioéconomiques uniformes (Greenstein et al., 2000). Aménager le territoire et appliquer des codes de construction qui excluent les ménages à faibles revenus est une façon de faire passer la ségrégation sociale sous couvert de critères urbanistiques apparemment techniques. Par exemple, jusqu’à sa révision au milieu des années 1990, le principal code de construction en vigueur au Kenya maintenait l’application de normes coloniales privilégiant les classes les plus aisées et prêtait trop peu d’attention au caractère plus ou moins abordable des dispositions réglementaires. Jusqu’à l’adoption du « Code 95 », le coût des matériaux de construction classiques était hors de portée des groupes à faibles revenus et vulnérables, qui n’avaient majoritairement pas accès à des crédits sur le logement (ONU-Habitat, 2014a). Plus récemment, la ségrégation volontaire s’est renforcée avec la prolifération d’ensembles résidentiels protégés et la concentration des commerces dans les nouveaux centres commerciaux et d’affaires qui offrent une sécurisation accrue contre la criminalité, mais minimisent également les interactions des résidents avec les autres groupes sociaux d’une ville. Les villes ont toujours été caractérisées par des inégalités. Au milieu du XIXe siècle, Manchester (Engels, 1845) offrait des conditions de vie épouvantables à la majorité de ses habitants, du point de vue des risques quotidiens. Aujourd’hui, la plupart des villes des pays à revenu élevé sont capables de fournir des infrastructures, des services et une protection sociale à leurs résidents de manière à minimiser les risques de catastrophe et à renforcer leur résilience, excepté dans des quartiers particulièrement précarisés tels que Calton (Glasgow). À mesure que les villes deviennent plus 229


Encadré 11.2 Influence de l’aménagement urbain sur la durabilité et les risques d’inondation

Pour tout ensemble de besoins socio-économiques, il existe toujours un aménagement urbain optimal. Différents aménagements urbains présentent des pourcentages très différents d’utilisation du sol et des distances de déplacement unitaires très diverses (Caminos et Goethert, 1978). Ceci influence à la fois le coût initial de l’urbanisation ainsi que sa durabilité. Étant donné que le coût des déplacements et de l’évacuation des eaux pluviales est en principe cinq fois supérieur au coût de l’électricité et de l’éclairage public et 18 fois supérieur au coût de l’approvisionnement en eau, l’adoption d’un aménagement urbain efficace influence directement la capacité d’une municipalité à fournir et à maintenir cet élément fondamental pour des infrastructures propres à réduire les risques d’inondation (Ibid.). Des études ont montré que le coût par hectare des réseaux d’infrastructures, y compris l’évacuation des eaux pluviales dans le cadre de l’aménagement moderne type d’une périphérie urbaine avec parcelles carrées (voir Figure 11.4) est environ égal au double du coût d’un aménagement efficace avec parcelles rectangulaires. De même, la proportion du sol occupée par les routes dans l’aménagement à parcelles carrées est de 38 %, contre 21 % pour l’aménagement à parcelles rectangulaires. Dans l’aménagement à parcelles carrées, les surfaces revêtues imperméables sont donc presque doublées, avec des conséquences importantes pour l’écoulement des eaux de ruissellement. La longueur des routes par hectare dans l’aménagement à parcelles carrées représente approximativement le double de celle observée pour l’aménagement à parcelles rectangulaires, ce qui signifie que les services de livraison ou de collecte des déchets doivent parcourir une distance deux fois plus longue pour obtenir le même résultat, ce qui accroît à la fois les coûts et les émissions de carbone. De plus, le gaspillage des terres réduit les terrains sûrs et bien situés qui pourraient être utilisés pour des habitations destinées aux populations à faibles revenus. Figure 11.4 Aménagements urbains Aménagement à parcelles rectangulaires

Aménagement à parcelles carrées

(Source : Google Earth.)

Ceci signifie qu’un aménagement efficace réduit le coût des terres par habitant, grâce à une meilleure utilisation de celles-ci. Cela réduit également de manière importante le coût de l’installation et de la maintenance des infrastructures, en particulier du réseau d’égouttage, avec un impact important sur la capacité des autorités locales et des fournisseurs de services de mettre de telles infrastructures à disposition. En outre, un aménagement efficace réduit la superficie des zones revêtues imperméables, ce qui atténue les risques d’inondation et raccourcit les distances à parcourir par les véhicules pour la fourniture des différents services de base. Malheureusement, l’influence de l’aménagement urbain sur ces éléments est trop fréquemment ignorée, même dans les pays à faible revenu ce qui augmente les coûts tant pour les résidents que pour les autorités locales, réduit la durabilité, accroît les risques d’inondation et contribue au changement climatique.

230

Partie III - Chapitre 11


riches, des investissements sont réalisés dans des infrastructures et des services qui réduisent les risques extensifs et renforcent la résilience. Engels ne reconnaîtrait certainement pas le Manchester du XXIe siècle. Dans de nombreuses villes, les inégalités se creusent pourtant. Selon les estimations, environ deux tiers de la population urbaine mondiale vivent aujourd’hui dans des villes où les inégalités ont connu une augmentation continue depuis les années 1980 (ONU-Habitat, 2014b). Dans beaucoup de pays à faible revenu, les municipalités ne disposent pas des ressources ou du pouvoir politique nécessaires pour fournir des terres et des infrastructures aux ménages à faibles revenus. C’est pourquoi une grande partie du développement urbain se fait de manière informelle et qu’une proportion variable de la population urbaine (de 30 % dans la plupart des pays à revenu intermédiaire à 90 % dans de nombreux pays à faible revenu) vit dans des logements précaires, sur des sites soumis à des aléas et avec peu ou pas d’accès aux services et aux infrastructures. Ceci accroît significativement les risques supportés par comparaison aux quartiers mieux nantis. La population urbaine vivant dans des établissements informels a augmenté au cours des deux dernières décennies, d’environ 650 millions de personnes en 1990 à plus de 860 millions en 2012 (ONU-Habitat, 2013)4. Cette croissance a lourdement compromis la réalisation de l’objectif du Millénaire pour le développement visant à « Réussir, d’ici à 2020, à améliorer sensiblement la vie d’au moins 100 millions d’habitants de taudis »5. Dans le même temps, les autorités locales et nationales négligent fréquemment de définir, classifier ou quantifier les établissements informels ainsi que les besoins de leurs habitants et les risques qu’ils supportent (Sarmiento et al., 2014). Certains quartiers de Karachi, au Pakistan (Hasan et al., 2010), comptent plus de 4 000 habitants par hectare (soit 2,4 m2 par personne), contre 200 personnes par hectare (50 m2 par habitant) dans les

quartiers à revenus élevés. En Tanzanie, environ 70 % de la population de Dar es Salam vit dans des logements de mauvaise qualité exposées à des risques réguliers d’inondation (Kahn, 2014). À Sao Paulo, plus de 85 % des ménages à risque vivent dans des établissements informels. Parmi eux, plus de la moitié ne dispose pas d’un accès à des structures sanitaires adéquates et plus de 30 % n’ont pas accès à des routes goudronnées (Ibid.). En fait, les problèmes de santé et d’assainissement qui existent dans les établissements informels exacerbent les risques et en créent de nouveaux. En Tanzanie par exemple, le manque d’eau potable et de structures d’assainissement peut conduire à des épidémies de maladies transmises par l’eau et de paludisme durant les périodes d’inondation des établissements informels, ce qui accroît la vulnérabilité (Banque mondiale, 2011). La mise en place d’une réglementation pour l’aménagement du territoire et de codes de construction devient un défi majeur dans de tels contextes (UNISDR, 2011a ; Johnson, 2011), en particulier lorsqu’une densité de population élevée aggrave les risques existants. Dans de telles conditions, ce qu’observaient deux architectes innovants à propos de Caracas il y a près de dix ans peut également se révéler vrai aujourd’hui pour de nombreuses zones urbaines : « Envisager les conditions idéales est une perte de temps [...]. Il faut avant tout éviter la catastrophe » (Brillembourg et Klumpner, 2005). Risques urbains en chaîne La complexité croissante des systèmes urbains interdépendants des grandes villes contribue à modeler les risques de catastrophe en chaîne évoqués au Chapitre 10. Ces systèmes sont directement modelés par les caractéristiques distinctives de chaque ville. Ils présentent toutefois des caractéristiques communes, notamment leurs interdépendances (Wamsler, 2014). Par exemple, la dépendance croissante des systèmes médicaux, de distribution d’eau, d’assainissement et 231


de gestion des déchets vis-à-vis de la fourniture d’électricité a engendré l’arrêt de ces services essentiels durant les coupures de courant associées à des aléas tels que l’incendie du tunnel d’Akalla à Stockholm en 2002 ou l’ouragan Sandy à New York en 2012 (Ibid.). Dans les centres urbains, les risques sont amplifiés par le degré d’interdépendance des secteurs, des services publics et des infrastructures, en particulier dans les villes qui jouent un rôle central dans l’économie mondiale et les marchés nationaux (Airmic Technical, 2013 ; OCDE, 2009). Par exemple, dans les villes où la redondance intégrée est limitée, les défaillances du réseau d’alimentation électrique se propagent rapidement aux réseaux de télécommunication et de transport et ont ainsi des répercussions sur la production, le système bancaire et d’autres secteurs.

par l’interdépendance (Haraguchi et Kim, 2014). Par exemple, les secteurs de la santé, du transport et de l’électricité ont subi des dommages indirects supplémentaires importants à cause de l’interruption des activités dans les secteurs du transport et de la construction (Tableau 11.1). Ces interdépendances signifient que certains secteurs essentiels doivent être pris en compte dans les mesures de réduction des risques et les plans d’investissement afin de renforcer la résilience d’une ville (Municipalité de New York, 2013 ; Haraguchi et Kim, 2014). Tableau 11.1 Dommages directs et indirects causés par l’ouragan Sandy Secteurs

Dommages directs

Dommages indirects

Électricité

2

Transport

1

10

2012 Hurricane Sandy

Fin 2012, l’ouragan Sandy a provoqué de telles défaillances en plein cœur d’une plaque tournante économique majeure au niveau mondial. Les activités dans le port de New York ont été interrompues, ce qui a perturbé les services de fret maritime et surtout les équipes d’intervention de première ligne. Les impacts ont été lourds et prolongés tant pour les activités portuaires que pour les services d’intervention d’urgence. La bourse de New York a dû être fermée deux jours de suite, ce qui n’était pas arrivé depuis une forte tempête hivernale survenue en 1888, et plus de 20 000 vols ont dû être annulés. Le trafic internet a également été affecté dans le monde entier en raison du rôle de New York en tant que plate-forme majeure pour le trafic de données (National Hurricane Center, 2013 ; Smythe, 2013)6. Alors que les dommages directs causés par la tempête étaient liés au respect ou non des codes par les bâtiments et les infrastructures, les pertes et impacts indirects ont été lourdement influencés 232

Partie III - Chapitre 11

Santé

5

Construction

0

2

1

(Source : Haraguchi et Kim, 2014.)

11.2

Prise en charge des risques de catastrophe en zone urbaine dans le cadre du CAH

La plupart des progrès réalisés dans la prise en charge des risques de catastrophe en zone urbaine est associée à une solide planification et gestion urbaine, en particulier dans les pays à revenu élevé. Par conséquent, d’importants efforts ont été consentis dans le contexte d’autres cadres de référence, en particulier dans le cadre de l’adaptation au changement climatique, plutôt que dans le cadre de la réduction des risques de catastrophe. Ces efforts ont fait émerger des méthodes innovantes de gestion urbaine, avec des avantages aussi pour la réduction des risques de catastrophe.


Dans le cadre de la Priorité d’action n° 4, le CAH mettait largement l’accent et fournissait des consignes détaillées sur le rôle de la gestion urbaine et du développement de normes de construction et de réglementations pour la réduction des risques de catastrophe, notamment pour la conception des infrastructures et des installations sensibles telles que les hôpitaux et les écoles (Encadré 11.3).

Figure 11.5 Progrès dans la gestion des risques en environnement urbain Niveau des progrès [1 à 5]

Niveau moyen des progrès au cours du CAH

3,4 3,3 3,2 3,1 3 2,9

Les rapports d’auto-évaluation des gouvernements élaborés à l’aide de l’outil HFA Monitor mettent en lumière les progrès réalisés au cours des trois derniers cycles d’évaluation, même si les progrès réalisés dans ce domaine sont bien moindres que ceux réalisés dans le cadre des autres priorités d’action (Figure 11.5). Il en va de même pour les autres domaines de la Priorité d’action n° 4. Une grande partie des progrès réalisés dans la prise en charge des risques de catastrophe en zone urbaine est associée à une solide planification et gestion urbaine, en particulier dans les pays à revenu élevé, ou s’est inscrite dans d’autres cadres de référence que celui du secteur de la réduction des risques de catastrophe, en particulier dans le cadre de l’adaptation au changement climatique. Suivant une tradition de soutien des efforts des ménages et des collectivités dans le cadre du développement urbain informel initiée dans les

2,8 2,7

2007-09

2009-11

2011-13

Cycle d'évaluation des progrès du CAH Indicateur de base 4.4 du CAH : intégration de la réduction des risques de catastrophe dans la planification et la gestion des établissements humains, y compris un contrôle du respect des codes de construction. (Source : UNISDR, données de l’outil HFA Monitor.)

années 1960 (Turner, 1972), il existe de nombreux exemples de méthodes innovantes de gestion urbaine en cours qui présentent des avantages aussi pour la réduction des risques. Par exemple, une approche innovante du logement social dans le nord du Chili fournit une moitié de logement aux familles et les laisse construire l’autre moitié selon une structure définie, mais en fonction de leurs propres priorités et moyens (Figure 11.6). Dans le nord de l’Argentine, le mouvement social Tupac Amaru mobilise des familles à faibles revenus pour la construction des projets immobiliers de leur communauté, et les dote de leurs propres fours à briques et usines métallurgiques (McGuirk,

Encadré 11.3 Activités principales liées au développement urbain dans le CAH

(n) Intégrer l’évaluation des risques de catastrophe dans les plans d’urbanisme et la gestion des établissements humains sujets aux catastrophes, en particulier de ceux qui sont très peuplés ou qui connaissent une urbanisation rapide. Les problèmes posés par l’habitat informel ou non permanent et les habitations situées dans des zones à haut risque devraient être examinés en priorité, notamment dans le cadre des programmes de lutte contre la pauvreté en milieu urbain et d’assainissement des taudis. (r) Encourager la révision partielle ou totale des codes et des normes de construction ainsi que des pratiques en matière de modernisation et de reconstruction aux niveaux national ou local, selon qu’il convient, afin d’en faciliter l’application dans le contexte local, notamment dans les établissements humains informels ou marginaux, et renforcer les capacités disponibles pour mettre en œuvre ces codes, en suivre l’application et les faire respecter selon une approche consensuelle, le but étant de promouvoir des structures capables de résister aux catastrophes. (CAH, 2005)

233


Figure 11.6 Une redéfinition du logement social : Quinta Monroy, Iquique, Chili

(Source : Tadeus Jalocha et Christobal Palma.)

2014). En Inde, la National Slum Dwellers Federation, initialement un petit groupe défendant les intérêts d’un seul quartier de logements précaires, est devenue un vaste réseau d’associations locales à travers la planète qui négocie des droits d’occupation et l’accès aux infrastructures et services pour les habitants d’établissements informels (Patel et Mitlin, 2001). De nombreux gouvernements ont à présent mis en place des cadres politiques pour la modernisation et la régularisation des établissements informels, ce qui peut inclure la mise en place d’infrastructures propres à réduire les risques, par exemple un système d’assainissement ou des structures de stabilisation des pentes. En 2011 pourtant, environ 40 % des pays à faible revenu procédant à une auto-évaluation dans le cadre du CAH n’investissaient pas dans la réduction des risques dans les établissements urbains vulnérables (UNISDR, 2011b). En 2013, seuls 60 % environ des pays à faible revenu et moins de 40 % des pays à revenu intermédiaire fournissaient des terres sûres 234

Partie III - Chapitre 11

et un logement aux ménages et collectivités à faibles revenus (UNISDR, 2013a). Dans d’autres contextes, les politiques menées se concentrent toujours sur l’élimination ou la réinstallation des établissements informels (Encadré 11.4), ce qui peut accroître les risques et les vulnérabilités. Dans le secteur de la réduction des risques de catastrophe lui-même, le CAH a contribué à une sensibilisation croissante aux risques de catastrophe dans les plus de 2 000 villes qui figurent à ce jour parmi les signataires, à travers des initiatives telles que la campagne « Pour des villes résilientes ». Des outils tels que le programme d’évaluation de la résilience urbaine d’ONU-Habitat (CRPP, City Resilience Profiling Programme, ONU-Habitat, 2014a) ou encore l’outil Local HFA Monitor de l’UNISDR et ses 10 points essentiels offrent désormais aux municipalités les moyens de mieux comprendre les atouts et les faiblesses de leurs approches actuelles de la gestion des risques de catastrophe. À ce jour, 550 autorités locales, en majorité des municipalités, ont soumis des rapports7, qui indiquent différents degrés de réalisation. Floods: Senegal

Les autorités locales des pays à revenu élevé et des grandes villes ont généralement les moyens de conduire des évaluations des risques et d’en appliquer les résultats dans le cadre de l’aménagement du territoire, des plans de zonage, de la réglementation de la construction, ainsi que de la conception et de l’implémentation des projets d’infrastructure. Dans de nombreux pays à faible revenu et à revenu intermédiaire toutefois, les moyens institutionnels pour appuyer ces approches sont habituellement insuffisants, et dans certains cas totalement inexistants. De nombreuses villes et petits centres urbains n’ont pas disposé des bonnes informations sur les risques, en particulier dans les établissements informels, pour éclairer les décisions urbanistiques et les investissements de manière à réduire les risques et à renforcer la rési-


Encadré 11.4 Modernisation et élimination des établissements informels à Bangalore et Harare

Jusqu’à 20 % de la population de Bangalore vivent dans des établissements informels sans aucun accès aux services de base. Entre 2000 et 2005, le Bangalore Water Supply and Sewerage Board (BWSSB) a mis en place un programme d’amélioration de l’approvisionnement en eau dans les quartiers insalubres. En 2005, plus de 5 % des ménages de la ville vivant dans des taudis avaient accès à l’eau et étaient devenus des clients à part entière, recevant et réglant des factures. Le programme permet le partage de raccordements entre 8 à 12 ménages et propose des tarifs réduits spécifiques pour les ménages qui vivent dans des quartiers insalubres. Ce projet a non seulement augmenté le nombre des ménages ayant accès au réseau de distribution d’eau, mais il a également réduit la dépendance des résidents à des raccordements illicites ainsi que la quantité d’eau utilisée sans générer de revenu pour le BWSSB. À Harare et dans d’autres grandes villes du Zimbabwe, une approche différente a été adoptée pour les populations vivant dans des établissements informels. Durant sept semaines à compter de mai 2005, une campagne de nettoyage dirigée par le gouvernement et baptisée Opération Murambatsvina a été mise en œuvre, avec des impacts de grande portée. Son objectif était d’éliminer les habitations illicites ainsi que les activités commerciales prétendues illicites. Un total de 92 460 structures d’habitation ont été détruites et 700 000 personnes, c’est-à-dire près de 6 % de la population du pays, ont perdu leur logement. Selon les estimations, 2,4 millions de personnes supplémentaires ont été indirectement affectées par cette campagne et le secteur du travail informel, qui représentait à l’époque 40 % de l’emploi, a été réduit à néant. En conséquence, les personnes expulsées de leur habitation se sont trouvées encore plus vulnérables. (Source : Satterthwaite et Mitlin, 2014.)

lience, même lorsque la volonté politique pour ce faire était présente (ONU-Habitat, 2014a). Il existe toutefois des exceptions, comme observé plus récemment au Brésil (Encadré 11.5). Les codes de construction, les plans de zonage et l’aménagement du territoire ont joué un rôle central dans la prise en charge des risques urbains existants et de l’accumulation de nouveaux risques urbains. Au cours des deux dernières décennies, le développement de nouveaux codes et normes de construction et l’amélioration des codes et normes existants ont été au centre des efforts de gestion des risques urbains (UNISDR, 2011a ; PNUE et PSI, 2014). L’implication précoce du secteur privé dans les processus de gestion urbanistique concernant le respect des codes de construction et des normes urbanistiques ainsi que les investissements de modernisation peut avoir une influence directe sur le niveau futur des risques, et peut également améliorer le dialogue entre secteurs public et privé (Johnson et al.,

2012). Seuls des éléments anecdotiques tendent toutefois à prouver une telle implication.

11.3

L’avenir des risques urbains

Au final, la capacité des villes à gérer leurs risques de catastrophe dépend de la qualité de leur gouvernance. Les développements les plus prometteurs de ces dernières années concernent des villes qui sont parvenues à reprendre le contrôle de leur planification et de leur gestion et à renforcer leur gouvernance urbaine à travers des partenariats innovants entre les autorités locales, les ménages et les collectivités. Sustainable cities

Étant donné le volume des capitaux qui seront injectés dans le développement urbain et le secteur des infrastructures au cours des pro235


Encadré 11.5 Renforcement des moyens de gestion des risques de catastrophe au Brésil

En l’espace de seulement 70 ans, l’urbanisation au Brésil est passée d’environ 30 % à 84 %. Cette rapide urbanisation a été caractérisée par d’importantes inégalités dans les projets immobiliers urbains et dans l’aménagement du territoire. La spéculation immobilière a largement exclu les ménages à faibles revenus des zones résidentielles existantes et nouvelles, les forçant à s’établir de manière informelle sans passer par le marché officiel. Cette ségrégation sociale a conduit à la création de risques de catastrophe au fil du temps. Plusieurs métropoles brésiliennes, dont Salvador, Sao Paulo et Rio de Janeiro, abritent conjointement plus d’un million de ménages vivant dans des établissements informels. Près de 60 % de ces ménages sont installés sur des pentes modérées à fortes (Figure 11.7). Figure 11.7 Ménages en situation informelle installés sur des pentes modérées à fortes dans une sélection de villes brésiliennes Milliers 50

100

150

200

250

300

350

400

450

Rio de Janeiro (Rio de Janeiro) São Paulo (São Paulo) Salvador (Bahía) Belém (Pará) Fortaleza (Ceará) Recife (Pernambuco) Belo Horizonte (Minas Gerais) Manaus (Amazonas) São Luís (Maranhão) Porto Alegre (Rio Grande do Sul) Curitiba (Paraná) Teresina (Piauí) Maceió (Alagoas) João Pessoa (Paraíba) Cuiabá (Mato Grosso) Rio Branco (Acre) Florianópolis (Santa Catarina)

Ménages en situation informelle installés sur des pentes fortes

Macapá (Amapá)

Nombre total de ménages en situation informelle

Ménages en situation informelle installés sur des pentes modérées

Vitória (Espírito Santo) emar ue pente orte éga e ou supérieure

0

1

pente modérée entre 5

2

et 0

1

.

(Source : UNISDR, données 2010 de l’IBGE8.)

Ces zones sont très vulnérables aux inondations et aux glissements de terrain. Durant la saison des pluies prolongée qui a affecté Rio de Janeiro en janvier 2011, les glissements de terrain et les inondations ont causé la mort de plus de 900 personnes, 300 personnes ont été portées disparues et plus de 300 000 personnes ont été directement touchées dans seulement sept municipalités. Les pertes économiques se sont élevées à 1,8 milliard de dollars américains9. Cela a conduit à un changement dans l’approche du Brésil en matière de réduction des risques de catastrophe. En 2011, un programme transsectoriel a été initié afin de discuter des défis et de présenter des solutions, avec pour résultat la mise en place du Centre national d’alerte et de suivi des catastrophes naturelles (CEMADEN). Le CEMADEN dépend du Ministère de la science, des technologies et de l’innovation et travaille sur cinq priorités d’action, à savoir le développement de systèmes d’alerte précoce et de suivi, la connaissance des risques, la réduction des pertes et des impacts des catastrophes, la communication et la formation, et le soutien au système de défense civile afin de renforcer l’intervention en cas d’urgence (Ibid.). Le Brésil signale également qu’il a développé des mesures de gestion des facteurs de risque sous-jacents qui visent notamment à réduire la pauvreté et la spéculation immobilière. L’agenda de la gestion des risques de catastrophe est désormais une priorité pour plusieurs ministères : les catastrophes ne sont plus considérées comme de simples événements, mais comme des processus sociaux10. (Source : Alvalá et al., 2014.)

236

Partie III - Chapitre 11


chaines décennies (UNISDR, 2013a), l’approche de la gestion des risques de catastrophe en zone urbaine aura clairement un impact déterminant sur la réduction ou non de ces derniers. Environ 60 % des zones appelées à être urbanisées d’ici à 2030 sont encore à construire. Selon les prévisions, l’expansion des zones urbaines entre 2000 et 2030 devrait être comprise entre 56 et 310 %11. Selon les estimations, 25 000 à 30 000 milliards de dollars américains seront investis d’ici à 2030 dans de nouvelles infrastructures, notamment des routes urbaines, des systèmes de distribution d’eau et d’assainissement, des systèmes énergétiques et de transport, et des bâtiments. De même, près de 700 milliards de dollars américains par an seraient consacrés au financement de nouvelles infrastructures urbaines dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire au cours de cette période (ONUHabitat, 2014). Alors qu’au cours des deux derniers siècles, les plus grandes villes étaient situées dans les nations les plus riches, les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire abritent aujourd’hui les trois quarts de la population urbaine mondiale et la majorité des plus grandes villes de la planète (GIEC, 2014), ce qui reflète une croissance économique considérable et les changements qui vont de pair au niveau des relations et des structures sociales, politiques et industrielles (Satterthwaite, 2007 ; Sassen, 2012). Les centres urbains ont toujours concentré et continueront de concentrer les activités commerciales et les opportunités (Dobbs et Reemes, 2012), de même que les risques qui les accompagnent. Toutefois, une grande part de cette croissance prévisionnelle n’interviendra pas dans les mégalopoles d’Asie, mais dans des villes d’importance intermédiaire telles que Foshan en Chine et Surat en Inde (Dobbs et al., 2012). Ces villes devraient contribuer à hauteur des deux tiers de la croissance mondiale d’ici à 2025 (Ibid.) et abriter plus de la moitié de

la classe moyenne ou « consommatrice » mondiale (Ibid.)12. La combinaison d’un développement urbain spéculatif pour la minorité des plus riches et d’une urbanisation informelle pour la grande majorité des populations à faibles revenus dans des villes où les moyens de planification et de gestion urbanistiques sont limités va vraisemblablement continuer d’accroître les risques de catastrophe en milieu urbain. Au cours des décennies à venir, il est vraisemblable que la croissance urbaine interviendra majoritairement dans des régions telles que l’Asie du Sud et l’Afrique subsaharienne (Figure 11.8). À défaut d’un changement radical, cette croissance ira de pair avec celle de la ségrégation des risques de catastrophe. Dans de nombreux pays de ces régions, la gouvernance urbaine est relativement faible. L’incapacité de la gouvernance et des systèmes à soutenir la réglementation a compromis la qualité des contrôles dans le secteur de la construction et a créé d’importantes vulnérabilités. Parmi celles-ci figurent la qualité insuffisante des lois et des réglementations13, une administration inefficace, des compétences insuffisantes de la part des responsables de l’élaboration des codes de construction, des concepteurs et des entrepreneurs locaux, un manque d’attention pour la gestion des risques, des procédures bureaucratiques opaques et la corruption (GFDRR et ONU-Habitat, 2014). Par exemple, la population urbaine indienne devrait augmenter de 404 millions de personnes au cours des 35 prochaines années, ce qui signifie qu’environ 50 % de la population du pays vivra dans des villes d’ici à 2050 (UNDESA, 2014b). En Afrique subsaharienne, les taux de croissance sont similaires et signifient que 55 % de la population de la région vivront dans des zones urbaines d’ici à 2050 (Ibid.). C’est ce qui a été décrit comme un tsunami d’urbanisation14. À défaut d’une planification et d’une gestion adéquates, ce développement sera vraisemblablement accompagné d’un tsunami de risques de catastrophe tout aussi puissant. 237


Figure 11.8 Croissance urbaine par région 100 90

82,13

80

79,63

72,78 70

70,22

60 50

42,17

40

39,98 Amérique du Nord

30

Océanie Europe

20

Amérique latine et Caraïbes Asie

10

Afrique

1950

1970

1990

2010

2030

2050

(Source : UNDESA, 2014b.)

Urban growth

L’incapacité de la plupart des pays à faible revenu et de certains pays à revenu intermédiaire à fournir des terres situées dans des endroits sûrs aux ménages à faibles revenus signifie que le développement des établissements informels risque de continuer à prévaloir et de demeurer le seul recours des populations qui n’ont pas accès aux marchés foncier et immobilier officiels. En dépit du grand nombre d’études et de publications sur les risques urbains et l’expansion rapide des zones urbaines, l’intérêt pour la réduction de la pauvreté et des risques en zone urbaine ainsi que les investissements dans ces domaines n’ont que récemment atteint des niveaux significatifs sur la scène internationale (Satterthwaite et Mitlin, 2014). Tous niveaux de revenus et toutes régions confondus, on peut trouver des exceptions notables de villes bien gouvernées qui sont parvenues à fournir des infrastructures et des services à leurs habitants. De nombreux projets ont également 238

Partie III - Chapitre 11

reçu un soutien international, par exemple la fourniture d’électricité aux habitants de quartiers insalubres à Mumbai et à Ahmedabad en Inde (Banque mondiale et ESMAP, 2011) et l’amélioration des réseaux d’assainissement pour les populations pauvres des zones urbaines du Viet Nam (Banque mondiale et Australian Aid, 2013). Il est cependant très probable que la poursuite de la croissance urbaine en Asie du Sud, en Afrique subsaharienne et dans d’autres régions tendra à amplifier et exacerber les risques de catastrophe (Mitlin et Satterthwaite, 2013). Au final, la capacité des villes à gérer leurs risques de catastrophe dépend de la qualité de leur gouvernance. Parmi les développements les plus prometteurs de ces dernières années, des villes sont parvenues à reprendre le contrôle de leur planification et de leur gestion et à renforcer leur gouvernance urbaine à travers des partenariats innovants entre les autorités locales, les ménages et les collectivités. Par exemple, à Medellín et Bogota en Colombie, une gouvernance urbaine innovante a permis de réduire drastiquement la criminalité, d’améliorer les transports et la four-


niture de services, et de renforcer la qualité de vie en zone urbaine en général. À travers des projets urbains intégrés, la ville de Medellín a mené des investissements à grande échelle afin de fournir des services publics à des établissements informels situés sur les collines qui entourent la ville, en particulier dans le domaine des transports, de l’éducation, du logement et des espaces verts. Ces investissements ont été présentés comme des investissements pour la ville dans son ensemble, en mettant l’accent sur la solidarité et la nécessité de réduire les inégalités et de promouvoir les opportunités. Un élément clé de cette initiative a été la capacité de la municipalité à travailler avec les organisations de la société civile, qui étaient présentes dans les quartiers concernés, possédaient les connaissances requises et y étaient perçues comme légitimes. Un métro ainsi qu’un téléphérique ont été construits afin de permettre aux habitants des établissements informels situés sur les collines de se rendre au travail ou dans le centre-ville en quelques minutes au lieu de plusieurs heures auparavant. Des espaces verts et des pistes cyclables ont été construits dans toute la ville. De nouveaux « parcs-bibliothèques », c’est-à-dire la combinaison d’une bibliothèque publique, d’un parc et d’un centre communautaire doté de structures architecturales attrayantes, favorisent l’éducation, les loisirs et la cohésion sociale, et constituent une attraction majeure pour les touristes. À Medellín, le taux d’homicide est passé de 381 pour 1 000 habitants en 1991 à seulement 29 en 200715. En parallèle, les villes de Bogota et de Medellín ont consenti des investissements majeurs dans l’évaluation et la réduction des risques de catastrophe. L’expérience de ces deux villes et d’autres montre que le facteur le plus important dans la prise en charge des risques urbains est probablement le renforcement de la gouvernance urbaine de manière à impliquer et autonomiser les citoyens et à construire des partenariats avec la société civile

et le secteur privé. En revanche, les interventions techniques isolées qui visent à moderniser des écoles ou des hôpitaux ne sont vraisemblablement pas durables et peuvent littéralement être noyées par une vague de nouveaux risques. Une gouvernance urbaine efficace devra reconnaître la relation directe entre des infrastructures opérationnelles, la durabilité environnementale, la productivité, l’équité et la qualité de vie. Par extension, cela signifie que les facteurs sociaux et environnementaux qui influencent les risques de catastrophe devront également être pris en compte. Pourtant, les risques de catastrophe demeurent malheureusement rarement évoqués lorsque les villes se font concurrence pour attirer les investissements. Par ailleurs, les investissements dans de nouvelles villes intelligentes et écologiques ne semblent pas prendre en compte les problématiques sous-jacentes liées aux inégalités dans l’accès aux services et aux infrastructures. Si ces problématiques ne sont pas abordées, le scénario le plus probable sera l’émergence de villes cauchemardesques à l’image de celle dépeinte dans le film Blade Runner, où les expulsions et les réinstallations font la part belle à des enclaves dorées susceptibles d’attirer les investissements mondiaux, avec pour toile de fond des inégalités et des risques de catastrophe croissants.

Notes 1  Consultation le 11 janvier 2015. 2  La définition de l’adjectif « urbain » varie selon le contexte. Pour en savoir plus sur les caractéristiques de l’urbanisation en Afrique, voir Henderson et al., 2013. 3 http://www.ted.com/talks/paul_romer. 4  Il convient toutefois de relever que le pourcentage de la population vivant dans des établissements informels a reculé au cours de la même période dans toutes les régions à l’exception de l’Asie de l’Ouest (Ibid.). 5 http://www.un.org/millenniumgoals/environ.shtml.

239


6 http://research.dyn.com/2012/10/hurricane-sandy-initialimpact/ (consultation le 8 décembre 2014). 7 Nombre total des rapports soumis en ligne et hors ligne par les autorités locales à l’aide de l’outil Local HFA Monitor (octobre 2014). 8   h t t p : / / w w w. s i d r a . i b g e . g o v . b r / b d a / t a b e l a / l i s t a b l . asp?z=cd&o=20&i=P&c=4012 (consultation le 15 décembre 2014). 9 Source : http://www.mi.gov.br/pt/cZdocument_library/get_file? uuid=74dde46c-544a-4bc4-a6e1-852d4c09be06&groupId=10157 (consultation le 15 décembre 2014).

12  La « classe consommatrice » est définie comme la part de la population dont le revenu disponible est supérieur à 10 dollars américains par jour ou 3 600 dollars américains par an (à parité de pouvoir d’achat 2005). 13  La notion de « qualité » possède ici au moins deux sens larges : i) une signification légale centrée sur l’efficacité opérationnelle d’une loi pour la réalisation d’objectifs politiques, et ii) une signification technique qui renvoie à la pertinence des normes techniques établies en vertu de la loi.

10  Communication personnelle, Ministère de la science, des technologies et de l’innovation, Gouvernement du Brésil.

14  Joan Clos, directeur exécutif d’ONU-Habitat, lors de l’ouverture du 6e Forum urbain mondial de Naples en Italie, le 3 septembre 2012 : http://www.un.org/apps/news/story.asp?NewsID=42795 (consultation le 11 janvier 2015).

11  Cinquième rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, groupe de travail III, 2014.

15 http://www.iadb.org/en/topics/citizen-security/impact-medellin,5687.html (consultation le 11 janvier 2015).

240

Partie III - Chapitre 11


Chapitre 12

Bienvenue dans l'anthropocène : surconsommation et biocapacité

241


Alors que la surconsommation épuise progressivement la capacité des systèmes planétaires, les risques qui pèsent sur le système socio-économique mondial frôlent des niveaux potentiellement catastrophiques. Sous l’effet du changement climatique, du déclin de la biodiversité et de l’épuisement des ressources en eau, les risques de catastrophe vont continuer à augmenter. Bien que le CAH ait reconnu le rôle du changement climatique dans l’augmentation des risques, le partage inégal de ces risques n’a quant à lui pas été pleinement reconnu. Les inégalités croissantes transfèrent et concentrent ces risques dans les ménages, les territoires et les économies à faible revenu.

12.1

À la recherche d’une planète disparue

L’empreinte écologique mondiale excède actuellement de loin la biocapacité de la Terre. Les modèles de croissance économique actuels s’appuient sur d’importantes émissions de CO2 et sur une augmentation continue de la consommation des ressources environnementales, notamment de l’eau douce, du couvert forestier et des ressources marines. Aujourd’hui, le village fidjien de Vunidogolo est encore relativement inconnu : il s’apprête toutefois déjà à entrer dans l’histoire. La réinstallation permanente de la totalité de sa population par mesure de précaution contre la montée du niveau des océans a largement fait la une dans la presse et a été relayée à l’envi sur les médias sociaux. Ce village ayant subi d’importantes inondations et tempêtes à plusieurs reprises, le gouvernement fidjien a pris des mesures radicales et en janvier 2014, tous les résidents de Vunidogolo ont été réinstallés à plus haute altitude. La situation de ce village ne constitue pas un cas isolé. Plus de 650 communautés à travers les Fidji sont menacées par la perte de terres côtières et par des dégâts aux infrastructures en raison de l’élévation du niveau des océans et des ondes de tempête, et plus de 40 communautés ont déjà été sélectionnées pour une réinstallation au cours des 10 prochaines années1. La population de Vunidogolo n’est pas responsable des émissions de gaz à effet de serre qui contribuent au 242

Partie III - Chapitre 12

changement climatique mondial et à l’élévation du niveau des océans. Ces émissions proviennent de l’importante consommation énergétique dans d’autres régions du monde. Les habitants de ce village sont pourtant ceux qui en paient le prix : ils ont en effet dû contribuer à hauteur d’environ un tiers dans le coût total des travaux de construction et du développement de structures agricoles et d’étangs piscicoles nécessaires à la réinstallation. L’approche actuelle de la croissance économique s’appuie sur une surconsommation croissante et intenable des ressources énergétiques, de l’eau douce, des ressources forestières, des habitats marins, de l’air pur et des sols fertiles (Nair, 2014). L’empreinte écologique actuellement créée par cette surconsommation de l’énergie et des ressources naturelles excède la capacité de la planète à fournir les ressources demandées et à absorber les déchets, notamment les émissions de gaz à effet de serre. C’est à peu près en 1970 que la consommation a pour la première fois dépassé la biocapacité de la planète. Selon les estimations, la consommation excède à présent la biocapacité de la planète d’environ 50 % (Figure 12.1). À mesure que le PIB par habitant augmente, la consommation ainsi que les déchets qu’elle génère suivent la même tendance (Encadré 12.1). La consommation énergétique augmente avec le PIB par habitant. Comme souligné dans le Chapitre 13, cette relation n’est toutefois pas linéaire. L’offre totale mondiale d’énergie primaire a plus que doublé entre 1971 et 2011, tandis que la population mondiale a augmenté de 86 % au


Ecological overshoot Figure 12.1 La demande humaine excède déjà les capacités de la planète

Nombre de planètes Terre nécessaires 1,6

1,4

Carbone

Zones construites

Zones de pêche

Produits forestiers

Terres agricoles

Pâturages

1,2

1

Biocapacité mondiale

0,8

0,6

0,4

0,2

1961 1963 1965 1967 1969 1971 1973 1975 1977 1979 1981 1983 1985 1987 1989 1991 1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 2010

(Source : Global Footprint Network, 2013.)

cours de la même période (OCDE et AIE, 2013). Ceci a contribué à des augmentations significatives des émissions de CO2 (AIE, 2013 ; OCDE et AIE, 2013), en particulier dans les économies qui connaissent une croissance et une urbanisation rapides telles que l’Inde et la Chine. À titre d’exemple, la consommation d’électricité de l’Inde était en 1980 inférieure à un dixième de la moyenne mondiale. En 2010, elle atteignait 358 %, contre une moyenne mondiale de 88 %2. La production d’électricité du pays s’appuie largement sur le charbon et représente près de la moitié (48 %) de ses émissions totales de CO2 (von Hauff et Kundu, 2002). La surconsommation excède à présent la capacité de plusieurs systèmes planétaires. Dans ce contexte, Rockstrom et al. (2009) ont identifié neuf limites planétaires, qui peuvent être regroupées comme suit : les limites qui définissent le niveau mondial acceptable d’utilisation des ressources

fossiles non renouvelables telles que le charbon, le pétrole et le gaz, et des eaux souterraines fossiles ; les limites qui définissent le niveau mondial acceptable d’utilisation de la biosphère, notamment l’exploitation des écosystèmes, la protection de la biodiversité et la consommation de ressources renouvelables (par exemple l’utilisation des terres) ; et les limites qui définissent le niveau mondial acceptable de la capacité des systèmes planétaires à absorber et à dissiper les déchets de l’activité humaine, notamment le carbone, l’azote, le phosphore et les produits chimiques toxiques tels que les pesticides. Au moins trois de ces limites (changement climatique, perte de biodiversité et cycle de l’azote) ont déjà été franchies (Ibid.)3. Le changement climatique est probablement la mieux connue de ces limites planétaires et sa relation avec l’augmentation des risques de catastrophe a déjà été clairement établie (GIEC, 2012 et 243


Global carbon footprints

Encadré 12.1 Des modèles de consommation et de distribution destructeurs

Les modèles actuels de consommation et de distribution ont un impact direct sur le climat, l’eau, les terres et la biodiversité, ce qui à son tour engendre des risques de catastrophe. Par exemple, plus d’un quart de la production agricole mondiale est perdu ou gaspillé (FAO, 2012) dans les chaînes d’approvisionnement, entre les phases de production, de stockage, de transformation, de distribution et de consommation (EIU, 2014) Comme le souligne la Figure 12.2, l’Europe, les États-Unis d’Amérique ainsi qu’un groupe de pays asiatiques industrialisés comprenant la Chine, le Japon et la République de Corée sont les principaux responsables des déchets alimentaires qui surviennent dans la phase de consommation, tandis que les pertes dans la phase de production sont particulièrement élevées en Amérique latine, en Europe et en Afrique subsaharienne. Figure 12.2 Pertes et déchets alimentaires relatifs par région et par phase de la chaîne d’approvisionnement alimentaire Contribution relative aux déchets alimentaires régionaux 10

20

0

0

50

0

0

0

0

100

Europe Amérique du Nord et Océanie Asie industrialisée Afrique subsaharienne Afrique du Nord, de l'Ouest et centrale Asie du Sud et du Sud-Est Amérique latine Production agricole

Manutention et stockage des récoltes

Transformation

Distribution

Consommation

(Source : FAO, 2013b.)

Seuls les États-Unis d’Amérique et la Chine émettent plus de gaz à effet de serre que les 3,3 gigatonnes d’équivalent CO2 émis par les déchets alimentaires mondiaux en 2007, selon les estimations. Les déchets alimentaires représentent aujourd’hui jusqu’à 10 % des émissions de gaz à effet de serre générées par l’homme, contre 37 % pour le secteur de l’énergie et 18 % pour l’industrie (PNUE, 2012 ; FAO, 2012 ; Vermeulen et al., 2012). Cette forme de gaspillage a également un coût élevé. Dans le monde, l’équivalent de 750 milliards de dollars américains, soit le PIB de la Suisse, est gaspillé chaque année (FAO, 2012). Ce type de gaspillage contribue directement à l’insécurité alimentaire (EIU, 2014) et consomme d’importantes superficies de terres rares, des eaux de surface (un volume équivalent au débit annuel de la Volga ou à trois fois le volume du Lac Léman) et des terres productives (à raison de 28 % des terres agricoles mondiales en 2007). Ces deux ressources essentielles produisent la vulnérabilité de ceux qui en dépendent (FAO, 2012 ; Mekonnen et Hoekstra, 2011). Les déchets alimentaires restreignent la disponibilité des ressources alimentaires à l’échelle mondiale et accroissent la volatilité des prix alimentaires, ce qui constitue une menace pour la sécurité alimentaire et la résilience d’une partie substantielle de la population de l’Afrique subsaharienne et de l’Asie du Sud en particulier (EIU, 2013 ; UNISDR, 2013a).

2014). Les risques de catastrophe sont amplifiés par le changement climatique (UNISDR, 2009a, 2011a ; GIEC, 2012 ; SEI, 2014). Le changement climatique est déjà en train de modifier la fréquence et l’intensité de nombreux aléas météorologiques (GIEC, 2014). Il ne cesse d’accroître la vulnérabilité et de réduire la résilience des populations exposées qui dépendent des terres arables, de l’accès 244

Partie III - Chapitre 12

à l’eau, de la stabilité des températures et de la pluviométrie moyennes (PNUD et al., 2013). Climate change impact

Dans le même temps, le dépassement d’autres limites a également une influence sur les risques


couvert forestier, des zones humides et des zones côtières comportant des mangroves et des récifs coralliens a des implications directes en termes de risques (GIEC, 2014 ; PEDRR, 2010 ; Chatenoux et Peduzzi, 2013).

de catastrophe. La croissance économique est fréquemment associée à la dégradation et à la destruction des écosystèmes, par exemple à travers la transformation de mangroves en élevages de crevettes, de forêts primaires en plantations pour la production d’huile de palme ou de soja, ou de zones humides et de plaines inondables en centres urbains. Elle est également associée à la dégradation des terres et à l’épuisement des aquifères associés à l’agriculture intensive.

Le couvert forestier réduit les glissements de terrain et plus particulièrement le risque de sécheresse (UNISDR, 2011a), mais comme pour les zones humides, les mangroves et les récifs coralliens, la couverture mondiale a connu un déclin jusqu’à récemment, excepté dans les pays de l’OCDE (Figure 12.3). Par exemple, entre 2005 (moment de l’adoption du CAH) et 2013, soit une période de seulement huit ans, l’Amazonie aurait perdu environ 70 000 km2 de forêts tropicales, soit la superficie de l’Irlande ou du Panama.

Impacts, adaptation & vulnerability

L’un des facteurs sous-jacents des risques de catastrophe est la perte de biodiversité, notamment la diminution du couvert forestier (tant en termes de superficie que de diversité), des terres humides, des récifs coralliens, des mangroves, des zones durablement gérées et des zones protégées, la disparition d’espèces menacées et de ressources marines, et la dégradation des services écosystémiques qui jouent un rôle de régulateur et fournissent des services écosystémiques (GIEC, 2012 ; UNISDR, 2009a, 2011a, 2013a ; Banque mondiale, 2013). En particulier, la diminution du

Deforestation in Brazil

Les données mondiales sur la dégradation des services écosystémiques jouant un rôle essentiel de régulateur, notamment les forêts, les mangroves, les zones humides, les récifs coralliens et les aquifères, ainsi que les données

Figure 12.3 Évolution mondiale du couvert forestier (1990-2010)

vo ution du couvert orestier 1

0 100

102 101 100 99 98 97 96 95 94 93

OCDE Brésil, Russie, Inde, Indonésie, Chine, Afrique du Sud

92

Reste du monde 91 90

Monde 1990

1995

2000

2005

2010

(Source : OCDE, 2012.)

245


sur le changement climatique soulignent que de nombreux écosystèmes s’approchent à présent d’un point de non-retour au-delà duquel la réhabilitation sera difficile, voire impossible, ce qui aura des implications imprévisibles, mais potentiellement dangereuses, en termes de risques de catastrophe. L’impact de la rareté de l’eau a lui aussi été abondamment débattu (UNISDR, 2013a ; Erian et al., 2012 ; GIEC, 2012). Dans les régions les plus lourdement touchées, cela aura un lien direct sur les risques de catastrophe, à la fois à travers une augmentation du risque de sécheresse agricole et hydrologique et à travers l’augmentation de la vulnérabilité. La production agricole et par conséquent les revenus de la population rurale subiront des contraintes croissantes, ce qui compromettra la résilience face à la sécheresse et aux impacts d’autres aléas. L’augmentation du coût et la diminution de la disponibilité de l’eau potable dans les zones urbaines affecteront particulièrement les collectivités à faibles revenus, qui disposent déjà d’un accès très inégal à cette ressource. À nouveau, ceci compromet la résilience et la capacité des ménages et des collectivités à gérer les risques de catastrophe.

Djibouti, la Sierra Leone, la République démocratique du Congo et la Zambie font partie des pays dans lesquels la dégradation des terres est sévère, c’est-à-dire supérieure à 75 % de leur superficie totale. Vingt-quatre autres pays parmi lesquels l’Afrique du Sud et le Nigéria, ainsi que certains pays à faible revenu tels que le Swaziland, le Zimbabwe et l’Érythrée, connaissent une dégradation sévère des terres oscillant entre 50 et 75 % de leur superficie. En Amérique du Sud, un processus plus complexe de dégradation des terres et de changement du couvert végétal peut être observé (Erian et al., 2014). Une dégradation significative a eu lieu dans certaines parties du Brésil, de l’Argentine et en particulier du Pérou, avec pour résultat près de 500 millions d’hectares de terres dégradées en Amérique du Sud (Figure 12.4). Sur cette superficie, plus de 165 millions d’hectares présentent une dégradation modérée à sévère, soit plus de 10 % des terres du continent (Erian Figure 12.4 Dégradation des terres en Amérique du Sud et en Amérique centrale

21st Century drought

À l’échelle mondiale, la dégradation des terres est un autre facteur clé, en particulier quand il s’agit du risque de sécheresse (UNISDR, 2013a ; Erian et al., 2012). Les effets de la dégradation des terres sont souvent irréversibles et lorsque leur réhabilitation est envisagée, elle est habituellement coûteuse et exigeante en main-d’œuvre (Erian et al., 2014). Il y a 10 ans, les estimations indiquaient déjà que plus de 30 % des terres de la planète risquaient de subir une dégradation (OMM, 2005). En Afrique, 52 % des terres sont considérées comme dégradées (Erian et al., 2014). Le Lesotho, 246

Partie III - Chapitre 12

Dégradation Très élevée Élevée Modérée Faible Très faible Développement Très faible Faible Modéré Faible Élevé Très élevé

(Source : Erian et al., 2014.)


et al., 2014). La dynamique de l’évolution du couvert végétal et des investissements dans le développement des terres signifie toutefois que plus de 12 % de la superficie totale de ces dernières peuvent être considérés comme hautement développés, ce qui contrebalance l’ampleur globale de la dégradation. Ce chiffre masque néanmoins à l’évidence le niveau élevé de dégradation des sols au niveau local, qui a un impact significatif sur les collectivités et les économies locales (Ibid.). Le véritable coût de la dégradation des terres est difficile à évaluer. À titre d’exemple, le Tableau 12.1 estime la valeur des pertes dues à la dégradation des terres cultivées, des pâturages libres et du couvert forestier en République arabe syrienne. Étant donnée l’interdépendance des différents systèmes planétaires, le dépassement de l’une des limites planétaires affecte les autres limites, qui ont toutes un impact sur les risques de catastrophe. La surconsommation de l’énergie et des ressources naturelles, qui engendre ensuite le dépassement de différentes limites planétaires, nous a conduits dans une nouvelle ère que certains scientifiques appellent désormais l’Anthropocène, à savoir une période où les activités humaines ont un impact significatif sur les écosystèmes de la planète (Rockstrom et al., 2013).

La notion d’Anthropocène, qui n’a pas encore été officiellement adoptée par la communauté scientifique, se caractérise par l’augmentation de l’impact des catastrophes comme des indicateurs de systèmes planétaires en détresse. Étant donné que ses causes et conséquences sont mondiales et qu’elle menace les fondements mêmes de la vie socio-économique à travers le globe, la surconsommation peut être considérée comme un métafacteur de risque. Comme pour les autres facteurs de risque, la surconsommation est toutefois aussi largement influencée et caractérisée par les inégalités sociales et territoriales. Comme le souligne l’exemple du village de Vunidogolo, de nombreux risques de catastrophe associés à la surconsommation de l’énergie et des ressources naturelles ne sont pas directement supportés par ceux qui bénéficient des richesses générées, mais sont transférés à d’autres secteurs et à d’autres régions. En outre, le dépassement des limites planétaires constitue un autre facteur d’inégalités face aux risques, puisqu’il redistribue les risques de catastrophe ainsi que les pertes et les impacts des catastrophes. De nombreux pays dont l’économie est florissante ont déjà excédé leur propre biocapacité et sont par conséquent devenus dépendants de l’importation de la biocapacité d’autres pays (Figure 12.5).

Tableau 12.1 Valeur des pertes causées par la sécheresse sur les cultures, les terres et l’emploi en République arabe syrienne Usage du sol affecté Pâturages

Niveau de sévérité Sévère

Modérée

Légère

Sévère

Perte de valeur des terres [dollars américains par ha]

erres cultivées non irriguées

Forêts

350

150

50

0,3

Sévère

Modérée

Légère

Sévère

Perte de valeur des terres [dollars américains par ha] 300

90

2

Sévère

Modérée

Légère

Sévère

Perte de valeur des terres [dollars américains par ha] 600

200

Légère

0,15

0,07

Modérée

Légère

Nombre d'emplois perdus [par ha]

600

1 500

Modérée

Nombre d'emplois perdus [par ha]

1

0,4

Modérée

Légère

Nombre d'emplois perdus [par ha] 1

0,5

0,1

(Source : Erian et al., 2014.)

247


Figure 12.5 La richesse écologique des nations

Empreinte écologique dépassant a biocapacité de 0-50 % 50 100 100-150 % 150

Biocapacité dépassant empreinte éco ogi ue de 0-50 % 50 100 100-150 % 150

(Source : Global Footprint Network, 2013.)

12.2

Progrès dans les politiques publiques et la planification dans le cadre du CAH

Le secteur de l’environnement a été capable d’appliquer en partie le CAH et l’agenda du changement climatique a généré un important élan en termes politiques et économiques. La gestion des risques de catastrophe a toutefois été relativement mal intégrée aux agendas sur la biodiversité, l’eau, la durabilité, l’énergie et le changement climatique, et la gestion de l’environnement ainsi que l’atténuation du change-

ment climatique n’ont pas joué un rôle suffisamment important dans la mise en œuvre du CAH. Dans le cadre de la Priorité d’action n° 4, le CAH a particulièrement mis l’accent sur la gestion de l’environnement (Encadré 12.2). Il s’agit de l’un des quelques domaines relevant de la Priorité d’action n° 4 dans lesquels les rapports d’avancement dans le cadre du CAH soulignent des réalisations au-dessus de la moyenne (Figure 12.6). Bien que peu de ces progrès soient associés au secteur de la gestion des risques de

Encadré 12.2 Activités principales liées à la gestion de l’environnement dans le CAH

(a) Encourager une utilisation et une gestion durables des écosystèmes, notamment en améliorant l’aménagement du territoire et les activités de développement afin de réduire les risques et les facteurs de vulnérabilité. (b) Appliquer, aux fins de la gestion de l’environnement et des ressources naturelles, des démarches intégrées prévoyant la réduction des risques de catastrophe, notamment sous la forme de mesures structurelles et non structurelles, comme la gestion intégrée des crues et l’aménagement rationnel des écosystèmes fragiles. (c) Promouvoir l’intégration de la réduction des risques liés à la variabilité climatique et aux changements climatiques futurs dans les stratégies de réduction des risques de catastrophe et d’adaptation aux changements climatiques. Pour cela, il faudrait mettre clairement en évidence les risques de catastrophe liés au climat, concevoir des mesures précises de réduction des risques et veiller à ce que les planificateurs, les ingénieurs et les autres décideurs s’informent systématiquement des risques climatiques et exploitent mieux ce type d’information. (CAH, 2005)

248

Partie III - Chapitre 12


Figure 12.6 Progrès dans la réduction des risques de catastrophe à travers la gestion de l’environnement Niveau des progrès [1 à 5]

Niveau moyen des progrès au cours du CAH

3,6 3,5 3,4 3,3 3,2 3,1 3 2,9

2007-09

2009-11

2011-13

Cycle d'évaluation des progrès du CAH Indicateur de base 4.1 du CAH : intégration de la RRC aux objectifs des politiques et plans liés à l’environnement, de la gestion de l’aménagement du territoire et de l’adaptation au changement climatique. (Source : UNISDR.)

catastrophe proprement dit, le secteur de l’environnement a été capable d’utiliser le CAH pour renforcer les politiques internationales et régionales et influencer le travail de terrain. Dans le même temps, le secteur de la lutte contre le changement climatique a généré un soutien et un élan supplémentaires importants en termes politiques et économiques. La gestion des risques de catastrophe est à présent relativement bien intégrée aux agendas liés à la biodiversité, l’eau, la durabilité, l’énergie et le changement climatique. Au niveau politique, de nombreux cadres et initiatives régionaux et internationaux font à présent explicitement référence aux risques de catastrophe et à la gestion des risques, par exemple les conclusions de la Conférence Rio+20 (Nations Unies, 2012), la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification4, la Convention de Ramsar sur les zones humides5 et la Convention sur la diversité biologique6. Le Rapport spécial sur la gestion des risques de catastrophes et de phénomènes extrêmes pour les besoins de l’adaptation au changement climatique (SREX) publié en 2012 par le GIEC expliquait en outre combien la gestion des risques de catastrophe

est essentielle pour l’adaptation au changement climatique. En 2012, les États membres de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) ont été invités à utiliser la Priorité d’action n° 4 du CAH comme référence pour renforcer une gestion des risques de catastrophe privilégiant la conservation de la nature dans le cadre de leurs politiques et pratiques environnementales (PNUE, 2014). Dans le même temps, un nombre croissant de cadres régionaux soulignent la nécessité de prendre en compte les risques de catastrophe dans la gestion de l’environnement et inversement (Ibid.). Des succès ont également été remportés dans l’évaluation et la planification. Par exemple, une écrasante majorité des rapports d’avancement soumis pour 2013 (94 au total) dans le cadre du CAH confirment que les risques de catastrophe ont été pris en compte dans les études d’impact sur l’environnement (UNISDR, 2013b). De nouveaux cadres qui intègrent les risques de catastrophe aux études d’impact sur l’environnement et aux évaluations stratégiques environnementales ont été développés, par exemple le guide en dix étapes rédigé par la Banque de développement des Caraïbes ou l’utilisation d’évaluations d’impact sur l’environnement dans le cadre de différents projets en Australie, au Canada et aux Pays-Bas (Agrawala et al., 2010 ; PNUE, 2014). Au Sri Lanka, le gouvernement a utilisé des évaluations stratégiques environnementales afin de développer un cadre de développement durable pour la reconstruction de la Province du Nord, en prenant en compte les principaux aléas tels que les ondes de tempête, les inondations, les tsunamis et l’élévation du niveau des océans (PEDRR, 2010). En raison de l’absence d’indicateurs de résultat cohérents, il est difficile d’évaluer dans quelle mesure ces progrès au niveau politique se sont traduits concrètement sur le terrain. Pour l’heure, 249


différents éléments anecdotiques suggèrent un élan croissant dans certains domaines et la persistance de défis dans d’autres. Changement climatique La lutte contre le changement climatique a émergé comme un secteur à part entière au niveau national, régional et international, qui possède ses propres dispositions institutionnelles, ses cadres de référence mondiaux et ses mécanismes de financement. Depuis la formulation du Programme de travail de Nairobi lors de la Conférence des Parties en 2006, une kyrielle de stratégies, de cadres de référence et de mécanismes de financement a créé une impression de convergence et de cohérence entre les agendas de la lutte contre le changement climatique, de la réduction des risques de catastrophe et du développement durable (PNUE, 2014). Dans la réalité toutefois, cette impression se heurte à l’absence de véritable intégration au niveau des institutions et des pratiques (SEI, 2014). Les Philippines, le Viet Nam et d’autres pays du Pacifique sont parvenus à saisir l’opportunité pour fusionner effectivement les réglementations et les consignes techniques de même que les cadres politiques et budgets nationaux couvrant la réduction des risques de catastrophe et l’adaptation au changement climatique. Ces pays demeurent néanmoins minoritaires et la plupart des politiques nationales (bien que chaque domaine fasse référence à l’autre) maintiennent un cloisonnement strict des concepts, des plans, des méthodologies, des voies de remontée de l’information, des responsabilités, des budgets et d’autres domaines (Ibid.). Dans le même temps, un grand nombre de projets d’adaptation au changement climatique intègrent amplement la réduction des risques de catastrophe, même s’ils ne sont pas explicitement libellés en tant que tels (UNISDR, 2009a). Par ailleurs, le secteur de la lutte contre le changement climatique a probablement bénéficié d’une 250

Partie III - Chapitre 12

influence politique beaucoup plus importante à tous les niveaux par comparaison au secteur de la réduction des risques de catastrophe. Il est probable que le secteur de la réduction des risques de catastrophe bénéficie de l’élan généré par le secteur de la lutte contre le changement climatique, même si leur intégration demeure encore limitée dans la pratique. Gestion de l’environnement Différentes approches et outils de gestion de l’environnement prennent aujourd’hui les risques de catastrophe explicitement en compte. Par exemple, la gestion intégrée des ressources en eau prend en compte les risques de catastrophe afin de gérer l’offre excédentaire et/ou la rareté de l’eau (PNUE, 2014). La directive sur les inondations de l’Union européenne ainsi que la stratégie de développement du bassin du Mékong basée sur les ressources en eau de la Commission du Mékong (Mekong River Commission) sont des exemples de telles approches, qui couvrent une superficie significative et se montrent très ambitieuses (Commission européenne, 2007 ; Commission du Mékong, 2010). De même, des approches nationales et régionales d’intégration de la réduction des risques de catastrophe dans la gestion de l’environnement existent dans le contexte de la gestion des incendies de forêt (par exemple en Jamaïque et au Liban), de la gestion des zones côtières (par exemple au Belize, au Viet Nam et au Kenya) et de la gestion des zones protégées (par exemple au Mali, en Nouvelle-Zélande et au Népal) (PNUE, 2014). L’application concrète de ces outils semble gagner du terrain. Les exemples d’approches intégrées appliquées au niveau de collectivités qui ont été généralisés à plus haut niveau demeurent toutefois peu nombreux. On en trouve un exemple dans le cas de la gestion de l’eau basée sur une approche locale à la frontière entre le Guatemala et le Mexique. Dans ce cas précis, les initiatives locales ont bel et bien permis d’aboutir à une stratégie nationale


(UICN, 2012). Dans la municipalité guatémaltèque de Tacana, 14 comités responsables de microbassins hydrologiques ont pu collaborer avec les autorités municipales afin de développer une coordination entre différentes organisations gouvernementales et non gouvernementales au niveau infranational. Cette réussite a été reproduite dans d’autres municipalités et a conduit à la création d’une commission nationale responsable des microbassins hydrologiques au Guatemala (Ibid.).

notamment la réduction des risques d’inondation. Par exemple dans la Vallée de Napa en Californie, des infrastructures vertes ont été mises en place à travers la création de zones humides (et la protection des zones humides existantes) et la réhabilitation de plaines inondables, et ont été combinées avec une série d’investissements dans des infrastructures grises, par exemple des protections classiques en roches et béton contre les inondations (Figure 12.7).

Approches écosystémiques de la réduction des risques de catastrophe Une autre pratique qui recèle un énorme potentiel encore inexploité est le paiement des services écosystémiques (UNISDR, 2009a). Bien que difficiles à évaluer en termes économiques, les services écosystémiques qui jouent un rôle de régulateur, par exemple la protection du sol et la gestion des inondations, ont bel et bien un impact économique, et donc une valeur (PNUE, 2014). Les exemples concrets de systèmes de paiement de ces services sont toutefois encore rares et nous sommes encore loin de leur généralisation (UNISDR, 2011a, 2013a).

La conservation et la réhabilitation des mangroves sont un autre domaine où des efforts considérables ont été consentis, bien que les résultats demeurent contrastés. Par exemple, 9 050 hectares de mangroves ont été plantés dans le Bengale-Occidental en Inde entre 1989 et 1995, avec un taux de réussite de seulement 1,5 % (Lewis, 2001). Les mangroves peuvent réduire l’impact des inondations en offrant une protection contre les ondes de tempête, en réduisant la hauteur des vagues de 50 centimètres et en réduisant les vagues de surface dues au vent de plus de 75 % (McIvor et al., 2013). Les conditions requises pour une réhabilitation réussie ne sont toutefois pas toujours réunies.

Les nouvelles approches associent également les infrastructures grises et vertes de manière à maximiser les différents services écosystémiques,

Afin de relever ces défis, des approches hybrides qui associent la reforestation des mangroves à

Figure 12.7 Contrôle concret des crues grâce à des infrastructures gris-vert dans la Vallée de Napa en Californie

Le projet a créé plus de 364 hectares de zones humides.

À marée haute, ces terrasses réhabilitées sont inondées et créent un habitat particulier.

Le projet comporte également des protections c assi ues en dur en certains endroits par exemple ce segment de rive vulnérable adjacent au centre-ville de Napa.

Lorsque les eaux montent, ce canal de dérivation dévie l'eau vers un ancien méandre du fleuve, qui constitue un important habitat de plaine inondable.

NORD

Quatre axes de réhabilitation et d'amélioration

© Napa County Flood Control and Water Conservation District

Une grande partie de la plaine inondable historique a été réhabilitée, ce qui a permis d'accroître significativement le volume d'eau pouvant être charrié par le lit du fleuve sans inonder les zones développées.

Création d'une terrasse de marée Création d'une promenade le long du fleuve Réhabilitation de la plaine inondable Création de zones humides

(Source : Conservation International, 2014.)

251


naturelles, et que ceux-ci se sont révélés efficaces pour inverser la perte de biodiversité et le déclin des écosystèmes au niveau local (OCDE, 2012). Par exemple, les efforts de reforestation et de régénération des forêts naturelles, en particulier dans les pays de l’OCDE et dans les économies émergentes, devraient commencer à montrer des résultats à partir de 2020, avec une augmentation significative du couvert forestier global qui devrait se poursuivre jusqu’en 2050 (Figure 12.8). Il existe également un élan pour l’adoption de solutions locales, par exemple les toitures végétales. Déjà évoquées dans les éditions précédentes du Bilan mondial (UNISDR, 2011a et 2013a), ces toitures font partie des techniques de construction qui améliorent la performance thermique et réduisent donc la consommation énergétique tout en améliorant le confort de vie et les conditions de travail, et qui réduisent les îlots thermiques urbains, améliorent la qualité de l’air et augmentent les espaces verts urbains tout en régulant le ruissellement en cas de fortes pluies, ce qui réduit les risques d’inondations.

des solutions structurelles traditionnelles ont également été développées afin de réduire la vulnérabilité des deltas et des zones côtières tout en créant dans le même temps des avantages socio-économiques (Winterwerp et al., 2003). Par exemple, dans le centre-nord de Java en Indonésie, les ceintures de mangroves ont été largement encouragées, mais elles n’ont pas pu stabiliser l’érosion des côtes et n’ont pas pu être réhabilitées en raison de la morphologie de ces dernières. Les côtes ont donc continué de se dégrader à une vitesse alarmante (Winterwerp et al., 2014). La combinaison de structures perméables d’une part et de techniques d’ingénierie d’autre part a toutefois permis l’accumulation de suffisamment de sédiments, créant ainsi une élévation suffisante pour une colonisation naturelle par les mangroves (Ibid.). Bien que les exemples d’approches réussies - ou non - de gestion des écosystèmes et de l’environnement abondent, il est difficile de mesurer leur impact au niveau mondial. Il n’empêche que des investissements significatifs sont consacrés à la réhabilitation et à la protection des ressources

Declaration on Forests

Figure 12.8 Évolution mondiale du couvert forestier (2010-2050) ouvert orestier 2010 100 115 ouvert orestier tota monde or ts primaires monde

110

ouvert orestier tota or ts primaires

ouvert orestier tota B or ts primaires B S

S

ouvert orestier tota reste du monde or ts primaires reste du monde

105

100

95

90

85

80

75 2010

2020

Remarque : BRIICS = Brésil, Russie, Inde, Indonésie, Chine, Afrique du Sud.

(Source : OCDE, 2012.)

252

Partie III - Chapitre 12

2030

2040

2050


Le dynamisme du secteur des toitures végétales est illustré par le fait que pour la seule Amérique du Nord, environ 1,86 million de mètres carrés de toitures végétales ont été installés en 2012, contre environ 464 000 mètres carrés en 2005 (Figure 12.9). Ceci ne représente toujours qu’un infime pourcentage de la superficie des nouvelles toitures (Green Roofs for Healthy Cities, 2014). Néanmoins, il est clair que les approches innovantes de ce type, dont l’initiative appartient aux ménages, aux collectivités, aux entreprises et aux autorités locales, gagnent du terrain, car elles offrent des avantages socio-économiques et environnementaux ainsi qu’en matière de réduction des risques de catastrophe. Figure 12.9 Augmentation estimée des toitures végétales en Amérique du Nord Pieds carrés installés par an 25 000 000

Si les projections actuelles de la croissance économique et de la consommation se maintiennent, la biocapacité de la planète sera dépassée d’environ 200 % d’ici à 2030. En d’autres termes, deux planètes supplémentaires seront nécessaires pour faire face à la consommation et absorber les déchets. En tant que métafacteur, ceci pose le risque de la kata-strophe ultime. La limite planétaire pour les émissions de CO2 a été fixée à 350 ppm7, mais les niveaux actuels frôlent déjà les 400 ppm et l’augmentation se poursuit (Figure 12.10). Carbon emissions

Figure 12.10 La croissance des émissions engendre des niveaux élevés de CO2 dans l’atmosphère CO2 (ppm) 420

20 000 000

400 380

15 000 000

360 10 000 000

340 320

5 000 000 300 1959 200

2005 200

200

200

200

2010 2011 2012 201

1965

1971

1977

1983

1989

1995

2001

2007

2013

(Source : UNISDR, données NOAA8.)

(Source : Green Roofs for Healthy Cities, 2014)

12.3

Dépasser les limites

La poursuite de la croissance économique repose sur une surconsommation croissante et intenable des ressources énergétiques, de l’eau douce, des ressources forestières et des habitats marins, de l’air pur et des sols fertiles. L’empreinte écologique excède actuellement la biocapacité de la planète d’environ 50 % et à défaut de changements sérieux dans les approches et les méthodologies employées, les projections ne prédisent rien de bon.

Les émissions annuelles mondiales de CO2 ont augmenté de 54 % entre 1990 et 2011 (GIEC, 2013). Les émissions par habitant varient énormément, et l’Amérique du Nord demeure largement en tête (AIE, 2013). Les émissions par unité de PIB ont diminué chez tous les gros émetteurs9, en particulier la Chine et la Russie, notamment grâce à une amélioration de l’efficacité énergétique tout au long de la chaîne de valeur énergétique. Cela n’a pourtant pas suffi à compenser l’augmentation des émissions par habitant. Par exemple, l’Inde et la Chine ont respectivement doublé et triplé leurs émissions par habitant entre 1990 et 2011 (OCDE et AIE, 2013). 253


À l’échelle mondiale, la moitié des quotas d’émission mis en place pour limiter le changement climatique à 2 °C avait déjà été épuisée en 2011 (GIEC, 2013). Si les émissions actuelles se maintiennent, ces quotas seront complètement épuisés d’ici à 2045, avec pour conséquence une augmentation de la température bien au-dessus des 2 °C. Même si les températures se stabilisent, les processus tels que l’évolution de la couverture glacière, le réchauffement des océans et le changement du couvert végétal, qui se déroulent sur de longues échelles de temps et présentent des interdépendances complexes, continueront d’influencer le climat durant des centaines voire des milliers d’années (Ibid.). Par conséquent, même si les émissions cessaient dès aujourd’hui d’aug-

menter, le changement climatique continuerait à générer des risques et à créer des « motifs de préoccupation » (Encadré 12.3). Ces risques comprennent les événements extrêmes liés au climat tels que les inondations, les cyclones, les feux de friche, les sécheresses et les vagues de chaleur, identifiés très clairement par le GIEC (GIEC, 2014). À leur tour, ces événements extrêmes vont altérer les écosystèmes, l’offre de denrées alimentaires et d’eau, les systèmes urbains et, au final, le bienêtre humain. Les aléas climatiques continueront d’exacerber les vulnérabilités et les expositions (GIEC, 2012, 2014). Si les émissions continuent d’augmenter sans aucun contrôle, ce risque peut devenir catastrophique. Global temperature

Encadré 12.3 Les cinq « motifs de préoccupation » présentés dans le cinquième Rapport d’évaluation du GIEC

Un dangereux changement climatique anthropique, c’est-à-dire induit par l’être humain, va continuer d’accroître les risques. Les scientifiques et les décideurs politiques ont identifié cinq motifs de préoccupation critiques pour le bien-être humain, économique et écosystémique. 1. Systèmes uniques et menacés : le changement climatique va affecter des écosystèmes et des cultures déjà menacés avec un réchauffement de 2 °C. Les glaces de l’Arctique et les systèmes de récifs coralliens, dont les capacités d’adaptation sont particulièrement faibles, se trouveront en grave danger. 2. Phénomènes météorologiques extrêmes : le risque d’événements extrêmes est déjà modéré. Il devrait augmenter sous l’effet de la hausse des températures. Un réchauffement plus important peut exacerber le risque de certains types d’événements, par exemple les vagues de chaleur. 3. Répartition des effets : ce sont généralement les collectivités les plus défavorisées qui sont les plus touchées par les risques inégalement répartis. Les impacts du changement climatique sont réputés varier en fonction des régions. Il existe un important risque d’impacts inégalement répartis en cas de réchauffement supérieur à 2 °C. 4. Effets cumulés à l’échelle mondiale : le risque d’effets cumulés sur la biodiversité et l’économie mondiale est modéré dans le cas d’un réchauffement compris entre 1 et 2 °C. Ces effets cumulés augmentent avec la hausse des températures et les risques deviennent élevés dans le cas d’un réchauffement supérieur ou égal à 3 °C. 5. Singularités à grande échelle : les risques associés à des changements soudains et irréversibles dans certains systèmes physiques et écosystèmes sont modérés pour un réchauffement compris entre 0 et 1 °C, alors que les écosystèmes arctiques et les systèmes de récifs coralliens subissent déjà des changements irréversibles. Une augmentation disproportionnée des risques est attendue dans le cas d’une variation des températures comprise entre 1 et 2 °C. Des risques élevés seront associés à un réchauffement supérieur ou égal à 3 °C compte tenu de l’élévation potentielle du niveau des océans provoquée par la fonte des glaciers.

(Source : GIEC, 2014.)

254

Partie III - Chapitre 12


La production d’énergie et par conséquent sa consommation contribuent également à l’épuisement de ressources naturelles telles que l’eau. La demande mondiale en eau va connaître une augmentation considérable, même si les méthodes agricoles deviennent plus économes en eau (OCDE, 2012). Cette augmentation sera principalement due à une demande croissante de production d’électricité et de production manufacturière

sur les marchés émergents tels que le Brésil, la Chine et l’Inde (Figure 12.11). Il est estimé que d’ici à 2050, 40 % de la population mondiale vivra dans des bassins versants soumis à un important stress hydrique, en particulier en Afrique et en Asie (Figure 12.12). Selon les prévisions, l’épuisement des eaux souterraines risque de devenir un sérieux défi pour

Figure 12.11 Demande mondiale en eau d’ici à 2050 Km3 000 Électricité

5 000

Production Élevage Utilisation domestique

000

Irrigation

000

2 000

1 000

2000

2050

OCDE

2000

2050

Pays BRIICS

2000

2050

Reste du monde

2000

2050

Monde

Remarque : BRIICS = Brésil, Russie, Inde, Indonésie, Chine, Afrique du Sud. RdM = reste du monde.

(Source : OCDE, 2012.)

Figure 12.12 Projection de la population soumise à un stress hydrique sévère d’ici à 2050

Niveau de sévérité (taux d'exploitation des ressources en eau r s aib e

01

aib e 0 1 0 2 o en 0 2 0 Sév re

0

(Source : OCDE, 2012.)

255


l’agriculture et l’approvisionnement en eau des zones urbaines, et bien que l’approvisionnement en eau soit globalement appelé à s’améliorer, il est vraisemblable que plus de 240 millions de personnes n’auront pas accès à l’eau potable d’ici à 2050 (OCDE, 2012). Ceci n’augure rien de bon pour la réduction des risques de catastrophe. Sea level rise

Les projections actuelles montrent que la vitesse et l’ampleur potentielles du déclin des écosystèmes (dont l’élévation du niveau des océans n’est pas la moindre cause) risquent de rendre insuffisants et inefficaces les efforts actuels de gestion des risques de catastrophe. Par exemple, la diminution mondiale des zones humides, estimée à 50 % depuis le début du XXe siècle, va conduire à une réduction sévère de la capacité mondiale et surtout locale à absorber les eaux durant les inondations et à limiter les débits de pointe (TEEB, 2013). Pour les zones humides côtières, c’est-à-dire celles qui occupent les deltas des principaux fleuves du monde, un recul de 52 % a été enregistré entre les années 1980 et le

début des années 2000 (Coleman et al., 2008). Des estimations mondiales de la future diminution des zones humides ne sont actuellement pas disponibles, mais les projections locales et régionales dressent un triste bilan. Par exemple, la zone située au sud de Freeport au Texas devrait perdre une importante superficie de zones humides en raison de l’élévation du niveau des océans d’ici à 2050 (Figure 12.13). Le coût de la perte des zones humides à cause des dommages occasionnés par l’absence de protection contre les tempêtes est potentiellement considérable. Aux États-Unis, le coût d’une perte de 1 hectare de zone humide côtière a été estimé à 33 000 dollars américains (Constanza et al., 2008). D’autres écosystèmes essentiels pour la biodiversité tels que les mangroves et les récifs coralliens connaissent également une dégradation rapide. La FAO estime que la superficie totale des mangroves côtières dans le monde a reculé de 188 000 km² en 1980 à 152 000 km2 en 2005, soit une perte de 20 % en l’espace de seulement 25 ans (2007). Il a été démontré que les récifs co-

Figure 12.13 Projection de l’évolution des zones humides côtières au Texas d’ici à 2050

Zones humides d'eau salée

Hautes terres

Zones très développées

Zones humides d'eau douce

Eaux

Zones peu développées

[Source : NOAA (http://coast.noaa.gov/digitalcoast/dataregistry/#).]

256

Partie III - Chapitre 12

Littoral non consolidé


Figure 12.14 Projection du déclin des récifs coralliens

30°N 15°N 0° 15°S 30°S 0°

90°E 2030

2032

180° 2034

2036

2038

2040

2042

2044

90°W 2046

2048

2050

2052

2054

0° 2056

(Source : van Hooidonk et al., 2013.)

ralliens atténuaient les ondes de tempête, mais ils sont également sur le déclin. Par exemple, 85 % des récifs d’huîtres ont été perdus entre 1930 et 2003 selon les estimations (Butchart et al., 2010). À l’échelle mondiale, 90 % des récifs devraient subir un blanchissement sévère d’ici à 2050 (Figure 12.14).

bien-être humain et social, sans faire l’erreur de simplement protéger le modèle qui est occupé à la détruire.

La destruction des systèmes planétaires promet la kata-strophe ultime. Selon les projections les plus pessimistes, la planète aura perdu tous ses glaciers dans seulement quelques centaines d’années, et les océans seront devenus stériles. Il ne fait aucun doute qu’il y aura toujours des gagnants et des perdants dans l’évolution des équations qui régissent les interactions des systèmes planétaires. Il est toutefois clair que les hypothèses actuelles du développement socio-économique et de l’urbanisation ne l’emporteront pas. Il reste à savoir si le pouvoir de la kyrielle d’initiatives locales visant notamment à promouvoir les infrastructures vertes, les énergies renouvelables et la réhabilitation de la biodiversité parviendra à inverser suffisamment rapidement le cours des choses. Néanmoins, même si ces initiatives sont insuffisantes et trop tardives, elles constituent tout de même une lueur d’espoir. Au final, la question essentielle est de savoir comment protéger notre planète nourricière, qui constitue la base du

2 Données de la Banque mondiale : http://data.worldbank.org.

Notes 1 http://aosis.org/reports-fiji-latest-country-to-relocate-climaterefugees (consultation le 11 janvier 2015). 3 Le débat reste ouvert quant au calcul des valeurs précises de ces limites planétaires. En outre, les chercheurs sont d’accord pour dire que certaines limites ne s’appliquent pas à l’échelle mondiale et que ce sont plutôt les conditions locales qui définiront le dépassement de certains seuils critiques. Par ailleurs, l’interprétation des données en vue de l’élaboration de politiques comporte certaines difficultés et la définition arbitraire des limites acceptables peut créer de nouveaux risques (http://www.nature.com/nature/ journal/v461/n7263/full/461447b.html). En dépit de ces écueils, le débat autour des limites planétaires a permis d’ouvrir la voie à une discussion plus approfondie des modèles de consommation intenables qui existent actuellement. Pour en savoir plus sur les limites planétaires, voir la page http://www.nature.com/news/specials/ planetaryboundaries/index.html. 4 http://www.unccd.int/en/about-the-convention/Pages/Aboutthe-Convention.aspx (consultation le 11 janvier 2015). 5 http://www.ramsar.org /cda/en/ramsar-documents-textsconvention-on/main/ramsar/1-31-38%5E20671_4000_0. 6 http://www.cbd.int/sp. 7 La valeur de 350 ppm a été identifiée comme la limite si le réchauffement mondial n’excède pas 2 °C (ppm = parties par million, c’est-à-dire le ratio entre le nombre de molécules de gaz et le nombre total de molécules d’air sec). 8 http://co2now.org/Current-CO2/CO2-Now/noaa-mauna-loa-co2data.html. 9 Les plus gros émetteurs par ordre d’importance depuis 1990 sont la Chine, les États-Unis d’Amérique, la Fédération de Russie, l’Inde et le Japon (AIE, 2013).

257



Chapitre 13

Conclusion : rendre le développement durable

Alors que la communauté internationale s’apprête à définir les visées des bjectifs de développement durable DD , qui seront pour la première fois destinés à une application universelle, il est urgent de réinterpréter la réduction des risques de catastrophe de manière à l’intégrer au processus de développement à travers une série d’approches et de méthodes qui se renforcent mutuellement. Sans une gestion efficace des risques de catastrophe, le développement durable ne sera pas durable et les DD ne pourront être réalisés. La réduction des risques de catastrophe est tout à fait possible. Des décennies d’expérience dans la gestion des catastrophes et la réduction des risques climatiques et de catastrophe ont permis d’acquérir de vastes connaissances en la matière et d’élaborer des méthodes de référence qui peuvent être appliquées dans les secteurs social et productif, et qui par ailleurs se justifient financièrement.

13.1

Un changement nécessaire

L’accumulation des risques de catastrophe met aujourd’hui directement à rude épreuve la capacité de nombreux pays à réaliser les investissements en capital et à consentir les dépenses sociales nécessaires à un développement durable. Outre de la surconsommation et des inégalités, le modèle de développement actuel génère également des risques de catastrophe qui s’accumulent, avec des impacts à trois niveaux. Tout d’abord, les décisions d’investissement publiques et privées qui ne prennent pas en compte les aléas sont susceptibles de générer des risques, des pertes et des impacts pour les investisseurs eux-mêmes, comme l’ont découvert à leurs dépens des entreprises telles que Toyota lors des crues du fleuve Chao Phraya survenues en Thaïlande en 2011. 2011 hailand oods

Ensuite, et comme l’ont montré de nombreux exemples contenus dans ce rapport ainsi que

dans les éditions précédentes, ces risques, pertes et impacts ne sont le plus souvent pas supportés par ceux-là mêmes qui prennent les risques, mais sont transférés à d’autres secteurs de la société ou territoires. C’est par exemple le cas de projets immobiliers urbains de nature spéculative qui peuvent accroître les risques d’inondation pour les ménages qui résident dans des établissements informels dans d’autres quartiers d’une ville. Enfin, comme le démontrent le changement climatique et la destruction de la biodiversité, d’autres risques sont transférés au patrimoine naturel. En conséquence, les différents systèmes planétaires dont dépend notre survie sont aujourd’hui en danger, un scénario dans lequel personne ne ressortira gagnant au bout du compte. Le monde a désormais dépassé son point d’équilibre, que ce soit en matière sociale, économique, politique ou environnementale. Les modèles qui tentent de représenter l’avenir se caractérisent par une incertitude croissante, car les valeurs aberrantes, c’est-à-dire les observations qui sortent du cadre de ce qui apparaîtrait comme des prévisions raisonnables, deviennent la nouvelle norme. 259


Dans le pire scénario, une kata-strophe d’envergure mondiale menace, alors que la surconsommation épuise progressivement la biocapacité des systèmes planétaires et que des risques de catastrophe qui augmentent rapidement et sont inégalement répartis érodent la résilience de ceux qui ont le plus besoin de se développer. L’accumulation des risques de catastrophe met aujourd’hui directement à rude épreuve la capacité de nombreux pays à réaliser les investissements en capital et à consentir les dépenses sociales nécessaires à un développement durable.

le développement social. Ceci montre que le développement durable est possible. Si la consommation de l’ensemble de la population mondiale était au niveau de la moyenne par habitant des États-Unis d’Amérique, l’équivalent de quatre planètes Terre serait nécessaire pour assurer la biocapacité requise. Malheureusement, il n’existe aujourd’hui qu’une seule planète Terre. C’est pourquoi un modèle de développement qui repose sur la croissance économique et qui génère de la surconsommation et des inégalités est intenable.

En conséquence, si nous souhaitons un jour parvenir au résultat escompté du CAH, à savoir « réduire de manière substantielle les pertes en vies humaines et les dommages subis par les collectivités et les pays sur les plans social, économique et environnemental à cause des catastrophes », il existe un consensus croissant autour de la nécessité de s’attaquer aux facteurs de risque générés par le développement, par exemple le changement climatique, la surconsommation des ressources naturelles, la pauvreté et les inégalités.

Un consensus croissant se dégage aujourd’hui quant à la nécessité d’évoluer vers une économie à faibles émissions de carbone, ce qui implique des transformations dans d’autres domaines, par exemple dans l’agriculture et le développement urbain (Rockström et al., 2013). Les valeurs implicites du développement semblent bien évoluer, et remettent totalement en question des idées reçues bien ancrées concernant la croissance économique, le bien-être social et les risques.

Pour ce faire, il est essentiel de gérer plus efficacement les risques de catastrophe. Ceci implique toutefois de revoir la façon dont la réduction des risques de catastrophe a été envisagée et mise en pratique jusqu’ici. Gérer les risques et non plus seulement les catastrophes qui surviennent parce que des risques n’ont pas été gérés doit devenir la nouvelle règle dans le cadre du processus de développement. À défaut, le développement durable ne sera pas durable.

Les émissions annuelles mondiales de CO2 frôlent désormais les 5 tonnes par habitant. Jusqu’il y a peu, on considérait qu’une augmentation de la consommation énergétique avait un impact positif et nécessaire sur le développement social et humain (von Hauff et Kundu, 2002). De même, une hausse continue du PIB était jugée nécessaire pour parvenir au bien-être social et au développement humain. Ces idées reçues sont aujourd’hui remises en question.

13.2

Pas de planète B

Les revenus et la consommation énergétique doivent certes augmenter dans les pays à faible revenu afin de garantir le progrès social. Toutefois, au-delà d’un certain seuil, l’augmentation des revenus et de la consommation énergétique ne présentent plus une corrélation étroite avec 260

Chapitre 13

Comme le montre la Figure 13.1, la relation entre augmentation de la consommation énergétique et développement humain (mesurée selon l’Indice de développement humain) n’est pas linéaire. D’un côté de la courbe, une augmentation ne serait-ce que minime de la consommation énergétique entraîne des progrès majeurs sur le plan du développement humain. En revanche, au-delà d’un certain point, les progrès en termes


igure 13.1 Relation non linéaire entre le développement humain et la consommation énergétique

Indice de développement humain (IDH) 2013 1

Suisse

0,9 0,8

Cuba

Allemagne Chili

Norvège

Libye

Australie

Canada

États-Unis d'Amérique Bahreïn

Qatar

Koweit

Oman

Kazakhstan

0,7

Luxembourg

Trinité-et-Tobago

Afrique du Sud

Irak 0,6

Guinée équatoriale 0,5 0,4 0,3

Côte d'Ivoire Guinée-Bissau République centrafricaine Niger

0,2 0,1

5

10

15

20

25

30

35

40

45

Émissions de CO2 (tonnes métriques par habitant)

(Source : Costa et al., 2011.)

de développement résultant d’une hausse de la consommation énergétique deviennent de plus en plus ténus. Par exemple, la consommation de CO2 aux États-Unis d’Amérique (environ 20 tonnes par habitant) représente près de quatre fois celle de la Suisse, bien que les deux pays présentent un développement humain similaire. Cet exemple montre que le développement humain n’est pas incompatible avec une faible consommation énergétique. Actuellement, le point d’inflexion de la courbe semble se situer autour de la moyenne mondiale de 5 tonnes de CO2 par habitant. Ceci implique toujours des niveaux d’émission beaucoup trop élevés pour lutter contre le changement climatique et parvenir à la durabilité. Par ailleurs, de nombreux pays à faible revenu doivent encore radicalement augmenter leur consommation énergétique pour parvenir à un niveau viable de développement. Néanmoins, à mesure que l’efficacité énergétique augmente et que de nouvelles technologies apparaissent, il est probable que le point d’inflexion se déplacera vers le haut et vers la gauche, permet-

tant ainsi un développement humain plus important pour une consommation énergétique plus faible. Des points d’inflexion similaires peuvent être observés en matière de progrès social (Porter et al., 2014), d’espérance de vie (Jackson, 2009) ainsi que de perception du bien-être ou du bonheur. Tout comme pour la consommation énergétique et le développement humain, la relation entre la croissance économique et le progrès social évolue à mesure que le revenu augmente (Figure 13.2). À un niveau de revenu plus faible, une petite hausse du PIB est associée à une augmentation importante du progrès social. Cependant, lorsqu’un pays atteint un niveau élevé de revenu, les progrès sociaux rapides suscités par le développement économique s’amenuisent. Par exemple, le Costa Rica, un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure dont le PIB par habitant s’élève à 11 165 dollars américains, a atteint un niveau de progrès social supérieur à celui de l’Italie dont le PIB par habitant est de 26 310 dollars américains. 261


igure 13.2 Relation non linéaire entre le progrès social et le PIB

Indice du progrès social 90 Nouvelle-Zélande Australie Japon

Allemagne États-Unis d'Amérique

Portugal 80

Slovaquie

Costa Rica

70

Italie

Chili

Maurice

Grèce

Panama Argentine

Jamaïque Brésil

Équateur

Trinité-et-Tobago

Mexique Turquie

60

Chine Ouzbékistan Sénégal

50

Inde Congo Iraq Pakistan

40

Niger Burundi République centrafricaine Tchad

30

10 000

20 000

0 000

0 000

50 000

0 000

0 000

0 000

PIB par habitant [2013]

(Source : Indice du progrès social 20141.)

Ces deux exemples soulignent que parvenir au développement humain et au progrès social ne dépend pas d’une croissance économique continue et de l’augmentation de la consommation énergétique. En d’autres termes, le développement durable est possible. On observe aujourd’hui un élan croissant pour transformer les pratiques de développement, dont plusieurs prennent directement en compte les facteurs de risque sous-jacents et contribuent à réduire les risques de catastrophe. Par exemple, la réduction de la consommation énergétique et le passage à des sources d’énergie renouvelables réduisent le risque de changement climatique catastrophique, la protection et la réhabilitation des écosystèmes qui jouent un rôle régulateur peuvent réduire les aléas liés 262

Chapitre 13

aux conditions météorologiques et une agriculture raisonnée en fonction du climat peut améliorer la sécurité alimentaire. Les trois éditions précédentes du Bilan mondial ont systématiquement identifié et mis en avant de telles pratiques comportant des avantages connexes en matière de réduction des risques de catastrophe. Ces pratiques vont des toitures végétales aux approches écosystémiques, en passant par la gestion des inondations, les approches innovantes de la protection sociale et les approches participatives du développement urbain. Bien qu’encore à leurs balbutiements, ces pratiques démontrent bel et bien dans quelle mesure les nouvelles approches de la transformation du développement prennent en compte les facteurs de risque sous-jacents et permettent de réduire les risques.


13.3

estion des facteurs endogènes

La gestion des risques inhérents à l’activité socio-économique plutôt que l’intégration de la réduction des risques de catastrophe pour protéger contre des menaces externes constitue une approche radicalement différente de la réduction des risques de catastrophe telle qu’elle se pratique actuellement. L’utilisation de la notion d’année de vie humaine comme mesure commune des pertes dues aux catastrophes offre aujourd’hui une image plus complète de la véritable ampleur et de l’impact réel de ces pertes. Cette approche souligne que les risques de catastrophe menacent aujourd’hui autant le développement humain et le progrès social que certaines maladies qui peuvent être prévenues, comme la tuberculose et le paludisme qui sévissent dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire. Les ODD feront vraisemblablement une place importante à la santé afin de réduire le poids des maladies à l’échelle mondiale, par exemple en mettant un terme à toutes les épidémies de maladies transmissibles d’ici à 2030. La réduction des risques de catastrophe peut aujourd’hui être considérée comme tout aussi importante pour parvenir à un modèle de développement plus durable et plus équitable. Managing risks

Jusqu’ici, la relation entre la réduction des risques de catastrophe, le changement climatique et le développement durable a été abordée à travers la notion d’intégration. Toutefois, vouloir intégrer la réduction des risques de catastrophe dans le cadre du développement durable ou de l’adaptation au changement climatique, ou encore y intégrer la réduction de la pauvreté, la protection des écosystèmes ou la bonne gouvernance, trahit

la persistance d’une perception des catastrophes et du changement climatique comme des facteurs externes qu’il convient de réduire plutôt que comme des facteurs endogènes ou internes au développement. Gérer ces facteurs endogènes au sein même du développement constitue une approche radicalement différente de l’intégration de la réduction des risques de catastrophe pour protéger contre des facteurs exogènes. Elle implique que la gestion des risques doit devenir une composante essentielle du développement durable. La gestion des risques, plutôt que la gestion des catastrophes comme indicateurs des risques non pris en charge, doit aujourd’hui être ancrée dans l’ADN du développement et ne plus être un accessoire qui doit lui être intégré. La gestion des risques de catastrophe passe par trois approches qui se renforcent mutuellement : •  la  gestion prospective des risques : prévenir ou éviter l’accumulation de risques nouveaux ou futurs grâce à des décisions de développement raisonnées en fonction des risques, y compris dans le cadre du redressement et de la reconstruction à l’issue d’une catastrophe ; •  la  gestion corrective des risques : limiter ou réduire les risques existants en investissant dans des mesures correctives, notamment dans l’alerte précoce et la préparation ; •  la gestion compensatoire des risques : prendre des mesures afin de renforcer la résilience des individus et des sociétés face aux risques résiduels qui ne peuvent pas être efficacement réduits. Ces trois approches soutiennent les trois agendas internationaux en cours de négociation en 2015, à savoir la réduction des risques de catastrophe, l’adaptation au changement climatique et le développement durable (Tableau 13.1). En outre, elles peuvent faciliter l’intégration de ces 263


ableau 13.1 Gérer les risques de catastrophe afin d’appuyer la réduction des risques de catastrophe, de lutter contre le changement climatique et de promouvoir le développement durable Prospective

Corrective

Compensatoire

Atténuation du changement climatique

Adaptation au changement climatique

Renforcer la résilience financière et sociale aux catastrophes

Changement climatique

Prévenir ou éviter la création de nouveaux risques

Réduire ou atténuer les risques existants

Renforcer la résilience aux risques climatiques

Développement durable

Contribuer à la durabilité des nouveaux développements

Renforcer la durabilité des développements existants

Renforcer la résilience aux risques et aux chocs quotidiens

Réduction des risques de catastrophe

(Source : UNISDR.)

agendas, puisqu’il est clair que les risques de catastrophe et le changement climatique sont en fin de compte des manifestations d’un processus de développement intenable. La gestion prospective des risques de catastrophe est probablement celle qui se rapproche le plus de la notion de durabilité. Comme nous l’avons souligné plus haut, il ne s’agit pourtant pas de simplement intégrer ces méthodes. En revanche, il est nécessaire de développer de nouveaux paramètres, principes et outils qui transforment les réflexions et les méthodes existantes de l’intérieur. Plus important peut-être, alors que la gestion corrective des risques et la gestion compensatoire des risques peuvent être interprétées dans le cadre des perceptions et des méthodes actuelles de la gestion des risques de catastrophe, la gestion prospective des risques remet plus largement en cause ce modèle, étant donné que son efficacité dépend plus des moyens politiques que des ressources financières. Les chiffres gonflent Il est indispensable de gérer les différentes strates des risques de catastrophe en combinant les stratégies prospectives, correctives et compensatoires si l’on veut réduire les PAM mondiales associées aux séismes, aux tsunamis, aux cyclones tropicaux et aux inondations dans les zones construites, qui sont estimées à 314 milliards de dollars américains, et si l’on veut parvenir à un 264

Chapitre 13

développement durable. L’investissement dans la réduction des risques de catastrophe constitue donc une condition préalable au développement durable dans le contexte du changement climatique. Cette condition préalable peut être atteinte et se justifie financièrement. Si les risques ne sont pas réduits, ces pertes prévisionnelles vont avoir des répercussions importantes en termes de coût pour le développement. En particulier dans les pays où les risques de catastrophe représentent aujourd’hui une part significative des investissements en capital et des dépenses sociales, les possibilités de développement futur seront sérieusement entravées. Dans de telles circonstances, il sera difficile d’aboutir à un développement ne serait-ce que soutenable, pour ne pas dire durable. Selon les estimations actuelles, 90 000 milliards de dollars américains devront être investis dans les infrastructures (urbaines, aménagement du territoire et systèmes énergétiques) d’ici à 2030 (Global Commission on the Economy and Climate, 2014). Ceci représente une moyenne de 6 000 milliards de dollars américains par an au cours des 15 prochaines années. Les investissements supplémentaires requis pour la transition vers des infrastructures à faibles émissions de carbone sont estimés à environ 4 000 milliards de dollars américains, soit 270 milliards de dollars américains par an (Ibid.). Si ces investissements ne sont pas raisonnés en fonction des risques, les


PAM mondiales continueront d’augmenter, même sans prendre en compte l’augmentation vraisemblable des aléas due au changement climatique et à d’autres facteurs. Dans de nombreux pays, cette augmentation des risques pourrait bien empêcher un développement durable. Les rapports coûts-avantages (RCA) de la réduction des risques de catastrophe peuvent uniquement être évalués dans des contextes locaux spécifiques et pour des stratégies spécifiques de gestion des risques de catastrophe (Shreve et Kelman, 2014) : il n’existe pas de valeur universellement valable. Dans le cas de la gestion corrective des risques de catastrophe, les coûts peuvent excéder les avantages purement économiques (UNISDR, 2011a ; Kunreuther et Michel-Kerjan, 2012). Dans les pays où une forte proportion des actifs est exposée à des risques et où les investissements sont faibles, la gestion corrective des risques de catastrophe devient toutefois très importante. Et si l’on intègre également les avantages indirects de la réduction des risques, le RCA des investissements correctifs devient plus attractif. Les RCA types pour la gestion prospective des risques de catastrophe semblent compris dans une fourchette de 3:1 à 15:1 (Shreve et Kelman, 2014) et un rapport général de 4:1 a été suggéré (Mechler et al., 2014 ; Gouvernement du RoyaumeUni, 2012) comme ordre de grandeur des avantages potentiels d’investissements raisonnés en fonction des risques2. Une application de ce RCA aux nouveaux investissements potentiels dans les infrastructures signifierait que des investissements annuels mondiaux à hauteur de seulement 6 milliards de dollars américains dans la réduction des risques de catastrophe au cours des 15 prochaines années3 généreraient un bénéfice total de 360 milliards de dollars américains en termes de pertes évitées sur toute la durée de vie des investissements (par exemple, 50 ans pour les infrastructures)4. Ceci re-

présente une réduction annuelle de plus de 20 % des nouvelles PAM engendrées. Cette réduction substantielle des pertes prévisionnelles est comparativement peu coûteuse par rapport aux fonds actuellement consacrés à l’atténuation du changement climatique ou aux investissements futurs requis dans les infrastructures énergétiques, de télécommunications et de transport (CNUCED, 2014). Étant donné que les RCA et les taux d’actualisation appliqués varient largement en fonction des investissements spécifiques considérés, les chiffres ci-dessus indiquent uniquement l’ordre de grandeur possible des investissements requis. Étant donné que les investissements dans de nouvelles infrastructures permettent de remplacer progressivement les infrastructures vulnérables existantes, ceux-ci protégeraient non seulement les nouveaux développements, mais les PAM mondiales seraient également progressivement réduites. Ceci montre que la réduction des risques de catastrophe est non seulement essentielle pour le développement durable, mais constitue également un investissement intelligent.

13.4

L’avenir de la gestion des risques de catastrophe

Par conséquent, alors que la communauté internationale s’apprête à définir les visées des Objectifs de développement durable (ODD), qui seront pour la première fois destinés à une application universelle, il est urgent de réinterpréter la réduction des risques de catastrophe de manière à l’intégrer au processus de développement à travers une série d’approches et de pratiques qui se renforcent mutuellement. Comme le montre le Chapitre 6, la réduction des risques de catastrophe connaît elle-même une rapide évolution. De nouveaux acteurs, notamment les municipalités, les entreprises et le secteur financier, sont moteurs de changement. Les innovations dans des domaines aussi divers que 265


la gouvernance des risques, la connaissance des risques, l’analyse coûts-avantages et la responsabilité remettent en cause les idées reçues et créent de nouvelles opportunités (Figure 13.3). Plutôt qu’un programme ou un cadre d’action, le Bilan mondial 2015 présente une discussion sur l’avenir d’une gestion des risques de catastrophe qui intègre ces innovations permanentes. L’objectif est de stimuler la réflexion, le débat et l’amélioration des méthodes employées, alors que les différents pays abordent les défis posés par les nouveaux accords internationaux en matière de réduction des risques de catastrophe, de lutte contre le changement climatique et de développement durable en 2015 et au-delà.

13.5

Réformer la gouvernance afin de gérer les risques de catastrophe

Alors que les différents pays continuent d’avoir besoin d’un secteur spécialisé dans la gestion des catastrophes, afin de se préparer aux catastrophes et d’intervenir lorsque celles-ci surviennent, la gestion des risques de catastrophe

et des risques climatiques dans le cadre du développement nécessite une nouvelle approche. Dans cette optique, il est nécessaire de renforcer les outils de gouvernance des différents secteurs et territoires afin de réduire au maximum les futurs risques et d’accroître la transparence et la responsabilité vis-à-vis des risques qui sont produits, transférés et maintenus. Un secteur spécialisé dans la gestion des catastrophes demeure nécessaire Les outils de gouvernance requis pour la gestion des catastrophes sont différents de ceux requis pour la gestion des risques. La gestion des catastrophes en tant qu’événements, en particulier l’alerte, la préparation et l’intervention, constitue un domaine spécialisé de gouvernance pour lequel les nombreuses dispositions institutionnelles et législatives développées au cours des quelque 30 dernières années sont appropriées, en dépit de certains écueils importants. Il est par conséquent nécessaire de maintenir dans chaque pays un secteur spécialisé dans la gestion des catastrophes, les situations d’urgence et autres incidents, notamment maritimes, aériens,

Figure 13.3  L’avenir de la gestion des risques de catastrophe

Réformer la gouvernance

Passer de l'information sur les risques à la connaissance des risques

Rendre le développement durable

Évaluer les coûts et les avantages

(Source : UNISDR.)

266

Chapitre 13

Renforcer la responsabilité


industriels et environnementaux. Dans la mesure où les risques continuent de se développer, la nécessité d’organisations spécialisées dans la gestion des catastrophes se renforce plutôt qu’elle ne décroît. En d’autres termes, les différents pays doivent continuer de renforcer leurs capacités de gestion des catastrophes, notamment les compétences professionnelles spécialisées, les dispositions institutionnelles, les politiques et les législations requises à cet effet. Des outils de gouvernance plus efficaces pour la gestion des risques de catastrophe dans les différents secteurs et territoires En revanche, la gestion des risques de catastrophe exige de renforcer les outils de gouvernance dans les différents secteurs et territoires. Plutôt que de se concentrer sur des outils spécialisés de gouvernance des risques de catastrophe, la question essentielle est de savoir comment améliorer globalement la gouvernance pour réduire au maximum les futurs risques et accroître la transparence et la responsabilité vis-à-vis des risques qui sont produits, transférés et maintenus (Wilkinson et al., 2014 ; UNISDR, 2011a ; Lassa, 2010). Ceci implique d’assouplir, voire de chasser, l’idée que la gestion des risques de catastrophe doit être circonscrite à un secteur pour concentrer l’attention sur l’intégration de la gestion des risques au sein même du développement. La gestion des risques de catastrophe ne doit plus être considérée comme une pratique à part dont la responsabilité incombe à un secteur spécialisé (Gall et al., 2014c). Au lieu de cela, elle devrait devenir une considération quotidienne et normale de la planification du développement et de la prise de décisions à travers tous les secteurs du développement. La distinction entre gouvernance des risques et gouvernance du développement est erronée et contribue à la situation actuelle, dans laquelle les coûts de la production et de l’accumulation des risques sont des éléments externes qui demeurent cachés et ignorés, ce qui limite la responsabilité à tous les niveaux.

Ceci a plusieurs conséquences. Tout d’abord, la capacité d’un pays à gérer ses catastrophes dépend de la qualité et de la solidité globales de sa gouvernance. Ceci implique qu’il est fort peu probable que des pays dans lesquels la corruption est répandue, la liberté de la presse n’existe pas, des conflits civils ou militaires sont en cours, ou encore les droits de l’homme en général sont bafoués, puissent gérer leurs risques de catastrophe avec efficacité (Alexander et Davis, 2012). La gouvernance des risques de catastrophe n’est jamais totalement indépendante de la qualité de la gouvernance globale. Renforcer cette qualité est par conséquent indispensable pour renforcer la gouvernance des risques de catastrophe. Ensuite, ceci implique que donner la priorité à la gestion des risques de catastrophe signifie également donner la priorité à la prise en compte des facteurs de risque sous-jacents. La priorité politique accordée à la réduction de la pauvreté et des inégalités, à la protection et à la réhabilitation de la biodiversité, et à la planification et à la gestion d’un développement urbain durable déterminera dans une large mesure la priorité politique accordée à la réduction des risques de catastrophe. Enfin, si les risques de catastrophe atteignent des ordres de grandeur sans précédent et touchent de nouveaux domaines, la capacité à gérer les risques connus ne constituera que l’un des piliers d’une gestion efficace des risques. La réactivité générale dans la gestion des risques à mesure qu’ils apparaissent, par l’anticipation, l’adaptation et la transformation permanente, pourrait alors se révéler plus importante, en particulier lorsqu’elle renforce une résilience globale et non pas spécifique (Pelling, 2014 ; Cavallo et Irlande, 2014 ; Ray-Bennet et al., 2014). Ceci signifie que la gestion des risques de catastrophe doit être considérée comme un élément d’une approche plus large de la gestion des risques de toutes sortes. Le concept de progrès social est utile, dans la mesure où il intègre nombre des caractéris267


Il y a du changement dans l’air Nombre des réformes nécessaires de la gouvernance ont déjà été décrites en détail dans les éditions précédentes du Bilan mondial (UNISDR, 2009a, 2011a, 2013a). La gestion des risques de catastrophe exige une solide gouvernance locale et une volonté et une capacité des autorités locales de travailler en partenariat avec les ménages à faibles revenus ainsi que les collectivités et la société civile. Une solide autorité politique au niveau national est nécessaire afin de garantir la mise en œuvre des politiques, des stratégies et des lois à travers les différents secteurs, régions et autorités locales. Il est tout aussi nécessaire d’impliquer pleinement le secteur privé aux niveaux national, municipal et local.

tiques requises pour une gestion efficace des risques, à savoir les besoins humains primaires, les fondements du bien-être et les opportunités5. À ce titre, les pays qui présentent un indice de progrès social élevé sont susceptibles d’avoir une meilleure capacité à gérer et à réduire leurs risques de catastrophe. Cet élément est important car il implique qu’une gestion des risques de catastrophe solide n’est pas une prérogative des seuls pays à revenu élevé, mais plutôt de tous les pays qui ont atteint un certain niveau de progrès social. Par exemple, alors que Maurice et l’Irak présentent des niveaux très similaires de risques de catastrophe, Maurice a atteint un niveau de progrès social beaucoup plus élevé et est par conséquent mieux à même de gérer ses risques (Figure 13.4).

Private sector collaboration

igure 13.4 Progrès social et pertes annuelles moyennes Indice du progrès social 90 ouve e é ande ustra ie

Allemagne

Japon tats nis d méri ue

ortuga 80

Slovaquie

osta ica

ta ie Panama 70

Chili

Maurice

Grèce Jamaïque

rgentine

Brésil Mexique

Colombie

Thaïlande

Turquie

60

Sri Lanka

Nicaragua

ri ue du Sud

Chine

u bé istan

Pérou

Bénin ibouti Togo

40

Honduras

ad i istan Bangladesh

Népal

Inde

Philippines

République dominicaine uatema a

Sénégal 50

rinité et obago

uateur

épub i ue démocrati ue popu aire ao

Cambodge

Rwanda

Congo

Mozambique

Mali Libéria

Iraq

Madagascar

a istan

Niger Burundi épub i ue centra ricaine Tchad

30

0,20

0,40

0,60

0,80

1,00

1,20

1,40

1,60

/ cti s (Source : UNISDR, données du modèle de risque mondial et de l’Indice du progrès social.)

268

Chapitre 13


La gestion des risques de catastrophe doit faire partie d’une approche plus large de la gestion des risques qui englobe également les risques biologiques, technologiques, financiers et autres. Par ailleurs, la responsabilité sociale peut être renforcée à travers l’information du public et la transparence. Des synergies plus importantes doivent être créées entre la gestion des risques de catastrophe et celle du changement climatique, ainsi qu’entre ces deux domaines et le développement durable. Ces principes généraux devront être interprétés à la lumière des dispositions constitutionnelles, politiques et administratives de chaque pays. Bien que des modèles puissent exister pour la gestion des catastrophes, aucun modèle unique ne peut être développé pour la réduction des risques de catastrophe. Les profils spécifiques de la réglementation, des mesures incitatives et des politiques nationales ainsi que de leur mise en œuvre au niveau local varient considérablement d’un pays à l’autre (Gall et al., 2014c). La réussite dépendra de l’adoption de politiques, de stratégies et de normes adéquates dans chaque secteur et à chaque niveau d’autorité territoriale. La question de savoir à quel niveau la responsabilité de la réduction des risques de catastrophe doit se situer au sein d’un gouvernement n’est toujours pas résolue (UNISDR, 2011a, 2013a ; Wilkinson et al., 2014 ; PNUD, 2014a). Ceci s’explique en partie par une caractéristique commune à toutes les questions de gouvernance, à savoir qu’il n’existe pas de réponse unique et universelle, et en partie aussi par le manque d’accord sur la manière dont les distances, les dynamiques de partage du pouvoir et les mécanismes de coresponsabilité entre les différents échelons d’un gouvernement et les différents départements opèrent dans différents contextes spécifiques. Certains pays prennent déjà des mesures afin de gérer les risques de catastrophe dans un cadre de gouvernance plus large. Les ministères des

finances et de la planification de plusieurs pays, notamment le Costa Rica, le Panama et le Pérou, travaillent à l’intégration de la gestion des risques de catastrophe dans la planification et l’évaluation des investissements publics. Au Mexique, les dispositions sophistiquées de financement des risques mises en place pour la gestion des risques de catastrophe font partie d’une stratégie plus large de renforcement de la résilience financière du secteur public. Au Pérou, un nouveau cadre institutionnel a été mis en place afin de gérer les risques de catastrophe, tandis qu’une nouvelle législation en Colombie renforce la responsabilité non seulement vis-à-vis des catastrophes, mais également vis-à-vis de la génération de risques de catastrophe. Une autre innovation récente a été l’introduction de directeurs des risques au niveau municipal et national afin d’assurer la cohérence des efforts de gestion des risques6. L’avenir nous dira si ces nouveaux outils de gouvernance se révéleront efficaces. Ils montrent cependant bel et bien que la réforme de la réduction des risques de catastrophe ne se cantonne pas à la théorie. Forts de leurs propres expériences, différents pays expérimentent déjà de nouvelles formes de gouvernance des risques.

13.6

De l’information sur les risques à la connaissance des risques

La sensibilisation aux risques et la connaissance des risques doivent être étendues et renforcées. À cette fin, la production sociale d’informations sur les risques doit être transformée et la fourniture des informations doit devenir un processus social de production de connaissances sur les risques. Transformer la production sociale des informations sur les risques Une première étape dans le renforcement de la gestion des risques de catastrophe est d’améliorer la sensibilisation aux risques et de la connaissance des risques. La production sociale des 269


informations sur les risques elle-même doit être transformée, avec une évolution de la production d’informations sur les risques proprement dite vers la production d’informations compréhensibles et exploitables par différents types d’utilisateurs, en d’autres termes la connaissance des risques (CDKN, 2014 ; GFDRR, 2014a). Les informations sur les risques doivent être intégrées en tant que connaissances sur les risques dans tous les processus de prise de décisions en matière de développement. Par exemple, alors que les ministres des finances ont besoin de chiffres qui représentent les risques pour l’économie nationale, les secteurs du développement ou les entreprises internationales auront besoin d’informations sur les risques pour des portefeuilles spécifiques d’actifs, tandis que les responsables de l’aménagement du territoire auront quant à eux besoin d’informations géographiques sur le niveau des aléas. Il est par conséquent nécessaire de passer du type d’informations sur les risques mondiaux présenté dans ce rapport à des informations beaucoup plus ciblées et pertinentes pour des utilisateurs, des secteurs et des territoires spécifiques. Cette transition exigera des changements dans la manière dont les données et les informations sur les risques sont actuellement produites et transformées. D’une part, les gouvernements devront investir dans la collecte, la gestion et la diffusion d’informations sur les risques, notamment de statistiques sur les pertes dues aux catastrophes et les impacts de ces dernières, de modèles d’aléas, de bases de données sur l’exposition aux aléas et d’informations sur la vulnérabilité. En même temps, les gouvernements doivent mettre en place des normes et des mécanismes afin de garantir l’ouverture et la transparence de manière à ce que les utilisateurs aient non seulement accès aux informations dont ils ont besoin, mais aient également connaissance de leurs hypothèses sous-jacentes et de leurs limites. Un changement de perspective dans la production des informations sur les risques est égale270

Chapitre 13

ment nécessaire. Les risques ne doivent plus être mesurés comme des éléments objectifs externes qui peuvent être réduits : une compréhension, une identification et une estimation plus approfondies des causes et des conséquences de la création et de l’accumulation des risques sont nécessaires de façon à révéler les risques, à la fois en tant qu’opportunités et menaces. Compréhension des risques extensifs Une compréhension accrue des risques extensifs est essentielle afin de renforcer la sensibilisation globale aux risques. L’omniprésence de cette forme de risque en fait une préoccupation quotidienne pour les ménages, les collectivités, les petites entreprises et les autorités locales. Sa prise en charge peut par conséquent insuffler une demande au sein de la société pour la gestion des risques de catastrophe. Les catastrophes extensives constituent des indicateurs spécifiques locaux en temps réel de la manière dont les risques sont générés au quotidien par la pauvreté. Par conséquent, les catastrophes de ce type permettent de comprendre concrètement les risques actuels, par opposition à des risques futurs plus abstraits. Dans le même temps, ce type de risque est le plus influencé par la vulnérabilité sociale, économique et environnementale. Il peut donc être efficacement géré à travers la combinaison efficace de mesures prospectives, correctives et compensatoires. Comprendre la manière dont les risques extensifs sont générés par les conditions de vie quotidiennes, notamment la fragilité du marché de l’emploi et des moyens de subsistance et l’accès limité aux soins médicaux et à l’éducation, réaffirme et démontre non seulement comment les risques sont socialement construits, mais peut également faciliter l’identification de mesures concrètes permettant de les réduire. Accorder la priorité aux risques extensifs et au développement local peut ouvrir la voie à des changements progressifs et durables dans les pratiques de développement, de ma-


nière à intégrer la gestion des risques de catastrophe dans la création d’opportunités socioéconomiques. La visualisation des modèles et des tendances des risques extensifs est extrêmement utile, car la plupart des risques extensifs peuvent être gérés et pris en charge à travers des politiques publiques et des actions privées pertinentes et efficaces. La sensibilisation aux risques extensifs en ellemême ne conduit pas à la transformation. Les citoyens, les ménages, les petites entreprises et les autorités locales acceptent et supportent fréquemment des niveaux élevés de risques de catastrophe en raison d’un accès très restreint aux actifs et aux ressources nécessaires pour réduire ces risques. Toutefois, un message centré sur la prospérité, le choix et la qualité de vie plutôt que sur des notions telles que les vies sauvées, la réduction de la vulnérabilité et les économies réalisées peut établir le lien entre les désirs individuels et les besoins sociaux d’une part et la gestion des risques d’autre part, même dans les contextes où les choix de développement sont fortement restreints. Connaissance des risques et évolution des valeurs Cette perspective a des conséquences sur les efforts actuels visant à améliorer la sensibilisation du public, l’éducation et l’information sur les risques, qui tendent à refléter et renforcer la perception classique des catastrophes en tant que menaces externes pour le développement. Plutôt que de donner à voir les opportunités ou de favoriser le changement des pratiques de développement, ces efforts dissimulent en réalité les facteurs à l’origine des risques et de leur accumulation. Il est par conséquent essentiel de passer de la perception des catastrophes comme des événements extérieurs à la prise en compte de la création et de l’accumulation des risques au sein même du développement. On ne saurait trop souligner l’importance d’intégrer cette approche dans l’éducation formelle et

informelle ainsi que dans les campagnes de sensibilisation du public, avec une attention particulière aux enfants et aux jeunes, et d’exploiter les supports visuels offerts par les médias sociaux et les nouvelles technologies. À mesure que la sensibilisation passe des pertes dues aux catastrophes et de leurs impacts aux facteurs de risque sous-jacents, une nouvelle vision des pratiques de développement pourrait progressivement émerger, de même que des moyens efficaces pour la prise en charge des facteurs de risque.

13.7

Évaluation des coûts et des avantages de la gestion des risques de catastrophe

Comprendre les coûts et des avantages de la gestion des catastrophes deviendra essentiel pour la réussite future. Il s’agit de comprendre et de mesurer les avantages et les inconvénients implicites de chaque décision en termes de réduction de la pauvreté et des inégalités, de durabilité environnementale, de développement économique et de progrès social, et d’identifier ceux qui supportent les risques, ceux qui supportent les coûts et ceux qui récoltent les bénéfices. Intégrer les mesures des risques de catastrophe dans les investissements publics et privés La gestion des risques de catastrophe évalue toujours les risques par rapport aux opportunités et les menaces futures par rapport aux besoins actuels. Une autre façon d’améliorer la gestion des risques de catastrophe est de veiller à ce que les coûts et les avantages associés soient pleinement pris en compte dans les investissements publics et privés à tous les niveaux, dans le système financier et dans la conception des mécanismes de partage des risques et de protection sociale. Toutes les décisions de développement, qu’il s’agisse d’investissements en capital, de dépenses sociales ou de protection de l’environnement, ont la capacité de réduire ou d’accroître les risques. Les indicateurs du risque sont indispen271


sables afin d’éclairer de telles décisions et d’identifier les avantages et les inconvénients implicites à chaque décision. Si la demande provenait des gouvernements, des entreprises et d’un secteur financier soucieux de la durabilité et de la compétitivité, les indicateurs du risque pourraient alors cesser d’être confinés à la seule communauté des professionnels de l’évaluation des risques. L’utilisation de ces indicateurs pourrait alors devenir courante dans le cadre de la planification et de la prise de décisions des gouvernements et des entreprises. Des estimations probabilistes des risques qui soient accessibles et transparentes sont essentielles afin d’évaluer les coûts et les avantages des investissements publics et privés dans le cadre du développement. Dans le cas des pays et des gouvernements nationaux, des infrastructures sensibles fiables et résilientes deviennent alors une partie intégrante des stratégies visant à renforcer la compétitivité et la durabilité et à attirer les investissements (UNISDR, 2011a). Dans les entreprises, des chaînes d’approvisionnement fiables et résilientes sont indispensables à leur compétitivité, leur durabilité et leur réputation (UNISDR, 2013a). Pour l’heure, l’utilisation d’analyses coûts-avantages dans la gestion des risques de catastrophe se limite habituellement à envisager les coûts de remplacement évités pour les bâtiments ou les infrastructures endommagés par rapport aux coûts supplémentaires de la réduction des risques. Les analyses coûts-avantages peuvent être étendues pour mettre en lumière les avantages et les inconvénients de chaque décision, notamment les avantages en aval et les coûts évités en termes de réduction de la pauvreté et des inégalités, de préservation de l’environnement, de développement économique et de progrès social. Elles permettent également d’identifier ceux qui supportent les risques, ceux qui supportent les coûts et ceux qui récoltent les bénéfices. 272

Chapitre 13

Cette approche met non seulement beaucoup mieux en évidence les avantages de la réduction des risques de catastrophe, mais contribue également à clarifier les questions liées à la responsabilité : qui exploite les opportunités représentées par les risques et en bénéficie, qui en subit les conséquences lorsque les risques ne sont pas gérés, et qui en supporte les coûts ? Les travaux en cours visant à évaluer les coûts et les avantages des services écosystémiques (TEEB, 2013) pourraient servir de base à l’élaboration de nouveaux indicateurs du risque qui permettraient à la réduction des risques de catastrophe de jouer un tel rôle transformateur. Des indicateurs du risque appropriés produits de cette façon permettraient de prendre en compte différentes strates du risque dans les décisions d’investissement du secteur public et des entreprises. Fondamentalement, ceci implique de déterminer l’équilibre optimal entre les investissements réalisés respectivement dans les stratégies prospectives, correctives et compensatoires de gestion des risques de catastrophe (UNISDR, 2011a). En principe, il est plus économique de réduire les strates du risque les plus extensives que de les maintenir et d’utiliser des mécanismes compensatoires pour prendre en charge les risques qui ne peuvent pas être réduits de manière économique. De même, il est généralement plus économique d’éviter la création de nouveaux risques que de réduire les risques existants. Dans la perspective d’une approche de partage de la valeur intégrant les différentes strates du risque, l’élargissement de la définition des coûts et des avantages pour inclure non seulement les coûts et les avantages pour les entreprises et les gouvernements, mais également pour la société et l’environnement, peut radicalement modifier la nature et l’impact des décisions d’investissement publiques et privées.


Faire entrer les risques de catastrophe dans le système financier Les indicateurs du risque de catastrophe peuvent et doivent également être pleinement pris en compte dans le système financier. Les nouveaux projets tels que l’initiative 1-in-1007 vont déjà dans ce sens et recommandent la mise à disposition d’indicateurs du risque de catastrophe pour les investisseurs institutionnels, notamment les fonds de pension et les fonds souverains. Ces indicateurs doivent être utilisés non seulement pour évaluer les risques potentiels inhérents à des portefeuilles d’actifs, qui constituent également des risques pour ceux qui investissent dans ces instruments, mais également pour les risques plus généraux posés par les investissements. Par exemple, lorsqu’un portefeuille d’investissements donné est excessivement concentré sur le développement urbain dans des zones particulièrement soumises à des aléas, ceci comporte des risques pour les investisseurs eux-mêmes, et il convient de les rendre explicites (par exemple en calculant les PAM en pourcentage du portefeuille exposé). Dans le même temps, les risques posés par ces investissements pour les économies régionales et les centres urbains dans lesquels ils sont réalisés doivent également être clairement établis. Les indicateurs du risque peuvent également permettre d’identifier les déficits de financement des risques auxquels des gouvernements peuvent être confrontés face à des catastrophes importantes. Comme le montre le Chapitre 5, de nombreux gouvernements ne possèdent pas la résilience financière requise pour absorber l’impact des pertes dues à une catastrophe d’une période de retour de 1 sur 100 ans et pour se redresser à l’issue de celle-ci. De même, les risques de catastrophe doivent être pris en compte dans le cadre des prêts consentis à des gouvernements, des entreprises ou des ménages dans les pays soumis à des aléas. Cette prise en compte des risques de catastrophe dans les décisions financières doit

être considérée comme un principe de base de la gestion raisonnée des risques. Les indicateurs du risque de catastrophe doivent également être pris en compte dans la formulation des notations de crédit, dans les indices qui mesurent l’attractivité des différents secteurs et pays en termes d’investissement, et dans les prévisions de performance tant pour les entreprises que pour les pays. Les risques de catastrophe doivent également être communiqués dans les publications obligatoires auxquelles les entreprises, les institutions financières et les gouvernements sont tenus. L’intégration d’indicateurs du risque dans ces indicateurs d’investissement plus larges est essentielle afin de modifier le comportement des investisseurs et de renforcer la sensibilisation aux risques de catastrophe dans une perspective plus large des risques. Élargir les offres de financement des risques et de protection sociale En même temps, cette approche plus large du calcul des coûts et des avantages de la gestion des risques peut également apporter une meilleure justification pour étendre les mesures de financement des risques et de protection sociale aux ménages à faible revenu, aux petites entreprises et aux autorités locales faibles. De nombreux mécanismes innovants d’assurance et de protection sociale ont été testés dans le cadre de projets pilotes. À moins d’une évolution des paramètres de calcul de leurs coûts et avantages, un changement significatif de la situation actuelle, dans laquelle le secteur de l’assurance et de la réassurance est surcapitalisé alors qu’une grande majorité de ménages et d’entreprises dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire n’a pas accès au marché de l’assurance ni à d’autres formes de financement des risques est toutefois peu probable. Si les avantages du renforcement de la résilience et d’un redressement rapide pouvaient être cal273


culés, il est vraisemblable que le rapport coûtsavantages des investissements dans la protection sociale et dans l’accessibilité au marché de l’assurance deviendrait plus attractif. Actuellement, le fait que certains impacts des catastrophes tels que la détérioration de la santé et de la nutrition ou la perte d’opportunités de formation ne soient pas pris en compte dans les coûts liés à l’absence de protection sociale constitue un obstacle à un élargissement substantiel des couvertures d’assurance. Risques extensifs et demande sociale Les risques quotidiens et les risques de catastrophe extensifs ne sont pas exogènes à la réduction de la pauvreté ; ils constituent des problématiques inhérentes à la pauvreté. La réduction de la pauvreté, l’accès à l’éducation et l’amélioration de la santé à l’échelle nationale et internationale ne sont pas réalisables si les destructions toujours plus nombreuses d’écoles, de structures médicales, de logements et d’infrastructures locales par des catastrophes extensives continuent d’être ignorées et minimisées. La demande sociale d’eau potable, de collecte des déchets, de sécurité, d’emploi, de logements adéquats, de services de transport, et d’accès à l’éducation et aux services de santé n’a pas besoin d’être défendue car elle existe déjà sous des formes qui reflètent les spécificités de chaque contexte local. Dans les contextes où les risques sont principalement extensifs et élevés, cette demande sociale inclut fréquemment la protection contre les préjudices potentiels. C’est pourquoi la réponse aux besoins de base et la création d’opportunités pour le développement socio-économique local peuvent devenir un moyen de prendre en charge les risques de catastrophe à leur source. Los Angeles etro

Lorsque la sensibilisation s’étend des risques extensifs aux facteurs de risque sous-jacents, alors 274

Chapitre 13

le lien avec la transformation du développement local devient explicite et évident. La préservation d’un bassin hydrologique local peut améliorer la qualité et la disponibilité d’eau potable et réduire le risque d’inondation. Le développement de systèmes de collecte et de recyclage des déchets ménagers peut améliorer la qualité de l’environnement, créer de l’emploi et des revenus et réduire le risque d’inondation dû à l’obstruction des systèmes d’égouttage par des détritus. La régénération de mangroves peut également contribuer à régénérer la population de poissons, renforcer la pêche au niveau local et protéger les côtes contre l’érosion et les ondes de tempête. La fourniture de terres bien situées pour les nouveaux logements peut réduire le coût de la mise à disposition d’infrastructures et de services tout en réduisant les risques de catastrophe. Les flancs de coteau en terrasse peuvent accroître la production agricole et réduire le risque de glissement de terrain. Cette approche est très puissante car elle exploite les facteurs de risque sous-jacents eux-mêmes comme instruments de durabilité. L’énergie que recèlent les inondations, les glissements de terrain et d’autres catastrophes locales peut être transformée et utilisée de manière constructive comme énergie pour le développement durable.

13.8

enforcer la responsabilité en matière de gestion des risques

Alors que les sociétés deviennent plus attentives aux causes et aux conséquences des risques de catastrophe, la mise en cause des responsabilités peut faire l’objet d’un discours social et de négociations. Des normes et des cadres de suivi transparents régissant l’accumulation et la réduction des risques peuvent jouer un rôle important dans ce contexte. Responsabilité pour les risques générés Il ne sera possible d’intégrer pleinement les coûts et les avantages de la gestion des risques de catas-


trophe dans les décisions d’investissement, le secteur financier, le financement des risques, la protection sociale et le développement local que si les responsables des décisions peuvent être identifiés et mis face à leurs actes. Si les sociétés deviennent plus attentives aux causes et aux conséquences des risques de catastrophe, la mise en cause des responsabilités deviendra une question sociétale qui peut faire l’objet d’un discours social et de négociations. Ceci peut conduire à un renforcement de la responsabilité non seulement vis-à-vis des pertes dues aux catastrophes et des impacts de ces dernières, mais également vis-à-vis de la création et de l’accumulation de futurs risques. Quelle que soit leur nature, la mise en place de mécanismes de responsabilité requiert de parvenir à un consensus quant à la définition des responsabilités, en d’autres termes qui est responsable de quoi. Actuellement, le fait que les catastrophes sont encore perçues comme des chocs exogènes plutôt que comme des problèmes non résolus du développement signifie que les pertes dues aux catastrophes et les impacts de ces dernières sont attribués aux aléas naturels ou aux forces de la nature plutôt qu’à ceux qui génèrent et accumulent les risques. Dans le même temps, la responsabilité est rarement une problématique simple. Les responsabilités en matière de création de risques peuvent être complexes ou floues, impliquer les actions d’intervenants des secteurs public et privé sur plusieurs années ou encore résulter de l’absence de décisions ou d’actions. Principe de précaution La question centrale de la problématique de la responsabilité est : responsable de quoi ? La responsabilité vis-à-vis des risques de catastrophe et des pertes dues aux catastrophes devrait-elle être évaluée en fonction des éléments qui étaient connus et pour lesquels des mesures ont été prises, ou en fonction des éléments qui pouvaient et auraient dû être connus ? La seconde option se fonde sur le principe de précaution et possède des implications importantes en matière d’utilisation

des indicateurs du risque dans la planification des investissements publics et privés. Si le principe de précaution est appliqué, les indicateurs du risque deviennent non seulement un outil pour l’évaluation des coûts et des avantages de la gestion des risques de catastrophe, mais peuvent également servir à l’indemnisation en cas de catastrophe. Ce principe peut appuyer un nouveau cadre de référence pour les droits des citoyens et des entreprises qui subissent des pertes dues à des catastrophes. Il est toutefois nécessaire de garantir un meilleur accès aux informations sur les risques à ceux qui prennent les décisions d’investissement, car ces informations peuvent permettre à d’autres personnes, notamment les citoyens et les autorités locales, de comprendre les décisions prises8. Actuellement, des asymétries sévères dans la génération et la disponibilité d’informations sur les risques s’ajoutent à un manque de responsabilité à tous les niveaux. Les médias sociaux ainsi que d’autres nouvelles technologies et nouveaux outils de communication peuvent faire tomber les barrières et susciter une demande sociale de responsabilité vis-à-vis de la création et de l’accumulation des risques. À l’échelle internationale, la notion de précaution est un sujet sensible, car elle touche à des questions de souveraineté nationale. La question de l’appropriation des mécanismes de responsabilité vis-à-vis des risques de catastrophe à l’échelle mondiale n’a pas encore été abordée à ce jour. Implicitement, chaque État est responsable de la sécurité de ses citoyens, mais la responsabilité de la création de risques qui affectent d’autres pays (par exemple à travers le changement climatique ou des investissements créateurs de risque) n’a pas été définie. Responsabilité et demande sociale La responsabilité va de pair avec une véritable demande sociale, sans laquelle même un niveau 275


élevé d’appui politique pour la réduction des risques de catastrophe ne parviendra pas à créer les mécanismes de responsabilité requis pour s’attaquer efficacement à des problèmes tels que la corruption ou la préférence du profit à court terme au détriment de la durabilité à long terme. L’expérience montre cependant que la demande sociale résulte rarement de politiques, de lois ou de nouveaux mécanismes administratifs nationaux : elle découle plutôt de l’expérience des catastrophes elles-mêmes. Alors que l’essor des médias sociaux se poursuit, il devient plus difficile de cacher ou de dissimuler les causes de la création et de l’accumulation des risques. La demande sociale de responsabilité peut devenir un facteur majeur de transformation, car elle peut constituer un risque important pour la réputation des politiciens et des dirigeants d’entreprise. Les plates-formes de pétition en ligne telles qu’Avaaz.org mettent aujourd’hui régulièrement en cause des gouvernements, des entreprises et des dirigeants d’entreprise9. Par exemple, lorsqu’une usine textile du Bangladesh s’est effondrée en avril 2013, ensevelissant de nombreux travailleurs sous-payés sous les décombres, l’indignation du public s’est rapidement manifestée sur la toile. En quelques jours, plusieurs campagnes d’envergure ont été lancées en ligne contre des marques de vêtements bien connues, et en quelques semaines, ces campagnes sont parvenues à obtenir la signature par plus de 75 grandes entreprises d’un accord sur la sécurité des bâtiments et la sécurité incendie (Accord on Fire and Building Safety) au Bangladesh soutenant l’application d’un programme de sécurité des travailleurs10. Des cadres normatifs pour la responsabilité À ce jour, les cadres normatifs susceptibles d’apporter une base à des mécanismes de responsabilité se limitent largement à la gestion des catastrophes (FISCR et PNUD, 2014). Le développement de mécanismes de responsabilité vis-à-vis de la création de risques est plus problématique, en 276

Chapitre 13

particulier en ce qui concerne la définition des objectifs, des rôles et des responsabilités. Une telle approche commence toutefois à apparaître dans des lois récentes, par exemple celles adoptées en Colombie (Gouvernement de la Colombie, 2012) et en Inde (FISCR et PNUD, 2014). Par exemple, un procès d’intérêt public a été intenté devant la Cour suprême indienne en 2013 contre les gouvernements de six États, au motif que la loi nationale sur la gestion des catastrophes de 2005 n’avait pas été appliquée correctement (Disaster Management Act of 2005) (Ibid.). Plus récemment, et comme souligné dans le Chapitre 6, des autorités locales françaises ont été condamnées pour avoir autorisé l’urbanisation de zones soumises à des inondations. Les différents pouvoirs au sein de l’État auront différents rôles à jouer. Le pouvoir exécutif pourra par exemple définir les objectifs, et plusieurs pays expérimentent actuellement des mécanismes de supervision par des comités parlementaires, voire par le Parlement lui-même, ou encore l’appel à un ombudsman. Le renforcement ou l’adoption de mécanismes de responsabilité doivent toutefois être adaptés au contexte local et national. Ces mécanismes peuvent inclure l’intervention de bureaux de contrôle nationaux afin de vérifier la bonne application des politiques de gestion des risques de catastrophe par les différents secteurs ou par les autorités locales, des interventions du pouvoir judiciaire afin d’enquêter sur les cas de négligence ou de création malveillante de risques, des évaluations par le pouvoir législatif concernant l’application des politiques et stratégies de gestion des risques de catastrophe, par exemple via les comités parlementaires, et de nouvelles fonctions potentielles, par exemple un ombudsman spécialisé dans les risques chargé d’aider à résoudre les différends. Adoption volontaire de standards Des standards adoptés volontairement peuvent jouer un rôle transformateur dans le renforcement de la responsabilité. Ils peuvent contribuer


à la sensibilisation et à l’implication vis-à-vis de la gestion des risques en proposant des indicateurs simples et consensuels, présentés dans un langage et selon des formats familiers aux entreprises, aux autorités locales et aux collectivités (CEE-ONU, 2014). La cohérence et l’interopérabilité des informations sur les risques et les pertes sont particulièrement importantes pour l’adoption et l’application d’indicateurs du risque de catastrophe, mais elles exigent des standards adoptés volontairement pour y parvenir. Actuellement, les standards de gestion des risques utilisent des outils, des indicateurs et un langage qui permettent à différents acteurs de mettre leur expertise et leurs ressources en commun et d’apporter une base solide aux stratégies des entreprises et aux objectifs politiques. Promouvoir et élargir la portée des standards adoptés volontairement exige cependant des investissements tant des gouvernements que du secteur privé (CEE-ONU, 2014), par exemple dans les infrastructures de qualité nécessaires pour assurer un suivi et fournir des éléments de preuve crédibles attestant de la conformité ainsi que de la qualité et de la fiabilité des processus. Ces investissements permettront d’effectuer des comparaisons entre différentes régions ou périodes sur la base d’indicateurs clairs et consensuels. Même sans processus de certification formel, leur application peut créer non seulement le sentiment d’une responsabilité partagée, mais également celui d’une réelle valeur partagée (CEE-ONU, 2014). De cette manière, les standards nationaux et internationaux peuvent contribuer à transformer les méthodes utilisées au sein des collectivités, des entreprises et des gouvernements, et à promouvoir un changement dans la culture de la responsabilité, pour passer d’une approche fondée sur la gestion d’entreprise qui privilégie la réduction des coûts et le contournement des réglementations à une approche qui considère le respect des standards adoptés volontairement comme un investissement potentiellement très rentable.

Afin d’exploiter tout le pouvoir des standards adoptés volontairement, les gouvernements peuvent jouer un rôle crucial dans la promotion et l’élargissement de leur portée, en les mettant à la disposition des petites et moyennes entreprises, des universités et des établissements de formation professionnelle et en encourageant leur application, ou encore en réunissant les organismes de standardisation pour les consulter sur les risques de catastrophe et sur le processus de prise de décisions (CEE-ONU, 2014). Les infrastructures requises pour appuyer l’extension et le développement de standards nécessitent d’investir dans des professionnels compétents capables de contrôler le respect par les infrastructures et les usines industrielles de standards sectoriels et plurisectoriels. Mettre en place des objectifs et suivre les progrès La responsabilité est également tributaire du suivi, de l’évaluation, du compte rendu, de l’analyse comparative et de la fixation d’objectifs. Un autre moyen essentiel de transformation serait par conséquent le renforcement du suivi des progrès de manière à accroître la transparence et la responsabilité. Ceci est possible de différentes manières. La première consiste à fixer des objectifs mondiaux et nationaux pour la réduction des risques de catastrophe et de définir des indicateurs compréhensibles et mesurables. Étant donné que les pertes dues aux catastrophes ne sont que les indicateurs de failles dans le développement, le suivi de l’évolution de ces pertes peut constituer un outil puissant afin d’évaluer la transformation du développement. Déterminer si les pertes dues aux catastrophes et les impacts de ces dernières sont à la hausse ou à la baisse peut permettre de comprendre non seulement les progrès réalisés dans la réduction des risques de catastrophe, mais également dans la mise en œuvre des Objectifs de développement durable (ODD) et de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC). 277


Deuxièmement, afin de saisir l’ensemble des progrès réalisés, il est nécessaire de suivre les résultats de la gestion des risques non seulement dans le secteur de la réduction des risques de catastrophe, mais également à travers tous les domaines du développement, afin de déterminer si les différents facteurs de risque sous-jacents sont pris en charge ou non. Afin de garantir que le suivi soutient la planification et la prise de décisions au niveau national, les indicateurs eux-mêmes doivent être appropriés, liés à des politiques publiques spécifiques et être gérés par des responsables clairement identifiés au sein des différents ministères. Idéalement, les indicateurs clés de performance des cadres supérieurs et des hauts fonctionnaires devraient intégrer les résultats en matière de gestion des risques, ce qui favoriserait une meilleure compréhension des conséquences des décisions quotidiennes en matière de risques. Le suivi doit explicitement inclure les actions menées par les autorités locales, le niveau auquel la mise en œuvre de la gestion des risques de catastrophe intervient principalement, et il doit être suffisamment flexible pour s’adapter aux cycles de planification nationaux et maximiser l’utilisation des données générées au niveau national ainsi que des informations locales pertinentes fournies par les collectivités exposées à des risques. Enfin, le processus de suivi doit être lié à un mécanisme clair de responsabilité, qu’il s’agisse d’un examen parlementaire ou d’un organe d’audit national. À défaut, le système de suivi n’aura pas de réel pouvoir et risque de se limiter à légitimer des actions symboliques de gestion et de réduction des risques de catastrophe plutôt que de devenir un mécanisme essentiel pour la transformation du développement et la prise en compte des facteurs de risque sousjacents. 278

Chapitre 13

13.9

Changer l’avenir ?

Si la gestion des risques de catastrophe peut permettre aux sociétés de tirer les enseignements du passé pour changer l’avenir, elle constitue alors peut-être la clé du développement durable. Actuellement, de nombreuses études signalent une perte de confiance dans la classe politique et les dirigeants d’entreprise, alors que les avantages de la croissance économique se concentrent de plus en plus et deviennent plus inégalement répartis11. Alors que des pertes directes dues aux catastrophes atteignant 300 milliards de dollars américains ne semblent pas avoir suffi à modifier la manière dont les risques sont valorisés et tarifés, la menace d’un effondrement des systèmes planétaires, en particulier sous l’effet du changement climatique, ne semble pas non plus susciter une demande croissante de la société pour une nouvelle approche du développement. On observe un élan de plus en plus important de la part du secteur privé, des citoyens et des municipalités pour transformer les pratiques de développement dans des secteurs tels que les énergies renouvelables, l’eau et la gestion des déchets, la gestion des ressources naturelles, la construction écologique et les infrastructures, ainsi que l’agriculture durable. Ceci s’explique par la combinaison de la préoccupation des citoyens pour la planète, en particulier parmi les jeunes, de l’opportunité pour les entreprises d’améliorer leur compétitivité et leur proposition de valeur en réduisant leur consommation énergétique et d’autres coûts, et du déploiement rapide de nouvelles technologies dans ces domaines, qui donnent naissance à de nouveaux secteurs d’activité dynamiques. De façon notable, ce type de transformation n’est plus cantonné à l’Europe ou à l’Amérique du Nord. Par exemple, la Chine, l’Inde et d’autres écono-


mies en croissance rapide prennent aujourd’hui la tête tant dans le développement que dans l’adoption des technologies nécessaires pour transformer l’économie de l’énergie. Alors que les citoyens, les collectivités ou les entreprises peuvent favoriser de nouvelles pratiques de développement, le changement doit en fin de compte être intégré dans les lois et les réglementations : un processus complexe qui comporte toute une série de questions litigieuses dans les domaines politique et social, comme les droits fonciers ou la corruption. Ces nouvelles pratiques de développement peuvent maintenant commencer à recevoir un soutien politique et financier de la part des gouvernements, des entreprises et du secteur financier à l’échelle internationale. Le Sommet des Nations Unies sur le climat qui s’est tenu à New York en septembre 2014 a mis en exergue toute une série d’engagements (Encadré 13.2) qui, s’ils sont tenus, seront de nouveaux catalyseurs de changement. Climate Summit 2014

Il reste à savoir si ce changement s’attaquera véritablement aux inégalités qui, comme expliqué dans la Section III, sont omniprésentes dans les facteurs sous-jacents des risques de catastrophe. Par exemple, il sera politiquement difficile de se mettre d’accord sur des niveaux équitables et durables de consommation à l’échelle mondiale. Pourtant, à défaut d’un tel consensus, les risques d’aggravation des inégalités, des catastrophes et des conflits ne peuvent qu’augmenter (Rockström et al., 2013). Cela signifie-t-il que le développement durable a peu de chances d’être atteint, voire de se révéler utile en tant que concept ? Pas nécessairement. De nombreux facteurs entrent en ligne de compte, notamment des questions d’échelle. Le risque fait partie intégrante de l’activité humaine et du développement, et il constitue à la fois une menace potentielle et une opportunité. Les processus sociaux qui concourent à la construction des risques sont directement liés aux modèles de développement passés et actuels. Les perceptions collectives et individuelles, les réactions face aux contextes des aléas et des risques et les valeurs attachées à la gestion des risques de catastrophe se

Encadré 13.2 Principaux engagements pris lors du Sommet des Nations Unies sur le climat

En septembre 2014, 120 chefs d’État et des milliers de représentants du secteur privé, du monde académique, d’organisations de développement multilatérales et d’ONG se sont réunis à New York dans le cadre du Sommet des Nations Unies sur le climat. À cette occasion, ils ont formulé plusieurs déclarations et pris toute une série d’engagements en vue d’appuyer l’adaptation au changement climatique ainsi que l’atténuation de ses effets. Par exemple, le secteur de l’investissement et de la gestion d’actifs s’est engagé à accroître les investissements raisonnés en fonction du climat à hauteur de 500 milliards de dollars américains d’ici à 2020 et à soumettre des rapports d’avancement dans le contexte du cadre d’action pour la réduction des risques de catastrophe pour l’après-2015, tandis que le secteur financier s’est engagé à intégrer les risques de catastrophe et les risques climatiques dans la réglementation financière (sans se limiter au secteur de l’assurance) et dans la comptabilité publique et privée à travers des tests de stress pour des événements d’une période de retour de 1 sur 100 ans. Ces engagements ont été pris conjointement et ont été pleinement adoptés par des gouvernements, des banques de développement, des assureurs, des investisseurs, des autorités de réglementation et des institutions scientifiques compétentes. Leur ambition est importante, car plusieurs d’entre eux s’attaquent à des nœuds majeurs du système financier et économique mondial qui peuvent changer la donne. (Source : Nations Unies12.)

279


sont toutes construites sur la base de ces modèles. Dans une large mesure, ces valeurs déterminent également l’orientation qui sera prise par les différents pays et sociétés. Ces valeurs et les hypothèses qui en découlent évoluent en permanence, parfois tout à fait clairement et de manière abrupte, mais le plus souvent avec lenteur et en demeurant habituellement implicites plutôt qu’explicites et immédiatement visibles. A different future

À l’échelle mondiale, le changement peut être accéléré par des chocs systémiques massifs qui se répercutent à travers un nombre significatif de pays et de groupes d’intérêt. La crise financière de 2008 et ses retombées peuvent être considérées comme un tel choc, même si certains des effets à long terme restent encore à découvrir. Au niveau local, le changement peut se révéler plus progressif. Il n’en demeure pas moins significatif dans la durée (Pelling, 2014). De ce point de vue, les catastrophes elles-mêmes constituent de puissants agents de changement puisqu’elles libèrent des quantités massives d’énergie et de risques qui se sont accumulés. Elles possèdent le pouvoir extraordinaire de révéler les multiples dimensions des mauvaises pratiques de développement passées et des facteurs de risque sous-jacents, ainsi que les niveaux potentiels des pertes et dommages à venir. L’importance essentielle des catastrophes réside par conséquent peut-être dans leur capacité à aider les populations à tirer les leçons du passé pour modifier l’avenir. Elles peuvent donner à voir les principes transformateurs à intégrer dans les pratiques de développement, qui ne s’appuieront pas exclusivement sur des données quantitatives, mais également sur des indicateurs qualitatifs des changements fondamentaux en termes d’éthique, de déontologie, de moralité, d’équité, d’efficience, de participation et de responsabilité. De ce point de 280

Chapitre 13

vue, la réduction des risques de catastrophe peut devenir une véritable force transformatrice. La réduction de la pauvreté, l’amélioration de la santé et l’éducation pour tous, une croissance économique durable et équitable, tout comme la protection de l’environnement dépendent à présent de la façon dont les gouvernements, les entreprises, les investisseurs, les organisations de la société civile, les ménages et les individus gèrent quotidiennement les risques de catastrophe. Le renforcement de la réduction des risques de catastrophe est essentiel si l’on veut rendre le développement durable. Notes 1 http://www.socialprogressimperative.org/data/spi. 2 Pour en savoir plus sur les limitations des ACA et RCA et pour une analyse des études récentes, voir Shreve et Kelman, 2014 ; Mechler et al., 2014. 3 Peu d’informations sont disponibles sur la manière d’estimer correctement les coûts des activités de réduction des risques de catastrophe qui couvrent les approches structurelles et non structurelles et qui intègrent les coûts directs et indirects ainsi que ceux qui découlent de l’intégration des risques dans les pratiques de développement (Vorhies, 2012). Sur la base d’estimations similaires établies dans le contexte de l’adaptation au changement climatique (GIEC, 2014 ; IBRD et Banque mondiale, 2011), cette estimation peut toutefois être considérée comme prudente. 4 Pour un taux d’actualisation de 10 %, l’économie totale d’ici à 2030 s’élèverait encore à 2 400 milliards de dollars américains. Bien qu’il soit courant d’utiliser un taux d’actualisation de 3 % à 5 % lors de l’évaluation des RCA pour des investissements dans le développement social (voir http://cbkb.org/toolkit/discount-ing/), la majorité des ACA couvrant des projets de réduction des risques de catastrophe utilisent un taux d’actualisation unique de 10 % à 12 %, ou une série de taux compris entre 0 % et 10 % ou 0 % et 20 % (Shreve et Kelman, 2014). 5 http://www.socialprogressimperative.org/data/spi. 6 http://www.emergencymgmt.com/disaster/Chief-Resilience-Officers.html (consultation le 11 janvier 2015). 7 http://www.un.org /climatechange/summit/wp-content/ uploads/sites/2/2014/09/RESILIENCE-1-in-100-initiative.pdf (consultation le 11 janvier 2015). 8 Chris Lavell, commentaire pendant la réunion UNISDR-PNUDFLACSO de San José, série de réunions sur l’avenir de la gestion des risques de catastrophe dans le cadre de l’élaboration du Bilan mondial 2015 (mars 2014). 9 www.avaaz.org. 10 http://bangladeshaccord.org. 11 Voir par exemple les résultats d’études récentes telles que l’Edelman Trust Barometer 2014, qui indique que « globalement, la confiance dans le leadership a atteint un plateau. [...] Les PDG et les chefs de gouvernement demeurent en bas de la liste pour le grand public et pour les spécialistes, avec une confiance extrêmement faible pour les indicateurs clés » (http://www.edelman.com/ insights/intellectual-property/2014-edelman-trust-barometer). 12 http://www.un.org/climatechange/summit.



Glossaire Le Bilan mondial 2015 utilise la terminologie déjà employée par les trois précédents bilans mondiaux. Le risque de catastrophe est considéré comme la conjugaison des aléas, de l’exposition et des vulnérabilités. Le risque de catastrophe est normalement exprimé comme la probabilité de pertes humaines, de préjudices corporels, de pertes matérielles et de pertes causées à des actifs sur une période donnée. La terminologie de base est disponible dans le glossaire de l’UNISDR1. Les spécificités pertinentes dans le cadre du Bilan mondial 2015 sont expliquées ci-dessous. Le Bilan mondial 2015 emploie le terme aléa physique (plutôt que naturel) pour désigner des phénomènes tels que des inondations, des tempêtes, des sécheresses et des séismes. Les processus tels que l’urbanisation, la dégradation de l’environnement et le changement climatique influencent les aléas, c’est pourquoi il devient de plus en plus difficile de démêler leurs origines naturelles de celles liées à l’activité humaine. Exposition est employé pour désigner la présence de populations, de moyens de production, d’infrastructures, d’habitations ou d’autres actifs humains tangibles dans des zones soumises à des aléas. Vulnérabilité est employé pour désigner la mesure dans laquelle ces actifs risquent de subir des préjudices et des pertes en raison de facteurs sociaux qui engendrent des conditions d’insécurité dans les environnements bâtis et humains. Résilience est employé pour désigner la capacité d’un système (qu’il s’agisse d’une économie nationale ou locale, d’un ménage, d’une entreprise ou d’une chaîne d’approvisionnement) à anticiper, à amortir ou à absorber les pertes, et à se redresser. Risques extensifs est employé pour désigner les risques de catastrophes très fréquentes et de cclxxxii

Glossaire

moindre gravité, principalement mais non exclusivement associées à des aléas très localisés. Risques intensifs est employé pour désigner les risques de catastrophes plus sévères et moyennement à peu fréquentes, principalement associées à des aléas majeurs. Risques émergents est employé pour désigner les risques de catastrophes extrêmement peu probables associées à de nouveaux modèles d’aléas et de vulnérabilités. Les orages magnétiques ont par exemple toujours existé, mais les risques associés sont aujourd’hui amplifiés par la dépendance grandissante des sociétés modernes vis-à-vis de sources d’énergie et de réseaux de télécommunication vulnérables. Les facteurs de risque sous-jacents sont des processus tels que les problèmes de planification et de gestion du développement urbain et régional, la dégradation de l’environnement, la pauvreté, le changement climatique et les problèmes de gouvernance, qui influencent les schémas et les tendances des risques. La notion d’inégalités face aux risques renvoie à la répartition inégale des risques de catastrophe sur les plans social, économique et territorial. Les pertes directes dues aux catastrophes désignent les pertes en vies humaines ainsi que les préjudices aux bâtiments, infrastructures et ressources naturelles. Les pertes économiques directes sont calculées via l’estimation du coût de remplacement des actifs. Les pertes indirectes dues aux catastrophes désignent les baisses de production ou de chiffre d’affaires à la suite de pertes directes ou d’impacts sur la chaîne d’approvisionnement. Les impacts plus larges englobent les conséquences socio-économiques à plus long terme, par exemple en matière d’éducation, de santé, de productivité, ou au niveau macroéconomique. Le modèle de risque mondial adopte une approche probabiliste. La probabilité est définie


comme la probabilité d’une perte, par rapport à l’ensemble de toutes les pertes susceptibles de survenir. La probabilité de dépassement est la probabilité qu’une perte d’une ampleur donnée survienne ou soit dépassée au cours d’une période donnée. La fréquence est le nombre de fois où une perte est supposée survenir au cours d’une période donnée. La période de retour est la fréquence moyenne avec laquelle une perte est supposée survenir. Elle est habituellement exprimée en années, pour une fréquence donnée, par exemple 1 sur X années. Cela ne veut pas dire qu’une perte surviendra toutes les X années, mais plutôt qu’elle surviendra en moyenne une fois toutes les X années. Il s’agit d’une autre manière d’exprimer la probabilité de dépassement : une perte dont la fréquence est de 1 sur 200 ans aura une probabilité de 0,5 % de survenir ou d’être dépassée chaque année. Les pertes annuelles moyennes (PAM) sont une estimation des pertes moyennes annualisées survenues sur une longue période et en prenant en compte l’intégralité des scénarios de pertes correspondant à différentes périodes de retour. Les pertes maximales probables (PMP) représentent les pertes maximales prévisibles pour une période de retour donnée, par exemple 250 ans. Dans le Bilan mondial 2015, et plus particulièrement dans les analyses de risque qu’il contient, la notion d’actifs représente la valeur totale de l’immobilier commercial et résidentiel, des écoles et des hôpitaux dans chaque pays. La notion exclut les infrastructures telles que les routes ainsi que les réseaux de télécommunication et d’approvisionnement en eau. Les investissements en capital représentent les investissements totaux des secteurs public et privé au cours d’une année et sont évalués à travers la formation brute de capital fixe (FBCF). Les dépenses sociales désignent les dépenses d’un gouvernement en matière d’éducation, de santé et de protection sociale. Dans le Bilan mondial 2015, les risques relatifs de catastrophe sont estimés en comparant les PAM ou les PMP avec les actifs, les investissements en

capital, les dépenses sociales ou d’autres paramètres économiques tels que l’épargne ou les réserves. La biocapacité désigne la capacité biologique à produire des matériaux biologiques utiles ainsi qu’à absorber les déchets tels que le dioxyde de carbone. Cette notion est liée à celle d’empreinte écologique, qui est calculée en prenant en compte tous les matériaux biologiques consommés et toutes les émissions de dioxyde de carbone générées par une personne au cours d’une année. Les deux concepts fournissent conjointement une base commune pour comparer la capacité biologique de l’environnement à la demande que les populations humaines font peser sur cette dernière. Les limites planétaires désignent les limites de différents systèmes indispensables pour la planète, dont le dépassement est susceptible de conduire à des changements dangereux ou irréversibles à l’échelle de la planète. La réduction des risques de catastrophe (RRC) est un objectif politique d’anticipation des risques de catastrophe, de réduction de l’exposition, des vulnérabilités ou des aléas existants et de renforcement de la résilience. La gestion des risques de catastrophe (GRC) englobe les moyens d’action permettant de réaliser cet objectif. Parmi ces moyens d’action figurent la gestion prospective des risques, par exemple une meilleure planification conçue pour éviter la création de nouveaux risques, la gestion corrective des risques, conçue pour s’attaquer aux risques préexistants, et la gestion compensatoire des risques, par exemple les produits d’assurance qui permettent de partager et de répartir les risques. La gestion des catastrophes ou gestion d’urgence désigne l’ensemble des mesures (préparation et planification d’urgence, plans de maintien de l’activité, alerte précoce, moyens d’intervention et redressement immédiat) qui permettent de faire face lorsqu’une catastrophe est imminente ou s’est produite. cclxxxiii


La gouvernance désigne les différents moyens par lesquels un gouvernement, le secteur privé et d’une manière générale l’ensemble des individus et institutions au sein d’une société s’organisent pour gérer leurs affaires communes. Dans le cadre de cette définition large de la gouvernance, la gouvernance des risques de catastrophe désigne les dispositions spécifiques mises en place par une société afin de gérer ses risques de catastrophe.

Séisme Cyclone tropical Tsunami Inondation Volcan Sécheresse Précipitations Investissements en capital Actifs Dépenses sociales

1  Voir UNISDR, 2009. Terminologie pour la réduction des risques de catastrophe. Genève, Suisse : UNISDR.

cclxxxiv

Glossaire


Acronymes ACA

Analyse coûts-avantages

ACC

Adaptation au changement climatique

ALC

Amérique latine et Caraïbes

AVCI

Année de vie corrigée du facteur invalidité

CAH

Cadre d’action de Hyogo

CBDRM

Gestion participative des risques de catastrophe

CBDRR

Réduction participative des risques de catastrophe

CCNUCC

Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques

CEE-ONU

Commission économique des Nations Unies pour l’Europe

CEPAL

Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes

CNUCED

Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement

CO2

Dioxyde de carbone

DIPCN

Décennie internationale de la prévention des catastrophes naturelles

EIE

Étude d’impact sur l’environnement

ENSO

Phénomène d’oscillation australe El Niño

FAO

Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture

FBCF

Formation brute de capital fixe

FISCR

Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge

FMI

Fonds monétaire international

GAR

Bilan mondial

GAR09

Bilan mondial 2009

GAR11

Bilan mondial 2011

GAR13

Bilan mondial 2013

GAR15

Bilan mondial 2015

GFDRR

Global Facility for Disaster Risk Reduction (Dispositif mondial pour la réduction des risques de catastrophe)

GfT

Application « GAR for Tangible Earth »

GIEC

Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat

GRC

Gestion des risques de catastrophe

IDE

Investissement direct étranger

IDH

Indice de développement humain

IRDR

Integrated Research on Disaster Reduction (Programme de recherche intégrée sur la réduction des catastrophes)

IRP

Programme international de relèvement

ISDR

Stratégie internationale de prévention des catastrophes

JICA

Japanese International Cooperation Agency (Agence japonaise de coopération internationale)

cclxxxv


NASA

National Aeronautics and Space Administration (Administration nationale de l’aéronautique et de l’espace, États-Unis)

NOAA

National Oceanic and Atmospheric Administration (Administration nationale des océans et de l’atmosphère, États-Unis)

OCDE

Organisation de coopération et de développement économiques

ODD

Objectifs de développement durable

OIM

Organisation internationale pour les migrations

OIT

Organisation internationale du travail

OMD

Objectifs du Millénaire pour le développement

OMM

Organisation météorologique mondiale

OMS

Organisation mondiale de la santé

ONG

Organisation non gouvernementale

ONU

Organisation des Nations Unies

ONUSIDA

Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida

PAM

Perte annuelle moyenne

PAM

Programme alimentaire mondial

PEID

Petits États insulaires en développement

PIB

Produit intérieur brut

PMA

Pays les moins avancés

PMP

Perte maximale probable

PNB

Produit national brut

PNUD

Programme des Nations Unies pour le développement

PNUE

Programme des Nations Unies pour l’environnement

PNUE-GRID

Base de données sur les ressources mondiales du PNUE

ppa

Parité de pouvoir d’achat

ppm

Parties par million

RCA

Rapport coûts-avantages

RRC

Réduction des risques de catastrophe

SIG

Système d’information géographique

UNDAC

Équipe des Nations Unies pour l’évaluation et la coordination en cas de catastrophe

UNDESA

Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies

UNDHA

Département des affaires humanitaires des Nations Unies

UNDMTP

Programme des Nations Unies pour la formation à la gestion des catastrophes

UNDRO

Organisation des Nations Unies pour les secours en cas de catastrophe

UNESCO

Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture

UNICEF

Fonds des Nations Unies pour l’enfance

UNISDR

Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophe

UNOCHA

Bureau des Nations Unies pour la coordination de l’assistance humanitaire

USD

Dollars américains

cclxxxvi

Acronymes


Remerciements Comité consultatif Présidente Margareta Wahlstrom, représentante spéciale du Secrétaire général pour la réduction des risques de catastrophe. Membres Laura Alfaro, professeur, Harvard Business School, Harvard University, Cambridge ; Wadid Erian, responsable de l’étude des ressources du sol, Centre arabe pour l’étude des zones et des terres arides, Damas ; Priyanthi Fernando, directeur exécutif, Centre d’analyse de la pauvreté, Colombo ; Virginia Garcia Acosta, directrice, Centre de recherche et d’études avancées en anthropologie sociale, CIESAS, Mexico DF ; Michelle Gyles-McDonnough, coordonnatrice résidente des Nations Unies pour la Malaisie, Kuala Lumpur ; Michel Jarraud, secrétaire général, Organisation météorologique mondiale, Genève ; Randolph Kent, directeur, Planning from the Future Programme, King’s College, Londres ; Allan Lavell, coordinateur, programme sur les risques environnementaux et de catastrophe, Faculté latinoaméricaine de sciences sociales (FLACSO), San Jose ; Anthony Oliver-Smith, professeur, University of Florida, Gainsville ; Ibrahim Osman, ancien secrétaire général adjoint, Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, Genève ; Aromar Revi, directeur, Indian Institute for Human Settlements, New Delhi ; Johan Schaar, responsable de la coopération au développement, Consulat général de Suède, Jérusalem ; Cecilia Ugaz, coordonnatrice résidente des Nations Unies pour le Paraguay, Asunción ; Dennis Wenger, directeur de programme, Element 1638, National Science Foundation, Arlington ; Sandra Wu, présidente directrice générale, Kokusai Kogyo Corporation, Tokyo. Principaux rédacteurs en charge de la coordination Bina Desai et Andrew Maskrey, Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophe (UNISDR), Genève.

Équipe à l’UNISDR Marc Gordon et Rhea Katsanakis, coordination de l’évaluation thématique du CAH ; Julio Serje, Sylvain Ponserre et Vicente Anzellini, données et analyses nationales sur les pertes dues aux catastrophes, outils en ligne, graphiques et cartes ; Sahar Safaie et Mabel Marulanda Fraume, modèle de risque mondial ; Kazuko Ishigaki, analyse et recherche économique ; Vicente Anzellini et Lucy Foggin, recherche, références et études de cas ; Matthieu Meerpoel et Julian Templeton, assistants de recherche ; Frédéric Delpech, coordination de la production. Collaborateurs Modèle de risque mondial CIMNE and associates et INGENIAR (Alex Barbat, Omar Dario Cardona, Gabriel Bernal, Diana Gonzalez, Miguel Mora, Mario Salgado, Liliana Carreno, Mabel Marulanda Fraume, Cesar Velasquez, Claudia Villegas, Daniela Zuloaga) ; Centre arabe pour l’étude des zones et des terres arides - ACSAD (Wadid Erian, Sanaa Ibrahim, Bassem Kataln, Naji Assad) ; Beijing Normal University (Penjung Shi, Saini Yaing) ; CIMA Foundation (Roberto Rudari, Lorenzo Campos, Francesco Gaetani, Giorgio Boni) ; FEWS NET (Harikishan Jayanthi, Greg Husak, Chris Funk, James Verdin) ; Geoscience Australia (Adele BearCrozier, Ken Dale, Gareth Davis, Mark Edwards, Jonathan Griffin, Nick Horspool, Andrew Jones, Tariq Maqsood, Steve Newey, Victoria Miller, Hyeuk Ryu, John Schneider, R. Weber, Martin Wehner) ; Centre commun de recherche - JRC (Tom De Groeve, Sergio Freire, Daniele Erlich, Martino Pesaresi) ; Kokusai Kogyo (Noritoshi Kamagata, Junko Tomita) ; Norwegian Geotechnical Institute - NGI (Farrokh Nadim, Carl Harbist, Finn Løvholt, Sylfest Glimsdal, Helge Smebye, Jose Cepeda) ; UNAM (Mario Ordaz et Krishna Singh) ; UNEP-GRID (Pascal Peduzzi, Andrea de Bono, Christian Herold, Bruno Chatenoux) ; WAPMERR (Max Wyss, Philippe Rosset, Stavros Tolis). Autres contributeurs : Maria Ana Baptista (IPMA, Lisbonne) ; Eric Geist (U.S. Geological Survey) ; Stefano Lorito et Roberto Basili (INGV, cclxxxvii


Rome) ; Rui Pinho et Helen Crowley (GEM Foundation) ; Hong Kie Thio (URS Corporation). Scientifiques chargés de la révision Sous la coordination de l’OMM : James Douris (OMM) ; Bob Stefanski (OMM) ; Michael J. Hayes (University of Nebraska-Lincoln) ; Fumin Ren (Chinese Academy of Meteorological Sciences CAMS). Sous la coordination de l’UNESCO : Pauline Galea (University of Malta) ; Ren Jinwei (Institute of Earthquake Science, China) ; Christina Magill (Macquarie University) ; Alexandros Makarigakis (UNESCO) ; G.A. Papadopoulos (Observatoire national d’Athènes) ; Kenji Satake (université de Tokyo) ; Roberto Scarpa (Universita degli Studi dell’Aquila, Italie) ; Mehdi Zare (Institut international de génie parasismisque et de sismologie - IIEES). Sous la coordination de GNS Science : Kelvin Berryman (GNS Natural Hazards Research Platform) avec des experts d’Arup, de Cankaya University, de FM Global, de Hannover Re, d’ETH Zurich, de NORSAR et de Schneider Geohazards. Autres contributeurs : Robert Muir-Wood (Risk Management Solutions - RMS). Aléa et risque volcanologique mondial GVM et IAVCEI (Susan C. Loughlin, British Geological Survey ; Sarah. K. Brown, Steve Sparks, et Susanna Jenkins, université de Bristol ; Charlotte Vye-Brown, British Geological Survey ; Thomas Wilson, université de Canterbury ; Christina Magill, Macquarie University ; Victoria Miller, Geoscience Australia ; C. Stewart, Joint Center for Disaster Research, GNS Science, Massey University). Réviseurs : Jenni Barclay (université d’East Anglia) ; Russle Blong (Aon Benfield) ; Costanza Bonadonna (Université de Genève) ; Antonio Costa (INGV, Istituto Nazionale di Geofisica e Vulcanologia, Italie) ; Charlie Mandeville (U.S. Geological Survey) ; Christopher Newhall (Earth Observatory of Singapore) ; Jose Palma (université de Concepcion) ; Sally Potter (GNS Science) ; Greg Valentine (université de Buffalo). Contributeurs aux contenus, données nationales et études de cas : S. Andreastuti (Geological Agency of Indonesia) ; W. Aspinall (université cclxxxviii

Remerciements

de Bristol; Aspinall & Associates) ; G. Atici (General Directorate of Mineral Research and Exploration) ; M. Auker (université de Bristol) ; B. Baptie (British Geological Survey) ; S. Barsotti (Icelandic Meteorological Office) ; R. Basili (National Institute of Geophysics and Volcanology, Italie - INGV) ; P. Baxter (université de Cambridge) ; M. Boulton (université de Bristol) ; M. Camejo (Seismic Research Center) ; E. Calder (université d’Édimbourg) ; G. Chigna (INSIVIMEH) ; V. Cloud (Smithsonian Institution) ; A. Costa (Istituto Nazionale di Geofisica e Vulcanologia, Italie) ; E. Cottrell (Smithsonian University) ; S. Crosweller (université de Bristol) ; C. Dessert (Observatoire volcanologique et sismologique de Guadeloupe), S. Daud (Civil Contingencies Secretariat, Cabinet Office, Royaume-Uni) ; H. DelgadoGranados (Universidad Nacional Autonoma de Mexico) ; N.Deligne (GNS Science, Nouvelle-Zélande) ; C.D. Escobar (Ministerio de Medio Ambiente y Recursos Naturales) ; J. Ewert (U.S. Geological Survey) ; B. Faria (National Institute for Meteorology and Geophysics, République de Cabo Verde) ; C. Felton (Civil Contingencies Secretariat, Cabinet Office, Royaume-Uni) ; A. Garcia (Institute IGEO, CSICUCM), J. Gottsman (université de Bristol) ; E. Guttierez, (National Institute for Meteorology and Geophysics, République de Cabo Verde) ; T. Hincks (université de Bristol) ; C. Horwell (université de Durham) ; E. Ilyinskaya (British Geological Survey) ; R. Iriat, (Universidad Mayor de San Andres) ; G. Jolly (GNS Science, Nouvelle-Zélande) ; R. Kamanyire (Public Health England) ; K. Karume (Observatoire volcanologique de Goma) ; M. Kelman (Ressources naturelles Canada) ; C. Kilburn (University College London) ; J.C. Komorowski, (Institut de physique du globe de Paris, France) ; G. Leonard (GNS Science) ; J. Lindsay (GNS Science) ; Kristianto (Center for Volcanology and Geological Hazard Mitigation) ; P. Kyle (New Mexico Institute of Mining and Technology) ; L.E. Lara (SERNAGEOMIN) ; C-H. Lin (Taiwan Volcano Observatory, Tatun) ; C. Lombana-Criollo (Universidad Mariana, Colombie) ; O. Macedo (Instituto Geofisico del Peru) ; G. Macedonio (INGV, Istituto Nazionale di Geofisica e Vulcanologia, Italie) ; C. Magill (GVM / Risk Frontiers) ; C. Mandeville (U.S. Geological Survey) ; J.M. Marrero (consultant volcanologue) ; J. Marti


(Consejo Superior de Investigaciones Científicas, Espagne) ; W. Marzocchi (INGV, Istituto Nazionale di Geofisica e Vulcanologia, Italie) ; K. Mee (British Geological Survey) ; V. Miller (Geoscience Australia) ; P. Mothes (Instituo Geofísico EPN, Équateur) ; A. Mruma (Geological Survey of Tanzania) ; F. Nadim (Norwegian Geotechnical Institute) ; B. Oddsson (Department of Civil Protection and Emergency Management, Islande) ; S. Ogburn (université de Buffalo) ; R. Ortiz (Institute IGEO, CSIC-UCM) ; N. Ortiz Guerrero (Universidad Nacional Autónoma de México ; Universidad Mariana, Colombie) ; L. Ottemoller (université de Bergen) ; J. Pallister (Volcano Disaster Assistance Program, U.S. Geological Survey) ; M. Poland (Hawaiian Volcano Observatory, U.S. Geological Survey) ; M. Pritchard (Cornell University) ; P. Ramon (Instituto Geofísico EPN, Équateur) ; R. Robertson (Seismic Research Centre) ; L. Sandri (INGV, Istituto Nazionale di Geofisica e Vulcanologia, Italie) ; D. Sayudi (Geological Agency of Indonesia) ; E. Scourse (université de Bristol) ; J. Selva (INGV, Istituto Nazionale di Geofisica e Vulcanologia, Italie) ; L. Siebert (Smithsonian Institution) ; H. Smebye (Norwegian Geotechnical Institute) ; R. Solidum (Philippine Institute of Volcanology and Seismology) ; R. Stewart (Montserrat Volcano Observatory) ; R. Stewart (Massey University) ; J. Stone (East Anglia) ; Subandriyo (Geological Agency of Indonesia) ; S. Sumarti (Geological Agency of Indonesia) ; Surono (Geological Agency of Indonesia) ; S. Takarada (Geological Survey of Japan) ; R. Tonini (INGV, Istituto Nazionale di Geofisica e Vulcanologia, Italie) ; A. Turkecan (General Directorate of Mineral Research and Exploration) ; G.E. Vougioukalakis (Institute of Geology and Mineral Exploration) ; N. Varley (Universidad de Colima) ; E. Venzke (Smithsonian Institution) ; V. Villeneuve (Observatoire volcanologique du Piton de la Fournaise) ; G. Wadge (université de Reading) ; K. Wagner (université de Buffalo) ; P. Webley (Alaska Volcano Observatory, États-Unis d’Amérique) ; R.E. Wolf (INSIVUMEH). Évaluation des thématiques du CAH Rapports de synthèse GFDRR (Prashant ; Rob Reid ; Alanna Simpson ; Margaret Arnold ; Ayez Parvez ; Laura Boudreau ;

Sergio de Cosmo) ; Programme international de relèvement (Sanjaya Bhatia ; Gulzar Keyim ; Damon P. Coppola) ; OCDE (Rachel Scott ; Jack Radisch ; Cathérine Désiree Gamper) ; Save The Children (Johara Bellali ; Briony Towers ; Nick Ireland ; John Handmer) ; Stockholm Environment Institute (Richard J.T. Klein ; Frank Thomalla ; E.Lisa F. Schipper ; Karlee Johnson ; Gregor Vulturius) ; PNUD (Kamal Kishore ; Angelika Planitz ; Allan Lavell ; Yasemin Aysan) ; CEE-ONU (Lorenza Jachia) ; PNUE (Muralee Thummarukudy ; Shalini Sharma Kanwar) ; UN-Habitat (Dan Lewis ; Patricia Holly Purcell) ; UNICEF et UNESCO (Antony Spalton ; Julia Heiss ; Aisling Falconer) ; UNISDR (Craig Duncan ; Sarah Wade-Apicella ; Sophia Scherer) ; Université de Huddersfield (Bingunath Ingirige ; Dilanthi Amaratunga ; Mohan Kumaraswamy ; Champika Liyanage ; Aslam Perwaiz ; Peeranan Towashiraporn ; Gayan Wedawatta) ; PAM (Anthony Craig ; Randolph Kent ; Joanne Burke) ; OMM (Maryam Golnaraghi ; Lynn Maximuk ; James C. Douris). Documents de référence A. Aguiar (Universidade Vila Velha) ; S. Ahn (Applied System Thinking Institute - AsysT) ; F. Amelung (université de Miami) ; O. Anikeeva (Torrens Resilience Institute) ; P. Arbon (Torrens Resilience Institute) ; A. Attolico (Provincia di Potenza) ; F. Atun (Politecnico di Milano) ; S. Baas (FAO) ; H. Baba (Japan International Cooperation Agency) ; C. Bach (UNU-EHS) ; B. Balgos (Center for Disaster Preparedness Foundation, Inc.) ; F. Ballio (Politecnico di Milano) ; J. Barnard (consultant indépendant) ; C. Bartels (Centre européen pour la prévention et le contrôle des maladies) ; M. Batistella (Center of Environment Studies and Research - NEPAM/UNICAMP ; Embrapa Monitoramento por Satélite) ; J. Beauté (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies) ; M. Bengoubou-Valerius (Bureau de recherches géologiques et minières BRGM) ; N. Berni (Protection civile, Italie) ; J. Birkmann (Université des Nations Unies, UNU-EHS) ; R. Black (FAO) ; E. Brink (Lund University) ; J. Bruce (FAO) ; P. Bubeck (Adelphi) ; J. Burnside-Lawry (RMIT University) ; C. Cabot-Venton (PNUD) ; J. Ćalić (Serbian Academy of Sciences and Arts) ; A. Caravani (Overseas Development Institute) ; cclxxxix


L. Carvalho (Civil Protection Municipal Service, Portugal) ; A. Cavallo (université d’Adelaide) ; P. Chakrabarti (consultant indépendant) ; S. ChangRundgren (Karlstad University) ; T. Chelidze (Ivane Javakhishvili Tbilisi State University) ; I. Christoplos (Danish Institute for International Studies) ; V. Chub (Centre of Hydrometeorological Service, Ouzbékistan) ; M. Ciotti (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies) ; E. Comba (Overseas Development Institute) ; J. Cools (Milieu Ltd) ; A. Coskun (Cour des comptes de Turquie) ; A. Cottrell (James Cook University) ; N. Curosu (State Enterprise Basin Water Management Authority of Moldova) ; L. Cusack (Torrens Resilience Institute) ; S. Cutter (université de Caroline du Sud) ; M. da Penha Smarzaro Siqueira (Universidade Vila Velha) ; T. da Silva Rosa (Universidade Vila Velha) ; B. de Groot (Ressources naturelles Canada - Service canadien des forêts) ; L. de la Cruz (Center for Disaster Preparedness Foundation, Inc.) ; M. Di Prisco (Politecnico di Milano) ; A. Di Ruocco (Analisi e Monitoraggio del Rischio Ambientale - AMRA) ; N. Dufty (Molino Stewart Pty Ltd) ; M. Egener (FAO) ; C. Emrich (université de Caroline du Sud) ; S. Erbay (gouvernement de Turquie) ; M. Evers (Bonn University ; Karlstad University) ; N. Fassina (Société mondiale pour la protection des animaux) ; N. Fernando (université de Colombo) ; L. Ferreira (Center of Environment Studies and Research - NEPAM/ UNICAMP) ; F. Ferreira Pedroso (Banque mondiale) ; A. Firdaus (James Cook University) ; C. Fitzgibbon (PNUD) ; K. Fleming (GFZ) ; M. Florin (International Risk Governance Council) ; J. Frittman (Applied Systems Thinking Institute - ASysT) ; S. Frye (NASA) ; F. Gaetani (Group on Earth Observations) ; JC Gaillard (université d’Auckland) ; M. Gall (université de Caroline du Sud) ; A. GarciaAristizabal (Analisi e Monitoraggio del Rischio Ambientale - AMRA) ; P. Gasparini (Analisi e Monitoraggio del Rischio Ambientale - AMRA, Italie) ; K. Gebbie (Torrens Resilience Institute) ; S. Giovanazzi (Resilient Organisations) ; P. Girot (CARE International) ; Y. Gurtner (James Cook University) ; B. Guru (Tata Institute of Social Sciences, India) ; R. Haigh (université de Salford) ; F. Hamdan (Disaster Risk Management Centre) ; N. Harada (National Defence Medical College, Japon) ; M. Haraguchi (Columbia ccxc

Remerciements

University) ; C. Harbitz (Norwegian Geotechnical Institute) ; S. Hardjosuwarno (gouvernement d’Indonésie) ; S. Harwood (James Cook University) ; K. Hayashi (Barefoot Doctors Okinawa) ; M. Hosseini (Institut international de génie parasismique et de sismologie) ; M. Huang (National Graduate Institute for Policy Studies) ; G. Huertas (Société mondiale pour la protection des animaux) ; F. Imamura (Tohoku University) ; D. Innocenti (université d’Anvers) ; V. Ireland (université d’Adelaide) ; A. Iwama (Center of Environment Studies and Research - NEPAM/UNICAMP) ; Y. Izadkhah (Institut international de génie parasismique et de sismologie) ; P. Jackson (université de Leicester) ; M. Johansson (université de Karlstad) ; F. Kagawa (Sustainability Frontiers) ; K. Kalula (consultant indépendant) ; S. Kanwar (PNUE) ; J. Kellett (Overseas Development Institute) ; G. Keyim (Programme international de relèvement) ; S. Kim (Columbia University) ; D. King (James Cook University) ; N. Komendantova (Institute for Environmental Decisions - ETHZ ; Institut international pour l’analyse des systèmes appliqués - IIASA) ; J. Kovačević-Majkić (Serbian Academy of Sciences and Arts) ; H. Kreibich (GFZ) ; S. Kundak (Istanbul Technical University) ; Y. Kurauchi (PNUD) ; K. Kuterdem (gouvernement de Turquie) ; Y. Lee (Dongguk University) ; N. Leitão (Universidade Nova de Lisboa) ; F. Lindsay (NASA) ; M. Liu (Asian Development Bank Institute) ; L. Longoni (Politecnico di Milano, Italie) ; F. Løvholt (Norwegian Geotechnical Institute) ; K. Maripe (université du Botswana) ; S. Marsh (GeoHazards Community of Practice) ; A. Masys (Centre for Security Science Defence R&D) ; S. McGee (Applied Systems Thinking Institute - ASysT) ; Q. Mejri (Politecnico di Milano) ; S. Menoni (Politecnico di Milano) ; D. Miljanović (Serbian Academy of Sciences and Arts) ; M. Milošević (Serbian Academy of Sciences and Arts) ; D. Molinari (Politecnico di Milano) ; D. Montfort (Bureau de recherches géologiques et minières - BRGM) ; E. Morales (Société mondiale pour la protection des animaux) ; R. Mrzyglocki (German Committee for Disaster Reduction - DKKV) ; A. Muhari (Tohoku University) ; S. Murray (Applied Systems Thinking Institute - ASysT) ; F. Nadim (Norwegian Geotechnical Institute) ; N. Ngoy (OMS) ; M. Nurlu


(gouvernement de Turquie) ; L. Nyberg (Karlstad University) ; E. Ochoa (National Secretary for the Management of Risks - SNGR) ; J. Odongo (consultant indépendant) ; O. Olu (OMS) ; F. Opiyo (PNUD) ; R. Otoni de Araújo (Universidade Vila Velha) ; C. Pandolfo (Protection civile, Italie) ; M. Panić (Serbian Academy of Sciences and Arts) ; C. Pathirage (université de Salford) ; A. Patt (Institute for Environmental Decisions - ETHZ ; Institut international pour l’analyse des systèmes appliqués) ; F. Pedroso (Banque mondiale) ; H. Peter-Plag (GeoHazards Community of Practice) ; K. Peters (Overseas Development Institute) ; I. Petiteville (Agence spatiale européenne) ; A. Pharris (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies) ; F. Pichon (Overseas Development Institute) ; M. Pittore (GFZ) ; N. Ray-Bennett (université de Leicester) ; C. Réboli (Universidade Vila Velha) ; M. Reis (Universidade Vila Velha) ; C. Renschler (The State University of New York) ; E. Roberts (King’s College London) ; T. Rosa (Universidade Vila Velha) ; S. Santha (Tata Institute of Social Sciences) ; A. Scolobig (Institute for Environmental Decisions - ETHZ ; Institut international pour l’analyse des systèmes appliqués) ; G. Seguin (consultant indépendant) ; J. Semenza (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies) ; K. Seneviratne (université de Salford) ; N. Setiadi (UNU-EHS) ; E. Seville (Resilient Organisations) ; H. Shiroshita (Kansai University ; université de Leicester) ; R. Sinkamba (université du Botswana) ; M. Siqueira (Universidade of Vila Velha) ; E. Skelton (PricewaterhouseCoopers) ; K. Soojun (Georgia Tech) ; M. Stal (Global Risk Forum) ; M. Steenkamp (Torrens Resilience Institute) ; J. Suk (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies) ; B. Sukatja (gouvernement d’Indonésie) ; A. Tabacaru (State Enterprise Basin Water Management Authority of Moldova) ; M. Tarande (OMS) ; L. Teixeira (Center of Environment Studies and Research - NEPAM/UNICAMP ; Brazilian Institute of Environment and Renewable Natural Resources - IBAMA) ; B. Tekin (gouvernement de Turquie) ; J. Teo (université de Kyoto) ; M. Trujillo (FAO) ; S. Tsolova (Centre européen pour la prévention et le contrôle des maladies) ; A. Usman (OMS, Organisation mondiale de la santé) ; V. Valenzuela (Center for Disaster Preparedness Foundation,

Inc.) ; T. Van Cangh (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies) ; D. van Niekerk (PNUD) ; J. Vargo (Resilient Organisations) ; C. Vinchon (Bureau de recherches géologiques et minières - BRGM) ; E. Visconti (Natural Disasters Fund, FONDEN) ; C. Walch (Uppsala University) ; C. Wamsler (Lund University) ; M. Wieland (GFZ) ; E. Wilkinson (Overseas Development Institute) ; J. Xu (International Risk Governance Council) ; M. Yasumiishi (The State University of New York) ; T. Yunit (gouvernement d’Indonésie) ; D. Zupka (Centre for Education and Research in Humanitarian Action). Évaluation par les pairs des rapports de synthèse Dilanthi Amaratunga (Global Disaster Resilience Centre, université de Huddersfield), Richard Haigh (Global Disaster Resilience Centre, université de Huddersfield), Naveed Ahmad (University of Engineering and Technology), Sisith Arambepola (Asian Disaster Preparedness Centre), Massimo Bianchi (université de Bologne), Alice Chang-Richards (université d’Auckland), Aguinaldo dos Santos (université fédérale du Parana), Thayapran Gajendran (université de Newcastle), Paolo Gasparini (AMRA), Ashantha Goonetilleke (Queensland University of Technology), Makarand Hastak (Purdue University), Samantha Hettierachichi (université de Moratuwa), Siri Hettige (université de Colombo), Yamuna Kaluarachchi (université de Kingston), Arturas Kaklauskas (Vilnius Gediminas Technical University), Kaushal Keraminiyage (université de Huddersfield), Udaya Kulatunga (université de Salford), Bingu Ingirige (université de Salford), Skevi Lees (Frederick University), Andrew Lees (Frederick University), Irene Lill (Tallinn University of Technology), Champika Liyange (University of Central Lancashire), Roshani Palliayaguru (Heriot-Watt University), Chaminda Pathirage (université de Salford), Srinath Perera (Northumbria University), Kurt Petersen (Lund University), Joachim Post (DLR), Harkunti Rahayu (Institute of Technology Bandung), James O. B. Rotimi (AUT University), Janaka Ruwanpura (université de Calgary), Sujeeva Setunge (RMIT University), Siti Uzairiah Mohd Tobi (Technological University Malaysia), Clive Warren, (université du Queensland), Gayan Wedawatta (Aston University), Suzanne Wilkinson (université d’Auckland). ccxci


Série de séminaires sur L’avenir de la réduction des risques de catastrophe Osman Alhassan (université du Ghana) ; Naomi Aoki (Lee Kuan Yew School of Public Policy) ; Tarekegn Ayalwe (Bahir Dar University) ; Sophie Baranes (PNUD, Programme des Nations Unies pour le développement) ; Roy Barboza (CEPREDENAC) ; Djillali Benouar (University of Science and Technology Houari Boumediene) ; Gautam Bhan (Indian Institute for Human Settlements - IIHS) ; Sarah Bradshaw (université du Middlesex) ; Caroline Brassard (Lee Kuan Yew School of Public Policy, université nationale de Singapour) ; Alonso Brenes (FLACSO) ; Ian Burton (consultant indépendant) ; Terry Cannon (Institute of Development Studies) ; Gilles Carbonnier (The Graduate Institute, Genève IHEID) ; Christo Coetzee (African Centre for Disaster Studies) ; Rui da Maia (Eduardo Mondlane University) ; Mateugue Diack (Gaston Berger University) ; David Dodman (IIED) ; Mike Douglas (université nationale de Singapour) ; Jean Christophe Gaillard (université d’Auckland) ; Sumetee Pahwa Gajjar (IIHS) ; Rachel Gallagher (United States Agency for International Development - USAID) ; Luis Gamarra (PNUD) ; Christopher Garimpoi Orach (Makerere University) ; Pascal Girot (Care International) ; Michelle Gyles McDonnough (UNRC, Malaisie) ; Kenneth Hewitt (Wilfried Laurier University) ; Gabriela Hoberman (Florida International University) ; Ailsa Holloway (université de Stellenbosch) ; Edwin Iguisi (Ahmadu Bello University) ; Ronald Jackson (CDEMA) ; Garima Jain (Indian Institute for Human Settlements - IIHS) ; Sanny Jegillos (PNUD) ; Benjamin William Jeyaraj (Singapore Red Cross) ; Jyotsna Jha (Centre for Budget and Policy Studies - CBPS) ; Rohit Jigyasu (Indian Institute for Human Settlements - IIHS) ; Ase Johanessen (Stockholm Environment Institute) ; Anup Karanth (Technical Assistance Response Unit - TARU) ; Gabriel Roderick Kassenga (Ardhi University) ; Ilan Kelman (University College London) ; Kamal Kishore (PNUD) ; Shefali Lakhina (consultant indépendant) ; Andrea Lampis (université nationale de Colombie) ; Jonatan Lassa (Nayang Technological University) ; Allan Lavell (FLACSO) ; Chris Lavell (consultant indépendant) ; Donald Low (Lee Kuan Yew School of Public Policy, université nationale de Singapour) ; Tiana ccxcii

Remerciements

Mahefosa Randrianalijaona (université d’Antananarivo) ; Roché Mahon (Lincoln University) ; Elisabeth Mansilla (université nationale autonome de Mexico) ; Adolfo Mascarhenas (université de Dar es Salaam) ; Peninah Masibo (Moi University) ; David Matyas (Save the Children) ; Franklin McDonald (université des Indes occidentales) ; Imen Meliane (The Nature Conservancy) ; Lilian Mercado Carreon (ASEAN) ; Jessica Mercer (Secure Futures) ; James Morissey (université d’Oxford) ; Ilan Noy (Victoria University of Wellington) ; Richard Olson (Florida International University) ; Edmund Penning-Rowsell (université d’Oxford) ; Robyn Pharoah (université de Stellenbosch) ; Jean Michel Piedagnel (Woodseer Resources) ; Angelika Planitz (PNUD) ; Aromar Revi (IIHS) ; Dominic Sam (PNUD) ; Neha Sami IIHS) ; Juan Pablo Sarmiento (Florida International University) ; David Satterthwaite (IIED) ; Jo Scheuer (PNUD) ; Lisa F. Schipper (Stockholm Environment Institute) ; Antony Oliver Smith (université de Floride) ; David Smith Wiltshire (National University Costa Rica) ; Jacob Songsore (université du Ghana) ; Marcela Tarazona (Oxford Policy Management) ; Daniel Toole (UNICEF) ; Marco Toscano (UNISDR) ; Emily Wilkinson (Overseas Development Institute) ; Scott Williams (PricewaterhouseCooper) ; Ben Wisner (University College London). Recherches complémentaires Felipe Baritto (Geohidra Consultores) ; Amir Bazaz (IIHS) ; Susan Cutter (université de Caroline du Sud) ; Melanie Gall (université de Caroline du Sud) ; Terry Gibson (GNDR) ; Stefan Hochrainer (IIASA) ; Garima Jain (IIHS) ; David Johnston (Massey University) ; Reinhard Mechler (IIASA) ; Junko Mochizuki (IIASA) ; Khai Nguyen (université de Caroline du Sud) ; Ilan Noy (Victoria University of Wellington) ; Mark Pelling (King’s College London) ; Ayisha Siddiqi (King’s College London) ; Bill Solecki (City University of New York) ; Keith Williges (IIASA). Données nationales sur les pertes dues aux catastrophes Albanie : Défense civile d’Albanie (Emanuela Toto, Marco Massabo) ; Antigua-et-Barbuda : NODS (Philmore Mullin) ; Argentine : CENTRO (Alejandra


Celis) ; Bolivie : Vice Ministerio de la Defensa Civil VIDECI (Carlos Mariaca Ceballos, Omar Pedro Velazco) ; Cambodge : National Committee for Disaster Management Cambodia (Sophal Sam) ; Chili : Universidad de Chile (Alejandro León, Carolina Clerc) ; Colombie : Corporación OSSO (Andres Velásquez, Natalia Diaz, Nayibe Jiménez, Cristina Rosales, Unidad para la Gestión del Riesgo de Desastres) ; Comores : Protection civile, Comores (Abdillahi Maoulida Mohamed) ; Costa Rica : Programa Integral de Gestión de Riesgos de Desastres de la Universidad Nacional - PRIGD UNA (Alice Brenes Maykall, David Smith) ; Djibouti : Centre d’études et de recherches de Djibouti, CERD (Samatar Abdi Osman, Ahmed Madar) ; Dominique : Office of Disaster Management, Dominique (Don Corriette) ; El Salvador : Universidad de El Salvador, Dirección General del Observatorio Nacional (DGOA) del Ministerio del Medio Ambiente y Recursos Naturales - MARN (Edgar Armando Peña, Ivonne Jaimes) ; Équateur : Secretaría Nacional de Gestión de Riesgos - SNGR (Dalton Andrade Rodríguez) ; Espagne : Dirección de Protección Civil de España (Gregorio Pascual Santamaría, Almudena Bustamante Gil) ; Éthiopie : ministère de l’agriculture et Programme alimentaire mondial - PAM (Animesh Kumar, Workneh Hundessa, Edget Tilahun, Getnet Kebede) ; Grenade : NEMO Grenada (Terence Walters) ; Guatemala : La Red de Estudios Sociales en Prevención de Desastres LA RED (Gisela Gellert) ; Guyana : Civil Defence Commission - CDC (Kester Craig, Sherwin Felicien) ; Honduras : Instituto Hondureño de Ciencias de la Tierra IHCIT de la Universidad Nacional Autónoma de Honduras UNAH (Nabil Kawas, Oscar Elvir) ; Îles du Pacifique : SPC/SOPAC (Jutta May, Nicole Daniels, Litea Biukoto) ; Îles Salomon : NDMO, ministère de l’environnement (Jonathan Tafiariki) ; Inde : Tamil Nadu, State Disaster Management Authority (Ganapathy Pattukandan) ; Indonésie : Indonesian National Board for Disaster Management BNPB (Ridwan Yunus) ; Iran (République islamique d’) : ministère de l’intérieur et PNUD (Amin Shamseddini) ; Jamaïque : Office for Disaster Preparedness and Emergency Management - ODPEM (Leiska Powell, Anna Tucker, Rashida Green, Sherese Gentles, Sashekia Powell, Fredene Wilson) ; Jordanie : Protection civile de Jordanie

(Waleed Al-So’ub) ; Kenya : National Disaster Operations Center (Oliver Madara, Isabel Njihia, Faith Langat) ; Laos : National Disaster Management Organization - NDMO, Laos (Sisomvang Vilayphong, Bouasy Thammasack, Thitiphon Sinsupan, Hang Thi Thanh Pham, Thanongdeth Insisiengmay, Somvath) ; Liban : cabinet du Premier ministre et PNUD (Nathalie Zaarour, Lama Tabbara, Bilal ElGhali) ; Madagascar : Protection civile de Madagascar (Mamy Nirina Razakanaivo, Regis Andrianaivo) ; Mali : Protection civile du Mali (Mamadou Traore, Diawoye Konte, Aboudra Koungoulba, Savane Foulematou SY) ; Maurice : IOC, ministère de l’environnement, Maurice (Venetia Bellers, Bhye Muslim Heetun) ; Mexique : La Red de Estudios Sociales en Prevención de Desastres - LA RED (Elizabeth Mansilla) ; Mozambique : Instituto Nacional de Gestão de Calamidades - INGC et PNUD (Dulce Chilundo, Eunice Mucache, Antonio Queface) ; Népal : National Society for Earthquake Technology - NSET (Amod Dixit, Gopi Bashal) ; Nicaragua : Sistema Nacional para la Prevención, Mitigación y Atención de Desastres - SINAPRED (Ana Isabel Izaguirre, Mercedes Martínez, Gisela Guevara, Carlos Olivares, Noé Ubau, Ernesto González) ; Orissa : State Disaster Management Authority (Kalika Mohapatra, Ambika Prasad) ; Ouganda : cabinet du Premier ministre, Department of Disaster Preparedness and Management (Martin Odong, Charles Odok, Samuel Akera) ; Pakistan : NDMA, National Disaster Managment Authority (Nasir Hussain) ; Palestine : Défense civile de Palestine (Issa Zboun) ; Panama : Sistema Nacional de Protección Civil - SINAPROC (Yira Marisol Campos Barranco) ; Pérou : Centro de Estudios de Prevención de Desastres - PREDES (José Sato Onuma, Alfonso Diaz Calero, Julio Meneses Bautista, Yeselm Díaz Toribio, Ingrid Azaña Saldaña) ; République arabe syrienne : ministère de l’admnistration locale (Kinda Muhanna, Claude Amer) ; Sainte-Lucie : NEMO Sainte-Lucie (Nelda Joseph) ; Saint-Kitts-et-Nevis : NDMO Saint-Kittset-Nevis (Carl Herbert) ; Saint-Vincent-et-les-Grenadines : NEMO Saint-Vincent-et-les-Grenadines (Howie Prince) ; Sénégal : Protection civile / PNUD (Sophie Baranes) ; Serbie : Sector for Emergency Management - Serbie (Selena Markovic, Dragana Djokovic Papic, Zoran Jancic) ; Seychelles : déparccxciii


tement de gestion des risques et des catastrophes, ministère de l’environnement et de l’énergie (Divina Sabino) ; Sierra Leone : Disaster Management Dept, Office of National Security/PNUD (Mary Mye, Mohamed Abchir) ; Sri Lanka : ministère de la gestion des catastrophes (Anoja Seneviratne, Dinesh Rajapaksha) ; Timor-Oriental : National Disaster Operation Centre - NDOC, ministère de la solidarité sociale (Lourenco Cosme Xavier, Maarten Visser) ; Trinité-et-Tobago : Office of Disaster Preparedness and Management - ODPM (Candice Ramkissoon, Shelly Bradshaw) ; Tunisie : ministère de l’environnement (Hedi Shili, Hazar Belli) ; Turquie : METU (Koray Kuruoğlu, Burcak Basbug Erkan) ; Uruguay : Sistema Nacional de Emergencias de la Presidencia de la República - SINAE (Pablo Brugnoni, Virginia Fernandez, Sabrina Pose, Soledad Camacho, Ana Maria Games, Pablo Capurro) ; Venezuela : Dirección Nacional de Protección Civil y Administración de Desastres - DNPCAD (Jesús Riobueno, José Scire) ; Viet Nam : ministère de l’agriculture et du développement rural et PNUD (Miguel Coulier, Oanh Luong Nhu, Nguyen Thi Thu Thuy) ; Yemen : ministère de l’eau et de l’environnement (Majed Alrefai). Évaluation par les pairs de l’avant-projet préliminaire Jonathan Abrahams (OMS) ; Adele Bear-Crozier (Geoscience Australia) ; Johara Bellali (Adelphi) ; Lee Boscher (université de Loughborough) ; Sarah Brown (université de Bristol) ; Antonella Cavallo (université d’Adelaide) ; Jan Cools (Milieu Ltd) ; Luis Rolando Duràn Vargas (consultant indépendant) ; Sergio Freire (Centre commun de recherche) ; JC Gaillard (université d’Auckland) ; Terry Gibson (GNDRR) ; Michael Gordy (consultant indépendant) ; Tim Haney (Mount Royal University) ; Ilan Kelman (University College London) ; Susan Loughlin (British Geological Survey) ; Shuaib Lwasa (Makerere University) ; Roché Mahon (Lincoln University) ; David Matyas (Save The Children) ; Jared Mercadente (GFDRR) ; Robert Muir-Wood (Risk Management Solutions - RMS) ; Kenji Okazaki (Kyoto University) ; Toshio Okazumi (gouvernement du Japon) ; Aris Papadopolous (Titan America) ; Patrick Pigeon (université de Savoie) ; Angelika Placcxciv

Remerciements

nitz (PNUD) ; Nibedita Ray-Bennett (université de Leicester) ; Robert Reid (Banque mondiale) ; John Schneider (Schneider Geohazards) ; Alanna Simpson (GFDRR) ; Xu Tang, (OMM) ; Jennifer Trivedi (université de l’Iowa) ; Jerry Velasquez (UNISDR) ; Christine Wamsler (Lund University) ; Emily Wilkinson (ODI) ; Scott Williams (PWC) ; Ben Wisner (University College London et Oberlin College) ; Jianping Yan (PNUD). Conception du design Earth Literacy Program (organisme à but non lucratif). Design et production (version papier du Bilan mondial) Rédaction : Christopher Anderson ; Cartes et graphiques : Sylvain Ponserre (UNISDR) et Stéphane Kluser (Komplo) ; Conception du design, couverture et guide stylistique : Mitsuhiro Miyazaki et Masashi Tomura (AXIS), Shin’ichi Takemura (Earth Literacy Programme - ELP), Taku Satoh (Taku Satoh Design Office) ; Symbole du parapluie renversé : Taku Satoh et Shin’ichi Takemura, inspirés par le travail de Makoto Murase et de l’Institute on Sky Water Harvesting ; Réalisation : Mitsuhiro Miyazaki et Masashi Tomura (AXIS), Shin’ichi Takemura (ELP) ; Traduction : Euroscript Luxembourg S.à r.l. (Luxembourg), Development Works (Le Caire) ; Révision : Valentina Ermolovich (Moscou), Kazuko Ishigaki (UNISDR), Fernando Ramírez Gómez (Bogotá), Sandrine Revet (Paris), Saini Yang (Beijing) ; Mise en page : Takae Ooka, Euroscript Luxembourg S.à r.l, Imprimerie Gonnet ; Impression : Imprimerie Gonnet (Belley, France) ; Logistique : UNOPS (Bangkok) ; Coordination de la production : Frédéric Delpech (UNISDR). Bilan mondial en ligne et plateformes d’information sur les risques Julio Serje, Sylvain Ponserre, Joel Margate et Hugo Jacquet (UNISDR). Applications Tangible Earth (TE) et GAR for Tangible Earth (GfT) Conception de la plateforme TE et développement de scénarios GfT : Shin’ichi Takemura ; Architecture


système TE : Takahiro Shinkai ; Architecture système GfT : Jun Nishimura ; Développement de scénarios GfT : Yoshiyuki Inaba ; Gestion de la production : Kensuke Arakawa ; Études de cas pour GfT : Sylvain Ponserre, Vicente Anzellini et Lucy Foggin (UNISDR) ; Conception de l’interface GfT : Masashi Tomura (AXIS), Kensuke Arakawa ; Administration: Shoko Takemura. Ressources financières Commission européenne (DG ECHO et DG Développement), Programme des Nations Unies pour le développement (BCPR) et gouvernement des États-Unis d’Amérique (USAID-OFDA).

Autres ressources et soutien à la coordination Florida International University (FIU) ; Geoscience Australia ; Dispositif mondial pour la réduction des risques de catastrophe et le relèvement (GFDRR) ; Global Volcano Model - GV M ; IAVCEI : Integrated Institute for Applied Systems Analysis (IIASA) ; Indian Institute for Human Settlements (IIHS) ; Integrated Research on Disaster Risk (IRDR) ; Kokusai Kogyo ; Latin American Faculty of Social Sciences (FLACSO) ; Lee Kuan School of Public Policy (LKYSPP), université nationale de Singapour ; Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) ; université du Ghana ; université de Huddersfield ; Victoria University of Wellington.

ccxcv


Références Acemoglu, Daron and James Robinson. 2012. Why Nations Fail: The Origins of Power, Prosperity and Poverty. New York: Crown Business. ACTED (Agency for Technical Cooperation and Development). 2012. ACTED 2012 Annual Report. Paris. ADPC (Asian Disaster Prevention Center). 2008. Monitoring and Reporting Progress on Community-Based Disaster Risk Management in Viet Nam. Partnerships for Disaster Reduction – South East Asia Phase 4. April. Agarwal, Siddharth. 2011. The state of urban health in India; comparing the poorest quartile to the rest of the urban population in selected states and cities. Environment and Urbanization, Vol. 23, No. 1, pp. 13-28. Agrawala, Shardul, Arnoldo Matus Kramer, Guillaume Prudent-Richard and Sainsbury, Marcus. 2010. Incorporating climate change impacts and adaptation in Environmental Impact Assessments: Opportunities and Challenges. OECD Environmental Working Paper No. 24. Paris: OECD Publishing. AIFDR (Australia-Indonesia Facility for Disaster Reduction). 2013. Key Disaster Management Successes: January 2012 – February 2013. Jakarta. Airmic Technical. 2013. Supply Chain Failures: A study of the nature, causes and complexity of supply chain disruptions. A report by Dr. Alan Punter on behalf of Airmic - Sponsored by Allianz Global Corporate & Specialty & Lockton. London. AIS (Asociación Colombiana de Ingeniería Sísmica). 2014. Historia. Available from http:// www.asosismica.org.co/?idcategoria=1052. Accessed 30 September 2014. Albala-Bertrand, José Miguel. 1993. Political Economy of Large Natural Disasters With Special Reference to Developing Countries. Oxford: Clarendon Press. Albala-Bertrand, José Miguel. 2006. The Unlikeliness of an Economic Catastrophe. Working ccxcvi

Références

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Index Liste de pays et territoires utilisée par l’ONU A Açores 83

D Djibouti 246, ccxciii

Aghanistan

Dominique 77, ccxciii

66, 68

Afrique du Sud 128, 229, 246 Albanie 94, ccxcii Algérie v, 104 Allemagne 53, 104, 162, 163, 183, 214, 218 Angola 86 Anguilla vi, 80 Antigua-et-Barbuda 76, 77, ccxcii Argentine 160, 217, 233, 246, ccxcii

E Égypte 166 El Salvador 108, ccxciii Émirats Arabes Unis 66 Équateur 66, 160, 171, 179, cclxxxix, ccxciii Érythrée 85, 132, 246 Espagne 94, cclxxxix, ccxciii État de Palestine 94, ccxciii

Arménie

68, 83

Aruba

77, 80

Australie

69, 147, 163, 180, 181, 249

États-Unis d'Amérique ii, 32, 34, 39, 57, 61, 67, 70, 74, 90, 104, 131, 147, 160, 162, 201, 205, 214, 216, 244, 256, 257, 260, 261, cclxxxvi, cclxxxix, ccxcv

Autriche

ii, 53

Éthiopie 81, 85, 168, ccxciii

B Bahamas 76, 77

F Fidji 242

Bangladesh 32, 38, 49, 50, 67, 75, 163, 170, 200, 217, 276, ccxcix, ccc, ccci, ccciii, cccxii

France ii, 104, 130, 147, 156, 214, cclxxxviii, ccciv, cccxx

Barbade 94, 163 Belgique 166 Belize 70, 71, 108, 250, ccci

G Gabon

Bénin 86

Géorgie 166

Bermudes

Ghana 227, ccxcii, ccxcv

77, 80

66, 76

Bhoutan 75, 124

Grèce v, 67, 68, 103

Bolivie (État plurinational de) 104, 160, 168, ccxciii

Grenade 94, 132, ccxciii

Brésil 73, 160, 181, 235, 236, 240, 246, 255

Guadeloupe cclxxxviii

Burkina Faso 124, ccciv

Guatemala 32, 64, 66, 67, 81, 217, 250, 251, ccxciii, ccxcix, cccvii

Burundi 193 C Cabo Verde cclxxxviii Cambodge 64, 74, 75, 94, 106, 147, ccxciii Canada 104, 249, cclxxxviii, ccxc, cccx, cccxv Chili iv, 67, 104, 160, 163, 167, 178, 179, 183, 229, 233, 234, ccxciii Chine 43, 52, 57, 67, 73, 74, 108, 132, 175, 205, 237, 243, 244, 253, 255, 257, 278 Colombie 31, 35, 36, 37, 82, 90, 122, 154, 156, 160, 238, 269, 276, cclxxxviii, cclxxxix, ccxcii, ccxciii, cccix

H Haïti 48, 50, 60, 103, 132, 146, 150, 167, 178, 179 Honduras 60, 64, 66, 67, 103, 106, 174, ccxciii Hong Kong 142, ccxcvii Hongrie 75 I Îles Caïmanes 77, 108 Îles Canaries 83 Îles Marshall 79 Îles Salomon 78, ccxciii

Comores 94, 104, 105, 106, ccxciii

Îles Turques et Caïques 79

Costa Rica 163, 217, 261, 269, ccxcii, ccxciii, ccciii, cccx

Îles Vierges Américaines

79, 80

Cuba 49, 146, 170, cccxiii

Îles Vierges Britanniques

77, 79, 80

cccxxiii


Inde 25, 35, 46, 57, 73, 74, 94, 100, 128, 159, 163, 170, 171, 173, 183, 234, 237, 238, 243, 251, 253, 255, 257, 276, 278, ccxciii Indonésie iv, 25, 35, 43, 71, 81, 82, 83, 90, 93, 104, 155, 173, 175, 183, 252, ccxc, ccxci, ccxciii Iran (République Ismamique d’)

iv, 67, 104, ccxciii, cccxiv

Iraq 192

Nigéria 246 Nouvelle Calédonie 79 Nouvelle-Zélande 43, 57, 72, 181, 250, cclxxxviii O Ouganda 156, ccxciii Ouzbékistan ccxc

Irlande 245, 267 Islande 81, 82, cclxxxix Italie 67, 81, 82, 166, 240, 261, cclxxxviii, cclxxxix, ccxc, ccxci

P Pakistan iv, 94, 104, 150, 167, 179, 182, 183, 231, ccxciii Palaos 78

J Jamaïque v, 34, 35, 103, 116, 204, 250, ccxciii

Palestine 94, ccxciii Panama 92, 217, 245, 269, ccxciii

Japon ii, iii, xiii, xvi, 25, 29, 30, 61, 66, 67, 69, 70, 72, 73, 81, 83, 90, 126, 129, 132, 134, 138, 140, 141, 165, 176, 181, 201, 215, 216, 218, 220, 221, 222, 244, 257, ccxc, ccxciv

Papouasie-Nouvelle-Guinée 71, 83

Jordanie ccxciii

Philippines v, 35, 64, 66, 67, 70, 72, 81, 103, 126, 135, 163, 175, 195, 250, ccxcviii, ccci, cccvi, cccix, cccxi, cccxiv, cccxvi, cccxix

K Kenya vi, 87, 88, 89, 168, 229, 250, ccxciii, cccxvi Kirghizistan 68

Pays-Bas 73, 249 Pérou iv, 25, 32, 33, 66, 67, 69, 127, 156, 160, 195, 217, 246, 269, ccxciii

Polynésie Française 79 Porto Rico 77, 78, 79, 80

Kiribati 73, 79 L Lesotho 246

R République Arabe Syrienne 247, ccxciii République Centrafricaine 76

Liban 250, ccxciii

République de Corée 244

Libéria 86

République de Moldova 75

M Macao (Région administrative

République démocratique 192, 246 du Congo 72

spéciale de Chine)

Madagascar iv, 66, 70, 94, 99, 103, 104, 105, 106, ccxciii Malawi vi, 86, 87, 88, cccxxi Maldives 107 Mali 86, 166, 193, 250, ccxciii Maroc 94, 204 Martinique 90 Maurice 94, 104, 105, 106, 152, 163, 268, ccxciii Mexique vi, 53, 81, 82, 108, 126, 165, 175, 195, 202, 218, 223, 250, 269, ccxciii

République démocratique 74 populaire lao République Dominicaine 67, 146 République Tchèque 53 Royaume-Uni 32, 33, 73, 151, 210, 221, 223, 265, cclxxxviii Russie (Fédération de) 73, 190, 253, 257 Rwanda 204 S Saint-Hélène, Ascension 83 et Tristan da Cunha Sainte-Lucie 94, ccxciii

Micronésie (États fédérés de) 73, 79

Saint-Kitts-et-Nevis 77, 94, ccxciii

Mongolie 201

Saint-Vincent- et-les-Grenadines

Montserrat 77, cclxxxix Mozambique 49, 104, 170, 182, 183, ccxciii, cccxxi Myanmar 47, 50, 64, 66, 74, 172, 173, 221, 222, ccciv, cccxi, cccxii, cccxvii, cccxix

94, ccxciii

Samoa 83 Samoas Américaines 79, 83 Sao Tomé-et-Principe 83 Sénégal 87, 94, ccxciii

N Népal 67, 145, 217, 250, ccxciii

Serbie 60, 94, ccxciii

Nicaragua 32, 35, ccxciii, ccciv

Slovénie 68

Niger vi, 87, 88, 94

Somalie 25, 74, 168

cccxxiv

Index

Sierra Leone 94, 192, 193, 246, ccxciv


Soudan 86 Sri Lanka 25, 35, 48, 138, 164, 165, 249, ccxciv, ccciv, cccxiii, cccxiv

Tuvalu 43

Suède cclxxxvii

U Uruguay 160, ccxciv

Suisse ii, 188, 204, 206, 244, 261, cclxxxiv, ccc

Ukraine 75

Swaziland 246 T Tadjikistan 67 Taïwan 175

V Vanuatu 78, 83, 99, 107, 108 Venezuela 160, 174, ccxciv Viet Nam 172, 238, 250, ccxciv, ccxcvi, cccxi

Tanzanie 94, 100, 231 Tchad 86 Togo 94

Y Yemen ccxciv

Tonga 78 Trinité-et-Tobago vi, 69, 80, 94, ccxciv Tunisie 94, ccxciv

Z Zambie 246

Turquie 43, 48, 94, 196, 197, 201, ccxc, ccxci, ccxciv

Zimbabwe 235, 246

cccxxv


Actifs iii, iv, viii, xi, xix, xx, 28, 51, 57, 58, 61, 62, 63, 67, 68, 69, 70, 72, 73, 74, 75, 76, 77, 78, 79, 81, 82, 90, 97, 98, 99, 100, 102, 103, 107, 108, 110, 116, 125, 131, 132, 160, 177, 179, 180, 188, 195, 197, 198, 200, 201, 206, 209, 210, 211, 214, 215, 216, 222, 227, 265, 270, 271, 273, 279, cclxxxii, cclxxxiii Agriculture vi, xvii, 42, 60, 72, 85, 86, 87, 180, 183, 198, 199, 245, 256, 260, 262, 278, cclxxxv, ccxciii, ccxciv Biocapacité vi, xi, xvi, 189, 214, 241, 242, 247, 253, 260, cclxxxiii Cadre d’action de Hyogo

xiii, 29, cclxxxv (CAH)

Changement climatique vi, xiii, xv, xvi, xvii, xviii, xx, xxi, 36, 58, 71, 73, 78, 80, 81, 85, 87, 88, 89, 109, 110, 117, 118, 128, 133, 134, 142, 143, 147, 148, 151, 152, 187, 189, 190, 195, 200, 213, 222, 230, 232, 233, 242, 243, 244, 246, 248, 249, 250, 254, 259, 260, 261, 262, 263, 264, 265, 266, 269, 275, 278, 279, 280, cclxxxii, cclxxxv

130, 133, 138, 139, 145, 150, 152, 154, 164, 166, 167, 169, 172, 182, 183, 186, 188, 192, 193, 195, 198, 200, 206, 210, 211, 212, 218, 221, 222, 227, 229, 230, 231, 236, 242, 249, 250, 251, 252, 254, 256, 259, 262, 264, 274, 276, cclxxxii Maintien des activités 142, 147, 152 Modèle de risque mondial xxi, xxii, 58, 59, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 70, 72, 73, 75, 76, 77, 78, 79, 90, 103, 112, 132, 268, cclxxxii, cclxxxvii Objectifs du Millénaire pour le développement

xvii, 47, 199, cclxxxvi

Période de retour iv, vi, xxi, 51, 53, 58, 68, 72, 73, 77, 79, 86, 87, 88, 89, 102, 104, 105, 106, 112, 152, 154, 179, 180, 193, 218, 273, 279, cclxxxiii Pertes annuelles moyennes ix, xv, 56, 57, 58, 66, 69, 74, 80, 87, 89, 153, (PAM) 157, 268, cclxxxiii Pertes directes 36, 60, 106, 216, 219, 278, cclxxxii Pertes maximales probables (PMP)

58, 86, 154, 157, cclxxxiii

Crues 28, 43, 53, 58, 72, 73, 74, 90, 92, 166, 227, 248, 251, 259

Petites et moyennes entreprises (PME)

160, 210, 211, 277

Cyclone iv, vi, xv, xxi, 32, 35, 38, 46, 47, 49, 50, 51, 56, 57, 58, 61, 66, 69, 70, 71, 73, 77, 78, 79, 80, 90, 92, 108, 112, 150, 152, 164, 172, 173, 179, 180, 186, 194, 198, 211, 221, 222, 227, 254, 264, ccxcix

Petits États insulaires en développement (PEID)

iv, xv, xvii, 43, 60, 61, 76, 163

Probabilité 58, 59, 68, 72, 77, 83, 84, 86, 89, 139, 195, 213, 220, cclxxxii, cclxxxiii

Déficit de financement iv, 105

Résilience iii, iv, vi, ix, x, xi, xii, xiv, xvi, xix, xxi, 28, 30, 32, 38, 88, 98, 101, 102, 103, 104, 107, 111, 137, 139, 140, 145, 152, 155, 158, 160, 168, 169, 172, 179, 182, 189, 190, 194, 195, 197, 198, 200, 201, 202, 204, 229, 231, 232, 234, 244, 246, 260, 263, 267, 269, 273, cclxxxiii

Dégradation des terres 85, 86, 245, 246, 247

Résilience économique 88, 102, 103, 104, 179

Développement urbain vii, viii, xiii, 36, 48, 92, 130, 132, 189, 226, 227, 228, 229, 231, 233, 235, 237, 260, 262, 267, 273, cclxxxii

Ressources naturelles vi, vii, xvi, xvii, 110, 188, 242, 247, 248, 252, 255, 260, 278, cclxxxii

Décennie internationale xiv, 30, 46, cclxxxv de la prévention des catastrophes naturelles (DIPCN)

Facteurs de risque xiii, xiv, 36, 38, 92, 100, 118, 125, 131, 188, sous-jacents 198, 236, 262, 267, 271, 274, 278, 280, cclxxxii Financement des risques xx, 28, 37, 57, 60, 134, 152, 180, 201, 202, 204, 269, 273, 275 Formation brute de capital 62, 90, 100, cclxxxiii, cclxxxv fixe (FBCF) Gestion corrective des risques

ix, xix, 62, 63, 116, 125, 126, 129, 169, 172, 263, 264, 265, cclxxxiii

Gestion prospective des risques (de catastrophe)

ix, xix, 37, 63, 67, 70, 74, 125, 126, 133, 173, 178, 183, 200, 263, 264, 265, cclxxxiii

Glissements de terrain 28, 67, 70, 71, 81, 92, 138, 145, 166, 174, 186, 236, 245, 274 Gouvernance des risques xiv, xviii, 31, 37, 122, 123, 124, 126, 128, 133, 134, 135, 141, 204, 266, 267, 269, cclxxxiv Incendie 85, 92, 159, 232, 250, 276, ccciv Inégalité vii, xiii, xv, xvi, xvii, xix, 27, 36, 92, 98, 186, 188, 189, 192, 195, 196, 197, 198, 201, 204, 205, 206, 207, 226, 228, 229, 231, 236, 239, 242, 247, 259, 260, 267, 271, 272, 279, cclxxxii Inondation iv, xv, xxi, 26, 27, 32, 43, 46, 47, 48, 49, 51, 52, 53, 56, 57, 58, 60, 61, 66, 72, 73, 74, 75, 76, 90, 92, 98, 104, 109, 112, 125, 128, 129,

cccxxvi

Index

Risques extensifs iv, xiv, xv, xix, xxi, xxii, 51, 60, 92, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 138, 158, 169, 174, 180, 187, 195, 196, 226, 228, 231, 270, 271, 274 Risques intensifs 93, 159, cclxxxii Sécheresse vi, xxi, 32, 56, 58, 85, 86, 87, 88, 89, 90, 156, 162, 164, 168, 182, 186, 195, 198, 201, 245, 246, 247, 254, cclxxxii Sécurité alimentaire xvii, 166, 168, 198, 199, 200, 244, 262 Séisme iv, xv, 25, 26, 32, 33, 34, 35, 37, 43, 48, 50, 52, 56, 57, 58, 60, 66, 67, 68, 70, 71, 73, 77, 81, 90, 92, 106, 112, 132, 133, 141, 143, 150, 152, 154, 156, 157, 165, 167, 172, 173, 178, 179, 181, 182, 183, 186, 188, 194, 195, 196, 210, 211, 215, 216, 219, 220, 222, 227, 264, cclxxxii Transfert des risques 37, 158, 198, 228 Tsunami 25, 26, 35, 39, 53, 66, 70, 71, 72, 78, 150, 155, 164, 174, 175, 183, 216, 220, 237, ccciv, ccciv, cccix, cccxv, cccxvi Vulnérabilité xiii, 27, 28, 30, 35, 36, 46, 47, 50, 51, 58, 59, 61, 66, 67, 69, 76, 78, 80, 90, 92, 98, 109, 110, 131, 132, 145, 149, 155, 156, 158, 167, 168, 174, 182, 189, 190, 193, 197, 198, 199, 200, 201, 204, 206, 215, 221, 222, 231, 244, 246, 248, 252, 270, 271




L’UNISDR remercie les organisations dont les logos figurent ci-dessous pour leur aide financière et leur très précieuse contribution à l’élaboration du Bilan mondial 2015 sur la réduction des risques de catastrophe. De généreuses ressources financières ont également été apportées par la Commission européenne (Direction générale de l’aide humanitaire et de la protection civile et Direction générale pour le développement et la coopération), le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) ainsi que par le Gouvernement des États-Unis.

Supports associés au Bilan mondial 2015 •  La version de poche du Bilan mondial 2015 synthétise les principaux résultats et messages du  rapport sous une forme concise et accessible. •  Le rapport principal inclut des liens vers des contenus enrichis supplémentaires, tels que des  cartes dynamiques, des vidéos, des photos et des études de cas à l’intention des utilisateurs de  smartphones et de tablettes numériques. •  Les utilisateurs de tablettes numériques et de smartphones peuvent également profiter de  l’application gratuite « GAR for Tangible Earth (GfT) ». •  GfT,  ou  «  gift  »,  est  une  application  autonome  entièrement  interactive  comportant  un  globe 3D réunissant des décennies de données scientifiques dynamiques, notamment sur les  catastrophes  couvertes  par  l’ensemble  des  Bilans  mondiaux.  Ces  données  sont  illustrées  par  des scénarios de risque interactifs, des cartes et des photos et des recherches peuvent être effectuées (y compris en temps réel) par date, lieu, facteur de risque, aléa, catastrophe, etc. •  Une version en ligne du Bilan mondial 2015 est également disponible, qui reprend la plupart  des fonctionnalités disponibles dans les supports susvisés, par exemple : Le rapport principal interactif en anglais Le rapport principal en anglais, arabe, chinois, espagnol et russe La version de poche en anglais, arabe, chinois, espagnol, japonais et russe Les annexes Des articles connexes Les  rapports  nationaux  intermédiaires  de  suivi  de  la  mise  en  œuvre  du  Cadre  d’action de Hyogo L’accès aux bases de données reprenant les pertes et risques liés aux catastrophes Tous les supports associés au Bilan mondial 2015 sont accessibles à la page suivante :

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Réduction du risque de catastrophe : Bilan mondial

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2015

2015 Rendre le développement durable : l'avenir de la réduction des risques de catastrophe


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