L'agriculture paysanne

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EDITO Obsolescence. Nom féminin du latin obsolescere qui signifie « perdre sa valeur ». Obsolète se dit d’un mot, d’une pratique, d’un fait désuet, hors d’usage, voire périmé. Il nous est tous arrivé au moins une fois d’y être confronté : un collègue, indigné, qui « crie haro sur le baudet », une vieille tante qui continue de moudre son café à la main et de faire minutieusement ses conserves parce qu’on « ne sait jamais », un voisin qui a « déménagé à la cloche de bois ». C’est ainsi, le temps passe, les gens se lassent et les choses se tassent. Rien d’étonnant. Mais si je vous disais qu’il était possible de programmer l’obsolescence. Plus que possible, c’est probable, et même avéré. Certaines grandes industries le font avec nos appareils électroniques par exemple. Concrètement, il y a deux façons de le faire. On peut tout miser sur le marketing, le design, le visuel du dernier modèle en date pour créer une obsolescence psychologique. Fortement basée sur notre frénésie consumériste, cette technique provoque une dépendance. Ceux qui ont le tout dernier téléphone XZ7-Gh font partie d’un club, celui des gens « qui l’ont ». Cela provoque une jalousie chez les membres du club des « ex » (mot qui vient du latin et signifie « hors de »). L’autre possibilité, plus technique et scientifique, est de s’assurer qu’au bout d’un certain nombre d’utilisations, une des pièces de l’appareil cessera tout simplement de fonctionner et ne pourra être remplacée, entrainant la mort prématurée de l’engin.

Tout cela a de quoi éveiller des envies de révolte. Certains pratiquent le boycott, d’autres se (re)mettent au bricolage et tentent de réparer, pas de jeter. Mais que se passerait-il si nous faisions la même chose avec du vivant ? Avec la terre, par exemple. Si nous mettions tellement de produits chimiques dans nos sols qu’ils deviendraient morts prématurément, comme le grille-pain. Si nous ne produisions plus qu’une ou deux variétés de tomates, entrainant la disparition de toutes les autres. Si nous n’achetions que des produits importés, et que nos campagnes s’amoindrissaient jusqu’à épuisement complet de ses habitants. Si nous polluions tellement nos eaux que nous ne puissions plus en boire. Dans quel magasin irons-nous pour racheter une nouvelle Terre ? Alors certains boycottent les grandes industries agroalimentaires, d’autres se (re)mettent au jardinage, au maraichage, à l’élevage, et tentent de faire au mieux, de ne pas gaspiller un héritage précieux. Certains luttent contre l’obsolescence programmée de nos terres en allant chercher dans les pratiques désuètes, oubliées ou ignorées, pour les réadapter aux enjeux sociaux, économiques et environnementaux d’aujourd’hui et de demain.

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