Numéro 01 Mai 2020
EDITO
par Maître Lionel Kalina Menga
Avocat au Barreau de Pointe-Noire / lionelkalina@cabinetkalina.com
ETAT D’URGENCE : LE SENS DE L’EXCEPTION Après la seconde adresse du chef de l’État à la nation, relative à la prorogation de l’état d’urgence, la question est sur toutes les lèvres : comment le confinement peut-il survivre à l’état d’urgence sanitaire qui lui sert de justification ?
Après la seconde adresse du chef de l’État à la nation, relative à la prorogation de l’état d’urgence, la question est sur toutes les lèvres : comment le confinement peut-il survivre à l’état d’urgence sanitaire qui lui sert de justification ? La réponse est une lecture de la loi qui se veut rigoriste sans être nécessairement conforme à la constitution. En effet, le Président de la République a décrété, le 30 mars dernier, l’état d’urgence sanitaire avec confinement à domicile de la population sur l’ensemble du territoire pour une durée initiale de 20 jours, et ce sur le fondement de l’article 157 de la constitution. Après autorisation du Parlement, le texte prévoit que l’état d’urgence peut être prorogé par le Président de la République «au-delà de 20 jours ». Dans la lecture qui a été faite de ce texte, et qui a servi de base au discours du Président de la République, l’état d’urgence ne peut être prorogé qu’une seule fois, pour une période identique de 20 jours. C’est la raison pour laquelle, à l’expiration de cette « ultime prorogation », intervenue avant l’épuisement de la crise sanitaire, le Président de la République a dû se résoudre à la poursuite du confinement au-delà de l’état d’urgence sanitaire. La question qui taraude le juriste est alors la suivante : où diable, les exégètes du gou-
vernement sont-ils allés chercher l’idée que l’état d’urgence ne pouvait être prorogé qu’une seule fois et pour une période identique de 20 jours ?
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L’article 157 de la constitution qui sert de base à cette interprétation évoque l’accord du Parlement pour autoriser la prorogation de l’état d’urgence «au-delà de 20 jours », sans enfermer cette prorogation dans un délai précis. Ce texte ne limite pas davantage le nombre de fois dont dispose le Président pour demander au Parlement l’autorisation de proroger l’état d’urgence.
Par ailleurs, la loi déterminant les conditions de l’état d’urgence et de l’état de siège, qui a été récemment adoptée au parlement et au Sénat, prévoit en son article 4 que « le décret déclarant l’état d’urgence précise la nature de l’événement qui le justifie, la zone concernée et la durée de son application qui ne saurait, à chaque fois, être supérieur à 20 jours ». L’usage du terme chaque fois suggère que la prorogation peut intervenir plusieurs fois. On notera enfin que l’article 2 de la même loi dispose que « l’état d’urgence peut-être décrété sur toute ou partie du territoire national en cas de présomption de menace pour l’ordre public ou de péril réel ou imminent résultant d’événements graves qui exige, pour protéger les personnes, les biens, l’environnement ou
BAROMÈTRE
N°01 - MAI 2020
ÉDITORIAL p.1 Etat d’urgence : Le sens de l’exception DOSSIER COVID-19 p.2 • Quelle stratégie pour le déconfinement ? • Interview du Professeur Francine NTOUMI • Le serment d’Hippocrate a l’épreuve du Covid 19 • La protection des données personnelles à l’épreuve du Covid 19 • Cybercriminalité et Covid 19 : un virus peut en cacher un autre • Le Code du travail congolais à l’épreuve du Covid-19 • La responsabilité des employeurs personnels soignants dans le contexte de la pandémie du covid 19 • La réglementation des essais cliniques au regard de la pandémie du covid 19 NOUVELLES p.16 • Création de la section congolaise de l’association Henri Capitant VEILLE JURISPRUDENTIELLE p.16 • L’arrêt Guillaume SORO VEILLE LÉGISLATIVE ET RÉGLEMENTAIRE p.19 • Loi portant prorogation de l’état d’urgence • Loi sur l’état d’urgence et lestât de siège • Loi habilitant le gouvernement a édicter des ordonnances dans le cadre des mesures relatives à l’état d’urgence