Brief aan Karel Dierickx 28 september 1997
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Anvers, le 28 Septembre 1997.
Cher K., Parlons des toiles grises maintenant, maintenant que les jours commencent d se faire bouffer et que le soleil n'arrive plus à monter sur ses grands chevaux mais au contraire nous envoie en pleine gueule une lumière qui nous rase les yeux ainsi que les champs écorchés et les bois engloutis chaque soir chaque matin de plus en plus, le coeur me monte à la gorge et l'automne m'enlace en me passant sa mains dans la braguette. Je me fais chier, K., et cela aussi de plus en plus. Voilà deux mois ou plus que je n'ai pas touché mes pinceaux et ils me mordillent le coeur, ils se vengent sur moi, enfin c'est une idée. Cet été brûlant ridicule et apocalyptique m'a épuisé; les scènes de ménage d'un ménage moisi, des chagrins de taupes, les nuits blanches peuplées de naines. les oiseaux carnassiers dans ma tête-volière, les bonnes femmes très méchantes, les bonnes femmes chiennes, les bonnes femmes qui me coupent en tranches etc.. et je me dis, K., je me demande oui comment arrêter cette kermesse de chagrin douteux, de mauvais sang, de délire plastico-ridiculo. Je ne travaille plus, K., je dégueule en plein chemin et me tire la queue dans un coin à moins qu'une suceuse ne se pointe d l'horizon, ach, les suceuses! Peut-être qu'il vaudrait mieux de me le placer sous ventouses. Il me reste le dessin naturellement, le grabouillis sur papier- frites oui et oui cela peut être la fête mais toujours de courte durée -l'angoisse ne se laisse pas coincer par un crayon - c'est plutôt la récré et pas à perpète car a force de m'écraser sur la pointe du merveilleux outil nº 2 je vois passer les miracles comme des étoiles filantes ou plutôt comme des formules 1 gonflées à bloc. C'est pas assez, K., c'est pas assez, c'est jamais assez comme me crachait l'Exe dans des moments meilleurs, dans ses meilleurs moments dans une meilleure tranche de vie il y a longtemps longtemps longtemps (maintenant elle se roule les hanches, mon ami, promenant son caniche dans les salons. Ah K., rien de plus bèto-mechant rien de plus tristo qu'elle qui se vente d'une vieille bète poilue et encore de temps en temps un peu baveuse qu'elle traîne au bout de sa lesse). Et puis il y a les autres, ceux qui jappent dans les coins, ceux qui chient dans les tiroirs, les polichinelles, les gilles, les rasoirs sur pattes, les survivants un peu troubles des génocides, ceux qui portent une odeur et elle n'est pas bonne, K., pas bonne, ceux qui tournent le dos à la croix. ceux qui ne parviennent pas à se moucher dans les nuages, les petits quoi!, les courtes têtes, les nains en croûte et non, K., ce carrousel ne s'arrête pas, il ne s'arrêtera plus sans qu'une bille ne s'écrase, une rotule ne se casse une tige ne se plie un boulon ne pête et cela en moi, seulement en moi, prédisait l'Exe, combien de temps encore devrai-je tenir dans cette ridicule polka? Et puis au fond du couloir (ou est-ce au fond du trou?) il y a les toiles grises qui attendent, grises infâmes et finalement stupides et en plus muettes, enfin, elles