l'Hémicycle - #445

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Pratiques Les fiches thématiques de l’Hémicycle par Richard Kitaeff

Une dotation pour les petites collectivités : la DETR

Issue de la fusion entre la dotation globale d’équipement et la dotation de développement rural opérée par la loi de finances pour 2011, la DETR (dotation d’équipement pour les territoires ruraux) a pour objet de financer les besoins d’équipement des territoires ruraux. Focus sur les critères d’éligibilité et les orientations stratégiques de cette aide financière de l’État. ès 2007, la Cour des comptes avait proposé la création d’une dotation unique permettant de mieux équilibrer les masses budgétaires dédiées aux communes rurales. Symboles du concours financier de l’État aux collectivités territoriales, les anciennes DGE et DDR étaient bien connues des élus locaux mais leur accessibilité méritait d’être favorisée. La réforme des finances locales, entreprise par les lois de finances 2010 et 2011, a participé de la logique de recentralisation financière guidée par l’impératif de « péréquation » budgétaire : soutenir les territoires tout en tenant compte de leurs inégalités. Cela supposait une aide spécifique, plus de simplicité pour l’obtenir, et de privilégier les communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à faible potentiel financier et fiscal. La notion de « potentiel financier » est d’ailleurs prise en compte dans le calcul de nombreuses dotations de péréquation communale : dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU), dotation de solidarité rurale (DSR), dotation particulière « élu local » (DPEL)…

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Véritable indicateur de la richesse d’une collectivité donnée, il correspond au potentiel fiscal majoré de la dotation forfaitaire perçue par les communes, le potentiel fiscal correspondant lui à l’« application aux bases communales des quatre taxes directes locales du taux moyen national d’imposition à chacune de ces taxes » (article L. 2334-4 du code général des collectivités territoriales). Ainsi, les élus municipaux et intercommunaux des collectivités à faible potentiel financier disposent d’une caisse commune (dont la gestion est déconcentrée) d’un montant fixé à 615 689 257 euros en 2012. Les demandes de subvention sont accordées par le préfet après avis d’une commission départementale d’élus.

Critères d’éligibilité et domaines d’application La liste des communes bénéficiaires est fixée par le ministère de l’Intérieur. Il s’agit des communes dont la population n’excède pas 2 000 habitants dans les départements de métropole et 3 500 habitants dans les départements

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d’outre-mer (première part de la dotation). Mais il existe une deuxième part touchant les communes dont la population est respectivement supérieure à ces deux seuils, et n’excède pas 20 000 habitants dans les départements de métropole et 35 000 habitants dans les départements d’outre-mer. Concernant les intercommunalités, là aussi, il existe deux parts se répartissant à moins de 20 000 et plus de 20 000 habitants (35 000 pour les départements d’outre-mer), la population ne pouvant pas dépasser 60 000 habitants. À compter de 2013, seuls les EPCI à fiscalité propre seront éligibles. La deuxième part se justifie par une infériorité du potentiel financier ou fiscal moyen par habitant de l’ensemble des collectivités de même catégorie (ne pas dépasser 1,3 fois le potentiel financier moyen national). Globalement, le champ d’intervention de la dotation s’inscrit dans les thématiques principalement liées aux dépenses d’équipement : travaux d’investissement concernant la voirie communale et rurale, création ou aménagement de zones d’activités artisanales, construction

L’HÉMICYCLE NUMÉRO 445, MERCREDI 2 MAI 2012

ou rénovation de groupe scolaire, projet de valorisation et de développement touristique et/ou culturel, Maison pluridisciplinaire de santé à vocation intercommunale, soutien à la mise en œuvre de relais de services publics, études de faisabilité, rénovation de siège intercommunal, réalisation de terrains de sport… Un taux d’intervention et des coûts plafonnés sont fixés dans chaque axe des catégories d’opération prioritaire (sécurité, scolaire, équipements communaux, développement économique, maintien des services en milieu rural, ingénierie). Il n’est pas possible de faire prendre en charge, au titre de la subvention, des dépenses de fonctionnement courant comme les frais de rémunération des personnels, les dépenses d’entretien et de fourniture… Il existe un soutien particulier de l’État pour certaines opérations comme le financement des implantations de la gendarmerie en milieu rural, ou la mise en œuvre du Plan national d’adaptation de la France aux effets du changement climatique (PNACC). La demande de subvention doit être présentée à la préfecture par le maire ou le président de l’EPCI. Il comprend généralement une note explicative (objet de l’opération, objectifs, durée, coût prévisionnel, montant de la subvention sollicitée), un devis descriptif détaillé, la délibération du conseil municipal, syndical ou communautaire arrêtant les modalités de financement (plan de financement prévisionnel), une attestation de non-commencement de l’opération, et une série d’autres documents à joindre (plan de masse des travaux, permis de construire, notice de sécurité éventuelle…). Une fois le dossier remis à la Direction des relations avec les collectivités, il sera instruit par une commission départementale de représentants d’élus. Celle-ci n’émet qu’un avis consultatif et elle se réunit, dans la plupart des cas, pour des subventions supérieures à 150 000 euros. À signaler que le montant minimal d’une subvention DETR est de 5 000 euros avec un taux d’intervention variant entre 20 et 30 %. Un plafond de

1 million d’euros s’applique mais il est possible d’opérer une séparation fonctionnelle dans un projet : la construction d’un équipement sportif de 2 millions d’euros pourrait être scindée en deux projets, un pour le gymnase multisport et un pour l’installation d’un terrain équipé de gradins, aires de jeux et pistes, par exemple.

Réalisation du projet et enveloppe départementale Le paiement de la subvention s’effectue par tranches successives (30 % dès le début de son montant, acomptes n’excédant pas 80 % du montant prévisionnel de la subvention, solde par renvoi des pièces justificatives). Au sujet des délais de réalisation du projet, la collectivité a deux ans pour engager la réalisation à compter de l’arrêt attributif et quatre ans pour la terminer, sans quoi aucun paiement ne pourra être sollicité. Des règles de calcul permettent de déterminer le montant de l’enveloppe départementale de la DETR. Les crédits de dotation sont répartis en fonction de la population, la densité du département et la richesse fiscale de la collectivité. Pour le cas de la Vienne, par exemple, les communes de Poitiers et Châtellerault sont exclues (par leur nombre d’habitants) ainsi que Mirebeau et Chasseneuil-du-Poitou (par leur potentiel financier). Suite à une question orale de Didier Guillaume (sénateur socialiste de la Drôme) portant sur la baisse de la DETR dans son département, le ministère des collectivités territoriales a répondu que ce fait était essentiellement lié à l’augmentation de la population au sein des EPCI (JO Sénat du 22.02.2012). Les enveloppes départementales peuvent donc chuter en fonction de l’évolution territoriale. À l’inverse, les départements très ruraux (Creuse, Gers, Lozère, Nièvre…) enregistrent une augmentation de leur dotation compte tenu de ce caractère rural et de la « réalité du besoin d’investissement », ce qui est bien conforme à l’identité institutionnelle de la DETR.

Richard Kitaeff Professeur à Sciences-Po Paris


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