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LIVRES
Arthur Cerf
Breaking Bad by SoFilm (Capricci) Breaking Bad est, après Mad Men, la meilleure série du monde. Vous pouvez ne pas être d’accord, mais on ne va pas en débattre ici. Nous allons donc évoquer la seconde meilleure série de tous les temps, créée par Vince Gilligan et diffusée par AMC (comme Mad Men) entre 2008 et 2013. Soit le baroud d’honneur de Walter White, prof de chimie souspayé et atteint d’un cancer, se lançant dans le trafic de méthamphétamine pour mettre sa famille à l’abri après sa mort. Or, il continuera, malgré sa rémission. Pourquoi ? C’est l’un des enjeux de cette histoire basée sur mille et un dilemmes moraux. On ne décroche pas facilement de cette fresque réaliste de la classe moyenne d’Albuquerque, NouveauMexique – ce pourrait être la Belgique, la France ou l’Espagne… Dans cet ouvrage pop, richement illustré par Manon Skotnicki, Arthur Cerf, (SoFilm, Society…) conte la genèse de l’œuvre et dévoile l’envers du décor. On y trouve des entretiens avec Gilligan, mais aussi les scénaristes, la cheffe costumière, le chef-opérateur, les compositeurs… Un livre instructif et passionnant, qui donne envie de re-binge-watcher les cinq saisons et, pourquoi pas, son excellent spin-off, Better Call Saul. 152 p., 20€. Thibaut Allemand
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Benjamin Campion HBO et le porno. Raconter des histoires par le sexe (PUFR)
Avec Oz ou The Sopranos, HBO a réinventé le format de la série. Mais la chaîne câblée est-elle aussi innovante lorsqu'il s'agit de représenter la sexualité ? C'est l'une des questions que pose cet essai roboratif, d'une ampleur et d'une précision impressionnantes. Une approche statistique permet de brosser un panorama complet de la production entre 1997 et 2019, avant de guider des analyses stimulantes, par exemple sur la nudité frontale dans Girls et Game of Thrones, ou la mise en récit de la sexualité dans Tell Me You Love Me. Parmi les surprises qui jalonnent une réflexion irriguée par Linda Williams ou Teresa de Lauretis, on notera le rôle pionnier de David Simon. Eh oui, la première érection de l'histoire des séries se trouve dans The Wire ! 422 p., 28 €. Raphaël Nieuwjaer
Lewis Trondheim Par Toutatis !
(L’Association) Depuis Les Carottes de Patagonie (1992), Lewis Trondheim utilise Lapinot comme un vecteur pour créer de la bande dessinée – et réfléchir sur celle-ci. Après L’Accélérateur atomique (2003) qui visitait l’univers de Spirou et Fantasio, l’auteur se penche sur Astérix. On retrouve tous les passages obligés : sangliers, bagarre avec les Romains, potion magique, jeux de mots… Le tout est très "méta" : Lapinot a conscience d’être dans une bande dessinée, mais celle-ci est… réelle. Cette mise en abyme ne se moque jamais de l’œuvre de Goscinny et Uderzo , mais donne à s'interroger sur ce que peut représenter la BD : un monde à part, dont on connaît les coins et recoins et qui finit par devenir, in fine, réel.
48p., 14€. Thibaut Allemand
Alexandre Clérisse Feuilles volantes
(Dargaud) Un collégien des années 1990 se découvre une vocation de bédéiste. Un moine copiste du Moyen-âge se lance dans la fiction au risque de finir sur le bûcher. En 2070, une autrice s’interroge sur la suite à donner au travail de son père. Soit trois récits reliés, dont l'imbrication forme un élégant canevas sur lequel Alexandre Clérisse observe notre besoin de créer. Dans cette échappée solo, après sa brillante trilogie en compagnie de Thierry Smolderen, le dessinateur mêle les époques et les destins façon Cloud Atlas avec un plaisir communicatif. Si cette mécanique menace parfois de tourner à vide, l’essentiel est ailleurs : Feuilles volantes est un chant d’amour à la bande dessinée. Aussi touchant dans sa dimension personnelle que remarquable dans sa composition. 144 p., 23€. Rémi Boiteux
BeKa & Munuera Les Cœurs de ferraille T. 1 Debry, Cyrano et moi (Dupuis)
Cette fantaisie steampunk imagine un xixe siècle où vivraient des robots domestiques. On y suit la jeune Iséa, ado solitaire réfugiée dans la lecture de Cyrano de Bergerac et qui ne communique avec sa seule amie, Tal, que par écrans interposés. L’Espagnol Munuera, à qui l’on doit quelques Spirou (dont Paris-sousSeine, 2004) illustre joliment, tout en couleurs vives, pastel et traits ronds cette histoire signée BeKa. Un scénario malin, qui évoque les relations familiales, l’amitié, mais aussi l’esclavage et l’underground railroad, le tout parsemé de références à l’Amérique d’Autant en emporte le vent, Cyrano donc, ou encore La Nuit du chasseur. Bref, ce récit replonge les adultes en enfance et… ne prend pas les mômes pour des idiots. Parfait ! 72p., 13,50€. Thibaut Allemand