L'Épine noire: Le Prunellier

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Les publications de l’Atelier des Simples©

Des Plantes au Fil de l’An dans le Bugey Rencontre, Usage et Bavardage

Le Prunellier


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L’Épine noire : LE PRUNELLIER Prunus spinosa Famille des Rosacées

Je l’ai rencontré un jour d’hiver, en me promenant dans le Valromey. Le Valromey, c’est le sud du massif du Jura. Plutôt calcaire, ce massif est issu de la sédimentation de la mer tropicale qui recouvrait la terre au Jurassique, il y a bien, bien longtemps à l’époque du secondaire lors d’un réchauffement planétaire. La poussée des Alpes a élevé tous ces sédiments pour en faire des plateaux qui ont été traversés et coupés par des fleuves. Et ainsi sont nées les cluses. Pourquoi parler des pierres et des cailloux quand on s’intéresse aux plantes : parce que la plante est issue de la terre, la plante prend ses racines dans la terre. La terre nourricière est différente d’un lieu à l’autre, toutes les plantes ne poussent pas sur le même sol. Le sol va induire la composition en molécules présentes dans les plantes. Dire que le prunellier est spécifique du calcaire, non. Mais les sols calcaires étant assez pauvres en humus, le prunellier s’en accommode très bien et y pousse facilement. La nature protège également cet arbre d’apparence modeste des assauts des hommes et des animaux en lui inventant des épines. Ces épines le rendent difficile d’accès, et lui permettent de résister aux agressions. Une des caractéristiques des arbrisseaux poussant à portée de mâchoires a été de développer des épines. Ainsi, Aubépine, Ronce, Églantier ont eu l’intelligence de créer leurs propres défenses pour ne pas disparaître dans les panses des gourmands herbivores de tout poil. Oui Dame nature sait faire. Dans la tradition populaire, le prunellier est appelé Épine Noire, noire à cause de la couleur de ses fruits en hiver, par opposition à son amie proche l’aubépine : l’Épine Blanche qui illumine nos printemps par ses grappes de fleurs blanches odorantes pointées de rouge qui font danser les abeilles. Ses fruits : les prunelles, (des drupes chez les botanistes), se mangent après les gelées. C’est une belle farce à faire à qui ne connaît pas les prunelles : les faire goûter avant que les premières gelées d’hiver aient cassé leur amertume, la grimace est garantie tellement le fruit est âpre et laisse une horrible sensation dans la bouche. Mais surtout ne dites pas que c’est moi qui vous ai donné l’idée.

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La drupe est un nom savant pour décrire un type de fruit. Le fruit est l’emballage de la graine qui assure la survie de la plante. Selon les espèces, elle peut être nue chez les conifères (Gymnosperme), simplement déposée dans un support appelé le cône, la pomme de pin par exemple ou bien emballée dans différentes membranes souples, dures ou charnues. Pour la drupe, la première membrane souple à l’extérieur est l’épicarpe, c’est la peau du fruit. La seconde épaisseur, le mésocarpe est la chaire du fruit. La troisième membrane devient dure et forme le noyau qui contient la graine. Ainsi, les pêches, les prunes, les cerises, les olives sont des drupes. La datte n’est pas une drupe mais une baie !

Cet arbre est un nostalgique. Avant que ses feuilles ne montrent leurs limbes, juste avant le printemps, il se décore de flocons tout blancs immaculés et les pose sur ses branches et ses épines, comme pour imiter le sapin sous la neige. Plus tard, dans l’année, lorsque les forêts se séparent de leurs feuilles, le prunellier aime encore à se prendre pour un sapin : il accroche ses boules bleues pour préparer Noël. Le prunellier a-t-il un rêve de sapin ou bien a-t-il une simple nostalgie de ces temps reculés d’avant les plantes à fruits ? Le prunellier est parfois le piège pour le botaniste en herbe, qui au printemps le confond avec l’aubépine, mais seulement la première année !!!!! Oui, car le botaniste en herbe apprend très vite ! Vous avez dit santé ? À quoi peut bien servir notre prunellier ? Quels sont les composés utiles qui peuvent soigner les maladies que l’humain se crée ? Les fruits : une réserve de vitamine C. La vitamine C, un composé miracle. À l’origine, elle a été inventée par la nature pour conserver les fruits eux-mêmes. Utile à la fabrication de nos os, très bénéfique, elle active la respiration des cellules, sachant qu’une cellule qui respire bien est une cellule en bonne santé. Étant nousmême un « assemblage » de milliards de milliards de cellules, l’intérêt de consommer de la vitamine C au quotidien est évident. Elle participe au bon fonctionnement des vaisseaux sanguins. Elle est anti-infectieuse. Le seul souci : elle ne se conserve pas très bien ni à la cuisson, ni au séchage. Sa teneur dans le fruit séché est plus faible que dans le fruit frais. D’où l’intérêt de préférer les fruits et légumes frais.

Et si cet arbre était l’équivalent de l’acérola avec ses 20 mg de Vitamine C pour 100 g de pulpe ? Sans compter la provitamine A et les vitamines du groupe B. Dans la prunelle qu’y trouve-t-on également ? Du calcium, du magnésium, du potassium, tous ces bons minéraux pour le minéral de notre corps que sont les os, et cela vaut bien le chocolat.

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Quoi de plus merveilleux qu’une ballade oxygénante aux premières gelées pour cueillir les prunelles. C’est aussi cela le pouvoir curatif des plantes : Rencontre, Usage et Bavardage. Pour résumer : cueillez les drupes au début de l’hiver, séchez-les ou conservez-les au congélateur. Faites tisanes, confitures, vins liqueurs et sirops. Elles soigneront diarrhées, maux d’estomac. Elles s’occuperont des voies urinaires. Si vous avez raté la saison de la prunelle, cueillez les fleurs du printemps, mais vous n’en ferez pas la même utilisation : elles sont un peu laxatives anti-inflammatoires et aident à se relever des refroidissements. Alors, vous le regardez autrement ce prunellier ? Admirez aussi ses amis de l’automne aux petits fruits rouges et noirs qui sont aussi des réservoirs de vitamine C et qui vous permettront de préparer l’hiver : Arbrisseau Prunelle Cynorhodon Sorbier Sureau Mûre Viorne Argousier

Pour 100 g de fruit 20 mg (*) 500 – 1000 mg 50 mg 300 mg 400 mg 50 mg 500 mg

(*) Les chiffres sont une valeur moyenne. Bien sûr la teneur en vitamines varie d’une plante à l’autre en fonction de son environnement et de sa croissance. Usage alimentaire : La « pelosse »(prononcer p’losse) est le nom vernaculaire de la prunelle dans le Valromey, le Lyonnais, les Pays Savoyards et certaines régions de Suisse. Après la Toussaint, après deux ou trois gelées, on peut les récolter. SIROP :

Mettre les pelosses dans un grand saladier et les recouvrir avec de l'eau bouillante. Mettre au frais. Toutes les 24 heures pendant trois jours, filtrer l'eau, la faire bouillir, la verser à nouveau sur les pelosses. Laisser reposer le tout au frais. Une fois la succession d'opérations terminée, ajouter 500 grammes de sucre, faire bouillir quelques instants en remuant et mettre en bouteilles.

LIQUEUR :

Écraser 500 grammes de baies entières cueillies après les premières gelées. Laisser macérer avec 150 grammes de sucre dans un litre 1/2 d'eau-de-vie à 45° pendant un mois. Filtrer et mettre en bouteilles. L’atelier des Simples Les Bergonnes 01260 Haut Valromey


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Le prunellier est également utilisé pour réaliser une boisson à partir des jeunes pousses de l’année connue sous le nom de « trousse-pinette ». Recette issue de la toile : Cueillir deux grosses poignées de jeunes pousses de l’année (15-20 cm de long) d’épine noire, si possible dans une haie n’ayant pas été soumise à des produits désherbants. Déposer votre cueillette dans un charnier de terre cuite. Verser 5 litres de vin de 13 ou 14 °, blanc ou rouge. Rajouter un litre d’eau-de-vie ( 50 /55°). Rajouter 800 grammes de sucre. Bien mélanger. Laisser macérer 10 jours et goûter. Le goût d’eau-de-vie doit avoir disparu. Si ce n’est pas le cas, prolonger la macération, jusqu’à 60 jours s’il le faut. Mettre en bouteille, servir frais.

Dans la tradition basque, le « patxaran » est préparé également à partir des baies : Dans 1 litre d'alcool anisé, faire macérer une centaine de prunelles sauvages récoltées entre août et octobre, soit 1/3 du volume d'une bouteille d'une contenance de 1 litre, ajouter 2 gousses de vanille et 3 grains de café. Faire macérer pendant environ 4 mois. Filtrer. La préparation ne doit pas avoir une teinte brune. Il est préférable de ne pas consommer le fruit ainsi préparé, il peut rendre fou.

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