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Lise Beauzyeux, extraits de « Conversations avec Sylvie Guiot », Ed. Au fil du temps 17 janvier 2006, Veliko Tarnovo (…) Lise Beauzyeux : ………………………………………………………………………………………………………………………….. ? Sylvie Guiot : Oui, je lui avais répondu : « Il n’y a pas d’école pour cela. C’est dans son laboratoire intime qu’on s’occupe de ces choses-là. » La dernière formule, je l’avais volée à Céline. L B : ……………………………………………………………………………………………. S G : Je me méfie des mots. Je m’en débrouille mal… Tout ce que j’ai à dire est dans ce que je donne à voir. Mon vocabulaire, ce sont ces ficelles et ces bouts de tissu. D’ailleurs, « textile » et « texte » ont la même origine étymologique. Ils viennent tous deux du mot latin « texere » qui signifie « tisser ». L B : …………………………………………………………………………………… S G : L’œuvre doit à elle seule et en elle-même porter le sens, et si elle n’y parvient pas, il n’y a qu’à la détruire. Je ne chercherai pas à lui en insuffler à l’aide de mots. Je me refuse à envisager la parole comme une justification ou un soutien. Et je ne la considère pas comme indispensable à mon travail. Elle peut advenir, mais je la vois comme un agrément, pour le plaisir de l’échange. La parole autour plutôt que sur… L B : ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………. ? S G : C’est que vous savez écouter, et c’est si rare. Et puis, vous réfléchissez avec vos sens, moi je pense avec mes mains, alors nous arrivons à nous entendre. L B : ……………………………………………………………… S G : Je crois, oui, que je « raconte » des histoires, que ça dit la vie, ces enchevêtrements de fils qui n’en finissent pas de monter, descendre, traverser ; qui ont l’air de s’empêtrer, de s’épuiser, de renoncer, mais qui trouvent toujours le moyen de poursuivre leur route. Ça évoque quelque chose de la vie ces empilements sans fin de tissus pliés… C’est en tout cas là, dans la vie ordinaire, que je puise. C’est de cela que se nourrit mon travail. (…) Le réel m’intéresse plus que tout, l’humain me passionne… et le déroulement de l’existence, et la condition humaine… Mon travail suit le rythme, se développe en parallèle de la vie, en est le reflet, le miroir. Je n’emprunte jamais la ligne droite pour aller d’un point à un autre. Je fais, je défais, je refais, je redéfais… sans cesse. C’est ainsi que les choses prennent forme, se constituent, c’est ainsi qu’elles arrivent à prendre sens pour moi. Après d’innombrables tours et détours…


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