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L'ESSOR SAVOYARD - Edition de Savoie
Jeudi 29 mars 2018
Bassin chambérien
Effondrement de leur immeuble rue Juiverie : le cri de détresse de Sibylle et Ivan L’effondrement partiel de l’immeuble sis 87 rue Juiverie, samedi 10 mars, a été provoqué par des travaux effectués dans l’un des appartements. Depuis, une expertise fait état d’un nouveau risque d’éboulement. CHAMBÉRY
À
quelques mètres de la rue Juiverie, Sibylle et Yvan Rodolphe entrent dans un café de la place de l’Hôtel-de-Ville, où ils ont leurs habitudes, avec un sourire de façade. Au fond, « la colère » domine les émotions. Aujourd’hui, plus personne n’occupe l’immeuble qui s’est effondré partiellement samedi 10 mars. « Il était 15 h 54 », affirme Sibylle Rodolphe, enseignante dans un collège à Aiguebelle. « J’étais dans notre chambre, je préparais le brevet blanc pour mes élèves quand l’effondrement a eu lieu dans une de nos chambres, celle que l’on loue à un homme d’une cinquantaine d’années. Il a juste eu le temps de s’enrouler dans le matelas pour se protéger et de rouler vers le mur qui donne dans la salle de bains », souffle cette mère de trois enfants, gagnée par l’émotion. Ce locataire qui travaille dans le bâtiment a eu la présence d’esprit d’anticiper juste à temps ce qui allait arriver après avoir entendu le craquement du bois.
« J’avais trop peur et je n’arrivais plus à respirer » « J’ai ouvert la porte qui lie les deux parties de l’appartement, entre les chambres et tout le souffle de poussière est entré chez moi. Je ne voyais plus ma chambre, comme si elle n’existait plus », poursuit-elle, difficilement. Après avoir appelé les pompiers avec le téléphone fixe, et son mari, de l’autre main, avec le portable. Sibylle Rodolphe, propriétaire d’un appartement au premier étage, grimpe jus-
L’arrêté de péril
Sibylle et Ivan Rodolphe doivent surmonter la situation alors que les assurances ne proposent aucune solution de repli.
qu’au deuxième, s’inquiétant pour ses voisins. « Je n’ai pas pu aller plus haut. J’avais trop peur et je n’arrivais pas à respirer ». Lorsque cette maman sort de l’immeuble, accompagnée de sa fille qu’elle confie aux commerçants, elle intercepte un homme avec un sac à dos : « Il était plein de poussière, il avait des chaussures de sécurité », et le garde près d’elle jusqu’à l’ar-
rivée de la police. A priori, cet homme est l’ouvrier qui effectuait des travaux dans un appartement du 4e étage et qui entreposait les gravats de plusieurs tonnes sur le plancher d’un appartement du 3e, d’où est parti l’effondrement. L’enquête doit le déterminer mais il s’agirait de travail dissimulé. Après avoir dormi à l’hôtel
puis dans une chambre d’hôte, la famille Rodolphe investira un meublé dans le centre-ville dans quelques jours. « On a dû tout laisser chez nous. On ne pourra pas y retourner avant des mois. Aujourd’hui, le plus compliqué à vivre c’est que rien n’est pris en charge. Les assurances se renvoient la balle », dénonce Ivan Rodolphe. Mardi 20 mars, les habitants
SA0131.
sinistrés suite à l’effondrement des deux premiers étages ont appris que « l’expertise montrait qu’un précédent éboulement au 4e étage avait eu lieu quelques jours ou semaines avant. Rien que le passage d’un homme pourrait provoquer un autre éboulement », explique l’avocat des deux familles propriétaires, Christian Saint-André. RANDA BERBOUCHE
Un arrêté de péril a été pris par la municipalité et ne devrait pas être levé d’ici les prochains mois. « Le dernier arrêté de péril date de 2010. Nous accompagnons les familles autant que possible mais si la Ville avançait les fonds pour le relogement plutôt que l’assurance de la copropriété, les propriétaires ne pourraient bénéficier d’aides financières », détaille Michel Dantin, maire de Chambéry. Le propriétaire des 3 et 4 est depuis des années en conflit avec la copropriété. Cet homme originaire de Grenoble maintient face aux accusations qu’il ne réalisait aucun travaux dans ses appartements. « Les caméras de la ville montrent que le mercredi cet homme déchargeait, et la fumée qui sortait de l’étage vendredi », précise le maire.