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contribue en retour à façonner les personnalités qu’il en ressort. Encore une fois avec d’évidents raccourcis, notons une césure prégnante selon que l’on vive la rue ou que l’on ne fasse qu’y passer, voire l’éviter. Or l’image des quartiers dits « sensibles » est grandement marquée par cette « culture de rue »4, qui dans un effet-retour oriente les conduites de ceux qui y adhèrent, comme des autres qui en restent à distance. En un mot donc, habiter FCB-LC c’est se situer par rapport à cette centralité de la rue occupée, d’un espace public qui se trouve avant tout représenté comme celui du groupe résident. Enfin, si la géographie n’est pas qu’extérieure aux individus, si elle est partie prenante de nos identités, c’est qu’il faut entendre par là que nous sommes également faits du sens des lieux qui nous habitent. Être du « 9-3 », des quartiers « nord », de Fafet, Calmette… revient à s’identifier par ce qui identifie ses habitants.

Un sentiment opaque : qu’il est blême mon HLM Cela ne signifie en rien qu’une vision homogène du quartier régnerait en son sein, loin de là, mais ce qui s’impose au regard extérieur c’est bien cette revendication ambivalente d’en être et de devoir plus ou moins s’en revendiquer. C’est ce que l’on a pu observer le 29 mars 2012 lorsqu’un aréopage de l’OPAC, à l’invitation de la Place des Habitant-e-s, y est venu expliquer la démarche de rénovation en cours. Des « décideurs » devant des résidents loin d’être naïfs. Ces derniers n’ont pas manqué de rappeler leur sentiment de délaissement, alternant entre fierté d’appartenance aux lieux et désir de vivre ailleurs. Nous nous situons en quelquesorte ici au centre de la problématique d’attraction-répulsion. D’une part certaines expériences montrent qu’on a pu chercher à s’éloigner en entrant dans un long parcours

de demandes de logement pour des secteurs moins stigmatisés de la ville. Mais d’autre part l’éloignement s’est pour d’autres conclu par un isolement socio-affectif douloureux qui a provoqué le retour sur leur quartier. Un autre élément instructif confirme que les instances publiques n’ont pas toujours pris toute la dimension de la segmentation identitaire de ces vastes parcs de logements. Si l’on peut bien se revendiquer du « quartier Nord », pour reprendre une expression courante, ce n’est là qu’une présentation destinée aux publics extérieurs, à ceux qui généralement n’en sont pas. Lorsqu’on s’approche des blocs, on redécouvre des sous-ensembles beaucoup plus pertinents. L’extrémité Nord-Est de la ville relève bien de cette vaste entité qu’on retrouve dans de nombreuses villes françaises, mais pour leurs habitants le Nord relève d’une unité très abstraite. Se fait jour au contraire tout un univers de représentations entre Le Colvert, Le Pigeonnier, Mozart et bien d’autres lieux de vie. Les groupes d’habitats qui font sens aux yeux des résidents ne correspondent pas toujours aux comités de quartier qui visent à les représenter. Comment pourrait-il en être autrement lorsqu’une logique institutionnelle cherche à coller avec une réalité sociologique ? La vision des habitants n’est ni plus juste, ni plus précise que la cartographie des interventions urbaines ; elle est simplement plus adaptée à la signification sociale qu’elle vise à appréhender pour mieux s’y repérer. Et même lorsqu’on se rapproche encore d’un échelon, celui du micro-quartier justement, que l’on croit avoir cerné par les grandes variables démographiques et économiques que sont le taux de chômage, le niveau scolaire, la densité de familles monoparentales, voire la coloration présumée « ethnique », l’unité s’échappe à nouveau. Être installé à Fafet ne doit pas se confondre avec les barres pourtant voisines de Brossolette, et même les petits

Cf. David Lepoutre : Cœur de banlieue. Codes, rites et langages, Paris, Odile Jacob, 1997. Voir également pour un panorama plus large, Albert Ogien, Sociologie de la déviance, Paris, Armand Colin, 1995, « U ».

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Les jeunes et la police

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immeubles de Calmette font l’objet d’une différenciation dans l’univers mental minutieux des habitants. C’est là que l’on perçoit l’impact de l’espace dans la construction du Soi géographique : un groupe de bâtiments élaborés dans le même style fournit parfois la matière à cette différenciation. Norbert Elias et John Scotson5 l’ont suffisamment montré : la distinction chez les plus modestes prend différentes voies qui ne se réduisent pas aux grands indicateurs. Est-ce là un pur artefact, une illusion ? Certes pas si l’on en croit les procédures de triage quant aux demandes formulées pour tel ou tel ensemble d’immeubles. Car la conviction des demandeurs c’est bien qu’il existe une orientation dans la manière dont le bailleur accorde les logements en fonction de la réputation de chaque site. Ce que réfute catégoriquement l’OPAC, principal gestionnaire du parc. Il n’y aurait dans le traitement des dossiers qu’une réponse donnée en fonction des seules demandes… en fonction des disponibilités. Ce qu’on ne demanderait qu’à croire si on ne constatait une profonde corrélation entre les différents sous-espaces et le niveau de difficultés socio-économiques qu’on y rencontre. Pour exemple, FCB-LC est l’illustration par excellence de la ghettoïsation. Serait-ce le produit d’une répartition par degré estimé de solvabilité ? C’est en ce sens que penchent les travaux qui ont étudié les commissions d’attribution6. Doit-

on estimer également que les demandeurs s’autocensurent de par la maîtrise qu’ils ont acquise de cet univers réputationnel ? Si tel est le cas, c’est une bonne démonstration de la façon dont ils sont habités par leur parcours résidentiel7. À l’évidence, il y a en tout cas une réputation du locataire qui est estimée à partir de l’image du site habité. Cette sociologie de la distribution spatiale des populations, selon leur capital économique primo et l’image sociale qu’elles véhiculent secundo, rejoint les trois instances qu’Olivier Lazzarotti propose dans un autre texte8 pour établir les fondements d’une géographie de l’habiter : soit l’espace habité en premier lieu, l’habitant en tant qu’acteur et troisièmement la cohabitation. Ces trois instances se présentant en interaction les unes avec les autres, on peut poser comme hypothèse que les habitants sont distribués en tenant moins compte de leurs demandes que de leurs capacités estimées à être des cohabitants conformes à la réputation du quartier habité. Que les offices publics ou privés accordent par la suite un soin différencié à l’entretien du bâti et des communs n’est que la conséquence de cette logique étagée quant à la notoriété des locataires à être de « bons » locataires, solvables bien sûr, bons payeurs assurément et dont le mode de sociabilité correspondra à la réputation du « bloc », ce qui relève parfois d’une forme de non-dit.

Les logiques de l’exclusion. Enquête sociologique au cœur des problèmes d’une communauté, Paris, Fayard, 1997. Cf. sous la direction de Jean-Yves Authier, Catherine Bonvarlet et Jean-Pierre Lévy Élire domicile. La construction sociale des choix résidentiels, Lyon, PUL, 2010. 7 Cf. Catherie Bonvalet et Anne-Marie Fribourg (éd.) : Stratégies résidentielles, Paris, INED, 1990. 8 « Habiter, aperçu d’une science géographique », in Cahiers de géographie du Québec, n°139, 2006, pages 85-102. 5 6

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| Denis Lachaud |

Nous sommes là Nous parlons de ce que nous faisons. Nous expliquons ce que c’est, être sociologue. Nous vous proposons de parler d’une affiche que nous avons produite, une affiche que nous souhaitons commenter avec vous, une affiche qui présente le drapeau français flottant au dessus d’un groupe d’immeubles et en surimpression, les mots « respect et égalité », la phrase « Nous sommes tous la France ». Mais non. Nous demandons : est-ce qu’on revendique la République et donc l’égalité ? Est-ce que l’égalité permet de sortir de situations d’inégalité ? Est-ce que l’équité ne permet pas plus de choses que l’égalité ? Et nous parlons entre nous. Nous commentons ce que nous vous proposons de commenter. Vous écoutez, mais non. Ce qui se dit ne vous atteint pas. Ce qui se dit passe à côté de vous. Ce qui se dit ne vous fait pas réagir. Ou si. Bien que nous ayons peu de moyens de le savoir, ce qui se dit vous atteint, ce qui se dit vous traverse et vous travaille autant que ça nous travaille, ce qui se dit vous fait réagir, même si vous gardez votre réaction pour vous. De temps en temps vous parlez. Vous trouvez dans votre vie ce qui se lie à ce qui se dit : la lecture, l’école, le territoire, le quartier, les règles ici et les règles là, différentes, le respect dont la définition est soumise aux règles, les pauvres, les riches, la mixité. Nous vivons dans plusieurs réalités, différentes, et une fois par semaine, toutes ces réalités se rencontrent autour d’une table. Ce qui apparaît à chaque fois, c’est l’envie, notre envie et votre envie, l’envie qui règne autour de cette table, l’envie qu’un langage 43



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| Hugues Bazin | Résumé des entretiens avec les intervenants du projet  La Place des habitants mis en place par la Forge depuis 2011 Texte du livret diffusé

Accompagnement d’un surgissement Quelques mots clés à propos de la recherche-action Ce document est issu d’un travail en atelier de recherche-action dont les matériaux initiaux sont constitués par des entretiens réalisés auprès des principaux acteurs intervenant dans le cadre du projet La Place des habitants animé par l’association La Forge et ses partenaires Cardan et Carmen. La forme atelier de recherche-action se comprend comme une invitation à se réapproprier ses matériaux. Cette proposition ne concerne pas que les professionnels intervenants. Nous entrons en recherche-action lorsque nous faisons un « pas de côté » afin de changer de perspective sur notre engagement. Cela permet par exemple d’interroger la logique de projet comme support de l’action, de ce qui fait ville et territoire, particulièrement lorsque l’on travaille dans un quartier enclavé où relégué. Ce processus où l’on se prend soi-même comme matériau d’étude s’appelle en recherche-action « réflexivité » : la personne n’est pas objet, mais sujet de la recherche. En même temps se produit un décalage dans la manière de penser la réalité sociale et de concevoir ses modes d’implication dans cette réalité sociale. Nous proposons par exemple de réfléchir de manière dialectique et systémique par couple de termes, non pour les opposer, mais pour les mettre en tension : intervention et mise en situation, processus et dispositifs, surgissement et accompagnement, temps continu et temps intermittent, compétences et disciplines… Nous pouvons ainsi aborder la complexité des situations sociales en évitant tout réductionnisme et apporter des éléments de réponse que nous n’aurions pas imaginés autrement. C’est dans ce décalage où l’on adopte une posture hybride d’« acteur-chercheur » que l’on peut interroger les fondamentaux de notre engagement social

ou professionnel à travers les notions d’« agentacteur-auteur ». Cette trilogie constitue les postures sur lesquelles on joue habituellement, mais qu’il est nécessaire aujourd’hui de questionner, voire de redéfinir d’autant plus qu’elles sont en crise. Il faut d’autres mots pour décrire la réalité contemporaine et ses enjeux. Il s’agit de se réapproprier le sens de ce que l’on fait, d’élaborer éventuellement un nouvel outillage méthodologique et d’évaluation. Par exemple nous interrogeons l’injonction de « faire des projets » aussi bien dans notre vie personnelle que professionnelle. Mais comment des habitants peuvent s’approprier des projets ? C’est pourtant eux qui généralement sont mis au cœur à travers le principe de « participation » qui est convoqué à chaque fois pour justifier de l’authenticité, de l’efficacité d’une intervention dans les quartiers ? Comment ceux qui habitent un territoire deviennent acteurs  ? Plutôt que partir des projets nous préférons chercher des espaces en posant la question « où sont les espaces de rencontres possibles sur un territoire, quelles sont les possibilités d’un travail collectif, quelles sont les conditions d’un espace du commun ? La recherche-action, comme tout processus, produit des transformations par l’apport de nouvelles connaissances et la capacité de dégager de nouvelles perspectives. Cela peut s’incarner par des expérimentations où cette dimension réflexive est intégrée dans l’action, ou encore des dispositifs interrogeant la manière de concevoir la gouvernance sur un territoire, les cadres de partenariat, etc. Le « laboratoire social » est une autre manière de nommer cet espace du commun où nous entrons dans une logique de coproduction mêlant plusieurs domaines d’activité : sociale, culturelle, scientifique, etc. Ce laboratoire social n’est pas un dispositif qui s’ajoute aux autres. Comprenons que la démarche de recherche-action est transversale à notre manière de faire habituelle.

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