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10 arts visuels

En quoi la globalisation définit-elle selon vous l’artiste d’aujourd’hui ? La société est globalisée. L’industrie est globalisée. Aujourd’hui, l’artiste n’est pas isolé, ni cantonné à un seul point géographique. Il s’inscrit dans ce même contexte de mondialisation. Quand on parle d’artistes issus de « Luxembourg et Grande Région », qu’est-ce que cela veut dire ? Que signifie l’appartenance à une Grande Région ? L’identité en tant que définition de soi est au cœur de tous les débats. Le but de cette exposition ne consiste aucunement à chercher à révéler un art typiquement luxembourgeois, l’opportunité est plutôt donnée aux artistes ayant un lien avec le Luxembourg, de renouer avec leurs origines ou avec dits liens. Cette connexion s’étend à la Grande Région. Je préfère parler en terme de territoire et de comment celui est propice à la création, plutôt que de parler de nationalité. L’exposition contrecarre un peu sans le vouloir l’idée d’un nation branding, celle d’une identité claire et définie… Parler d’identité, ça reste compliqué, surtout au Luxembourg, qui est tellement imprégné d’influences venues d’ailleurs. Pareil pour les études. La majorité des étudiants partent à l’étranger, ce qui change aussi leur façon de voir les choses. Peut-être qu’être Luxembourgeois, c’est justement ça : être baigné dans ce mix d’influences. Certaines œuvres de la Triennale se penchent sur la question d’appartenance et d’errance.

Sur les 121 dossiers reçus, comment s’est faite la sélection ? La sélection s’est faite avec les Rotondes. Il y avait un nombre de critères à respecter, dont l’espace délimité du lieu d’exposition. Autant les projets semblaient intéressants, autant nous étions obligés de nous limiter à une vingtaine d’artistes. Ce n’était évidemment pas le premier critère, qui est et reste le sujet. Certaines propositions ne faisaient qu’effleurer le sujet. Il y en avait qui d’emblée étaient pertinentes, d’autres où nous n’étions pas sûrs d’avoir saisi l’approche. Ces artistes-là, nous les avons recontactés pour en savoir plus et, surtout, voir si leur œuvre s’inscrivait bien dans la thématique. Nous avons à plusieurs reprises dû revoir notre position. Par contre, des 25 projets retenus, 20 sont des créations spécialement conçues pour la Triennale. Vous êtes responsable de la programmation au Cercle Cité, mais commissaire de la Triennale dont la grande majorité se déroule aux Rotondes. Sans regret ? J’avoue que ça fait un peu drôle parce que toutes les missions de commissariat d’exposition que j’ai menées jusqu’à présent l’étaient pour le Cercle Cité. Mais l’approche est intéressante parce qu’elle me permet de me détacher de mon rôle de coordinatrice, qui est plus lié à l’aspect pratique et à la logistique autour d’une exposition. Je savais dès le départ que nos espaces ici au Cercle étaient limités,

en raison de la traditionnelle exposition de la Photothèque de la Ville de Luxembourg que nous accueillons chaque été. J’ai vraiment perçu mon implication dans la Triennale comme étant l’invitée des Rotondes, ce qui était plutôt agréable. Quelles sont les idées que vous souhaitez que les visiteurs retiennent de Jet Lag / Out Of Sync ? Il y a plusieurs messages sous-jacents dans cette exposition. J’ai ressenti de la part des artistes un souhait de voir une décélération de la société et de retourner à des choses plus simples et fondamentales. Il y a une envie de se distancer de la « machine », de prendre du temps pour soi, de faire une pause. La cabane de Marie-Luce Theis (hide & seek, érigée sur le parvis), par exemple, reflète très bien ce sentiment. On y entre, on dépose son téléphone dans une boîte aux lettres, on retire ses chaussures, avant d’adopter la seule position à peu près possible à l’intérieur, qui est de regarder le ciel à travers une fenêtre de toit. Il y a cette idée forte de vouloir marquer une pause d’un côté et, de l’autre, l’envie de renouer avec l’humain, avec la nature.


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