Kaizen hors-série 13 : Avez-vous l'esprit nomade ?

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avez-vous

COUVERTURE L’ESPRIT NOMADE ? Un peu, beaucoup, passionnément ?

Des reportages, des fiches pratiques, pour se (re)mettre sur la route L’ I M P O R TA N T , c e N ’ E S T P A S L A D E S T I N AT I O N , C ’ E S T L E V O YA G E …


3 Éditeur SARL EKO LIBRIS au capital de 98 913 € Siège social 19, rue Martel - 75010 Paris info@kaizen-magazine.fr www.kaizen-magazine.com

Éditorial

Hors-série numéro 13 Juin 2019 Imprimé sur papier certifié PEFC Fondateurs Cyril Dion, Yvan Saint-Jours, Patrick Baldassari et Pascal Greboval

Esprit nomade, es-tu là ? OURS + EDITO

Directeur de la publication Patrick Baldassari Rédacteur en chef Pascal Greboval

Rédactrice en chef adjointe Sabah Rahmani Secrétaires de rédaction Emmanuelle Painvin Delphine Dias Journaliste multimédia Maëlys Vésir

Directrice administrative et financière Céline Pageot Abonnements et commandes Camille Gaudy abonnement@kaizen-magazine.fr Tél. 01 56 03 54 71 (de 14 h à 18 h) 19, rue Martel - 75010 Paris Responsable commerciale Cyrielle Bulgheroni Stagiaires pour ce numéro Laura Remoué Cypriane El-Chami Direction artistique, maquette et mise en pages • www.hobo.paris hobo.paris - hobo@hobo.paris Tél. 06 12 17 87 33 Photo de couverture © Simon Pouyet Prépresse Schuller-Graphic 18, rue de l’Artisanat 14500 Vire Tél. 02 31 66 29 29 Impression Via Schuller-Graphic Corlet Roto (Imprim’Vert) ZA Les Vallées 53300 Ambrières-les-Vallées SIRET : 539 732 990 000 38 • APE : 5814Z Commission paritaire : 0322 K 91284 Numéro ISSN : 2258-4676 Dépôt légal à parution Régie de publicité et distribution dans magasins spécialisés AlterreNat Presse • Tél. 05 63 94 15 50 Distribution Presstalis Vente au n° pour les diffuseurs Groupe HOMMELL • Tél. 01 47 11 20 12 diffusion-hommell@sfep.fr Aucun texte ni aucune illustration ne peuvent être reproduits sans l’autorisation du magazine. Merci.

Liberté, mobilité, sobriété. Mode de vie ou simple état d’esprit, le nomadisme nous invite à renouer avec cette source qui a guidé les premières communautés humaines, celle qui nous pousse à dépasser nos peurs, à aller de l’avant, à découvrir l’inconnu. Un ailleurs où tout semble possible. Tel un voyage initiatique, au court ou au long cours, étape après étape, l’esprit nomade s’adapte avec humilité à chaque environnement social et naturel. Un peu, beaucoup, passionnément… À pied, en vélo ou en camion, pour quelques semaines, quelques mois ou toute une vie, en tente, en Tiny House ou chez l’habitant, le nomadisme prend aujourd’hui des formes multiples ; non pour accélérer la cadence, mais pour prendre le temps de (se) découvrir, de s’installer et de se nourrir des richesses locales. Sans rien dévaster. Puis reprendre le chemin. N’emportant que le strict nécessaire, comme pour s’alléger des contraintes de l’enfermement sédentaire. Loin des vanités de la surconsommation. Comme pour mieux se rapprocher de la nature, explorée au gré des vents. L’esprit nomade s’est adapté à notre monde contemporain en pleine transition, il s’est infiltré jusque dans les réseaux d’Internet, en créant de nouveaux espaces d’échange et de partage. Car il porte en lui la circulation des biens et des idées. Nomadisme digital, urbain ou rural, chacune de ses déclinaisons alimente une soif personnelle, familiale, artistique, professionnelle, où le voyage au cœur de soi ne se réalise que dans la rencontre avec l’autre. L’art de s’ouvrir à l’altérité. Même si, seul(e), en famille ou en groupe, le ou la nomade ne quitte jamais la route de ses rêves. Et vous, quel esprit nomade sommeille en vous ? Sabah Rahmani Rédactrice en chef adjointe

Origine du papier : pages intérieures : Belgique ; encart : Allemagne ; couverture : Pays-Bas. Taux de fibres recyclées : 0 %. Ce magazine est imprimé sur un papier issu de forêts gérées durablement. Eutrophisation : Ptot = 0,018 kg/t. Pour les abonnés : une relance de fin d’abonnement.

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NOMADE Un peu, beaucoup, passioNnément… 14 • Portfolio • Jean-Christophe Plat Sibérie : au bord du monde

UN PEU…

© Simon Pouyet

Sommaire 3 • Édito

SOMM

4 • Présentation des auteurs

22 • Portrait Sylvain Giez : l’épicier itinérant, colporteur des campagnes

8 • Préface de Michel Maffesoli : « Le mot-clé du nomadisme, c’est altérité »

24 • Point de vue De la ville aux champs, les travailleurs nomades changent d’horizon

120 • Bibliographie

28 • Fiche pratique Voyager avec son animal de compagnie

130 • Abonnements

30 • Portrait Jean-Jacques Fasquel : wwoofing : des vacances qui ont du sens 32 • Reportage Partir en van, un premier pas vers l’aventure 36 • Reportage À vélo en famille : dans la roue de Chrystel et Eliott 40 • Fiche pratique Randonner avec les enfants 42 • Interview Marie Papot-Libéral : « Nous sommes tous nomades puisque nous ne sommes que de passage sur terre » 46 • Reportage Itinérance musicale sur les sommets KAI ZE N

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86 • Portfolio • Jean-Christophe Plat Éthiopie : à l’aube…

BEAUCOUP…

PASSIONNÉMENT…

© DR

© Jérômine Derigny, collectif Argos

52 • Portfolio • Jean-Christophe Plat Indonésie : fils de la mer

MAIRE

60 • Portrait Geoffrey Roy : l’humanité et la générosité au bout du voyage

94 • Portrait Véronique de Viguerie : en quête d’âme sur les terrains en guerre

62 • Point de vue Tiny House : maison nomade, écologique et moderne

96 • Point de vue Nomades numériques : le monde est leur bureau 100 • Portrait Damien Le Thiec : global vs local

66 • Fiche pratique L’école nomade

101 • Fiche pratique Administration, boîte aux lettres…

68 • Portrait Sylvère Janin : semeur d’oasis

102 • Portrait Samuel Allo : « Troubadour du xxie siècle »

70 • Reportage En camion, au rythme des saisons

104 • Reportage Élèves de classe en classe

76 • Fiche pratique Travailler en étant nomade

110 • Fiche pratique Mes trousses de voyage au naturel

78 • Reportage Festina Lente : des artistes nomades des mers

112 • Interview Gabi Jiménez : « La capitalisation de la vie n’est pas notre raison d’être »

82 • Point de vue Militants itinérants : l’ubiquité des luttes

116 • Récit Un tour du monde à « Pieds Libres »

E SPR IT N OMADE

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NOMADE Un peu, beaucoup, passionnément…

P R É FA C E

Michel Maffesoli « L e m o t- c l é d u n o m a d i s m e , c ’e s t a l t é r i t é » Propos recueillis par Sabah Rahmani

Le sociologue Michel Maffesoli a consacré une grande part de ses travaux universitaires aux notions de tribalisme et de nomadisme postmodernes. Dans l’un de ses nombreux ouvrages, Du nomadisme. Vagabondages initiatiques, il observe une société contemporaine en pleine transition qui cherche à s’affranchir des enfermements. Rencontre.

PREF

Michel Maffeso

Comment, historiquement, le nomadisme s’est-il exprimé dans nos sociétés ? Des historiens allemands comme Werner Jaeger ont bien montré qu’avant la stabilisation et la cristallisation des grandes cités grecques et romaines comme Athènes, Sparte, Rome…, avant la fermeture des frontières, il y avait une intense circulation des biens, des personnes et des idées, des échanges et des partages. Cette intense circulation était une forme de nomadisme structurel, différente de ce que les penseurs allemands nommaient la « tragédie des frontières », laquelle a suscité toutes les guerres à partir du xvie siècle.

KAI ZE N

Aujourd’hui, nous revivons une période de circulation intense, notamment les jeunes générations, avec les voyages étudiants, les années de césure… Avec Internet, un nouveau nomadisme naît. Nous entrons dans une période postmoderne. Ce n’est plus l’État-nation qui prédomine, mais nous assistons au retour des grands ensembles avec une circulation plus dense. Quel regard portez-vous sur notre société contemporaine ? Nous assistons actuellement à un changement de fond des valeurs qui a lieu dans la société officieuse plus que dans la société officielle. Alors que cette dernière, représentée par les grandes institutions politiques, économiques, éducatives, etc. reste sur les grandes valeurs « modernes », et marquée par l’individualisme, le rationalisme, le progressisme, et le saccage de la nature, la société officieuse, elle, est en pleine gestation, marquée par des formes postmodernes de tribalisme, de nomadisme, d’hédonisme et de rapprochement avec la nature. On observe donc un réel désaccord entre l’officiel et l’officieux. 8

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SIBÉRIE Au bord du monde

PORTF

JEAN-CHRISTOPHE PLAT

SIBÉ

Isolés par les conditions climatiques et géographiques extrêmes de leur territoire polaire, les Nénètses pérennisent un mode de vie nomade millénaire. Ces éleveurs de rennes parcourent inlassablement les chemins de transhumance ancestraux, au bord du monde… Le troupeau est leur raison d’être, vital dans ces milieux souvent hostiles. Puisée au plus profond d’eux-mêmes, une force de vie intense émane de ce peuple racine qui lutte au quotidien pour sa survie. Mais l’acculturation programmée depuis longtemps par le gouvernement russe menace le mode de vie traditionnel de ces nomades de la toundra…

Sur son traîneau royal, reconnaissable au nombre de jambes, une Nénètse dicte aux rennes la direction à l’aide de sa « tour », une perche précieuse, terminée par un embout en os ou en ivoire.

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FOLIO

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22 • Portrait

Sylvain Giez : l’épicier itinérant, colporteur des campagnes 24 • Point de vue

De la ville aux champs, les travailleurs nomades changent d’horizon

RTURE PEU

28 • Fiche pratique

Voyager avec son animal de compagnie 30 • Portrait

Jean-Jacques Fasquel : wwoofing : des vacances qui ont du sens 32 • Reportage

Partir en van, un premier pas vers l’aventure 36 • Reportage

À vélo en famille : dans la roue de Chrystel et Eliott 40 • Fiche pratique

Randonner avec les enfants 42 • Interview

Marie Papot-Libéral : « Nous sommes tous nomades puisque nous ne sommes que de passage sur terre » 46 • Reportage

Itinérance musicale sur les sommets

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NOMADE Un peu, beaucoup, passioNnément…

Sylvain Giez L’é p i c i e r i t i n é r a n t , c o l p o r t e u r d e s c a m p a g n e s

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J

À bord de son épicerie itinérante, au ventre rempli de produits bio et locaux, Sylvain Giez sillonne les terres poitevines. Il approvisionne les villages désertés par les commerces et crée du lien social, notamment avec les personnes âgées.

’ai toujours aimé prendre la route, raconte Sylvain Giez, au volant de son épicerie itinérante. Je suis un contemplatif. Je regarde les paysages du Poitou qui défilent et changent selon les saisons. Sur ces petites routes de campagne, je me sens moins soumis à la pression du temps. Cela m’apaise et me procure un sentiment de liberté. » Les mardis, jeudis et vendredis, Sylvain Giez circule dans un rayon de quarante kilomètres autour de sa commune de Vivonne, près de Poitiers. Sa tournée l’amène au cœur de douze villages désertés par les commerces de proximité. Le mercredi, il s’approvisionne. « Je travaille avec trente producteurs locaux respectueux de l’environnement. J’ai également goûté tous les aliments que je vends. J’étais très ému quand une dame âgée de 87 ans m’a dit qu’elle avait enfin retrouvé le goût de la faisselle que sa grand-mère lui préparait », confie Sylvain Giez. Sur la liste de courses de l’épicier nomade figurent : légumes, fruits, fromage, viande, conserves, gâteaux, produits laitiers, tisane, café, thé, vin, bière ou encore sodas. Quant au lundi, il le consacre à démarcher les maisons de retraite, les foyers-logements et les comités d’entreprise. « Enfant, se souvient-il, j’accompagnais mon père, qui était coursier, dans ses tournées. J’avais déjà la bougeotte ! Et quand j’ai eu mon permis de conduire, je l’ai remplacé l’été. » La sobriété heureuse au bout de la route Après la naissance de ses deux enfants et quinze années de sédentarité en tant que dessinateurprojeteur dans les travaux publics, Sylvain Giez a

PORT

décidé de changer de vie professionnelle. « J’avais 40 ans. Il était temps de mettre mes valeurs écologiques en face de mes actions. Quitte à gagner beaucoup moins d’argent. L’idée de livrer des produits bio, locaux et en circuit court m’est venue en me rendant sur un marché de producteurs d’ici », précise-t-il. Le 1er décembre 2017, Sylvain Giez part pour sa première tournée. Peu à peu, il agrège une clientèle hétéroclite autour de sa camionnette baptisée « Sylvain l’épicier. Votre quotidien à domicile ». La moitié est constituée de jeunes retraités, un tiers a entre 20 et 50 ans et le reste, ce sont des personnes plus âgées. Quant à ses prix, ils sont équivalents à ceux d’une coopérative bio. Au bout d’un an d’activité, Sylvain Giez rentre dans ses frais. « Mon épargne salariale a été un coup de pouce pour me lancer. D’ici deux ans, mon objectif est de me dégager un Smic. Avec ma femme, nous nous inscrivons dans la sobriété heureuse. C’est aussi ça, l’esprit nomade ! », dit-il tout sourire. Depuis deux ans, Sylvain Giez garde le sentiment de toujours mettre le cap vers l’inconnu : « Chaque jour est une surprise. C’est moi qui vais vers les gens. Je m’approche du seuil de leur maison, et ils m’accordent leur confiance. » Cette proximité donne le goût de l’autre. « Parfois, j’apporte des nouvelles du village d’à côté, comme au temps des colporteurs, ces marchands ambulants qui faisaient du porte-à-porte. » A. R.

ÉPICIER N

– Pour aller plus loin • www.sylvainlepicier.fr

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NOMADE Un peu, beaucoup, passioNnément…

De la ville aux champs, les travailleurs nomades changent d’horizon Décorer leur bureau avec leurs photos souvenirs : très peu pour eux ! Qu’ils soient indépendants ou télésalariés, les travailleurs nomades travaillent là où est leur ordinateur. Dans des cafés, des tiers-lieux, en ville ou à la campagne, ils bossent partout en fonction de leurs envies, leurs clients. Bienvenue au « bureau du futur » !

A

ujourd’hui, le travail, c’est là où est l ’ord i nateu r », la nce X av ier de Mazenod, créateur de la plateforme Zevillage, site d’information en ligne consacré aux nouvelles organisations et nouveaux espaces de travail. « La technologie et les outils collaboratifs banalisent le télétravail », poursuit celui qui sillonne la France pour son activité de consultant et

formateur au service de la transformation numérique des entreprises. « Avec ma famille, nous avons fait le choix de quitter l’Île-de-France pour vivre en zone rurale, dans l’Orne. Je savais en m’installant ici, il y a plus de dix ans, que mes clients ne seraient pas dans mon village de 350 habitants. Mais mon activité peut être faite à distance. Alors quand je vais voir mes clients, je travaille dans le train, dans un café, dans un tiers-lieu 1, n’importe où. » En moyenne, Xavier de Mazenod fait un aller-retour à Paris par semaine et un déplacement en région par mois. « Je le vis bien, car c’est un nomadisme choisi, pas subi. Outre mes rendez-vous professionnels, je m’accorde toujours un peu de temps pour visiter les villes où je passe : Lyon, Toulouse, Bordeaux, Rennes, etc. C’est super agréable. » Cette facilité de travailler n’importe où permet aussi à des indépendants aux statuts parfois précaires d’allier plaisir et travail. C’est ce qu’a compris, par exemple, Mutinerie Village : un lieu d’accueil rural pour travailleurs indépendants et séminaires d’entreprise situé au cœur du Perche, dans un cadre champêtre. « C’est un espace de travail à 1 heure 30 de Paris, explique Antoine van den Broek, un des cofondateurs. On y trouve des chambres, pouvant héber-

ARTI

WORKATION : DIGITA + CAMP

© Pascal Greboval

«

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NOMADE Un peu, beaucoup, passioNnément…

Fiche pratique

Voyager avec son animal de compagnie

FICHE PR

Partir en voyage avec son chien, chat, furet ou autre ne s’improvise pas. Chaque pays a en effet sa réglementation et, pour traverser les frontières, il convient de se renseigner en amont, car certains accès sont souvent limités, voire interdits aux animaux de compagnie. Pense-bête pour ne pas risquer d’amende ou mettre en danger son compagnon.

PARTIR AVEC DE COM

Papiers

conditions d’entrée spécifiques à chaque animal. Le passeport fournit la preuve que l’animal est identifié et vacciné. Si l’identification de votre animal a été faite avant le 3 juillet 2011, un tatouage suffit ; au-delà de cette date, votre compagnon doit porter une puce électronique. © Simon Pouyet

Pour voyager dans l’Union européenne et en Suisse, votre animal doit posséder un passeport européen. Celui-ci est délivré par un vétérinaire et coûte entre 8 et 20 euros. Il n’est pas exigé dans les départements d’outre-mer. Pour les autres destinations, il faut se renseigner auprès des ambassades pour connaître les

Santé

Pour passer des frontières, le vaccin contre la rage est obligatoire. Des conditions spécifiques s’appliquent pour l’Irlande, Malte, la Finlande et le Royaume-Uni qui exigent que l’animal soit âgé d’au moins 3 mois et qu’il soit à jour de son traitement contre l’échinococcose. Ce traitement doit être administré entre 120 et 124 heures avant l’arrivée dans le pays de destination. Hors Europe, il convient de se renseigner auprès des ambassades pour connaître les spécificités des destinations. Certaines exigent des mises en quarantaine : Australie, île Maurice, Malaisie… À l’arrivée, l’animal est placé dans un centre de quarantaine pendant une durée moyenne d’environ dix jours afin de protéger la population locale d’une éventuelle maladie contagieuse. Prévoir une trousse de

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NOMADE Un peu, beaucoup, passionnément…

Partir en van, un premier pas vers l’aventure Tous les périples en van commencent de la même manière : une envie d’évasion, en marge du tourisme de masse, un besoin de liberté sans pour autant renoncer à un minimum de confort. Les voyageurs sont de plus en plus nombreux à expérimenter l’itinérance, en quête d’aventure, de simplicité et de reconnexion avec la nature.

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REPOR

précisément où passer le week-end ! s’exclame la mère de famille, originaire de Seine-Saint-Denis. Mais partir à la dernière minute revient cher s’il faut louer un logement, prendre la voiture, manger au restaurant… alors qu’avec le van, il suffit d’attraper quelques affaires, un paquet de pâtes, et tout le monde est content ! » Depuis qu’il a des enfants, le couple regrettait de partir moins souvent en week-end, « parce que cela nous semblait compliqué. Avec le van, c’est simple, et c’est une aventure qui leur a beaucoup plu ». Malgré les quelques disputes habituelles entre frère et sœur, la promiscuité obligée les a rapprochés. « Ils ont tellement apprécié qu’ils étaient même prêts à dormir ensemble, ce qui ne serait jamais arrivé à la maison », se réjouit celle qui ressentait « une sorte de frustration liée au manque d’aventure dans notre quotidien de sédentaires ». Ce qu’a visiblement su combler le van, mais au prix de quelques concessions : « Nous avions emporté beaucoup trop de choses. Les premiers jours, nous avons fait des allersretours quotidiens à notre voiture, garée à Perpignan, pour échanger des affaires superflues avec celles qui nous manquaient… toute une organisation à repenser. Nous avons mis trois jours

PARTIR

© Jérômine Derigny, collectif Argos

près une semaine de voyage dans le sud de la France, il est temps pour Sophie Jarry, son conjoint et leurs deux enfants de 7 et 8 ans, de rendre le van de location dans lequel ils ont fait l’expérience du road trip : « Combien de fois, à la maison, j’ai eu envie de partir à l’aventure un vendredi soir, sans savoir

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NOMADE Un peu, beaucoup, passionnément…

À vélo en famille : dans la roue de Chrystel et Eliott Dès qu’ils le peuvent, mère et fils s’élancent sur les pistes cyclables de France et d’Europe. Leurs vacances sont synonymes de plus ou moins longues expéditions, rythmées par le moulinet des pédales.

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ue de Montagny, 8e arrondissement de Lyon. À première vue, un quartier résidentiel peu propice à l’évasion. C’est pourtant le point de départ de toutes les expéditions à vélo entreprises par Chrystel, 48 ans, et son fils Eliott, 8 ans. « Le voyage commence ici. Toujours depuis le bas de l’immeuble. » Le garage souterrain, c’est pour l’entrepôt des vélos. Vous n’y verrez aucun autre véhicule, la mère de famille ayant décidé d’abandonner la voiture depuis son départ de

une grossesse et une naissance difficiles, j’avais envie de lui faire un cadeau dans la vie, et le voyage à vélo était le meilleur que je pouvais lui faire. » Dès ses premiers mois, le garçon est bercé par la rotation des roues, au plus proche du bitume qui défile. D’abord dans une remorque, emmitouflé dans d’épaisses couvertures. « Il ne faisait que dormir. » Aujourd’hui droit sur les pédales lorsqu’il faut gravir les reliefs normands et britanniques. « Des côtes de malade ! », souffle le jeune cycliste.

« La mécanique du coup de pédale te berce. Tu es léger, ton esprit vagabonde. »

Londres, premier voyage au long cours Durant l’été 2018, la doublette s’est rendue à Londres depuis Paris. Le premier voyage en autonomie totale. 520 kilomètres au compteur, en trois semaines, la plupart du temps sur des pistes aménagées pour accueillir les amoureux de la petite reine. Devant Chrystel, le GPS fait défiler le trajet préalablement étudié. 36 kilomètres par jour en moyenne et des étapes jusqu’à 60 kilomètres. « Je suis un beau gosse », se félicite Eliott. Une fierté que la maman ne semble pas vouloir lui voler. Pour la première fois, le fiston était logé à la même enseigne que sa mère, équipé de ses propres sacoches contenant habits, duvet et tapis de sol. Sans oublier quelques jouets. Point kilométrique zéro : sur le parvis de la cathédrale Notre-Dame. Après la visite des musées d’Orsay et de l’Orangerie, la famille alterne entre trains et routes pour s’extirper de la ville. Puis retrouve la Seine à Maisons-Laffitte (Yvelines), rejointe par une régionale de

l’Ardèche et son installation en ville en 2005. « En milieu rural, c’est encore un peu compliqué. Ici, la voiture ne sert à rien, ce ne sont que des frais. » Quand elle contemple les photos de ses périples, des paysages, des visites, des rencontres, elle adopte une voix douce qui ne trompe pas sur son état de plénitude lorsqu’elle s’élance sur les routes. Soigneusement triés par dossier, les clichés à vélo remontent à 2010. Aussi loin que ses souvenirs remontent, Chrystel a toujours aimé l’aventure. Plus jeune, elle aimait déjà partir avec peu d’effets. « Partir seule avec mon sac à dos à 20 ans ne me faisait pas peur. » Une douce passion qu’elle tente aujourd’hui de transmettre à son fils, fidèle compagnon de route. « Quand Eliott est arrivé, après

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NOMADE Un peu, beaucoup, passioNnément…

Fiche pratique

Randonner avec les enfants Quelle distance pour quel âge ? Avec quel matériel équiper sa famille ? Comment motiver ses troupes ? Michael Anthoine, conseiller technique à la Fédération française de randonnée pédestre, nous livre ses inspirants conseils pour mettre les pas de ses enfants dans les siens.

FICHE PR

À quel âge ? - Moins de 3 ans : Un porte-bébé, spécialement destiné à la randonnée, est nécessaire. Les parents veilleront à ce que leur sac de portage ne comprime pas l’enfant. Ils devront marquer des pauses toutes les heures pour lui

dégourdir les jambes. Une randonnée en altitude (plus de 1 500 mètres) est déconseillée aux enfants en bas âge, car ils sont sensibles à la pression atmosphérique et à la raréfaction de l’oxygène.

PARTIR AVEC

- Entre 4 et 12 ans : Pour faire simple, 1 an égale 1 kilomètre. Autrement dit, un enfant de 8 ans pourra marcher, en moyenne, 8 kilomètres par jour. Sauf, bien entendu, contreindication médicale. À la distance s’ajoute le critère du dénivelé. Sur du plat, on enchaîne les pas à un rythme de 1 à 2 kilomètres par heure. En dénivelé, on ralentit l’allure. Dès 6 ans, on peut affronter 500 mètres de dénivelé. Si le groupe comprend plusieurs enfants, il faudra s’adapter au rythme du plus lent. Et être attentif à leur état de fatigue. Il ne s’agit pas de réaliser une performance, mais d’arriver, ensemble, à destination. Pour éviter le coup de pompe, qui arrive en général au troisième jour, prévoir une nuit de sommeil réparateur. Enfin, pour une première randonnée en famille, mieux vaut s’entraîner un week-end avant de partir.

- Plus de 12 ans :

© Pascal Greboval

Les capacités physiques et l’endurance des adolescents se rapprochent de celles des adultes. Seules « contraintes » : bien les nourrir et les motiver !

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NOMADE Un peu, beaucoup, passioNnément…

Fiche pratique

Randonner avec les enfants Quelle distance pour quel âge ? Avec quel matériel équiper sa famille ? Comment motiver ses troupes ? Michael Anthoine, conseiller technique à la Fédération française de randonnée pédestre, nous livre ses inspirants conseils pour mettre les pas de ses enfants dans les siens.

FICHE PR

À quel âge ? - Moins de 3 ans : Un porte-bébé, spécialement destiné à la randonnée, est nécessaire. Les parents veilleront à ce que leur sac de portage ne comprime pas l’enfant. Ils devront marquer des pauses toutes les heures pour lui

dégourdir les jambes. Une randonnée en altitude (plus de 1 500 mètres) est déconseillée aux enfants en bas âge, car ils sont sensibles à la pression atmosphérique et à la raréfaction de l’oxygène.

PARTIR AVEC

- Entre 4 et 12 ans : Pour faire simple, 1 an égale 1 kilomètre. Autrement dit, un enfant de 8 ans pourra marcher, en moyenne, 8 kilomètres par jour. Sauf, bien entendu, contreindication médicale. À la distance s’ajoute le critère du dénivelé. Sur du plat, on enchaîne les pas à un rythme de 1 à 2 kilomètres par heure. En dénivelé, on ralentit l’allure. Dès 6 ans, on peut affronter 500 mètres de dénivelé. Si le groupe comprend plusieurs enfants, il faudra s’adapter au rythme du plus lent. Et être attentif à leur état de fatigue. Il ne s’agit pas de réaliser une performance, mais d’arriver, ensemble, à destination. Pour éviter le coup de pompe, qui arrive en général au troisième jour, prévoir une nuit de sommeil réparateur. Enfin, pour une première randonnée en famille, mieux vaut s’entraîner un week-end avant de partir.

- Plus de 12 ans :

© Pascal Greboval

Les capacités physiques et l’endurance des adolescents se rapprochent de celles des adultes. Seules « contraintes » : bien les nourrir et les motiver !

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NOMADE Un peu, beaucoup, passioNnément…

Marie Papot-Libéral « No u s s o m m e s t o u s n o m a d e s p u i s q u e nous ne sommes que de passage sur terre » Marie Papot-Libéral, sexagénaire, a déménagé quarante-quatre fois ! Elle est à l’origine du « nomadisme urbain » : un mode de vie hérité de son enfance africaine. Selon elle, chacun peut vivre en ville en conservant les valeurs inhérentes au nomadisme, au premier rang desquelles l’ouverture d’esprit. Vous qui avez inventé la notion de « nomadisme urbain », comment définissez-vous ce qui ressemble fort à un oxymore ? J’envisage le nomadisme urbain en partant du postulat que nous sommes tous nomades puisque nous ne sommes que de passage sur terre. Au regard de cette perspective, nous devons, tels les nomades, garder l’esprit ouvert. Chaque fois qu’ils bougent, ces peuples doivent s’adapter, s’intégrer à une nouvelle culture. Ils sont comme des abeilles qui vont butiner : ils apportent quelque chose et repartent avec autre chose. Il en est de même pour nous, qui sommes sédentaires : il est vital de traverser sa vie en étant sans cesse dans l’apprentissage, en faisant preuve de curiosité, en étant solidaires les uns des autres et en cultivant le partage.

INTER

croissance à tout prix. Face à l’effondrement annoncé de notre civilisation, il est temps d’inventer un autre modèle, basé sur les échanges humains, la résilience, la transition écologique. Les problèmes sont moins importants quand on met l’énergie dans les solutions. Et les possibles deviennent infinis. Je crois en l’intelligence humaine et à son aspect multidimensionnel. D’où la nécessité d’écrire une nouvelle page pour réinventer et réenchanter notre monde. En espérant que le développement de l’intelligence artificielle nous en laisse le temps : après avoir remplacé nos bras, les robots risquent de remplacer nos cerveaux…

MARIE PAPO URBAN NOMAD /

Comment préserver ces valeurs intrinsèques du nomadisme sachant que, désormais, les trois quarts des Français vivent en zone urbaine ? Certes, la ville incite au repli sur soi, il suffit de regarder le nombre de personnes qui y souffrent de solitude. Sans oublier le contexte de crise humaine qui provoque une peur telle qu’on est incapables d’accueillir quelques migrants. Il s’agit justement de ne pas perdre notre capacité d’ouverture d’esprit, d’accueil à notre environnement et à l’autre. C’est simple dans sa complexité, tel le fait de sourire ou de respirer. Pour y parvenir, il faut casser ses habitudes et questionner ses certitudes. Comme nous y invite Pablo Servigne 1, nous devons faire notre deuil d’un modèle capitaliste et libéral basé sur la

Êtes-vous une nomade urbaine, vous-même ? Même si je me suis ancrée dans la ville de Bordeaux, il y a trente ans, je veille à demeurer une nomade urbaine. Notre maison, par exemple, est toujours ouverte. Depuis que nous l’avons achetée avec mon mari, en 1994, il ne s’est pas écoulé une année sans qu’un membre de la famille ou un ami, une famille traversant un moment difficile ne viennent s’y poser, pour quelques jours, plusieurs mois ou même un an et demi. Cette façon de se rendre disponible à l’autre permet de s’enrichir et de briser la routine inhérente à la sédentarité. Autre exemple : en 2012, j’ai participé à la création de l’antenne du mouvement Colibris et à la campagne citoyenne « Tous ca ndidats 2012. Pour une République des consciences » à l’occasion des élections présidentielles. Cette campagne s’appuyait sur le postulat que le meilleur candidat pour transformer la

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OT LIBÉRAL : /ESPRIT NOMADE

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NOMADE Un peu, beaucoup, passioNnément…

Itinérance musicale sur les sommets Avec leurs instruments sanglés sur leurs sacs de randonnée, les musiciens de la Tournée des refuges ne passent pas inaperçus sur les sentiers. Depuis 2013, ils gravissent les montagnes et échangent le gîte et le couvert contre des concerts dans les refuges. Une itinérance en musique, inspirée de leurs esprits voyageurs.

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e soleil se couche à peine sur le massif des Écrins, dans les Hautes-Alpes. Les tables du refuge de l’Alpe de Villar-d’Arêne viennent d’être débarrassées après le dîner. Bancs et tables sont déplacés pour faire place à un spectacle peu commun dans les refuges de montagne : un concert gratuit et acoustique donné par des musiciens professionnels. Une scène est improvisée avec trois chaises pour les deux guitaristes et le violoniste et de petits microphones reliés à une table de mixage miniature et à un ordinateur portable. Un ingénieur du son immortalise chaque soir le

musicien présent. » « Nous aimons trouver de vieilles chansons roumaines ou russes et les interpréter à notre manière, précise Jean-Christophe Gairard, au violon. Florian Vella est d’origine sicilienne, mais apprécie énormément la musique tsigane. Les musiciens de la Tournée des refuges ont beaucoup voyagé et s’inspirent de morceaux des pays où ils se sont rendus. Le répertoire de la tournée est le fruit de ce mélange international. Nous nous envoyons la liste des morceaux quelques mois avant le départ, chacun les travaille de son côté, puis nous les jouons ensemble dans les refuges. »

« En marchant deux mois en montagne, j’ai l’impression de davantage voyager qu’en faisant un aller-retour au Brésil. »

Voyage en musique Le public de l’Alpe de Villar-d’Arêne est conquis. Les applaudissements retentissent après chaque morceau et en redemandent : « On ne se lasse pas de leurs concerts ! », s’exclame joyeusement Bénédicte Foussat, qui suit la Tournée des refuges depuis quatre éditions. Avec un groupe d’amis, ils planifient chaque année leur randonnée en fonction des dates des musiciens : « Nous ne savons jamais quels morceaux vont être joués dans les refuges. C’est différent à chaque concert et ce sont des musiques que l’on ne peut pas entendre ailleurs. » Une mélodie enjouée fait gigoter les randonneurs sur leurs bancs. « Cette composition nous a été inspirée par les Espagnols lors de notre passage dans les Pyrénées », précise Gaspard Panfiloff. Lorsqu’il joue, le guitariste regarde le ciel comme pour chercher l’inspiration vers les sommets. La marche en

TOURNÉE MUSICA

concert en live, pour autoproduire un album par édition. Il fait quasiment nuit lorsque les premières notes de musique glissent sur le bois du refuge. Une chanson populaire italienne, un medley de musiques hongroises, une polka tsigane… Des sons d’ailleurs, qui transportent l’assistance vers des horizons exotiques. « Notre répertoire se compose de plus de cent cinquante morceaux, explique Gaspard Panfiloff, l’initiateur de la tournée. Chaque concert est inédit, le choix des compositions dépend des influences et des goûts musicaux de chaque

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NOMADE Un peu, beaucoup, passionnément…

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TOURNÉE MUSICA


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FOLIO

OPIE Le « speed box », frêle embarcation de Kibou, transperce une mer d’huile, à destination de Kabalutan. Au loin, une habitation défie cet horizon sans fin. À travers ses lunettes en bois, Sultan, 5 ans, m’observe. Enfant-poisson, il occupe une grande partie de son temps à jouer dans l’eau à 27 degrés. Plus tard, il sera pêcheur, comme tous les Badjos. Leur plus grande fierté... Le mystère de leur origine reste entier. Surnommés les « Gitans de la mer », les Badjos d’Indonésie conservent un domaine exclusivement marin.

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BEAUCOUP…

ITRE 2 60 • Portrait

Geoffrey Roy : l’humanité et la générosité au bout du voyage

RTURE COUP 62 • Point de vue

Tiny House : maison nomade, écologique et moderne 66 • Fiche pratique

L’école nomade 68 • Portrait

Sylvère Janin : semeur d’oasis 70 • Reportage

En camion, au rythme des saisons 76 • Fiche pratique

Travailler en étant nomade 78 • Reportage

Festina Lente : des artistes nomades des mers 82 • Point de vue

Militants itinérants : l’ubiquité des luttes

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NOMADE Un peu, beaucoup, passionnément…

Tiny House : maison minimaliste nomade Construite sur une remorque de camion, la Tiny House, ou « toute petite maison », est née aux États-Unis, avant d’arriver en France en 2013. Depuis, plus de quatre cents Tiny Houses ont vu le jour dans l’Hexagone, habitées par des minimalistes qui refusent la sédentarité.

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ans les montagnes iséroises, Damien Artero a installé sa maison roulante sur le terrain d’amis maraîchers : une Tiny House de 16 mètres carrés, dans laquelle il vit avec ses deux filles, de 5 ans et 9 ans, et sa compagne. « Bienvenus ! s’exclament-ils en nous invitant à entrer par la porte coulissante, une astuce pour gagner de la place : les portes que l’on ouvre entravent la circulation, c’est pour cela que les armoires sont fermées par des rideaux et que les rangements sont sur roulettes », explique le père de famille, réalisateur de films d’aventure, en présentant le gardemanger et la penderie qui lui fait face. À l’intérieur de la maison, de 6,50 mètres de long sur 2,50 mètres de large et de 3 mètres de haut, tous les équipements sont optimisés pour conserver le confort d’une maison dans un espace miniature. Pas d’escalier pour accéder aux mezzanines, mais une échelle de corde, des prises d’escalade et de bateau ; la douche est construite à l’italienne, sans bac ni rideau ; le couloir qui y mène ne mesure que 80 centimètres de large entre la cuisine et la penderie : « pile-poil l’espace qu’il faut pour tourner sur soi-même et se pencher pour ramasser quelque chose par terre », justifie Damien Artero. S’alléger l’esprit « On peut facilement et confortablement vivre dans un espace très minimaliste à quatre, pour peu qu’on ait la jugeote d’organiser cet espace de façon efficace et intelligente, explique celui qui a dessiné sa Tiny House sur un logiciel d’architecture 3D, avant de la faire réaliser par une entreprise spécialisée. Cela ne me sert à rien d’avoir une salle de bains de 10 mètres

carrés avec deux lavabos, deux miroirs, des placards, etc. parce que tout ce que je veux y faire, c’est me rincer. J’ai juste besoin de la place pour le volume de mon corps et un point d’eau. » Il n’y a pas que l’espace qui doit être revu à la baisse dans une Tiny House, la quantité d’objets également : « Nous n’avons pas de rangement pour la vaisselle, car tout tient sur l’égouttoir. Nous sommes quatre, donc nous avons quatre assiettes, quatre jeux de couverts, quatre verres… Tout est calculé au plus juste. Il faut sélectionner les objets en fonction de leur utilité au quotidien. Ensuite, il faut éviter toute manipulation hasardeuse ou pénible, c’est-à-dire ne pas avoir à

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VIVRE EN T

« On peut facilement et confortablement vivre dans un espace très minimaliste à quatre. » chercher quelque chose dans une caisse qui est derrière une autre caisse… Tout doit être accessible facilement. Et si on invite des amis à manger, on leur demande d’apporter leur vaisselle. » Contraignant, non ? « Je ne dirais pas ça, répond Damien Artero. Je pense que c’est du bon sens et de l’optimisation. J’ai passé plusieurs années à pédaler pour faire le tour du monde et j’ai d’abord vécu sous la tente. Après ce voyage à vélo, j’ai regardé chaque objet en me disant : si je ne l’utilise pas régulièrement, je m’en débarrasse. Ensuite, à la naissance des filles, je me suis procuré le fourgon aménagé qui est dehors… En passant de la tente au fourgon, puis à la Tiny, je n’ai pas l’impression d’avoir d’effort à fournir. Au contraire, j’ai le sentiment qu’en simplifiant et

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NOMADE Un peu, beaucoup, passioNnément…

Fiche pratique

L’école nomade En France, l’instruction est désormais obligatoire de 3 à 16 ans. Adaptées aux différentes formes de nomadisme, plusieurs formes de scolarisation répondent aux besoins des familles et à cette obligation légale.

FICHE PR

Comment scolariser son enfant nomade en France ?

RESTER CO + BATTERIES, ÉLECRIT La fréquentation de plusieurs établissements scolaires en France au cours d’une même année scolaire n’est pas rare, pour les enfants de forains notamment. Les familles se rapprochent directement de la mairie pour une inscription temporaire à l’école. En cas de refus de scolarisation du fait d’une domiciliation instable, la loi est là pour rappeler aux communes leurs obligations en matière d’inscription à l’école élémentaire [lire page 104].

© Jérômine Derigny, collectif Argos

Et à l’étranger ? Pour les familles qui optent pour le voyage à l’étranger, il est tout à fait possible de se rapprocher des écoles françaises locales. Leur liste est disponible sur le site de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE). Sur place, en cas de doute sur les possibilités de scolarisation, il vaut mieux se tourner vers les ambassades et consulats français.

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NOMADE Un peu, beaucoup, passionnément…

Sylvère Janin S e m e u r d’o a s i s Partout en France, des citoyens se mobilisent pour réinventer leur lieu de vie. Mutualisation des ressources, sobriété énergétique, lien entre les générations : les porteurs de projet peuvent recourir aux compétences de compagnons oasis pour être accompagnés le temps de la genèse.

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ylvère Janin n’a pas beaucoup hésité lorsqu’en 2016, il s’est vu proposer par le réseau Colibris une mission bien particulière. Voyager pour faire éclore des « oasis », des lieux de vie régis par des valeurs écologiques et de partage. Sylvère est un « compagnon oasis » au même titre que quinze autres femmes et hommes répartis dans toute la France, rattachés à Colibris, et de dizaines d’autres par ailleurs. Leur mission : accompagner l’émergence de centaines de projets. Des écohameaux intergénérationnels, des fermes, des écoquartiers… « Je suis sensibilisé à l’écologie depuis toujours », reconnaît l’ingénieur en hydrologie, également passionné de montagne. « Nous apportons un regard extérieur, nous faisons le diagnostic du lieu pour savoir comment améliorer les points de blocage. » Soutenir, mais pas faire à la place. Que les conseils soient d’ordre juridique ou financier, les compagnons apportent une aide sur mesure. Une expertise qui a déjà emmené le trentenaire nomade vers des projets d’écohameau près de Chartres, mais aussi en Ardèche, à côté de Nice, en Bourgogne ou dans le sud-ouest de Lyon auprès du lieu de vie Ahimsa, Permaculture et Chocolat. Indépendant, Sylvère partage aujourd’hui son temps entre les différents projets de Colibris et sa vie familiale. Fraîchement papa, il a établi son camp de base familial dans un petit village limitrophe du Rhône et de la Loire. Scout parmi les Éclaireurs de France dans sa jeunesse, adhérent à une Amap quand il était étudiant, formé à la communication non violente, le trentenaire met désormais ses valeurs au service des créa-

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teurs d’oasis selon plusieurs formules, du simple coup de fil jusqu’à l’accompagnement sur plusieurs journées. « Nous sommes des acteurs locaux. Une nouvelle convention vise à ouvrir davantage le réseau de compagnons. Plus il y a de personnes dans un réseau, plus on a de chance de faire émerger des initiatives. » Un objectif de diffusion qu’il mènera toujours en lien avec ses comparses. Les compagnons se réunissent trois ou quatre fois par an. « Nous partageons nos expériences. On sait que l’on peut compter les uns sur les autres pour des problématiques spécifiques. » Son savoir-faire, il le met aussi au service de ses propres intérêts. Tout naturellement, le compagnon a monté avec des amis un projet d’oasis. Et rejoint les plus de six cents autres projets recensés en France. La route est encore longue, mais le lieu est déjà tout trouvé. Ce sera la Haute-Savoie pour se rapprocher des montagnes. Toujours en mouvement. J. P.

CADRE IT

– Pour aller plus loin • Oasis, un nouveau mode de vie, Kaizen, numéro spécial, 2019 www.colibris-lemouvement.org/projets/projet-oasis

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NOMADE Un peu, beaucoup, passionnément…

En camion, au rythme des saisons «

© Georges Bartoli

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Ils sont semi-nomades, quasi autonomes et un peu marginaux, mais pleinement en accord avec eux-mêmes. Les saisonniers en camion ont choisi de vivre de manière différente pour se sentir libres. Rencontre avec ces hommes et ces femmes qui déplacent leur maison au gré des saisons et de leurs évasions.

a vie est un voyage, profitez de la balade. » Aurore a gravé sa philosophie de vie sur la porte de son camion. Un fourgon de 14 mètres cubes. À 30 ans, la jeune femme s’est installée pour la saison d’hiver, de décembre à mai, sur le parking pour camping-cars du village des Angles, dans les Pyrénées-Orientales. À 500 mètres

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des pistes seulement, mais invisible des skieurs, elle a pour voisins une dizaine d’autres saisonniers qui, comme elle, ont choisi de vivre dans leur camion aménagé. Grand sourire, bonnet sur la tête et vêtements de sports d’hiver, elle prépare le café sur sa gazinière. « C’est petit, mais je me sens à l’aise et en sécurité », confie Aurore. Elle vit dans 7 mètres carrés avec son chien, son chat et, la moitié du temps, sa fille de 2 ans. Un lieu de vie étroit, mais qu’elle a su rendre confortable. « J’ai équipé mon camion comme un studio, décrit-elle. J’ai une douche, des toilettes, une grande armoire, une gazinière, un poêle à bois », le strict minimum pour vivre, « mais vivre heureuse ». Rentrer dans un camion, c’est pénétrer dans l’intimité de son propriétaire. Chacun le façonne à son image. Bordélique avec des meubles de récup, sobre avec des éléments démontables rapidement ou chaleureux avec un poêle et une bibliothèque, tous sont pourtant propres et soignés, malgré les chiens qui vont et viennent. Compagnons et protecteurs. Aujourd’hui, des flocons tombent encore sur le campement des saisonniers. Ils viennent s’ajouter au mètre de neige accumulé depuis début janvier. Le thermomètre oscille entre 0 degré le jour et

SAISONNIERS

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NOMADE Un peu, beaucoup, passionNément…

Fiche pratique

Travailler en étant nomade Oubliez l’idée que les voyages sont réservés aux vacances et qu’il est nécessaire d’être sédentaire pour trouver du travail. De nombreuses options existent pour travailler en étant nomade. En voici quelques exemples.

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Saisonnier

Intérimaire

COMMENT GAGNER NOMA

L’hiver, vous trouverez de nombreux emplois dans les stations de ski, en hôtellerie et restauration essentiellement. L’été, vous pourrez vous tourner vers la mer et les stations balnéaires où les mêmes emplois saisonniers foisonnent. À l’intersaison, les agriculteurs comptent sur la main-d’œuvre ponctuelle pour les cueillettes de fruits, légumes et pour les vendanges. En période de vacances scolaires, les centres de loisirs recherchent des animateurs avec le BAFA 1 en poche.

Que vous soyez technicien, commercial ou aide-soignant, il est possible de signer des CDD de courte durée dans des entreprises, ou via des agences d’intérim, partout en France. Ces emplois, souvent liés à des besoins de renfort ou de remplacement, permettent de s’installer de manière temporaire à un endroit et de le quitter dès la fin du contrat. Toutes les professions ne sont pas compatibles avec des emplois intérimaires. Vous trouverez davantage d’offres dans les secteurs de la santé, de l’industrie et du bâtiment.

© Jérômine Derigny, collectif Argos

Free-lance

Grâce à Internet, de nombreux métiers peuvent être exercés à distance. Rédacteur, journaliste, photographe, développeur web, community manager, vidéaste, influenceur, consultant, graphiste… Peu importe votre domicile si vous choisissez un métier qui vous permet de travailler d’où vous le souhaitez. En revanche, prévoyez une adresse postale pour domicilier votre entreprise – via laquelle vous facturerez vos prestations – ou recevoir vos fiches de paie.

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NOMADE Un peu, beaucoup, passioNnément…

Festina Lente : des artistes nomades des mers Depuis 2013, une flottille de bateaux-spectacle navigue sur les océans du globe pour proposer des escales artistiques. Rencontre avec des artistes nomades des mers.

REPOR

U PÉNICHE THÉÂTRE EN B n festival itinérant à la voile est une odyssée en soi ! Celle-ci commence en septembre 2013 quand des artistes rassemblés au sein de la Formation alternative et autogérée aux arts du cirque (Faaac) imaginent Armada 2013. Dans leur sillage, ils embarquent des marins expérimentés et des techniciens pour deux mois de navigation. Différentes escales artistiques ponctuent leur périple : Marseille, plusieurs ports de Corse et de Sardaigne, et Sète. Le festival Armada regroupe onze voiliers. « C’était un laboratoire très créatif, se souvient Soizic Séon, cofondatrice. À tel point qu’avant de se quitter, un groupe de 28 personnes, sur les 70 équipiers, s’est formé avec l’intention de faire du nomadisme des mers un mode de vie pérenne. » C’est ainsi que naît l’aventure Festina Lente. Un oxymore qui, en latin, signifie « hâte-toi lentement ». En mai 2016, le festival hisse les voiles. 25 artistes et marins âgés en moyenne de 30 ans – presque autant de femmes que d’hommes – larguent les amarres pour une expédition de quinze mois, au gré du vent. Cette énergie renouvelable mène la flottille, composée de quatre bateaux à voile, de Sète à Groix, en passant par l’Espagne, le Maroc, Madère, les Açores, puis la façade atlantique de la France. Se reconnecter aux éléments « S’en remettre au vent pour avancer permet de se confronter aux éléments naturels, relève Soizic Séon. On n’est pas dans le contrôle comme avec un engin à moteur. On se retrouve face à plus grand

que soi. On se rend compte alors de la vulnérabilité de l’être humain. À l’opposé de l’égocentrisme que l’on observe souvent dans le milieu artistique – “moi, ma vie, mon œuvre”. Si tu tombes en pleine mer la nuit, impossible de te repêcher. » Sa sœur, Margaux, qui s’est, elle aussi, embarquée dans l’épopée en tant que musicienne, fait écho à ses paroles : « La notion du temps et des distances n’est pas la même quand on navigue ainsi à la voile. C’est une autre échelle. Cela permet de lâcher prise et de vivre dans le moment présent. »

« La notion du temps et des distances n’est pas la même quand on navigue. » Comme pour Armada 2013, les équipiers ont fait des escales artistiques : trente deux au total. Éducatrice en environnement à terre, à Montpellier, Soizic Séon avait envie de se consacrer davantage au dessin. Elle confie : « C’était l’occasion de me lancer. Le fait d’évoluer dans un cadre artistique et bienveillant m’a donné du courage et a créé une émulation. » Depuis cette Armada, la jeune femme, qui puisait son inspiration dans les paysages montagneux, représente désormais des bateaux, des mers et des ciels, étoilés ou tourmentés de nuages. Ses aquarelles sont vendues à prix libre, lors des escales, sur un stand dédié. « En mer, on se reconnecte à la nature, souligne-t-elle. Les journées sont saupoudrées de

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NOMADE Un peu, beaucoup, passioNnément…

Militants itinérants : l’ubiquité des luttes Qu’ils apportent un soutien numéraire sur les zones à défendre (ZAD) ou participent ponctuellement à des actions à des kilomètres de chez eux, des militants écologistes vadrouillent sur les différents terrains de la contestation. Pour combattre les projets qu’ils jugent nuisibles, place à l’ubiquité des luttes !

L © Éric Coquelin

orsqu’il se rappelle de son enfance, Olivier, presque quarantenaire, retrouve un sourire pur. « Mon père était instituteur, on avait une caravane et on partait chaque été deux mois. » Ses parents auraient préféré qu’il fasse des

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ZADDISTES I

études longues, mais Olivier a toujours trouvé satisfaction dans le départ, l’arrachement. Dès l’âge de 16 ans, il quitte la France pour suivre des festivals de musique en Europe, puis en Amérique du Sud. Un esprit « libertaire » qui le conduit à organiser de grands spectacles dans les favelas de Buenos Aires, puis en Colombie en tant que « passeur de culture ». Mais après des années de vie hors de France, il ressent le besoin de retrouver le lien avec son pays d’origine. Ce sera en 2013, dans les Cévennes, où il est un temps en charge d’activités périscolaires. Alors impliqué dans des cercles militants, la mort de Rémi Fraisse résonne en lui comme l’impératif d’un nouvel engagement. « Je découvre le fossé de générations. Dans les années 1990, les jeunes avaient besoin de liberté, festive, mais pas forcément militante. Aujourd’hui, ceux qui sont dans les ZAD n’ont plus envie de faire la teuf. Il n’y a plus autant de liberté et il y a désormais une conscience de l’urgence écologique. » À 34 ans, fort de cette révélation, le militant rejoint les luttes. Pour la défense d’une zone humide dans les Cévennes, puis très vite vers Roybon, en Isère, contre l’implantation d’un Center Parcs. « On investit les lieux le 30 novembre 2014, on obtient de suite l’arrêt du chantier. » Le site devient une « zone à défendre » comme il s’en est créé plusieurs ces dernières années. Des sites qui se nomment Bure, Sivens, Grand

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PASSIONNÉMENT…

ITRE 3 94 • Portrait

Véronique de Viguerie : en quête d’âme sur les terrains en guerre 96 • Point de vue

NÉMENT

Nomades numériques : le monde est leur bureau 100 • Portrait

Damien Le Thiec : global vs local 101 • Fiche pratique

Administration, boîte aux lettres… 102 • Portrait

Samuel Allo : « Troubadour du xxie siècle » 104 • Reportage

Élèves de classe en classe 110 • Fiche pratique

Mes trousses de voyage au naturel 112 • Interview

Gabi Jiménez : « La capitalisation de la vie n’est pas notre raison d’être » 116 • Récit

Un tour du monde à « Pieds Libres »

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NOMADE Un peu, beaucoup, passionnément…

Nomades numériques : le monde est leur bureau Ils travaillent sur leur ordinateur connecté à Internet tout en voyageant à travers le monde. Plus qu’un simple travail à distance, c’est un véritable mode de vie que choisissent les nomades numériques. Autonome, minimaliste et tourné vers l’avenir.

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en Europe, en Amérique du Sud et en Afrique. Cela fait onze ans que je suis digital nomad. » Quèsaco ? Travaillant à distance – et majoritairement à son compte – le digital nomad, ou nomade numérique, en profite pour voyager, contrairement à un expatrié qui, lui, est sédentaire. Il vit au moins six mois de l’année à l’étranger et séjourne dans le pays de son choix pendant quelques jours, semaines ou mois. « Le monde est mon bureau » : telle pourrait être sa devise ! Un ord inateur et u ne connex ion Internet pour se relier au reste de la planète, voilà les deux outils indispensables au nomade numérique. Rédacteur web, assistant virtuel, blogueur, animateur de communautés en ligne, créateur d’applications mobiles, monteur vidéo, développeur web, traducteur, graphiste, coach, formateur en ligne, e-commerçant, musicien, photographe, etc. La liste des professions exercées par le nomade numérique est longue comme un code informatique. Sans oublier les métiers qui restent à inventer. En effet, selon le think tank californien Institute for the Future (Institut pour le futur), 85 % des emplois de 2030 n’existent pas encore aujourd’hui. Comme nous y invite le pédagogue britannique, fondateur du Schumacher College, Satish Kumar :

TRAVAIL : DIGIT

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alagan souffre de « routinophobie » : « Je fuis le mode de vie sédentaire du salariat, de la propriété et de la consommation de masse. » C’est depuis le Mexique que ce Français de 35 ans, webmaster de profession, répond à nos questions : « Je séjourne dans ce pays six mois de l’année. Le reste du temps, je voyage :

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Fiche pratique

Administration, boîte aux lettres…

RATIQUE Courrier

Départ en France, à l’étranger… Si vous décidez de quitter votre domicile pour de longues semaines ou définitivement, veillez à bien résilier tous vos abonnements (eau, électricité, etc.) et contrats d’assurance avant de partir. De plus en plus de services peuvent être dématérialisés via Internet. Très rapidement, vous pouvez faire fondre votre pile de courrier. Vous pouvez aussi signaler à La Poste un changement d’adresse et faire suivre votre courrier à une autre adresse.

TRATION, X LETTRES…

Déclaration de revenus en ligne, changement d’adresse, porte-documents pour stocker des justificatifs et des attestations : le site www.servicepublic.fr est devenu incontournable pour réaliser les différentes démarches nécessaires quand on est nomade. La création d’un compte facilite les échanges avec l’administration. De son côté, le ministère des Affaires étrangères a établi une check-list pour préparer son expatriation : par exemple, vérifier la validité des visas de séjour, faire le point avec son médecin sur les vaccinations recommandées, informer les impôts de son changement d’adresse, demander au besoin un permis de conduire international auprès de l’Agence nationale

© Yann Colin

L’état en ligne

des titres sécurisés (ANTS)… Si vous séjournez quelque temps dans un même pays, il est fortement recommandé de s’inscrire au registre des Français établis hors de France auprès du consulat dont vous dépendez. Et également sur la liste électorale consulaire qui vous permettra de participer aux scrutins nationaux. Et bien sûr, vérifiez que votre passeport ne périme pas à l’approche ou au lendemain de votre départ. Retrouvez toutes les informations pratiques sur service-public.fr, rubrique « Étranger ». Et sur place, dans les ambassades et consulats français. M. P.

L E SOU F F L E N O MADE 101 KAI ZE N


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NOMADE Un peu, beaucoup, passionnément…

Élèves de classe en classe

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De par l’activité itinérante de leurs parents ou parce qu’ils n’ont pas de domicile fixe, de nombreux enfants suivent une scolarité loin des salles de classe traditionnelles. Une scolarité qui s’inscrit souvent en pointillés.

scolarisation et à l’éducation des enfants tsiganes (ASET), elles n’ont pas d’établissement attitré et font classe dans deux camions-école blancs joliment décorés de lettres multicolores qui intriguent les passants. À la rencontre des publics éloignés de l’école. Des Tsiganes, des Gitans, des Manouches, des Roms : autant d’enfants de communautés et de cultures différentes, mais unis par l’envie de suivre, comme leurs camarades du même âge, une scolarité ordinaire. « Notre cœur de cible historique, ce sont les enfants du voyage. Des enfants qui parlent français le plus souvent, vivent en caravane ou bien dans des bidonvilles. Ils sont parfois inscrits dans les écoles environnantes ou n’y vont pas en raison de freins culturels », explique Odile, en poste depuis 2000 au sein de l’association. À la rentrée 2018, elle a été rejointe par sa nouvelle collègue Raphaëlle. Avec leur école mobile, les deux maîtresses se d é p l a c e nt a u x q u a t r e c o i n s d u département du Rhône. Le matin dans une ville à la rencontre de populations roms, l’après-midi avec des enfants de familles migrantes. Depuis des années, les deux institutrices interviennent également une fois par semaine pour l’association Forum réfugiés auprès de demandeurs d’asile et de jeunes mineurs non accompagnés pour qui la langue est

ÉCOLE DES

© Jérémy Pain

as de portail à l’entrée de l’école, pas de cour de récréation ni de longs couloirs aux porte-manteaux. Pas de doute, nous ne sommes pas dans une école classique. Pourtant ici aussi, on peut saisir des bribes de voix d’élèves, mais aussi de maîtresses. Odile Sapin et Raphaëlle Vignal ne sont pas des professeures comme les autres. Employées par l’Association d’aide à la

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NOMADE Un peu, beaucoup, passioNnément…

Fiche pratique

Mes trousses de voyage au naturel

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Pour alléger son sac à dos, tout comme son empreinte écologique, voici une liste des produits respectueux de l’environnement à glisser dans ses trousses de toilette et à pharmacie.

La trousse de toilette

LA TOILETTE + TROU Brosse à dents : Pour un brossage au poil,

Savon : en plus de servir à nettoyer le corps, le savon « all-one » du Dr. Bronner fait aussi office de shampoing, mousse à raser, lessive, liquide vaisselle ou même dentifrice. Bref, ce savon, c’est vraiment du tout en un ! Autres bonus : il est bio, naturel, végane, issu du commerce équitable et zéro déchet.

respectueux de l’environnement, on choisit une brosse à dents à tête rechargeable.

Déodorant : là encore, c’est du solide : le déodorant compact à l’huile essentielle de palmarosa s’attaque aux mauvaises odeurs tout en laissant la peau respirer.

Shampoing : si le savon « couteau suisse » du

Lingette lavable : fini les ribambelles de rondelles de coton, emballées de plastique, qui atterrissent à la poubelle. Pour voyager minimaliste, on se lave le visage à l’eau claire avec une lingette en tissu réutilisable.

Dr. Bronner n’est pas adapté à votre nature de cheveux, choisir un shampoing solide naturel. Parmi ses avantages, son impressionnante longévité.

Dentifrice : ceux que « l’haleine de savon » rebute opteront pour l’écologique dentifrice compact.

Coupe menstruelle : d’après l’ouvrage Famille zéro déchet, Ze guide, une femme utilise entre 10 000 et 15 000 produits menstruels au cours de sa vie. Une alternative : ce petit récipient en silicone souple réutilisable, léger à transporter.

© DR

Cotons-tiges : sans attendre leur interdiction à la vente, prévue en janvier 2020, on remplace les boîtes de cotons-tiges par un bâton nettoyeur d’oreilles écologique en bambou.

KAI ZE N 110 HORS-SÉ RI E N °13


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ESPRIT NOMADE En route vers la sobriété heureuse… Savez-vous qu’à l’échelle de l’histoire de l’humanité, nous avons été nomades 99 % du temps ? Ce n’est qu’après des millions d’années d’itinérance que nos ancêtres ont progressivement stoppé leur marche. Quelques millénaires d’adaptation et de sédentarisation plus tard, le nomadisme est passé de mode de vie naturel de l’être humain à mode de vie d’exception…

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Aujourd’hui, pourtant, avec l’émergence de nouvelles formes de mobilité, d’échange, de partage, l’esprit nomade connaît un second souffle. En solo, en famille, au travail, en vacances, à pied, à vélo, en van, en Tiny House… l’esprit nomade contemporain se décline selon les moyens et envies de chacun : un peu, beaucoup, passionnément !

4 DE COUV

Il nous invite à nous délester du superflu, nous alléger du matériel et à tendre vers le spirituel. À nous mettre en route vers la sobriété heureuse. Quel que soit votre degré de nomadisme, laissez-vous inspirer par les reportages, portraits, fiches pratiques, etc. de ce hors-série. Et n’oubliez pas de le glisser dans votre sac lors de votre prochain périple !

9-791-093-452-357

« Pour voyager heureux, voyagez léger. » Antoine de Saint-Exupéry


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