Un monde analogique

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iV L’ombre d’un doute

On a beau se moquer de rêveurs, ils ont ce qui manque à beaucoup : la force et la conviction… Graham Greene

Le système analogique peut engendrer quelques méprises. J’ai signalé déjà, dans le récit de La Mémoire absolue, que je niais avoir raconté moi-même l’histoire d’un homme fusillé sur une digue de Noirmoutier dans Le Fauteuil rouge, alors qu’il n’y avait que moi, à cette époque, qui puisse connaître l’exécution du général vendéen Louis Gigost d’elbée dans l’île en 1794, et le tableau qui se trouvait dans l’escalier de la Citadelle. Je me suis beaucoup penché sur le phénomène de la mémoire et de l’oubli. et je pense aujourd’hui à une obsession de cette nature. Je veux absolument que L’Ombre d’un doute soit le titre d’un roman de Graham Greene, alors qu’il s’appelle en réalité Le Ministère de la Peur. L’Ombre d’un doute, de 1943, est bien un film d’alfred hitchcock, et le film tiré du Ministère de la peur est réalisé par Fritz Lang à la même date de 1943. Le Ministère de la peur est l’histoire d’un homme qui s’égare dans un quartier de Londres sous les bombardements. il entre dans une fête foraine. il consulte une Voyante, puis il gagne à une loterie un énorme gâteau qui contient en fait des microfilms destinés aux Nazis. il est recherché et persécuté par les espions et leurs sympathisants allemands et britanniques. enfermé dans une clinique, il oublie jusqu’à son nom. hitchcock pourrait ne rien avoir à faire dans cette histoire, mais il avait tourné en 1935 un film intitulé Les Trente-neuf marches, avec un monsieur mémoire qui dirige une bande d’espions pour les mêmes raisons.

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