Journal des avocats - N°12

journal des avocats - N째12

E D I T O R I A L

Imagination… évasion De tous nos voyages nous rapportons des images, et avec un peu d’imagination, des rêves, de beaux moments d’évasion. Nous en gardons toujours quelque chose, un souvenir acheté ou reçu, une image mémorisée à jamais, une photo prise ou un film réalisé. Nous aimons les conserver. Toi, ami, je t’imagine confortablement installé, lisant ce numéro 12… Oui, tu lis et tu voyages, tu apprends, tu ris, tu songes, tu rêves, tu te rappelles. En route ! Le monde est beau. Et pour tes quelques heures d’évasion imagine ceci: Imagine-toi à Paris … tu entres dans son bureau !

Imagine… Dieu qui désire organiser des élections Imagine, tu es au bord de mer, tu vois un cadavre Imagine une folle histoire de bad-boy et de vamp Imagine, tu as le pouvoir et la capacité de pouvoir Imagine : poignardant l’espace, des parois d’acier Imagine-toi fils d’un architecte né au 18e siècle Imagines-tu connaître les règles de ta maison…?

Imagine-toi roi…tu as 7 ans, tu apprends le latin Imagine… tu peux voir Verviers et vivre encore !!!

Imagine que tu ne saches pas écrire sans fautes Imagination et création d’évasion à chaque page.

Nous l’avons imaginé, créé, édité ce journal des avocats… avec une seule et même conviction : vous devrez le garder toujours ou en conserver le meilleur souvenir !

Myriam Robert-César Alligators & Cie

Meilleurs vœux pour 2014

- le journal des avocats -

Imagine un peu…

Imagination ardente, brillante, brûlante, capricieuse, confuse, débordante, débridée, délirante, démesurée, déréglée, désordonnée, enfiévrée, exaltée, excessive, exubérante, fantastique, fertile, forte, passionnée, vive… Imagination divagatrice, errante, vagabonde… Imagination médiocre, défaillante, épuisée, faible ! Imagination enfantine, populaire, puérile… Imagination puissante, sans borne, sans frein, en délire ! Manque d'imagination, efforts d'imagination, écarts de l'imagination, inventions de l'imagination ; le fruit de l'imagination : caprices, créations, fantasmes, fantômes, fictions, illusions. Etre dénué, manquer d'imagination ; réfréner son imagination ; agir sur l'imagination ; se laisser emporter par son imagination ; s'abandonner à son imagination ; dépasser l'imagination ! L'imagination colore, déforme, embellit, l'imagination avive, excite, irrite. Trop d’imagination fait craindre, redouter, prévoir le pire, et l'imagination s'échauffe, s'enflamme, s'exalte. Revivre en imagination.

Imagination de la forme, de la couleur, de l’harmonie. Imagination d’un auteur, d’un peintre, d’un compositeur, d’un éditeur, d’un sculpteur. En avoir beaucoup pour éveiller et frapper votre imagination. Un effet de mon imagination ?

MRC

Texte inspiré d’une étude de l’ ATILF / CNRS. Nantes

Sommaire - Inhoud - Inhalt

Du cahier des éditeurs Editorial

Imagine un peu…

Sommaire

La tombola des auteurs

Tous en récré…

Le Voyage à Nantes

Les Grandes Conversations du journal des avocats Dernière interview accordée par Jacques Vergès quelques jours avant son décès le 15 août 2013.

Propos recueillis par François Dessy pour le journal des avocats

Et ensuite, classé par ordre alphabétique du nom de leurs auteurs, les articles suivants : Jean-Pierre Babut du Marès

BAB

Croquis et lettres de Ferdinand Rops

Alain Berenboom

BER

Le Peuple réélu

Olivier Bonfond

BON

Un cadavre à la mer

Jean-Pierre Bours

BOU

Le Bad Boy et la Vamp

Roger Chaidron

CHA

"La verticale poignarde le ciel et le sol" - Et l'architecte ?

Stefaan De Clerck

DEC

De Brusselse culturele metropool La métropole culturelle bruxelloise

Herman De Croo

DEC

Pouvoir et pouvoir

Nicole Deprez

DEP

Nicolas de Staël - Mon " Maître" à peindre

Klaus Heinemann

HEI

Couven - Baukunst zwischen Rhein und Maas im 18. Jahrhundert Couven - Architecture entre Rhin et Meuse au 18ième siècle

Patrick Henry

HEN

Les règles de la maison

Alain Jacobs-von Arnauld

JAC

Pages roses

Aurelia Luypaerts

LUY

Voir Verviers et vivre encore

Ghislain Royen

ROY

Le petit Robert Photos

ABC

Où retrouver tous nos auteurs

Des richesses encore à découvrir…

Rijkdom te ontdekken...

Aufzudeckende Reichtümer noch…

La tombola des auteurs PREMIER PRIX : La liste des destinations s’allonge… Après des séjours INOUBLIABLES à Saint Petersburg, Paris, Bruges, Zagreb, Durbuy, Gstaad, Londres,... le journal des avocats offre à nouveau un premier prix formidable au grand gagnant de notre TOMBOLA DES AUTEURS. Un séjour entre tradition et modernité de trois nuits en demi-pension dans une suite au Radisson Blu de Nantes, construit dans l’ancien palais de Justice du 19ème siècle. Nous offrirons également au gagnant 2 City Pass 48h de l’Office de Tourisme « LE VOYAGE À NANTES ».

Ces Pass lui permettront de visiter les sites touristiques de Nantes (dont les Machines de l’île) mais également d’utiliser les transports en commun.

LE NOUVEAU « PALACE » DE NANTES, la métropole la plus à l’Ouest d’Europe !

DEUXIEME PRIX : Peugeot, acteur incontournable dans la fabrication de moulins de table et d’accessoires dédiés à la dégustation du vin, nous propose pour un gourmet, épicurien ou amateur de beaux objets, un coffret Peugeot...High Tech en trio présenté dans un magnifique écrin, un cadeaux prestigieux pour faire sensation !

LES SAVEURS de PEUGEOT: saveurs de vins, saveurs de cafés, saveurs d'épices.

TROISIEME PRIX : Une FERME de 58 pièces en bois laqué.

Réalisée en hévéa, bois de plantation du Sri Lanka. Seul bois sans écharde, sans insecte et sans champignon (grâce au latex). Découpé, poncé et décoré à la main, recouvert de primer et de 3 couches de laque non toxique. UN TRES BEAU CADEAU pour les petits de + de 3 ans

La tombola des auteurs du journal des avocats est toujours très aimablement contrôlée par notre huissier de Justice, Maître Frank SPRUYT, que nous remercions chaleureusement. Les résultats du tirage sont envoyés par email à tous nos auteurs et les heureux gagnants sont Nous souhaitons BONNE CHANCE A TOUS ! également contactés par téléphone pour la remise de leur prix. www.frankspruyt.be

TOUS EN RÉCRÉ…

L'art de cingler !

Au Conservatoire national d'art dramatique, Louis Jouvet, professeur, à François Périer, jeune élève : - Si Molière voit comment tu interprètes ton Don Juan, il doit se retourner dans sa tombe.

Et Périer de répliquer du même ton : - Comme vous l'avez joué avant moi, ça le remettra en place.

Anna Tyskiewicz, future comtesse Potocka, cachait avec soin un strabisme divergent. Mais Talleyrand, le plus célèbre pied bot de l'Histoire, connaissait cette infirmité.

Un jour, elle s'avisa de lui demander : - Comment allez-vous, Prince ?

- Comme vous voyez, madame, répondit Talleyrand.

"Un cheval, mon royaume pour un cheval", déclamait un acteur.

- Un âne ne suffirait pas ? lance un spectateur du balcon.

- Mais bien sûr, descendez donc, cher monsieur!

Cindy Crawford à Amanda Lear : - Merci de m'avoir envoyé votre livre, je l'ai adoré. Mais dites-moi, qui vous l'a écrit ?

Réponse d'Amanda Lear : - Je suis ravie que vous ayez apprécié mon livre. Mais dites-moi, qui vous l'a lu ?

Diogène, à un chauve qui l’insultait : - Je ne vais pas être insolent envers toi, mais je félicite tes cheveux d’avoir abandonné une sale tête.

Du cahier de l'éditeur

C’est du Business ça ?

Le père : Je vais te marier avec la fille de mon choix Le fils : Non Le père : C’est la fille de Bill Gates Le fils : Alors OK Un député : - Monsieur Churchill serait-il en train de dormir pendant que je parle?

Churchill : - Si seulement !

La belle Isadora Duncan poursuivait de ses assiduités Georges Bernard Shaw, qu'elle admirait sans réserve. Un jour, elle lui murmura, œillade appuyée : - Quel miracle ce serait d’avoir un enfant ensemble.

Imaginez qu’il ait ma beauté et votre intelligence !

- Bien sûr, mais supposez que ce soit le contraire ! répliqua Shaw..

Le maréchal va beaucoup vous manquer, dit-on à l’épouse du Maréchal de Boufflers après qu’il eut décédé.

- Peut-être. Mais au moins, je saurai où il passe ses nuits, réplique-t-elle.

Monsieur de Rivarol, combien d’années me donnezvous ? Demandait une vieille coquette à l’homme célèbre.

Réponse : - Pourquoi vous en donnerais-je, Madame ?

N’en avez-vous donc pas assez ?

A la fin d'un dîner organisé par Winston Churchill, le maître d’hôtel du héros de la guerre présente la cave à cigares aux invités. L’un d’entre eux, sans le moindre scrupule, en prend cinq, les met dans sa poche et déclare : - C’est pour la route.

- Merci d’être venu d’aussi loin, lui lance Churchill.

….le père va à la rencontre de Bill Gates : Je veux que votre fille soit la femme de mon fils Bill Gates : Non Le père : Mon fils est le CEO de la banque mondiale Bill Gates : OK Le père va voir le PDG de la banque mondiale : Je veux que mon fils soit le CEO de votre banque Le PDG : Non Le père : C’est le mari de la fille de Bill Gates Le PDG : Alors OK

Si un jour…

Si un jour je couchais avec ta femme, on serait toujours amis ?

- Non. On serait des ennemis ?

- Non. On serait quoi alors ???

- On serait quitte.

Entre tradition et modernité C’est en 2000 que le palais de Justice de Nantes a cessé d’assurer les fonctions pour lesquelles il avait été construit en 1851, au coeur d’un quartier de Nantes comprenant également la maison d’arrêt et la caserne de la gendarmerie. Depuis le départ des tribunaux vers le nouveau palais de Justice sur l’Ile de Nantes, le bâtiment était totalement inoccupé.

Au printemps 2004, le ministère de la Justice en a rendu les clés au Conseil général de Loire-Atlantique. Quelque peu abîmé par les années écoulées sans mise aux normes ni occupation, le bâtiment conservait son caractère prestigieux et une grande fonctionnalité. Son emprise foncière de 5.611 m², ses 10.000 m² répartis sur quatre niveaux et son square attenant en faisaient un des bâtiments historiques incontournables de la ville. Sa situation sur la place Aristide Briand, dans le centre de Nantes, dans un quartier avec un tissu commercial diversifié et une qualité de vie résidentielle certaine, était un des atouts de ce bâtiment abandonné.

LE PLUS BEL HÔTEL HISTORIQUE DE NANTES UN BÂTIMENT UNIQUE AU COEUR DE LA VILLE

L'architecte Jacques Cholet et célèbre décorateur Jean-Philippe Nuel y ont vu l’opportunité d’aménager un hôtel dans des espaces non-conventionnels en termes de volume comme en termes de style, c’est aussi la possibilité d’un dialogue entre deux écritures architecturales : l’une historique et l’autre résolument contemporaine.

De ce jeu de contrastes, naîtra le projet qui devra assumer sa nouvelle fonction, dans ce lieu chargé d’histoire. Le maître mot de ce nouvel établissement est la satisfaction du client avant tout. Cette gageure et l’attitude du personnel qui en découle sont les marques de fabrique de la chaîne hôtelière Radisson Blu. Doté de 142 chambres (dont 20 suites), d’un restaurant gastronomique de 80 couverts, d’un spa, d’un lounge bar et de nombreuses salles de séminaire, ce « monument » a ouvert ses portes il y a un an. “Si la priorité de l’hôtel est d’accueillir ses clients, ce beau bâtiment fait partie du patrimoine architectural de Nantes, rappelle Cyril Casabo, directeur général de l’établissement. A ce titre, il entend s’ouvrir aux habitants de la ville et jouer un rôle dans la vie locale, devenir un lieu de rencontre incontournable.”

QUAND RENAÎT UN GRAND MONUMENT

Le Voyage à Nantes : chaque année, de nouveaux sites à découvrir !

Vous pensiez connaître la métropole la plus à l’Ouest de l’Europe ?

Vous n’avez encore rien vu !

Château des ducs de Bretagne, Grand Éléphant et Carrousel des Mondes Marins aux Machines de l’île, Mémorial de l’abolition de l’esclavage, lieu unique, Passage Pommeraye, parcours d’art contemporain Estuaire Nantes, SaintNazaire, La Fabrique…

Venez découvrir Le Voyage à Nantes, un monument dispersé d’une trentaine d’étapes réunies en un parcours urbain insolite et poétique à seulement 60 km de l’Atlantique. Laissez-vous conduire d’une oeuvre signée par un grand artiste d’aujourd’hui à un élément remarquable de notre patrimoine, d’une ruelle historique à une architecture contemporaine.

Information : www.nantes-tourisme.com

La Maison dans la Loire - Jean-Luc Courcoult © Bernard Renoux Château des ducs de Bretagne © Martin Argyroglo Le Carrousel des Mondes Marins et l'éléphant. Les Machines de l'île © Nautilus Les Anneaux, Daniel Buren et Patrick Bouchain © Patrick Messina

LES GRANDES CONVERSATIONS DU JOURNAL DES AVOCATS

François Dessy fut orateur de la rentrée solennelle du barreau de Huy en 2010 « Voltaire : La douce insurrection de l’ironie » et lauréat de divers concours d’écriture. Il voudrait moins souvent casser sa lyre… plus souvent prendre sa plume et s’envoler, épitoge au vent… sous d’autres cieux. Porté par le doux zéphyr de la curiosité. Sans suivre les autres alizés, forcément contraires… en voilà un beau rêve ? Le lecteur retrouvera la précédente interview de François Dessy, “Petite exploration chez et avec Robert Badinter”, dans le numéro 9 du journal des avocats.

le journal des avocats

Maître Jacques Vergès à Amiens, le 26 novembre 2010. (PHOTOPQR/LE COURRIER PICARD)

DES

Louis Antoine de Saint Just. (25 août 1767- 10 thermidor an II (28 juillet 1794)

1.Coups et blessures : 50 ans de secrets partagés avec François Mitterrand, éd. Le Cherche-midi, 2011. Les extraits encadrés de Talleyrand sont tirés de l’ouvrage suivant : « La confession de Talleyrand. 1754-1888 », éd. L. Sauvaitre, Paris, 1891 2.(1899-1983) Professeur d’histoire, homme politique de droite (MRP), et résistant.

le journal des avocats

Ce « salaud lumineux, maître de l’ombre, avocat du diable, ce mercenaire du droit », redouté ? Ou cet orateur du désespoir, cet amoureux de la dignité perdue, ce pourfendeur à perpétuité de l’injustice, cet évangéliste de la libre pensée, objecteur de conscience, abstracteur de quintessence humaine, louangé ? « Ceux qui parlent ne savent pas, ceux qui savent ne parlent pas ». L’avertissement de Talleyrand est connu et nous, guère plus avancés.

Nous pénétrons dans l’univers du Sérial plaideur, baignons toujours dans cette sombre clarté cornélienne. Son bureau est l’exact reflet du personnage : un splendide clair-obscur ? Un vaste tableau digne de Rembrandt, faussement calme ?

Un incroyable champ de bataille intellectuel où sont dressées, tranches au clair, d’immobiles armées de livres, au garde à vous, en signe de capitulation devant leur envahisseur quotidien – au terme d’un long siège de la pensée – avec lequel ils vivent désormais en bonne - et même exceptionnelle - intelligence. Ces soldats barbouillés d’encre, des Cicéron aux Dostoïevski, au grand complet, ont visité tous les siècles, embaumant la citadelle de papier, assoupie, d’un parfum intemporel.

Statues, totem, figurines et masques ouvragés, de toutes tailles et tous continents, complètent le tableau et veillent, croirait-on, en vestale possessive et imperturbable, sur leur donataire. Y a-t-il une âme en chaque chose entreposée ? Toutes semblent y célébrer le vécu extraordinairement dense de leur propriétaire ? Tout s’est joué là. Oui, ici. La valse des clients libérés, le ballet des criminels en sursis, la fin de leur tragédie ou le commencement de leur calvaire. Le joueur d’échecs… humains, manipulant ces âmes en lambeaux, ces morceaux d’existence - déjà avortée ou non encore abrégée par la sentence, est là. Face à nous. Bling bling, plouc plouc, rois et reines déchus, cavaliers en déroutes, fous dangereux ou simples pions que la justice veut damer, parias d’un jour ou de toujours, se sont succédés devant lui. Et sous le regard insoupçonné, sévère et inquisiteur d’un autre comparse - dont le portrait orne discrètement la bibliothèque. Louis Antoine de Saint Just ! Toujours de la partie.

L’archange et l’avocat de la terreur se donnant l’accolade. La boucle, mes Chers Confrères, est-elle bouclée ? Vergès irréductible anticolonialiste, défenseur de toutes les indépendances, conseil paradoxal de Claus Barbie, Saddam Hussein, Milosevic ou Khieu Sampan, suppôt de l’oppression barbare ? Saint Just, libertin puis zélateur de la vertu, apôtre ardent d’une société fraternelle et membre du Comité de Salut Public, pourvoyeur de la guillotine ? Les deux hommes sont aussi insaisissables qu’une savonnette mouillée pour des mains trempées d’huile. L’héroïsme intransigeant du dandy les rapproche. La contradiction et la subversion paraissent les réunir ? Ne vous fiez pourtant pas aux apparences. Ces « aristocrates du refus, du courage » pourraient vous surprendre.

Ils sont tous deux ennemis « des ennemis de la liberté » et ennemis du mensonge.

Quelle est toutefois leur vérité ? Bienvenue au royaume de l’Incernable, de l’Incunable, de l’Inclassable. Tâchons d’en cerner le Roi. Echec et mat Maître Vergès ? A vous de jouer…

Une conversation vaut mieux que mille supputations. Un test d’humeur, mieux que mille rumeurs. Une vraie figure, mieux que mille caricatures. Âmes non sensibles s’abstenir…

RIM DES

le journal des avocats

François Dessy – Maître Vergès, je vous remercie d’avoir accepté cette rencontre à l’initiative d’un journal belge « LE JOURNAL DES AVOCATS ». Votre notoriété dépasse évidemment toutes latitudes, votre réputation n’est plus à décrire. Vous venez de sortir un dernier livre, autobiographique, paru il y a quelques semaines intitulé « De mon propre aveu ». Nul besoin de polygraphe. L’on vous sait adversaire de toute langue de bois. Cet aveu, circonstancié s’il en est puisqu’il n’occupe pas moins de 300 pages, révèle, si besoin en est encore, une vie dense, trépidante, sinueuse, rythmée par des combats avant même d’endosser la toge. Combats militaires d’abord. A quel âge vous êtes-vous engagé, dans quelles circonstances et pour quelles raisons ?

Jacques Verges – Alors, je me suis engagé, on m’a engagé plutôt. Vous savez, je suis né d’un père de l’Ile de la Réunion et d’une famille d’origine européenne, moitié catalane et moitié bretonne et d’une mère vietnamienne. Mon père était médecin et consul de France au Siam, c’était le nom de la Thaïlande à ce moment-là et ma mère était institutrice. Déjà c’était une mésalliance quand un blanc épouse une jaune, c’était inadmissible chez nous surtout quand il présentait ou représentait la France.

Mon père est rentré de l’Ile de la Réunion pour s’occuper des funérailles de son père et ma mère est morte. A ce moment-là, j’avais 3 ans et j’ai été élevé par mon père et par ma grande tante. Ceci veut dire que dès l’enfance, je me suis senti différent.

FD – Et vous avez cultivé votre différence comme dirait Jean Cocteau ?

JV – Oui, je ne l’ai pas vécue comme beaucoup de ceux qui ont fait des bêtises à l’époque et vivaient avec un complexe d’infériorité. J’ai vécu avec un complexe, disons-le, de supériorité. En me disant, je suis double, je suis européen. Mais je suis aussi d’Asie et par conséquent, les règles qui s’appliquent aux autres ne peuvent pas s’appliquer à moi de la même manière. Quand la France a été battue en 40, j’ai éprouvé beaucoup de chagrin, de peine. Je me disais que ce serait dommage que la France, avec tout ce qu’elle représente, disparaisse et je pensais, comme d’Annunzio, que sans la France, le monde serait seul.

FD – La France oppressée, la France-libre. Vous étiez donc Gaulliste !

JV – J’étais effectivement gaulliste à 15 ans, j’étais en 1ière dans un lycée. A 16 ans, j’ai passé mon bac et à 17 ans, j’ai pu m’engager. Ce qui me plaisait, c’était de continuer le combat pour la France mais sous les ordres d’un Général condamné à mort. Ce qui à mon avis, était la preuve suprême de sa supériorité. C’était un homme, comme le disait Bernanos, un général à titre provisoire. Il ne représente aucun groupe s’il part à l’étranger, lever une armée de volontaires cela ne s’est jamais vu dans l’histoire de France. Les Gaullistes venaient du monde entier rejoindre De Gaulle. Nous n’étions pas nombreux : 15.000 peut-être. J’avais le sentiment d’appartenir à « une élite ».

Ce qui m’a plu aussi, c’est que je l’ai fait au niveau le plus bas. Soldat, caporal et j’ai terminé comme sergent. Défenseur de la France libre, j’acquiers une assurance très grande, je ne vais baisser les yeux devant personne : un président, un secrétaire fédéral, un Roi. FD – Donc combat militaire d’abord puis viennent ensuite vos combats estudiantins et idéologiques.

JV – Oui, la guerre terminée en 45, j’adhère au Parti Communiste. Parce que la France va s’engager dans des expéditions coloniales pour reconquérir les pays colonisés.

Le colonialisme défigurait le visage de la France, celui de la lucidité tant admirée par Nietzsche et des Grands rêves célébrés par Goethe. J’ai pour tâche de militer, lutter contre la répression à Madagascar, en Côte d’Ivoire et au Sénégal. De cette époque remontent mes premiers contacts avec Pol Pot, Khieu Samhan (Président

RIM DES

du Kampuchéa d’alors), Houphouët Bobigny (NDLR président du Sénégal.). On va rencontrer ce que l’on appelle les fachos. Et ce sont des bagarres Bd Saint Michel.

A Prague, l’Union Internationale des Etudiants a entendu parler d’une manifestation à Paris. Nous participons au congrès de 1950. Notre groupe venu de Paris s’est fait remarquer parce que nous avions un double avantage. D’une part, nous avions vécu le système colonial, mais d’autre part, nous vivions en Europe et nous suivions le grand débat idéologique qui se développait. Nos interventions ont donc été très appréciées et à la fin du Congrès, Joseph Groman, Président de l’Union Internationale, un tchèque, me dit : « Jacques, tes camarades (NDLR les soviétiques) pensent à toi, on va réunir le Bureau, tu vas être membre du Bureau. » FD – Vous jouez durant ces années, les Phileas Fogg d’obédience communiste : d’incessants voyages avec son cortège de rencontres.

JV – Oui, je deviens de 50 à 54 un révolutionnaire professionnel. J’habite Prague, je vais dans toutes les capitales d’Europe, Londres, Sofia, Bucarest, Amsterdam, Stockholm, … m’adresser aux étudiants, à Bruxelles. On va décorer la tombe de Francisco Ferrer,... Je participe à la Saint Verhaegen chaque année.

FD – « prétexte à des beuveries sans nom, ajoutez-vous dans votre livre : on sait joindre l’utile à l’agréable…en Belgique ! « On fantasmait sur les saunas mixtes de Finlande », écrivez-vous aussi. Il y a pire comme Kolkhoze. C’est un euphémisme (rires).

JV – Puis je vais à Moscou, Pékin, Delhi, j’y prendrai notamment le thé avec Indira Gandhi, Nehru…

FD –Derniers combats et non des moindres. Evoquons vos premiers combats judiciaires.

JV – J’avais fait des études d’histoires et de langue orientale. J’aurais eu une bourse CNRF pour aller déchiffrer l’Etrusque, j’aurais été « comblé ».

FD – Les grimoires poussiéreux, la belle affaire ! Vous avez préféré les prétoires tumultueux…

JV – Sourire en coin… Je fais du droit international, je termine mes études de droit et m’inscris au Barreau en 55. Je n’ai pas une attirance particulière, je n’ai pas de répulsion non plus. Je me dis c’est un métier honnête où je serai libre. Et en 57, je suis stagiaire, les vieux caciques de l’indépendance des coloniaux qui depuis 45 c’està-dire depuis 12 ans se battent en Afrique du Nord, en Afrique Noire, en Indochine, me demandent de les substituer pour certains projets.

FD – Fort de votre titre de premier secrétaire de la Conférence du Barreau de Paris…

JV – C’est vrai. Et donc là, je vais à Alger. Et là, c’est un moment capital pour moi. Je constate que tous les caciques se sont trompés. Et là je leur dis je trouve que vous faites erreur. Il n’y a pas de dialogue possible avec les juges militaires, pour eux, l’accusé est un Français, donc j’avais une association de malfaiteurs et non pas de résistance.

FD – C’est là que vous conceptualisez, expérimentez la défense de rupture?

JV – Mieux valait la rupture que la connivence, à défaut de dialogue. Etes-vous coupable ?

Demandait-on à l’accusé. L’accusé répond à cela que l’Algérie était la France, mais l’histoire montre que l’Algérie n’est pas la France, je ne suis pas français. Vous me considérez comme un criminel. Je me considère comme un patriote. Par contre s’il y a des criminels ici, c’est vous. Parce qu’il y a un maintien par la force dans ce pays

le journal des avocats

d’un système colonial .Vous allez me condamner à mort, et je dis empêcher les juges de le condamner à mort n’est pas possible. Par contre, le condamné à mort ne peut pas être exécuté sans l’accord du chef de l’Etat et lui est sensible à l’opinion. Je monte à la tribune pour m’adresser à l’opinion.

FD – Sans renier votre insolence proverbiale d’alors, lorsque vous quittez, par exemple, la salle d’audience d’Alger pour faire un communiqué de presse à Paris.

JV – Oui. J’avais critiqué le déroulement du procès à partir d’une citation de Clémenceau, « la justice militaire ressemble à la justice comme la musique militaire ressemble à la musique ». Cet aller retour a jeté le trouble, m’a permis de toucher un public plus vaste. Quitter un procès avant de le regagner n’est certes pas prévu par le Code mais pas interdit non plus. Surtout quand dans l’intervalle, le Tribunal a commis pour me remplacer un partisan de l’Algérie française, preuve une nouvelle fois d’une conception pour le moins curieuse de la neutralité.

FD –Vous dites « l’âme de ma stratégie était d’abord la médiatisation »… de l’injustice.

Une sorte de « médiamorphose » du procès pour transcender l’incommunicabilité du procès, une déflagration pour répondre à la mise sous silence, aux brimades ?

JV – Exactement. Tout cela était également à l’œuvre dans l’Affaire Jamila Bouhared.

Il y a des moments dans l’histoire où l’histoire est cruelle, et pose carrément des problèmes. A cette époque-là, est jugé à Paris un nommé Ben Sadok, un jeune algérien qui a tué, je pourrais dire exécuté, un collaborateur du nom d’Ali Chekkal, vice-président de l’Assemblée Nationale Algérienne. Et son avocat qui est un vieux cacique, Stibbe, socialiste dissident, grande figure des années 30, pense que s’il plaide que Ben Sadok était membre d’un commando, qu’il exécutait un rôle, il serait condamné à mort. Et il veut éviter cela en présentant Ben Saddok comme un homme solitaire, ce qui n’est pas le cas, qui réprouve les attentats aveugles qui ont eu lieu à Alger dans des cafés, des restaurants et qui n’est même pas d’accord avec la politique du FLN. Mais dans cette période trouble, se décide à tuer Ali Chekkal.

Stibbe arrivait à avoir des témoignages comme celui de Sartre et aussi réducteur que cela paraisse, Sartre va comparaître, Ben Sadock offrait selon lui une analogie saisissante avec Charlotte Corday. Ben Sadock évitera la peine de mort. Mais pendant que Ben Saddock plaide ceci ou plutôt son avocat plaide ceci pour lui, à Alger, il y effectivement une jeune femme qui est condamnée à mort pour avoir posé des bombes et qui attend d’être exécutée. Jamila. J’avais plaidé la rupture dans des conditions personnellement difficiles puisque mon père est mort. Et mon père voulait que je vienne le voir sur son lit de mort et je n’ai pas été. J’ai été au procès. Seul moi pouvais plaider cette rupture.

FD – Vous deviez être terriblement tiraillé. Le tirailleur tiraillé.

JV – Et donc, ce que j’ai fait en rentrant à Paris de ce procès, un confrère membre, partisan de l’Algérie, un adversaire politique, mais entre nous, nous avions des rapports de courtoisie, même d’amitié. Ce confrère me dit je ne suis pas d’accord avec vous sur ce que j’envisage pour l’avenir de l’Algérianité. Mais pour le procès bravo. Tu ne peux pas imaginer. Par contre, je te pose une question Jacques. Tiens-tu à la vie de ta cliente ? Plus qu’à la mienne, lui dis-je. Le confrère me dit alors : « Je te mets en garde parce que les autorités en Algérie ont promis sa tête à mes amis ».

Du coup, après des heures de plaidoiries, des plaidoiries écrites, je les ai publiées aux Editions de Minuit et adressées au Général De Gaulle.

FD – Qui vous envoie en retour, expliquez-vous dans votre livre, une aimable réponse.

JV – « (…) Tout drame français est un monde de drames humains. Vous avez raison

RIM DES

de ne pas les cacher. Votre éloquente sincérité ne peut laisser personne indifférent. A mon fidèle souvenir ». Et avec ça, j’étais sûr qu’elle allait sauver sa tête. Les militaires faisaient la cour à De Gaulle . Au printemps 58. Jamila est graciée. Si elle avait été exécutée, Stibbe aurait pu dire vous voyez comme la défense de Vergès est « brillante ».

L’histoire ôtait son masque, le FLN approuvait l’intransigeance de notre défense et sanctionnait la défense complaisante de Stibbe, le FNL a destitué tous les caciques.

FD – J’ai une autre question. Est-ce à ce moment-là que vous échappez vous-même à la mort, à un attentat commandité ?

JV – Ces procès que j’appelle de rupture ont intéressé l’opinion mondiale. Le premier Ministre, Mr Debré dit « Ils font plus de mal à la France, qu’une division armée » et il fait exécuter ces avocats. Et pareil, mon confrère Ould Aooudia est exécuté. Et l’homme qui exécute ça, Monsieur Muelle, colonel de réserve aujourd’hui, reconnait dans un livre et aussi dans une interview à la télévision que j’étais sur la liste et que si je suis vivant, c’est qu’il y a eu un accroc. La voiture qui me poursuivait est tombée en panne.

FD – Finalement, le premier Ministre trouve un expédient pour vous mettre sur la touche.

JV – Evidemment, lorsqu’on veut jouer les incendiaires, rien d’étonnant dès lors que l’on essuie un retour de flamme. Avant que se termine la guerre, je vais être suspendu un an pour outrage, le Roi du Maroc, Mohamed IV, m’invite comme conseiller du Ministre des Affaires Africaines. Mais chacun de mes revers, je les ai vécus comme une victoire…

FD – Vous récupérez votre bavette, apposez votre plaque à Alger et fondez avec celle qui est devenu votre femme, Jamila Bouhared, un journal.

JV – L’hebdomadaire Révolution africaine sera un énorme succès. Je rejoins ensuite Paris où j’annonce la sortie de « La Révolution », qui sera un mensuel …

FD – La propagande journalistique vous réserve d’inoubliables rencontres ?

JV – Pendant 2 ans, j’ai rencontré plusieurs fois Mao. « L’amour camarade est toujours subversif » m’a-t-il glissé un jour. Ernesto Che Guévara, avec qui je vais avoir une brève rencontre, il n’est pas avec nous, il n’est pas contre non plus. C’est lui qui m’a converti au cigare et mené au Sénégal. Et j’ai rencontré aussi des dirigeants maçonniques, des dirigeants indonésiens. Malcolm X. FD – Quelle est votre part d’ombre? Si vous étiez Dorian Gray et que j’étais votre maudit portraitiste ? Que devrais-je peindre ? Nous en direz-vous davantage sur votre disparition durant 8/9 années ? Sur votre tentation de Venise ?

JV – Non, je n’ai pas la tentation de Venise, ça je la laisse aux politicards français.

Ce que j’ai fait à ce moment-là était dans la logique. En 70, je vais partir pour ce que j’appelle mes grandes vacances. Je courais de multiples aventures qui toutes se sont terminées par des désastres. La plupart de mes sont amis sont morts. Un jour, je reçois une visite d’une jeune femme, Fatima Bhutto accompagnée de ses trois enfants, dont le grand-père, Ali Bhutto, a été pendu par les militaires. Ben Azir sera en procès avec Badinter et Moktadar, le fils, était en contact avec moi. Ben Azir choisit la CIA, Moktadar a choisi la lutte armée. Quand les enfants peuvent rentrer au Pakistan, Ben Azir est au pouvoir. Son frère s’y oppose violemment sur le plan politique et un soir, la police sur l’ordre de Ben Azir tue Moktadar devant son domicile.

Ils ne sont pas poursuivis. Fatima Moktadar vient près de moi et nous évoquons nos conversations avec son père, à Damas, le soir. Lui fumant sa pipe, moi mon cigare, rêvant et comme disait le Che, les balles traçantes éclairent le ciel.

le journal des avocats

FD – Quand sortez-vous de l’ombre Jacques Vergès ?

JV – Fin 78. Je n’ai pas un sou, je n’ai que des souvenirs. Je reprends ma robe et je ne peux pas plaider que des affaires politiques. Depuis mon retour, j’ai d’abord plaidé 6 affaires politiques. Il n’y a plus d’affaires politiques aussi nombreuses que durant la guerre d’Algérie. Et là je découvre que le droit commun c’est vraiment notre profession, à condition que l’on voie à quel point la justice s’est trompée. Qu’est-ce qui se passe ? La justice est vécue comme un duel entre l’accusation et la défense.

L’accusation veut la peine la plus lourde, la défense, la peine la plus légère : tous les deux mentent. L’assassinat ne fait pas partie des Beaux-Arts comme le disait Thomas de Quincey, parce que le cadavre est muet et il fait peur, il est énigmatique.

Si vous rentrez chez vous et que vous avez dans votre cour un homme mort avec un poignard. Vous vous dites : qu’est-ce que c’est ? Ce danger pèse sur tout le monde.

Si vous savez la vérité, s’il est l’auteur de l’assassinat, vous expliquez comment il est arrivé à le commettre. Cette affaire devient une affaire humaine. Si on connait le cheminement par lequel quelqu’un commet un crime, on fait une découverte, c’est ce que dit Simenon, le commissaire Maigret : « Quand je suis en face d’un criminel, ce n’est pas le crime qui m’intéresse, c’est ce qu’il y a dans la tête du criminel ».

FD – Et c’est en cela que nous faisons un travail de prévention sociale.

JV – Ça va même au-delà. Dans un cas d’avortement, par exemple. Du point de vue religieux et moral, le fœtus est un être humain : de quel droit peut-on le détruire ? Ça c’est la réflexion que fait l’avocat de la société que l’on appelle le procureur et là au contraire, l’avocat de l’accusé va dire : le nombre d’avortements montre que c’est un problème de société qui est vital. Vous avez tant de vies qui sont brisées. Une étudiante en médecine a dû abandonner ses études pour devenir dactylo. Et je dis que le crime est un signal que la vie donne à la société. Pour que la société les change.

RIM DES

FD - Et c’est ce que vous dites : « l’interdit d’aujourd’hui peut être la règle de demain ».

JV – Vous savez le crime n’est pas quelque chose de bestial mais c’est un signe d’hominisation. Il n’y a pas de violation de la loi chez les animaux. Ils suivent leur instinct. Seulement l’homme viole la loi qu’il prêche.

FD – Et vous avez d’ailleurs une parole remarquable lors d’une de vos conférences : « Il y a des hommes et des hommes, il y a encore des innocents et des déjà coupables ».

JV – De toute évidence. L’infraction fait partie de nous, de la société. Sans l’infraction, la société n’évoluerait pas. Et on voit comment un crime devient un acte patriote salutaire, c’est l’Algérie. Ces gens que l’on traitait de tueur, n’était-ce pas des combattants pour la liberté. D’où la nécessité du travail que l’on doit faire. Le crime pour avoir un sens pour nous doit découvrir la vérité. Si c’est un mensonge, cela ne tient pas debout. Et d’où l’importance que je donne à l’aveu. Contrairement à ceux qui disent n’avouer jamais, je leur dis avouez toujours. Les procès de rupture sont des procès fondés sur l’aveu. Un aveu prudent, l’accusé ne dit pas voilà comment ça s’est passé. Il n’est pas une balance, mais l’accusé, il dit voilà tout ce que j’ai fait.

FD – Il assume sa matérialité des faits.

JV – Et cette défense sert l’accusé parce que mon accusé explique le cheminement qui l’a amené à commettre un crime et l’humanisme du crime puisque c’est un fait humain.

FD – C’est ici qu’on rejoint André Malraux qui disait « Juger, c’est comprendre ».

JV – Je suis d’accord avec vous et vous donne deux exemples. Le premier, c’est un procès qui avait eu lieu fin des années 50, celui de Madame Chevalier. Madame Chevalier est une infirmière, elle a comme amant un jeune étudiant en médecine qu’elle aide. Il réussit ses examens, il l’épouse, ils font de la résistance, il devient ministre, mais c’est une âme médiocre, dans le monde qu’il fréquente désormais, huppé.

FD – Il y a des pesanteurs sociales.

JV – C’est ça et c’est pour ça qu’il a honte de cette femme, dans sa manière de se servir à table. Elle confond Giraudoux et Céline. Lui, la trompe, cesse tout rapport avec elle et demande le divorce. A ce moment-là, les voisins entendent 3 coups de feu. Elle a tué son mari. A son procès, elle va tout avouer Je suis une pauvre fille, je suis une conne, et je pense que cet homme était un homme supérieur et je le pense toujours. Lui en m’abandonnant, c’est comme s’il était mort, ma vie n’a plus de sens.

Je suis perdue. L’avocat général sent le danger. Il sait que l’aveu a fait du crime un roman, et même un mélodrame.

FD – Comme vous de vos crimes (décryptés), un roman « De mon propre aveu ».

JV – L’avocat général dit aux jurés, mais je vous mets en garde, ce n’est pas ici le roman que je vous demande, c’est une condamnation d’un crime réel. Et elle a été acquittée à l’unanimité.

FD – Moralité : l’avocat est le garant de l’aveu.

JV – Pas toujours, ce besoin de se confier existe spontanément, c’est comme l’écrivait Simenon dans « Lettres à mon vieux », le Docteur Alavoine, écrit au Juge, non pas pour lui reprocher sa condamnation mais de n’avoir pu expliquer comment un homme a pu tuer la femme qu’il aime et l’explique au juge en disant voilà ce qui s’est passé. Mais seul l’avocat en première ligne peut aider l’accusé à faire aveu. Le juge n’a pas ce dialogue il lui est interdit d’avoir des dialogues d’homme à homme, parce qu’il a toujours, peur que si c’est une femme, elle le séduise, qui si c’est un homme, il le corrompe.

le journal des avocats

FD – Est-ce cela selon vous la grandeur suprême de l’avocat de pouvoir se mettre à hauteur d’homme ?

JV – L’avocat est le seul capable de recevoir une confession. La confession exige ce rapport d’homme à homme. Un juge qui demanderait à un accusé « Aimez-vous la musique de Brahms ? » On dirait mais il est fou, l’avocat non. Il joue ce rôle essentiel, c’est là que le procès devient une œuvre d’art. Quand il y a eu l’aveu, le beau est la splendeur du vrai. Pour Gide, « nos actes s’attachent à nous comme la lueur au phosphore et nous consument ». Le procès devient une œuvre d’art et un personnage né du procès de Gilles de Rais (Barbe Bleue) et devient également le jeune prince mélancolique de l’opéra de Bartók. Il y a une sorte de romantisme noir judiciaire.

Un personnage apparait comme un personnage de roman. L’exemple typique, c’est Julien Sorel, il a existé dans la réalité.

FD – Stendhal va d’ailleurs compulser les archives du procès à Grenoble.

JV - Oui mais l’avocat n’a pas su faire de lui un personnage de roman. C’est Stendhal qui viendra après et qui en fera un personnage de roman. La profession d’avocat est, comme celle d’écrivain, une profession d’artiste.

FD - C’est à l’avocat qu’incombe ce travail de maïeutique pour faire accoucher l’accusé de sa vérité, par une ironie toute socratique et ce pour donner sens aux actes ?

JV- Bien sûr et vous avez un autre exemple, l’Organisation Consul, l’extrême droite allemande, compte un officier complice d’assassinat du Ministre Walter Rathenau. Il passe en procès, son avocat est un brave type, engagé dans une bataille de procédures pour le sortir en lui disant que ce qu’il avait fait n’est pas un acte de complicité. En prison, l’officier va écrire la vérité, pas une vérité complaisante puisqu’il dit « Nous ne connaitrons jamais la paix ». C’est une phrase de récidiviste, mais ça devient un bestseller. C’est-à-dire que tout le monde le comprend et donc, les professions d’artistes, les avocats, cette grande sincérité nous donne un grand bonheur, c’est Nietzsche qui écrivait « celui qui assumera connaîtra un bonheur divin ».

FD – On revient aussi dans le sillage de Gide que vous citez « l’avocat est celui qui doit assumer le plus d’humanité ».

JV- Et nous assumons une grande partie, nous cannibalisons nos clients et je vois par exemple ce type, je devais défendre un Monsieur, qui est accusé d’avoir tué sa femme en la jetant sous les roues d’un train. J’obtiens un non-lieu pour lui, le conducteur de la locomotive témoigne qu’il a vu cette femme se jeter sous les roues du train car elle était seule. Il n’avait même pas remarqué la présence d’un homme sur le quai. « Maître Je suis coupable ». Connaissant le dossier, je lui dis de ne rien dire, il n’est pas coupable de l’avoir jetée sous les roues du train, je suis coupable de ne pas l’avoir empêché de le faire alors que je devinais son geste et il a besoin de le dire à quelqu’un, mais à qui ?

FD – A Jacques, le confesseur.

JV – Le confessé ? Tout est dans la manière de mener un procès. Mentir ne sert même pas à l’accusé.

FD – Et donc votre objectif serait précisément de faire du procès une occasion non seulement de répondre à l’appel de l’abîme, comme vous le dites, donc d’explorer les recoins de l’âme, mais également alors de jauger quelque part l’évolution des mœurs et des valeurs.

JV – Oui, c’est ça.

DES

FD –N’y a-t-il pas une contradiction à être quelque part anticolonialiste affiché et déclaré et de défendre quelqu’un comme Claus Barbie qui a fait partie d’un système nazi qui a voulu exterminer ou opprimer des peuples ?

JV – Deux choses. Egalité. Je suis d’accord pour l’imprescriptibilité,… mais si l’on renonce à l’amnistie pour d’autres crimes semblables. La France a du sang colonial sur les mains. Traitez-les tous, mais traitons-les sur pied d’égalité. Humanité. Le problème, est là-dessus, je dis que l’auteur du crime le plus affreux c’est celui que l’on doit défendre le plus. Et quand vous voyez des gens prétendument défenseurs des droits de l’homme, qui vous disent comment peux-tu défendre Barbie ?, je leur réponds - c’est une monstruosité -, parce que le tortionnaire est quelqu’un de fascinant. Je ne dis pas qu’il faut l’excuser, pas du tout, mais il est fascinant. Le patron d’Auschwitz qui dit « Quand on m’a proposé les gaz, j’ai été content car c’est moins cruel que les coups de bâtons mortels », il y a de quoi avoir froid dans le dos mais c’est un être humain qui s’exprime.

FD –Vous parlez de Porphyre Pétrovitch, célèbre juge héros de Dostoïevski, qui va tirer sa force dans la science des hommes. Pour reprendre une belle expression que l’on retrouve sous votre plume à la page 214, doit-on changer la justice pour qu’elle aussi puisse voir, comme l’avocat, l’envers du monde ?

JV – Eh oui, c’est un travail commun que doit mener le Juge, le procureur et l’avocat et non pas cet affrontement qui est grotesque Et qui fait perdre au crime toute sa signification.

FD – Croyez-vous que pour reprendre l’expression de Dostoïevski, que « l’âme » de la justice est encore « dans un corset »?

JV – Tolstoï disait que les juges font du drame humain une question de droit.

FD – Il dépeignait d’ailleurs aussi un juge d’instruction, je pense à Vladimir Ilitch, sous les traits d’un juge d’instruction qui était comment dire robotisé, quelqu’un qui était perméable à toute l’humanité.

JV – Vous arrivez à un tournant radical. Gide a raison, dans Ses souvenirs de la Cour d’assises, de se remémorer les paroles du Christ « Ne jugez pas » ou jugez dans le sens actuel, comme je le suggère.

FD – Vous avez échappé plusieurs fois à la mort. Nombre de vos confrères ont été tués, sacrifiés sur l’autel notamment de l’indépendance algérienne qui dérangeait à l’époque. Alors est-ce que vous n’avez pas, Maître Vergès, un ange mais plutôt un archange gardien celui dont l’ombre protectrice plane au-dessus de vous. Nous aurions pu citer Robespierre l’incorruptible, aussi citer Beaumarchais l’insolent, mais il y a cette figure émergeante, c’est Saint-Just et cette parenté ?

JV – Oui et non. Saint-Just. J’y faisais allusion l’autre jour dans une conférence au Palais de Justice. Je disais, nous devons rester fidèles aux traditions. Les traditions du Barreau français sont les plus marquantes en Europe. Pour la raison suivante, c’est qu’après la chute de Rome, la France est le 1ier état nation qui se constitue.

La France existe avant les Allemagne, Italie, avant l’Angleterre et la France et est disons la plus tourmentée aussi. Quand je fais des conférences au Palais de Justice, je regarde du bout de la place de la Citée jusqu’à la Concorde. Il n’y a pas dans le monde une bande de terre aussi étroite chargée de tant de drames. Ici au bout de l’Ile de la citée, le Roi a fait brûler le grand maître du temple, l’Ordre religieux le plus puissant que l’Europe ait jamais connu. A l’autre bout de la place de la Concorde, Saint-Just a fait couper la tête du Roi de France par la Grâce de Dieu.

du le journal cahier des deséditeurs avocats

FD - Vous êtes deux orateurs, amoureux du verbe ?

JV – Imagine-t-on Saint-Just dire à Maximilien j’ai la banane. Si Saint-Just avait parlé comme certains de nos dirigeants actuels, cette racaille, on va la passer au Karcher…

Le discours qu’il prononce et c’est sur un rythme latin, la posture est froide. « C’est en un jour que nous serons au 10ième siècle, moins avancés que du temps de César. Là le tyran fut immolé en plein sénat, sans autre formalité que 22 coups de poignard ».

FD – Pas de qu’importe le flacon, pourvu que l’on ait l’ivresse.

JV – Non, non. Et donc il y a cet héritage un Roi de France, le chef de l’Etat était le Roi de France. N’insulte pas ses sujets. Il ne va jamais dire « Casse-toi pauv’con ». Le Roi de France ne peut pas appeler un de ses sujets : pauv’con. Et puis il y a la tenue. SaintJust n’est pas débraillé. Vous avez à l’époque la révolution est une époque de cruauté puis d’élégance ?, Malherbes est conduit pour être guillotiné, Malherbes est très âgé, il glisse sur le verglas et se raccroche à des gardiens il leur dit, qui a défendu Louis XVI : « Fâcheux présage » ? Vous avez, surtout en France, un souci du beau langage et du geste chez les hommes d’Etat. Quelqu’un demande à Saint-Just, tu sais ce que Camille Desmoulins dit de toi ? Il dit : non, il dit que tu pends ta tête comme le SaintSacrement. Alors Saint-Just sourit et lui dit : « Dis-lui qu’il portera bientôt la sienne comme Saint-Denis ». Et vous avez le maréchal Ney : il a promis au Roi de faire tomber Napoléon. Napoléon remonte vers la Méditerranée et Ney a atteint Auxerre.

Un cavalier apporte une lettre à Ney : « Mon Cher Cousin, j’espère vous embrasser demain comme au soir….. » signé Napoléon. Ney bascule et au procès on lui dit vous aviez promis, il faut tenir vos engagements et Ney répond : « Peut-on arrêter la mer avec ses bras ? ».

DES

FD – On savait diablement bien causer...

JV – Dans le drame imaginé par Drieu la Rochelle, il y une Dame qui s’appelle Charlotte Corday, elle est dans sa cellule. Elle entend un pas, elle se dit, c’est le bourreau. La porte s’ouvre, elle suffoque, elle dit « Saint-Just » Saint-Just lui dit « oui », elle lui vouait son admiration. Tous les deux parlent, c’est devenu une scène de séduction, entre les deux. Elle dit « j’en ai assez de tous ces bavards », elle pense à ses anciens amis, Et Saint-Just lui dit : « vous et moi, nous sommes de la même race, de ceux qui tuent et qui sont tués. Quel âge avez-vous », elle dit « 25 ans », il dit, « j’ai 26 », « je vous suivrai bientôt. Et en votre honneur, on baptisera cette place, Place de la Concorde ».

FD – Belle illustration du jusqu’auboutisme révolutionnaire en disant, Charlotte Corday, mais vous savez, je serai peut-être logé à la même et triste enseigne que vous. Or ça m’avait frappé, tout jeune lecteur, dans votre Dictionnaire Amoureux de la Justice, page 171 : « Je suis prêt à défendre ma vérité par la violence, s’il le faut, en acceptant celle des autres, l’histoire nous départagera » … encore un point commun du saint-Just pur sucre avec une dose (létale) de Machiavel ?

JV – sourire approbatif et amusé. Je me rappelle, en pleine guerre, l’émotion que j’ai eue un jour en voyant un tankiste, un jeune tankiste allemand carbonisé au volant de son char, carbonisé par les obus que l’on avait tirés sur eux et je me disais, ce mec, c’est moi.

FD – Alors deux avocats de la terreur, défenseurs de la « terreur », n’y a-t-il pas chez les deux, un côté ombragé, énigmatique, silencieux ?

JV – Vous avez un mot de Saint-Just que l’on a retrouvé, qu’il transmet à Robespierre.

La victoire est au laconique. . Vous avez quelqu’un de fascinant quand Saint-Just ne dit rien .Vous savez ce que disait Saint-Just sur la terreur, « c’est la justice du peuple, prompte et sévère ». Evita Peron disait « la violence du peuple n’est pas la terreur, c’est la justice ».

FD – Epatante symétrie. N’y a-t-il pas chez Saint-Just, chez vous deux, une même soif d’absolu, je dirais, sous des fausses allures parfois de nabab mandarinal, sous les volutes de cigares que l’on vous connait, ne brûlez-vous pas d’un même idéal, préférez-vous la générosité du cœur à l’avidité du beurre ?

JV – Sûrement, et je dis un avocat doit mépriser l’argent, je ne dis pas vivre comme un ermite, mais ne pas essayer d’avoir forcément un luxe qui n’a pas de sens. Si je peux payer mes cigares, quel besoin ai-je d’avoir une fortune, de disposer d’un château ?

Vous connaissez la parole de Saint-Just. « Je méprise cette poussière qui me compose et qui vous parle vous pouvez la détruire, mais je défie que l’on m’arrache cette vie indépendante que je me suis donné dans les siècles et dans les cieux » FD – On est loin d’un Danton qui aimait la très bonne chair et les plaisirs superficiels.

En parlant d’amateur de plaisirs divers, parlons de Roland Dumas. Il évoque dans sa biographie – 50 ans de coups et de blessures – une triple brouille.

JV – Ecoutez, Roland Dumas est Dumas, Vergès est Vergès. On s’est connu au procès du réseau Jeanson et ensuite, lui a mené une carrière politique avec les implications que cela comportent et les compromis. Moi, je n’ai pas choisi cette carrière. Donc, je n’ai pas fait ces compromis et là, il y a des divergences mais qui ne touchent pas l’essentiel. L’amitié.

FD – Est-ce ça qui vous a poussé à faire du théâtre ? Etait-ce logique pour vous ?

JV – C’était logique. Vous avez un auteur de théâtre connu qui dans sa jeunesse était avocat, c’était Corneille.

le journal des avocats

FD – Question Shakespeare in Law. Déjà octogénaire vous avez joué au théâtre. Estce qu’il y a des liens entre le théâtre et les procès ?

JV – Forcément, puisque le thème est le même et on va aux procès, comme on va au théâtre. Sauf qu’au théâtre on va regarder beaucoup le style écrit, au procès on s’en détache davantage.

FD –Me Vergès on vous sait imbu de littérature, boulimique, la littérature a-t-elle favorisé également votre compréhension de la nature humaine ?

JV – Beaucoup, elle m’éclairait sur l’être humain. Le thème de tout roman et de tout procès eux-mêmes, c’est une remise en cause de l’ordre du monde.

Dans votre garnison littéraire trouve-t-on une sentinelle qui ne quitte jamais votre table de chevet ? Une livre inséparable ? Je dirais, c’est Nietzsche. Le Gai Savoir.

Un inséparable compagnon de travail, un livre qui trône sur votre table de travail ?

Dostovieski. Une préférence ? Non, Crimes et Châtiments, les Possédés.

Ici, vous avez aussi toutes les œuvres de Ciceron (geste indicateur). Une fidèle ou récente escorte de voyage ? Oui, cela dépend de la longueur du périple. J’aime beaucoup Gérard de Nerval. J’aime beaucoup Rilk. J’aime aussi les Diderot, Jacques le Fataliste et Montaigne évidemment.

FD – Avez-vous une devise ?

JV – J’aime bien cette phrase de Corneille dans la bouche de Nérine et Médée, « Votre pays vous hait. Votre époux est sans foi. Dans un si grand revers que vous reste-il ? Moi, répond Médée, moi dis-je et c’est assez ».

BAU DES

- Rachida Dati ou Christiane Taubira, que choisiriez-vous ? Joker.

- Mao ou De Gaule ? Non, on ne choisit pas, tous les deux.

- Un confrère Varaut ou Isorni ? Ce sont deux amis. Quand Varaut était très malade, le week-end quand j’avais le temps, j’allais lui faire des lectures.

- Bernard Henry Levy d’Arabie ou le tsar Kosy ? Aucun.

- Qu’est-ce qui vous caractérise Stakhanov ou Epicure ? Héraclite.

- Votre instinct est plutôt grégaire ou solitaire ? Solitaire.

- L’attitude judiciaire déférence ou irrévérence ? Vous savez la rupture n’est pas une injure, mais on est dans l’insolence ? Roland Dumas me le rappelle souvent, nous sommes un matin au procès du réseau Jeanson, ça énerve le procureur parce qu’on nous a condamnés mais nous faisons opposition par défaut et il apostrophe Dumas et lui demande une explication sur notre absence lors des plaidoiries, Dumas en donne toujours… Et vous Me Verges ? Je dis : « Moi ? J’étais avec ma masseuse ??? ».

- Roses ou rafflésias (NDLR. évoquées dans votre livre) ? Des rafflésias roses.

- La plume, la lyre ou la toge ? Je ne vois pas en quoi les 3 seraient incompatibles.

- Roméo Y Julietta ou Cohiba ? Partagas !

- Avez-vous un hôtel, un bistrot, un restaurant où vous avez vos habitudes à Paris? °

Un restaurant : le Veplaire, place Clichy c’est là, quand je suis pressé, je prends un repas, c’était le quartier général d’Henri Miller et d’Anaïs Nin. Et en face, il y a Charlot, le Roi des Coquillages. Et là, toutes les semaines durant les dernières années de sa vie, j’y dinais avec Jean Genet. C’est aussi le quartier de Bardamu, le héros de Céline.

°

Un hôtel : Le Beau Rivage à Genève, avec en face le Quai où l’Impératrice d’Autriche a été poignardée.

°

Un bistrot : Rue de Mogador, une vieille pizzeria. Monsieur Béchir m’y donnait rendez-vous là, à l’époque du FNL et me disait : « tu comprends, les flics sont tellement cons, ils n’oseraient jamais chercher un bougnoul chez des ritals ».

°

Un lieu habituel de villégiature ? Je n’ai pas de lieu de villégiature. De repos de prédilection ? La Bretagne. Une ville ? Saint-Malo. Dinar.

FD – Pouvait-on espérer meilleur entretien avant de se transporter au Musée d’Orsay, le temps d’une expo temporaire sur le romantisme noir de Goya à Ernst, et d’y descendre sur les lieux des crimes picturaux les plus stupéfiants.

JV – J’ai publié un bouquin qui s’appelle « Justice et Littérature » et la couverture est illustrée par une peinture de Füsli, elle représente Lady Macbeth qui brandit un flambeau. Dans toutes les librairies. Je dis c’est le crime éclairant le monde.

le journal des avocats

FD – Y-a-t-il un mot que vous souhaiteriez adresser manuscritement en post scriptum, pour clore cet entretien, aux avocats belges qui reçoivent copie de la présente ?

Et si l’indocilité rétive et fougueuse de Jacques Vergès était celle d’un Grand Amoureux de l’Homme, d’un épris des (âmes) meurtri(e)s jusqu’à la révolte ? Et si c’était un excès, un trop plein d’Humanité qui en expliquait tous les autres et transcendait toutes les contradictions qu’on lui connaît ? « L’humiliation de ceux qui me font confiance m’enfoncent ses griffes d’acier et ne me lâche plus » avouait-il. Et la lumière du personnage fut …et fut faite.

François Dessy

BAU DES

Si vouS voulez continuer à dicter de manière analogique, faiteS-le numériquement :

DictEE cEntEr

185, Chaussée de Charleroi | B-1060 Bruxelles Tél. 02/538 47 65 | Fax 02/534 10 74 www.dictee-center.com | info@dictee-center.com

PhiliPS PréSente le Premier aPPareil de dictée à caSSetteS numérique. le nouveau Pocket memo de Philips en mode classic simule l’enregistrement avec une minicassette traditionnelle pour vous permettre de changer simplement de la dictée analogique à la dictée numérique. le Pocket memo Philips est l’appareil de référence dans sa catégorie car il offre au dicteur professionnel un grand nombre de fonctionnalités bien pensées.

• Technologie 3D Mic pour une qualité audio optimale et des résultats de reconnaissance vocale précis • Boîtier en acier inoxydable pour une résistance accrue • Logiciel de flux de travail SpeechExec pour une gestion efficace des données • Écran couleur grand format et interface utilisateur simple pour une utilisation aisée et intuitive • Station d’accueil offrant un temps de charge rapide de la batterie et un enregistrement en mode mains libres • Détecteurs de lumière et de mouvement pour une durée de vie étendue de la batterie Essayez le Pocket Memo Philips chez notre partenaire Dictée Center, votre spécialiste pour les cabinets d’avocats.

Scanner le code et regarder la vidéo!

du n° 1 de la dictée professionnelle

Commenté par Jean-Pierre BABUT DU MARÈS Avocat honoraire au Barreau de Namur Amateur d’Art et Président de l’ASBL « Les amis du Musée Félicien Rops »

Comme continuation de mon étude sur Félicien Rops parue dans le premier numéro du « Journal des Avocats », sorti en 2010, voici en passant, et ce, à la demande de certains avocats, ce que je considère comme un des plus beaux dessins lithographiques du 19è siècle belge ainsi qu’une lettre très intéressante. Il faut savoir, en effet, que Rops était aussi fin épistolier que grand dessinateur.

Monsieur Willy Koninckx1 , que j’ai eu la chance de connaître, m’avait dit en mon jeune temps : « Rops est riche de bien de talents ».

Vous apprécierez vous-même s’il a eu raison…

Le prochain article que je ferai parvenir à la revue sera une lettre de Félicien à Edmond Picard.

J.-P. Babut du Marès

1. Willy Koninckx : 27 août 1900 - 15 août 1954 — homme de lettres, membre de la Chambre des Représentants et avocat près la Cour d’appel.

BAB

« Tout le bonheur des hommes est dans l'imagination. » Du Marquis de Sade.

le journal des avocats

Lettre de Félicien Rops à Charles De Coster 2

Quelques mots en courant, mon cher Karl, pour me soulager de tous mes ennuis, et pour que tu me répondes une de ces bonnes lettres toniques, comme tu sais en écrire, toi qui est un si vaillant méprisant.

J’enrage et je m’en fiche en même temps : tous ces journaux catholiques m’accusent d’avoir fait une « page anti-chrétienne » en dessinant « Un enterrement en pays Wallon ». Du diable si j’y ai pensé !

Il est toujours vexant de ne pas sentir sa pensée comprise, et de ne pouvoir dessiner la face apoplectique d’un bon curé de province et quelques bonnes têtes de suiveurs d’enterrement, sans s’entendre accuser « d’attaquer la religion », ou de saper les bases de la société et de la constitution que l’Europe nous envie. J’en ai assez de ces bégueuleries et, un de ces jours, je leur en montrerai d’autres 3. Voici la genèse de cette lithographie terrifiante sur laquelle on appelle les foudres de Dieu le Père.

J’étais à Namur, ne sachant que faire. L’idée d’aller aux Fonds d’Arquet m’est venue.

Tu ne connais pas les Fonds d’Arquet ? Une merveille ! Un éboulis de roches grises et jaunes, des orchidées « tout plein », et personne ! Les gens graves ne s’aventurent pas en pareil lieu ! Ils vont « au Casino » boire de la bière de Louvain ; les riches prennent une « bavaroise » ! Toutes les voluptés ! — Et les Fonds d’Arquet se trouvent, tout près, à quatre pas de cette belle « Porte de Fer », que des crétins, veulent, dit-on, démolir 4, pour faire un boulevard naturellement.

Figure-toi qu’en chemin je rencontre un enterrement. J’ai toujours eu un faible pour les enterrements. On porte à bras à Namur, et les porteurs ont des capes noires à collet jaune, léguées par l’Espagne qui font de belles notes sur le gris des routes. C’était un enterrement triste, celui-là.

C’est rare.

2. Charles De Coster : Auteur de « Légendes flamandes » et « La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au pays de Flandres et ailleurs ».

3. Promesse tenue depuis largement ! Eugène Ramiro.

4. Effectivement, elle fut détruite peu de temps après.

le journal des avocats

Derrière le cercueil recouvert d’un drap riche, avec des têtes de mort, en vrai or, suivait un petit garçon blond, de ce blond fade né des cours de récréation sans air et des verbes copiés dix fois en punition d’un sourire. C’était lui, le pauvret, qui menait le deuil, avec son petit nez rouge et de grosses larmes à travers les cils. A ses côtés, digne et protectant, ambulait un monsieur, le « mon oncle » ou le tuteur légal. En grand deuil aussi, le monsieur ayant engraissé depuis lors et ne mettant son habit que le jour du Te Deum de la fête des Rois, et pour aller à la Redoute de Monsieur le Gouverneur.

Un curé goutteux, avec des bas tombant sur les boucles de ses souliers, deux prêtres psalmodiant, lugubrement grotesques, encore enluminés par la digestion dérangée, un bedeau avec de l’ouate dans les oreilles, deux membres mâle et femelle de quelque congrégation, un enfant de chœur et un chien, c’est tout. Au cimetière, en plus le vieux fossoyeur « buveur de goutte ».

Tout cela bredouillant ne manquait pas de drôlerie sinistre, sous un ciel d’automne gris et cependant avec des échappées de lumière plus lumineuses que les blancs de surplis. L’enfant de chœur pendant les orémus, aspergeait le chien et les porteurs buvaient le péquet de circonstance.

Cela m’a plu.

Je l’ai dessiné sur une grande pierre lithographique, et voilà.

PS : On estime que cette lithographie de l'enterrement en pays wallon, de belles dimensions (65 /38 cm) a eu un tirage extrêmement limité dont il ne reste plus qu’une dizaine d’exemplaires. Aussi, je serais très reconnaissant à mes chers confrères, si l’un d’eux a la chance d’en découvrir un, de me le signaler. Merci.

BAB

LE PEUPLE REELU Par Alain BERENBOOM

Alain Berenboom n'a plus beaucoup de cheveux, ce qui explique sans doute ses nombreuses casquettes: avocat, prof à l'ULB, chroniqueur au Soir, et romancier.

Justement, il vient de publier "Monsieur Optimiste", récit autour de ses parents, venus de l'est avant la guerre en Belgique. À travers ce récit, tantôt burlesque, tantôt poignant et nostalgique, inspiré de la vie du père de l’auteur, c’est l’histoire du XXe siècle qui se dessine en filigranes mais c'est surtout pour l'auteur une façon de tendre la main à ses origines et de cerner sa propre identité. Comment deux immigrés de l’Est ont fabriqué un « Belge de souche »…248 Pages. Prix : 22,50 €- Parution : octobre 2013

ieu s'aperçut un jour que le peuple élu n'avait jamais été réélu. Il se dit que cela faisait mauvais genre. Bien sûr, la réélection du peuple d'Israël était acquise. Qui d'autre voudrait de la place ? Haine, rejet, massacre, les terribles défauts de l'élection sont bien connus. Et ses avantages ?

Une place de contremaître auprès du Seigneur et un joli titre sur la carte de visite? La belle affaire... Au moment de fixer la date du scrutin, Dieu se souvint qu'une élection respecte désormais certaines formalités. Bah, se dit-Il, il suffit de reproduire celles des pays heureux. Il les choisit - non sans difficultés -, photocopia leur réglementation mais, dès qu'Il se plongea dans l'étude des textes, Il en perdit à la fois son latin et son hébreu.

"Sûrement inspiré par le diable, ces trucs-là!" bougonna-t-Il en se grattant la tête.

Puis, petit à petit, comme tout novice, Il se prit de passion pour son nouveau jeu. Et Il se mit à rédiger Sa Loi. Conditions d'inéligibilité, d'incompati¬bilité et de déchéance couronnèrent Ses efforts. Il en sortit fourbu mais heureux. D'autant qu'Il n'était pas certain d'avoir compris le sens de tous ces mots.

Mais Il se réjouissait. Cela faisait si longtemps qu'Il avait donné les douze tables que tout le monde ou presque les avait oubliées. Avec les douze isoloirs, Ses oeuvres allaient revenir dans l'actualité! Soudain, Il se frappa le front. Il allait oublier le principal! Les électeurs. A qui donner le droit de vote?

La première fois, c'est Lui qui avait désigné le peuple élu.

Personne n'avait protesté. Mais cette méthode est passée de mode. Puisqu'il le faut, soupira-t-Il résigné, disons que seront admis au vote toute personne kasher. Mais qui est encore kasher en ces tristes jours où la terre grouille de pécheurs? Ne soyons pas trop sévères, pensa-t-Il. On me l'a assez reproché.

Est kasher, tout homme circoncis, écrivit-Il satisfait de sa mansuétude. Voilà un critère objectif simple! Circoncis? Et les femmes? A l'idée de la scène qu'elles allaient lui faire, Il barra plusieurs fois le mot "circoncis" de façon qu'aucune d'elles ne Le soupçonne jamais d'avoir osé y penser. Et si d'autres peuples allaient présenter leur candidature? Il secoua la tête.

Non, pas possible! Qui serait assez stupide pour courir de tels risques!

« L’imagination, ce n’est pas le mensonge. » De Daniel Pennac - Extrait de Messieurs les enfants.

BER

Et pourtant... Imaginons que les chrétiens se mettent sur les rangs, aussitôt les Musulmans suivront. Calmons-nous! Se ditIl. Ceux-là, je peux encore les contrôler. Avec l'aide d'Abraham, qui n'aura pas envie que je reparle de ses histoires de bonnes femmes. Quant à Jésus, puisqu'il se prétend mon fils, il aurait bonne mine de me désobéir publiquement! Mais les autres?

Les bouddhistes, les taoïstes, les adorateurs du soleil et de la Lune, du chat ou de je ne sais quels autres dégoûtantes bêtes que, dans ma folle jeunesse, j'ai eu la stupidité de créer? Ils me riront au nez!

Les jours passaient et Dieu ne parvenait pas à terminer Sa loi. Plus, Il la relisait, plus Il en voyait les défauts. Cette idée que la majorité décide... qui avait imposé cette règle stupide?

Pour peu qu'ils se présentent, les Chinois étaient assurés d'être élus. Ah! Il aurait bonne mine de travailler avec des Chinois! Il ne comprenait même pas leur langue. Et vous Le voyez obligé d'apprendre à son âge ? Dans un pays - dont il ne parvenait plus à lire le nom sur la carte tellement il était petit - la constitution a prévu un système donnant le pouvoir à la minorité. Cela s'appelait "la sonnette d'alarme" : quand la majorité vote, les perdants bloquent tout. Après s’être gratté le crâne, Il balaya la tentation de s'en inspirer. Non, Il n'allait pas imposer à tous les humains un système auquel lui-même ne comprenait rien. Pire que du chinois ! Et comment faire fonctionner cette sonnette en cas de panne d'électricité? Il fallait trouver autre chose. Il se sentit soudain très vieux. Quel orgueil Le poussait à vouloir organiser des élections ? Sinon celui d'assurer Sa propre gloire. Rien d'autre. Il fit une boule du manuscrit des douze isoloirs et la laissa tomber du ciel, puis prit une feuille de papier et désigna une fois de plus le peuple élu. Mais, cette fois, il eut la sagesse de ne pas avertir le vainqueur

Alain Berenboom

L’art du progrès.

La nouvelle Audi A8 fascine d’abord par sa ligne sculpturale époustouflante et son charisme exceptionnel. Mais à bord, c’est l’art d’associer à la perfection les innovations technologiques de pointe et l’émotion d’un intérieur sobre et luxueux qui vous marquera à jamais.

Modèle présenté avec options. Informations environnementales (AR 19/03/04): www.audi.be

5,9 - 9,2 L/100 KM ◆ 155 - 216 G CO2/KM.

Par Olivier BONFOND

Licencié en droit de l’Université de Liège et titulaire d’un D.E.A. en relations internationales et intégration européenne de la même université. Avocat au Barreau de Liège depuis 2000. Associé au sein du cabinet Draps & Oosterbosch.

Président de la Commission internationale du Barreau de Liège entre septembre 2009 et août 2011. Orateur de rentrée du Barreau de Liège en 2014.

e 25 septembre 1942, un hydravion de la R.A.F. fut pris dans un violent orage et s'écrasa sur les côtes espagnoles, au large de Cadix. Lorsqu'elle parvint aux services de renseignement anglais et américains, la nouvelle de l'accident provoqua une vague d’angoisse. Parmi les passagers de l'appareil, tous morts, se trouvait en effet le lieutenant James Turner, porteur de plusieurs lettres à l'attention du Gouverneur de Gibraltar et l'informant de certaines modalités pratiques et, plus important encore, de la date du débarquement en Afrique du Nord. La question qui obsédait les alliés était la suivante : pendant les 24 heures qui s'étaient écoulées entre la découverte du corps et sa remise par le commandement naval espagnol au consul britannique, les agents de l'Abwehr, les services de renseignement allemands, avaient-ils pu accéder aux documents confidentiels ? Ce n'est qu'en examinant le corps de Turner à Gibraltar et en constatant que du sable s'écoulait des boutons de la veste dans laquelle les lettres se trouvaient que les scientifiques anglais acquirent la conviction que le corps n'avait pas été fouillé.

L'opération "Torch" était donc sauve...

Dans les mois qui suivirent, une idée saugrenue germa dans l'esprit du lieutenant Charles Cholmondeley, agent du MI5 : celle d'une opération d'intoxication qui permettrait aux Alliés de débarquer en Europe, en faisant croire aux Allemands qu'ils étaient parvenus à obtenir des renseignements, confidentiels mais parfaitement faux, sur les objectifs visés, afin de lancer les armées du Reich sur une fausse piste.

Cholmondeley se souvenait d'une note interne distribuée aux membres de son service le 29 septembre 1939 à l'initiative de l'amiral John Godfrey, directeur des services secrets de la Royal Navy. Figuraient dans cette note 51 suggestions, en apparence toutes plus

fantaisistes les unes que les autres, pour dérouter l'ennemi en s'inspirant des méthodes de la pêche, c'est-à-dire en usant de leurres et d'appâts et en faisant preuve d'une patience d'ange. Parmi les différentes propositions de la note, qui entra dans l'histoire sous le nom de "Mémo de la truite"1 , la 28ème s'inspirait d'un roman policier d'un certain Basil Thomson dans lequel un cadavre, revêtu d'un uniforme d'aviateur et porteur de fausses dépêches, était abandonné en mer, à proximité des côtes ennemies.

De concert avec le capitaine de corvette Ewen Montagu, Cholmondeley se mit au travail. L'idée du cadavre était séduisante à plus d'un titre : il n'était en effet pas envisageable de sacrifier un homme en le faisant tomber aux mains des Allemands. En outre, une dépouille offrait bien plus de garanties en matière de silence et de résistance à la torture. Cependant, n'importe quel corps ne pouvait convenir. Il devait s'agir d'un homme assez jeune pour qu'aucun agent ennemi n'en ait encore entendu parler, d'un homme assez expérimenté pour que son propre Etat-major lui confie des documents confidentiels et, enfin, d'un homme qui, supposé être mort par noyade, avait de l'eau dans les poumons et l'estomac...

1. C e mémo fut rédigé par l'adjoint de l'amiral Godfrey, un certain Ian Fleming…

BON

« Quand on ne sait rien, on peut tout de même trouver des choses, avec de l’imagination. » De Boris Vian - Extrait de la postface de Les morts ont tous la même peau.

le journal des avocats

"The man who never was", réalisé par Ronald Neame en 1956 et produit par la Twentieth Century Fox

Grâce au concours du coroner de St-Pancras, Bentley Purchase, Montagu et Cholmondeley récupérèrent un corps qui correspondait plus ou moins à cette description, celui d'un sansabri, Glyndwr Michael, mort d'une ingestion, accidentelle ou non, de mort-aux-rats, contenant du phosphore blanc. Les deux officiers se montrèrent pourtant sceptiques : s'il semblait acquis que le phosphore allait disparaître de l'organisme avant l'autopsie à laquelle les autorités espagnoles ne manqueraient pas de procéder, le défaut d'eau dans les poumons, par contre, ne passerait pas inaperçu. Montagu et Cholmondeley se laissèrent toutefois convaincre par Sir Bernard Spilsbury, médecin légiste en chef au Home Office, qui leur asséna, non sans une certaine arrogance, que les médecins espagnols n'avaient pas les compétences qui leur permettraient de flairer la supercherie.

Montagu et Cholmondeley offrirent alors au malheureux Glyndwr Michael, mort dans la plus totale solitude, une nouvelle identité, des amis, une fiancée et même un découvert bancaire... A titre posthume, ils lui donnèrent une existence, faisant de lui le major William Martin, officier des Royal Marines, né à Cardiff en 1907. C'est un certain Ronnie Reed, ancien technicien radio de la BBC, qui prêta ses traits à la photo d'identité du major. On fit en effet diplomatiquement comprendre à Reed que sa ressemblance avec le cadavre était absolument étonnante...

La rédaction des documents qui devaient tomber entre les mains ennemies s'avéra tout aussi complexe. Désireux de faire croire aux Allemands que leur débarquement aurait lieu

en Sardaigne et en Grèce plutôt qu'en Sicile, les alliés ne pouvaient toutefois passer cette dernière sous silence alors qu'elle constituait à première vue l'objectif le plus évident. Les Britanniques contournèrent l'écueil en laissant apparaître dans les documents que la Sicile servirait précisément de diversion.

Approuvée sans réserve par le général Eisenhower, l'opération pouvait commencer. Un temps envisagé, le nom de "Cheval de Troie", un peu trop explicite, fut abandonné au profit d'un patronyme plus poétique : "Mincemeat" ("Chair à pâté").

Le 19 avril 1943, le corps du major Martin, conservé dans de l'eau froide depuis plusieurs semaines2, fut transporté vers l'Ecosse puis chargé à bord du HMS Seraph, un sous-marin commandé par le lieutenant Bill Jewell. Le 30 avril, à 4 heures 30 du matin, le bâtiment fit surface et le corps fut mis à la mer au large de Huelva, à charge pour les marées, calculées avec le plus grand soin, de l'amener vers la côte. Il fut découvert trois heures plus tard par un pêcheur espagnol, qui le ramena au port où il fut pris en charge par les autorités locales.

S'ensuivirent plusieurs jours au cours desquels les agents anglais en place, qui ignoraient tout de l'opération, firent pression sur les Espagnols afin que le corps soit immédiatement rendu aux Britanniques, les services de l'Abwehr usèrent de toutes leurs ressources pour accéder aux documents et l'équipe de Montagu 2. La congélation du corps aurait trop endommagé les tissus

le journal des avocats

simula la panique à l'idée que des documents cruciaux s'étaient égarés dans la nature. Au terme de nombreuses péripéties, l'officier du renseignement allemand en charge de l'affaire, le major Karl-Erich Kuhlenthal, remit à ses supérieurs à Berlin, le 9 mai 1943, une copie des documents trouvés sur le cadavre du major Martin, copie immédiatement transmise au plus grand expert-analyste allemand, le lieutenantcolonel Alexis Baron von Roenne. Celui-ci conclut immédiatement à la fiabilité et à l'authenticité des lettres. Son analyse emporta la conviction d'Hitler, tourmenté pendant un temps par le fait qu'aucun débris de l'avion n'avait été retrouvé.

Comme espéré, les Allemands renforcèrent leurs garnisons en Sardaigne, en Corse et en Grèce. Le 9 août 1943, les Alliés s'étaient emparés de la Sicile, ne rencontrant qu'une faible résistance.

L'opération "Mincemeat" se soldait par un incontestable succès. Cela étant, le succès de l'opération reposa aussi, dans une certaine mesure, sur deux circonstances propres à ses protagonistes allemands. La première, c'est que le major Kuhlenthal était d'origine juive. Craignant que la protection de son mentor, l'amiral Canaris, ne suffise bientôt plus à lui épargner un sort sinistre, il se sentit manifestement contraint de fournir à ses chefs une découverte qui les enchanterait, en modifiant pour l'occasion les estimations des médecins espagnols sur la date du décès afin de les rendre plus compatibles avec l'emploi du temps supposé du major Martin. La seconde, c'est que le lieutenant-colonel von Roenne, révolté par

les atrocités du régime, conclut très volontiers à l'authenticité des documents, en oubliant sa prudence coutumière. On ajoutera que sa propension à admettre, sans rigoureusement les vérifier, les informations qu'il recevait se manifesta encore avant le débarquement allié en Normandie. Le 11 octobre 1944, il fut pendu à un croc de boucher dans une prison de Berlin...

Depuis 1997, la tombe du major Martin à Huelva porte également de nom de Glyndwr Michael.

Plus de 50 ans après Mincemeat3, justice était enfin rendue à l'homme qui n'eut que sa mort à offrir à l'effort de guerre, mais qui contribua à sauver des milliers de vies...

Olivier Bonfond

3. Pour de plus amples informations, voy. B. Macintyre, "Opération Mincemeat", Bruxelles, Ixelles éditions, 2011; P. Pesnot, "Mincemeat, une opération d'intoxication au cœur de la seconde guerre mondiale", Rendez-vous avec X, 29 septembre 2012, disponible sur : www.franceinter.fr/emission-rendez-vous-avec-x

BON

Par Jean-Pierre BOURS Jean-Pierre Bours est avocat fiscaliste au barreau de Liège. Chargé de cours honoraire à l’ULg et aux HEC. Membre du comité de rédaction du Journal des tribunaux. Auteur d’un recueil de nouvelles « Celui qui pourrissait » publié chez Marabout en 1977 (Prix Jean Ray) et récemment réédité aux éditions L’Arbre vengeur. Auteur d’un roman policier « La Nuit du jugement » se déroulant à Liège et édité aux éditions Quorum en 1996. Il est aussi auteur d’un roman historique intitulé « Indulgence(s) », se déroulant dans l’Allemagne du début du XVIème siècle, et qui paraîtra dans le courant de l’année 2014 chez HC Editions (Paris).

e temps des loisirs est peau de chagrin : minutes grappillées en soirée, heures prélevées sur le week-end, journées si brèves de vacances, jusqu’à ce qu’enfin, le crépuscule aidant, retraité, l’on s’adonne à quelque passion à peine effleurée. Le temps des loisirs est émerveillement : car tout y est permis, serait-ce fugacement. L’on peut s’y adonner à la musique, lire les plus grands des auteurs, admirer les chefs d’œuvre des peintres et sculpteurs, regarder les plus beaux films jamais réalisés. Et l’on y fait parfois, surpris, d’étranges et mystérieuses découvertes. Ainsi, récemment, ai-je mis à jour une de ces « rencontres improbables », comme il doit pouvoir s’en trouver des milliers.

et fut créé le 19 juin 1926 au théâtre des Champs Elysées, dans un vacarme digne de la première en 1913 du Sacre du printemps. Le compositeur regagna ensuite les Etats-Unis où, jouant sur sa réputation de musicien anarchiste et son physique de mauvais garçon à la Jean Genet, il composa quelques œuvres que ses concitoyens n’apprécièrent pas, écrivit une autobiographie intitulée Bad Boy, puis se rangea : quelques quatuors et des symphonies, sans rien en elles qui tonne, étonne ou détonne, ensuite de la musique de film parce qu’il faut bien vivre. Il aurait voulu être Stravinsky, mais ne fut jamais qu’un « troisième couteau » dans l’ombre d’un Korngold ou d’un Herrmann.

Il y a de cela trente-cinq ans, avec un ami, j’ai eu l’idée de fonder un groupe de mélomanes (une dizaine) se réunissant chaque mois chez l’un d’entre eux, afin d’entendre un concert de musique classique enregistrée, organisé par l’hôte sur un thème de son choix (« L’Enfance », « le Voyage », « l’Enigme », « Miroirs », ou « la Nuit », par exemple). Nous avions baptisé ce groupe : le « SIAM » (« substituts, ingénieurs et avocats mélomanes »). Il a survécu aux décennies, à l’apparition du CD, à la disparition des disquaires ; et l’on y manifeste toujours aujourd’hui le même enthousiasme qu’à l’origine.

Comme je terminais de faire le tour du personnage, je fus interpellé par une phrase captée sur le site Wikipedia ouvert à son nom : « George Antheil est aussi connu comme ayant, avec l’actrice Hedy Lamarr, déposé le premier brevet d’un système de codage des transmissions appelé « étalement de spectre », proposé alors pour le radio-guidage des torpilles américaines durant la Seconde Guerre mondiale, bien qu’il ne fut pas appliqué (Brevet des USA 2,292,387). »

Préparant il y a quelques mois un concert sur le thème du « surréalisme en musique » (existe-t-il de la musique classique réellement « surréaliste », hors les pochades « dadaïstes » d’Eric Satie ?), je me suis intéressé à un compositeur américain du nom de George Antheil. Venu vivre à Paris dans les années 20, Antheil y a composé un Ballet mécanique, d’abord écrit pour seize pianos mécaniques, avant de l’être pour plusieurs pianos, hélice d’avion et divers timbres électriques (!), ce qui n’était pas sans faire penser au Parade de Satie,

Hedy Lamarr… (1913-2000) Quel cinéphile ne se souvient d’elle ? L’interprète de Dalila aux côtés de Victor Mature en Samson, qui avait déjà fait scandale à 17 ans en apparaissant nue dans une (brève) scène de l’Extase de Machaty (1933) puis qui, juive d’origine viennoise fuyant sa patrie suite à la montée du nazisme, devint l’une des reines de Hollywood, et donna toute la mesure de son talent dans un film d’Edgar Ulmer, avec George Sanders, intitulé (cela ne s’invente pas) « Le Démon de la chair ». « Fulgurante beauté », dit d’elle Jean Tulard dans son « Dictionnaire du cinéma », plusieurs fois qualifiée de « plus belle femme du monde », elle

BOU

« Les femmes sont comme le suspense. Plus elles éveillent l'imagination, plus elles suscitent d'émotions. » De Alfred Hitchcock Extrait du catalogue de l'exposition Hitchcock et l'art, coïncidences fatales.

le journal des avocats

crise des missiles à Cuba en 1962, jusqu’aux bombes dites « intelligentes » lâchées sur l’Irak. Lorsque le brevet fut déclassifié dans les années 1960, le dispositif fut également utilisé par les constructeurs de matériels de transmission. Aujourd’hui, la plupart des téléphones portables, pour améliorer leurs communications avec les émetteurs, mettent à profit la « technique Lamarr ». » Par ailleurs, dans une brochure que je me suis procurée, traduite de l’américain, et intitulée « Précurseur (sic) des télécommunications », l’on trouve (évidemment) des notices consacrées à Graham Bell et Marconi, de même qu’à d’autres ingénieurs ou physiciens, mais la plus longue de toutes (reprise de Wikipedia) est celle consacrée à l’actrice !

Comment deux êtres aussi différents, apparemment si peu prédisposés aux sciences appliquées, ont-ils pu être amenés à déposer un brevet en matière de guidage de torpilles ?

Quelles étaient leurs compétences en la matière ? Qui a fait quoi, en définitive ? Et quelles ont été leurs relations ? a mené une vie privée mouvementée et rédigé une autobiographie considérée par le magazine Playboy (expert en la matière) comme l’une des dix les plus érotiques de tous les temps. Elle était capricieuse, collectionnait les aventures, et a suscité autour d’elle une véritable « légende noire ». Mieux qu’une star, elle était une vamp.

Rien ne devait la rapprocher d’Antheil, surtout au point de déposer ensemble un brevet. Le Bad Boy et la Vamp : séditieuse alliance de deux anglicismes et d’une apocope.

L’étonnement redouble lorsque, prenant connaissance de la longue notice que Wikipedia consacre à l’actrice, on y découvre ceci : « Le Bureau des brevets américain détient en effet, daté du 10 juin 1941 et cosigné par Hedy Lamarr, la description d’un système de guidage de torpilles impossible à brouiller. Le brevet intitulé Spread Spectrum préconise de faire varier simultanément, et selon le même code enregistré sur deux cartes perforées, les fréquences de l’émetteur et du récepteur.

Les progrès de l’électronique quinze ans plus tard firent que le procédé fut utilisé dans la

Une première explication possible, qui satisfera le machisme de certains, est suggérée à nouveau par Wikipedia : « Toutefois, interrogée sur son invention, Hedy Lamarr a toujours affirmé n’y être pour rien, même si elle accepta avec joie le prix (très rétroactif) que lui décerna en 1997 l’Electronic Frontier Foundation américaine.

C’était Antheil, disait-elle, qui en avait eu l’idée, et qui l’avait associée au brevet par admiration pour elle, comme il aurait pu lui dédier une symphonie. » Voilà tout le mérite de l’invention reporté sur le Bad Boy, sans doute épris de la Vamp, et qui lui laissa cosigner sa demande de brevet… Mais est-ce si simple que cela ? J’ai voulu en savoir d’avantage.

Aussi ai-je mis la main sur un ouvrage, en anglais, de la plume d’un certain Richard Rhodes, ancien prix Pulitzer pour un autre livre intitulé « The Making of the atomic bomb ». Le livre qui m’a occupé est d’une qualité, au niveau du contenu, heureusement supérieure à ce que laisse prévoir un titre amphigourique : « Hedy’s Folly. The Life and breakthrough Inventions of Hedy Lamarr, the most beautiful woman in the world”. Rhodes a bien étudié la question,

le journal des avocats

s’est procuré des documents d’un haut intérêt (notamment la biographie inédite de l’épouse d’Antheil), et livre un récit plausible, parfois fort technique, levant enfin un coin du voile. Selon lui, Hedy Lamarr est l’instigatrice du projet, et c’est elle qui a été mue la première par l’idée d’imaginer un système de guidage des torpilles lancées par les sous-marins américains. Elle était motivée par sa haine du nazisme, et ses connaissances en matière d’armement datent de l’époque où, mariée à 18 ans contre son gré avec Fritz Mandl, fabricant d’armes et troisième fortune d’Autriche, elle a emmagasiné dans sa mémoire les innombrables conversations entre son mari et les divers clients de celui-ci, lors de repas à domicile, où elle était autorisée à être présente pour mieux relever les conversations de sa seule et passive beauté. Elle s’était dit que ce stock de savoir technique serait son passeport pour les Etats-Unis, tant était grand son désir de fuir, à la fois sa patrie et son mari. Une fois aux USA, elle proposa d’ailleurs ses services à l’Inventor’s Council, arguant des connaissances acquises en Autriche en matière d’armement, mais on lui opposa qu’elle était trop belle pour être prise au sérieux… Jamais elle ne se cacha d’être une inventrice, y consacrant du temps, réservant à cette occupation une des pièces de sa fastueuse demeure à Hollywood ; et elle déposa plusieurs brevets avant celui du guidage des torpilles. L’on peut d’ailleurs aisément trouver sur Internet des photos d’elle, avec cette légende, sans doute un rien excessive : « Actress Hedy Lamarr was also a mathematician (?) and the inventor of frequency hopping spread spectrum, a technology still used for Bluetooth and Wi-Fi. » Et Antheil? Sa rencontre avec Hedy Lamarr semble justifiée par le fait qu’assez curieusement, il avait des connaissances en endocrinologie, et qu’elle se plaignait d’avoir de trop petits seins…

Il partageait sa haine du nazisme, et leur chance fut que, grâce au Ballet mécanique, il était devenu un véritable spécialiste de la synchronisation entre différents pianos mécaniques fonctionnant avec des cartes perforées. Enfin, toujours selon Randolph, il n’y eut pas d’idylle entre eux (« an affair », comme disent les anglo-saxons), même si certains indices laissent à penser qu’Antheil aurait bien voulu… Mais ils passèrent de longues soirées à discuter « torpilles », et à réfléchir aux

façons d’empêcher les radars allemands de les intercepter.

Telle est la partie visible de la très romanesque histoire de la Belle et du musicastre. On aimerait en savoir plus et on peut tenter de l’imaginer. Quel beau sujet pour l’un de ces romans mêlant fiction et réalité comme il s’en écrit tant aujourd’hui, tantôt sur la mort de Jayne Mansfield (« Jayne Mansfield 1967 », de Simon Liberatori), tantôt sur le séjour de Marcel Duchamp au Maroc (« Orchidée fixe », de Serge Bramly), tantôt sur la vie du découvreur du bacille de la peste (« Peste et Choléra », de Patrick Deville). Je prends rang pour écrire celle de George et d’Hedy.

Que la présente soit considérée comme valant demande d’antériorité. Il restera à expliquer comment l’on passe de la synchronisation entre pianos mécaniques au guidage de torpilles…

Jean-Pierre BOURS

BOU

En plus de sa carrière cinématographique Hedy Lamarr est connue comme ayant, sous le nom de Hedy Kiesler Markey et avec son ami le compositeur George Antheil, déposé le brevet d'un système de codage des transmissions appelé étalement de spectre, proposé alors pour le radioguidage des torpilles américaines durant la Seconde Guerre mondiale, bien qu'il ne fût pas appliqué (Brevet des USA 2,292,387). La technique réapparut dans le domaine militaire dans les années 1960. De nos jours elle est par exemple utilisée par les systèmes de positionnement par satellites (GPS, GLONASS), les liaisons chiffrées militaires, les communications de la Navette Spatiale avec le sol, et plus récemment dans les liaisons sans fil Wi-Fi.

De nombreux compositeurs contemporains ont eu recours à des instruments de musique mécanique pour leurs œuvres, souvent avantgardistes d’ailleurs: L'oeuvre la plus célèbre du compositeur d’avant-garde américain George Antheil (1900-1959), « Le Ballet mécanique », date de 1924. Le terme de « ballet » est quelque peu usurpateur, car le compositeur n’a pas prévu de chorégraphie à proprement parler sur sa musique, qui était initialement prévue comme bande sonore d’un film du même nom par le dadaïste français Fernand Léger et le cinéaste Dudley Murphy. Mais comme Antheil et les producteurs du film travaillaient séparément, ils ne se sont rendus compte que lors des premières séances de synchronisation que la musique durait deux fois plus longtemps que le film. Le projet a donc été abandonné.

La première du film a eu lieu en 1924 à Vienne, sans la musique d’Antheil, bien que référence a été faite au « synchronisme musical de Georges Antheil » ! Quant à la partition d’Antheil, la première version de 1924 a été écrite pour 16 pianos mécaniques, jouant 4 parties différentes, 4 grosses caisses, 3 xylophones, 1 tam-tam, 7 cloches électriques, une sirène, 3 hélices d’avion de différentes dimensions, ainsi que 2 pianos conventionnels. Mais jusque dans les années 1990, cette version n’a jamais été jouée, puisque la technologie pour relier et synchroniser plusieurs pianos mécaniques, bien que possible en théorie, s’est avérée irréalisable dans la pratique. Afin de parer aux difficultés techniques, Antheil a donc rapidement remanié les parties pour piano, comprenant un multiple non spécifié de deux pianos conventionnels et un piano mécanique.

Cette version, présentée en 1926 à Paris avec 10 pianos conventionnels, était un succès, mais en 1927, lors d’un concert fatidique au Carnegie Hall à New-York, elle a provoquée un tel fiasco technique et musical qu’elle n’a plus jamais été rejouée pendant plus de 60 ans. En 1953, après s’être établi comme compositeur de films à Hollywood, Antheil a révisé cette partition une nouvelle fois, en utilisant un ensemble très différent de 4 pianos, 4 xylophones, 2 cloches électriques, 2 hélices d’avion, des timbales, un Glockenspiel et une section de percussion.

Cette version, plus resserrée et plus courte que les versions antérieures, est relativement souvent jouée et a plusieurs fois été enregistrée. Mais la carrière de George Antheil, en tant que compositeur « sérieux », n’a jamais vraiment été rétablie depuis la débâcle de New-York.

La première mondiale de la version originale du « Ballet mécanique » a finalement eu lieu, 75 ans après sa composition et 40 ans après la mort du compositeur, dans le hall de concert de l’Université de Massachussetts Lowell, le 18 novembre 1999, avec 16 Disklaviers Yamaha, commandés par un ordinateur avec séquenceur MIDI! (Source : Wikipédia)

STRESSLESS OFFICE ®

RÉVOLUTIONNE L'UNIVERS PROFESSIONNEL Imaginez que l’endroit où vous passez le plus de temps - votre travail, au bureau ou à la maison - devienne aussi un espace de plénitude et de bien-être. Imaginez que “les

THE INNOVATORS OF COMFORT™ (1)

innovateurs du confort” qui ont créé chaque modèle Stressless® depuis 40 ans, aient aussi pensé à votre confort dans votre univers professionnel. Passez du rêve à la réalité en venant essayer le confort Stressless® “sur roulettes” chez votre revendeur.

(1)

Les innovateurs du confort

N O U V E A U T É

Stressless® Jazz Office

12 modèles au choix dans plus de 100 coloris de cuirs et tissus

Stressless® Magic Office

Stressless® Consul Office

Fauteuil Stressless® Magic Office

Fabriqué en Norvège

www.stressless.be

Stressless® Blues Office

"LA

VERTICALE

POIGNARDE

LE CIEL ET

LE SOL"

*

ET L'ARCHITECTE ?…

Bâtonnier de l’Ordre des avocats du barreau de Dinant, Roger Chaidron a placé ses pas dans ceux de Charles Foucauld à Tamanrasset, recherché les traces d’Arthur Rimbaud au Yémen et aussi rencontré les réfugiés tibétains au Sikkim. Il pratique la course à pied (hors compétition), et aujourd’hui s’interroge sur la finalité de tous ces chemins parcourus.

* Citation de l’architecte Balladur, concepteur de La Grande Motte.

le journal des avocats

CHA

Une fois franchi ce site, la campagne s'étendait à perte de vue laissant alterner dans un vert désordre les champs, les prés et les bosquets.

Nous fîmes halte devant un boqueteau d'essences mêlées.

Il était toutefois clôturé de barbelés à ce point distendus qu'en poussant ici et en soulevant là, le moins souple des humains pouvait s'en rire.

Manifestement le lieu était entretenu. Une bande d'herbe fraîchement tondue dessinait une allée qu'il suffisait d'emprunter. Sont-ce les barbelures de la clôture ou les soins même sommaires apportés au lieu, mais nous nous parlions à voix basse.

Ce n'était pas la crainte d'être entendus ou surpris qui nous dictait cette soudaine discrétion mais l'intuition d'une découverte imminente, un pressentiment.

ous venions d'assister aux derniers soubresauts d'un printemps humide et froid. Il y avait bien eu quelques journées ensoleillées et douces comme des flèches lumineuses mais éphémères pointant vers le ciel d'une nature triste qui n'oubliait pas l'hiver.

Le dernier dimanche de juin cependant nous prîmes la route en quête de rêves oubliés.

Le village que nous avons traversé avait les allures d'une petite ville de province. Plusieurs écoles, quelques restaurants et cafés, des commerces divers... tous les signes extérieurs d'une vie collective à d'autres moments grouillante sans doute.

Au sortir du village, en empruntant la voie qui conduisait vers la Régie des Routes, une carrière en exploitation ouvrait sur le ciel les entrailles d'une terre rocailleuse et rougissante à mesure que le regard descendait vers ce qui fut il y a longtemps l'abysse.

« L’imagination la plus folle a moins de ressources que le destin. » De Claude Aveline.

Rien a priori ne distinguait celui-ci des autres qui donnaient aux champs une certaine densité.

Nous étions cependant avertis. C'est un chantier que nous allions découvrir. Nous en avions vu déjà et rien ne justifiait que cette perspective suscite un tel émoi. À moins que certains lieux ne puissent générer une dimension du sacré qui de nous se rend maître?

Nous remontâmes l'allée herbeuse en silence.

Le chemin s'arrêtait là où la faux avait suspendu son mouvement.

La végétation n'avait cessé de croître et des arbustes en désordre faisaient obstacle.

Au milieu d'eux, semblant garder une distance courtoise des frondaisons hirsutes, un appareil de béton et d'acier blanc crevait l'espace avec la majesté déchue des civilisations oubliées.

Sur un soubassement de béton ouvragé, les fines lames d'acier se dressaient impétueuses à l'assaut d'un ciel trop bas.

Les structures verticales renvoyaient à une architecture ogivale et donnaient à voir, à présager plutôt, la cathédrale à l'échelle de l'homme.

Car ce n'est pas le gigantisme de l'ouvrage qui suscitait l'émotion mais précisément cette force contenue dans chaque élément mis en œuvre.

Les fondations en béton permettaient d'abriter les caves et le local technique.

Un tableau électrique siégeait au pied de quelques marches permettant l'accès à l'air libre et de ce coffret s'échappaient tels des tentacules dont les extrémités étaient visibles dans ce qui devaient être les pièces de l'habitation, des tuyaux anciennement colorés et par lesquels en flot cuivré se répandrait l'énergie.

Les lieux de vie avaient été conçus sous la forme circulaire tandis que les pièces de repos apparaissaient rectangulaires ou carrées. Pour ces dernières, des ouvertures vers l'extérieur, des fenêtres peut-être, respectaient cette géométrie anguleuse. Partout ailleurs, la courbe, le cercle, s'imposaient à la vue.

Les parois d'acier en paraissaient plus légères.

Ici ou là, des ouvertures articulées sur charnières dessinaient une lune au croissant allongé.

Dans l'attente d'une toiture que l'on pouvait imaginer plate, en prenant du recul par rapport

le journal des avocats

à l'espace bâti, des bras rigides solidarisaient les lames d'acier.

oublier que derrière cet objet unique il y avait un homme.

Mais cette couverture sera-t-elle jamais tirée sur cette construction défiant l'orthodoxie architecturale?

Un homme qui centimètre par centimètre avait tout conçu et tout réalisé.

Qui avait gagné à sa cause une épouse aimante, des artisans aussi aventuriers que lui, voire des élèves...

Trente années d'un travail méticuleux, sans concession au temps, à la mode.

Nous éprouvions un sentiment qui, tel un balancier, oscillait entre l'admiration et le manque.

Nous étions ébaubis devant ce travail hors norme.

L'ouvrage d'une vie par le bâtisseur d'un seul rêve.

Rien ne ressemblait à rien.

Aura-t-il jamais la force d'en finir?

Le coffrage du béton donnait à voir des hautsreliefs inattendus sur un tel matériau, tandis que l'inclinaison de la partie hors-sol des murs de fondation ainsi ornés isolait la construction et lui permettait de s'inscrire entre terre et ciel, comme un vaisseau intergalactique qui aurait été mu par la seule force du vent s'engouffrant dans les voiles blanches d'acier les nuits de pleine lune.

Peut-être cependant faut-il que rien jamais ne soit achevé et que se poursuive le rêve qui occupera ses nuits de pleine lune.

Mais ce travail était inachevé. Il nous permettait sans doute de laisser libre cours à notre imagination, bien que nous ne pouvions pas

Roger Chaidron

CHA

Bij Stefaan De Clerck

‘Vergeet Guggenheim, denk (Tate) modern.’ Dit is de kernboodschap van Paul Dujardin in De Standaard van 23 juli 2013. ‘Sterarchitectuur om er kunst in onder te brengen. Er zijn geslaagde voorbeelden van te vinden. Maar net zo lief zijn er collecties op voortreffelijke wijze ondergebracht vertrekkend van het bestaande patrimonium.’ De auteur hoopt dat die piste wordt bewandeld voor moderne kunst in Brussel.

Paul Dujardin heeft groot gelijk. In Brussel zijn alle ingrediënten aanwezig om een indrukwekkend cultureel project verder uit te bouwen, alleen moet een integrale visie worden ontwikkeld en moeten alle overheden, van Europa tot de stad Brussel, mee willen.

1.

Fascinerende culturele en wetenschappelijke instellingen zijn er gehuisvest met een rijke collectie of een schitterend patrimonium: de Koninklijke Musea voor Kunst en Geschiedenis (KMKG), het Koninklijk Instituut voor Kunstpatrimonium (KIK), de Koninklijke Musea voor Schone Kunsten van België (KMSKB), de Koninklijke Bibliotheek van België (KBB), het Koninklijk Conservatorium, het Paleis voor Schone Kunsten (PSK), De Munt, …

Par Stefaan De Clerck

“Oubliez Guggenheim, pensez (Tate) moderne.”

C'est le message fondamental de Paul Dujardin dans le journal « De Standaard » du 23 Juillet 2013. « Une architecture vedette pour héberger l’art. C’est possible de trouver des exemples réussis. Mais il y a aussi des collections très bien rangées quand on part d’un patrimoine existant. » L'auteur espère que cette piste sera suivie pour l'art moderne à Bruxelles.

Paul Dujardin a tout à fait raison. A Bruxelles, tous les ingrédients pour développer un projet culturel impressionnant sont présents, il suffit seulement de développer une vision intégrale et la volonté de toutes les autorités, d’Europe jusqu’à la ville de Bruxelles.

Voici quelques institutions culturelles et scientifiques fascinantes où sont logés des riches collections ou un patrimoine prestigieux: les Musées royaux d'Art et d'Histoire (MRAH), l'Institut royal du Patrimoine artistique (IRPA), les Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique (MRBAB), le Palais des Beaux-Arts (PSK), la Bibliothèque royale de Belgique (KBB), La Monnaie, …

Stefaan De Clerck est avocat, marié et père de cinq enfants. Décoré Commandeur de l’Ordre de Léopold (2001) et Chevallier de la Légion d’Honneur (2006). Il fut membre du Parlement (de 1990 à 2013) et à deux reprises Ministre de la Justice. Récemment nommé Président du Conseil d’Administration de Belgacom, il a précédemment assuré la charge de bourgmestre de Courtrai et de nombreuses autres fonctions à très hautes responsabilités.

DEC

« Pour créer, il suffit d’avoir une grande imagination et une pile de vieilleries. » De Thomas Edison.

le journal des avocats

2.

3.

De bestuursovereenkomst heeft het ambitieus over een nieuw organigram, nieuwe beheersorganen, nieuwe musea, businessplannen… Maar deze hervorming dreigt opnieuw stil te vallen. In het Parlement worden regelmatig vragen gesteld over de timing voor de creatie van de ‘pool kunsten’, de renovatie van het operagebouw van de Munt, de aanpak van het Koninklijk Conservatorium van Brussel, de beleidsambities met betrekking tot het Paleis voor Schone Kunsten (PSK), etc… Er is geen scherpe beleidsvisie en dit is bijzonder spijtig voor de Brusselse culturele metropool.

Vanuit het concept van de ‘culturele mijl’ moeten een serie gebouwen en functies worden verbonden met elkaar. Rond de stedelijke as van de Munt en Bozar, over de Koningstraat en de Regentschapsstraat tot aan het Poelaertplein liggen ook de KMSKB, de KBB, het Conservatorium en zovele andere indrukwekkende gebouwen en instellingen. Ook het Justitiepaleis biedt bijzondere mogelijkheden.

Zoals Dirk Van Gerven en Benôit Feron stellen in editie n°11 van Journal des Avocats, is dit gebouw het grootste justitiegebouw ter wereld. De auteurs pleiten in hun bijdrage om het Justitiepaleis in de toekomst integraal te bestemmen voor een moderne (Europese?) Justitie. Maar met 45.000 m² beschikbare ruimte zou aanvullend ook een culturele bestemming kunnen nagestreefd worden binnen dit iconisch gebouw. Door de Regie der Gebouwen werd recent de opdracht gelanceerd voor de juridische, financieel/economische en technische bijstand voor adviesverlening voor de uitwerking van het masterplan rond de Poelaertsite te Brussel. Verder keuzes dringen zich ook hier op.

Een integrale benadering van deze instellingen, gebouwen en collecties door alle betrokken overheden samen, is een gigantische opportuniteit.

Al deze instellingen liggen slechts op een boogscheut van elkaar verwijderd. Het PSK, het Koninklijk Conservatorium, de KMSK, de KMKGB, het KIK, de BIB, zijn schitterende culturele juwelen. Deze instellingen worden op zeer diverse wijze beheerd.

De culturele mijl kan voor Brussel een nationale en internationale troef worden. De federale overheid met betrokkenheid van de gemeenschappen, de universiteiten en private partners moeten een hedendaagse visie neerzetten. Vlaanderen (en zijn vele culturele actoren in Brussel) moet intens participeren in die Brusselse ontwikkeling. Het project kan naast de culturele ook een enorme toeristische impuls geven.

Het versterken van twee geografische polen -een in het Jubelpark, een andere rond de Kunstbergverdient daarbij ondersteuning. Maar nog belangrijker dan de reorganisatie op zich is de globale visie die er achter zit en misschien ook het gevaar van een eenzijdig opgedrongen agenda.

De opdracht om al deze monumentale gebouwen te restaureren en op te waarderen (op een hedendaagse manier) is zo gigantisch dat het weinig zin heeft nu te denken in termen van een spectaculaire nieuwbouw. First things first.

Ons roerend en onroerend kunstpatrimonium is

Het regeerakkoord Di Rupo voorziet dat de modernisering van enkele federale wetenschappelijke instellingen (FWI zal worden voortgezet. Daartoe stelt de bestuursovereenkomst 2012-2015 tussen de Minister van Federaal Wetenschapsbeleid en Belspo (Programmatorische federale Overheidsdienst Wetenschapsbeleid) de creatie van een ‘pool kunsten’ voorop.

DEC

4.

L’accord du gouvernement Di Rupo prévoit que la modernisation de plusieurs institutions scientifiques fédérales (FSI) sera poursuivie. À cette fin, l’accord administratif 2012-2015 entre le ministre de la Politique scientifique et Belspo (Politique scientifique fédérale belge) met la création d'un « pool arts » en avant.

L’accord administratif parle ambitieusement d’un nouvel organigramme, de nouvelles autorités de gestion, de nouveaux musées, de plans d’entreprise... Mais cette réforme risque de s’arrêter à nouveau. Au parlement, on pose régulièrement les questions suivantes: sur le timing pour la création du «pool arts», sur la rénovation du bâtiment de la Monnaie, sur l'approche du Conservatoire Royal de Bruxelles, sur les ambitions politiques en ce qui concerne le Palais des Beaux- Arts, etc .... Il n'y a pas une vision politique forte et cela est vraiment regrettable pour la métropole culturelle bruxelloise.

Une approche globale de ces institutions, bâtiments et collections par toutes les autorités serait une énorme opportunité. Toutes ces institutions sont seulement à un jet de pierre l'une de l'autre. Le Palais des Beaux Arts, le Conservatoire Royal, les Musées royaux d’Art et d’Histoire, les Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, l’IRPA, sont des joyaux culturels éclatants. Ces institutions sont gérées d'une manière très différente.

Le renforcement de deux pôles géographiques - un dans le Cinquantenaire, un autre autour du Mont des Arts, mérite d'être soutenu. Mais ce qui est plus important que la réorganisation elle-même, c’est la vision globale et peut-

5. être aussi le danger de l'ordre du jour imposé unilatéralement.

A partir du concept « étape culturelle », il faut lier une série de bâtiments et fonctions. Autour de l'axe urbain de la Monnaie et des Bozar, la Rue Royale et la Rue de la Régence jusqu’à la Place Poelaert, il y a les Musées royaux d’Art et d’Histoire, la Bibliothèque royale de Belgique, le Conservatoire et beaucoup d’autres bâtiments et institutions impressionnants.

Le Palais de Justice offre aussi des possibilités spéciales. Comme Dirk Van Gerven et Benoît Feron citent dans l’Edition n° 11 du Journal des Avocats, ce bâtiment est le plus grand bâtiment de la justice dans le monde. Les auteurs plaident dans leur contribution pour destiner intégralement le Palais de justice à une justice moderne (européenne?). Mais avec les 45.000 m² d'espaces disponibles, on pourrait également favoriser une destination culturelle dans ce bâtiment. La Régie des bâtiments a lancé récemment une mission de conseil pour l'assistance juridique, financière/économique et technique pour le développement du masterplan sur le site Poelaert à Bruxelles. D'autres choix s’imposent ici.

L’ «étape culturelle » pourrait devenir un atout national et international pour Bruxelles. Le gouvernement fédéral avec la participation des communautés, des universités et des partenaires privés doivent établir une vision contemporaine. La Flandre (et ses nombreux acteurs culturels à Bruxelles) doivent participer intensément dans ce développement bruxellois.

Le projet peut donner aussi bien un élan culturel qu’un élan touristique.

6.

indrukwekkend. Het zou zeer vernieuwend zijn om dit patrimonium alle aandacht en uitstraling te geven die het te lang heeft moeten ontberen.

Wanneer kunnen we gewoon nog eens onze fantastische kunstcollecties bewonderen, behoorlijk gepresenteerd in die monumentale gebouwen?

Wanneer kunnen we nu eens alle geïnteresseerden samen zien werken om tot een gemeenschappelijk gedragen dynamiek te komen eerder dan eenzijdig opgedrongen modellen te moeten ondergaan.

Brabant. In overleg met de federale staat, de gewesten en gemeenschappen, de betrokken provincies en steden en gemeenten -maar ook in aanwezigheid van Europa!- is een groot emblematisch cultureel project noodzakelijk voor de verdere ontbolstering van ons aller hoofdstad.

Uiteraard zal de gehele culturele en academische wereld er alleen maar baat bij hebben.

Een vernieuwende eurometropole structuur is de enige mogelijkheid om de complexiteit van onze bestuurslagen op te vangen.

Ook daarom zou een hedendaagse beheersstructuur (zeker voor de ‘pool kunst’) moeten vastgelegd worden met zoveel mogelijk autonomie en betrokkenheid van de gemeenschappen in de raad van bestuur. Een vennootschap van publiek recht (zoals Bozar) lijkt me optimaal.

Een grote positieve coalitie voor vele uitzonderlijke Brusselse culturele monumenten.

Er is een nieuw internationaal cultureel leven ontstaan in Brussel: nieuwe galerieën, kunstencentra, festivals, dansscholen en theaterhuizen. Het verfrissen van het historisch patrimonium kan die vernieuwende beweging alleen maar versterken en verder verankeren met zijn originele collecties en zijn typische architectuur.

Stefaan De Clerck Voorzitter Eurometropool Lille-Kortrijk-Tournai Gewezen volksvertegenwoordiger en gewezen minister van Justitie

Per definitie zijn de financiële middelen beperkt.

Daarom moeten scherpe investeringen primeren.

Naar mijn mening moeten die overheidsmiddelen integraal naar de restauratie gaan van de (al zeer) verkommerde gebouwen.

Tot slot meen ik dat alles ook een prioritaire opdracht zou moeten zijn, niet voor de stad of het gewest, maar voor de Eurometropool Brussel-

Als we daarin slagen wordt Brussel ook een wereld-hoofdstad.

1. De munt / La Monnaie 2. Musea van het Verre Oosten / Musées d'Extrême-Orient 3. Hallepoort / Porte de Hal 4. Jubelparkmuseum / Musée du Cinquentenaire 5. Muziekinstrumenten-museum / Musée des instruments de musique

DEC

7.

La mission pour restaurer et revaloriser tous ces bâtiments monumentaux (de façon contemporaine) est tellement énorme qu'il n'y a guère de sens maintenant à penser en termes d'une construction neuve spectaculaire. First things first. Notre patrimoine culturel mobilier et immobilier est impressionnant. Il serait très innovant de donner à ce patrimoine toute l’attention et la présence dont il a manqué trop longtemps. Quand pouvons-nous admirer encore une fois nos collections d’art fantastique, présentées convenablement dans ces bâtiments monumentaux?

doivent aller entièrement à la restauration des bâtiments (déjà très) négligés.

Quand pouvons-nous voir travailler toutes les personnes intéressées afin d’obtenir une dynamique portée en commun plutôt que de subir des modèles imposés unilatéralement.

Une nouvelle structure eurométropole est l’unique possibilité pour compenser la complexité de nos niveaux hiérarchiques.

Pour cette raison, il faut définir une structure de gestion contemporaine (surtout pour le « pôle d’art ») avec un maximum d’autonomie et la participation des communautés dans le Conseil d’administration. Une société de droit public (comme le Bozar ) me semble optimale .

Une nouvelle vie culturelle internationale est née à Bruxelles: nouvelles galeries, centres d'art, festivals, écoles de danse et théâtres. Rafraîchir le patrimoine historique pourra renforcer ce nouveau mouvement et pourra rendre ses collections originales et son architecture typique durable.

Par définition, les ressources financières sont limitées. Par conséquent, les investissements doivent primer. À mon avis, les moyens publics

Enfin, je crois aussi que tout doit être une mission prioritaire, pas seulement pour la ville ou la région, mais pour l'Eurométropole Bruxelles-Brabant. En concertation avec l’Etat fédéral, les régions et les communautés, les provinces, les villes et les communes, mais aussi en présence de l’Europe, un grand projet culturel emblématique est nécessaire pour notre capitale. Bien entendu le monde culturel et universitaire y gagnera.

Une grande coalition positive pour beaucoup de monuments culturels bruxellois exceptionnels.

Si nous réussissons cela, Bruxelles deviendra une capitale du monde.

Stefaan De Clerck Président de l’Eurométropole Lille-KortrijkTournai. Ancien parlementaire et ancien Ministre de la justice

6. De Koninklijke Bibliotheek van België / Bibliothèque royale de Belgique 7. Bozar / Bozar

POUVOIR ET POUVOIR Par Herman DE CROO

Herman De Croo siège sans interruption depuis bientôt 46 ans comme élu au Parlement Fédéral.

Il fut 11 ans Ministre de différents départements. Durant deux législatures président de la Chambre, président de Parti et plusieurs fois président de groupe.

Mogen en kunnen…

L’Anglais -c’est une très belle langue, adorable à l’esprit et à l’oreille lorsque l’on assiste un dimanche matin à Londres, à Westminster au grand sermon du matin- a conservé à son tour une distinction de vocabulaire : to may- to can.

Pouvoir… pouvoir.

Sans pluriel, car souvent le nom commun est enfant chéri du verbe et dans le langage où je néologise trop souvent, le nom commun se fait verbe : le verbe souvent, dans mon vocabulaire préféré, à la fantaisie parfois débridée, devient chair, parfois très chèr.

Peut-être que pouvoir c’est pouvoir, et que le nom commun se fond avec le verbe pour montrer à la fois la puissance de ce dernier et la réserve non pétrifiée du précédent. Lorsqu’on peut…, parfois on arrive à le faire dans cette langue mystique de tous les jours et souvent au début dans nos écoles c’est qu’on sait… le faire.

Men weet het te kunnen… men weet het te kennen.

Nombreux sont les écrivains, les philosophes, les psychologues, les psychiatres, les hommes politiques, les « pouvoirs » dans notre société les plus ou moins puissants où la plasticine de nos langues est pétrie par l’imagination, l’audace, la fantaisie, la tonitruance où la frêle discrétion des propos chuchotés. « Puise » avec la forme interrogatoire parfois volontariste, comme une sorte d'alibi, naître un pré avertissement à ce que l’on envisage, plus que cela, l’on pose comme acte déjà débuté après l’interrogation de politesse ou d’investissement du « puis-je ».

Je possède le bonheur de la duplicité verbale, la tendresse du double sens, la rugosité auto suffisante des mots à plénitude qui, flacon de parfum oublié ou d’être fermé, s’évapore dans l’environ de notre esprit, de notre volonté, de notre insuffisance.

DEC

« Il vaut bien mieux avoir de l'imagination que de la mémoire. » De Charles Joseph de Ligne - Extrait de Mes écarts.

le journal des avocats

Pouvoirs

Le nom commun se rétrécit d’avantage ; il garde du verbe sa capacité d’agir et résume ce que l’on pourrait, ce que l’on peut, ce que l’on croit pouvoir faire.

Pouvoir, c’est davantage l’énumération des situations d’actes de potentialité d’un sens du verbe coulé dans un capital d’actions, de possibilités, du concret.

Certaines constitutions, chartes parfois hasardeuses, difficiles, souvent nées d’un élan à la fois généreux et théorique, énumèrent avec tant de fascination que les termes légaux ont pour plus d’un esprit, la tentation dernière… tous les pouvoirs émanent de la Nation.

La Nation peut donc tout, ou rien ne se peut sans la Nation. Formé à l’excellence compétitive du Collège des Jésuites où j’avais appris à exceller grâce à ma flexibilité caractérielle et intellectuelle, aidé par une mémoire qui me lâcha très rarement, j’avais appris, et je ne l’ai point oublié, que la force du pouvoir c’est de peu l’exercer, et le sommet serait : de ne jamais l’utiliser : Quel pouvoir… d’en posséder et de ne jamais l’employer ?

Pouvoir autorisation, limitation, manière d’agir, avertissement, appel au consensus, au choix d’une majorité numérique qualitative parfois déchirante dans ses conclusions… Qu’est-ce qui m’est autorisé quand, comment, avec qui, combien de temps, à quoi… ces questions nous collent à l’esprit, nous touchent le cœur et les reins, se limitent à nos capacités…. encore un si beau mot où le latin concentre le double sens capacitas, physiques, psychiques, intellectuels, marqués, démarquées, balisés, dévalués, le dilué ou… le concentré de nos expériences de vie, de notre déterminisme psychologique, physique, du DNA de notre famille, de notre tribu, de notre siècle, de notre humanité, de notre histoire, limite due à la réalité souvent, au hasard quelque fois, de ce que l’on peut, ce dont on est… capable par rapport à l’abstrait, par rapport au concret des autres… de faire.

Le pouvoir, la capacité de pouvoir

Je me laisse parfois bercer par la musique et la mystique du mot, par sa défragmentation, une fois que mentalement je l’ai scindé, divisé, multiplié, préfixé, post-fixé et parfois pour pousser l’audace un dictionnaire plus loin, verbalisé.

Non pas parce que verbaliser serait notuler une situation qui atteint une règle, mais parce que c’est faire d’un adjectif ou d’un nom commun un verbe, d’activer le mot, de le dynamiser, de le faire bouger et… tourner en rond, ce qui mentalement, est encore avancer, c'est-à-dire penser et créer. Savoir… savoir de quoi on est capable et avec cette capacité savoir quel est son pouvoir, c'est-à-dire ce que l’on peut et c’est pouvoir… ce que l’on sait faire, et un peu plus loin, ce que l’on ose faire ou penser à faire.

Herman DE CROO

DÉCOUVREZ CINQ BRASSERIES D’EXCEPTION

AUX QUATRE COINS

DE BRUXELLES

Où que vous soyez à Bruxelles, savourez une exquise cuisine de brasserie et de succulentes préparations françaises à deux pas. Votre repas entre amis ou votre réunion d’affaires sera toujours un plaisir. Confort contemporain, terrasse magnifique, plaine de jeux, salle de jeux pour enfants, salles de banquets, fumoir, parking aisé ou service voiturier... chaque brasserie est un coin de paradis.

Brasserie du Prince d’Orange Avenue du Prince d’Orange 1 • 1180 Uccle +32 2 375 23 05

Brasserie des étangs Mellaerts Bld. du Souverain 275 • 1150 Woluwe-Saint-Pierre +32 2 779 36 19

Chalet du Laerbeek Avenue du Laerbeek 145 • 1090 Jette +32 2 478 08 88

Brasserie du Heysel Chaussée Romaine 650 • 1853 Strombeek-Bever +32 2 460 47 75

BrasseriesRN de Waterloo Chaussée de Bruxelles 35 • 1410 Waterloo +32 2 354 98 54 Trois ambiances gustatives dans un seul endroit :

NICOLAS de STAËL Mon « Maître » à peindre Par Nicole DEPREZ

ECLAIRS

HASARD

ACCIDENT

EVENEMENT

IMAGINATION Nicole Deprez est peintre Avocat au Barreau de Charleroi Association DENIS-DEPREZ Licenciée en droit fiscal Licenciée en notariat Photographies de Bernard Mairesse

« Je crois à l'imagination. Ce que je ne vois pas est infiniment plus important que ce que je vois. » De Diane Michais.

le journal des avocats

DEP

le journal des avocats

« C’est si triste sans tableaux la vie, que je fonce tant que je peux » (lettre à sa femme Françoise mai 1954)

« Lorsque ma peinture devient bonne, je sens toujours atrocement une grande part de hasard, comme une chance et un vertige »

La composition va du rythme touché au tout le moins touché possible évidemment. Mais tout cela tient à je ne sais quel alphabet dont on ne perçoit qu’une partie » (lettre à Jacques Dubourg, juin 1952)

« Je ne peux pas prévoir ce que je ferai demain, mais pour l’instant je suis au maximum du plan aux confins de la toile vierge, je veux dire que la surface peinte tente sa forme comme si elle était encore vierge …

« Les tableaux comme d’habitude, trois pas en avant deux en arrière, et de petits éclairs trop brefs » (lettre à Betty Bouthoul janvier 1955)

« Le travail va par à-coup, de la terreur lente aux éclairs » (lettre à René Char novembre 1953)

DEP

« Le contact avec la toile, je le perds à chaque instant et le retrouve et le perds… Il le faut bien car je crois à l’accident, je ne peux avancer que d’accident en accident ; dès que je sens une logique trop logique, cela m’énerve et vais naturellement à l’illogisme.

Tout cela bien sûr n’est pas facile à dire, n’est pas facile à voir, il n’y a pas de vocabulaire et si, vous voulez, le système métrique de cela restera à inventer lorsque j’aurai fini de peindre.

Il y a très peu de tableaux que je vois dans leurs dimensions exactes, que ce soit de souvenir ou face à face, et mes dimensions à moi, c’est franchement comme je vois au hasard, avec une obstination constante, c’est même cela qui fait que, lorsque je vois, je ne vois comme personne d’autre. »

« Je peins comme je peux, et j’essaie chaque fois d’ajouter quelque chose en enlevant ce qui m’encombre. Je ne suis pas Jean-Baptiste Corot, je ne vois que de loin ; avoir le nez sur le tableau m’est impossible ; évidemment, parfois, c’est trop esquisse sans être esquisse, surtout de près, c’est rien, comme un calicot ; il faut s’habituer à finir plus sans finir, ce n’est pas facile. Bon. » (lettre à Cooper janvier 1955)

Nicole Deprez « pour » Nicolas de STAËL (1914-1955)

PS : L ettre de Romain Gary à Nicolas de Staël février 1954 : « Cher Monsieur, Je viens de voir, chez Rosenberg, vos toiles admirables et je tiens à vous dire le plaisir incessant que je prends à les regarder. Ce qu’une simplicité trompeuse peut cacher de finesse et de profondeur, sans parler d’années de travail, ce n’est pas à moi de vous le dire, mais c’est une peinture en quelque sorte, illimitée, qui vous donne de l’imagination et vous force, vous, simple spectateur, à avoir du génie.

Vous êtes le seul peintre moderne qui donne du génie au spectateur. Chaque toile ouvre des possibilités de rêve absolument étonnantes. »

BAUKUNST ZWISCHEN RHEIN UND MAAS IM 18. JAHRHUNDERT

COUVEN ARCHITECTURE ENTRE RHIN ET MEUSE AU 18ème SIECLE

Par Klaus HEINEMANN

Klaus Heinemann ist belgischer Avocat und deutscher Rechtsanwalt. Seit 1991 ist er in Brüssel tätig, zunächst in einer internationalen Anwaltskanzlei, seit 2007 als Partner der Sozietät Marx Van Ranst Vermeersch & Partners. Sein Schwerpunkt ist das Handels- und Gesellschaftsrecht. Klaus Heinemann ist Präsident der Belgisch-Deutschen Juristenvereinigung, die jedes Jahr in beiden Ländern Vortragsveranstaltungen ausrichtet. Als Liebhaber der klassischen Musik ist er auch Präsident des Verwaltungsrats des Brussels Philharmonic Orchestra.

Klaus Heinemann est à la fois avocat belge et allemand. Etabli à Bruxelles depuis 1991, il a passé de nombreuses années dans un cabinet international avant de rejoindre, en 2007, le cabinet Marx Van Ranst Vermeersch & Partners où il pratique le droit des sociétés. Il est le président de l’association de juristes belgo-allemande qui organise chaque année des colloques dans les deux pays. Grand amateur de musique classique, il préside également le conseil d’administration du Brussels Philharmonic Orchestra.

Eine Tagung der Belgisch-Deutschen Juristenvereinigung, deren Vorsitzender der Autor ist, gab den Anstoß zu diesem Beitrag. Die Tagung fand statt im Festsaal des Couven-Museums in Aachen. Die Vorbereitung der Tagung ließ mich Couven (neu) entdecken. Zwei Baumeister des 18. Jahrhunderts (Vater und Sohn) aus der Aachener Heimat mit Ausstrahlung weit ins heutige Belgien, in dem ich seit über 20 Jahren lebe und arbeite. Ein belgisch-deutsches Thema war gefunden, ohne juristischen Einschlag, aber mit einer persönlichen © Norbert Schnitzler

Note.

Un colloque de l’Association de Juristes Belgo-Allemande, dont le président est l’auteur du présent texte, est à l’origine de cet article. Ce colloque a eu lieu dans la salle des fêtes du Musée Couven à Aix-la-Chapelle. La préparation du colloque m’a permis de (re)découvrir Couven: deux architectes du 18ième siècle (père et fils), en provenance de ma ville natale, avec un rayonnement vers la Belgique où je vis et travaille depuis plus de 20 ans. Un sujet belgo-allemand a été trouvé, sans connotation juridique, mais avec une touche personnelle.

1. Bei der Vorbereitung dieses Artikels hat der Autor zu Rate gezogen: Josef Buchkremer, Die Architekten Johann Joseph Couven und Jakob Couven, Zeitschrift des Aachener Geschichtsvereins 17, Sonderdruck, Aachen 1896; Paul Schoenen, Johann Joseph Couven, Düsseldorf, 1964; Lutz-Henning Meyer, Johann Joseph Couven, in: Aachener machen Geschichte: Band 2, Aachen 1999; Bruno Demoulin / Jean-Louis Kupper, Histoire de la Principauté de Liège de l'an mille à la Révolution, Toulouse 2002; Marcel Bauer, Frank Hovens, Anke Kappler, Belinda Petri, Christine Vogt, Anke Vollmer: Unterwegs auf Couvens Spuren, Eupen 2005; Michael Römling, Aachen – Geschichte einer Stadt, Soest 2007; Jean-Louis Cohen, Mies van der Rohe, Paris 2007; Anke Kappler, Johann Joseph Couven (1701 – 1763), Architekturentwürfe für Stadt, Adel und Kirche, Arbeitsheft der rheinischen Denkmalpflege 73, Worms 2009.

1. Dans la préparation de cet article, l’auteur s’est inspiré des publications suivantes: Josef Buchkremer, Die Architekten Johann Joseph Couven und Jakob Couven, Zeitschrift des Aachener Geschichtsvereins 17, Sonderdruck, Aachen 1896; Paul Schoenen, Johann Joseph Couven, Düsseldorf, 1964; Lutz-Henning Meyer, Johann Joseph Couven, in: Aachener machen Geschichte: Band 2, Aachen 1999; Bruno Demoulin/JeanLouis Kupper, Histoire de la Principauté de Liège – De l’an mille à la Révolution, Toulouse 2002; Marcel Bauer, Frank Hovens, Anke Kappler, Belinda Petri, Christine Vogt, Anke Vollmer: Unterwegs auf Couvens Spuren, Eupen 2005; Michael Römling, Aachen – Geschichte einer Stadt, Soest 2007; Jean-Louis Cohen, Mies van der Rohe, Paris 2007; Anke Kappler, Johann Joseph Couven (1701 – 1763), Architekturentwürfe für Stadt, Adel und Kirche, Arbeitsheft der rheinischen Denkmalpflege 73, Worms 2009.

« L'imagination peint, l'esprit compare, le goût choisit, le talent exécute. » Du Duc de Lévis - Extrait de Maximes, préceptes et réflexions.

Aachen, Couven-Museum / Aix-la-Chapelle, Musée Couven

Einer der größten Architekten des 20. Jahrhunderts stammt aus Aachen: Ludwig Mies van der Rohe. Er verkörpert im besten Sinn des Wortes Architektur ohne Grenzen, mit seinen Hochhausbauten in Nordamerika und den wegweisenden europäischen Bauwerken in Berlin (Nationalgalerie) und Barcelona (deutscher Pavillon auf der Weltausstellung 1929). In Aachen und Umgebung finden sich von ihm keine Spuren. Wohl aber gibt es in vielen seiner Bauwerke Spuren von Aachen. Die Vorliebe des Architekten für Glasfassaden und Wände aus Marmor wird gern gedeutet als Reminiszenz an die marmorverkleideten Pfeiler und die hohen Glasfenster des Aachener Doms.

Un des plus grands architectes du 20ième siècle est né à Aix-la-Chapelle: Ludwig Mies van der Rohe. Il incarne, dans le meilleur sens du mot, une architecture sans frontières, avec ses gratte-ciels en Amérique du Nord et ses édifices innovants à Berlin (Galerie Nationale) et Barcelone (Pavillon allemand à l’Exposition Universelle 1929). Mies van der Rohe n’a pas laissé de traces à Aix-la-Chapelle et ses environs. En revanche, un bon nombre de ses œuvres révèlent des traces de sa ville natale. La prédilection de l’architecte pour les façades de verre et les murs de marbre est parfois perçue comme un rappel des piliers habillés en marbre et des hautes verrières de la cathédrale de sa ville natale.

Vater und Sohn Couven haben die Idee grenzenloser Architektur bereits im 18. Jahrhundert verwirklicht. Von ihnen stammen Sakralbauten, Schlösser und Patrizierhäuser vom Rhein bis zur Maas. Das 18. Jahrhundert war zwar noch geprägt von Kleinstaaterei. Aber man dachte bereits in großen Räumen. Das Herzogtum Limburg war ebenso Teil des Heiligen Römischen Reichs Deutscher Nation wie das Fürstbistum Lüttich. In Lüttich herrschten Fürstbischöfe aus dem bayerischen Hause Wittelsbach. Der Lütticher Fürstbischof war auch für den Aachener Dom zuständig, in dem über viele Jahrhunderte die deutschen Kaiser gekrönt wurden.

Couven père et fils incarnaient l’idée d’une architecture sans frontières déjà au 18ième siècle, à leur échelle. Entre Rhin et Meuse, de nombreux édifices sacrés, des châteaux et des maisons bourgeoises leur sont dus. Certes, le 18ième siècle est fortement caractérisé par la coexistence de nombreux petits états. Cependant, les esprits étaient déjà ouverts à l’établissement d’espaces plus larges. Le Duché du Limbourg faisait partie du Saint Empire, tout comme la Principauté de Liège. A Liège régnaient des Princes-Evêques de la maison bavaroise Wittelsbach. Le Prince-Evêque de Liège avait sous sa juridiction la cathédrale d‘Aix-la-Chapelle, ville libre du Saint Empire où les empereurs allemands ont été couronnés pendant de nombreux siècles.

Aachen ist der Ort, von dem aus Vater und Sohn Couven gewirkt haben. Die Familie Couven (seinerzeit noch mit Namen „de Couves“) stammt ursprünglich aus Clermont-sur-Berwinne im Herver Ländchen in Belgien.

C’est à Aix-la-Chapelle que les Couven se sont développés. La famille Couven (dénommée à l’époque « de Couves ») est toutefois originaire de Clermont-sur-Berwinne, dans le pays de Herve, en Belgique.

Die Couvens hatten von Anfang an Zugang zu den vornehmen Familien Aachens. Der Vater von Johann Joseph Couven war Sekretär beim spanischen Gesandten in Wien, später Ratssekretär in Aachen und Gerichtsprokurator (Notar).

Dès leur arrivée à Aix-la-Chapelle, les Couven ont fréquenté la grande bourgeoisie de la ville. Le père de Johann Joseph Couven était secrétaire auprès de l’ambassadeur espagnol à Vienne, avant de devenir secrétaire du conseil de la ville d’Aix-la-Chapelle et notaire.

le journal des avocats

Johann Joseph Couven, der erste Architekt aus der Familie Couven, wurde 1701 in Aachen geboren. Er wurde bei der Stadt Aachen als Architekt angestellt und erhielt 1739 den Titel „Architekt der Reichsstadt Aachen“. Schon in jungen Jahren war Johann Joseph Couven mit prestigeträchtigen Projekten befasst. So war er an der Neugestaltung der Rathausfassade beteiligt, die unter dem großen Stadtbrand von 1656 gelitten hatte. Die Nähe der Familie Couven zum Aachener Patriziertum verhalf Johann Joseph Couven zu einer Reihe von Aufträgen reicher Aachener Großbürger, darunter der wohlhabende Tuchfabrikant und spätere Bürgermeister Johann von Wespien, der Couven mit der Errichtung seines Hauses beauftragte. Zur selben Zeit erhielt Johann Joseph Couven einen bedeutsamen Auftrag aus Lüttich. Der Kaufmann und Bankier Michel Willems aus Eupen beauftragte ihn mit der Errichtung eines Stadtpalais in der Rue Féronstrée. Das Gebäude, inzwischen Teil des „Patrimoine majeur de Wallonie“, beherbergt heute das Musée d’Ansembourg mit einer reichen Sammlung Lütticher Möbelkunst, die im 18.

Jahrhundert in ganz Europa gefragt war.

Lüttich, Musée d’Ansembourg / Liège, Musée d’Ansembourg

Johann Joseph Couven, le premier architecte issu de la famille Couven, est né à Aix-laChapelle en 1701. Il y fut engagé en tant qu’architecte, et en 1739, obtint le titre honorifique d’« Architecte de la ville impériale libre d’Aix-la-Chapelle ». Malgré son jeune âge, il s’est vu confier des projets prestigieux. Il fut ainsi impliqué dans la rénovation de la façade de l’hôtel de ville, qui avait souffert d’un incendie important en 1656. De plus, étant proche de la grande bourgeoisie aixoise, Couven a reçu des commandes de grandes familles, plus particulièrement de la part du drapier fortuné (et ensuite bourgmestre) Johann von Wespien, pour la construction de sa maison. A la même période, il obtenait une commande importante en provenance de Liège, lorsque le marchand et banquier Michel Willems d’Eupen l’a chargé de construire un hôtel sur la rue Féronstrée. L’édifice, qui fait maintenant partie du « Patrimoine majeur de Wallonie », abrite aujourd’hui le Musée d’Ansembourg. Ce musée présente une collection très riche d’art mobilier liégeois fortement en demande au 18ième siècle dans l'Europe entière.

HEI

Der Höhepunkt des Schaffens von Johann Joseph Couven fiel in eine Zeit der Blüte seiner Heimatstadt. Aachen war ein wichtiger Standort der Tuchindustrie. Für wirtschaftlichen Aufschwung sorgte auch die Rolle von Aachen als Kur- und Badestadt, die vermögende Kurgäste aus ganz Europa in die Stadt zog.

Johann Joseph Couven a atteint le sommet de sa carrière d’architecte à un moment où la ville d’Aix-la-Chapelle était en plein essor. Aix-la-Chapelle était un lieu important de l’industrie drapière. L’essor économique de la ville fut aussi stimulé par la présence de nombreux bains thermaux qui attiraient des curistes fortunés de l’Europe toute entière.

1748 wurde Aachen zum Zentrum europäischer Politik. Hier fand der Friedenskongress statt, mit dem der Österreichische Erbfolgekrieg um die Nachfolge des Hauses Habsburg beendet wurde. Als neutrale Freie Reichsstadt und aufgrund ihrer Nähe zu den Kriegsschauplätzen in Lüttich und Maastricht bot sich Aachen als Ort von Friedensverhandlungen an. Couven, der in seinem Privathaus zeitweise den englischen Verhandlungsführer Earl of Sandwich beherbergt hat, wurde mit dem Ausbau des Aachener Rathauses beauftragt, in dem die Friedenskonferenz stattfinden sollte. Während des Aachener Friedenskongresses wurde die Idee geboren, in Aachen zur Unterhaltung der Kurgäste ein Theater zu errichten. Die Tuchhalle, zwischen Dom und Rathaus am Katschhof gelegen, wurde zu einem Komödienhaus umgebaut, einem der ältesten bürgerlichen Theater in Deutschland.

En 1748, Aix-la-Chapelle était un point focal de la politique européenne. Le congrès de paix qui mis fin à la guerre de succession autrichienne, s’est tenu à Aix-la-Chapelle. Son statut de ville libre de l’Empire (qui est resté neutre dans cette guerre) et sa proximité des champs de bataille entre Liège et Maastricht l’ont prédestiné à accueillir ce congrès de paix. La ville a demandé à Couven, qui hébergeait le délégué anglais Earl of Sandwich pendant quelques mois, d’aménager l’hôtel de ville. En outre, durant le congrès, on eut l’idée de construire un théâtre pour divertir les curistes. La salle drapière, située au Katschhof entre la cathédrale et l’hôtel de ville, fut aménagée en salle de spectacle, à l’époque l’un des premiers théâtres bourgeois d’Allemagne. Über seine Stellung als Stadtarchitekt kam Johann Joseph Couven in Berührung mit internationalen Kurgästen, darunter Repräsentanten europäischer Adelsfamilien. Im Jahre 1747 kam Karl Theodor, Kurfürst von der Pfalz und Herzog von Jülich und Berg, später auch Kurfürst von Bayern, nach Aachen. Couven erhielt von ihm den Auftrag, in Düsseldorf, seinerzeit Hauptstadt der Herzogtümer Jülich und Berg, das Jagdschloss Jägerhof zu errichten. Der schottische Offizier John Lindsey, 20th Earl of Crawford, im selben Jahr in Aachen zu Gast, erteilte Couven den Auftrag, das alte Schloss der Lords Lindsey of the Byres in der Grafschaft Fife in Schottland umzubauen. 1752 beauftragte der Lütticher Fürstbischof Johann Theodor Couven, in Maaseik ein Jagdschloss zu errichten. Der Lütticher Fürstbischof ernannte Johann Joseph Couven in Anerkennung seiner Arbeit zum „Architecte du Prince de Liège“. Die Fürstbischöfe verfügten bereits mit dem Schloss in Seraing über ein Refugium in der Nähe von Lüttich.

le journal des avocats

En tant qu’architecte municipal, Johann Joseph Couven a pu rencontrer des curistes de tous les pays, notamment des représentants de la noblesse européenne. En 1747, par exemple, Karl Theodor, Prince-Electeur du Palatinat (et plus tard, de la Bavière) et Duc de Jülich et Berg, séjourna dans la ville. Il demanda à Couven de construire un château de chasse, le Jägerhof, à Düsseldorf, qui était à l‘époque la capitale des Duchés Jülich et Berg.

De même, l’officier écossais John Lindsey, 20th Earl of Crawford, qui séjourna à Aix-laChapelle la même année, a demandé à Couven de dresser des plans pour l’aménagement du château des Lords Lindsey of the Byres, dans le comté Fife en Ecosse. Enfin, en 1752, le Prince-Evêque de Liège, Johann Theodor, a demandé à Couven de construire un château de chasse à Maaseik. Reconnaissant le travail effectué, le Prince-Evêque Johann Theodor a nommé Johann Joseph Couven « Architecte du Prince de Liège ». Ce château de chasse s’est ajouté au château refuge dont disposaient déjà les Princes-Evêques à Seraing, à proximité de Liège.

Schon in frühen Jahren war Couven mit verschiedenen Schlossprojekten befasst gewesen: Schloss Neubourg des Grafen Ferdinand von Plettenberg, in der Nähe von Gulpen in Niederländisch-Limburg gelegen, und Schloss Amstenrade, seit 1732 im Besitz der Familie De Ligne. Das Schloss in Soiron, einem der schönsten Dörfer der Wallonie, stammt vermutlich auch von Couven.

Déjà en tant que jeune architecte, Couven a été impliqué dans de nombreux projets de châteaux: le Château de Neubourg du Comte Ferdinand von Plettenberg, à proximité de Gulpen au Limbourg néerlandais, ainsi que le Château Amstenrade, appartenant depuis 1732 à la famille De Ligne. Le château situé à Soiron, l’un des plus beaux villages de la Wallonie, est considéré, lui aussi, comme une œuvre de Couven.

Auch im Bereich der Sakralbauten war Couven ein gefragter Architekt. Die Ungarische Kapelle des Aachener Doms, seit Jahrhunderten Anziehungspunkt für ungarische Wallfahrer, war baufällig geworden. Auf Veranlassung des ungarischen Generalfeldmarschalls Karl von Batthyány sollte Couven eine neue Kapelle errichten. Aufgrund statischer Probleme musste die neue Kapelle allerdings 1755 wieder abgerissen werden. Der Umbau der evangelischen Pfarrkirche St. Anna in Aachen wurde Couven anvertraut. Im nahegelegenen Vaals in Niederländisch-Limburg errichtete Couven im Auftrage des Aachener Tuchfabrikanten Johann Arnold von Clermont eine lutherische Pfarrkirche, in Nispert bei Eupen im Auftrag des Aachener Tuchfabrikanten von Wespien und des Eupener Färbereibesitzers Goertz eine Hauskapelle.

Couven était également un architecte recherché en matière d’édifices sacrés. À la demande du Maréchal Karl von Batthyány, par exemple, il a construit une nouvelle chapelle en remplacement de la Chapelle Hongroise de la cathédrale d‘Aix-la-Chapelle, un point d’attrait des pèlerins hongrois depuis des siècles, qui était tombée en décrépitude. Cette nouvelle chapelle a dû être démolie en 1755, à la suite de problèmes structurels. Par ailleurs, Couven s’est aussi vu confier la rénovation de l’église protestante St. Anna, à Aix-la-Chapelle, la construction d’une église paroissiale luthérienne à Vaals (situé près d‘Aix-la-Chapelle dans le Limbourg néerlandais) sur demande du fabricant-drapier aixois Johann Arnold von Clermont, ainsi que la construction d’une chapelle privée à Nispert (près d’Eupen), sur commande du fabricant-drapier aixois von Wespien et du teinturier Goertz.

HEI

Eupen, Maison Vercken Eupen, Haus Vercken

Aix-la-Chapelle, Eglise St. Johann Baptist Aachen, Kirche St. Johann Baptist

Auch an Klosterbauten war Couven beteiligt. Das Äbtissinnenhaus sowie der Haupteingang zum Kloster Munsterbilzen in Belgisch-Limburg, erbaut im maasländischen Renaissancestil, gehen auf Entwürfe von Couven zurück. Den bedeutendsten Auftrag im Bereich der Sakralbauten erhielt Johann Joseph Couven von Äbtissinnen der Burtscheider Zisterzienserabtei. Die im 14. Jahrhundert errichtete gotische Abteikirche genügte den Äbtissinnen nicht mehr. Johann Joseph Couven entwarf in ihrem Auftrag die Abteikirche St. Johann Baptist, die als bedeutendste Barockkirche zwischen Rhein und Maas gilt. Prägend für die Kirche ist der monumentale Kuppelbau, der dem Oktogon des Aachener Doms nachempfunden ist. Obwohl die Bauarbeiten an St. Johann Baptist nur schleppend vorangingen, beauftragten die Äbtissinnen Couven auch mit dem Neubau der in unmittelbarer Nähe gelegenen Pfarrkirche St. Michael.

Couven fut aussi impliqué dans des projets de monastères. La maison des abbesses ainsi que l’entrée principale du monastère de Munsterbilzen, situé au Limbourg belge et construit en style renaissance mosanne, sont basées sur des projets de Couven. La plus importante commande dans le domaine des édifices sacrés fut passée par les abbesses de l’abbaye cistercienne de Burtscheid (aujourd’hui un quartier d’Aix-laChapelle). Puisque leur église abbatiale gothique, construite au 14ième siècle, ne suffisait plus à leurs besoins, celles-ci demandèrent à Johann Joseph Couven de dresser les plans de l’actuelle église St. Johann Baptist qui est considérée aujourd’hui comme l’église baroque la plus importante entre Rhin et Meuse. L’église présente une coupole monumentale, rappel de l’octogone de la cathédrale d‘Aix-la-Chapelle. Quoique les travaux aient progressé lentement, les abbesses ont aussi demandé à Couven de dresser des plans pour l’église paroissiale St. Michael, située en face de l’église St. Johann Baptist.

le journal des avocats

Zu den letzten bedeutenden Werken von Johann Joseph Couven gehört das Haus der Familie de Grand Ry in Eupen, vermutlich zusammen mit seinem Sohn Jakob Couven errichtet. Heute ist das Haus de Grand Ry Sitz der Regierung der deutschsprachigen Gemeinschaft Belgiens.

Während der Stammsitz der Familie de Grand Ry französisch inspiriert ist, greift das Haus des Tuchfabrikanten Peter Vercken am Eupener Marktplatz Elemente des süddeutschen Barocks auf. Das Haus Vercken gilt nach der Zerstörung des Aachener Wespien-Hauses im Zweiten Weltkrieg als das schönste noch bestehende Bürgerhaus Couvens. Seit 1842 dient das Haus Vercken Franziskanerinnen als Kloster.

Parmi les plus importantes œuvres tardives de Johann Joseph Couven figure la maison de la famille de Grand Ry à Eupen, probablement conçue avec son fils Jakob Couven. De nos jours, la maison de Grand Ry abrite le siège du gouvernement de la Communauté germanophone de Belgique. L’architecture est d’influence française tandis que la maison du fabricant-drapier Peter Vercken, située sur la place du marché d’Eupen, présente des éléments baroques du sud de l’Allemagne. La Maison Vercken est considérée comme la plus belle maison bourgeoise de Couven encore en existence, suite à la destruction de la Maison Wespien à Aix-la-Chapelle pendant la deuxième guerre mondiale. Depuis 1842, la Maison Vercken sert de monastère à un ordre de franciscaines.

Eupen, Maison de Grand Ry, siège du gouvernement de la Communauté germanophone de Belgique Eupen, Haus der Familie de Grand Ry, Sitz der Regierung der deutschsprachigen Gemeinschaft Belgiens

HEI

Aachen, Neue Redoute, heute Altes Kurhaus genannt Aix-la-Chapelle, la Nouvelle Redoute, qu’on appelle aujourd’hui le Altes Kurhaus

Nach dem Tode von Johann Joseph Couven im Jahre 1763 trat sein Sohn Jakob (1735 – 1812) in seine Fußstapfen. Wie sein Vater übernahm Jakob Couven die Position des Aachener Stadtsekretärs. Als Architekt war auch er in Aachen gefragt. Zwei Gebäude prägen heute noch das Stadtbild: das Haus Monheim, das heute das Couven-Museum beherbergt, sowie die Neue Redoute, heute Altes Kurhaus genannt. Das Couven-Museum befindet sich in unmittelbarer Nähe von Dom und Rathaus. Es gibt einen Einblick in die Wohnkultur Aachens im 18. und 19.

Jahrhundert. Die Neue Redoute mit ihrem prachtvollen Ballsaal gilt als das bedeutendste Werk von Jakob Couven. Es wurde in den Jahren 1782 – 1785 erbaut. Dort traf sich das vornehme Kur- und Badepublikum.

Après la mort de Johann Joseph Couven en 1763, son fils Jakob (1735 – 1812) a assuré sa succession. Comme son père, Jakob Couven a repris la fonction de secrétaire du conseil de la ville. Il fut également un architecte recherché à Aix-la-Chapelle. Deux de ses édifices marquent toujours la ville: la maison Monheim, qui abrite aujourd’hui le Musée Couven, ainsi que la Nouvelle Redoute, qu’on appelle aujourd’hui le Altes Kurhaus. Le Musée Couven se trouve à proximité de la cathédrale et de l’hôtel de ville. Il donne une idée de l’art de l’habitat à Aix-la-Chapelle au 18ième et au 19ième siècle. La Nouvelle Redoute, avec sa salle de bal somptueuse, est considérée comme l’œuvre la plus importante de Jakob Couven. L’édifice fut construit pendant les années 1782 – 1785. Il servait de lieu de rencontre aux curistes fortunés provenant de toute l’Europe.

Auch wenn vieles, was Vater und Sohn Couven geschaffen haben, heute nicht mehr steht, bleibt doch eine ganze Reihe von Zeugnissen ihrer Architektur, verteilt über das Städtedreieck zwischen Aachen, Lüttich und Maastricht. Sie waren vielseitige Architekten. Bürgerliche und adelige Wohnkultur konnten sie in Architektur übersetzen – innen wie außen. Öffentliche und private Auftraggeber vertrauten ihnen. Konfessionsgrenzen gab es nicht: Aufträge für Sakralbauten gab es von katholischer und evangelischer Seite. Süddeutscher Barock und französischer Régence-Stil gehen in ihrer Architektur eine Verbindung ein, die die Architekturlandschaft zwischen Aachen, Lüttich und Maastricht geprägt hat.

Même si une grande partie des édifices conçus par Couven père et fils ne se visitent plus de nos jours, il subsiste de nombreux témoignages de leur architecture à travers la région entre Aix-la-Chapelle, Liège et Maastricht. Les Couven étaient des architectes diversifiés.

Ils étaient en mesure de traduire l’art de l’habitat de la noblesse et de la bourgeoisie en architecture, à l’intérieur comme à l’extérieur. Ils recevaient des commandes de la fonction publique ainsi que du secteur privé. Les conflits entre confessions ne faisaient aucun obstacle: les Couven recevaient des commandes tant du côté catholique que protestant. Le style baroque du sud de l’Allemagne et le style « régence » à la française se reflètent dans leur architecture, marquant ainsi le paysage architectural entre Aix-la-Chapelle, Liège et Maastricht de l’époque jusqu’à nos jours.

Klaus Heinemann

Dominique Rigo, le design sans appel.

Fritz Hansen at DOMiniQUe riGO 210 RUE DE STALLE - 1180 BXL AGAPE / ALIAS / ARCO / ARKETIPO / ARPER / ARTEMIDE / B&B ITALIA / CAPPELLINI / CASALIS / CASAMILANO CASSINA / CARL HANSEN / CLASSICON / DESALTO / EMECO / ERBA MOBILI / EXTREMIS / FIAM / FLEXFORM FLOS / FONTANA ARTE / FOSCARINI / Fritz Hansen / GALOTTI & RADICE / HUGUES CHEVALIER INGO MAURER / INTERLÜBKE / KARTELL / KNOLL / LAGO / LIGNE ROSET / LIMITED EDITION LUCEPLAN / MAXALTO / MDF ITALIA / NEMO / PAOLA LENTI / PASTOE / POLIFORM / POLTRONA FRAU SAHCO HESSLEIN / SIMON / TOULEMONDE BOCHART / VARENNA / VITRA /

info + 32 [0]2 649 95 94 info@dominiquerigo.be www.dominiquerigo.be

Par Patrick HENRY

Ancien sportif, ancien musicien, ancien étudiant, ancien stagiaire, ancien orateur de rentrée, ancien président du jeune barreau, ancien bâtonnier, ancien chargé de cours à l’Université de Liège mais, surtout, ancien enfant, Patrick Henry est aujourd’hui président d’AVOCATS. BE et quelques petites autres choses encore.

Toujours passionné, en tout cas.

NE PAS SE PLAINDRE A quoi sert de gémir ? A apitoyer. Non, pas la pitié ! Mais réclamer, revendiquer. Parce que le droit de chacun doit être respecté. Merci, parmi tant d’autres, à Nelson Mandela, Martin Luther King et Angela Davis, à Victor Schoelcher et à Abraham Lincoln, à Cesare Beccaria et à Robert Badinter, aux suffragettes et aux Femen, aux gays et aux lesbiennes, à Jan Palach et à Mohamed Bouazizi, à Willis from Tunis et à Hara Kiri, aux étudiants de Tian An Men et aux danseuses solitaires de la place de Mai, aux militants des places Taksim et Tahrir. Si nous sommes hommes c’est grâce à leur courage.

ETRE HEUREUX CHAQUE JOUR Même en serrant les dents. Nous ne choisissons ni de naître, ni de mourir. Avant, certains nous ont espérés. Après, certains garderont notre souvenir. Et entre les deux, comme le dit Gandalf, tout ce que nous avons à décider, c’est quoi faire du temps qui nous est imparti. Au match ! Allez, vas-y, joue !

Et sois heureux.

S’AIMER LES UNS LES AUTRES C’est la maxime qui a fait sortir l’humanité de la jungle. Pas seulement survivre. Dépasser la loi de la survie de l’espèce. Etre capable d’altruisme. Même si c’est pour avoir une belle image de soi-même. Allez Jésus, même s’il n’est pas sûr que ce soit toi qui aies dit cela, cela valait la peine de t’inventer. La religion cela ne devrait pas être la guerre. Allah, mais Allah quoi !

Le petit chat de Nadia Khiari, humoriste tunisienne qui vient d’être faite doctor honoris causa de l’Université de Liège Sting, They dance alone

Tolkien, Le seigneur des anneaux

HEN

« Le bonheur est un idéal de l’imagination et non de la raison. » D’Emmanuel Kant - Extrait du De la métaphysique des moeurs.

le journal des avocats

GARDER LA TÊTE HAUTE Avoir la peau qui plus vite à l’endroit des genoux devient sale, non merci. Faire face aux humiliations. Les digérer. Ne pas en prendre son parti. Pouvoir se regarder dans la glace. Garder en soi une petite flamme.

Comme Diego, libre dans sa tête.

Comme Primo Lévi.

Comme Nasrin Sotoudeh ou Abdatolfatah Soltani.

Comme Gao Zhisheng ou Le Quoc Quan.

E. Rostand, Cyrano de Bergerac

M. Berger Si c’est un homme, 1947 Avocate iranienne emprisonnée depuis 2010, qui vient d’être libérée (septembre 2013) // Avocat iranien emprisonné depuis 2009 Avocat chinois emprisonné depuis 2009, dont on espère qu’il est toujours en vie // Avocat vietnamien bloggeur emprisonné depuis 2012, qui vient d’être condamné à deux ans et demi de prison pour … fraude fiscale

RIRE BEAUCOUP Vous êtes calembour ou contrepèterie ? Moi les deux, merci. Il fut un temps, c’était celui des situationnistes – D’où parles-tu, camarade ?

Moi, je suis d’ailleurs, mec ! Non aligné ! -, où il était de bon ton de tirer la tronche. Pas pour moi. D’ailleurs il y a une contrepèterie dans ce texte, comme dans tous ceux que je commets. Cherchez l’horreur.

RESTER MOTIVÉ Motivé. Pour nos enfants c’est devenu l’injure suprême. Cherchez l’erreur. A quels enfants laisserons-nous ce monde ? Les soixantehuitards ont-ils raté leur progéniture ? Mais pas d’inquiétude, grandpère : déjà sur la stèle d’Hammourabi, les vieux se plaignaient de l’incapacité et de la frivolité des jeunes. Faisons confiance à la génération Z. Et puis, boostons la un peu…

TOUJOURS ESSAYER Un petit Johnny, époque Philippe Labro, pour faire the link : quand vos parents vous quitteront, ils vous diront, faut essayer de vous aimer. Cela sentait bon le flower power. Give peace a chance. All you need is love. Ouvrez les portes de la perception. Et puis Véronique a raison : celui qui n’essaie pas ne se trompe qu’une seule fois.

Hallyday, Essayez J. Lennon The Beatles A. Huxley Sanson

le journal des avocats

DIRE S’IL TE PLAÎT ET MERCI Là, j’ai eu du mal. J’avais une théorie à cinq francs. Dire merci c’est déprécier celui que l’on remercie. Le gratifier en retour. Acheter son geste. Lui enlever sa gratuité. Le réduire à un geste égoïste, voire commercial. A la rigueur, exprimer son plaisir mais remercier, non.

On peut être jeune et con, n’est pas Saez ? Quoique… Enfin, voyez 15.

NE JAMAIS DÉSESPÉRER Il n’est pas nécessaire de désespérer pour entreprendre. Non. Battez-vous tant qu’il est temps, avant le désespoir. Sans illusion mais dans la ferveur. Pour Camus, contre Sartre. J’appelle Tommy, Raël et Pink. The man that hath no music in himself nor is not moved with concord of sweet sounds. The motions of his spirit are dull as night and his affections dark as Erebus. Let’s no such man be trusted. Mark the music.

Saez, Jeune et con

The Who Genesis, The lamb lies down in Broadway Pink Floyd, The wall C’est pas du Bashung, ça mon pote, c’est du Shakespeare – il fallait un hommage à Renaud dans ce texte….

TOUJOURS DIRE LA VÉRITÉ C’est quoi la vérité ? Rien d’absolu. Une notion plurielle. Respectez ce que les autres voient et touchent même si ce n’est pas ce que vous, vous voyez et touchez, a dit Laudisi, le bouffon sage de Pirandello.

A chacun sa vérité. Je préfère la loyauté. L’avocat exprime la vérité de son client. Sa vérité. Mais il ne triche pas. A bas les tricheurs !

NE PAS JOUER AU BALLON DANS LA MAISON Ben non… Au ballon, c’est sur un terrain de foot qu’on y joue. Aaah, 1984, Marrakech, championnat du monde de football pour équipe d’avocats. La finale. Les prolongations. 3-2. Un moment d’extase.

L’orgasme du buteur. Trente ans. C’est comme si c’était hier.

Les rêves sont en nous. Ben si… Avec une balle de ping-pong, comme l’enfant du quatre-vingt douzième, on peut aussi jouer dans la maison. Et faire le plein de rêves. Ne laissez pas passer les rêves.

NE PAS PARLER LA BOUCHE PLEINE Parler ou manger, il faut choisir. Pourtant parler en mangeant, c’est la fête. La belgitude peut-être. Le banquet de plats bons. Chez nous on mange avec. Et peu importe quoi. Enfin presque. C’est un boulet qui ne pèse pas. Des frites qui ne sont pas toujours dans le même sachet. Et on se méfie des poules qui muent.

P. Rapsat P. Rapsat (bis) M. Berger

HEN

CROIRE EN SOI Gold ! Always believe in your soul ! Croire en soi c’est croire en l’humanité. Se dire que tout n’est pas écrit d’avance. Que le déterminisme n’est que quantique. Que si vous ne le faites pas, un autre ne le fera pas nécessairement. Parfois on regarde le monde tel qu’il est en se demandant pourquoi, parfois on le regarde tel qu’il pourrait être en se disant pourquoi pas…

NE PAS HURLER Je déteste les cris. Je déteste les chuchotements. Et pourtant, j’aime Bergman. La parole. Les mots. Pour dire les choses. Pour les ordonner. Pour les maîtriser. Pour communiquer l’incommunicable.

Les avocats sont des faiseurs de mots. Des faiseurs d’humanité. Le cri c’est la bête. Souvent la bête humaine. Parler pour apprivoiser.

Je suis un renard, dit le renard…

ETRE RESPECTUEUX R E S P E C T. Rien ne me met en joie comme la voix d’Aretha. Le respect pour les enfants, pour les vieux, pour les femmes, pour les homos, pour les étrangers, pour les faibles. Proscrire la suffisance et la condescendance. Eh oui, cela passe aussi par de petits gestes, comme un sourire ou une poignée de mains, et de petits mots, comme un bonjour ou … un merci.

TENIR SES PROMESSES Because I said I would. Mais il n’est pas nécessaire de poster sa promesse sur YouTube. L’avoir en soi. Comme un moteur auxiliaire, un spi. Tenir pour soi. Un pas, encore un pas. Regarder le haut de la montagne. Allez, disait Justine.

DIRE JE T’AIME En cinq cent langues s’il l’on veut. Le dire beaucoup. Le dire souvent.

Le dire même si on l’a trop dit, hein Patrick. Le dire avant qu’il soit trop tard, hein David. Le dire encore. Même si c’est aussi une question, hein Jean-Jacques. Tout simplement. Je t’aime.

Spandau Ballet

V. Paradis

Cris et chuchotements, 1972

Jean Renoir, 1938 Bon, Saint-Exupery, Le petit prince, 1943

A. Franklin C. Fredericks

Comme Guillaumet : encore Saint-Exupéry, Terres des hommes, 1939 Henin, bien sûr

Bruel Hallyday Goldman

le journal des avocats

PARDONNER MÊME SI C’EST DUR Je n’aime pas le pardon. Ou il faut s’entendre sur le mot. Ne pas oublier mais comprendre, accepter, pouvoir donner une seconde chance. Voire une troisième. Mais pourquoi devrions-nous pardonner l’impardonnable ? L’impardonnable doit être sanctionné. Justement et sans excès. Avec humanité et pour l’humanité.

FAIRE CE QUE L’ON AIME Pas uniquement, bien sûr. Ce serait trop beau. Tant de routine. Tant de gestion du quotidien. Mais garder du temps pour l’essentiel.

Allez au foot avec les copains. Jouer avec sa petite fille. Câliner sa femme. Et aussi plaider. Et aussi aimer. A perdre la raison. A n’en savoir que dire.

DE TEMPS À AUTRE, TRANSGRESSER LES RÈGLES C’est la dernière et, bien sûr, la plus importante. Antigone comme modèle. La petite flamme intérieure. De temps à autre. En sachant qu’il est rare que l’on ait raison contre tous. Mais il y a des ordres auxquels on ne doit pas obéir. Il y a des ordres auxquels on ne peut pas obéir. Il y a des ordres auxquels on n’obéit pas. C’est notre serment. Aucune cause que je ne croirai pas juste, en mon âme et conscience…

Par Patrick Henry

Aragon

HEN

Par Alain JACOBS-VON ARNAUD

Alphabet françois et latin, contenant une briefve et facile méthode de bien lire et prononcer en françois et en latin.

Manuscrit dédié à Louis XIV et composé par Jean de la Soie, grammairien de la reine Anne d'Autriche, pour l'instruction élémentaire de ce prince alors agé de sept ans. Chaque feuillet est décoré d'arabesques peintes ou de découpes (canivets).

Voilà en quoi consiste le livre de l'enfant roi dont la première page fleuronnée aux armes de France et de Navarre annonce tout d'abord la destination.

Alain Jacobs-von Arnaud, avocat au barreau de Bruxelles, un peu dilettante à la plume vagabonde.

Copyright Bibliothèque Rouen 2005 Cote: Leber 5770 fol.1 France, 1645.

42 ff. sur velin, marges décorées, découpes à blanc et gravures coloriées rehaussées d'or.

« L'érudition, c'est la mémoire et la mémoire, c'est l'imagination. » De Max Jacob - Extrait des Conseils à un jeune poète.

le journal des avocats

JAC

J’achète des pralines.ante meridiem1.

O tempora , o mores2 , la vendeuse délurée me dit « c’est pour qui ? » .

Je lui dis :- pour ma tante. Une rara avis3 qui m’aime ab imo pectore 4.

- Ah dit elle, je pensais bien, non margaritas ante porcos5.

- Mettez en quelques blanches, dis-je.

- De gustibus coloribusque non disputandum6 reconnaît-elle Je donne les pralines à ma tante: - « timeo danaos et dona ferentes 7 » me dit-elle.

Pourtant je suis désintéressé. Je prends donc cela cum grano salis8 Elle ajoute : Non ut edam vivo, sed ut vivam edo9 Elle me sert néanmoins illico un verre de vin en disant : « nunc est bibendum, bonum vinum laetificat cor hominis10 » Je marche sur la queue du chien « Vade retro11 !- s’exclame-t-elle, Cave canem12 » . Je veux le caresser mais il grogne « noli me tangere13 » Je demande à ma tante : - Quid novi14 ?

Elle me tend le journal : - tolle, lege15 Un voisin a été envoyé ad patres16 par un malandrin. Vae soli17 !

On l’a retrouvé raide perinde ac cadaver18.

Elle soupire : - Homo homini lupus19 –et ajoute désabusée : Ira furor brevis est20.

- Mais pourquoi cette violence ? cui prodest21, demandais-je ?

1. de grand matin 2. Quelle triste époque !

3. un oiseau rare 4. du fond du cœur 5. on ne donne pas des perles aux cochons.

6. On ne discute pas des goûts et des couleurs 7. je me méfie de ceux qui apportent des cadeaux 8. avec un grain de sel 9. Je ne vis pas pour manger, je mange pour vivre 10. :- Il est temps de boire, le bon vin réjouit le cœur des hommes 11. Recule, tire toi de là 12. Attention au chien.

13. bas les pattes 14. -Quoi de neuf ?

15. tiens, lis moi ça !

16. dans l’autre monde 17. Malheur à ceux qui sont seuls 18. raide comme un cadavre 19. - l’homme est cruel 20. la colère est une brève folie 21. qui en profite ?

le journal des avocats

Voila le hic me répond-elle. - Felix qui potuit rerum cognoscere causas22.

Probablement Auri sacra fames23 mais sapiens nihil affirmat quod non probet24.

- Il y a des témoins ?

- Un seul, horresco referens25, mais on le sait : testis unus testis nullus26.

- Et la victime demandais-je ?

- De mortuis aut bene aut nihil27.

Je forme le vœu : Fiat lux28 mais je n’insiste pas.

Il se fait tard, fugit irreparabile tempus29.

Je quitte ma tante avec un allègre - Sursum corda30 je l’embrasse et lui conseille : - carpe diem31 et cura ut valeas32 Amère, elle me salue d’un triste : Memento homo quia pulvis est et in pulverem reverteris33.

Pourtant je ne me sens pas in articulo mortis34 mais plutôt, mens sana in corpore sano35.

Heureusement elle se radoucit. C’était de l’humour dont je n’avais pas saisi subito la vis comica36.

- vade in pace37.

Me voilà dehors Deo gratias38

22. Heureux celui qui peut connaître la raison des choses 23. l’amour de l’argent 24. le sage n’affirme rien qu’il ne puisse prouver 25. je tremble en le racontant 26. un seul témoin ne compte pas 27. des morts on ne dit que bien ou on se tait 28. que la lumière soit faite 29. Le temps s’écoule irrémédiablement 30. Haut les cœurs 31. profite de l’existence 32. fais attention à ta santé 33. souviens toi mon ami que tu es poussière et que tu retourneras en poussière 34. proche de la tombe 35. je me porte bien de corps et d’esprit: 36. la force comique 37. Va en paix 38. Dieu soit loué

JAC

Voir

Verviers et vivre encore

Par Aurelia LUYPAERTS

Aurélia Luypaerts est avocate au barreau de Verviers.

Elle est la sœur de Maurane.

Elle est aussi une femme passionnée d’art, échevine de la Culture, du Patrimoine et de l'Enseignement artistique.

le journal des avocats

LUY

Quoi de plus facile que d’adresser une déclaration d’amour à Venise, Naples, Rome, Paris, New-York ou Londres.

Bien d’autres l’ont fait avant moi, et il n’y a rien de plus convenu que de s’extasier devant une ville dont chacun sait qu’elle est une merveille, de telle sorte qu’il n’est pas besoin d’en rajouter.

Qui d’autre, à n’importe quel endroit du globe (et même des autres galaxies de notre univers ou d’autres univers encore inconnus), au moment où j’écris ces lignes, aurait l’idée saugrenue d’écrire une ode à la cité (autrefois) lainière.

J’invoque ce droit à la singularité et à l’originalité.

Il ne s’agit pas bien entendu de célébrer la ville de Verviers, au seul motif que j’en suis originaire et que j’y habite.

Rien n’est plus blâmable que de n’avoir d’yeux que pour la localité où l’on réside et d’en dégouter les autres à force d’en parler.

Georges Brassens, qui comme chacun sait n’était pas verviétois mais n’était pas dénué de talent pour la cause, brocarde d’ailleurs judicieusement la race des chauvins et l’esprit de clocher, dans l’une de ses chansons intitulée « La ballade des gens qui sont nés quelque part » : C’est vrai qu'ils sont plaisants tous ces petits villages Tous ces bourgs, ces hameaux, ces lieux-dits, ces cités Avec leurs châteaux forts, leurs églises, leurs plages Ils n'ont qu'un seul point faible et c'est être habités Et c'est être habités par des gens qui regardent Le reste avec mépris du haut de leurs remparts La race des chauvins, des porteurs de cocardes Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part Par contre, à force de côtoyer la ville où l’on est né et où l’on a passé toutes les années de sa vie, on finit parfois par en oublier ses caractéristiques pittoresques, intéressantes ou valant tout simplement le détour.

Aussi, je vous propose un voyage d’abord littéraire à Verviers, où vous pourrez ensuite vous rendre afin de mettre en images les mots que j’ai écrits.

Il ne s’agit pas bien entendu de voir Verviers puis de mourir, Verviers n’aspirant pas à de telles extrémités comme par exemple Venise ou Naples, ni de souffrir du syndrome de ses bâtiments, de ses monuments, de ses artistes,… voyage aussi bien par l’esprit que par le corps.

Et si l’on ne meurt pas après avoir vu Verviers, au fond, ce n’est en fin de compte pas si mal : on ne s’en portera que mieux.

« La mémoire, c’est l’imagination à l’envers. » De Daniel Pennac - Extrait de La Fée carabine.

Quoi de plus singulier par contre que d’adresser une déclaration d’amour à la Ville de Verviers.

Le Verviers que j’esquisse ici est celui d’hier, d’aujourd’hui et de demain.

Les noms qui y sont cités le sont de manière tout à fait subjective et à titre strictement exemplatif.

C’est à la fois l’essor économique d’une ville et son ambition culturelle qui font qu’une ville est susceptible d’avoir un rayonnement particulier.

La définition de la culture par André Malraux permet de mieux cerner à quel point la culture est essentielle, lorsqu’il écrit : « La culture... ce qui a fait de l'homme autre chose qu'un accident de l'univers ».

Verviers ne fait pas exception à la règle. Son histoire témoigne de cet âge d’or exceptionnel, alliage de développement industriel et de tradition culturelle.

Mais avant tout, Verviers existe par ses habitants, par leur courage, leur combativité et leur abnégation.

Une pensée pour Grégoire-Joseph Chapuis, médecin, qui devint officier de l'état de la ville de Verviers sous le régime français. À ce titre, il fut un promoteur du mariage civil (le premier fut célébré le 22 février 1793). Lors de la seconde restauration du prince-évêque de Méan, il fut arrêté et condamné à mort. Pour avoir eu l’audace de célébrer des mariages civils, il fut exécuté publiquement sur la place des Récollets (devenue aujourd'hui place du martyr en son souvenir) le 2 janvier 1794. Il est mort pour le principe de l’indépendance du pouvoir civil et est devenu le symbole de la libre pensée.

Sillonner les rues de Verviers permet au visiteur de se rendre compte des richesses de cette ville notamment sur le plan architectural.

Pour paraphraser un célèbre slogan publicitaire, « Verviers a tout d’une grande ».

Ne dit-on pas que Liège se situe dans la banlieue de Verviers ?

En témoignent notamment une gare monumentale, écho de la gloire passée, faisant penser à un énorme château fort construit dans un style renaissance, mais aussi la Société royale d’Harmonie, avec son style néoclassique.

Il convient aussi de citer le Grand Théâtre et le Grand Hôpital, la ville voyant décidément tout en grand.

Verviers a même son ring, ceinture périphérique routière permettant de contourner le centre-ville.

Se rendre à Verviers c’est forcément faire un voyage dans le temps. Il ne suffit pas de regarder ; il faut aussi imaginer.

Comment ne pas songer au passé, en empruntant l’escalier de la paix avec son magnifique point de vue sur la ville et les alentours ?

On a forcément en tête des images du film « Australia » de Jean-Jacques Andrien, avec Fanny Ardent et Jeremy Irons.

Visiter une ville, ce ne sont pas seulement des images, mais aussi des musiques.

En longeant la Vesdre, sur les quais Jacques Brel (qui n’était pas verviétois, ce qui démontre bien que les verviétois ne sont pas chauvins) et Pierre Rapsat (chanteur de rock et de variété trop tôt disparu, né à Ixelles, mais ayant vécu à Verviers), ces deux artistes et leurs chansons nous reviennent en mémoire.

A cet endroit, je pense aussi à mon père, pianiste, compositeur et ancien directeur du conservatoire, qui aurait souhaité que, comme cela se fait à Paris le long de la Seine, des bouquinistes s’installent le long de la Vesdre.

En flânant sur la place Vieuxtemps, on ne pourra que s’arrêter près de la statue érigée en hommage à ce grand compositeur verviétois en fredonnant quelques extraits de son œuvre la plus célèbre, son fameux concerto pour violon n° 5.

D’un compositeur à l’autre, on évoquera aussi un autre grand compositeur verviétois, Guillaume Lekeu, né à Heusy, compositeur notamment de Barberine, d’inspiration si wagnérienne. On ne pourra s’empêcher de s’attrister de sa fin tragique et prématurée : mort à 24 ans de la fièvre typhoïde après avoir consommé un sorbet.

On peut donc être un grand homme et mourir bêtement (mais y a-t-il vraiment une manière intelligente de mourir ?).

Sur ce, les plus audacieux iront déguster une glace ou un sorbet chez les quelques excellents glaciers de la ville.

Ceux que la fin tragique de Guillaume Lekeu aura dissuadé à vie d’ingérer encore un sorbet, pourront se rendre, même le dimanche matin (dans la pâtisserie de garde comme disait mon père), afin de déguster les spécialités de la région : gâteau de Verviers, tarte au riz (avec ou sans macaron) ou vaution (sorte de tarte au sucre).

Il n’est évidemment pas possible de recenser en quelques pages les mille et une raisons de se rendre à Verviers, physiquement ou en pensée.

Il n’est pas d’avantage possible d’évoquer tous les verviétois célèbres ou moins célèbres qui ont permis à Verviers d’exister et d’avoir un rayonnement en dehors de ses murs.

Le meilleur moyen de connaître Verviers c’est de s’y rendre, et dans notre petit Royaume de Belgique, c’est forcément près de chez vous.

Aurelia Luypaerts

le journal des avocats

DES VERVIÉTOIS… ARTISTES !

Jean-Jacques Andrien, cinéaste - Stéphane Aubier, cinéaste - Vincent Bastin, auteur de micro nouvelles - Martin Charlier, humoriste - Arnold Couchard, romancier - Jean-Luc Couchard, acteur - Stephane Halleux, sculpteur - René Hausman, illustrateur et dessinateur de bande dessinée - Jean Herve, Musicien 1er Violon solo - Steve Houben, musicien - Jean-Marie Klinkenberg, linguiste Roger Leloup, dessinateur et scénariste de bande dessinée - Philippe Gilbert, cycliste - Jean-Claude Legros, jardinier, alpiniste et écrivain - Maurane, chanteuse - Philippe Maystadt, Ministre d'état - Dominique Monami, joueuse de tennis - Claude Rahir, peintre - David Reyes, compositeur - Eliane Reyes, pianiste Professeur et accompagnatrice des lauréats du concours Reine Elisabeth de Belgique - Luc Sante, écrivain et essayiste - Jacques Stotzem, guitariste Les frères Taloche, duo comique - Jean Vallée, chanteur-compositeur - Guy Margraff, écrivain.

ILS ÉTAIENT VERVIÉTOIS !

Christian Beck, écrivain - Marcel Begond, peintre - André Blavier, écrivain et éditeur - Roland Breucker, illustrateur - Grégoire-Joseph Chapuis, philosophe William Cockerill, industriel - Mathieu Crickboom, violoniste - André Damseaux, Bourgmestre, Ministre - Henri Daoust (Enrique d'Aoust), philologue et peintre - Pierre David, homme politique - Philippe Derchain, peintre - Albert Dupuis, compositeur - Emile Fabry, Peintre - Jean Lambert Joseph Fyon (1745-1816) Joseph Gérard, peintre - Georges Le Brun, peintre - Alexandre Louis Simon Lejeune, médecin et botaniste - Alphonse Lejeune, peintre - Guillaume Lekeu, compositeur - Raymond Macherot, dessinateur de bande dessinée - Mars, de son vrai nom Maurice Bonvoisin (1849-1942) - Henri Pirenne, historien - Maurice Pirenne, peintre - Edmond Duesberg, (1857-1944) dramaturge - Pierre Rapsat, chanteur-compositeur - Gustave Ruhl, avocat, archéologue et historien amateur - Barthélemy Vieillevoye, peintre - Henri Vieuxtemps, compositeur et violoniste - Henri Antoine Jardon (1768 - 1809), général des armées de la République française et du Premier Empire - Fernand Houget, peintre (1er prix de Rome en peinture) décédé à Paris le 11 novembre 1961 et reposant au cimetière d'Arcanque - Adrien Houget, Bourgmestre André Henry, cycliste.

LUY

ROBERT Par Ghislain ROYEN

Pour la présentation de l’auteur, voyez ses nombreuses, diverses et antérieures contributions à cette revue.

Robert W. était journaliste – imprimeur. Son journal, fondé par son arrière grand père était le plus ancien de la presse belge, paraissant deux fois par semaine, avec un résumé des informations générales, des nouvelles locales et quelques publicités. Mouvance : catholique rural. Pour ce journal, Robert était tout à la fois administrateur, journaliste, photographe, développeur, service commercial et service abonnements, passant bien plus que les 35, 38 ou 40 heures par semaine pour les reportages, les échos des conseils communaux, des matches de football ou les manifestations les plus diverses.

Bien sûr, il était de aisé pour les plus « rosses » de la localité de se gausser un peu de l’orthographe parfois hésitante des typographes, qui échappait quelque fois à la relecture du chef. Et le 1er avril 199.., à 9 h et quelques, le télécopieur du JOURNAL D’AUBEL a crépité de la première page de cette petite histoire, et ainsi de suite à raison d’une page chaque heure et quelques jusqu’au terme de ce feuilleton télécopié. Que ne ferait on pour ses amis. Bon rétablissement, mon petit Bob. -Non, Robert, tu es bien trop petit pour jouer avec nous !

- Hé Robert, tu passerais en dessous du ballon !

- Robert, va donc jouer dans la cour des filles, elles ont peut être besoin d’une poupée..

- Oh oui ! Mais n’oublie pas de pleurer, pour qu’elles puisse t’entendre et ne te perdent pas ! ha ha ha

ROY

« Notre tête ne serait-elle pas assez grande pour contenir à la fois la mémoire et imagination ? » De Rosa Montero - Extrait de La folle du logis.

le journal des avocats

'était à chaque fois pareil et chaque fois la même rengaine.

Personne ne voulait jouer avec le petit Robert : il était le plus petit de sa classe et les autres gamins, tous sans exception, s’amusaient de lui. Cela n’arrêtait jamais.

Alors le petit Robert rentrait à la maison et pleurait doucement dans les jupes de sa mère qui cherchait, vaille que vaille, à le consoler. Elle disait que cela ne durerait pas, et que pleurer faisait très mauvaise impression, et que dans une famille d’imprimeurs - on l’était de père en fils depuis une époque bien antérieure à Gutenberg - cela faisait décidément mauvais genre.

Mais comme il s’entêtait dans son chagrin, sans cesse reniflant et geignant sans arrêt, elle le houspillait enfin, lui reprochant sa déprime, et il s’enfermait dans sa coquille.

Dans ces moments là, il s’enfermait au grenier, en fait un local qui, juste au dessus du magasin, lui permettait de se trouver seul, perdu au milieu d’anciens tirages du Journal. Il s’y plaisait à lire de vieux articles vantant les mérites de tel colombophile, tel autre coureur cycliste ou précisant le prix du beurre au marché du précédent mardi.

Ce n’est qu’ainsi que, peu à peu, il se calmait, observant parfois par la fenêtre clients et clientes surtout, qui entraient et sortaient, ravis des sourires et des bonnes paroles que leur adressaient ses deux tantes servant au magasin .

Et comme le plafond de ce vieux magasin où l’on prenait les annonces pour le journal, et où ces deux demoiselles d’âge vendaient les abonnements et des fournitures scolaires, n’était fait que de planches, le petit entendait toutes les conversations, les histoires et même les ragots. Il savait tout ou presque sur toutes et tous du village, mais ne pouvait évidemment rien en dire, ayant déjà fait vœu de taire ses sources.

Mais toujours revenait hélas le lendemain, riche seulement de quolibets et de rires grinçants. Répondait-il de travers à une question du bon Maître que toute la classe s’esclaffait de concert, tous unis dans l’insulte. « Bon élève, mais manque de caractère », notait, sans pitié, le Maître dans son bulletin. ***

le journal des avocats

Il advint qu’un jour, il avait maintenant onze ans même s’il n’en paraissait toujours que huit, le vénérable bon père directeur, celui qui dirigeait l’école de sa sage main de fer, entra sans s’annoncer dans la classe du petit Robert.

Toute la classe évidemment se leva, et le petit Robert avec elle.

Comme à l’accoutumée, cela ne manqua pas de faire ricaner les plus méchants du fond qui relevaient à plaisir que sa tête dépassait à peine la hauteur du banc.

Aucun n’eut cependant le culot de lancer une plaisanterie : l’instant était trop solennel, le bon père directeur parlait.

Il annonça, devant les enfants ainsi alignés, qu’un grand concours allait être bientôt organisé qui opposerait toutes les écoles du voisinage, que l’honneur de l’école était en jeu, qu’il comptait fermement sur ceux qui seraient choisis pour des épreuves de calcul, d’histoire et de géographie, de sciences, de grammaire et d’orthographe pour montrer à tous ceux des environs, et spécialement aux mécréants de l’école laïque, que c’était bien les bons pères qui dispensaient le meilleur enseignement.

Il demanda alors au Maître de faire rapidement un choix de ceux qui représenteraient l’école pour ces cinq épreuves. Cela ne fut guère difficile pour les quatre premières matières, mais pour ce qui était de l’orthographe, la cause était manifestement plus délicate. La classe, pour brillante qu’elle fût, ne comptait pas, cette année là, de génie capable de dénicher le PH caché dans le fotograffe ou de déplacer le H de réthorique.

Tout au plus comptait-on quatre ou cinq gosses d’un bon niveau, tout simplement, et parmi ceux-ci se trouvait notre petit Robert. Après bien des hésitations, et Dieu seul sait sur quelle inspiration, le Maître choisit donc Robert, mais non sans préciser à son directeur que de toute évidence il s’agissait là du point faible de l’équipe.

On aurait pu croire que cette sélection allait transcender notre moustique mais elle ne fit au contraire qu’accroître ses peurs. Ecrasé par les responsabilités qu’on lui imposait, le gamin se découvrait anxieux. Seule sa timidité, que renforçait encore son angoisse, l’empêchait de demander son remplacement.

A la messe du matin, il se répétait les paroles de Monsieur le Doyen : non, vraiment, il n’était pas digne, pas digne… mais pas assez courageux pour le dire.

ROY

Et puis, il y avait les autres ; ils s’en seraient tellement réjouis. Ils auraient « eu trop bon » comme disait tante Ninie à propos de choses au sujet desquelles elle pas plus que Robert n’avaient de grandes connaissances.

Alors, il s’enfermait encore dans son fourbi, ressassant les quolibets qu’on lui lançait maintenant des deux côtés, car les mécréants de l’école laïque qui le croisaient dans la rue ne se faisaient pas faute de relayer les méchants qui le rudoyaient à l’école. *** La date du concours approchait et montait la tension dans le village et les environs.

Le maître avait pris ses champions à part et les soumettait à un entraînement intensif : avec les autres, Robert était ainsi astreint au dur apprentissage, accordant les participes passés et cherchant retenir ce damné circonflexe qui, décidément, n’aimait pas la troisième personne du singulier chez l’auxiliaire du conditionnel passé ( deuxième forme ).

Vint le grand jour : comme il faisait beau, le concours put se tenir sous les tilleuls, les candidats subissant les épreuves sur le kiosque. Evidemment, une foule considérable se tenait sur les places et tous, même les mécréants de l’école laïque, se taisaient. On était venu de tous les alentours, et même de Rémersdael ou de Sippenaeken, pour assister à l’événement.

A midi, commença le concours par l’épreuve de calcul et bien vite on constata que la lutte serait rude, surtout entre les p’tits curés et les mécréants, comme ils prenaient plaisir à se désigner mutuellement. A deux épreuves de la fin, les deux écoles se tenaient d’un point. Restaient les sciences et... l’orthographe.

Contre toute attente, le scientifique de l’école catholique s’effondra ; était-ce le trac, ou quelque substance qu’une main malveillante aurait mélangée à la boisson qu’il venait de boire, mais il ne put répondre à cinq des questions que lui posa Monsieur l’Inspecteur, seul juge impartial qu’on avait pu trouver pour départager les participants. Et, pendant ce temps, l’adversaire réalisait un sans faute…

Les laïcs exultaient. Six points d’avance. C’était dans la poche d’autant que, pour la dictée, le candidat des cathos n’était pas des plus brillants à ce qu’on disait. *** Sa mère lui avait donné une médaille bénie de St Antoine, pour retrouver les PH perdus, et une autre de Ste Rita, sans lui dire qu’elle ne s’occupait que des causes désespérées. Du Haut du ciel, St Hubert et son cerf convinrent de cesser quelques instants de se regarder pour suivre l’épreuve tandis que Monsieur le Doyen cherchait désespérément une prière pour ces moments là. Le bon père directeur se disait qu’il devait bien y avoir dans tous les Saints du ciel un patron des correcteurs orthographiques, mais lequel ?

Son bon Maître l’avait pris à part et ne lui avait rien dit. Tout au plus lui avait-il simplement caressé la tête, geste qui à cette époque n’était pas encore considéré comme acte préparatoire à une inculpation pour pédophilie et puis, le poussant du rang, lui avait adressé un clin d’œil.

le journal des avocats

En arrivant au kiosque, le petit avait manqué une marche, provoquant de nouveaux lazzis. Nul ne vit alors ce qui se passa, nul sinon le petit Robert qu’une main aida à se relever avant lui frotter ses genou(s) endolori(ts) d’un linge brillant. Et nul autre que lui n’entendit ce qui lui dit l’apparition : « la victoire te sera donnée si tu sais rester modeste. Le seras tu ? » Il opina et elle disparut. *** L’épreuve fut terrible : les pièges succédaient aux exceptions, allant de tout ce qui était perdu fors l’honneur au vaillant drapeau qui gît au champ du coq sur les chants de la gloire… Le silence au terme de la dictée était impressionnant. Tous attendaient, certains plus anxieux que d’autres, qu’arrivassent les résultats.

Le premier correcteur annonça dix sept fautes, ce qui n’étonna personne, tant la dictée avait paru difficile. Et, d’abord gêné, le représentant d’une école d’un village voisin dont on venait ainsi de clamer haut et fort le résultat fut vite rassuré en apprenant que les autres n’avaient obtenu que des cotes fort similaires : 13 fautes, 12 fautes, 19 et 25 fautes sanctionnaient les dictées qui furent ensuite annoncées.

Restait l’André, représentant de l’école laïque dont le correcteur avait voulu d’emblée vérifier un résultat qui lui semblait vraiment extraordinaire. Après une attente supplémentaire, il annonça 8 fautes, faisant gonfler d’orgueil tout le clan laïque qui laissait éclater sa joie quand un dernier correcteur, qu’on avait presque oublié, annonça froidement : - école libre : zéro faute - Vous dites ? s’étrangla quelqu’un - je dis : Ecole libre, zéro faute !

Alors ce fut formidable. On cria à la triche d’un côté, on hurlait de plaisir de l’autre.

Le Bourgmestre, homme de compromis qui ne voulait pas l’être ( compromis ) s’apprêtait à faire donner le garde champêtre pour calmer les esprits quand l’inspecteur, retrouvant ses réflexes de délégué syndical qu’il avait été dans sa jeunesse, trouva les mots pour mater l’assemblée : Vos G….

Choqués, outrés, vexés même, ils se turent. Et l’inspecteur annonça alors qu’on allait vérifier le travail du vérificateur. Dans les grognements qui s’échappaient d’un côté et le bruit des chapelets qu’on égrenait de l’autre, l’inspecteur alors vérifia.

Mais le corps enseignant de l’école laïque voulut voir ; six montèrent sur le kiosque. Ceux du libre ne voulurent pas demeurer en reste, ni les organisateurs, ni les parents, ni les P.O., ni…de telle sorte que l’inspecteur dut donc redonner de la voix pour pouvoir annoncer : Ecole libre : Zéro faute.

Les huit fautes de l’André donnaient donc l’avantage final aux p’tits curés pour... deux points ! Ce fut alors un triomphe. Robert était porté, ovationné, félicité, la famille était au comble du bonheur : on fit au moins trois nouveaux abonnés au

ROY

journal et l’on raconte qu’on faillit même, ce soir là, trouver un fiancé pour la tante Ninie.

Le lendemain, le bon père directeur vint une nouvelle fois le féliciter devant toute la classe lui offrant, au nom de la communauté des bons pères, une vie de St Népoçumène de Bzwyk-Przemyšl, dont il avait enfin trouvé qu’il patronnait, dans certaines régions de l’église du silence, les bègues, les correcteurs orthographiques et les scrabbleurs. *** La classe reprit, les jours succédant aux jours et les semaines aux semaines.

Plus personne au village n’osait encore se moquer du petit Robert.

Son Maître toutefois se prit à s’inquiéter : Robert ne réussissait plus de bons résultats en orthographe. C’était comme s’il avait tellement donné pour ce concours et qu’il n’était plus suffisamment fort pour faire face aux difficultés qu’on lui présentait, pensa-t-il d’abord. Mais bien vite il s’inquiéta. N’aurait-il pas… ? Non, ce n’était pas possible. Un temps silencieux, les condisciples de l’enfant reprirent alors leurs commentaires et leurs moqueries.

Doucement d’abord, puis de plus en plus fort, et enfin comme avant …Quelque chose toutefois avait changé. Le Maître ne devina d’abord pas quoi, mais il le sentait. Et enfin, il comprit en voyant que Robert ne subissait plus : sous les lazzis, il gardait le sourire. En y regardant à deux fois, le Maître vit alors que l’enfant ne commettait pas les mêmes fautes qu’auparavant. Les fautes avaient quelque chose d’évident, de programmé, d’organisé.

Pour respecter son serment, Robert faisait des fautes d’orthographe sciemment; il les faisait exprès. Et pour autant que j’en sache, je crois qu’il agit encore de la sorte aujourd’hui.

Ghislain Royen

Ils ont prêté leur plume et leurs images…

Jean-Pierre BABUT DU MARÈS

Alain BERENBOOM

Olivier BONFOND

Roger CHAIDRON

Jean-Pierre BOURS

Stefaan DE CLERCK

Herman DE CROO

Nicole DEPREZ

le journal des avocats

Votre temps est compté, il faut tout faire, bien faire et laisser dire !

Nos chers auteurs, Etudiants, Avocats, Bâtonniers et Présidents, nous ont offert de leur temps précieux ; malheureusement certains ont été contraints et forcés de nous abandonner en dernière minute et ont reporté leur contribution à un autre numéro. Nous les avons attendus le plus possible…

Néanmoins, nous leur conservons notre amitié et leur place dans une prochaine édition. Nos plus chaleureux remerciements vont donc à tous pour leur toujours si sympathique et talentueuse collaboration, passée, présente ou future.

François DESSY

Klaus HEINEMANN

Patrick HENRY

Alain JACOBS-VON ARNAUD

Chacune de nos lectures laisse une graine qui germe.

[Jules Renard] Extrait de son Journal 1894-1904

Elk van onze lezing laat een kiemende zaad.

Jede unserer Lektüren lässt einen Samen zurück, der keimt.

Aurelia LUYPAERTS

Ghislain ROYEN

OÙ RETROUVER TOUS NOS AUTEURS Dans vos numéros 2010, 2011, 2012 et 2013 du -journal des avocats- vous retrouverez, classés par ordre alphabétique, les avocats, auteurs et artistes suivants :

D Georges-Albert Dal

A Roman Aydogdu

4

B Jean-Pierre Babut du Marès

1 - 12 9 11

Philippe Balleux Robrecht Bauwens Alain Berenboom Marina Blitz Olivier Bonfond Stéphane Boonen Jacques Borlée (Coach) Xavier Born Pierre Bouchat (expert) Jean-Pierre Bours Jean-Paul Brilmacker Christine Brüls Jean-Pierre Buyle

C

Sylvie Callewaert Benoît Cerexhe Sandrine Carneroli Roger Chaidron Françoise Chauvaux Thérèse Chotteaux (sculptrice) Michel Claise Daniela Coco Philippe Coenraets Marteen Colette (OVB) François Collon Olivier Collon Guillaume Croissant

12

6 4 - 8 - 12 6 11 8 11

12

7 10 1-2-3-4-5-6-7-11

10 11 4 8 - 12 4 11 9 8 - 9 - 10 3 4 7 1 9

Marc Dal Christian Dalne Jérôme Dayez Bruno Dayez Robert De Baerdemaecker Jérôme de Brouwer Stefaan De Clerck Herman De Croo Jean-Pierre De Cuyper Jacques De Dobbeleer Vincent Defraiteur Romain Delcoigne Caroline Delesie (Fr) Anna Dejonckheere Martine Delierneux Francis Delpérée Willy Demeyer Nicole Deprez Guy De Reytere Yves Derwahl Charline Desmecht François Dessy Xavier Dewaide Patrick Dewael Marie-Fraçoise Dubuffet Roland Dumas (Fr) Aimery de Schoutheete Denis Dobelstein Caroline Dubois Axel Dumont Marie Dupont Véronique Drehsen

3 1 7 1 1-2-9 4 4

12 12

11 4 1-3 11 11 8 6 - 10 2 7

12

4 2- 5 10 5 - 6 - 7 - 9 -12 11 11 6 11 4 2 4 3 7 1 - 2 - 10

E Isabelle Ekierman

4 8 11

F Marine Fabbricotti

10 9 2 - 11 5

Marie-Céline Elleboudt Vincent Engel (écrivain)

Christiane Féral-Schuhl Benoît Feron Roland Forestini

le journal des avocats

L

G

François Glansdorff Jean-Marc Gollier Vincent Grévy Simon Gronowsky Didier Goeminne Emmanuel Gueulette

H Olivier Hamal

J

Bernard Hanotiau Paul Hautecler (architecte) Klaus Heinemann Marie-Paule Helpens Patrick Henry Guy Horsmans Jean-Damien Huberty

Valentin Jadot Dominique Jossart Alain Jacobs-von Arnaud Ingrid Jodocy

K Axel Kittel

Michel Kaiser

4

1- 2-5

11 2 11 2

11 9 11

12

5 5 -12 3-4 3

9 4 4 - 9 - 12 8

3 4

Vinciane Labeye

Marie-Jo Lafontaine (artiste)

Véronique Laurent

Marc Lazarus Karl-Heinz Lambertz

Juan Le Clercq

Cédric Lefèbvre

Pierre Legros

Eric Lemmens Rolf Lennertz

Serge Léonard

Antoine Leroy

Gérard Leroy

Luc Lethé

Vincent Lurquin

Aurelia Luypaerts

M Xavier Magnée

Michel Mahieu Jacques Malherbe Bernard Mairiaux Christophe Marchand Paul Martens Christine Matray Jean-Pol Meynaert Yola Minatchy Xavier Miny Luc Misson Stéphanie Moor François Motulsky

O

Martin Orban Marco Ossena Cantara Yves Oschinsky

5 11 3 - 10

1 1-9

4 3 3 4-8 8 2 - 11 3 1-2-3-5-6-7-8-9 2-5 5

12

4 4 9 8 9

1

2 - 10

1

5-6 7

1

3-7 9

4 8-9 4

ABC

P Pierre Paulus de Châtelet

2- 4 5 5 10 1- 2 10

R Carole Raabe

7 11 11 1-2-5 6 - 11 2 3 - 4 - 6 - 8 - 9 - 11 - 12 11 11

Alix Philippe Marie-Françoise Plissart Claude Pirson Corinne Poncin Andrée Puttemans

Frédéric Reard Bernard Renson Pierre-Jean Richard Yohann Rimokh Jacqueline Rousseaux Ghislain Royen Myriam Royen (son épouse)

Anne-Sophie Rutsaert

S Jean Saint-Ghislain

Vincent Sauvage Nicolas Saspi (photographe) André-Marie Servais Françoise Servais Aimery de Schoutheete Alain Smetryns (Magistrat) Luc Simonet Pierre-Marie Sproockeels Marcel Siraut Jehanne Sosson Frank Spruyt Benoît Stévart Jo Stevens (OVB)

T Patrick Thevissen

Miguel Troncoso Ferrer

4 8 11 4 10 4 11 3-6 9

1 1 - 10

8 4 4

1

7

V

Louis Van Bunnen Dirk Van Gerven Catherine van Gheluwe Xavier van Gils Jozef Van Waeyenberge Séverine Vandekerkove Claude Vanwelde Benjamin Venet Guy Verhofstadt Liliane Versluys Michel Vlies Olivier Vrins

W Jean-Paul Wahl

2-3-6 11 4 4 11 3 7 3 11 9 - 10 8 5-6-7-8-9

5 2 6 4

Jennifer Waldron Vincent Wauthoz Pierre Winand Hippolyte Wouters

Y

Cavit Yurt Onur Yurt

3 - 5 - 6 - 11 4 - 11

Z

Marie Zagheden

6

1

Les opinions exprimées par les auteurs n’engagent qu’eux-mêmes et ne reflètent pas nécessairement celles des éditeurs. La présentation de nos auteurs est toujours rédigée par chacun d’eux.

SAVEURS ÉPICES

SAVEURS VINS

SAVEURS CAFÉ

SAVEURS FRAICHES

WWW.PEUGEOT-SAVEURS.COM

Avec le soutien de Droit administratif - droit commercial et droit des sociétés - droit immobilier - droit de la construction droit de l’énergie et des transports - droit fiscal droit social - fusions et acquisitions - droit bancaire et financier - droit des assurances et responsabilités - droit intellectuel - arbitrage.

Janson Baugniet, fondée à Bruxelles en 1950, est une association d’avocats en droit des affaires au sens large, pluridisciplinaire et multilingue, qui compte aujourd’hui plus de 75 avocats, dont la plupart ont complété leurs cursus universitaire par des études spécialisées et/ou des expériences professionnelles en Belgique et à l’étranger. Depuis sa fondation, Janson Baugniet est restée indépendante, tout en développant des liens structurés avec plusieurs réseaux internationaux de cabinets d’avocats indépendants.

L’association étend son offre de services à l’ensemble des domaines juridiques liés à l’activité économique, en ce compris l’arbitrage national et international.

Janson Baugniet assiste des clients belges et étrangers, entreprises et particuliers, ainsi que les pouvoirs et les organismes de droit public, les fondations ou les organisations sans but lucratif.

Bruxelles Chaussée de La Hulpe, 187 1170 Bruxelles Tel. : + 32 2 675 30 30 Fax : + 32 2 675 30 31 L A L L E M A N D

&

L E G R O S

Association d ’ avocats logo.indd 1

8/12/11 12:17

Nivelles Place Albert 1er, 13 1400 Nivelles Tel: +32 67 21 79 95 Fax: +32 67 21 72 45 Gand Congreslaan, 27 9000 Gent Tel: +32 9 240 77 20 Fax: + 32 9 244 51 81

Frank SPRUYT Gerechtsdeurwaarders - Huissiers de Justice

Pour plus d’informations : www.janson.be