::
SAVOIR ET FORMATION
L’IMPORTANCE DE SOUTENIR LES COMMERCES ET LES ARTÈRES COMMERCIALES DE NOS VILLES Andrée De Serres
Fabien Durif
Andrée De Serres (Ph. D.), titulaire de la Chaire Ivanhoé Cambridge d’immobilier et directrice de l’Observatoire et centre de valorisation des innovations en immobilier, ESG UQAM Fabien Durif (Ph. D.), professeur titulaire à l’ESG UQAM, directeur de l’Observatoire de la consommation responsable (OCR) et du GreenUXlab (Laboratoire FCI de recherche en nouvelles expériences utilisateurs et en écoresponsabilité)
Les acteurs du domaine immobilier qui s'intéressent à l’avenir des artères commerciales et à leurs patrimoines bâtis, notamment les entreprises évoluant en construction, gestion, entretien, maintenance, aménagement, design, fourniture, ameublement et autres, doivent porter une attention particulière au contexte turbulent dans lequel doivent se débattre les commerçants qui y évoluent. Qu’ils soient usagers, locataires ou propriétaires du patrimoine bâti qui compose le panorama de ces artères commerciales, nos commerçants ont à faire face à d’importantes perturbations et doivent relever de grands défis pour réagir aux changements et aux nouvelles tendances et pour moderniser leurs modèles d’affaires en conséquence. Leur avenir en dépend. Celui de nos artères commerciales aussi.
A
UN CONTEXTE TURBULENT u cours des dernières décennies, les commerçants des artères comm erc iales des villes, grandes, moyennes ou petites, ont subi d’importantes pressions. Les commerces de ces artères répondaient traditionnellement aux besoins de la population locale. Ils ont dû réagir à l’émergence au Québec des centres commerciaux qui se sont multipliés en périphérie des villes à compter des années 1950 et 1960. Certains commerces ont délaissé leur artère commerciale pour s’y loger. D’autres ont gardé pignon sur rue dans les centres-villes ou sur les rues commerciales. Cependant, à l’heure actuelle, tous les commer çants, qu’ils soient sur rue ou à l’intérieur d’un centre commercial, font face à une même menace : le commerce en ligne qui permet d’acheter des produits de fournisseurs situés aux quatre coins de la planète. On substitue aux commerces sur rue un modèle d’affaires intégrant un système de vente en ligne, une logistique d’entreposage de marchandises et un service de livraison au magasin, dans un point de retrait, de dépôt ou de consigne déterminé par le client. De surcroît, l’éventail de biens qu’on y offre se révèle souvent plus
varié que celui du commerçant local et est fréquemment vendu à meilleur coût, en plus d’être livré directement à la porte de l’acheteur. C’est un modèle d’affaires innovateur qui fait particulièrement mal aux commerçants dont la façon de faire traditionnelle se limitait à choisir et à maintenir un inventaire de biens et à les vendre sur place, qu’ils aient pignon sur rue ou qu’ils soient situés dans un centre commercial. En 2017, près de 6 Québécois sur 10 (58 %) ont effectué un ou des achats en ligne, d’un montant moyen par transaction de 107 $, et ceux qui n’achètent pas en ligne utilisent le Web pour s’informer1. Cette difficile conjoncture engendre aussi des répercussions sur le développement économique et social des villes. Le chiffre d’affaires des commerçants diminue, certains ferment leurs portes, d’autres font faillite, entraînant dans le sillage de leurs déboires financiers des pertes d’emploi et une dégradation des immeubles qu’ils occupaient puisqu’ils ne retrouvent pas toujours preneur rapidement. Les artères commerciales des grandes villes en souffrent. Les perturbations causées par le commerce en ligne touchent tous les commerces et toutes les villes. Les commerçants, les propriétaires
1. NETendances (2017). CEFRIO. Le commerce électronique au Québec. https://cefrio.qc.ca/media/uploader/3_NETendances_Commerce_electronique_VF.pdf
26
MAINTENANCE IMMOBILIÈRE : : AUTOMNE 2018