J'attends le numéro 55

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LD RC

3e trimestre 2019 • SPÉCIAL INSTRUMENTS DE MUSIQUE


LD RC

Photo de couverture Florence Hennequin • Musicienne

J’atten

ds le n uméro 1 - 201 Créatio n > Isa 1 • 201 b e 9 lle Souc Design h et & Iva > Ivan L n eprêtre Leprêtre Contac t > lepr etre.ivan @wana doo.fr


E R I A M RO M O É S M U N U D

3e trimestre 2019 • SPÉCIAL INSTRUMENTS DE MUSIQUE

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ALAIN DIOT • 06

ANNE JOSSE • 26

Maître de conférence en arts plastiques alaindiot2@orange.fr

PORTRAIT DE FLORENCE HENNEQUIN Experte en contenus relationnels anne.josse@comzelle.com Site : annejosse.com

IVAN LEPRÊTRE • 10 FLORENCE HENNEQUIN • 26

D. A. et webdesigner lepretre.ivan@wanadoo.fr Site : ivanlepretre.com

Musicienne florencehennequin@me.com Blog : florencehennequin.com

RAOUL HARIVOIE • 18 FX JOYA • 36

Poète raoul.harivoie@laposte.net

Photographe

LOU BAUER • 21

BERTRAND BOULANGER • 46

étudiante - école G. Mélies Instagram : shiro.okamii

Poète gelamboo@wanadoo.fr

LILAS LEPRÊTRE • 22

MANUEL LAUTI • 50

étudiante - Paris Diderot lilaslepretre@gmail.com Instagram : mugen_megami

Photographe mlgphoto@outlook.be facebook.com/Manuellautiphotographie

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E R I A M RO M O É S M U N U D

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CHRYSTEL éGAL • 56

MARIE EDERY • 78

Artiste, écrivain chrystel.egal@free.fr • Site : c-egal.com

ARTISTES DE RUES Rédactrice marieedery108@gmail.com

FRéDéRIC ADAM • 62

JEAN-MARC COUVé • 86

Poète frederic_adam@hotmail.fr

Écrivain, critique et illustrateur jeanmarc.couve@gmail.com

STéPHANE ISSAURAT • 64

KARINE SAUTEL • 90

D. A. et webdesigner stephane@i-stef.com Site : i-stef.com

Ellipse formation karine@ellipseformationcom Site : ellipseformation.com

THIERRY FAGGIANELLI • 74

OLIVIER ISSAURAT • 100

Poète du quotidien thierry.faggianelli@sfr.fr

Enseignant • oissaurat@ac-creteil.fr Site : olivier.issaurat.free.fr

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MEURTRE À BORD DE L’ISS L

Par notre envoyé très spécial Ivan Leprêtre e professeur Archibald Mc Uloth, l’astrophysicien écossais à bord de la station spatiale internationale, aurait été assassiné hier matin par son homologue italien. La victime aurait été étranglée avec sa cornemuse puis balancée hors de l’ISS directement dans l’espace. Le meurtrier présumé, il Dottore Giuseppe Lombardi a déclaré, avant de se retirer dans sa cabine pour sa mise aux arrêts, « Être réveillé en sursaut tous les matins depuis 192 jours au son de cette saloperie de bagpipe, alors que c’est strictement interdit par le règlement ! Désolé pour Archi, j’ai craqué !!! Mais, grace à moi, les Terriens auront un nouveau spectacle à contempler chaque nuit pendant des millénaires ; le passage d’un satellite écossais ! »

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L A I R O RO T I D É E M U N U D

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INSTRUMENTS DEMENTS DE MUSIQUE MYTHIQUE

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Alain (strument) DIOT • Juin 2019 ous connaissons tous la vie au long cours des violons courts et de leurs sanglots longs verlainiens qui ne riment à rien quand, sous ses arches et ses clefs de voûte, le concert hall nous envoûte et tôt émerveillée s’ouvre à l’alto sitôt éveillé par l’archet qui le caresse dans l’allégresse des motets moyenâgeux bienheureux. Nous aimons tous les beaux sons profonds des bassons et les envolées guillerettes des clarinettes quand les hautbois narquois aboient à l’envers et à l’endroit même lorsque le cor d’harmonie nie que son corps chante au fond des bois et qu’il broie du noir les soirs de désespoir au bord de la Loire. Mais, quand avec toute la morgue d’un monologue, faisant fi des idéologues et des allergologues, l’orgue attaque le prologue d’un bel apologue, bien loin des dialogues entre les astrologues et les démagogues, la fugue nous subjugue quand la passacaille nous assaille, nous pauvre piétaille prise en tenaille, pauvre petite canaille sidérée, énamourée par les mondes entiers qu’elles déroulent à nos pieds et qui chamboulent nos idées essoufflées trop souvent mal tuyautées. Les saxophones et leurs épigones, alto ou soprano, voire ténor jusqu’à la mort, chiffonnent les hormones des madones aphones ou de quelques gorgones atones à coup de chacones bouffonnes, pendant que les batteries rient des pirateries, des espiègleries, des polissonneries, voire des coquetteries ou des bizarreries qu’elles nous confient en guise de cajolerie ou bien même de griserie, même si c’est avec la grosse artillerie. Et le trombone à coulisse nous hisse dans les délices subreptices des harmonies libératrices quand la trompette nous entête pour nous encourager aux pirouettes avec les plus chouettes des conquêtes. La flute traversière, elle, fidèle, joue la fière sans manière et nous libère de nos colères quand les timbales nous emballent pour des bacchanales cannibales de cavales impériales pendant que les violoncelles nous ensorcèlent par ce qu’ils nous révèlent de nos citadelles parallèles quand la contrebasse nous embrasse et nous prend dans ses nasses et que même le triangle s’étrangle, sur les côtés et dans les angles, à vouloir nous charmer pour pouvoir quand même exister quand le flageolet un peu désuet avec ses triolets nous promet quelque farandole un peu folle.

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Photo Florence Hennequin • Musicienne Et dès les matins coquins, le clavecin malin, espiègle comme un gamin, nous tient entre ses mains et le piano, ma non tropo, dans son beau manteau tout de noir et d’ivoire ostentatoires sortis tout droit du fin fond des conservatoires, nous ferait accroire que notre gloire est arrivée quand ses envolées lyriques, angéliques et diaboliques, nous piquent comme le cantique canonique des cantiques. Et son cousin atemporel à bretelles, l’accordéon, nous ensorcèle de ses flonflons sensuels. Mais dans nos bras parfois las, c’est la guitare qui vient se lover là, pour nous réveiller et nous aider à chanter tous ensemble, tous en chœur, du fond du cœur, quand la musique nous fabrique les belles répliques allégoriques qui enivrent les âmes des demoiselles et celles des damoiseaux, pauvres oiselles hirondelles, pauvres oiseaux sans cervelle, qui s’égosillent dans les trilles de pacotille des jeunes filles gentilles ou des joyeux drilles des familles. Et que personne n’ose nous dire que la musique c’est du pipeau ! Même pris dans la tourmente, point ne mentent ces instruments magnifiques et fantastiques et quand le silence nous relance c’est encore vers leur magnificence harmonique que s’envolent nos désirs jamais comblés, jamais rassasiés de cette ivresse mirifique que les instruments de musique, tout droit sortis de leur coffre magique, nous offre sans réplique pour nos plaisirs dix mille fois répétés quand ils viennent nous enchanter par les grands airs ensorcelés de leurs mélodies infinies qui nous irradient à midi comme à minuit

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S U C O ÉR O F E L M U N DU

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A VOTÉ !

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Alain (pitoyable) DIOT • Juin 2019 on, ben on s’est fait les européennes et pas de veine, y’a encore le RN qui nous emmène, derrière son croquemitaine et sa vilaine baleine, jusqu’aux tréfonds de la haine hallucinogène avec tous les aborigènes cancérigènes de l’Italie et des autres pays réunis. Et même si le sale Vini, vidi et vinci, espérons quand même que ce ouistiti rabougri obscène qui blasphème sans problème, sera mat et au rencard anxiogène à la prochaine, en paréo dans un placard oncogène. Et tout autant, on enrage de voir le Farage sortir en rage de sa cage. Souhaitons que le futur lui soit plus dur et qu’il rentre, en nage, sa voiture au garage sans bagage. Alors bien sûr, quand, un peu trop mûre, la Theresa raplapla s’est fait la ceinture en s’emplâtrant dans le mur jusqu’à la tête du fémur, c’est dur quand on sait que le Jaune sonne à la porte, lui qui se comporte comme un cloporte avec sa chevelure de manucure à moitié morte. Et même Orban, sans tomber en panne, ce pyromane mythomane, est sorti sans chicane de sa cabane. Attendons que ce mégalomane insane, dans sa bécane de cleptomane, décolle sur un dos-d’âne et s’enrubanne dans un platane pour le finir à la tisane à la valériane. Et notre Bellamy si mimi, le saint François-Xavier si gentil avec les catholiques réjouis, s’est pris la jolie veste en simili que ne lui avait pas promis pourtant le grand Laurent grisonnant, ce cœur vaillant époustouflant. Et ce vieux cabochon de Mélenchon a perdu son capuchon sous des volées de polochon en ressortant tout maigrichon, tout pâlichon, d’un sale coup de torchon et la pauvre Marion Aubry, sans un cri, s’est pris les pieds dans le tapis, elle qui riait vendredi. Quant à Glucksmann, tout droit sorti de sa caravane de profane, il nous l’a baillé belle, le Raphaël, lui la pucelle institutionnelle, en évitant la trop grosse gamelle quand le vieux compagnon de route Hamon - tu nous déçoit, Benoît ! - dans la déroute, a rendu les clefs du camion.

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Et voilà t’il pas que c’est notre Yannick qui leur fait la nique, à tous ces copains politiques et qui nous fait, sans ego, le coup de l’écho ! Logique ! Quand le vert est mis, c’est que le ver n’est pas dans le fruit et Jadot lapin peut garder son râble durable, que diable, tant que le futur se dessine sous la glycine pour qu’il perdure dans la verdure. Pour autant, l’Europe, c’est interlope et çà galope dans les couloirs pour savoir sur quel siège s’asseoir ! Et du haut du pont, on aperçoit Saint-Aignan en plan, Lafarge en marge, Arnaud capot, Asselineau à l’eau, et les listes des béjaunes qui sont demeurées aphones. Même les communistes et les royalistes ont raté la piste, c’est bien triste pour ces artistes anesthésistes ! Et que dire, si ce n’est que c’était rigolo, d’avoir une liste pour les animaux, veaux, vaches, cochons, couvées, qui ont sûrement bien appréciés, juste avant quand même de se faire bouffer ! Quant à Macron le vibrion, le fanfaron du carafon qui manie le boustrophédon comme un écrivaillon de salon, il ne s’en est pas sorti marron – c’est sûrement Brigitte, l’aéropagite, qui lui donne la frite ! - même si sa Nathalie jolie, tel le volatile fébrile trop docile, a raté quelque peu la marche symbolique en restant à l’arrêt public. Bon, ben y’en a pour cinq ans, une main derrière, une main devant, en espérant que les temps seront moins méchants et que le vent soufflera gentiment dans le sens de la tolérance et de la bienveillance réunies, mes ami.e.s., et levons nos chopes à la santé de l’Europe en cinémascope qui fait fi, si si, des cyclopes hypermétropes, des lycanthropes amblyopes et des misanthropes interlopes. Avec quelques frissons, ma foi, chantons à l’unisson l’hymne à la joie qui verdoie dans les forêts et les buissons !

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IVANRÊTRE LEP

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TROMSANSPETTE Instrument sans vent à deux embouchures, mais sans pavillon.

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CONTREBAFFE Instrument d’esquive et arme défensive...

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IVANRÊTRE LEP

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CORPSDEMUSE Instrument à anches de rêve !

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UKUL-ET-LAID Instrument très moche.

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IVANRÊTRE LEP

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SITARD Instrument de nuit, car la nuit je mens !*

* La nuit je mens • Alain Bashung

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FLUTE DE PAON Instrument à roues, joué par Léon.

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IVANRÊTRE LEP

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VIOLONSELLE Instrument à cheval sur deux harmonies.

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CLAIRAINETTE Instrument coassant dans la mare au fond du jardin.

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UL IE O A R IVO HAR

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LOGOS RALLYE OULIPO L

Mots imposés • Accordéon, clavecin, hélicon, déglingué, gambader. a maîtresse d’Eolien, mon dernier, est une personne grave, avec une figure en hélicon, une voix de craie, sel et poivre et des gestes qui rappellent ceux des joueurs d’accordéon ivres qui gambadent dans les champs en floraison de la campagne. Elle entasse dans sa vieille voiture déglinguée les téléphones portables qu’elle confisque aux enfants bruyants ou qui regardent des films X pour la génération Y quand elle explique les tables de multiplication ou les aides accordées aux agriculteurs par l’Europe. Le samedi après-midi, elle donne des concertos pour clavecins à la mitemps des matchs de foot, c’est là que je l’ai vue pour la première fois. Sa beauté m’abasourdit. Prétextant les nombreuses lacunes à combler du fiston, je multiplie depuis les demandes de rendez-vous. Je lui achète des fleurs, des chocolats. Je lui ai même apporté une fois dans un Tupperware une langue de veau, mais elle m’a confié qu’elle était végane. Elle m’a demandé d’être un père moins rigoureux avec Eolien : certes, le délit de « faux et usage de faux » est puni, en théorie de trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 45 000 euros, mais il n’a que huit ans.

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LOGOS RALLYE OULIPO M

Mots imposés • Lyre, hautbois, ocarina, timoré, susurrer. a lyre, victime d’un malaise pendant la canicule (elle s’était pourtant réfugiée à l’ombre d’un hautbois pour se protéger mais cela n’a pas suffi) se meurt et ne me susurre plus que des jeux de mots pathétiques comme « Mais où est donc l’ocarina ? ». Si je n’étais pas aussi timoré, j’irais en voler une autre plus jeune et résistante.

Ma pauvre lyre, hélas ! victime d’un malaise En pleine canicule a dû stopper le Raid Dans mon cerveau marin au kilomètre 13 Elle est déjà finie ma carrière d’aède !

(« A-t-elle commencé ? me dit mon ami Fred A part deux ou trois mails à la jolie barmaid Tu n’as écrit que des choses très laides Jamais tu ne seras toi invité en Suède »).

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UL IE O A R IVO HAR

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MOT VALISE M

TROMPÉTÉTISTE on père était trompététiste : il jouait de la trompette la nuit dans un centre de tri du courrier, pour motiver les agents, pour leur donner le sourire et la bonne cadence. En 1988, quand la Direction a autorisé les postes de radio sur les casiers, il s’est retrouvé du jour au lendemain sans activité. Nous avons alors traversé une période de plusieurs années où nous mangions de la mâche sans vinaigre. Heureusement, mon père a fini par retrouver un travail intéressant -guitariste d’ascenseur dans un gratte-ciel à New-York-, notre vie quotidienne s’est améliorée, et il a pu financer mes stages «Mot compte double» l’été.

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LOUER BAU

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S LILA êTRE LEPR

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OTIS REDDING

hh A R D TO

ANDLE

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ARETHA FRANKLIN

THINK 23


S LILA êTRE LEPR

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DAVID BOWIE

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IS THERE

LIFE ON MARS?

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S T I A R T R O E P S S S LE NE JO N A ’ D FLORENCE HENNEQUIN MUSICIENNE GUÉRISSEUSE

«

Photo : Clara Lecarme

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Petite déjà, je m’intéressais aux gens. J’aimais entrer en contact avec eux » C’est ainsi que débute l’interview de Florence Hennequin. Nous nous sommes donné rendez-vous au bistrot « Le Chantefable », à Paris. Sportive, elle a fait le chemin à Vélo. En préparant son nouveau jattendslenuméro1 consacré à la musique, Ivan Leprêtre a eu l’idée de cette mise en relation : « C’est une violoncelliste de talent, une femme brillante et super sympa. Il faut que tu la rencontres ». Et nous voilà, le samedi 23 mai, assises à la terrasse de ce bistrot bien connu des habitants du 20e arrondissement. Je comprends vite que j’ai en face de moi une femme d’une vivacité d’esprit peu commune. De musique il sera question, bien sûr. Mais aussi de sport, de fasciathérapie, de coiffure, de moto, d’aviation, de cheval, de famille. Femme généreuse et belle, multiple et entière, animée par l’envie permanente de comprendre et de donner, Florence est musicienne et guérisseuse.

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Anne Josse : « Florence, parle-moi d’abord de ton instrument…Comment vous êtesvous trouvés ? » Florence Hennequin : J’ai choisi le violoncelle parce que je ne pouvais pas faire de cheval. A.J. : ?... F.H. : C’est en regardant « Bonne nuit les petits »* que j’ai eu une révélation. Dans un des épisodes il y avait un cheval. Ce fut sans doute son unique apparition mais je me souviens parfaitement de l’émotion que j’ai ressentie. L’envie de faire de l’équitation m’est venue à ce moment précis. Malheureusement, mes parents n’ont pas partagé mon enthousiasme. A quatre ans, j’étais bien trop jeune et monter à cheval risquait de me déformer les jambes ! Je devais raisonnablement attendre d’avoir douze ans. Une fois cet âge atteint, j’ai fait une nouvelle fois l’expérience du mensonge de la part des adultes, parce qu’ils n’ont pas tenu leur promesse. L’équitation était un sport résolument trop dangereux à leurs yeux. A.J. : Une nouvelle fois ? F.H. : La capacité des adultes à mentir aux enfants, je l’ai comprise le jour où mes parents m’ont annoncé que le Père Noël n’existait pas. Comment pouvaient-ils m’avoir caché cela pendant tout ce temps ? J’ai commencé à sérieusement douter de la parole des grandes personnes. Je vais sans doute te surprendre si l’on considère que mon enfance, à bien des égards, fut heureuse, privilégiée même, mais j’ai sincèrement détesté être enfant. J’avais hâte de grandir pour accomplir tout ce que je voulais, décider de ce que ferais. Accéder au statut d’adulte signifiait pour moi être libre. A.J. : La pratique du violoncelle est un choix de tes parents ? F.H. : Je suis issue d’une famille de musiciens, la question de la pratique d’un instrument ne se pose pas. Cela fait partie de la culture, de l’éducation. J’ai choisi le violoncelle sans raison particulière. Sans doute par goût de la nouveauté. Mon frère joue du clavier à la perfection et mon père est un hautboïste de renom. Quant à ma mère, elle est altiste. Ma pratique s’est transformée en passion un peu plus tard. Je me suis vite révélée habile, douée même pour le violoncelle. A l’issue de ma formation au Conservatoire National de Paris, j’ai intégré l’Orchestre Régional de Bretagne. J’accédais enfin à l’autonomie à laquelle j’aspirais tant ! Lorsque je me suis installée à

* Bonne nuit les petits : série télévisée en noir et blanc créée par Claude Laydu, diffusée car soir de 1963 à 1972.

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Rennes, je me suis tout de suite mise en quête d’un lieu pour pratiquer l’équitation. Le problème, c’est que le club se trouvait assez loin de l’Orchestre. J’ai dû déployer une organisation hors pair pour concilier mes deux activités et pouvoir, entre chaque répétition, m’adonner à ma deuxième passion. Pour gagner du temps, j’ai décidé de passer mon permis moto, bravant au passage un autre interdit de mes parents ultra protecteurs : devenir motarde !

A.J. : Ça ne m’étonne pas vraiment. Ne le prends pas mal, mais même si tu es très féminine, il émane de ta personnalité comme de ton physique, quelque chose de… guerrier. Je me trompe si j’évoque un côté « rock » chez toi ? F.H. (amusée) : Et tu n’as pas vu mon tatouage dans le dos ! Pour être plus sérieuse, disons que je suis quelqu’un de déterminé et qu’il n’y a pas grand-chose qui me fait peur. J’ai même une certaine attirance pour les sports à risque. Par exemple, j’adore faire de la voltige aérienne. Ce que tu vis dans les airs, la liberté que tu ressens aux commandes de ton avion, est difficilement descriptible. C’est à la fois physique, technique et mental. Le sport fait partie de mon mode de vie depuis toujours. J’ai d’ailleurs été sportive avant d’être musicienne. A l’âge de six ans, j’enchainais les compétitions de natation. Aujourd’hui encore, je fais plusieurs fois par semaine mes 3 kilomètres de longueur et ne me déplace qu’à vélo.

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A.J. : C’est sans doute aussi parce que le violoncelle est très « physique ». F.H. : C’est l’image que la plupart des gens s’en font. Mais ce n’est pas plus physique qu’un autre instrument. Juste un peu plus imposant. Ce qui est sûr, c’est que ça muscle les bras (Avec humour Florence plie son bras droit qui sans forcer la contraction fait saillir naturellement un triceps aussi dur que du roc). A.J. : Je me rends compte que nous n’avons pas encore parlé de ton instrument de musique. Tu veux bien nous le présenter ? F.H. : Caruso(1), c’est le nom que j’ai donné à mon compagnon de route. C’est ma colonne vertébrale, mon fidèle ami. Il est né en 1875. Son créateur, Charles Bruyère, avait pris pour modèle un violoncelle créé au 17e par un luthier italien du nom de Testor. Le choix d’essence de poirier en fait sa rareté, la taille du poirier trop petite pour la dimension du violoncelle. On voit bien les quatre planches qui ont servi à sa confection. Le luthier n’a pas cherché non plus à effacer les nœuds du bois. Ca lui donne une vraie personnalité. Depuis 1990, année de son achat, nous ne nous sommes jamais séparés, son côté atypique m’a plu. Lorsqu’il a vu que j’avais un véritable coup de cœur pour ce violoncelle, le luthier a subitement fait grimper le prix de vente. J’aurais pu l’acheter au prix fort, si un ami n’avait pas constaté en l’examinant de plus près, l’existence d’une pièce d’âme(1) dissimulant une fracture de la table*. Cela ne m’a pas arrêtée, mais le prix, lui a baissé !

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Florence et Caruso en concert.


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A.J. : Comédies musicales, variété français et anglosaxonne, jazz, tango, musique de chambre, opéra, ballets… tu voyages avec « Caruso » dans un registre très éclectique ! F.H. : Je prends en effet beaucoup de plaisir à évoluer dans des registres variés voire opposés, à les faire se rencontrer. On peut aimer passionnément Bach et prendre un immense plaisir à interpréter un morceau de Muze. Je ne sais pas si tu as vu le spectacle Odino*, mais c’est une belle démonstration de tous les champs d’exploration possibles avec des instruments de musique dits « classiques ». J’ai certes une formation musicale classique, mais cela ne m’empêche pas d’aimer et de pratiquer la salsa. Son tempo, son côté physique, charnel : c’est pour moi une super image de la vie. Quand tu danses la salsa tu ne peux pas mentir. Ce qui compte ce n’est pas la technique mais l’intention, ce que tu donnes à l’autre comme espace de liberté. Je suis très sensible aussi à sa dimension populaire, accessible à tous, quels que soient le physique, l’âge, la tenue vestimentaire, le niveau social du danseur. Ce qui fera de lui un bon danseur, c’est sa générosité, sa capacité à communiquer avec son partenaire. C’est ce que je retrouve dans le duo DuElles (3) que nous formons Mimi Sunnerstam et moi, ou encore lorsque j’accompagne sur scène le comédien Jean-Paul Farré et l’accordéoniste et pianiste Benoît Urbain ! Maintenant, si je veux être honnête, je dois dire que ma passion pour le chant lyrique et la musique symphonique l’emporte sur le reste. La musique symphonique représente pour moi un travail colossal. Parce que pour être un bon musicien d’orchestre, tu dois être un excellent lecteur ce qui me demande beaucoup d’effort. Je vais te révéler un secret : je joue beaucoup avec les oreilles plus qu’avec mes yeux. D’ailleurs, les chefs d’orchestre n’aiment pas beaucoup cela… A.J. : Parmi toutes tes expériences, y en a-t-il qui t’ont particulièrement marquée et que tu voudrais bien partager avec nous ? F.H. : « DuElles » nous permet d’aller au-devant des personnes, partager des moments de vie, faire rentrer la musique dans des lieux où elle ne va pas habituellement. Jouer des airs connus, populaires, qu’ils soient issus du registre classique ou de la variété, permet de toucher le cœur des gens. Avec Mimi, on s’amuse à casser les codes pour donner une autre image de la musique classique en mélangeant des styles très variés. Récemment, dans une maison de retraite, une femme, recroquevillée sur sa chaise à la suite d’ un AVC s’est mise à chanter. Sa voix était claire, magnifique. C’est

*Odino : orchestre pop symphonique dirigé par Sylvain Audinoski reprenant des grands thèmes populaires classiques et des standards de la pop.

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un moment que je n’oublierai jamais, à la fois émouvant, joyeux, magique. C’est pour vivre des émotions comme celles-ci que je joue d’un instrument. Ce que j’aime aussi beaucoup, peut-être même ce que j’aime le plus, c’est l’accompagnement. Le solo concentre toute l’attention sur soi. Ça ne m’intéresse pas. Lorsque j’accompagne un chanteur, un comédien, je suis 100% à son écoute, je rentre pleinement en communication, en vibration avec lui. C’est une expérience extraordinaire qui se vit à deux, dans l’authenticité. A.J. : C’est quoi pour toi être un bon musicien ? F.H. : C’est communiquer avec la justesse et le tempo des autres musiciens, c’est écouter l’autre avec sincérité. Et puis, surtout, c’est faire du bien aux autres. A.J. : Ce n’est donc pas qu’une affaire de technique ! F.H. : Lorsque j’ai commencé à jouer, je n’étais pas véritablement passionnée. Longtemps, j’ai même été en résistance avec la musique. J’étais certes talentueuse mais je continuais à vivre la musique comme un second choix. J’ai eu une révélation quand j’ai compris que la musique pouvait aider les autres à se sentir mieux. A.J. : La musique aurait-elle révélé ta sensibilité altruiste ? F.H. : Depuis toute petite j’aime être au contact des gens et j’ai rapidement pris conscience du pouvoir que j’avais de leur faire du bien. La musique est une manière d’y parvenir. Mais il y en a d’autres. J’aime prendre soin des gens, embellir une femme en la coiffant ou en la maquillant. Embellir, cela signifie pour moi révéler la beauté qui est en chacun de nous. J’ai appris les techniques de base de la coiffure et du maquillage pendant les tournées, en observant les professionnels, en reprenant leurs gestes.

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Pour le massage, ça s’est fait autrement. J’ai découvert que j’avais un don pour faire circuler l’énergie, par la simple apposition des mains sur les zones douloureuses des techniciens plateau, les riggers (4), le personnel catering. Tu sais, ces gens-là prennent rarement le temps de se poser. Pas question de s’allonger sur une table de massage ou de s’installer confortablement dans une chaise de shiatsu ! Cette contrainte m’a permis d’exprimer mon don. A.J. : D’où ton envie de développer une activité autour du bien-être ? F.H. : En effet. J’ai obtenu mon diplôme en fasciathérapie en juin 2018 que je complète en ce moment par une spécialisation en coaching perceptif. Tout consiste à sentir l’énergie, à l’appeler et à la remettre dans le circuit. Je veux mettre mon don au service des autres, devenir moi-même un instrument pour guérir. A.J. : Je n’avais jamais entendu parler de fascia avant de tomber sur un document à ce sujet sur Arte* ! F.H. : Peu de personnes connaissent son existence. Pour bien expliquer aux lecteurs ce dont il s’agit, c’est une fine membrane blanche, très élastique, qui recouvre toute notre structure anatomique, qui relie tous nos muscles. A ne pas confondre avec la peau ! Le fascia joue un rôle essentiel de transmetteur d’énergie. Quand ton corps subit un traumatisme, dû à un choc, une mauvaise position ou une situation de stress, les fascias ont tendance à se rétracter ce qui entraine l’apparition de douleurs. Par le massage, on évite la prise de médicament. C’est une alternative qui privilégie l’écoute du corps et la douceur. Je crois en la perfection de la nature. Le corps est une merveille et peut se réparer lui-même dès lors que l’on est attentif à ses messages et qu’on lui fait confiance. Et comme pour pouvoir prendre soin des autres il faut d’abord penser à prendre soin de soi, j’ai choisi mon mode de vie. Je pratique le sport quotidiennement, de me nourrit sainement, et je me soigne uniquement par les plantes et les huiles essentielles. Ah j’oubliais, je pratique régulièrement le jeûne*. C’est formidable pour réactiver l’organisme. Je le conseille à tout le monde. A.J. : Plus j’apprends à te connaitre Florence plus je me rends compte que tu es avant tout une médiatrice. F.H. : Mon violoncelle comme mes mains sont des vecteurs de bien-être. Je n’ai pas peur de dire que je suis une guérisseuse. *Les alliés cachés de notre organisme : les fascias. Enquête passionnante sur cet organe inconnu et vital qu’est le fascia. Réal : Kirsten Esch, production Arte Geie. * Florence conseille la lecture de « Le Jeune, nouvelle thérapie », thierry Lestrade, Arte éditions, collection La découverte.

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A.J. : Cela explique-t-il le fait que tu ne composes pas ? F.H. : Je suis en effet une pure interprète. Je ne suis pas faite pour créer. Composer des morceaux ne m’intéresse pas. En cela je suis le parfait contraire de mon frère Jean-Louis que j’adore et que je considère comme un créateur brillant. Moi, je me sens parfaitement à ma place dans l’interprétation. Pour cela il faut beaucoup observer et être à l’écoute de l’autre. Ma manière de vivre les tournées va dans ce sens. Une tournée, comme tu le sais, c’est beaucoup de transport, et d’attente. Les artistes ont l’habitude de rester entre eux. On voyage ensemble, on mange ensemble, on fait la fête ensemble. Eh bien figure toi que j’ai pris l’habitude de ne pas suivre le rythme des autres musiciens mais celui du staff. Le montage de la scène me fascine. J’ai beaucoup de respect pour le travail des riggers qui s’activent pour que tout soit prêt lorsque les artistes rentrent en scène. C’est un travail dans l’ombre que beaucoup de musiciens ne connaissent ou ne mesurent pas. Alors, quand cela est possible, je m’arrange pour voyager en bus technique. J’aime participer au montage du décor. Comme je n’ai pas le vertige et que je pratique l’escalade, les techniciens n’hésitent pas à me demander un coup de main ! Si je te raconte cela, c’est pour te donner une nouvelle preuve de mon besoin permanent de comprendre les choses. Tout m’intéresse et ma curiosité me fait apprendre tous les jours de nouvelles choses sur les autres et sur moi-même. A.J. : Quels sont tes projets à court terme ? F.H. : Continuer de jouer, bien sûr, mais ne plus être entièrement dépendante de l’intermittence en développant une activité autour du bien-être et de la fasciathérapie. J’ai envie de soigner les musiciens, les sportifs et les chevaux. J’ai pensé ma maison de sorte que toutes mes activités puissent cohabiter. A côté des pièces de vie, de la salle de répétition pouvant accueillir un quatuor, il y aura bientôt mon cabinet de consultation. Promis, je t’invite pour ta première séance !

_____________________________ Enrico Caruso Ténor italien né à Naples le 25 février 1873 et mort le 2 août 1921 dans cette même ville. Il est considéré par la profession et par la critique comme le plus grand chanteur d’opéra de tous les temps. (1)

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TS I A R RT SE O P LES NE JOS D’AN

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FLORENCE HENNEQUIN D’un peu plus près encore

L’âme du violon C’est une fine baguette ronde taillée dans de l’essence d’épicéa. Elle se situe entre la table et le fond du violon. Son rôle est crucial. Placée sous pression, elle remplit des fonctions à la fois structurelles et acoustiques. Sans elle, la table aurait du mal à résister à la pression exercée par l’archet sous la tension des cordes ! L’âme a également pour rôle de transférer les vibrations dans la caisse de résonance. Sa position, l’orientation des fibres de son bois, son épaisseur, sa longueur, influent sensiblement sur les sons.

(2)

Comprendre le violoncelle

Volute Chevilles

Touche

Caisse de résonnance

Ouies en « f »

Chevalet

Tendeurs Cordier

Pique

DuElles Duo de Violoncellistes né de l’amitié entre deux musiciennes, Mimi Sunnerstam et Florence Hennequin. Bach, Mozart, Vivaldi, Beethoven, Schubert, Saint-Saëns, Piazzolla, Gershwin côtoient sans complexe Elvis, Earth Wind & Fire, Abba et Metallica. Un pied de nez à l’image traditionnelle teintée d’austérité d’un instrument qui nous fait voyager dans des émotions aussi variées que les genres musicaux. (3)

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3e trimestre 2019 • SPÉCIAL INSTRUMENTS DE MUSIQUE Rigger Mot anglosaxon emprunté au lexique de la voile, rigger signifie gréeur. To rig = monter, installer, fixer, gréer. Dans le domaine artistique, le rigging consiste à lever et accrocher les décors, grilles de lumières et appareils de sonorisation en hauteur des scènes de spectacle. Quand au 17e siècle est apparue la machinerie de théâtre, les marins, entre deux campagnes en mer, habitués à monter dans les grééments, faisaient les machinistes. Cela explique l’emploi de termes marins et certaines superstitions partagées sur le pont d’un bateau comme sur la scène d’un théâtre.

(4)

_____________________________

Hennequin en alexandrins https://florencehennequin.com/ site qui nous dévoile un autre talent de Florence : l’écriture. A la fois philosophiques et poétiques, ses billets abordent les sujets graves ou légers avec la même élégance teintée d’humour. Plus ou moins courts selon son humeur, en prose ou en vers, ils trouvent leur inspiration dans le quotidien de Florence, ses rencontres, ses lectures, ses voyages, ses réunions familiales. Elle y partage aussi sa passion pour les livres. Parmi mes coups de cœur « passons l’éponge », « Le bateau livre » et « Crêpes Show ». Une rubrique Photos nous donne aussi un aperçu de son goût pour l’image et son don du cadrage. Les dernières publications datent de 2017. Espérons que cela ne soit qu’un entracte dans cette comédie humaine en mots majeurs.

Échantillon discographique Bach, Haendel, Johny Hallyday, Muse, Metallica…Les interprétations de Florence servent toutes sortes de musiques, en solo, en duo, en quatuor ou en orchestre. En voici un bref aperçu : Comédies musicales, spectacles musicaux : le Roi Lion, La nuit d’Eliott Fall (nominée aux Molière du meilleur spectacle musical), le Bal des Vampires, le Cabaret Boris Vian, A flowering tree, Corps pour corps (hip hop), “Ferré, Ferrat, Farré”, Dialogues de géants, Elémentaire mon cher ! Parce que j’en avais besoin. Citons aussi Serge Lama, Ben Harper, Charles Aznavour,Tina Arena… et bientôt GHOST (saison prochaine !) Enregistrements albums, accompagnement d’artistes : Lenny Kravitz, Lisa Simone, Omar Pène, Johny Halliday, Patrick Bruel, Julien Clers, Demis Roussos, Juliette, Patrick Fiori, Tiéphaine, Pascal Obispo, Céline Dion,Tita Nzebi… Orchestres, ensembles et groupes : Orchestre régional de Bretagne, orchestre national de Lille, ensemble Jean Paul Goude, Ensemble Florence Hennequin, DuElles. Accompagnement de Grand Corps Malade.

Activité teambuilding Florence intervient aussi en entreprise. DRH et managers la sollicitent pour animer des séances de teambuilding destinées à développer la cohésion d’équipe, l’écoute et la confiance en soi. Pour prendre rendez-vous : florencehennequin@me.com

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FX A JOY

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FX A JOY

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D N A R BERTLANGER BOU

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R

J’INSTRUME ET AUTRES TEXTES... ebond du jour chacun, chacune. Ce que j’aime dans le rubricolage , c’est que ça écarquille les panoramas. On y voit loin dans son arrière-boutique et on se débarbredouille en se rafraîchissant l’écrou-de-mémoire à l’aide de son trousseau de clés-à-mollettres qui trépigne-pignent dans le fond du cerveau....

D

(N’oublions pas que l’étonnante anagramme du mot cerveau n’est autre qu’évacuer). ans “Instruments de musique” par exemple, j’entends, dans le creux de ma coquille d’intimologiste aux aguets, telles les marches clapipotantes de l’orgue-marin de Zadar en Croatie, le verbe instrumer qui signifie co-ïnstruire son intérieur brut par le truchement d’un outil. Puis à sa suite et aux travers des parois du mot musique, je crois entendre la voix étouffée d’une muse délicatastrophée aussi aphone que si on lui tordait l’haïku, me murmurer un son, un mon & un notre, en gesticulant, c’est sûr, dans cette muse, y’a un hic ! (comme dans efficace, si tu l’ôtes, tout s’effacent…) La diffusion semble s’amenuiser Flûtalors ! Serais-ce en relation avec la disparition annoncée de tout un pan (tympan, du grec tumpanon: tambour non débattu) d’émissions radiophoniques france-musicales aussi créatives que déroutantes telles que “le cri du patchwork “ de Clément Lebrun, d’Ocora* Couleurs du monde” de François Degeorges ou encore de “à l’improviste” d’Anne Montaron, rencontrée il y a peu au nécessaire Festival Pépette-Lumière en Burgondie.

*Ocora est l’acronyme de Office de COopérations Radiophoniques fondé par Pierre Schaeffer, ainsi qu’un incommensurable label d’enregistrements subtils réalisés de par le monde-tout-entier.

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V

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oilà, c’est dit et debout sur le papier. J’en suis tout-bouleversé… Bouleversez-vous le bercez ? C’est à ce moment précis que déboule une supertonique avalencre… Alors, en vertigitateur galactique de proximité,

N

ouvrir grand les écluses de la spontanéité… ous allons pouvoir patiner en vrac dans la présenterie & dans l’œil-vif du vaste sujet :

Le premier instrument de musique qui me vient à l’esprit surgit d’une fresqu’île miraginaire qui porte, sur le bout de la langue, le nom d’Ouscrapie, (On y accède par le jeu Ouscrapo : OUvroir de SCRAbblologie POétique ) et c’est une Cture, voici sa définition : Bouche des logis. Par sa grande singularité, la Cture déploie aussi ses charmes dans le pluriel. En effet, ses ondes-à-gond peuvent se propager jusqu’à la lettre E d’Eoclite*. Lorsqu’elles s’ouvrent aux vents de la curiosité, les Ctures s’offrent en élargissement sur la table de conjuguérison. Elle fait-naitre, aussi. « En Ouscrapie, avantage sans pareil, il y a le confort des maisons sobres, mais extraordinaires, mais musicales. Ces flûtes enchantées, je veux dire, ces tanières, envahies soudain de vibrations miraculeuses & contenues, sous ce chant céleste et cristallin, s’épanouissent. Ces mélodies radieuses et uniques allant parfois jusqu’au vacarme, bercent pourtant : la maison s’endormira… »

*Eoclite : Récital du vent s’engouffrant sous la Cture Cette entrée de secours étant minutieusement accordée par une ou un Lussier**, pour assouplir l’intimité harmonique de l’endroit qu’elle cloisonne. __________________________________________ **Lussier Prompt à intervenir, l’accordeur de Ctures S’agenouille délicat, scrutant votre embouchure Et de sa râpe habile harmonise les dégâts Du vent dans l’encoignures et en retrouve l’éclats (Et si cela vous donne envie d’écouter l’album « Les trésors de la langue » de René Lussier, qui relate entre autre, une expérience instrumentale vers l’accent québécois…)

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J

D N A R BERTLANGER BOU

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e vous laisse envisager ici à quoi pourrait ressembler : - l’Ananacordéon - l’entriloque - le Cas-où - le Merlomane - le Théréminérale - la Mornemuse

E

- l’Harmonitrice… n vrac, encore : • La lyre & le manège de Pierre Avézard, dit Petit-Pierre, qui bien que sourd comme un potiron fleuri, il su faire chanter sa différence fertile dans son potager mécanique et au-delà. • Les orchestres javanais & Balinais composés le plus souvent de toute une famille de cloches de bronze se jouent à califourchon-tuilé : Certains font le Pollos, d’autres le Sensé pour construire ensemble le Kotékan comme si l’un faisait Mél.. & l’autre… Odie pour réaliser une Rythmélodie. • Igor Stravinsky se souvient, sur son trottoir d’enfance, d’un vieux paysan muet qui se ménageait une poche d’air sous les aisselles pour produire des sons puissants (des puits-sons ?) Le futur compositeur nommait cela : « Le baiser de la nourrice. » • Le violon bateau du Baron tzigane qui rétrécit dans l’album de Fred « La dernière image » se ré-agrandit lorsque j’y re-pense. • Jacques-Perry Salkow, dans ses anagrammes à quatre mains, rapproche Listen de Silent, et qu’il déniche à travers cet adage de Nietzsche « La vie sans musique est tout simplement une erreur, une fatigue, un exil » l’intrigante anagramme :

R

« Temps gris. Il est en mer une lueur fantôme, un vaisseau qui luit, exténué. » adeau-Majeur ? Tiens, une p’tite berceuse-à-percussions, pour percer l’a-b-c comme une courte-échelle offerte vers la suite qui ne tient-qu’à-vous-d’continuer…

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’instrume ‘me relève la nuit, plus que les manches et j’égoutte en chant nocturne, regoûlinant ma rive crapauds-siffleurs babillant-tête… Faire-corps, discret-complice sur la pointe des pieds-à-coulisses d’une lettre ouverte en minutie en timbre-porte d’un détroit vers l’estuaire des amours

J

en narration synchronisée. ’en fais des confitures de souvenirs en bocalme pour mes oreilles-de-bruit qui éternuitent en carapace des postillons d’ingratignures. Entendresse et en douce, en décollement de la routine, comme une éponge de tableau noir qui engloutit le cri d’un ongle, comme une flûte en tibia sur l’parking d’la grotte Chauvet, comme un papillon dans une cocotte-minute, comme un octogénéraire sautant,

Logo du Palais Idéal ?

avec élan mais sans témoin à la ronde, les deux pieds dans la même flaque, j’instrume. Bertrand Boulanger alias Léonard Brutemberg terrien-vague

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L E U MANTI LAU

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GESTES NOTéS

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3e trimestre 2019 • SPÉCIAL INSTRUMENTS DE MUSIQUE

5 clichés de grands musiciens du jazz belge, shootés lors de prestations de Manuel Lauti au « Marathon jazz » de Bruxelles.

Hans van Oosterhout • Drums

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L E U MANTI LAU

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GESTES NOTéS

Greg Houben • Trumpet

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3e trimestre 2019 • SPÉCIAL INSTRUMENTS DE MUSIQUE

Fabian Fiorini • Piano

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L E U MANTI LAU

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GESTES NOTéS

Sreven Delannoye • Tenor Sax

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3e trimestre 2019 • SPÉCIAL INSTRUMENTS DE MUSIQUE

Brice Soniano • Bass

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L E T S CHRY L A G é

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A

ELECTRO WIND u début, c’est le piano.

Et en première partie de David Bowie.

Puis aspiration trompette.

A la Cité de la musique en 2002 à mes côtés.

Totalement. Truement.

Pas de partition stricte exécutée.

New York devient sa ville.

Son style c’est l’imperfection démultipliée.

John Hassel son mentor.

J’écris, je dialogue en live avec Ben : Takuskan,

Hommage aux écrits de Stockhausen.

the essence of life…

1980, illumination Ben Neill invente la

Nous créons des ponts entre le freejazz et la

mutantrompette.

vibration de l’écriture.

Un instrument hybride.

Improvisation préméditée.

Une trompette electroacoustique avec jeux de

Inspiration Cecil Taylor…

soupages et trois cloches.

Dans la nature, le chaos surgit dans un système

Effet de glissando garanti.

de modèles réguliers !

Alternance de sons ouverts et assourdis.

Le tout respire.

Ben préprogramme.

D’autres portes s’ouvrent…

Ben manipule en live.

Ben combine des mélodies simples pour faire jaillir le grand.

Ben joue avec John Cage, La Monte Young,

Aujourd’hui, croisement avec le mathématicien

Robert Moog, Dj Spooky…

Ralph Abraham.

A l’écoute, son pincé, écho à Miles Davis.

Partir de l’épure dans un monde où la surcharge

Ambiance trippy & groovy.

est énorme…

Sa musique adresse un souffle et des images…

Traduire une idée claire avec beaucoup d’espace

1996, je le rencontre à la Kitchen Performance

autour…

Space.

Désir mystique.

Création de paysages cinématiques.

Electro wind…

Ben projette plusieurs voix dans le monde de l’avant-garde.

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3e trimestre 2019 • SPÉCIAL INSTRUMENTS DE MUSIQUE

Ben et sa mutantrompette.

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ELECTRO WIND

La mutantrompette (détail).

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Ben et I Bowing.

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L E T S CHRY L A G é

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ELECTRO WIND

C. = Performance.

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C. = Performance.

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D

C I R é FRéDM ADA

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es cymbales pour chaussons

La voilà ma fanfare

Et une caisse claire dans son fourreau

Mon halètement premier, mon ragtime

Son étui de chaire

Mon égérie, mon pense-bête

Sa gabardine de peau tendue

Elle me trompe à pleins poumons

J’ai pour tambour

Et fourvoyé tant et mieux

Ce billot creux

Je souffle avec elle

Qui résonne et tapisse d’échos

Claironnant mes violes

Le martèlement de chaque jour

Ma lyre et mes pianos

Il ne passe la main

Car ils sont la voix tue

Qu’à tout rompre

Ils donnent corde à mes bourdons

Filant témoin et baguettes

Au carillon duquel

Au tintamarre des stridences, des haut perchés

Je bourde et baffe à la volée

En tête tous les cuivres

De ce fil

Possibles, forgés, tonitruants

Toujours

Ils sont à la kermesse des idées

La musique

Et jouent à chamboule-tout

Tintinabule.

Ils trombonent à tous vents À trompette que veux-tu Un saxo débridé en guise de boussole Le nez dans le tuba et un cor à demeure

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S

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’appareiller

L’onde

De pistons, de bidules, de cordes

En cadence

Pour rendre

Se tient à une berge

Beau

Dont la sérénade

Le nombre

Récite le livret

Donner au bois, au métal

Ce support

Assez de bras, de lèvres

Est l’appui

Pour extraire

Qui guide

Du chiffre

De ses halages, de ses bastringues

La romance du ton

L’aubade

Tapisser à force

Rejoindre ainsi les nuées

De battements, de souffles

Marché par marche

Le bran

Opus barreau après barreau

Et bramer

Gravi à contre-courant

De concert

C’est se hisser sur le levier des basses.

Marteler la note À une onomatopée près Et conférer au bruit Le statut D’inflexion C’est au prix D’une plongée Sous la peau Des tambours Que le son se joue

Photo Florence Hennequin • Musicienne

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E N A H STéPURAT ISSA

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éTUDE EN 3D

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E N A H STéPURAT ISSA

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E N A H STéPURAT ISSA

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éTUDE EN 3D

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E N A H STéPURAT ISSA

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RY LLI R E I TH GIANE FAG

’accorde

, il faut hz instrument » 220

est « Tout définition la sur

juste

que

s l’on

LES Instrumenteurs

J

A, B, C des instruments à vent e voulais écrire sur les instruments qui disparaissent : je veux parler des instruments à vent. De nos jours, on répugne à faire des efforts. Il faut bien reconnaître qu’il y a une pénibilité avérée à souffler un certain temps dans un tube de métal ou de bois évasé ou même conique pour des résultats aléatoires. Aujourd’hui, les jeunes musiciens répugnent à se mettre la pression. L’époque est à la facilité, la fluidité, la séduction. Tripoter un clavier façon DJ : oui, à la rigueur. Mais de là à se faire péter les veines du front et sortir les yeux de la tête pour séduire les dernières amatrices de fanfares, il y a une marge. Regardez le sort tragique de Chet Baker : obligé de sauter par la fenêtre de son hôtel à Amsterdam, après s’en être mis plein dans le cornet, juste pour échapper à une cohorte de fans nostalgiques de son époque beau gosse, c’est excessif.

Q

Non à la « trompétition » ui dans son cercle d’amis n’a pas, comme moi, connu un vieux trompettiste aux joues déformées façon crapaud buffle, obligé de saliver dans son tuyau jusqu’à son dernier souffle pour payer les traites de son studio et de sa bouteille de Jack Daniels. Certains de ces « musicos » de l’époque se rajoutaient même un handicap en se bouchant la trompe pour estomper les stridences. Allez comprendre. Ils mettaient leurs ambitions en sourdine juste pour jouer de leur instrument en public et médiatiser leur passion. Le fric, la carrière, à l’époque, ils s’en battaient la mesure. Tout le monde ne s’appelle pas Miles Davis ou Dizzy Gillespie, ils étaient au courant. J’ai une connaissance, un jeune surdoué un peu dilettante qui utilise une appli avec un embout qu’il rajoute à son Samsung pour le glisser dans l’embouchure de sa trompette et jouer à sa place. Ni vu ni connu, même s’il fait les arrangements, il ne souffle même plus. Inutile de dire qu’il « trompe » son monde. D’ailleurs, les spectateurs ont fini par s’en apercevoir. Un beau jour ou plutôt une nuit, pressé par le temps, énervé par une histoire de selfie, mon collègue musicien avait programmé par erreur le très tonitruant « concerto d’Aranjuez » au lieu du « Kind of Blue » de Miles lors d’un concert en plein air avec sa formation. Il avait dû sortir, déguisé en pain d’épices, sous les sifflets outrés et les jets de castagnettes de la foule en colère.

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C

Flûte de paon e sort funeste du musicien à vent n’est d’ailleurs pas réservé qu’aux cuivres. Je vous donne un exemple. Je hais personnellement la flûte de paon et par extension ceux qui en joue. Allez savoir pourquoi. Nous avons tous un instrument ou même un animal que l’on déteste, sans raison. La flûte de paon est de ceux-là. Non seulement le son qui sort de ses bambous naturels rappelle une vieille pub pour café gringo mais une fois les plumes déployées, celles du paon, admettez que l’on a du mal à voir l’orchestre qui joue derrière surtout avec ces dizaines d’yeux bleus ou verts aveugles qui vous narguent. Le côté péruvien n’arrange rien à l’affaire.

C

Ô son, Basson ’est le seul instrument à ne pas écouter à partir d’un certain âge. Sans appareil d’accompagnement auditif, on n’entend pas le basson ni les sons bas. Vous pouvez répéter. Culture : le Basson est un instrument à vent en bois de palissandre, d’érable et plus rarement de cagettes de légumes. Il coûte bonbon, ce qui n’en fait pas une sucrerie. Attention, l’instrumentiste qui le joue n’est pas le bassiste. Loin s’en faut. Quoi que j’en connaissais un (de bassiste), qui pris de boisson était aussi épris de basson. Il avait du mal à concilier le jeu des deux instruments, la corde et le vent, sauf dans son orchestre barock‘n’roll : les Montever Die . (Monteverdi en langue vernaculaire)

L

Flûte triste ? a légende dit que les premiers flûtistes refusaient de se faire opérer de leur becde-lièvre, par amour de sa tubulure. Je veux parler de la traversière. Ils pouvaient ainsi émettre un filet d’air de façon énergique proportionné au pincement de leurs lèvres sur les différents endroits de l’arête de l’embouchure. C’était une de ces époques où les partitions pour flûte étaient aussi précises que la chirurgie esthétique était approximative. Certains opérés se retrouvaient donc avec un becde-lapin ou même un bec benzène en guise de sourire ce qui rendait l’exercice de leur art périlleux. Et pourtant. Que peut-on rêver de plus élégant qu’un air de Mozart pour flûte, orchestre et perruque dans un jardin à la française ? Cet instrument rappelle le chant des oiseaux et imite si bien leur pépiement absurde, leurs jacasseries hautaines qu’il fait vibrer les frondaisons des tilleuls près de nos romantiques fenêtres à crémone.

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RY LLI R E I TH GIANE FAG

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M

Harmonica, caca… algré les apparences , c’est aussi un instrument à vent – énervant- de la famille des bois à anche (peu pulpeuse) qui fonctionne sur le principe de l’accordéon. Celui-ci peut être diatonique, chromatique et se jouer avec différents orifices dont la bouche. Il est ajouré et chaque trou peut jouer quatre notes, plus une de laverie si salissure. Depuis quelques années, certains baroqueux s’obstinent à souffler dans l’harmonica avec le nez pour restituer son côté pincé. Surtout lors des festivals d’été lorsqu’il n’est pas encombré. Cet usage singulier confère à la musique ainsi pratiquée un caractère végétatif (de végétations), propice à la rêverie et aux éternuements.

C

Shuakashi (à ne jamais confondre avec le Shinobue) ’est un tube en bambou d’origine chinoise ou japonaise, percé de trous pour y placer les doigts, généralement les siens. Le port d’ongles synthétiques de trop grande longueur est déconseillé, peu importe la couleur. Ce bidule n’a donc rien à voir avec un quelconque chat des frères Kuachi de sinistre mémoire. Inutile donc de la faire surveiller. Le Shakuashi, de par son caractère méditatif permet de meubler à peu de frais nos silences intérieurs. Il nous rappelle que la Chine d’où ce flutiau est issu n’a pas toujours été le pays du commerce débridé. Il fut aussi celui de l’opium rêveur.

I

SExophone nstrument de musique appartenant à la famille des bois bien qu’il puisse être en cuivre, laiton, plastique, plaqué or ou même en bambou. Longtemps utilisé dans les dancings lors d’interminables slows, bien plus suave et zouave que sa belle-sœur la trompette, le Saxo prolongea longtemps son heure de gloire auprès d’un public de femmes du tertiaire que le bruit des machines à écrire indisposait. Les formes érigées des poitrines de l’époque l’attestent : on ne restait pas longtemps insensible devant un saxophone baryton basse ! D’ailleurs les musiciens eux-mêmes appréciaient la présence du large pavillon au niveau des parties génitales. Surtout en descente de gamme chromatique. Ces graves sirupeux les auraient prédisposés à un certain groove.

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A

Ventilotron ppareil à vent rafraîchissant devenu instrument par hasard, il se joue avec une hélice surtout en période de forte chaleur et d’abus de boisson synchronisé. Il se dit que c’est surtout par désœuvrement qu’en été 1922 un musicien amateur, John R aurait glissé, par désœuvrement, un stylo dans la pale du ventilateur et déclenché, à son insu, une émotion de nature musicale chez sa femme portant assez hermétique. Le ventilotron ainsi nommé produisit un son à mi-chemin entre le gong tibétain et la harpe de concert, ce qui peut déconcerter - en la majeur- , voire en la-mentable. Du coup, on l’utilisa dans les hôpitaux psychiatriques et même les résidences balnéaires.

J

Homo ventilus e suis fasciné par le bruit d’une belle respiration humaine. En dehors de nos émotions, ce sont surtout nos poumons, notre poitrine, nos sinus qui nous font vibrer. Mécaniquement. Ces organes s’imposent comme nos premières caisses de résonance. Le cœur est notre boîte à rythme intégrée. L’Homme lui-même, est instrument à vent. Pas seulement lorsqu’il ronfle ou qu’il flatule. Quand il parle aussi, qu’il se répand dans l’atmosphère. D’ailleurs, le reste du temps, il va de l’avant. S’il chante, s’il vocalise, l’humanoïde redevient de suite un instrument à cordes. Surtout quand il tousse à la quinte.

L

Conclusion a musique est une dilatation de temps et de l’espace. Avec elle, on peut jouer avec la gravité, celle du moment ou de l’instant. Avec de la pratique et un piston, on peut même compresser la matière du sentiment. C’est amusant. Tout ça en un seul accord, une tonique, une octave, une quinte. C’est simple, sans musique, nous en serions réduits à grimper à l’échafaud du silence feutré de la stricte mesure du monde. Soupir. Quelques notes permettent l’expansion de l’être. L’être singulier, l’être ensemble. Sans douleur, sans humiliation, sans dieux à honorer, sans prosternation, pour nous faire vibrer à l’unisson, nous pouvons jouer jusqu’à la sénilité et mettre en contact notre terre et notre ciel… Et cela, avec l’instrument que nous sommes, sans limite, jusqu’à notre dernier souffle, notre dernier couac.

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INSTRUMENTS [DE MUSIQUE] I nstrumental’ liste Il y a toutes sortes d’instruments : instruments de musique, pour adoucir les mœurs ; instruments de torture, pour raccourcir clameur de qui meurt à demeure. Pour l’allergique aux sons, phobique du Classique, inutile de jouer grosse caisse ou pipeau : il est sourd comme un pot ; aucun canon ne trouve grâce à son ouïe. Le bourreau mélomane, au contraire, en frappant, se plie à la cadence : un’ deux / un’ deux… Il entre dans la danse, sans se soucier des basses, et monte à fond le son – le pendu, oh ça, valse ! Il y a beaucoup d’instruments dans un monde marchand que le Grand Capital instrumentalise à des fins de profit sans faim. On peut même, en cherchant bien, trouver des intrus menteurs et des instrumentistes ; on peut dresser la liste des débutants comme des finalistes. Dans le substantif « instrument », en tendant l’oreille, on entend le verbe instruire. Oui, ya pléthore d’instruments pour peu d’instruits et quelques instructeurs : à vent (ou à prés), percussions à cordes, corps répercutant, chirurgicaux ou liturgiques – l’étude en est un peu technique, mais les connaître est instructif, car, pour chaque corps de métier, pour chaque activité humaine, on distingue tel instrument, tel truc, tel objet, tel machin, tel outil, telle chose… bref : tel INSTRUMENT qui atteste de notre faculté d’homo sapiens sapiens à armer de patience et puis de savoir faire un esprit ingénieux qui aime à bricoler et ne tourne ses pouces mais, via c/ses instruments, et muni de dix doigts (sans compter seize orteils !) est habile à pincer, frotter, frapper, clouer, visser, scier, tailler ou même façonner de nouveaux instruments attendant simplement leur heure pour servir… Et puis, y’a l’intello (tais l’auteur de ses lignes), assez piètre manœuvre. Or, inventaire oblige : à lui revient l’honneur insigne de nommer, définir puis classer tel ou tel instrument. 19/06/2019

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INSTRUMENTS [DE MUSIQUE] II eau lie – faulx nique [de A comme accordéon à Z comme zouk] Il bruisse. Au fond du bois. D’un petit air futé. Son flûté. Voix qui fait ses vocalises. Exerce un chant-plain de pleins champs ! Aise accordée, on s’ouvre au chœur soprano, à ce brassage, ce métissage de sens haut-voltigeur. Instrumentale, a capela : Elle

hèle

aile…

Il/Elle se renvoient, là, balle - aube où l’eau bondit en cascade, échote de puits en puis. Tout un orchestre fait ses gammes. Affûte. Entraîne. Invite à la vitale expression d’être qui s’équilibre. En pavoise, haut perchée ou plus sourde. Instrument ricoche, entre échange et monologue ; un son s’insère au creux de l’arbre où nos histoires puisent leurs racines aériennes, voire plus gutturales. Une symphonie sans fin s’invente au fur et au mesure que l’œuvre envahit tout en nous laissant l’essence en alerte. Ici, la corde garde un timbre égrillard. Elle a cor ; bombarde un cu(l)ivre, en bout chaud, bec à roue dentée, sans aucun bémol. Et fait que tournent têtes : ô musique, sacrée musique immémoriale, accentue tel arpège ou tel riff endiablé, course en sac pour saxo ; oûd d’amour, d’Elle - hissez orgue ! Ô musique acoustique allant pianissimo, ou zique électronique assez fortissimo, aux forces telluriques en plaqués tectoniques, à moins que techno tique ? Harmonie quitte, happe aise ou transporte impétueuse, épi colosse axe haut : hue – hi – ah / musicale a

u

i / ahuris !

Envolée trompe étire en trombe onirique (art maux niqua), à corps z’ à cris, est champ d’action lyrique aux ondes qui s’étendent, en chacun s’entrechoquent, amplifient en chacune un désir infini de vivre en

HARMONIE

- extase instrumentale… Et zou : que zouk et zique obstacles soient aux zigs accros z’ aux z’ oukases ! 27/06/2019

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BULLETIN DE SOUSCRIPTION L’IRE ANSELME Incertain centenaire

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208 pages • format 16 x 23 her/s ami/s, pour honorer le centenaire de L’Anselme – adepte du pauvre, contempteur du pas-con, poète qui réhabilita ris et laid, voire riz au lait auréolé, olé ! – cela fait près de deux ans que je bûche, en lien étroit avec sa famille, d’une aide précieuse, à une somme, (un peu) sur le modèle de la fameuse collection « Poètes d’aujourd’hui » du regretté P. Seghers : – une présentation, en ouverture – des extraits de correspondances – des dessins et documents, hors-texte – un choix de textes parmi l’ensemble de ses livres – des entretiens, parus en revues – des poèmes et critiques, publiés ici ou là ; d’autres, inédits. Je lance cette souscription tout en vous informant de cette parution, prévue fin 2019, manière de savoir si les éditeurs Éditinter et Les Cahiers À l’Index comme moi-même devons prévoir 100 ou 100… 000 exemplaires ? Merci, donc, de m’informer, par retour de courriel, si ce bel ouvrage, encore dans les limbes, vous intéresse… moyennant 18 € l’exemplaire (port compris, avant parution), auxquels s’ajouteront 5 € de port, à compter d’octobre 2019. Vos commandes peuvent m’être adressées, dès aujourd’hui, à Dieppe, chèque à mon nom. N’hésitez pas à faire suivre cette info ! À bientôt, le plaisir de te/vous lire, bien amicalement, Jean-Marc ____________________________ Je soussigné

souhaite commander

demeurant à

exemplaire(s) de L’ire L’Anselme.

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Poésie(s) MUSICALE(S) e pauvre homme jouait simplement de l’hélicon !

Du soir jusqu’au matin, il aimait l’hélicon.

Aussi Hadès lui-même envoya le pauvre homme

Du midi au coucher, il soufflait à tout rompre,

Dans l’antichambre divine rejoindre l’instrumentiste.

S’époumonant follement pour produire du son.

L’histoire pourrait se finir, mais le bang qui sonna,

Plus puissant qu’un canon, faisait quartier vibrer

En un écho mêlé au flon flon languissant,

Au flon flon endiablé que produisait l’instrument.

Créa une harmonie inconnue jusqu’ici.

Mais un jour de décembre, en ce temps de l’avant,

L’assassin, tout ému, s’amouracha soudain

Un jeune homme affublé, en cet période festive

Du joueur d’hélicon tombé en pamoison.

D’un costume de noël, s’arma de son tromblon,

Et les voici partis, se tenant par la main,

Transforma en passoire émaillée de plombs ronds

Demander au bon Dieu que vite on organise

Le poumon du souffleur pour en faire charpie.

Pas très loin de Venise, les noces de Cana Où les deux amoureux s’y uniront sous peu.

Enterré dans sa boîte avec son hélicon, Il paraît que sur le chemin menant aux bords du Styx

Ici le plus cocasse. On raconte à ce jour

Il fit un tintamarre à réveiller les morts !

Que le Dieu prit lui-même la poudre d’escampette.

L’Hadès fort contrarié, repoussa notre joueur

Fatigué, las d’entendre cet odieux tintamarre

Du côté purgatoire pour le chasser dardar.

Passa le fleuve Ladon où Pan n’a pas sa place, Trouver un lieu paisible, paradisiaque à souhait.

Et contre toute attente, l’assassin d’hélicon Ne fut pas si heureux, car d’entendre le son

Notre Dieu débonnaire y coule des jours paisibles

Persistait en son ouïe. Le voici maintenant,

En compagnie de celle qu’on a nommé Syrinx

Le canon sur l’oreille, de son doigt tremblotant

La belle étant contente de pouvoir échapper

Pressant sur la détente, pour faire taire le cancan.

A ce cochon de Pan et ses festives débauches.

Le bang bang du fusil, grimpa aux portes des cieux, Forma rythmique parfaite avec le ronron Si caractéristique d’icelui hélicon. Aux enfers on ne put accepter d’y jeter Ce pauvre meurtrier usé par la musique Du bruyant instrument en forme de siphon.

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e son du canon

ouzine trompette et cymbales

Ils allaient à l’unisson

J’aime plus que tout

Au gré du refrain

A souffler dans ma bouzine

Ils marchaient d’un bon pas

Avec je fais un foin d’enfer

Par monts et par vaux

En caleçon du haut de mon balcon

Passant les ponts en arythmie

Je gueule aussi comme un putois

Leur voix vibrait au loin

Puis j’y fous la trompette

Et reprenait le chant choral

Au cul de l’aspirobalayette

L’air principal était doublé

Et je branche le tout sur le 220

D’une mélodie contre-chantée

Que me fournit l’eudè-effe

Qui décalait les paroles

Je possède aussi des cymbales

Les uns s’en revenaient

Plus grandes que des roues de camion

Chuchotant le miséréré

J’y tape et j’y tape tant et tant

Pas trop fort

Qu’à la fin même le piaffe

Pou ne pas réveiller les morts

Finit par fermer son gueule

Les autres partaient

Mais dès que la fanfare militaire

Sur l’air du tradéridéra

A passé son chemin

D’une voix gueularde

Je range tout mon foutoir

Pour effrayer la camarde

Et je patiente en buvant du pastis

C’est au son du canon

Jusqu’à l’année suivante

Qu’ils savaient les tranchées Pas si loin, pas si loin

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a question existentielle J’ai composé une mélodie pour une belle Qui jamais ne vient J’ai ajouté de bien jolies paroles Pour mon plus grand malheur Rien n’a changé Depuis je tiens un bistrot Où je sers des diabolos citron Vous n’allez pas le croire Mais pour attraper les filles C’est bien plus efficace J’arrive pas à comprendre Est-ce ma musique qui est mauvaise ? Ou bien sont-ce les diabolos qui sont vraiment trop bons ?

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