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Sexperte

Sexperte Sophie Pilcer, sexologue

LE DÉSIR FÉMININ EST-IL DIFFÉRENT DU DÉSIR MASCULIN ?

En 1970… Oui, je sais, ça fait un peu ancienne combattante! Et pourtant, on parlait de révolution sexuelle en 1970. En 1970, donc, les femmes par la légalisation de la contraception et de l’IVG (merci Simone, merci Gisèle !) découvraient enfin la liberté d’accéder à une sexualité récréative déliée du risque de reproduction.

Enfin, elles allaient pouvoir vivre leur désir et leur excitation sans risque de maternité. Bien loin de la question des difficultés à obtenir du désir, elles abordaient la vie rêvée de centaines de femmes qui osaient se qualifier de salopes! Salopes, ce mot nous écorche, nous dérange, nous parle de maltraitance féminine et, pourtant, à cette époque, il était synonyme de liberté sexuelle, d’être enfin libre dans son désir. On pouvait prendre son pied comme un homme sans contrainte et sans entrave. On ne parlait pas encore de charge mentale, ni d’indisponibilité au désir. Non, on découvrait son corps et son fonctionnement, le clitoris prenait ses lettres de noblesse et on déclassait le soutien gorge… La femme devenait un homme comme les autres…

Les hommes de toute façon étaient considérés comme des bonobos qui n’étaient qu’un sujet pour vivre sexuellement comme eux, être des êtres de sexe et de génitalité. On a pensé, écrit, crié que leur besoin sexuel était toujours un besoin irrépressible. Et finalement, on leur demandait juste de respecter le désir des femmes et de tenter de réfréner leurs besoins génitaux et organiques. Leur désir, on n’en parlait pas. Nous, les femmes enfin ouvertes à la possibilité d’une vie sexuelle dictée par notre désir, devions mettre en œuvre tout ce qui pouvait nous porter vers l’excitation sexuelle. On parlait d’un malentendu intrinsèque à la condition masculine et féminine, un mâle entendu, me diriezvous? Ou plutôt l’idée d’un mâle pas entendu, parce qu’il était considéré comme se réduisant uniquement à son organe de reproduction. L’homme pénis ne pouvait pas rencontrer la femme tête…

Et puis, on s’est étonné de voir et d’entendre ces hommes qui ne bandaient plus ou peu et ces femmes qui étaient frustrées sexuellement. On ne s’attendait pas à ça: une inversion de genre. Un homme qui désire, une femme qui a envie de baiser! Si l’homme n’est pas qu’un animal bandant, s'il peut désirer et jouir sans érection, il pourrait lui aussi devenir une femme comme les autres…

Parce que, oui, aujourd’hui, la majorité des hommes qui viennent en consultation de sexologie, arrivent la queue entre les jambes, coupables de ne plus avoir de libido. Une libido qui a été normée, étouffée d’injonctions de jouissance et de pénétration. Eux aussi ont besoin de révolution sexuelle. Ils veulent sortir du trou génital des injonctions, ils veulent découvrir leurs sens, ils veulent jouir et faire jouir avec leur corps tout entier, ils veulent la même chose que vous, chère Janette, construire un désir érotique, entrer dans les fantasmes, pousser leur excitation au paroxysme des corps et des cœurs. Non, comme pour vous, leur désir n’est pas automatique, ni robot, ni porc. Ils sont avec vous dans l’arène de l’invention et de la créativité érotique! Leur mâle être est la voie de la réconciliation des désirs.

La révolution sexuelle de ces messieurs, dames, est avancée. Prenez place, c’est un tour gagnant pour tout le monde, pas de perdant dans le manège de l’excitation: le septième ciel est à portée de mains, de bouches, de corps et de cœurs! La boîte à fantasmes vous tend les bras! On n’annule pas la différence des genres, on ne nie pas les spécificités de chacun, on sort juste de ses cases, ou cages, pas très dorées mais pleines d’injonctions !