ITAA-Zine | Numéro 9 - Novembre 2023

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Édition mensuelle – Bureau de dépôt Gent X – P409030

Que faire en cas de demandes informelles d’un contrôleur qui attend une réponse dans un délai très court ? Vous êtes de plus en plus nombreux à nous faire part du fait que vous recevez des demandes informelles de contrôleurs fiscaux sans que votre client n’en soit informé et, de surcroît, avec une exigence de réponse dans des délais très courts. Certains contrôleurs se permettent même de vous menacer de sanction ou d’amende en cas d’absence de réponse dans le délai demandé. iStockphoto.com/g-stockstudio.


Colophon Demande de renseignements : que faire en cas de demandes informelles d’un contrôleur qui attend une réponse dans un délai très court ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 La transposition en droit belge de la directive (UE) 2019/2121 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 Mises à disposition transfrontalières de véhicules à des utilisateurs non assujettis : TVA belge ou étrangère ? Régularisation ou pas ?. . . . . 15

ITAA-zine Magazine mensuel de l’ITAA (ne paraît pas en janvier et en juillet) N° 9/2023 ADMINISTRATION ET RÉDACTION ITAA, Boulevard Emile Jacqmain 135/2, B-1000 Bruxelles Tél. : +32 2 240 00 00 E-mail : info@itaa.be COORDINATION DE LA RÉDACTION Stéphane De Bremaeker (NL) – stephane.debremaeker@itaa.be Gaëtan Hanot (FR) – gaetan.hanot@itaa.be COMITÉ DE RÉDACTION Stéphane De Bremaeker, Vincent Delvaux (Vice-Président), Liesbet Dhaene, Carine Govaert, Gaëtan Hanot, Caroline Meys, Nathalie Lambot, François Lezaack, Nathalie Procureur, Bart Van Coile (Président) IMAGES iStockphoto TRADUCTIONS Azimut Translations, IGTV ÉDITEUR RESPONSABLE B. Van Coile, Boulevard Emile Jacqmain 135/2, B-1000 Bruxelles

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L’Institut des conseillers fiscaux et des experts-comptables (ICE) a été créé par la loi du 17 mars 2019. L’ICE se présente en tant qu’ITAA, et est le résultat d’une fusion entre l’IEC et l’IPCF. L’ITAA est géré par un Conseil et un Comité exécutif. Plus d’informations via : www.itaa.be.

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AVIS AUX LECTEURS Les auteurs, le comité de rédaction et l’éditeur veillent à la fiabilité des informations publiées, lesquelles ne pourraient toutefois engager leur responsabilité. Les articles représentent les points de vue et les opinions des auteurs et donc pas nécessairement ceux de l’Institut ou du comité de rédaction.

ÉDITEUR Wolters Kluwer Belgium Motstraat 30, B-2800 Mechelen


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Demande de renseignements : que faire en cas de demandes informelles d’un contrôleur qui attend une réponse dans un délai très court ? Vous êtes de plus en plus nombreux à nous faire part du fait que vous recevez des demandes informelles de contrôleurs fiscaux sans que votre client n’en soit informé et, de surcroît, avec une exigence de réponse dans des délais très courts. Certains contrôleurs se permettent même de vous menacer de sanction ou d’amende en cas d’absence de réponse dans le délai demandé. Nous rappelons qu’il n’existe pas de délai de réponse imposé par la procédure fiscale en cas de demande informelle ! L’ITAA a déjà signalé à plusieurs reprises au SPF Finances que ces pratiques des contrôleurs mettent la pression sur les professionnels économiques de façon injustifiée. Dans le but de vous aider dans la pratique quotidienne de votre cabinet, nous vous proposons, dans le cadre de la présente publication : • de mettre un terme à la confusion qui existe dans le chef de certains contrôleurs fiscaux entre les demandes informelles et formelles de renseignements ; • de rappeler, qu’en l’absence de mandat général octroyé à vous par votre client, la demande de renseignements doit en principe être adressée par le contrôleur fiscal directement au contribuable, ceci afin que le secret professionnel des membres ITAA soit respecté ; • de vous communiquer la position de l’ITAA ;

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• de vous fournir un modèle de réponse standard à une demande de renseignements informelle injustifiée d’un contrôleur fiscal, selon que vous disposez d’un mandat général du client ou non.

1. Demande informelle versus demande formelle de renseignements par le contrôleur ? Si un contrôleur fiscal adresse une demande informelle, il ne peut pas invoquer un délai contraignant à l'encontre du professionnel économique pour obtenir une réponse rapide. La date indiquée ne peut être qu’un souhait de l’administration, l’on peut évidemment en tenir compte dans la mesure du possible mais il ne s’agit en aucun cas d’une obligation. Ce n’est qu’en cas de demande de renseignements formelle qu’un délai de réponse est expressément prévu,

étant entendu que la demande doit être adressée directement au contribuable qui fait l’objet d’un contrôle. En vertu de l’article 316 du CIR 921 , tout contribuable est tenu de fournir par écrit, dans le délai d’un mois, tous les renseignements qui lui sont réclamés aux fins de vérifier sa situation fiscale. En effet, l’article 316 autorise l’Administration à demander des informations au contribuable sur ce qu’il a repris dans sa déclaration fiscale. A défaut de réponse du contribuable, celui-ci s’expose à des sanctions administratives et des sanctions pénales (sauf prolongation du délai pour de justes motifs) 2 . En outre, en l’absence de réponse à une demande de renseignements, l’Administration fiscale peut appliquer une taxation d’office. La charge de la preuve est alors renversée. Il revient normalement à l’Administration de prouver quels sont les revenus imposables, mais en cas de taxation d’office, c’est le contribuable qui devra prouver que les chiffres de l’administration fiscale sont inexacts.

Article 316 CIR 92 : ‘Sans préjudice du droit de l’administration de demander des renseignements verbaux, toute personne passible de l’impôt des personnes physiques, de l’impôt des sociétés, de l’impôt des personnes morales et de l’impôt des non-résidents a l’obligation, lorsqu’elle en est requise par l’administration, de lui fournir, par écrit, dans le mois de la date d’envoi de la demande, ce délai pouvant être prolongé pour de justes motifs, tous renseignements qui lui sont réclamés aux fins de vérifier sa situation fiscale.’ Une prolongation du délai de réponse avant l’échéance du délai initial peut être demandée. Le contrôleur n’est pas obligé d’accorder cette prolongation, mais il le fera le plus souvent, assurément en cas de motif valable, tel une maladie, un séjour à l’étranger, etc.

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4 faute contractuelle en les communiquant à un tiers sans en avoir reçu l’accord du client au préalable (sauf dans des cas spécifiques explicités dans une précédente note de l’ITAA6). Ce principe doit être respecté si vous n’avez pas été mandaté par votre client pour répondre à une demande de renseignements d’un contrôleur fiscal, autrement dit si vous ne disposez pas d’un mandat général. iStockphoto.com/Thanakorn Lappattaranan.

2. Quid du secret professionnel ?

nature ou confiés, expressément ou tacitement, à l’expert-comptable ou au conseiller fiscal 5 .

En vertu de l’article 120 de la loi du 17 mars 2019 relative aux professions d’expert-comptable et de conseiller fiscal4 , l’article 458 du Code pénal est d’application aux professionnels économiques (en ce compris les stagiaires).

Toute pièce se trouvant dans le cabinet de l’expert-comptable ou du conseiller fiscal ne recèle pas nécessairement des éléments confidentiels.

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Le secret professionnel porte sur les éléments confidentiels par leur

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Il est important de signaler que, quand bien même des éléments ne seraient pas couverts par le secret professionnel, l’expert-comptable ou le conseiller fiscal commettrait une

3. Position de l’ITAA Malgré les nombreuses concertations entre l’ITAA et l’Administration fiscale au sujet des demandes de renseignements injustifiées, certains contrôleurs fiscaux continuent de menacer les membres ITAA de sanction ou d’amende en l’absence de réponse dans un délai très court à une demande informelle de renseignements. Dans ce contexte, deux hypothèses doivent être distinguées : • Si vous disposez d’un mandat général, vous pouvez répondre à la demande du contrôleur fiscal en fonction du planning de vos travaux, et après concertation préalable avec votre client. • Si vous ne disposez pas d’un mandat général, il conviendra de répondre au contrôleur fiscal que vous devez d’abord contacter votre client pour savoir s’il vous mandate pour répondre à la demande de renseignements. A défaut, le contrôleur fiscal devra s’adresser directement au contribuable.

L’administration fiscale peut, pour assurer la juste perception de l’impôt, également recueillir des renseignements auprès du professionnel économique, directement en son nom. Dans l’hypothèse où le professionnel économique recevrait, à son nom, une demande de renseignements ou d’être entendu, l’Administration – qui souhaite recueillir des renseignements par audition auprès d’un tiers en qualité de témoin – devrait appliquer la procédure prévue par l’article 322, paragraphe 1er du CIR 92, convoquer par recommandé le contribuable pour assister à l’audition des témoins selon l’article 325 du CIR 92 et dresser un procès-verbal. L’expertcomptable ou le conseiller fiscal est cependant rarement un témoin car, sur base de sa lettre de mission, il est un exécutant du contrat d’entreprise combiné au contrat de mandat, ce qui forme d’ailleurs un contrat innommé. De plus, il faudrait que l’e-mail envoyé par l’Administration fiscale reprenne le nom de l’agent et son grade de sorte qu’il soit possible pour le professionnel économique de vérifier si la personne qui sollicite les renseignements possède bien le grade d’expert financier des finances comme le prévoit l’article 322, paragraphe 1er, alinéa 1er du CIR 92. En tout état de cause, l’Administration fiscale se doit de respecter les règles de procédure fiscale ! https://www.ejustice.just.fgov.be/cgi_loi/loi_a1.pl?language=fr&la=F&cn=2019031703&table_ name=loi&&caller=list&F&fromtab=loi&tri=dd+AS+RANK&rech=1&numero=1&sql=(text+contains+(%27%27))#Art.120 Cass. 30 octobre 1978, Pas. 1979, I, p. 248. Pour davantage d’informations sur le sujet, nous renvoyons à une précédente publication de l’ITAA : https://www.blogitaa.be/ fr/2022/04/14/le-secret-professionnel-de-lexpert-comptable-et-du-conseiller-fiscal/

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4. Proposition de réaction standard par l’ITAA à une demande de renseignements informelle à laquelle il est exigé de répondre dans des délais très courts

Proposition de réponse standard de l’ITAA

Hypothèse 1 : vous ne disposez pas d’un mandat pour répondre

Bonjour Madame, Monsieur, Je suis en charge d’examiner le dossier du contribuable repris ci-dessus. Vous avez indiqué 1 au code 1036, auriez-vous un jugement à me fournir ? Si ce n’est le cas je devrai effectuer un rejet de l’enfant repris en garde alternée. Veuillez me renvoyer votre accord de la rectification éventuelle 1036 : 0 au lieu de 1. Sans réponse de votre part endéans les 10 jours, je me verrai contrainte d’envoyer un avis de rectification au contribuable.

Nous avons bien reçu votre demande informelle de renseignements concernant (nom du client). Nous ne disposons pas de mandat qui nous permette de répondre et ne pouvons donc vous communiquer les données demandées sans que notre client n’en soit averti au préalable et sans qu’il nous ait donné son accord pour répondre à votre demande.

Afin de diminuer la pression déjà suffisamment importante qui pèse actuellement sur les professionnels économiques, l’ITAA propose à ses membres de s’inspirer du modèle de réponse standard ci-dessous en cas de demande informelle de renseignements contenant un délai de réponse contraignant très court :

Exemple de demande de renseignements informelle

Cher M. / Chère Mme,

Hypothèse 2 : vous disposez d’un mandat pour répondre

Proposition de réponse standard de l’ITAA Cher M. / Chère Mme, Nous avons bien reçu votre demande informelle de renseignements concernant (nom du client), pour lequel nous disposons d’un mandat. Nous l’informons dès à présent de votre demande de renseignements. Nous ne manquerons pas de donner suite à votre demande informelle de renseignements dès que possible, et après concertation avec notre client, en fonction du planning de nos travaux. Nous pensons pouvoir vous répondre pour le (date prévue). En effet, vous n’ignorez pas qu’une demande informelle ne peut en aucun cas être assortie d’un délai contraignant de réponse. D’avance merci pour votre compréhension.

En tant que membre ITAA, nous sommes tenus de respecter des principes de déontologie, dont notamment le secret professionnel. En vertu de l’article 120 de la loi du 17 mars 2019 relative aux professions d’expert-comptable et de conseiller fiscal, l’article 458 du Code pénal est d’application aux professionnels économiques. Si notre client nous y autorise, nous donnerons suite à votre demande informelle de renseignements dès que possible, et après concertation avec notre client, en fonction du planning de nos travaux. En effet, vous n’ignorez pas qu’une demande informelle ne peut en aucun cas être assortie d’un délai contraignant de réponse. Si notre client ne nous donne pas mandat pour répondre à votre demande, il vous appartiendra de prendre contact directement avec celui-ci. Dès que nous recevons les instructions de notre client nous vous tiendrons informé. D’avance merci pour votre compréhension.

Axelle Dekeyser Cellule Fiscalité ITAA

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La transposition en droit belge de la directive (UE) 2019/2121 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières 1. Introduction La mobilité transfrontalière des sociétés constitue un élément essentiel de la liberté d’établissement qui est l’une des libertés fondamentales au sein de l’Union européenne. Alors que la liberté d’établissement renvoie au droit de constituer et de gérer des sociétés dans un autre État membre de l’Union, l’interprétation de la Cour de justice va plus loin. La Cour interprète cette liberté comme la possibilité pour les sociétés de se transformer en une société régie par le droit d’un autre État membre.1 Bien que le besoin d’une harmonisation des règles en matière de mobilité transfrontalière ait été reconnu depuis longtemps au niveau européen, il a fallu attendre la mise en œuvre de la directive (UE) 2005/56 2 , telle que modifiée ultérieurement par la directive (UE) 2017/1132 3 , concernant les fusions transfrontalières. Jusqu’il y a peu, le législateur communautaire n’avait procédé à aucune harmonisation concernant les autres formes de mobilité transfrontalière, dont les scissions et les transformations. Pour combler cette lacune du droit, le législateur belge de son côté a prévu un régime belge applicable aux scissions et transformations transfrontalières à l’occasion de l’introduction du Code des sociétés et des associations (CSA).

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Or, la directive européenne 2019/2121 assure à présent la modernisation des règles applicables en matière de fusions transfrontalières et prévoit pour la première fois une réglementation harmonisée applicable aux scissions et transformations transfrontalières. Cette directive est transposée en droit belge par la loi du 25 mai 20234 , de sorte que les dispositions du Livre 12 et du Livre 14 du CSA sont mises en conformité avec la directive 2019/2121. En plus de modifier les règles en matière de restructurations transfrontalières, la loi a également pour effet de créer de nouvelles possibilités en matière de fusions, scissions et transformations nationales. La loi a ainsi également apporté des modifications considérables aux procédures relatives aux restructurations nationales.

2. Champ d’application Le champ d’application de la directive 2019/2121 est limité aux sociétés à capital. La directive prévoit en outre une limitation géographique, son champ d’application étant limité au territoire de l’Union européenne, étendu à celui de l’Espace économique européen (EEE). 5 Lors de la transposition de la directive 2019/2121, le législateur belge a choisi d’étendre son champ d’application. Le champ d’application personnel comprend toutes les formes de sociétés dotées de la personnalité juridique qui sont

Considérant 2 de la directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières, JO.L. 12 décembre 2019, 321 (ci-après « directive 2019/2121 »). Directive 2005/56/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 sur les fusions transfrontalières des sociétés de capitaux, JO.L. 25 novembre 2005, 310. Directive (UE) 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 relative à certains aspects du droit des sociétés, JO.L. 30 juin 2017, 169. Loi du 25 mai 2023 modifiant le Code des sociétés et des associations, la loi du 16 juillet 2004 portant le Code de droit international privé et le Code judiciaire, notamment à la suite de la transposition de la directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières, M.B. 6 juin 2023, 52268 (ci-après « la loi »). En vertu de l’accord sur l’Espace économique européen, le champ d’application s’étend également aux pays de l’EEE (Norvège, Islande et Liechtenstein).

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7 reprises dans le CSA 6 , comme la SA, la SRL et la SC, mais aussi la SNC et la SComm. Ce principe connaît toutefois plusieurs exceptions.7 Le champ d’application territorial est lui aussi plus étendu que celui prévu par la directive, les règles n’étant pas limitées aux restructurations transfrontalières au sein de l’EEE. Les dispositions s’appliquent également aux opérations impliquant une ou plusieurs sociétés hors EEE.

3. Transformation transfrontalière Une transformation transfrontalière renvoie à la procédure par laquelle une société transfère son siège vers un autre pays, suite à quoi elle adoptera une forme légale du pays vers lequel le siège est déplacé, sans que sa personnalité juridique s’en trouve affectée.

3.1. Émigration 3.1.1.

Phase de préparation

Projet de transformation La phase préparatoire de la procédure d’émigration d’une société commence par l’établissement d’un projet de transformation (sous seing privé ou authentique) par l’organe d’administration de la société belge. Ce projet mentionne les informations prescrites par la loi, entre autres les données de la société avant et après la transformation, les détails du notaire qui délivrera le certificat préalable à la transformation, etc. 8 Ce projet de transformation, accompagné d’un avis aux titulaires d’actions et de parts bénéficiaires, aux créanciers et aux (représentants des) travailleurs, est ensuite déposé au greffe du tribunal de l’entreprise compétent et publié aux Annexes du Moniteur belge.9 Le législateur a néanmoins prévu une autre solution de mise à disposition électronique de certains documents sur le site Internet de la société, de sorte que seul un nombre limité d’informations sera déposé et ensuite publié aux Annexes du Moniteur belge.10

Art. 12:1 CSA (fusions et scissions transfrontalières) ; art. 14:15 CSA (transformations transfrontalières). 7 Voir art. 12:106 CSA (fusion transfrontalière) ; art. 12:120 CSA (scission transfrontalière) ; art. 14:15 et 14:17 CSA (transformations transfrontalières). 8 Art. 14:18 CSA. 9 Art. 14:18/1 juncto 2:8 juncto 2:14, 1° CSA. 10 Art. 14:18/1, § 2 CSA.

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8 Protection des créanciers Un mécanisme de protection des créanciers sous la forme d’un droit d’opposition a priori est prévu à partir de la publication du projet de transformation aux Annexes du Moniteur belge. Les créanciers (i) dont les créances sont certaines, mais non encore exigibles au moment de la publication du projet de transformation, ainsi que ceux (ii) qui ont des créances faisant l’objet d’une action introduite en justice ou par voie d’arbitrage contre la société avant cette publication, qui ne tirent aucune satisfaction des garanties offertes dans le projet de transformation, peuvent exiger une sûreté supplémentaire ou toute autre garantie pour leurs créances dans les trois mois de la publication du projet.11 Le notaire ne peut délivrer le certificat préalable à la transformation que s’il constate que les créanciers qui ont fait usage de leur droit d’opposition ont réellement obtenu satisfaction ou que leurs prétentions ont été rejetées.12 Il s’ensuit que les créanciers ont la possibilité de bloquer la transaction. Le délai précité de trois mois a en outre valeur de délai d’attente. L’assemblée générale appelée à se prononcer sur le projet de transformation ne peut se réunir qu’après l’expiration du délai d’attente de trois mois, et donc après l’expiration du délai de protection des créanciers.13

Rapport de transformation Après l’établissement d’un projet de transformation, l’organe d’administration de la société belge sera responsable de l’établissement d’un rapport de transformation contenant certaines mentions prescrites par la loi. À cet égard, l’organe d’administration peut choisir d’établir (i) un seul rapport global ou (ii) deux rapports distincts à destination respectivement des titulaires d’actions et de parts bénéficiaires et des travailleurs.14 S’il choisit la deuxième option, le contenu des rapports variera selon le destinataire.15 Le législateur prévoit néanmoins certaines exceptions à l’obligation de rapport de l’organe d’administration. Dans certains cas exceptionnels, la partie du rapport ou le rapport (selon le choix de l’organe d’administration) à

destination respectivement des titulaires d’actions ou de parts bénéficiaires ou des travailleurs ne doit pas être établi.16

Expert En plus du rapport spécial de l’organe d’administration, il est requis qu’un expert, à savoir respectivement le commissaire, un réviseur d’entreprises ou un expert-comptable certifié rédige un rapport spécial sur le projet de transformation, ainsi que sur l’état intermédiaire résumant la situation active et passive 17. Les mêmes exceptions que celles qui s’appliquent dans le cadre du rapport de transformation s’appliquent dans le cadre de l’obligation de rapport du commissaire, du réviseur d’entreprises ou de l’expert-comptable certifié.18

Obligation d’information Une fois les documents précités établis, ils doivent être portés à la connaissance (i) des travailleurs et (ii) des titulaires d’actions et de parts bénéficiaires. Le contenu de l’obligation d’information et les modalités de mise à disposition varient selon la catégorie de destinataires.19 Le législateur a également prévu une autre solution de mise à disposition électronique sur le site Internet de la société des documents destinés aux titulaires d’actions et de parts bénéficiaires. 20

3.1.2. Décision de transformation transfrontalière La deuxième phase de la procédure de transformation transfrontalière concerne l’approbation de l’opération transfrontalière. L’assemblée générale ne peut délibérer et statuer sur la transformation transfrontalière qu’après l’expiration du délai d’attente, c’est-à-dire le délai de trois mois après la publication du projet de transformation dans lequel les créanciers peuvent faire opposition. 21

Quorum et majorité Pour que l’assemblée générale puisse se tenir valablement, il faut que la moitié au moins du capital, ou, si la société ne

11 Art. 14:19 CSA. 12 Art. 14:26, alinéa 5 CSA. 13 Art. 14:23 CSA. 14 Art. 14:20, alinéa 2 CSA. 15 Comparez l’article 14:20, alinéa 3 CSA avec l’alinéa 5 du même article. 16 Art. 14:20, alinéa 4 CSA (titulaires d’actions et de parts bénéficiaires) et art. 14:20, alinéa 6 CSA (travailleurs). 17 Art. 14:21, § 1er CSA. 18 Art. 14:21, § 2 CSA. 19 Art. 14:22 CSA (titulaires d’actions et de parts bénéficiaires) et art. 14:20, alinéa 8 CSA (travailleurs). 20 Art. 14:22, § 4 CSA. 21 Art. 14:23 CSA.

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dispose pas d’un capital, la moitié au moins du nombre total d’actions émises, mais également la moitié du nombre de parts bénéficiaires soient présentes ou représentées. 22 En plus du quorum de présence précité, une condition de majorité spéciale au sein de l’assemblée générale s’applique, à savoir que la transformation transfrontalière ne sera approuvée que si la proposition réunit une majorité de trois quarts des voix, sans qu’il soit tenu compte des abstentions au numérateur ou au dénominateur. 23 Dans des situations exceptionnelles, toutefois, une condition d’unanimité s’appliquera en lieu et place de la condition de majorité spéciale précitée. 24

Droit de sortie Le droit de sortie des titulaires d’actions et de parts bénéficiaires est sans doute la principale nouveauté introduite par la directive (UE) 2019/2121. Conformément à ce droit de sortie, les titulaires de titres précités ont le droit de démissionner de la société et, par conséquent, d’obtenir le remboursement de la valeur de leur titre à condition (i) qu’ils aient fait part à la société de leur intention d’exercer leur droit de sortie, (ii) qu’ils aient voté contre la proposition à l’assemblée générale appelée à se prononcer sur l’opération transfrontalière et (iii) qu’ils aient fait acter leur vote négatif ainsi que leur intention d’exercer leur droit de sortie dans le procès-verbal de l’assemblée générale. 25

22 Art. 14:24, § 1er, 1° CSA. 23 Art. 14:24, § 1er 2° CSA. 24 Art. 14:24, § 4 CSA. 25 Art. 14:25/1 CSA.

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10 Les actions ou parts bénéficiaires du titulaire démissionnaire seront détruites au moment où l’opération transfrontalière prendra effet. 26

3.1.3. Phase d’exécution Certificat préalable à la transformation Le notaire est tenu de délivrer un certificat préalable à la transformation dans lequel il atteste la légalité tant interne qu’externe des actes et formalités incombant à la société. 27 Préalablement à la délivrance de ce certificat, il est procédé à un contrôle détaillé sur la base des documents et informations fournis dans le cadre de la demande de certificat. 28 Si toutefois les informations fournies par la société dans le cadre de la demande s’avèrent insuffisantes, le notaire dispose de possibilités d’actions supplémentaires et peut notamment demander des informations supplémentaires et faire appel à un expert. 29 En règle générale, le notaire doit délivrer le certificat préalable à la transformation dans les deux mois qui suivent la date de réception des documents et informations nécessaires. 30 Le notaire peut néanmoins prolonger le délai de deux mois dans les situations où il recourt aux possibilités d’actions supplémentaires précitées. 31 La loi prévoit également une énumération des cas particuliers dans lesquels le notaire peut refuser de délivrer un certificat préalable à la transformation. 32 Une fois le certificat délivré, il est déposé au greffe du tribunal de l’entreprise compétent et publié aux Annexes du Moniteur belge. 33

Prise d’effet La phase d’exécution prend fin avec la prise d’effet de la transformation transfrontalière. Le moment exact où celle-ci

26 Art. 14:25/1, in fine CSA. 27 Art. 14:26, alinéa 1er CSA. 28 Art. 14:26, alinéas 2 et 3 CSA. 29 Art. 14:26, alinéa 9 CSA. 30 Art. 14:26, alinéa 1er CSA. 31 Art. 14:26, alinéa 7 CSA. 32 Voir art. 14:26, alinéas 5 et 6 CSA. 33 Art. 14:26, alinéa 10 juncto art. 2:8 CSA juncto art. 2:14, 1° CSA. 34 Art. 86octodecies Directive (UE) 2019/2121. 35 Art. 14:27 CSA. 36 Art. 14:28, alinéa 1er CSA. 37 Art. 14:28, alinéa 2 CSA. 38 Art. 14:28, alinéa 3 CSA. 39 Art. 14:28, in fine juncto art. 2:8 juncto art. 2:14, 1° CSA. 40 Art. 14:29 CSA. 41 Art. 14:30 CSA.

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intervient dépend de la juridiction vers laquelle la société belge déplace son siège. 34 La transformation est ensuite inscrite dans le registre belge des personnes morales. 35

3.2. Immigration Acte authentique Pendant la procédure de l’immigration, c’est-à-dire lorsqu’une société étrangère se transforme en une société régie par le CSA, le notaire, après avoir procédé à un contrôle, constate la réalisation de la transformation dans un acte authentique. 36 Dans le cadre du contrôle à opérer par le notaire, la société présente à ce dernier une copie du projet de transformation approuvé, ainsi que des pièces attestant qu’elle a respecté les prescriptions étrangères applicables en la matière. 37 Lorsqu’un certificat préalable à la transformation est disponible, spécifiquement pour les cas qui relèvent du champ d’application de la directive 2019/2121, le notaire belge à la possibilité de le consulter. Il doit ensuite accepter ce certificat comme preuve concluante que les prescriptions étrangères applicables ont été respectées. 38 Une fois que l’acte authentique confirmant la transformation transfrontalière a été passé, cet acte et les statuts de la société sont déposés au greffe du tribunal de l’entreprise compétent et publiés aux Annexes du Moniteur belge. 39 La transformation transfrontalière prend effet à dater de l’immatriculation de la société dans le registre des personnes morales belge. 40 Après transformation, la société dépose un état résumant la situation active et passive de la nouvelle société belge à la Banque nationale de Belgique. 41


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4. Fusions et scissions transfrontalières 4.1. Champ d’application matériel Fusion Les opérations de fusion qui existaient en vertu du CSA avant la mise en œuvre de la directive 2019/2121, comme la fusion par absorption42 , la fusion par constitution d’une nouvelle société43 et les opérations assimilées à la fusion ou la fusion simplifiée mère-fille44 , sont maintenues in extenso.

que transfrontalier lorsque (i) tous les titres conférant le droit de vote sont entre les mains d’une personne ou lorsque (ii) les mêmes actionnaires conservent ces titres conférant le droit de vote dans la même proportion. 45 Il est important de faire remarquer qu’une fusion simplifiée entre sociétés sœurs s’opère sans émission d’actions. Contrairement à la fusion simplifiée mère-fille existante, la fusion simplifiée entre sociétés sœurs s’accompagne d’une augmentation de capital ou d’un apport complémentaire dans la société absorbante.

Fusion entre sociétés sœurs

Scission

Une nouvelle catégorie est ajoutée aux opérations assimilées à la fusion, il s’agit de la fusion entre sociétés sœurs. Cette procédure est appliquée tant au niveau national

À l’instar des opérations de fusion, toutes les opérations de scission existantes en vertu du CSA, comme la scission par absorption 46 , la scission par constitution

42 Art. 12:2 CSA. 43 Art. 12:3 CSA. 44 Art. 12:7, 1° CSA. 45 Art. 12:7, 2° CSA. 46 Art. 12:4 CSA.

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12 de nouvelles sociétés 47, la scission mixte 48 , la scission partielle 49 et la scission partielle silencieuse 50 continuent à exister.

Scission partielle non proportionnelle La définition de la scission partielle a néanmoins été adaptée suite à la mise en œuvre de la directive 2019/2121 pour inclure également la scission partielle non proportionnelle. Il est par conséquent possible, tant dans le cadre d’une scission partielle nationale que dans le cadre d’une scission partielle transfrontalière, d’attribuer aux associés ou actionnaires des actions de la société bénéficiaire, de la société à scinder ou des deux.51

Scission transfrontalière par séparation La scission transfrontalière par séparation constitue une nouvelle figure également introduite dans le CSA. Elle consiste à transférer une partie du patrimoine d’une société à une ou plusieurs sociétés bénéficiaires ou nouvelles moyennant l’attribution d’actions des sociétés bénéficiaires ou des nouvelles sociétés. 52 L’Exposé des motifs indique qu’il n’est pas requis, aux fins de l’application de cette procédure spécifique, que les actifs et passifs transférés constituent une branche d’activité. 53 Le critère de la branche d’activité demeure néanmoins applicable lors de restructurations nationales lorsqu’une partie du patrimoine est transférée. Cela s’explique par le fait que le champ d’application de la scission par séparation n’a pas été étendu aux restructurations nationales. 54

4.2. Procédures de fusions et scissions transfrontalières Projet de fusion ou de scission La transposition de la directive 2019/2121 a également une incidence sur les procédures existantes de fusions

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47 Art. 12:5 CSA. 48 Art. 12:6 CSA. 49 Art. 12:8, 1° CSA. 50 Art. 12:8, 2° CSA. 51 Art. 12:8, 1° CSA. 52 Art. 12:8, 3° CSA. 53 Exposé des motifs du projet de loi modifiant le Code des sociétés et des associations, la loi du 16 juillet 2004 portant le Code de droit international privé et le Code judiciaire, notamment à la suite de la transposition de la directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières, Doc. parl. Chambre 2022-23, n° 55-3219/001, 8. 54 Art. 12:8, 3° CSA.


13 et scissions transfrontalières. Ces procédures présentent néanmoins d’importantes similitudes avec la procédure de transformation transfrontalière abordée précédemment. Les procédures commencent par l’établissement d’un projet de fusion ou de scission contenant un certain nombre de mentions obligatoires. 55 Suite à la transposition de la directive 2019/2121, le contenu du projet de scission transfrontalière a été aligné en grande partie sur celui du projet de fusion transfrontalière. Ce projet, accompagné d’un avis, doit ensuite être déposé au greffe et publié aux Annexes du Moniteur belge. 56 La modification la plus importante suite à la mise en œuvre de la directive 2019/2121 est sans doute l’introduction d’un droit d’opposition a priori en faveur des créanciers en cas de fusions et scissions transfrontalières, alors qu’ils ne bénéficiaient précédemment que d’une protection a posteriori dans le cadre des fusions transfrontalières. 57 De ce fait, les créanciers auront donc effectivement la possibilité de bloquer la fusion ou scission transfrontalière, une possibilité qui n’existait pas auparavant.

Rapports L’obligation de rapport est la même que celle qui s’applique dans le cadre des transformations transfrontalières. Un rapport spécial établi par l’organe d’administration 58 et un rapport spécial établi par un expert, à savoir le commissaire, un réviseur d’entreprises ou un expert-comptable certifié, sont donc en principe 59 requis. Lors de la transposition de la directive 2019/2121, le législateur a toutefois prévu diverses exceptions à cette obligation de rapport.

Obligation d’information L’obligation d’information à l’égard des travailleurs 60 et des titulaires de titres 61 s’applique elle aussi in extenso dans le cadre des fusions et scissions transfrontalières.

Conclusion Après accomplissement des formalités et expiration du délai d’attente, la décision de fusion ou de scission transfrontalière peut être prise. La compétence d’approuver ces opérations appartient en principe à l’assemblée générale qui décidera dans le respect des règles particulières de présence et de majorité.62 La loi prévoit toutefois des exceptions où l’approbation de l’assemblée générale de la société absorbée 63 ou celle de la société à scinder64 n’est pas requise.

Droit de sortie Certains titulaires d’actions ou de parts bénéficiaires de la société absorbée ou de la société à scinder ont la possibilité, lorsque la société bénéficiaire est une société étrangère, d’invoquer leur droit de sortie.65 Les associés ou actionnaires qui n’ont pas fait usage de leur droit de sortie disposent toutefois, sous certaines conditions, d’une possibilité supplémentaire de demander au président du tribunal de l’entreprise le paiement d’une soulte en espèces s’ils ne sont pas satisfaits du rapport d’échange des actions proposé.66

Certificat préalable à la transaction Enfin, le notaire est également tenu de délivrer un certificat préalable à la transaction dans le cadre des procédures de fusions et scissions transfrontalières.67

Prise d’effet En ce qui concerne la prise d’effet des fusions et scissions transfrontalières, la loi fait une distinction entre la situation où la société absorbée 68 ou scindée est régie par le droit

55 Art. 12:111 CSA (fusions transfrontalières) ; art. 12:124 CSA (scissions transfrontalières). 56 Art. 12:112, § 1er CSA (fusions transfrontalières) ; art. 12:125, §1er CSA (scissions transfrontalières). 57 Art. 12:112/1 CSA (fusions transfrontalières) ; art. 12:126 CSA (scissions transfrontalières). 58 Art. 12:113 CSA (fusions transfrontalières) ; art. 12:127 CSA (scissions transfrontalières). 59 art. 12:114, § 1er CSA (fusions transfrontalières) ; art. 12:128, § 1er CSA (scissions transfrontalières). 60 Art. 12:113, § 1er alinéas 7 et 8 CSA (fusions transfrontalières) et art. 12:127, alinéas 7 et 8 CSA (scissions transfrontalières). 61 Art. 12:115 CSA (fusions transfrontalières) ; art. 12:129 CSA (scissions transfrontalières). 62 Art. 12:116 CSA (fusions transfrontalières) ; art. 12:131 CSA (scissions transfrontalières). 63 Art. 12:116, § 1er, alinéa 2 CSA. 64 Art. 12:131, § 2 CSA et art. 12:67, § 7 CSA. 65 Art. 12:116/1, § 1er, alinéa 1er CSA (fusions transfrontalières) ; art. 12:137, § 1er, alinéa 1er CSA (scissions transfrontalières). 66 Art. 12:116/1, § 2, alinéa 1er (fusions transfrontalières) ; art. 12:137, § 2, alinéa 1er CSA (scissions transfrontalières). 67 Art. 12:117 CSA (fusions transfrontalières) ; art. 12:138 CSA (scissions transfrontalières). 68 Art. 12:119, § 2 CSA.

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14 belge et celle où 69 la société absorbante 70 ou à constituer71 est régie par le droit belge. Selon la situation, l’opération prendra effet à un moment différent. Le législateur a en outre prévu un moment de prise d’effet particulier pour le cas où, lors d’une scission transfrontalière par constitution de nouvelles sociétés, une société scindée est une SRL, une SC ou une SA belge et où toutes les nouvelles sociétés ont une forme qui figure dans l’annexe II de la directive.72

Conclusion Le cadre européen harmonisé créé par la directive 2019/2121 constitue un changement bienvenu en vue de la promotion de la mobilité des sociétés au sein de l’Union européenne. Lors de la transposition de cette directive, le législateur belge a modifié en profondeur les livres 12 et 14 du CSA, et l’impact de ces modifications sur les entreprises, mais aussi sur les diverses parties prenantes (entre autres les actionnaires, les travailleurs et les créanciers) ne saurait être sous-estimé. La mise en œuvre de la directive 2019/2121 a entre autres eu pour effet de compliquer considérablement la procédure de fusions transfrontalières. En conséquence, on peut s’attendre à ce que le délai d’exécution de la procédure augmente considérablement. Gert Cauwenbergh Avocat

Charlotte Reabel Avocate

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69 Art. 12:140, § 2 CSA (scission par constitution de nouvelles sociétés) ; art. 12:141, § 2 (scission par absorption). 70 Art. 12:141, § 1er CSA (scissions transfrontalières). 71 Art. 12:119, § 1er CSA (fusions transfrontalières) ; art. 12:140, § 1er CSA (scissions transfrontalières). 72 Art. 12:140, § 3 CSA.


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Mises à disposition transfrontalières de véhicules à des utilisateurs non assujettis : TVA belge ou étrangère ? Régularisation ou pas ? Les mises à disposition transfrontalières de véhicules, achetés ou pris en location, par une entreprise, aux membres de son personnel, à ses gérants et administrateurs, non assujettis, sont soumises à la TVA. Mais de quel Etat membre ? La TVA belge ou étrangère ? Une nouvelle circulaire1 adoptée le 1 er septembre 2023 clarifie la position de l’Administration fiscale en la matière. Cette circulaire prend en compte les conclusions de l’arrêt QM du 20 janvier 2021, dans l’affaire C-288/19, de la Cour de justice de l’Union européenne. La circulaire aborde les règles applicables en matière de TVA lorsque le lieu d’imposition est situé en Belgique. La circulaire précise également les dates fixées par l’Administration pour régulariser les mises à disposition transfrontalières qui n’ont pas été correctement soumises à la TVA belge.

1. Opérations transfrontalières Les mises à disposition transfrontalières concernent un intervenant, établi en Belgique, et un autre à l’étranger. Ces lieux d’établissement, dans des pays différents, visent les deux intervenants. Ainsi, l’entreprise peut être établie en Belgique ou en dehors, tout comme l’utilisateur. Mais, les deux intervenants ne doivent pas se localiser dans le même pays, sinon il s’agit d’une opération purement nationale. Les mises à disposition nationales belges, parce que les deux intervenants sont établis en Belgique, restent irrévocablement sous l’emprise de la TVA belge.

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2. Législation

Gérants et administrateurs non assujettis

Les mises à disposition de véhicules, à des utilisateurs non-assujettis, sont régies par l’article 56, § 2, alinéa 1er, de la directive 2006/112/CE (art. 21bis, § 2, 7°bis, CTVA). De telles opérations se localisent à l’endroit où l’utilisateur est établi (ou domicile, ou résidence habituelle).

Pour les gérants et les administrateurs, selon la position administrative, les personnes physiques sont considérées non-assujetties.

Ce lieu de l’utilisateur repose sur les conditions suivantes 2 : • une prestation de services à titre onéreux ; • une utilisation en permanence à des fins privées, excluant d’autres personnes ; • une durée convenue supérieure à trente jours.

Par contre, les personnes morales sont des assujettis. Mais, ces personnes morales, peuvent revendiquer le non-assujettissement, avec toutes les conséquences qui s’en suivent. Les mises à disposition transfrontalières de véhicules à des assujettis, sont réglées par une autre disposition (art. 21, § 2, CTVA), et se localisent au lieu d’établissement de l’utilisateur assujetti. Les mises à disposition des utilisateurs assujettis s’écartent des présents commentaires, notamment pour la perception de la TVA (auto liquidation, etc.).

Circulaire 2023/C/72 du 1er septembre 2023 concernant le lieu d’imposition à la TVA de la mise à disposition d’un véhicule d’entreprise à un membre du personnel dans un contexte transfrontalier. Voir aussi points 3. et 4.

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3. Prestation de services à titre onéreux Selon l’administration, les circonstances suivantes confèrent le « titre onéreux » : • le paiement par l’utilisateur non-­ assujetti, à l’entreprise ; • la rétention par l’entreprise d’une partie de la rémunération de l’utilisateur ; • l’inscription au débit du compte courant du gérant ou de l’administrateur ; • le choix de l’utilisateur, entre différents avantages, du droit d’utiliser le véhicule, impliquant la renonciation à d’autres avantages. Selon la Cour de justice de l’Union européenne dans l’affaire QM 3 , « l’absence de paiement d’un loyer ne saurait être compensée par la circonstance que, au titre de l’impôt sur le revenu, l’utilisation privative

du bien affecté à l’entreprise soit considérée comme constituant un avantage en nature quantifiable et donc, en quelque sorte, comme une fraction de la rémunération à laquelle le bénéficiaire aurait renoncé en contrepartie de la mise à disposition du bien ». L’entreprise hésitante peut demander un avis à « aagfisc.exp.tva.btw@minfin. fed.be », « décision – arrêt QM », avec les documents ad hoc joints.

4. Mises à disposition non visées

• pour un usage exclusivement professionnel.

5. Localisation et taxation – notions Lorsque l’utilisateur est un non-assujetti, et dans les conditions précitées, les mises à disposition sont taxables à l’endroit où l’utilisateur est établi. Transfrontalières, ces mises à disposition sont soumises à la TVA belge, même si le lieu de l’entreprise est hors Belgique, lorsque l’utilisateur se situe dans notre pays. Par contre, la mise à disposition échappe à la TVA belge, bien que l’entreprise soit établie en Belgique, parce que l’utilisateur est situé en dehors de notre pays.

Sont ici exclues les mises à disposition : • d’une durée convenue inférieure à 30 jours ; • sans droit d’utilisation exclusif (­certains véhicules de service ou « pool car ») ;

6. Taxation en Belgique – Base imposable 6.1. Contrepartie exclusivement en somme d’argent Lorsque la contrepartie est exclusivement une somme d’argent, l’article 26 du CTVA, prévoit que la TVA doit être calculée sur tout ce qui constitue cette contrepartie. Toutefois, dans certaines situations déterminées, d’autres critères peuvent entrer en considération, la base d’imposition devenant alors la valeur normale. iStockphoto.com/Creative Credit.

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CJUE 20 janvier 2021, C-288/19, QM.

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6.2. Valeur normale 6.2.1. Notions La base d’imposition doit être déterminée, conformément à l’article 33 du CTVA, lorsque la contrepartie ne consiste pas uniquement en une somme d’argent.


17 La base imposable devient la valeur normale, fixée selon l’article 32 du CTVA. La valeur normale peut être déterminée par l’une des trois méthodes de la Circulaire n° 36/2015 du 23 novembre 2015 4 . Il y a lieu de distinguer si les véhicules mis à disposition sont pris en location par l’entreprise ou sont achetés par l’entreprise.

6.2.2. Véhicules pris en location par l’entreprise iStockphoto.com/fuchs-photography.

La base d’imposition, pour les véhicules pris en location, par l’entreprise qui les met à disposition, se compose des éléments suivants : (Loyer HTVA + Frais HTVA) × (% de déduction – % professionnel)

6.2.3. Véhicules achetés par l’entreprise Pour les véhicules acquis par l’entreprise, la base imposable correspond à la valeur normale, constituée des éléments suivants, explicités sous les points 6.3. à 6.7. : (Prix d’achat HTVA / 5) + (Frais HTVA) × (% de déduction – % professionnel)

6.3. Base imposable – entreprise avec déduction partielle 6.3.1. Notions Lorsque l’entreprise mettant à disposition est soumise à un droit partiel à déduction, la base d’imposition en tient compte.

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6.3.2. Véhicules pris en location par l’entreprise Lorsque l’entreprise, qui met à disposition des véhicules pris en location, subit une déduction partielle des taxes en amont, la base imposable correspond à : (Loyer HTVA + Frais HTVA) × (% de déduction – % ­professionnel) × prorata de déduction

6.3.3. Véhicules achetés par l’entreprise Lorsque l’entreprise, soumise à un droit partiel à déduction, met à disposition des véhicules achetés, la base taxable est réduite à concurrence de cette limitation :

(Prix d’achat HTVA / 5) + (Frais HTVA) × (% de déduction – % p ­ rofessionnel) × prorata de déduction

6.4. Base imposable – Frais HTVA inclus Les autres frais entrent dans la base d’imposition, selon la formule suivante : « Frais » = base imposable des autres dépenses soumises à TVA Les frais, non soumis à TVA, ne sont pas pris en compte (assurances, etc.). En revanche, les frais HTVA, soumis à la TVA belge, en font partie (carburant, etc.).

Circulaire 36/2015 (E.T.119.650) du 23 novembre 2015 – Dispositions concernant le droit à déduction des biens d’investissement, et autres biens et services, à usage mixte. Révisions et autres régularisations relatives à la déduction de la TVA supportée en amont.

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18 6.5. Base imposable – Pourcentage de déduction

6.6.4. Méthode 3 : Forfait général professionnel 35 %

Pour la base imposable, le « % de déduction » de la TVA est pris en considération.

La méthode 3 est subordonnée aux conditions cumulatives ici résumées : • le forfait 35 % s’applique à tous les moyens de transport, avec utilisation mixte ; • le forfait 35 % ne vaut que pour un véhicule par utilisateur ; • le véhicule constitue un instrument de travail ou moyen d’exploitation pour au moins 10 % ; • le forfait 35 % s’applique minimum 4 années civiles consécutives.

Lorsque l’entreprise peut déduire 100 % (certains Etats membres dont le Grand-Duché de Luxembourg), le « % de déduction » reste 100 %.

6.6. Base imposable – Pourcentage professionnel 6.6.1. Notions Le « % professionnel » correspond à l’utilisation du véhicule pour l’activité économique de l’entreprise qui le met à disposition. Selon la Circulaire 26/2015 du 23 novembre 2015 5 , poste 3.2.1.2.3., le trajet domicile/lieu de travail appartient aux kilomètres privés. Le « % professionnel » peut se déterminer par l’une des trois méthodes du poste 3.2.1.3 de cette circulaire du 23 novembre 2015.

6.6.2. Méthode 1 : Registre journalier Un registre exhaustif quotidien de tous les trajets doit être tenu, par véhicule.

6.6.3. Méthode 2 : Formule spéciale Cette formule spéciale correspond à la fraction suivante :

6.7. Base imposable – Exemples 6.7.1.

Déduction totale

Un assujetti, au Grand-Duché du Luxembourg, peut déduire 100 % de la TVA du véhicule pris en leasing qu’il met à disposition d’un employé, résident belge. La valeur normale, sous le forfait ­général de 35 %, devient : (Loyer HTVA + Frais HTVA) × 65 %.

6.7.2. Déduction partielle Pour un employeur, avec droit partiel à déduction de 55 %, la valeur normale, au forfait général de 35 %, se détermine comme suit : (Loyer HTVA + Frais HTVA) × 65 % × 55 %.

% Privé = (Distance domicile/lieu de travail × 2 × 200 + 6.000) / (Distance totale ) × 100

7. Taxation en Belgique – Déclaration et paiement

% Professionnel = 100 % – % Privé

7.1. Notions Pour déclarer, et payer, la TVA belge due sur la mise à disposition,

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l’entreprise doit, en principe, s’identifier en Belgique, et y déposer des déclarations périodiques. La TVA belge peut aussi être déclarée, et payée, via le régime OSS (art. 369bis et suivants directive 2006/112/CE – art. 58quater CTVA).

7.2. Régime OSS L’entreprise, débitrice de la TVA belge, selon le régime OSS, agit sous le couvert du numéro d’identification détenu dans son propre Etat membre. Elle y dépose une déclaration, et la paye, trimestriellement, par voie électronique, avant la fin du mois suivant le trimestre. Cette déclaration contient, par État membre de consommation, les éléments requis (TVA due, base imposable, taux, etc.). Sous le régime OSS, l’assujetti ne peut pas déduire la TVA payée dans l’Etat membre de consommation. Mais, il peut revendiquer le remboursement des TVA étrangères déductibles, selon la procédure communautaire (demande spécifique). Un registre détaillé doit permettre de vérifier la déclaration OSS. Ce registre, sur demande, est mis, par voie électronique, à disposition de l’État membre d’identification et de l’État membre de consommation ( conservation 10 ans).

8. Taxation en Belgique – Depuis quand : 01/01/2013, 01/07/2021, 01/09/2023 ? – Régularisations 8.1. Notions La taxation se localise en Belgique, lieu des utilisateurs non-assujettis, selon l’article 21bis, § 2, 7° du CTVA, version du 1er janvier 2013, mais se

Circulaire 36/2015 (E.T.119.650) du 23 novembre 2015 – Dispositions concernant le droit à déduction des biens d’investissement, et autres biens et services, à usage mixte. Révisions et autres régularisations relatives à la déduction de la TVA supportée en amont.

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19 prescrit, selon l’article 82 du CTVA, à l’expiration de la 3ème ou 7ème année civile suivant l’exigibilité ...

8.2. Tolérances L’administration fixe les dates pour régulariser les mises à disposition transfrontalières qui n’ont pas été ­correctement soumises à la TVA belge. Ainsi, la taxation de la valeur normale de la contrepartie qui ne consiste pas exclusivement en une somme d’argent remonte au 1er juillet 2021. Cette tolérance ne s’applique pas aux mises à disposition dont la contrepartie est constituée intégralement d’un paiement par l’utilisateur. Les mises à disposition, dont l’exigibilité est intervenue lors d’un exercice fiscal échu, et dont la contrepartie a été inscrite au compte courant du gérant, de l’administrateur, etc., à concurrence de la rétribution, peut être considérée TVA comprise, pour les besoins de la régularisation, selon la formule : [(Loyer HTVA + Frais HTVA) × 65 %] / 1,21) × 21 % Cette application permet, notamment, d’éviter un recalcul de l’avantage en nature de l’utilisateur, en matière d’impôts sur le revenu.

8.3. Taxation – Exemples Un employeur, établi au Grand-Duché du Luxembourg, qui peut déduire 100 % de la TVA du véhicule pris en leasing, a mis ce véhicule à disposition de son employé, résident belge. La valeur normale se calcule selon la formule : (Loyer HTVA + Frais HTVA) × 65 %. Si l’exercice fiscal de cet employeur s’est terminé le 31 décembre 2022, il applique cette base d’imposition à partir du 1er janvier 2023.

Autre problématique Plaques luxembourgeoises – immatriculation belge – utilisation du véhicule par le conjoint – amende immédiate Le conjoint de l’utilisateur contractuel ne peut pas conduire ledit véhicule !

En réponse à une question parlementaire, le ministre a émis sa position concernant l’utilisation, par des résidents belges, de véhicules immatriculés au Grand-duché du Luxembourg.

Une copie du contrat de travail, ou de l’ordre de travail, doit être à bord du véhicule.

L’A.R. du 20 juillet 2001 oblige à immatriculer en Belgique les véhicules qui y circulent, même s’ils sont déjà immatriculés à l’étranger. Seul l’employé peut conduire un véhicule immatriculé à l’étranger, dans le cadre de sa profession, et accessoirement à titre privé.

Pour les prestations avant le 1er ­janvier 2023, les tolérances du 8.2. ­s’appliquent. Si l’exercice comptable se termine le 30 avril 2023, les tolérances du 8.2. peuvent être appliquées pour la période qui précède le 30 avril 2023. Lesdites tolérances restent facultatives.

9. Taxation dans un autre Etat membre

Lors de déplacements privés, un document de l’employeur doit se trouver dans le véhicule, attestant la mise à disposition du véhicule immatriculé à l’étranger. Une amende immédiate de 116 euros est encourue. Occultons les implications TVA. (Q. orale 55037322C du 19 juillet 2023 de M. Piedboeuf –CRIV 55 COM 1162, 2022-2023, p. 27-28)

10. Entrée en vigueur de la circulaire Sans compromettre les tolérances sous 8.2., la circulaire 2023/C/72 entre en vigueur le 1er septembre 2023. Elle abroge les dispositions antérieures contraires. Yvon Colson Collaborateur externe

La Belgique n’est pas compétente pour les taxations en dehors de son territoire (régularisations, tolérances éventuelles, taux, etc.). L’entreprise établie en Belgique peut, en principe, déclarer et payer la TVA due dans un autre Etat membre, sous le régime OSS.

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