cahier-special-inm_2006_low-economie

Page 13

INSTITUT DU NOUVEAU 2031. Il craint par conséquent une explosion de retraite n’est même pas complètement des impôts ou de la dette, toutes deux accaassuré: les gens prennent leur retraite plus blant les nouvelles générations plutôt que les jeunes, cessent de cotiser rapidement et toucontribuables actuels. chent tôt des bénéfices. La décroissance Fortin tient sur le sujet du vieillissement démographique ne constitue pas à ses yeux démographique des propos jugés par certains une opportunité; en fait, les entreprises pouralarmistes. Pourtant, ses calculs décrivent de raient choisir de déménager ailleurs pour manière assez juste les changements à venir; trouver la main d’œuvre dont elles ont besoin ils sont d’ailleurs confirmés par ceux du minisplutôt que de payer plus cher. Des opportunitère des Finances du Québec. Deux données tés de croissance meilleures à l’étranger pournous paraissent ignorées toutefois. La premièraient même convaincre nombre talents de re a trait à la diminution du poids des s’expatrier. dépenses d’aide sociale pour lesquelles le Sur le plan des seules dépenses de santé, contexte de vieillissement démographique Cheal et ses collaborateurs avancent que la entraîne un allègement prévisible significatif : croissance pourrait être surestimée du fait de il y aura transfert de prestataires vers la retrail’amélioration des conditions de vie des noute et les personnes aptes au travail en trouvevelles cohortes de gens âgés. Si ces derniers ront plus facilement. La deuxième est l’amépeuvent moins compter sur leurs enfants, peu lioration quantitative et qualitative de la partinombreux ou disposés, pour les assister, ils cipation au marché du travail qui pourrait pourraient par contre compter davantage sur compenser en partie la diminution de la popula fratrie et sur la communauté. Ces auteurs lation en âge de travailler. soulignent d’autre part que les visions parfois D’autres experts, comme Mérette ainsi que pessimistes véhiculées au sujet de l’âge avanLefebvre et Soderstrom discutent de ces cé sont fausses: les travailleurs âgés demeureaspects. Pour Mérette, la rareté de la main ront probablement plus longtemps au travail d’œuvre entraînera une appréciation des et seront productifs, les personnes retraitées salaires de nature à stimuler deux phénocontinuant d’être une source d’enrichissemènes importants pour stimument différente pour leur familler la croissance économique: le et leur communauté. l’allongement des études et le Pour cette raison préciséreport de l’âge de la retraite. ment, nous sommes amenés à Les gens âgés de Lefebvre et Soderstrom ne penser que le maintien d’un contestent pas les chiffres indisystème de santé efficace et quant le rôle du vieillissement accessible est essentiel. Il nous 65 ans et plus démographique sur les apparaît toutefois illusoire d’asdépenses de santé mais, pour socier l’hypothétique meilleure eux, elles sont parfaitement représentent 14,1 % santé des nouvelles cohortes à soutenables pour deux raisons: des économies : la persistance leur croissance pourrait être de l’état de bonne santé s’acde la population réduite en éliminant certains quiert par la consommation de services et une économie en ser vices et de médicaments, en 2006; en 2036 d’une part, et d’autre part le croissance fournirait les revenus nécessaires pour y faire report dans le temps de la morface. Cette croissance éconotalité n’est qu’un report et non ils représenteront mique serait justement favoriune économie. Rappelons que sée par le niveau de formation la plus grosse par t des le double, soit 27,9 % dépenses de santé sur vient plus élevé des travailleurs. Les faits obser vés depuis dans l’année précédant le 2000 ne favorisent guère la décès. thèse de Lefebvre et La dimension économique Soderstrom. Primo, la croissance des dépenses de santé se maintient au dessus de L’évolution de la croissance économique au toutes leurs hypothèses. Secundo, la croissanQuébec est en bonne partie déterminée par ce annuelle de la productivité n’atteint pas les ses caractéristiques démographiques. La 2% souhaités, un niveau qui n’a d’ailleurs pas faible croissance démographique au Québec été observé sur une longue période depuis est par exemple une des principales raisons des décennies. Tertio, la croissance éconoqui explique que l’économie du Québec croît mique ne génère pas les revenus attendus habituellement moins vite que l’économie du puisque les impôts des particuliers ont été reste du Canada et qu’on y crée en général réduits de manière importante depuis 2000 au moins d’emplois. Québec. Finalement, il est renversant de Selon le dernier scénario de référence de constater que les auteurs n’ont pas fait de prol’Institut de la statistique du Québec (ISQ), la jections. Leurs calculs sont fondés sur un horipopulation du Québec âgée de 15 à 64 ans, zon d’un an avec des dépenses de santé représoit celle qui regroupe la très grande majorité sentant 33 % des revenus de l’État; cette part de la population en âge de travailler, commenest déjà de 37 % en 2005-2006, quelle sera la cera à diminuer en 2012. Cette baisse aura valeur de leurs calculs lorsque ce chiffre bien sûr des impacts sur les finances atteindra 40 % ou 50 % des revenus de l’État publiques et laisse craindre l’apparition de dans quelques années? pénuries majeures de main-d’œuvre, surtout Lefebvre et Soderstrom plaident que le dans les emplois hautement qualifiés. vieillissement est soutenable puisque ses Quoiqu’il soit fort probable que de telles effets ont pu être contenus jusqu’à présent. pénuries surgissent de façon momentanée Georges Mathews prétend que ceci a été dans certaines professions spécifiques, la rendu possible jusqu’à présent en raison de la forte hausse du niveau de scolarité de la popudiminution du nombre de jeunes dépendants, lation amène la plupart des observateurs à de l’augmentation de la population active et douter que des pénuries généralisées poind’une augmentation limitée du nombre de tent à l’horizon, en supposant que la sélection personnes âgées: ce meilleur des mondes ne des immigrants corresponde bien aux se reproduira pas. Pour lui le portrait à venir besoins du marché du travail. Les employeurs est plus sombre. Le financement des rentes risquent d’ailleurs d’éprouver davantage de

13

MONDE

PHOTO: JACQUES NADEAU

Une solution : aider les familles

difficultés à pourvoir des postes dans les professions peu ou pas spécialisées. Même dans le domaine de la santé, c’est beaucoup plus l’augmentation spectaculaire des coûts qui inquiète que le manque potentiel de maind’œuvre. En outre, on observe depuis peu certains revirements de tendances qui pourraient permettre d’atténuer les effets du vieillissement de la population sur la population active. Ainsi, le taux d’activité de la population âgée de 55 ans et plus, en baisse depuis des décennies, est récemment reparti en hausse, principalement en raison de l’arrivée massive dans cette tranche d’âge des femmes plus scolarisées et plus attachées au marché du travail. La demande pour les travailleurs âgés a aussi fait diminuer l’utilisation de programmes d’encouragement à la retraite, et commence déjà à faire augmenter l’âge moyen et médian de la retraite, lui aussi en baisse depuis au moins vingt ans. De même, le solde migratoire, en baisse tout au long des années 90 connaît une croissance marquée depuis quelques années. Le manque relatif de main-d’œuvre devrait avoir un impact positif sur le taux de chômage. Cela dit, il pourrait difficilement diminuer en bas d’un seuil qu’on peut situer autour de 5 à 7 %. En effet, avec tous les changements

Un fonds énergétique Nous proposons de mettre en place le Fonds énergétique du Québec, financé par les surplus d’Hydro-Québec et servant uniquement à rembourser la dette du Québec. En février 2005, la FCEI a modélisé cette stratégie intégrée, consistant à poursuivre le développement du réseau hydroélectrique, revoir la structure tarifaire de l’électricité (hausse de prix de 3 % et correction des distorsions entre individus et entreprises), accroître l’offre de programmes d’économie d’énergie et intensifier l’exportation des surplus énergétiques. Notre analyse démontre que nous rembourserions environ 15 milliards $ en dix ans, dont 30 % proviendraient de l’extérieur du Québec par les profits sur les exportations d’électricité. Pierre Emmanuel Paradis Économiste principal Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI)


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.