BoGa Lausanne/Fribourg, Trésor végétal

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Trésor végétal Comment sauvegarder nos plantes menacées

François Felber Vincent Guerra Sébastien Bétrisey Gregor Kozlowski



François Felber Vincent Guerra Sébastien Bétrisey Gregor Kozlowski

Trésor végétal Comment sauvegarder nos plantes menacées

Editions Haupt


PD Dr. François Felber est directeur des Musée et Jardins botaniques cantonaux vaudois (MJBC) et enseigne aux Universités de Lausanne et Neuchâtel. Vincent Guerra est biologiste et collaborateur de recherche aux MJBC. Sébastien Bétrisey est expert cantonal pour les plantes menacées du canton de Fribourg. Prof. Dr. Gregor Kozlowski est directeur du Jardin botanique et professeur à l’Université de Fribourg. L’édition en langue allemande: Botanischer Schatz: Wie man bedrohte Pflanzen vor dem Aussterben rettet, Editions Haupt (ISBN 978-3-258-08213-4) Couverture / C2: La saxifrage bouc / Saxifraga hirculus – illustrée par Sowerby James, English Botany, 1790–1814 Conception et composition: Etc Advertising & Design Sàrl Rédaction : François Felber, Vincent Guerra, Sébastien Bétrisey, Gregor Kozlowski, Christian Parisod, Nicolò Tartini, Edouard Di Maio, Christophe Randin et Franco Ciardo Révision : Joëlle Magnin-Gonze, Béatrice Valverde, Christophe Randin, Christian Purro, Sibyl Rometsch, Christian Parisod, Franco Ciardo et Catherine Strehler Perrin

La maison d’édition Haupt bénéficie d’un soutien structurel de l’Office fédéral de la culture pour les années 2016–2020 1e édition: 2020 ISBN 978-3-258-08212-7 Cette publication a été répertoirée dans la « Deutsche Nationalbibliografie ». Plus d’informations sous http://dnb.de Tous droits réservés © 2020 Haupt Berne Sauf autorisation expresse, toute forme de reproduction est interdite Imprimé en Suisse www.haupt.ch


Sommaire Introduction – François Felber Observer – Vincent Guerra Zones critiques de biodiversité Régions biogéographiques suisses Le réseau Emeraude

4 6 8 12 13

Etudier – François Felber et Vincent Guerra Comprendre les menaces qui pèsent sur les espèces Facteurs génétiques Facteurs environnementaux Conserver Sébastien Bétrisey, Franco Ciardo et Gregor Kozlowski

Suivre – Vincent Guerra Qu’est-ce que la biodiversité ? Caractériser et suivre la biodiversité sert de base à la conservation Info Flora, le Centre national de données et d’informations sur la flore Atlas de la flore vaudoise

16 18

Evaluer – Vincent Guerra et Christian Parisod Quelles espèces sont les plus susceptibles de disparaître ? Quelle espèce doit-on protéger en priorité ? Variation au sein des espèces et conservation de la biodiversité

26

Légiférer – François Felber La législation internationale La législation suisse

40 42 44

20 24 25

28 36

46 48 49 53

Comment préserver nos plantes menacées ? Conservation in situ Conservation ex situ et réintroductions de plantes menacées

60 62 68

Prédire – Nicolò Tartini, Edouard Di Maio et Christophe Randin 80 L’impact du changement climatique sur quelques plantes menacées 82 Projeter le futur des plantes rares 86 Conclusion – François Felber

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Crédits et remerciements

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Bibliographie

112

39

SOMMAIRE 3


La Réserve naturelle du Vallon de Nant (VD) date de 1969. Elle est gérée par Pro Natura, à proximité immédiate du Jardin alpin « La Thomasia », qui dépend des Musée et Jardins botaniques cantonaux vaudois. Photo : François Felber.

Introduction L’essor des mouvements citoyens en faveur de la planète Terre reflète bien la prise de conscience de la dégradation de notre environnement. En effet, la situation est préoccupante: les espèces se raréfient, les milieux naturels se dégradent et le climat se dérègle. Par quels processus une plante devient-elle une espèce menacée ? Quels sont les moyens mis en place pour les identifier ? Quelles mesures sont-elles prises pour les protéger ? Quels impacts le changement climatique aurat-il sur ces espèces en danger ? 4 INTRODUCTION

Au fil des chapitres, ce livre tente d’apporter quelques éléments de réponse à ces questions. Observer décrit la répartition de la biodiversité dans le monde et en Suisse et met en exergue les zones où celle-ci est particulièrement élevée et menacée. Suivre cite les outils mis en place pour évaluer et assurer le suivi de l’évolution de la biodiversité. La détermination du degré de menace des espèces est décrite dans le chapitre Evaluer. Légiférer répertorie les principaux instruments légaux mis en place pour la conservation de la biodiversité. Etudier explique les


facteurs génétiques et environnementaux qui conduisent à la raréfaction des plantes et à leur mise en danger. Conserver relate les mesures prises pour la préservation des milieux naturels et les espèces. Enfin, Prédire élabore des scénarios de l’avenir de la distribution de certaines espèces, suite au changement climatique. Le plus souvent, la situation globale est décrite, suivie des spécificités propres à la Suisse. Cet ouvrage est conçu en partenariat entre les Musée et Jardins botaniques cantonaux vaudois, le Jardin botanique de l’Université de Fribourg et l’Université de Berne. L’exposition qui l’accompagne se décline sur trois lieux: les Musée et Jardin botaniques de Lausanne (Vaud), le

Jardin alpin à Pont-de-Nant (Vaud) et le Jardin botanique de l’Université de Fribourg. Le projet est accompagné de photographies de Mario Del Curto, ainsi que de celles d’autres photographes talentueux. De nombreux partenaires mentionnés à la fin de l’ouvrage ont permis sa réalisation. Que tous soient vivement remerciés. « Nous n’héritons pas de la terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants. » Cette citation, attribuée à Antoine de SaintExupéry, exprime bien notre responsabilité de conserver le patrimoine vivant afin de le transmettre aux générations futures. Puisse notre projet contribuer quelque peu à la compréhension de cet enjeu. INTRODUCTION 5


Plantes épiphytes, Minas Gerais, Brésil. Photo : Joëlle Magnin-Gonze.


OBSERVER


Zones critiques de biodiversité A l’échelle mondiale, les différents écosystèmes subissent actuellement de profondes modifications entraînant des pertes considérables de biodiversité. Définir les zones où la biodiversité est menacée n’a alors jamais eu autant d’importance. Actuellement, on observe que la moitié des espèces végétales occupe moins de 5 % de la surface terrestre. Ces zones riches en biodiversité, dénommées hotspots ou zones critiques de biodiversité, sont dans le monde au nombre de 36 (cf. p. 10/11). Chacune d’elles est caractérisée par une perte de plus de 70 % de son habitat naturel, ainsi que par la présence d’au moins 1500 espèces de plantes vasculaires endémiques (qui n’existent que dans cette région). La répartition de ces zones est inégale à travers les différents continents, mais des similitudes peuvent être relevées. Ces havres de biodiversité se situent souvent dans des zones fortement influencées par les activités humaines, et certains types de biomes sont plus représentés que d’autres. Un biome – ou écorégion – est un ensemble d’écosystèmes caractéristiques d’une aire géographique, définis par la flore et la faune qui y prédominent. A l’échelle du globe, par exemple, tous les biomes de type méditerranéen sont présents dans un hotspot. En revanche, la taïga et la toundra ne sont représentées dans aucun d’eux. 8 OBSERVER

Focus sur le bassin méditerranéen La troisième zone critique, en termes de diversité végétale endémique, est le bassin méditerranéen, dont la colonisation par l’homme date d’au moins 8000 ans. Près de la moitié des 25 000 végétaux recensés sont endémiques. Cet endémisme s’explique par le grand nombre d’îles disséminées dans la mer Méditerranée. Les impacts les plus importants de la présence humaine sont la déforestation, le pâturage intensif, les incendies et le développement des infrastructures. Ils ont fait chuter la végétation originelle à 5 % sur l’ensemble de la zone, plaçant ainsi le bassin méditerranéen parmi les quatre hotspots les plus altérés sur Terre. Le ciste blanchâtre (Cistus albidus) est un sous-arbrisseau caractéristique de la garrigue méditerranéenne. Photo : Joëlle Magnin-Gonze.


Origine du concept de hotspot Le concept de zone critique, de biodiversité a été développé en 1988 à l’Université d’Oxford par l’équipe de Norman Myers, chercheur britannique spécialisé dans les rapports entre l’écologie et l’économie. Assister toutes les espèces menacées n’est malheureusement pas possible, par manque de moyen et de temps. De ce fait, les travaux de Myers définissent quelles régions possèdent une concentration d’endémisme exceptionnelle, pour ainsi concentrer les efforts de conservation sur ces dernières.

La faune et la flore exceptionnelles du Costa Rica représentent plus de 5 % de la biodiversité mondiale pour une surface équivalente à 0,03 % des surfaces émergées. La réserve biologique de Monteverde est incluse dans le hotspot nommé Mesoamerica.

Réserve biologique de Monteverde, Costa Rica. Photo : Vincent Guerra. CATALOGUE D'EXPOSITION 9


Distribution des hotspots selon les biomes

Le pourcentage d’endémisme correspond au nombre d’espèces endémiques végétales par rapport au nombre total d’espèces végétales du hotspot considéré.

Forêts décidues humides tropicales et subtropicales

Forêts de conifères tempérées

Forêts décidues sèches tropicales et subtropicales

Taïga

Forêts de conifères tropicales et subtropicales

Prairies, savanes et terres arbustives tropicales et subtropicales

Forêts tempérées décidues et mixtes

Prairies, savanes et terres arbustives tempérées

10 OBSERVER


Prairies et savanes inondées

Déserts et terres arbustives xériques

Prairies et terres arbustives de montagne

Mangroves

Toundra

Roche et glace, ou zones terrestres abiotiques

Forêts, terres boisées et broussailles méditerranéennes

Zones critiques de biodiversité OBSERVER 11


Régions biogéographiques suisses Pour répondre aux besoins grandissants de la protection de la nature, la Suisse a été divisée en six régions biogéographiques, en fonction de leurs compositions floristique et faunistique (cf. p. 14/15). Elles servent de base à la conception de projets de conservation adaptés aux spécificités de chacune. Elles reflètent la grande richesse des habitats créés par la diversité de la géologie, ainsi que la grande variation des précipitations et de l’altitude du pays. L’action conjuguée de facteurs écologiques propres aux

espèces tels que leur faculté de dispersion et leurs relations de concurrence vont aussi influer sur la composition en espèces. Pour exemple, le bassin lémanique, le Valais et le Tessin sont plus riches en espèces, notamment d’origine méridionale, que le versant nord des Alpes, le Plateau ou le Jura, du fait de leurs relations avec les grands axes de migration européens (bassins du Rhône, du Rhin, du Danube et du Pô), ainsi que de leurs conditions climatiques et géologiques spécifiques.

Focus sur les Alpes Les Alpes représentent une des régions floristiques les plus importantes d’Europe. On dénombre 4500 espèces végétales différentes, dont plus de 400 sont endémiques. Cette forte diversité floristique doit son existence aux grandes différences d’altitude, à la présence de microclimats et de microhabitats, ainsi qu’à la géologie particulière de la région. En outre, la dernière époque glaciaire du Quaternaire a forcé de nombreuses espèces à se réfugier dans les Alpes, espèces que l’on retrouve encore dans certaines régions. Androsace des Alpes (Androsace alpina). Photo : Vincent Guerra.

12 CATALOGUE D’EXPOSITION


Le réseau Emeraude « Cœur vert de l’Europe » La Suisse s’est engagée, en tant que partie contractante de la Convention de Berne, à protéger ses milieux naturels particulièrement précieux en Europe. Ces différents sites abritant des espèces et des habitats potentiellement menacés sont recensés sous le réseau Emeraude. On compte 37 sites Emeraude dispersés sur l’ensemble du territoire national, abritant 43 habitats et 140 espèces Emeraude (cf. p. 14/15).

Les plantes et les animaux ne connaissant pas les frontières politiques, le réseau Emeraude permet de coordonner les efforts de conservation au niveau international. Il s’inscrit parmi les éléments de la stratégie européenne pour la biodiversité, conjointement au réseau européen Natura 2000. Ces différents réseaux visent à assurer la protection des espèces, mais concernent aussi le maintien de leurs habitats naturels.

Focus sur le site Emeraude de la vallée de Joux (CH05 Vallée de Joux) Le site émeraude de la vallée de Joux s’étend sur 881 hectares, de la pointe sud du lac de Joux jusqu’à la frontière française. Il présente un intérêt du fait de la présence d’une densité élevée de marais abritant une diversité unique d’espèces spécialisées. Parmi elles, figurent le sisymbre couché (Sisymbrium supinum) et la sabline de Suède (Arenaria gothica), dont les uniques stations en Suisse se trouvent sur les rives temporairement submergées du lac de Joux. Marais du site Emeraude de la vallée de Joux. Photo : Mario Del Curto.

L’azuré des paluds (Maculinea nausithous), espèce « Emeraude » du site de la vallée de Joux, possède une unique plante hôte, la pimprenelle officinale (Sanguisorba officinalis), qui apprécie les milieux humides. Photo : David Guerra. OBSERVER 13


Régions biogéographiques de Suisse et sites Emeraude

Régions biogéographiques Jura Plateau Versant nord des Alpes Alpes centrales occidentales Alpes centrales orientales Versant sud des Alpes Sites Emeraude



Suivi de la flore sur les Monts Chevreuils dans le cadre du projet du nouvel Atlas de la flore vaudoise entrepris par le Cercle vaudois de botanique. Photo : Gwénolé Blanchet.


SUIVRE


Qu’est-ce que la

biodiversité ?

La biodiversité désigne la diversité du vivant. On en distingue trois niveaux. 1) La diversité des écosystèmes comprend l’ensemble des milieux naturels ainsi que les diverses interactions établies entre les communautés d’organismes vivants et leur environnement, formant une unité fonctionnelle. 2) La diversité des espèces est la composante la mieux connue, car la plus facilement quantifiable. Elle désigne le nombre d’espèces, leur nature et leur abondance au sein d’un territoire donné. On la désigne souvent sous le terme de richesse spécifique. 1- Biodiversité des écosystèmes

3) La diversité des gènes correspond à la variabilité génétique au sein d’une même espèce. Elle est essentielle à la survie de l’espèce car, par le biais de la reproduction sexuée, elle permet aux individus d’une espèce de générer de la variation, ce qui est une condition essentielle à son adaptation aux fluctuations de l’environnement. Ces trois niveaux de diversité sont étroitement liés et doivent être considérés comme un ensemble, notamment dans le cadre de projets de conservation.

2- Biodiversité des espèces

3- Biodiversité génétique (diversité des gènes)

Forêt tempérée Lac Désert

Mésange

Lombric

Papillon

Forêt tropicale Océan Biche

Fougère 18 SUIVRE

Escargot

Plante à fleurs

Fourmi


Le bon fonctionnement des écosystèmes est tributaire de la biodiversité et essentiel à toutes les formes de vie, y compris humaine. La biodiversité fournit de nombreux services indispensables à notre société : pollinisation des cultures, maintien d’un sol fertile pour la production alimentaire, transformation de déchets et de polluants, mise à disposition de matières premières pour l’industrie ou encore, par exemple, production de médicaments. Ces services écosystémiques se péjorent avec la dégradation de la biodiversité. L’Union européenne estime que, jusqu’en 2050, la perte économique annuelle due à l’appauvrissement de la biodiversité s’élèvera à environ 4 % du produit intérieur brut (PIB) européen. On peut donc en déduire qu’en Suisse également, ne rien faire coûterait plus cher que d’investir dès à présent dans une protection et une promotion efficaces de la biodiversité.

La reine des prés (Filipendula ulmaria) est une plante commune en Suisse, que l’on rencontre au bord de cours d’eau et dans des prairies humides. Anciennement appelée spirée, c’est à elle que l’on doit le nom du médicament aspirine. Tout comme le saule blanc (Salix alba), cette espèce est riche en composés salicylés permettant de synthétiser l’aspirine. Photo : François Felber. SUIVRE 19


Caractériser et suivre la biodiversité sert de base

à sa conservation « On ne peut conserver que ce que l’on connaît » Près de deux millions d’espèces d’animaux, de végétaux, de champignons et de micro-organismes ont été recensées dans le monde, mais ce nombre est probablement sous-évalué. En effet, les dernières estimations indiquent que plus de 80 % des organismes vivants ne sont pas encore décrits ou même découverts.

Totalité des espèces

80 %

Proportions des espèces des différents groupes d’organismes. Le cercle de gauche représente les dix millions d’espèces estimées sur Terre, dont environ deux millions ont été décrites. Le cercle de droite représente les proportions des espèces des grands groupes taxonomiques. D’après Chapman A. D. et al., 2009. Numbers of Living Species in Australia and the World.

Espèces décrites 20 %

Vertébrés 3,5 % Insectes 53 % Arachnides 5 % Crustacés 2,5 % Plantes 16 % Champignons 5 % Autres groupes 15 %

Les coléoptères (inclus dans les insectes) forment à eux seuls un groupe constitué de plus de 350 000 espèces décrites. Ici, un scarabée bijou (Chrysina sp.), Costa Rica. Photo : Vincent Guerra.


MONITORING DE LA BIODIVERSITÉ EN SUISSE En Suisse, plus de 50 000 espèces sont dénombrées, tous groupes confondus, qu’il n’est pas possible de suivre toutes individuellement. C’est pourquoi l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) a lancé en 2001 le Monitoring de la biodiversité en Suisse (MBD), en sélectionnant des groupes d’organismes indicateurs : plantes vasculaires, mousses, oiseaux nicheurs, papillons diurnes et gastéropodes. Cet outil permet aux acteurs impliqués de suivre l’évolution de la biodiversité en Suisse et d’en dégager les principales tendances.

Les papillons diurnes comme indicateurs de l’évolution des écosystèmes De par leurs spécificités écologiques et la connaissance de ce groupe, les papillons diurnes constituent un bon indicateur de l’évolution de la biodiversité en Suisse.

Les plantes vasculaires comprennent les fougères au sens large ainsi que les gymnospermes (incluant majoritairement les conifères) et les plantes à fleurs. Ci-dessous, une fougère indigène suisse, le capillaire noir (Asplenium adiantumnigrum). Photo : Mario Del Curto.

De nombreuses espèces ont décliné au cours des dernières décennies, suite aux modifications de leur habitat naturel. L’azuré du sainfoin (Polyommatus damon), par exemple, figure parmi les perdants. Ce papillon diurne a disparu du Plateau et du Jura au cours du XXe siècle, consécutivement à la diminution des grandes populations d’esparcettes (Onobrychis spp.), leur plante-hôte.

Azuré du sainfoin. Photo : Vincent Guerra. Esparcette des sables (Onobrychis arenaria). Photo : Joëlle Magin-Gonze. SUIVRE 21


MÉTHODOLOGIE DU MONITORING DE LA BIODIVERSITÉ EN SUISSE

Réseau des surfaces échantillonnées pour mesurer la diversité des espèces dans les paysages. Source : OFEV/MBD.

Afin d’établir les tendances à long terme de la biodiversité, le Monitoring de la biodiversité se focalise sur l’inventaire des espèces fréquentes et répandues à l’aide d’un réseau d’échantillonnage systématique. Ce système est simple à mettre en œuvre et facilement compréhensible du public. Deux réseaux de mesures ont été mis en place afin de suivre la diversité des espèces, l’un pour les paysages et l’autre pour les milieux naturels. Un premier réseau mesure la diversité des espèces dans les paysages. Il est constitué de 450 surfaces d’échantillonnage d’un kilomètre carré chacune. Chaque année, un cinquième de ces surfaces est échantillonné en recensant les plantes vasculaires, les papillons diurnes ainsi que les oiseaux nicheurs.

Les structures telles que les vieux murs en pierres sèches sont de véritables microhabitats pour beaucoup d’espèces. Auparavant, elles faisaient partie intégrante de nos paysages ; malheureusement, elles sont devenues de plus en plus rares suite aux améliorations foncières qu’ont subi les territoires agricoles suisses. Photo : Mario Del Curto. 22 CATALOGUE D'EXPOSITION


Le second réseau concerne les milieux naturels constitué de 1450 points d’environ dix mètres carrés chacun, ainsi que 570 tronçons de cours d’eau. Les habitats considérés sont les suivants : forêts, prairies et pâturages, zones d’habitation, champs, prairies alpestres et zones de montagne. Les plantes vasculaires, les mousses

et les mollusques y sont recensés. Concernant les cours d’eau, les tronçons varient de 5–100 mètres de longueur. Sont inventoriées les larves d’insectes aquatiques faisant partie des familles des éphéméroptères, des plécoptères et des trichoptères, qui constituent de bons indicateurs de la qualité des cours d’eau.

Suivi des effets de la protection des biotopes en Suisse (WBS) Parallèlement au Monitoring de la biodiversité en Suisse, qui concerne les parties du territoire qui ne sont pas sous protection, l’OFEV et l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL) ont lancé conjointement en 2011 le suivi des conséquences de la protection des biotopes en Suisse (WBS). Il vise à établir l’état et l’évolution des milieux naturels d’importance nationale. Ces habitats précieux comprennent des hauts et des bas-marais, des prairies et des pâturages secs, ainsi que des zones alluviales. Le but est d’évaluer si ces sites inscrits dans les inventaires nationaux évoluent de manière favorable pour leur conservation. Biotopes zones alluviales bas-marais hauts-marais prairies et pâturages secs

Placettes du Suivi des effets de la protection des biotopes en Suisse. Source : OFEV/WBS.

Dans le but de favoriser la biodiversité, la Venoge (VD) a subi de nombreux travaux de renaturation visant à recréer une dynamique naturelle propre aux zones alluviales. Photo : Mario Del Curto. CATALOGUE D'EXPOSITION 23


Info Flora, le Centre national de données

et d’informations sur la flore Le recensement floristique est réalisé en Suisse par Info Flora, fondation privée d’utilité publique basée à Genève, avec des bureaux à Berne et à Lugano. L’une des tâches principales de la fondation est de promouvoir l’importance des plantes sauvages en soutenant les inventaires floristiques. Ce travail est rendu possible grâce à un réseau de professionnels et de bénévoles constitué de plus de 400 botanistes qui contribuent à la cartographie et au suivi de la flore suisse. En outre, Info Flora recueille les observations floristiques et produit des cartes de répartition pour chaque espèce, permettant d’établir l’état et l’évolution des plantes sauvages en Suisse. L’aconit anthora (Aconitum anthora), plante très toxique de nos montagnes, a vu son statut de menace en Suisse modifié de « En danger – EN » à « Vulnérable – VU », uniquement grâce à l’amélioration du traitement des bases de données. Photo : Vincent Guerra.

Participez au suivi de la biodiversité ! Contribuez au suivi des espèces en transmettant vos observations aux centres suisses de données faunistiques (cscf.ch), floristiques (infoflora.ch), bryologiques (swissbryophytes.ch) et mycologiques (swissfungi.wsl.ch/fr/index. html). Ces informations contribueront au suivi de l’évolution

Avec un smartphone, saisir ses observations n’a jamais été aussi facile! En transmettant vos observations, vous aidez à documenter la distribution des espèces dans le temps et dans l’espace. Plusieurs applications disponibles permettent de saisir vos observations, qui seront alors transmises aux différents centres suisses de données et d’informations correspondants. Info Flora met à disposition gratuitement l’application FlorApp, qui permet de saisir les observations suisses de toutes les espèces de plantes, mousses, lichens et champignons. Source : Info Flora. 24 SUIVRE

de la biodiversité en Suisse et à sa protection, en identifiant les espèces en déclin ou les écosystèmes menacés. L’ensemble des Centres de données et d’informations et des Centres de coordination pour la conservation des espèces est chapeauté par l’association InfoSpecies (infospecies.ch).


Atlas de la flore vaudoise Sans nouvelles depuis 1882 ! Cette année correspondait en effet à la publication du Catalogue de la flore vaudoise de Théophile Durand et Henri Pittier. L’ambitieux projet du Cercle vaudois de botanique, initié en 2013 et qui aboutira en 2022 avec la publication d’un atlas, consiste à réactualiser cet ancien catalogue. Il s’agit de recenser et de cartographier l’ensemble des espèces présentes dans le canton de Vaud, espèces rares, communes et néophytes confondues. Une analyse des résultats permettra d’évaluer l’évolution de la flore suite aux nombreux bouleversements qui ont marqué le territoire durant près de 140 ans.

Le mouron délicat (Anagallis tenella) est une espèce en voie de disparition en Suisse. Dans le cadre d’inventaires floristiques entrepris pour cet atlas, plusieurs populations de cette plante rare et menacée ont été découvertes dans la région de Montreux. Photo : Françoise Hoffer-Massard.

Maquette de l’Atlas de la flore vaudoise en cours d’élaboration.

Journée d’inventaire floristique effectuée par les bénévoles de l’Atlas de la flore vaudoise, au Mont Tendre. Photo : Jean-Michel Bornand. SUIVRE 25


Crédits et

remerciements

Cet ouvrage a été réalisé dans le cadre de l’exposition Trésor végétal : comment sauvegarder nos plantes menacées, en partenariat entre les Musée et Jardins botaniques cantonaux vaudois de Lausanne et Pont-de-Nant, le Jardin botanique de l’Université de Fribourg et l’Université de Berne. Il paraît à la fois en français et en allemand à l’occasion des expositions éponymes aux Jardins de Fribourg, Lausanne et Pont-de-Nant. L’ensemble des contributeurs sont chaleureusement remerciés.

110 CRÉDITS ET REMERCIEMENTS


COORDINATION

GRAPHISME

François Felber, Vincent Guerra, Sébastien Bétrisey et Gregor Kozlowski

Etc Advertising & Design Sàrl

IMPRESSION RÉDACTION François Felber, Vincent Guerra, Sébastien Bétrisey, Gregor Kozlowski, Christian Parisod, Nicolò Tartini, Edouard Di Maio, Christophe Randin et Franco Ciardo

TRADUCTION Cet ouvrage a été traduit du français à l’allemand par Sibyl Rometsch et Sandra Reinhard

RÉVISION ET RELECTURE Joëlle Magnin-Gonze, Béatrice Valverde, Christophe Randin, Sibyl Rometsch, Christian Parisod, Christian Purro, Franco Ciardo et Catherine Strehler Perrin Relecture Editions Haupt: Adeline Vanoverbeke, coordination par Patrizia Haupt

PHOTOGRAPHIES Mario Del Curto, Vincent Guerra, Joëlle Magnin-Gonze, Jérémie Guenat, David Guerra, François Felber, Gregor Kozlowski, Sébastien Bétrisey, Christian Parisod, Julien Leuenberger, Christophe Randin, Yi-Gang Song, André Moura, Jean-Michel Bornand, Françoise Hoffer-Massard et Gwénolé Blanchet

Stämpfli AG, Berne

FINANCEMENT Service des affaires culturelles de l’Etat de Vaud Université de Fribourg Division Biodiversité et paysage – Direction générale de l’environnement du Canton de Vaud Office fédéral de l’environnement, OFEV Loterie Romande Service des forêts et de la nature Fribourg Fondation Paul Schiller Fondation Philanthropique Famille Sandoz Association des Amis des Musée et Jardins botaniques de Lausanne Fondation Ernst Göhner Réseau romand Science et Cité Académie suisse des sciences naturelles (SCNAT) Société botanique suisse Ville de Fribourg Pro Natura Fribourg Association des Amis du Jardin botanique de Fribourg Fondation pour le Jardin alpin de Pont-de-Nant CRÉDITS ET REMERCIEMENTS 111


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Trésor végétal Comment sauvegarder nos plantes menacées Aujourd’hui, près d’un tiers de la flore suisse est menacée. Pourquoi certaines plantes sont-elles en danger ? Que pouvons-nous faire pour les préserver ? Au travers de sept mots clés – observer, suivre, évaluer, légiférer, étudier, conserver et prédire – les auteurs abordent ces questions de façon globale, en les illustrant par des exemples locaux. Cet ouvrage, richement illustré, apporte des éléments de réponse simples et compréhensibles au grand défi de la conservation de ce précieux patrimoine en péril.

ISBN 978-3-258-08212-7


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