Un article d'un pédopsychiatre concernant la fermeture des écoles

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« La cloche a sonné, l’école est finie… » Un beau gâchis ! La Fédération Wallonie - Bruxelles vient d’annoncer qu’il n’y aurait pas cours la semaine prochaine, même pas à distance, pour les élèves du primaire et du secondaire. Elle leur « offre » donc trois semaines de vacances de printemps. Des vacances ? Drôles de vacances cependant, pratiquement sans voyages ni activités structurées ni contacts sociaux à l’intérieur. Pour les plus de 12 ans, c’est la disette à l’extérieur aussi. Grands-parents toujours interdits... Nos chères têtes blondes vont donc beaucoup « glander », s’ennuyer, être irritables à la maison et passer toujours plus de temps sur les écrans... Ils risquent de se sentir encore davantage livrés à eux-mêmes, avec des adultes dépassés et inconséquents, sur qui ils pèsent et qui ne les guident plus vraiment. Et notre devoir d’enrichir leur savoir ? Caroline Désir s’était montrée jusqu’il y a peu la passionaria de l’école à tout prix. La voici virant à 360° et sacrifiant les jeunes sur l’autel du légendaire progressisme des syndicats ! J’entends évidemment surgir l’objection : « Les écoles ont été prises au dépourvu, et dans l’incapacité d’organiser en si peu de temps un programme à distance consistant». Prises au dépourvu ? Voici des mois que plane l’épée de Damoclès de la fermeture des écoles et les responsables de l’enseignement auraient eu tout le temps de s’organiser à tous les niveaux. Exemple : les cours Lumni sur France 2. Nous aurions pu nous aussi organiser, amplifier et rendre obligatoire ce qui commençait à exister sur la Trois. Et surtout, sur le terrain, dans bien des écoles, des instituteurs, des professeurs, le plus souvent guidés ou soutenus par leur direction, avaient pris des initiatives pour rester en contact avec leurs élèves et continuer les apprentissages par courriel, SMS, cours vidéo et même parfois par courrier papier, et ceci même en primaire lors du premier confinement. On aurait pu applaudir et soutenir ces initiatives en annonçant par exemple : « La semaine prochaine sera une semaine de cours, mais ceux-ci ne seront pas systématiques. Ils seront liés aux possibilités et aux initiatives prises par chaque école et chaque enseignant ». Que nenni ! Cerise sur le gâteau, à la garderie scolaire, interdiction est faite d’enseigner à l’enseignant qui en serait parfois le responsable ! Même pas à temps partiel, à titre quasi-récréatif, pour rompre la monotonie de la journée. Tant qu’à faire, on aurait pu interdire aux enfants de la garderie d’avoir accès à des livres, puisque tant et tant d’enfants ne lisent pas à la maison. On n’est pas très loin de l’absurdie ! C’est que voici surgir la deuxième objection, autour de la paix sociale et de l’égalitarisme : « Seules des minorités d’ élèves auraient été concernés...Cela aurait pu créer beaucoup de disparités, des différences dans les compétences, et de tensions entre enseignants, écoles, élèves et parents, qui auraient été très en colère contre les écoles qui semblaient ne rien faire...» Comme si les quelques éléments de savoir qu’auraient pu engranger une partie des enfants constituait une menace et une profonde injustice pour les autres ! Comme c’est pénible, cet égalitarisme rigide qui cherche plus à raser toute tête qui dépasse qu’à enrichir les ressources de celles et ceux qui ont du retard ! Invoquer que la justice, c’est une quantité toujours identique pour chacun, quelles que soient les circonstances, et en profiter pour se reposer, quelle belle rationalisation pour procéder à un nivellement par le bas! Et tant pis pour les enfants qui resteront encore un peu plus à stagner sur le bord du chemin, face à eux-mêmes et à leur solitude, avec leur regard désabusé sur des adultes incapables d’être exigeants! Pr. Jean-Yves Hayez pédopsychiatre Professeur émérite à l’UCL


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