[FR] Mémoire de fin d'études - e-Artsup Master 2

1

« Quels moyens mettre en place pour intéresser un public qui ne connaît pas, ou peu l'e-Sport ? »

Mémoire professionnel réalisé par Yann Grégoire 2018-2019 e-artsup n'endosse pas la responsabilité du contenu développé dans ce mémoire.

Il appartient à son auteur.

2

3

Remerciements C

e mémoire aura été réalisé avec l'aide inestimable de certaines personnes.

Je tiens donc à remercier en premier lieu l'équipe pédagogique d'e-Artsup, et plus particulièrement Julien Vierra et David Laranjeira, pour l'enseignement si réfléchi et crucial dont je bénéficie.

Merci à Carole Ballereau, ma collègue de travail à Change Factory, pour ses conseils avisés et pour les discussions autour de l'e-Sport que nous avons pu avoir. Merci également à Jean-Noël Chaintreuil, mon patron, pour l'intérêt porté sur ce mémoire et pour ses corrections.

Je me dois de remercier l'équipe de modération du forum Reddit France, qui m'a autorisé à poster mon sondage, et l'internaute Hache-Gonville, qui aura répondu à mes questions. Merci aussi à Rémi Grégoire, mon père, expert en mécanique des fluides et aérodynamicien dans le domaine ferroviaire à Alstom, qui aura lui aussi prit le temps de me répondre.

Bien évidemment, je remercie mes amis Cannelle Schardt et Étienne Laurent, anciens étudiants de l'école, qui auront, entre autres, eu la gentillesse de partager mon sondage sur les réseaux sociaux. Ce qui m'aura permis d'obtenir bien plus de réponse que je ne pensais jamais avoir.

Enfin, à ma mère et mon père : merci pour tout. Sans vous rien n'aurait été possible. Vos relectures, votre soutien et votre investissement dans cette aventure m'auront été indispensable. Ces études seront réussies grâce à vous.

4

Sommaire Résumé ............................................................................ 8 Abstract .......................................................................... 12 Introduction .................................................................. 17

Partie 1

...................................................................... 24

Chapitre 1 - La naissance de l'e-Sport en France et sa place dans notre société aujourd'hui ............................ 26 1.1 - L'avénement de l'e-Sport en France ..................................

1.2 - Vers une véritable professionnalisation, protection et structuration du secteur ....................................................

1.3 - Un développement exceptionnel dû à la modernisation des structures et aux avancées technologiques… .........................

1.4 - … Conduisant à un impact économique certain dans le pays .......................................................................

1.5 - La société française actuelle reconnait-elle donc comme légitime et acceptable la pratique e-Sportive ? ..................

26 29 31 33 36

Chapitre 2 - Quels sont les freins relatifs à une meilleure acceptation de l'e-Sport en France ? ...................... 38 2.1 - Introduction à l'étude réalisée dans le cadre de ce mémoire ...................................................................

2.2 - L'intégration de l'e-Sport, un problème réellement générationnel ? ...................................................................

2.3 - Un soucis de mentalité lié à la culture ? ..............................

2.4 - Une erreur de la part des éditeurs ? ...................................

38 40 43 44

5

2.5 - De manière générale dans les jeux-vidéos, le côté "fun" est préféré à l'aspect compétitif ...............................

2.6 - Comment une meilleure intégration de l'e-Sport serait donc possible en France ? ..............................................

Partie 2 ......................................................................

46 47 58

Chapitre 1 - Un projet pour une meilleure

acceptation de la discipline e-Sportive en France ................ 60 1.1 - Présentation du projet : faire venir l'e-Sport aux gens 1.1.a - On sait désormais ce qu'il faut faire et ne pas faire pour aboutir à un projet réussi 1.1.b - Présentation du projet : idée générale 1.1.c - Personas 1.1.d - Customer Profile 1.1.e - Concept Card 1.1.f - Présentation du projet : détails de "l'e-Sport Truck" 1.1.g - User Journey 1.1.h - Expérience visée dans le stand présenté à e-Artsup en décembre 2018

............ 60

................................................ ................................. ................................................................ ....................................................... ........................................................... ................... ............................................................

60 61 64 66 67 68 72

.................................................................

1.2 - Ancrer le projet dans la réalité ........................................

1.2.a - Rétroplanning du projet ...............................................

1.2.b - Budget ..................................................................

1.3 - Univers visuel du projet et premières pistes graphiques .........

1.3.a - Inspiration et moodboard ..............................................

1.3.b - Premières pistes graphiques ...........................................

74 76 76 76 80 80 84

Chapitre 2 - Analyses des forces et des faiblesses du projet ............................................................................ 86 2.1 - Introduction au SWOT ..................................................

2.2 - Forces du projet (S - Strengths) ........................................

2.3 - Faiblesses du projet (W - Weaknesses) ...............................

2.4 - Opportunités du projet (O - Opportunities) ........................

86 87 88 89

6

2.5 - Menaces pour le projet (T - Threats) .................................

2.6 - Benchmark ................................................................

90 90

Conclusion ..................................................................... 93 Bibliographie ................................................................ 99 Annexes ..........................................................................105 Annexe 1 - Sondage réalisé pour le mémoire .............................106 Annexe 2 - Plan de l'e-Sport Truck ..........................................110 Annexe 3 - Rétroplanning de la production du projet ..................112 Annexe 4 - Interview de Rémi Grégoire ...................................114 Annexe 5 - Interview de l'internaute Hache_Gonville ..................115 Annexe 6 - Invitation au petit déjeuner e-Sport de Change Factory ..............................................................116

7

8

Résumé C

e mémoire de fin d'études traite de la pratique de "l'e-Sport" ou "sports électroniques" et de son intégration dans le paysage culturel français actuel. L'e-Sport "est un jeu-vidéo multi-joueur joué de manière compétitive, par des joueurs professionnels, pour des spectateurs" d'après le dictionnaire d'Oxford(1). Alors que les nouvelles technologies progressent à très grande vitesse dans le monde entier, il est étrange de constater qu'en 2016, seulement 49% des français ont entendu parler de la pratique e-Sportive(2). L'idée est donc d'analyser quels sont les freins à une meilleure reconnaissance des sports électroniques en France, en répondant à la problématique suivante : "Quels moyens mettre en place pour intéresser un public qui ne connaît pas, ou peu l'e-Sport ?". Trois hypothèses peuvent être alors établies : la première est que la relativement faible acceptation de l'eSport dans la culture française est un problème générationnel. La deuxième est que le mot "Sport" dans "e-Sport" crée entre les disciplines sportives et e-Sportives une analogie gênante pour certaines personnes, qui en viennent à remettre en cause la légitimité des sports électroniques. La dernière est que l'intégration limitée de l'e-Sport en France peut être en grande partie la faute des éditeurs. Pour répondre à ces interrogations, le mémoire est articulé en une introduction, deux parties, et une conclusion.

L'histoire de l'e-Sport dans le monde est rappelée dans l'introduction, afin de situer le phénomène dans le temps et comprendre comment les sports électroniques ont pu aussi rapidement se développer à travers le globe. En effet, l'e-Sport étant officiellement né en 2000 en Corée du Sud et ayant généré 655 millions de dollars de bénéfices dans le monde en 2017(3), tout éditeurs de jeux confondus, il est important d'appréhender les origines mondiales de la discipline. Puis, la première partie décrit dans un premier temps la place de l'e-Sport dans la société française, des points de vue politique, légal, puis technologique, économique et enfin sociologique. Ce

9

qui en ressort est assez positif puisque la France, dans son ensemble, fait des efforts pour légitimer la pratique compétitive de jeux-vidéos, en structurant cette dernière notamment grâce aux textes de lois d'Axelle Lemaire (alors secrétaire d'État chargée du Numérique) en 2016(4). Ce n'est que lorsqu'une étude dite "UX" (basée sur l'eXpérience Utilisateur) est effectuée dans un second temps qu'il est possible de valider deux des trois hypothèses ci-dessus, en remarquant que les seuls obstacles pour une meilleure intégration de l'e-Sport sont l'aspect générationnel d'une part et le fait que les éditeurs ont en majorité communiqué vers les moins de 35 ans d'autre part. On constate aussi que le cœur de cible français des éditeurs préfère en grande majorité une expérience de jeu solitaire aux jeux compétitifs.

Dans la deuxième partie de ce mémoire, je propose donc un projet visant à faire découvrir les sports électroniques aux français, et plus particulièrement à ceux âgés de plus de 35 ans et travaillant en entreprise. Tout d'abord parce que les personnes nées avant 1980 n'ont pas le même rapport au digital que les représentants des générations postérieures et qu'elles ont donc statistiquement moins entendu parlé de l'e-Sport. Et également parce que faire connaître la discipline aux entreprises permet par extension de la faire découvrir à des cadres et des responsables, qui sont des leviers potentiels dans la validation de projets susceptibles de bénéficier aux sports électroniques.

Mon projet prend donc la forme d'une scène e-Sportive mobile aménagée dans un camion : "l'e-Sport Truck". Ce dernier interviendrait, lors de séminaires ou d'autres évènements, auprès d'entreprises clientes curieuses de découvrir ce domaine du digital et souhaitant passer un moment où les employés auront une occasion de renforcer les liens qui existent entre eux. Le déroulement du service de l'e-Sport Truck se ferait en deux temps. Dans un premier temps, les responsables de l'e-Sport Truck présenteraient les sports électroniques à l'entreprise, puis dans un deuxième temps, les employés pourraient s'affronter sur Rocket League, jeu e-Sportif simple à prendre en main. Chaque partie entre joueurs dans le camion serait diffusé sur un écran géant sur le côté extérieur du Truck, afin que tout le monde puisse vivre une expérience immersive, joueurs comme spectateurs. Ces derniers étants tous des acteurs reconnus de la discipline e-Sportive. Ce projet, de par son originalité, présente beaucoup d'atouts, et n'a à faire face qu'à une concurrence inexistante ou limitée. Mais il est aussi extrêmement dépendant du bon fonctionnement du matériel et est donc d'un coût élevé. Néanmoins rien ne semble l'empêcher de prospérer si jamais des clients sont intéressés.

10

Enfin, en conclusion, le mémoire affirme que même si ce projet peut être une réussite, il est nécessaire que d'autres entreprises semblables voient le jour en France pour que l'e-Sport soit davantage reconnu dans le paysage culturel. Puisque les français manquent réellement d'une éducation relative à la discpline e-Sportive. Cela dit, quelques projets sont déjà en train de se construire, certaines structures comprenant qu'elles ont tout à gagner en se positionnant sur l'e-Sport. Le mémoire se termine donc en se demandant si une acceptation des sports électroniques meilleure encore, à un niveau mondial cette fois, est possible et ce qu'il faut mettre en place pour ce faire.

Il est ainsi proposé en ouverture d'analyser comment les pays asiatiques, prétendus terres d'e-Sport, ont intégré la discipline.

Finale des World Championship 2014 de League of Legends, dans un stade de 40 000 personnes, en CorĂŠe du Sud.

11

12

Abstract T

his final dissertation deals with the practice of "e-Sport" or "electronic sports" and its integration into the current French cultural landscape. e-Sports are "a multiplayer video game played competitively, by professional players, for spectators" according to Oxford's dictionary(1). As new technologies are advancing at an astonishing rate around the world, it is strange to note that, in 2016, only 49% of French people heard of e-Sports(2).

The idea is therefore to analyse what are the obstacles to a better recognition of electronic sports in France, by answering the following question: "What means should be put in place to interest an audience that does not know, or only slightly, e-Sports?". Three hypotheses can then be established: The first is that the relatively low acceptance of e-Sport in French culture is a generational problem. The second is that the word "Sport" in "e-Sport" creates an awkward analogy between disciplines for some people, which challenges the legitimacy of electronic sports. The last one is that the nuanced integration of e-Sport in France can be largely the fault of the publishers. To answer these questions, the brief is divided into an introduction, two parts, and a conclusion.

In the introduction, the history of e-Sport in the world is presented, in order to situate the phenomenon in time and understand how electronic sports have been able to develop so rapidly across the globe. Indeed, since e-Sport was officially launched in 2000 in South Korea, and generating $655.3 million in profits worldwide in 2017(3), for all game publishers combined, it is important to understand the global origins of the discipline.

Then, the first part first describes the place of e-Sport in French society, from a political,legal, technological, economic and sociological points of view.

What emerges is quite positive since France as a whole is making efforts to legitimize the competitive practice of video games, by structuring the latter,

13

in particular through the legislative texts of Axelle Lemaire (then Secretary of State for Digital Technology) in 2016(4). It is only when a so-called "UX" study (based on User eXperience) is carried out in a second step that it is possible to identify the most relevants of the three hypotheses, by saying that only the generational aspect and the fact that most publishers have communicated for those under 35 years of age are an obstacle to a better integration of e-Sport.

We also note that the core French target group of publishers prefers a solitaire game experience rather to play competitive games.

In the second part, I therefore propose a project aimed at introducing electronic sports to the French, and more particularly to those over 35 years of age working in companies. Firstly because people born before 1980 do not have the same relationship to digital technologies as the representatives of younger generations and statistically have therefore heard less about e-Sport.

Secondly because, once the discipline is made known to companies, this allows by extension to make it known to executives and managers, who are potential levers in the validation of projects that would benefit electronic sports. My project therefore takes the form of a mobile e-Sports stage set up in a truck. It would intervene, during seminars or other events, with client companies interested in discovering this digital field and wishing to spend a moment where employees will have an opportunity to strengthen the ties that exist between them. The e-Sport Truck service would be carried out in two stages. In the first, the e-Sport Truck managers would present electronic sports to the company, then in the second, the employees could compete on Rocket League, an e-Sports game that is easy to learn. Each game between players in the truck will be broadcast on a giant screen on the outside of the Truck, so that everyone can live an immersive experience, players and spectators alike. These are all mandatory actors in the e-Sport discipline. This project, due to its originality, has many strengths, and few competitors, but is extremely dependent on the proper functioning of the equipment, and is therefore expensive. Nevertheless, nothing seems to prevent it from thriving if customers are interested.

Finally, in conclusion, the dissertation states that even if this project can be a success, other similar companies will have to be created in France for e-Sport to be more widely recognized in the cultural landscape. Since the French really lack an education on the e-Sport discipline. That said, some projects are already being built, with some structures understanding that they have

14

everything to gain by positioning themselves on e-Sport. The dissertation therefore ends by asking whether an even better acceptance of electronic sports, at a global level this time, is possible and suggests that, to answer this question, we should analyze how the Asian countries, so-called e-Sports countries, have integrated the discipline.

Finale des World Championship 2017 de League of Legends, au Bird Nest, stade Olympique à Pékin.

15

16

Manette de XBOX 360, console de Microsoft.

17

Introduction D

ans le cadre d'une dernière année de Master à e-Artsup, ce mémoire va porter sur le thème de "l'e-Sport" - "ou sports électroniques" et plus précisément, du problème de reconnaissance dont la discipline souffre, tout en prenant le cas de la France. Depuis une vingtaine d'années, le monde grandit pour ainsi dire avec les jeux-vidéos et garde toujours un amour certain pour le sport traditionnel. L'arrivée de l'e-Sport, pratique combinant le jeu-vidéo et la compétition, est donc un phénomène logique, mais aussi un sujet très actuel et intéressant. Cette introduction a pour but de définir ce qu'est l'e-Sport de manière concise, énoncer le problème qui se pose par rapport à cette discipline et l'objectif de cette recherche.

Qu'est donc l'e-Sport exactement ? Selon le dictionnaire d'Oxford(1), "L'e-Sport" est un jeu-vidéo multi-joueur joué de manière compétitive, par des joueurs professionnels, pour des spectateurs. En pratique, ce sont des joueurs qui s'affrontent les uns contre les autres, en un contre un, deux contre deux, cinq contre cinq… En fonction des règles spécifiques de chaque jeu e-Sportif. En général, les joueurs sont sous contrats avec d'importantes structures cherchant à monter des équipes efficaces, pour tenter de remporter les meilleures compétitions e-Sportives. La plupart des éditeurs de jeux-vidéos e-Sportifs ont créé des systèmes de ligues régionales, à la manière des équipes des sports traditionnels, afin de classer les meilleures joueurs ou équipes et ainsi élire des champions à travers des championnats semestriels ou annuels. Historiquement, la première compétition de jeux-vidéos (à savoir un tournoi comprenant une récompense à la clé), eu lieu en octobre 1972(2), à l'université de Stanford. 10 000 participants se sont affrontés sur Spacewar pour tenter de remporter un abonnement d'un an au magazine Rolling Stones. Les médias se sont alors intéressés à ce tournoi, créant une effervescence nouvelle dans le monde du jeu-vidéo. Dans les années 80, plusieurs tournois de ce genre ont été organisées dans le monde et

18

certaines compagnies et éditeurs enregistraient alors les records des joueurs, afin de les faire s'affronter indirectement également. Un joueur nommé Billy Mitchell(3) fut notamment connu pour avoir détenu six high-scores* sur six différents jeux-vidéos sur arcade, en 1985. Cela lui aura d'ailleurs valu une entrée dans le Guinness livre des records. C'est donc entre 1970 et 1980 que la compétition dans les jeux-vidéos démarra.

Mais ce n'est vraiment que dans les années 1990 que l'e-Sport commence à prendre la forme qu'il a aujourd'hui, à savoir celle d'un univers en effervescence, mais régulé. Pour plusieurs raisons. Tout d'abord : internet, qui permit aux joueurs du monde entier de se connecter entre eux, et de créer les premières équipes en ligne. Les joueurs basculèrent donc en grand nombre des arcades aux ordinateurs. Puis en 1997, un tournoi fut organisé sur le jeu "Quake" et rassembla 2000 participants. Pour beaucoup d'experts, ce tournoi fut le premier réel évènement e-Sportif organisé. Quelques semaines après, le première ligue e-Sportive se forma : la "CPL" (Cybertathlete Professional League) et ils furent les premier à récompenser les vainqueurs de leurs tournois par d'importants prix en argent sonnant et trébuchant.

En 1998, ils firent gagner 15 000 dollars pour l'une de leur compétition(2).

Puis la première version de Starcraft arriva la même année sur Microsoft Windows. Ce fut le premier jeu de stratégie en temps réel, qui demandait, pour être un excellent joueur, de fantastiques réflexes, de la planification stratégique, l'étude de ses adversaires… En bref, Starcraft réclamait un investissement bien plus important que n'importe quel jeu jusqu'alors si l'on voulait accéder au tout meilleur niveau. Nous y reviendrons un peu plus tard dans cette introduction, mais la Corée du Sud fut le pays où le niveau de compétition était le plus élevé sur Starcraft, et encore davantage sur son grand frère Starcraft 2, plus tard, en 2010. En 1999, une chaîne de télévision coréenne décida de diffuser un tournoi de Starcraft(4). Et ce fut le début du phénomène e-Sport. Effectivement, en 2000, l'Association Coréenne de l'e-Sport (KeSPA, pour "Korean e-SPort Association") fut fondé par le gouvernement pour développer et réguler la croissance des sports électroniques dans le pays(5). Ainsi naquirent des infrastructures et des équipes professionnelles, et les meilleurs joueurs gagnèrent leurs vies à travers la pratique compétitive des jeux-vidéos. Depuis, le monde entier a adopté l'e-Sport de manière professionnelle et il existe aujourd'hui nombre de jeux-vidéos compétitifs aux genres variés : FPS ("First Personal Shooter"

"High-Score" : Plus haut record effectué sur un jeu, ici sur un jeu-vidéo.

19

Jeux de tirs à la première personne), MOBA ("Massive Online Battle Arena" Arènes massives de bataille en ligne), RTS ("Real Time Strategy" Stratégie en temps réel), et jeux de combats, étants les styles d'e-Sports les plus populaires.

Le développement de l'e-Sport dans le monde, depuis les années 2000, est réellement fulgurant. Porté notamment par Starcraft, puis Starcraft 2, League of Legends, Dota 2 (MOBA) et Counter Strike (FPS). En réalité, à partir du moment où des équipes professionnelles commencèrent à se former et à promettre des salaires plus que confortable pour les joueurs qu'elles allaient engager, de très nombreux jeunes furent intéressés. Les jeux-vidéos devinrent alors bien plus compétitifs en ligne, puisqu'une bonne partie des joueurs souhaitaient passer professionnels et vivre de leur passion. L'e-Sport, années après années, eu un impact économique de plus en plus important. En effet, les grandes marques ayant remarqué le phénomène, ont décidées d'aider les structures et les joueurs en sponsorisant les sports électroniques. Les revenus liés aux e-Sports dans le monde sont donc édifiants, pour une pratique d'un peu moins de vingt ans. Les revenus mondiaux liés à l'e-Sport en 2017, tout éditeurs confondus, s'élèvent à 655.3 millions de dollars*. Dépassant donc largement le record de 2016, qui était de 492.7 millions de dollars(5). Alors qu'en 2010, chaque tournoi permettait de gagner en moyenne entre 4 500 et 9 000 dollars, en 2015 déjà, l'intérêt croissant de la discipline permit aux éditeurs de doubler les sommes mises en jeu(6). Et en 2017, c'est 121 millions de dollars qui ont été distribués dans le monde aux différents vainqueurs de tournois e-Sportifs(7). Cette année, la dotation des "Internationals" de Dota 2 était de 25 millions de dollars(8). Ce tournoi étant réputé comme la compétition avec les plus importantes récompenses.

Pourtant, peu d'éditeurs de jeux-vidéos e-Sportifs peuvent se permettre de mettre autant d'argent dans leur tournois. Ce qui signifie que certains sports électroniques marchent bien mieux que les autres. Actuellement, L'eSport est mené principalement par 3 éditeurs majeurs et 5 jeux, qui sont Riot Games avec League of Legends, Valve avec Dota 2 et Counter Strike Global Offensive, et Blizzard Entertainment avec Hearthstone (jeu de cartes) et Overwatch (FPS). Et c'est donc finalement "peu" de joueurs professionnels qui se partagent tout cet argent : au total, depuis la création de la discipline, ce sont 52 230 joueurs qui ont gagné des prix via l'e-Sport(9). Sur vingt ans, dans le monde entier, cela est effectivement "peu". Il est intéressant de savoir que les joueurs pros ont une carrière assez courte, et située uniquement

"Dollars" : Dans ce mémoire, chaque allusion au dollar sera pour parler de la monnaie des États-Unis d'Amérique.

20

dans leur jeunesse. Il est en effet compliqué de se maintenir au tout meilleur niveau, la compétitivité pour le peu de places professionnelles étant plus qu'intense. Les joueurs professionnels s'entrainent en moyenne 8 heures par jour, et peuvent pousser jusqu'à 15 heures lorsque c'est nécessaire.

Les acteurs principaux de l'e-Sport sont donc les éditeurs des jeux, les joueurs et les structures faisant travailler ces derniers. Mais il est important de préciser qu'il existe un autre acteur crucial au développement de la scène e-Sportive : les spectateurs. En effet, ce sont les personnes qui viennent assister aux tournois qui font réellement vivre le phénomène. La plupart des jeux e-Sports sont "Free-To-Play"*. De ce fait, le modèle économique des éditeurs de ces jeux attend une compensation financière quelque part. Cette dernière se trouve donc en partie dans le fait que les gens paient pour assister aux matchs des joueurs professionnels. Une autre partie vient en réalité de la vente d'accessoires cosmétiques dans le jeu, qui n'ont pas d'impact autre que visuel. Pas d'amélioration de performance pour les avatars dans le jeu en somme. Les spectateurs font également vivre le phénomène lorsqu'ils regardent les diffusions des matchs en direct sur internet. On peut donc dire que d'autres acteurs importants dans le monde de l'e-Sport sont les sites qui diffusent les compétitions en ligne, grâce à des partenariats avec les éditeurs.

Les plus connus étant les sites internet Twitch et YouTube. Mais il existe aussi des structures dédiées à l'e-Sport, diffusant les matchs de manière souvent nationales. En France, la plus connue est O-Gaming*. Mais, même s'il y a beaucoup d'acteurs e-Sportifs en Occident, ils ne sont que peu par rapport à ceux présents en Asie.

Il est nécessaire de comparer les différences qu'il existe dans l'approche à l'e-Sport entre l'Orient et l'Occident pour comprendre la problématique de ce mémoire. L'Asie est le continent le plus actif (et de très loin) dans le monde de l'e-Sport. Prenons le cas de la Corée du Sud, puis de la Chine, pour comparer leur dynamique e-Sportive à un des deux pays les plus intéressés par l'e-Sport en Europe : la France. En Corée du Sud, terre natale du phénomène, comme expliqué précédemment, l'e-Sport est un sport national et pas des moindres, puisqu'il est juste un petit peu moins suivi que le baseball. Étant parfaitement ou presque accepté dans le pays, il est naturel que les structures encadrant les joueurs soient bien mieux pensées et organisées. C'est pour cette raison "Free-To-Play" : Se dit d'un jeu-vidéo où le joueur n'a pas besoin de dépenser un centime ni pour acheter le jeu et y jouer, ni pour devenir meilleur une fois dans le jeu.

"O-Gaming" : Structure française diffusant les compétition e-Sportive sur internet ("Web TV"), fondée en 2011 par les frères Alexandre et Hadrien Noci.

21

que les joueurs professionnels coréens sont les meilleurs du monde dans la plupart des jeux e-Sportifs auxquels ils touchent. Ils dominent notamment Starcraft 2 et ont remportés 5 championnats mondiaux consécutifs sur League of Legends, le jeu le plus joué au monde. La Chine quant à elle, de manière assez logique, compte le plus de joueurs "casual"* au monde. De ce fait, plus de joueurs souhaitent devenir professionnels et la compétition là-bas est par conséquent extrême. Et apporte énormément au monde de l'e-Sport. Plus de joueurs et de spectateurs donc plus de revenus pour les éditeurs. Une conséquence de cet engouement est que la plupart des gros tournois e-Sports internationaux sont organisés de manière à faciliter le visionnage des matchs au peuple Chinois, au détriment des Européens ou des Américains.

De la même manière, on retrouvera un amour certain pour l'e-Sport au Japon, en Thaïlande, ou à Taiwan. En fait, l'Asie est tellement en avance sur l'intégration de l'e-Sport, qu'entre le 18 août et le 2 septembre de cette année 2018, six jeux-vidéos compétitifs seront intégrés aux Jeux Asiatiques.

C'est la première fois que les sports électroniques seront représentés dans une des plus grandes compétitions multisports mondiale. Les six e-Sports seront : League of Legends, Hearthstone, Clash Royale (RTS), Starcraft 2, Pro Evolution Soccer (simulation de football) et Arena of Valor (MOBA).

En comparaison, même si l'e-Sport "structuré" est arrivé en Europe et en Amérique, il ne profite pas de la même intégration, ni de la même acceptation qu'en Asie. Une des causes est un cercle vicieux par rapport aux victoires asiatiques en championnats internationaux. L'e-Sport ayant été plus rapidement intégré en Asie, les coréens et les chinois ont eu plus de temps pour progresser et maîtriser les différents jeux. Dès lors, lorsque des équipes occidentales et orientales s'affrontent, sur la plupart des jeux, la victoire va très souvent aux équipes asiatiques. Si souvent même que certaines équipes occidentales perdent leur motivation face à la domination écrasante de l'Orient et s'entrainent alors moins, se résignant(10). Il en va de même pour les sponsors, qui ont du mal à beaucoup investir dans des équipes qui n'auront que peu de chance de gagner les tournois les plus importants. C'est un frein important au développement de la discipline en occident. L'e-Sport reste néanmoins populaire en occident : même si ce n'est pas au même degré qu'en Asie, de grands tournois y sont organisés. En mai 2018, le MSI* de League "MSI" : Ou "Mid Season Invitational" : Prestigieux tournoi international organisé par Riot Games pour League of Legends, qui prend place entre les deux phases des championnats régionaux. Seules les meilleures équipes de chaque région y sont envoyées.

"Casuals" : Terme qualifiant un joueur qui joue de manière normale aux jeux-vidéos, sans excès, pour s'amuser, et qui n'a pas nécessairement d'ambition compétitive.

22

of Legends s'est déroulé au Zenith de la Vilette à Paris, rassemblant plusieurs milliers de supporters et nombre de médias. Et ce seulement un an après avoir organisé les finales européennes du même jeu, à l'AccorHotels Arena.

Mais alors pourquoi la dynamique de pratique de manière compétitive de jeux-vidéos n'est pas semblable à celle en Asie ? Si ces dynamiques et engouements étaient les mêmes, alors l'e-Sport devrait à son tour déjà être intégré aux Jeux Olympiques de 2024, sans avoir besoin de débattre sur le sujet pendant des années(11). Au vu de l'évolution de la pratique, même en Occident, une meilleure intégration de l'e-Sport devrait être possible. Mais il faut pour cela identifier les freins à l'acceptation de la discipline. C'est de cela que traitera ce mémoire.

Nous arrivons en effet au sujet principal du travail : l'intégration de l'e-Sport en France, afin de prendre un exemple de pays occidental où l'intérêt pour la pratique est réel, mais l'acceptation de cette dernière est paradoxalement compliquée. Dans notre pays, en 2016, 51% des français disaient ne jamais avoir entendu parler des sports électroniques(12), alors que la même année, le chiffre d'affaire lié à l'e-Sport en France était de 22.5 millions de dollars(11).

Qui plus est, sur les 49% de personnes connaissant la discipline, seuls 43% pensaient que l'e-Sport pouvait être considéré comme un sport, de la même manière qu'en Corée du Sud(13). De manière générale, il existe donc des problèmes fondamentaux qui compliquent l'intégration de l'e-Sport à la société actuelle. Est-ce un problème générationnel ? Puisque les jeux-vidéos joués de manière compétitives existent depuis une vingtaine d'années, peut-être est-ce normal que les personnes étant nées avant le phénomène soient moins intéressées par ce dernier. Le doute sur la légitimité de l'e-Sport viendrait-il d'un simple problème de définition ? Le mot "sport" créant une analogie gênante pour grand nombre de personne, et donnant naissance au plus classique des débats : "L'e-Sport peut-il être réellement considéré comme un sport ?". Ou peut-être qu'après tout, cela pourrait être aussi la faute des éditeurs de jeux e-Sportifs ? Lors de la naissance des sports électroniques, pour que la discipline devienne rentable, il fallait séduire un coeur de cible rapidement et ce dernier fut les jeunes. Peut être que les éditeurs ne communiquent donc pas assez auprès des générations plus âgées, laissant les adultes dans une interrogation certaine sur ce qu'est l'e-Sport. Ce mémoire a donc pour but de répondre à la problématique suivante :

23

"Quels moyens mettre en place pour intéresser un public qui ne connaît pas, ou peu l'e-Sport ?"

Le mémoire se composera de deux parties. Dans un premier temps, une analyse de l'avènement de l'e-Sport en France sera faite, afin de comprendre quelle est sa place dans notre société actuelle et identifier les freins à son intégration. Puis, ce sera au tour de ma solution d'être présentée sous forme de projet, lequel sera expliqué en détails.

24

Part Finale du segment d'été des championnats européens de League of Legends, début septembre 2017, à l'AccorHotels Arena de Paris.

tie 1

25

D

ans cette première partie sera posé le problème d'intégration de l'e-Sport en France. Le premier chapitre sera consacré à la naissance de la discipline dans le pays, afin de pouvoir par la suite comprendre l'impact de l'e-Sport dans les secteurs politique, légal, technologique, économique et sociologique. De cette manière, dans un second chapitre, nous pourrons ensuite analyser des études réalisées dans le domaine e-Sportif, qui nous permettrons de valider ou invalider toutes les hypothèses formulées dans l'introduction, liées à l'intégration de la discipline dans le pays.

26

Chapitre 1 La naissance de l'e-Sport en France et sa place dans notre société aujourd'hui

1.1 - L'avénement de l'e-Sport en France

S'

il est vrai que l'e-Sport est une discipline âgée d'une vingtaine d'année (en considérant que sa naissance est représentée par la création de la KeSPA*), il ne s'est pas pour autant aussi vite développé dans tous les pays du monde. Dès 2000, à l'époque où les Coréens organisaient déjà des tournois sur Starcraft en ligne - permettant à des milliers de fans de suivre leurs joueurs professionnels préférés(1), la France n'avait pas encore tout à fait prit conscience du phénomène e-Sport. Si compétition virtuelle il y avait de manière internationale, en ligne, via la CPL (Ligues des Cyber Athlètes), il n'y avait encore aucun évènement assez structuré en France pour être qualifié d'e-Sportif. Les français jouaient néanmoins à des jeux-vidéos divers et variés, sur console, ou en ligne. Ce fut l'époque où la France découvrait le monde du jeu-vidéo et les médias commencèrent à expliquer le fait que les jeunes passaient de plus en plus de temps sur les consoles et écrans…

Mais ne le faisait pas toujours de la meilleure des manières, créant une image assez obscure des jeux-vidéos, notamment ceux en ligne(2). En bref, les français aimaient jouer, se rassembler pour faire des LAN* à domicile, entre "KeSPA" : Korean eSPort Association, fondée en 2000 par le gouvernement coréen.

Voir l'introduction.

"LAN" : ou "LAN-Party" : "Local Area Network" ou Réseau Local, ce terme désigne un réseau informatique local, qui relie des ordinateurs dans une zone limitée, comme une maison, école, laboratoire informatique, ou un bâtiment.

27

amis, mais n'avaient pas vraiment l'opportunité, en l'an 2000, en France, de s'affronter sur des scènes qui leur étaient dédiées. Le seul fait de jouer aux jeux-vidéos pouvait également être mal perçu.

Néanmoins, certaines structures e-Sportives virent le jour en l'an 2000, malgré le peu de pratique de l'e-Sport à l'époque : ce furent les premier pionniers de l'intégration des sports électroniques en France. Les deux meilleurs exemples sont des acteurs nommés aAa ("against All authority") et la Gamers Assembly ("L'assemblée des joueurs", en français). aAa est une équipe formée en mai 2000 sous l'impulsion de joueurs passionnés du jeu Quake. L'équipe participe alors à des petits tournois en ligne et rencontre un certain succès. En 2004, étant devenus une petite structure, ils décident de créer un site internet, véritable portail vers le monde du jeu-vidéo français.

Ils montèrent également différentes équipes afin de devenir compétitifs sur plusieurs jeux-vidéos et gagnèrent beaucoup de titres par la suite, se plaçant ainsi comme une structure référence, encore active aujourd'hui. La Gamers Assembly est quant à elle un tournoi, organisé chaque année depuis l'an 2000, où des joueurs peuvent s'affronter sur différents jeux de manière locale. Lors de la première édition, dans la ville de Smarves, 100 joueurs se regroupèrent, mais aucun prix ne fut distribué avant la deuxième édition, qui eut lieu à Saint-Benoît. La croissance fut rapide puisque dès la quatrième édition, plus de 500 joueurs s'affrontaient au Futuroscope de Poitiers - où auront lieu toutes les futures éditions jusqu'en 2013, pour 25 000 euros de récompenses(3). La Gamers Assembly fut donc réellement un tremplin pour les compétions de jeux-vidéos en France et une excellente vitrine pour les médias. Un autre tournoi qui joua un grand rôle dans le développement de l'e-Sport en France fut le tournoi nantais Lanagame, qui rassembla 820 joueurs sur 3 jours, en 2003(4). On s'y réfère encore comme la première LAN de compétition en France. Lors de cet évènement, de nombreux intervenants furent invités, créant ainsi un espace d'échange sur le monde du jeu-vidéo et de la compétition.

Au fur et à mesure que les tournois se développaient un peu partout en France, de jeunes passionnés de la compétition e-Sportive commencèrent à créer des sites web et des structures dédiées à l'e-Sport. Ce fut une première, car si certains sites web parlaient de l'e-Sport, ils n'en faisaient pas une priorité.

"Millenium" représente ce changement. Site web créé en 2002 par Cédric Page, Millenium souhaitait informer les joueurs français des actualités

28

relatives à l'e-Sport (Tournois, vainqueurs, nouvelles internationales, etc…).

Par la suite, Millenium intégra une Web TV* afin que les internautes fans d'e-Sport puissent voir leurs équipes favorites s'affronter. Sur le même principe, O-Gaming se forma en 2011, et la première décennie du deuxième millénaire franchit donc une étape pour l'e-Sport : la retransmission en direct des évènements e-Sportifs. Ce fut donc un pas en avant énorme pour l'intégration de la discipline en France. Twitch, actuellement un des leaders mondiaux dans la diffusion d'e-Sport, fut également créé en 2011. Les années passèrent et les tournois e-Sportifs, mieux structurés, furent de plus en plus diffusés sur les Web TV. Cet essor intéressa alors d'importantes structures et entreprises, bien décidées à profiter du succès du phénomène. Millenium fut par exemple racheté en 2014 par Webedia, géant français dans le domaine des médias en ligne. D'autres équipes françaises importantes virent le jour, tel que Vitality, créé par JB Siacci en 2013. Ces créations d'équipes, de tournois et de portails pour informer et diffuser les compétitions, marquent réellement les débuts d'un univers e-Sportif français sérieux, organisé et compétitif.

Nous le verrons par la suite, ces tournois et ces compétitions génèrent beaucoup d'argent. Ce qui, bien sûr, attire les sponsors. Il faut savoir que sur les revenus mondiaux, en 2017, générés par la diffusion d'e-Sport, 38% sont dus au sponsoring(5). Soit la plus grosse part des bénéfices créés.

Quelques sponsors célèbres dans le milieu sont notamment les marques Intel, Microsoft, Samsung, ou encore Orange et Canal+ pour en citer des français. De ce fait, grâce à ces nouvelles et importantes rentrées d'argent, la France pu organiser d'encore plus grands tournois, dans de plus grandes salles de spectacles et générer encore plus de bénéfices. Un des tournois les plus populaire aujourd'hui en France est celui organisé par l'association Lyon e-Sport, formée en 2011. À l'époque, le tournoi proposait une unique compétition sur League of Legends, et dans les locaux de l'école EPITECH*.

En 2017, l'évènement multi-e-sports se déroula au Palais des Sports de Gerland et rassembla plus de 10 000 spectateurs(6).

Qui plus est, les éditeurs des plus grands jeux e-Sportifs mondiaux ont fait de Paris une ville de premier choix pour la réception de grandes compétitions internationales. Comme évoqué en introduction, les phases finales des MSI "Web TV" : Système de diffusion vidéo en direct sur un site internet.

"EPITECH" : (L'École Pour l'Informatique et les nouvelles TECHnologies) est un établissement d'enseignement supérieur reconnu par l'État créé en 1999, faisant partie, au même titre qu'eArtsup, du groupe Ionis, qui délivre une formation dans les technologies de l'information et de la communication.

29

de League of Legends ont eu lieu au Zénith de Paris - La Villette, en Mai. Lors de la grande finale, 60 millions de personnes ont regardé le match sur Internet, puisque ce dernier était diffusé sur des dizaines de Web TV à travers le monde, et commenté dans pas moins de 15 langages(7). Nous sommes donc très loin des premiers évènements liés à l'e-Sport en France.

1.2 - Vers une véritable professionnalisation, protection et structuration du secteur

L'

e-Sport est donc une discipline nouvelle qui devient lucrative, et qui attire de plus en plus d'acteurs qui se bousculent pour faire des bénéfices sur cette période intense de croissance. Mais le phénomène est-il bien encadré par les éditeurs des jeux, ainsi que par les équipes ? En fait, l'e-Sport, comme chaque activité mettant en jeu d'importantes sommes d'argent, se doit d'avoir un cadre strict pour être considéré comme une discipline sérieuse et légitime. Les éditeurs d'e-Sport et les gouvernements ont donc l'obligation morale d'instaurer des règles et des lois réfléchies et adaptées, afin de prévenir de possibles problèmes légaux. Trois points notamment donnent matière à la réflexion : la représentation des joueurs professionnels, le respect de la propriété intellectuelle, et la réglementation du jeu e-Sport en lui-même.

Par rapport aux joueurs, il est bien établi avec les sports traditionnels que ces derniers ont des managers pour les aider à faire des affaires et naviguer dans des situations juridiques. Ce n'est en effet pas le cas actuellement pour les joueurs d'e-Sport. À l'heure actuelle, la plupart des athlètes de sport électronique se représentent eux-mêmes ou sont représentés par un membre de leur famille, ce qui les laisse assez exposés. En conséquence, les joueurs ne sont parfois pas payés ce qu'ils valent sur le marché, malgré de gros prix en argent pour les tournois. Une représentation formelle aiderait les joueurs à obtenir la compensation qu'ils méritent et à égaliser les chances en négociant des contrats avec des entreprises sophistiquées disposant d'une représentation juridique compétente. Le problème de la réglementation des jeux est un peu particulière. En effet, chaque jeu d'e-Sport à, par définition, ses propres règles. Mais qu'en est-il des contrôles anti-dopage ? Des réglementations

30

générales par rapport à la triche dans le milieu e-Sportif ? Pour que l'e-Sport se développe correctement en minimisant les soucis légaux, il faudra sûrement que les différents éditeurs s'accordent sur des règles communes concernant les principaux problèmes que l'on rencontre dans la pratique sportive professionnelle traditionnelle. Enfin, la question du respect de la propriété intellectuelle est un peu spéciale. En effet, un joueur professionnel aura son avatar à l'écran et l'écran appartiendra à l'éditeur. Il reste donc encore à définir où le joueur est réellement représenté lors des compétitions et cela est dépendant des différents jeux. À défaut d'avoir déjà répondu à toutes les réflexions légales soulevées par le monde de l'e-Sport, les différents gouvernements mondiaux ont décidés d'encadrer du mieux possible la pratique de l'e-Sport. L'objectif étant de protéger de la meilleure des manières les joueurs - en priorité, ainsi que les différents acteurs. Dans certains pays, le gouvernement a agi tôt, comme en Corée avec la KeSPA. Aux États-Unis, depuis 2013, les professionnels du sport électronique sont considérés comme des athlètes et jouissent des mêmes droits que ces derniers(8). En France par contre, il aura fallu attendre 2016 pour avoir des textes de lois suffisamment complets et réfléchis visant à réguler et encadrer la pratique e-Sportive. Cette année-là, un rapport fut remis à la secrétaire d'État au numérique Axelle Lemaire. Cette dernière déclara : "On doit offrir un vrai statut reconnu aux joueurs professionnels avec une meilleure protection sociale", relevant qu'il s'agissait d'une "mesure clef pour bâtir en France des équipes et éviter le brain-drain ("Fuite des cerveaux" vers l'étranger) et développer les compétitions". Le co-auteur du rapport, Rudy Salles, député, expliqua qu'avant ces textes, l'e-Sport était une "activité illégale, assimilée aux jeux d'argent, certes tolérée puisqu'elle ne porte pas atteinte à l'ordre public" mais qu'il fallait la légaliser. Les lois, adoptées depuis ont un triple objectif(9) : - Sécuriser juridiquement l'organisation de ces compétitions.

- Clarifier le statut social des joueurs professionnels.

- Encourager le développement du secteur en France.

Il est compliqué de dire si l'ensemble de ces lois sont d'ores et déjà bien connues des français, mais le gouvernement à définitivement fait un grand

Axelle Lemaire lors de la prĂŠsentation de lancement de l'association France e-Sport, le 27 Avril 2016 Ă Paris.

31

32

pas vers l'intégration de l'e-Sport en fin d'année 2016. Dans le même temps, l'association France e-Sport fut créée sous l'impulsion du gouvernement, comprenant les plus grands acteurs de l'e-Sport Français.Peut-être cela fera-t'il évoluer les mentalités par rapport à la discipline, la société constatant que le gouvernement considère les sports électroniques comme quelque chose d'à la fois sérieux, mais d'aussi prometteur.

1.3 - Un développement exceptionnel dû à la modernisation des structures et aux avancées technologiques…

L'

approche politique évolue de manière logique en même temps que l'e-Sport se développe en France. Néanmoins, cette expansion rapide du secteur ne ralentit-elle pas ? Nous aurons une réponse économique dans la prochaine sous-partie. Néanmoins, les éditeurs de jeux-vidéos destinés à la pratique compétitive font tout pour garder les joueurs et les spectateurs intéressés… En innovant. Principalement dans la forme que prennent les évènements e-Sportifs. Si les jeux restent les mêmes dans leur fond et que les règles de ces derniers n'évoluent pas ou rarement, il devient possible que les spectateurs se lassent de toujours voir le même spectacle. Mais par rapport aux professionnels, il est malgré tout compliqué de changer les dynamiques du jeu du jour au lendemain. Alors, les innovations sur la manière dont le match (le spectacle), est présenté, sont de mises.

Il faut savoir que participer à un évènement e-Sportif, pour le spectateur comme pour le joueur, c'est avant tout vivre une expérience unique. En effet depuis quelques années, les plus gros éditeurs de jeux e-Sport ne se contentent plus de remplir une salle avec simplement les joueurs professionnels et leur matériel : ils créent désormais un véritable spectacle. Et c'est ce qui rend la discipline si attractive à regarder et à prendre part. Entre les commentateurs qui font vivre le match, comme dans les sports traditionnels, les effets de lumières et autres divertissements proposés entre les différentes parties des matchs, le spectateur voit dans l'évènement bien plus qu'une simple confrontation.

Depuis longtemps déjà, il est de coutume que les grandes finales des plus

33

conséquents tournois internationaux démarrent par un concert d'un artiste en lien avec l'évènement. En 2014 par exemple, le groupe Imagine Dragons avait chanté devant 40 000 personnes pour la finale des championnats du monde de League of Legends en Corée du Sud, après avoir enregistré l'hymne du tournoi de Riot Games. L'an dernier, cette même compagnie a proposé sur sa diffusion en direct sur internet, le vol d'un dragon en réalité augmentée, lors de la cérémonie d'ouverture des nouveaux championnats du monde. Valve, quant à eux, proposent aux spectateurs regardant les matchs de Dota 2 derrière un écran, de suivre toutes les statistiques précises des parties, vie une interface interactive. Il est finalement compliqué de dire que l'on connaît réellement l'e-Sport tant que l'on n'a pas vécu l'immersion que les spectacles des éditeurs proposent.

Malheureusement, l'e-Sport français n'est pas un pionnier en matière d'innovation technologique et se contente de mettre en place ce qu'inventent les autres pays. La raison est assez simple : ce sont en général les éditeurs des jeux e-Sports qui décident des innovations les plus efficaces pour leurs produits et qui les déploient. Et aucun des plus gros éditeurs n'est français, Blizzard Entertainment, Riot Games et Valve étant chacunes des entreprises américaines. Il est donc assez compliqué d'aller plus vite que la lumière et de proposer des nouvelles technologies qui ne s'adapteraient pas forcément aux jeux du moment. Un outil prometteur est néanmoins en train d'être développé et adapté à l'e-Sport en ce moment, c'est la réalité virtuelle*. Plusieurs Start-Ups* ou entreprises sont en train de travailler sur le sujet, pour, pourquoi pas, révolutionner le monde des sports électroniques. Là encore, la France n'a pas d'acteurs assez conséquents dans le domaine pour espérer se placer en leader. Néanmoins, l'intégration de la réalité virtuelle en France et dans le monde, couplée à des systèmes tels que des tapis omnidirectionnels et des capteurs de mouvements, pourrait faire davantage accepter aux gens le fait que l'e-Sport puisse être un sport, puisque des efforts physiques seraient alors réalisés par les joueurs.

"Réalité virtuelle" : Ou VR, "Virtual Reality" Technologie informatique qui simule la présence physique d'un utilisateur dans un environnement artificiellement généré par des logiciels, la plupart du temps avec l'aide d'un casque. La réalité virtuelle crée un environnement avec lequel l'utilisateur peut interagir.

"Start-Up" : Une Start-Up est une nouvelle entreprise innovante, généralement à la recherche d'importantes levées de fonds d'investissement, avec un très fort potentiel éventuel de croissance économique, et de spéculation financière sur sa valeur future (création d'entreprise).

34

1.4 - … Conduisant à un impact économique certain dans le pays

U

ne réaction du gouvernement était en effet nécessaire dans le pays, afin de rendre légales et légitimes les manifestations ainsi que les énormes sommes d'argent que les sports électroniques génèrent, notamment grâce à l'évolution des technologies. Pour rappel, les revenus mondiaux liés à l'e-Sport en 2017 furent estimés à 655.3 millions de dollars. En France, les bénéfices générés la même année par la pratique furent d'environ 26 millions de dollars. Soit une hausse de 4 millions par rapport à 2016, et l'on prévoit une nouvelle hausse d'environ 3 millions pour 2018(10). La France reste depuis quelques années le troisième pays européen par rapport aux revenus e-Sportif, derrière la Suède et l'Allemagne.

Ces chiffres astronomiques, pour une nouvelle discipline, sont témoins d'une grande implication de la part des différents acteurs du milieu des sports électroniques. Et pourquoi existe t-il autant d'investissement dans l'e-Sport de la part des grands éditeurs ? Benoît Clerc, le responsable jeux-vidéos de l'éditeur Bigben Interactive, avait donné une réponse honnête et transparente en 2016 au Videogame Economics Forum d'Angoulême, lorsqu'un journaliste du Monde l'interrogea sur le sujet : "On ne fait pas de l'e-Sport pour faire joli, mais pour améliorer le bénéfice opérationnel et transformer les joueurs en relais de communication. Cela permet aussi de maximiser les ventes sur la durée." L'objectif pour les éditeurs est donc logiquement de générer plus d'argent, mais en inscrivant cette fois leurs produits dans une démarche de long terme. Avant l'e-Sport, la grande majorité des jeux-vidéos à succès connaissaient d'importantes ventes à leurs sorties, avant qu'elles ne déclinent au fur et à mesure pour s'arrêter à jamais, ou presque. Le sport électronique change la donne puisque des jeux tels que League of Legends ou CounterStrike sont désormais les jeux-vidéos les plus joués dans le monde depuis maintenant au moins 6 ans. C'est donc une sorte de poule aux œufs d'or pour les éditeurs, les équipes et bien évidemment les sponsors. Le plus grand éditeur de jeux-vidéos en France, Ubisoft, s'est donc lui aussi lancé dans la course en créant trois jeux à destinée e-Sportive : "Rainbow Six Siege", "Ghost Recon Wildlands : Ghost War" et "For Honor". Sur Rainbow Six Siege, la compagnie à enregistrée une audience e-Sportive en hausse d'environ 300%

35

pour la finale 2018 de leur tournoi : le "Six Invitational", par rapport à la finale de 2017(11), preuve de la rentabilité de la création des jeux compétitifs.

De ce fait, le marché de l'eSports est rapidement devenu un espace très compétitif du point de vue commercial. Les équipes d'e-Sport, les ligues, les éditeurs, les organisateurs, les plateformes de contenu, les diffuseurs, les réseaux sociaux, ainsi que les clubs et agences de sport traditionnels cherchent tous à capitaliser sur la volonté des marques d'investir dans l'e-Sport. La situation du marché est très différente de celle d'il y a quelques années, les investissements de marques mondiales et locales progressant rapidement.

Ce n'est pas une bonne nouvelle pour tout le monde, car l'implication accrue des géants du sport et des médias traditionnels pourrait signifier que certains doivent se contenter de beaucoup moins. Il ne fait aucun doute que les objectifs de revenus des entreprises individuelles dans cet espace sont sous pression et les attentes des investisseurs sont élevées, quand années après années l'e-Sport tente de s'intégrer encore davantage dans notre société.

Néanmoins le marché de l'e-Sport est encore très loin d'être aussi prolifique en France que celui des jeux-vidéos à nature non compétitive. Sur notre territoire, les recettes atteignirent en 2017 la somme record de 4,3 Milliards d'euros. Le chiffre d'affaires est en hausse de 18 % par rapport à l'année 2016, qui était déjà historique avec 3,64 Milliards d'euros de gains. Et ces chiffres ne comprennent pas les recettes liées à l'e-Sport(12). En termes d'intégration, cela prouve que les jeux-vidéos traditionnels sont encore bien plus en vogue que les sports électroniques. Néanmoins il est important de préciser que la plupart des jeux e-Sports ont un modèle "Free-To-Play", ne nécessitant pas un achat d'entre 40 à 60 euros pour leur acquisition, contrairement à leur cousins. Ce qui explique forcément une gigantesque différence dans les recettes générées.

36

1.5 - La société française actuelle reconnait-elle donc comme légitime et acceptable la pratique e-Sportive ?

A

ujourd'hui, l'e-Sport en France est donc un phénomène bien connu chez les jeunes et dont les autres générations entendent également parler.

Cela s'explique par la couverture médiatique dont jouit la discipline et qui devient chaque année plus importante. Au début des années 2010, il arrivait parfois de lire un article d'un journal français sur une "grande" compétition d'e-Sport, afin de faire découvrir le phénomène. Mais en 2018, et depuis trois - quatre ans, la plupart des journaux sportifs, ou même traditionnels, tels que Le Monde ou Le Point, communiquent fréquemment sur l'e-Sport. Certains, tels que l'Équipe, ont même des pages dédiées à l'actualité e-Sportive. Cela va encore plus loin puisque désormais, certaines chaines de télé, en plus de relayer l'impact de certaines compétitions de manière plus fréquentes, ont même des émissions dédiées exclusivement à l'e-Sport. C'est le cas de Canal+ avec "L'e-Sport Club" et celui de BeIn avec "BeIn e-Sport". Ces émissions s'organisent sous forme de saison et ne sont donc pas encore diffusées tout au long de l'année, mais cela pourrait arriver rapidement. En Amérique, ESPN 1, une des chaînes de sport américaine des plus populaire, a diffusé récemment ses premiers tournois d'e-Sport. Et enfin, en France, Webedia a lancé début 2018, avec l'aide d'Orange, une chaîne dédiée exclusivement à l'e-Sport : ES1. Cette chaîne n'est pour le moment disponible que pour les abonnés Orange, mais l'e-Sport n'a pas fini de se développer, et plusieurs chaînes de ce type pourraient bientôt faire leur apparition, si l'audimat est suffisant. Ce qui, pour l'instant, ne semble pas être tout à fait le cas au vu des interruptions temporaires des programmes de Canal+ et BeIn par exemple.

Les médias permettent donc une meilleure couverture de la discipline et comme nous l'avons vu précédemment, le gouvernement tient à offrir un véritable statut aux joueurs professionnels en France, mais également à structurer et développer le domaine de l'e-Sport. D'un point de vue technique et légal, la discipline est donc acceptée et reconnue. Ces dernières années, des pas en avant sont faits régulièrement pour intégrer davantage les sports électroniques dans la culture du pays. Pour autant, l'e-Sport divise les français, qui ne sont pas tous prêts à reconnaître que la pratique puisse être intéressante et constructive, comme nous le verrons dans le deuxième

37

chapitre. Mais surtout, une statistique déjà évoquée lors de l'introduction s'impose : en 2016, seul 51% des français avaient entendu parler d'e-Sport.

En somme, les sports électroniques sont encore très méconnus du grand public, malgré tous les efforts réalisés par les différents acteurs du domaine.

Le but est maintenant d'essayer de comprendre, lors du deuxième chapitre, pourquoi la discipline est aussi peu connue des français, alors que le public des jeunes semble conquis. Ce dernier étant la génération qui fait les efforts pour faire progresser le domaine e-Sportif. D'ores et déjà, le gouvernement ne semble remis pas en cause, ayant réalisé les démarches adaptées. Nous constaterons donc à travers différentes statistiques et analyses qu'il existe plusieurs freins sociaux à une meilleure intégration des sports électroniques dans le pays. Puis, il sera temps de présenter une solution possible visant à faire découvrir l'e-Sport à ceux qui ne sont pas familiers avec le phénomène, ou qui n'en ont tout simplement jamais entendu parler.

Deux personnes jouant à FIFA 2017, un jeu-vidéo de football réalisé par EA Games et destiné à être compétitif.

38

Chapitre 2 Quels sont les freins relatifs à une meilleure acceptation de l'e-Sport en France ?

2.1 - Introduction à l'étude réalisée dans le cadre de ce mémoire

L'

objectif, à travers ce chapitre, est donc de réfléchir à comment mieux intégrer l'e-Sport dans le paysage culturel français. Il faudra pour cela commencer en exposant les différents freins au développement des sports électroniques dans le pays. Puis, une fois qu'ils seront identifiés, nous pourrons valider ou invalider les hypothèses suivantes : - L'intégration de l'e-Sport est un problème à caractère générationnel.

- L'e-Sport, de par son appellation uniquement, crée une analogie gênante avec le sport traditionnel et cela freine son acceptation.

- Les éditeurs des sports électroniques, en ciblant presque exclusivement les jeunes générations dans leur communication, sont des fautifs de la relative mauvaise intégration de la discipline.

39

Pour répondre à ces hypothèses, nous utiliserons, tout au long de ce chapitre, une démarche de recherche centrée sur l'expérience utilisateur (UX*). En effet j'ai, pour ce mémoire, réalisé un sondage (étude quantitative) afin de mieux comprendre le rapport des français à l'e-Sport.

Néanmoins, il me semble important de préciser que malencontreusement, j'ai négligé un point crucial lors de la distribution de ce sondage et ce dernier n'a eu en conséquence que partiellement les résultats escomptés. En effet, j'ai essentiellement demandé de répondre au sondage sur les réseaux sociaux suivants : Facebook, Reddit/r/France*, et LinkedIn. D'entrée cela biaise les résultats, les personnes répondant en ligne étant plus susceptibles d'apprécier les nouvelles technologies et étant donc plus à même de connaître l'e-Sport. La population consultée ainsi est également plus jeune de manière générale. Malgré le fait que j'ai également transmis le sondage à d'autres personnes en dehors de ces réseaux, je me suis rendu compte de mon erreur trop tard. Malgré les 292 réponses récoltées, les résultats ne sont pas un réel reflet de l'opinion des français sur les sports électroniques. Je préférerai donc parfois utiliser certains sondages réalisées par des organismes spécialisés afin d'utiliser des résultats représentatif. Néanmoins, mon sondage m'aidera tout de même à appuyer certains points de mon argumentation. Ce dernier est à trouver en annexe.

J'ai également interviewé de manière approfondie (étude qualitative) un cadre d'Alstom âgé de 55 ans : Rémi Grégoire, et un internaute actif du réseau Reddit, âgé de 34 ans : Hache_Gonville, pour mieux comprendre certaines statistiques, et recueillir des avis plus poussés. La totalité de ces interviews sont également à trouver en annexe.

"UX" ou "User eXperience" : (Expérience Utilisateur, en français) Représente le ressenti émotionnel d'un utilisateur face à une interface, un objet ou un service. Aujourd'hui, afin de réellement sortir des produits adaptés aux clients, on utilise souvent une démarche UX, qui permettra de mieux analyser les besoins des futurs utilisateurs.

"Reddit" : Reddit est un site web communautaire de partage de signets permettant aux utilisateurs de soumettre leurs liens et de voter pour les liens proposés par les autres utilisateurs. Il fut fondé en 2005 par Steve Huffman et Alexis Ohanian. Reddit est aujourd'hui un des plus importants réseaux sociaux au monde.

"Reddit/r/France" : Indique la sous-section du site Reddit où les discussions sont relatives à la France.

40

2.2 - L'intégration de l'e-Sport, un problème réellement générationnel ?

L

orsqu'il est question du rapport des différentes générations au digital, on distingue souvent en Occident trois groupes, représentants en fait trois générations différentes : - La "Génération X", selon la classification de William Stauss et Neil Howe, représente toute les personnes nées entre 1966 et 1976. Par extension, il est commun d'étendre jusqu'à 1980. La Génération X n'est pas née avec le numérique et a vu la croissance du digital s'établir lorsqu'elle était déjà relativement âgée. Le rapport avec la technologie digitale peut donc être très différent.

- Les "Millennials" , aussi appelés "Génération Y". Ils représentent en fait toutes les personnes nées entre 1980 et 2000. Ceux qui ont sont venus au monde à cette période peuvent aussi être appelés "Digital Natives" (les enfants du digital), puisqu'ils ont grandis avec le développement technologique et digital.

- La "Génération Z". Elle représente la jeunesse née à partir de l'an 2000. Elle est donc une nouvelle génération de Digital Natives et est également déjà bien plus versée dans le numérique que les Millennials.

Ces trois générations entretiennent donc des rapports aux nouvelles technologies très différents. La première est née sans, la deuxième est née avec, la troisième est née dedans. Cela dit, les Millennials et la Génération Z devraient partager le même intérêt pour le vidéoludique. Quant à la Génération X, dont Rémi Grégoire est issue, elle a tendance à n'éprouver qu'un intérêt limité pour les jeux-vidéos de manière générale. Lui même explique qu'il "a d'autres passions et hobbies, puisqu'il n'a jamais grandit avec les jeux-vidéos comme source de divertissement". La forte attraction des Générations Y et Z pour les jeux-vidéos est effectivement expliquée par le fait que beaucoup d'enfants ont eu accès à une console de jeu lorsqu'ils

41

étaient très jeunes et ont eu tendance à la privilégier au détriment d'autres découvertes.

Lorsque l'on rapporte ces faits aux sports électroniques, on s'attend donc à trouver des différences de chiffres entre les générations quant à l'intérêt porté à la discipline. Et à raison, puisque d'après une étude conduite en 2014 par l'organisme Newzoo, 59% des spectateurs et joueurs e-Sport se situent dans la tranche d'âge 21 - 35 ans. Celle des Millennials. Si l'on prend le jeu e-Sport le plus joué au monde, League of Legends, une infographie de l'éditeur Riot Games nous indique qu'en 2012, 85% de ses joueurs sont âgés de 16 à 30 ans(1). Même si les chiffres ont dû un peu évoluer depuis, le changement n'a pas pu être drastique. Cela nous donne une bonne indication de la tranche d'âge la plus active sur les jeux-vidéo à nature compétitive, puisque 30 millions de compte sont actifs chaque mois sur League of Legends.

Au regard de ces chiffres, il est donc compliqué de dire que les personnes nées avant 1980 sont aussi « accrocs" d'e-Sport que les Millennials et que les jeunes nés après 2000. Dans mon sondage, sur les 244 réponse recueillies auprès des individus âgés de moins de 35 ans, 99% avaient entendus parler de l'e-Sport. Même si ce n'est pas totalement représentatif, on peut tout de même confronter cette donnée au fait qu'en 2016 seulement 49% de la population française avait entendu parler de l'e-Sport. Ce pourcentage a peut être diminué avec le temps, mais peut néanmoins signifier par déduction que la Génération X doit être la génération comprenant le plus de personne ne connaissant pas l'e-Sport.

Alors oui, un des freins à une meilleure intégration de l'e-Sport en France et de manière plus large, dans le monde, est d'ordre générationnel, puisque les personnes nées avant 1980 semblent tout simplement moins connaître les sports électroniques. Et c'est précisément un frein car seulement 11% des cadres en entreprises en 2016, en France, avaient moins de 30 ans(2).

Le reste des cadres faisant donc davantage partie de la Génération X. Or ce sont souvent les cadres et chefs d'entreprises qui autorisent les projets et si les éditeurs d'e-Sports souhaitent promouvoir leur discipline à travers des événements, il faudra avoir l'approbation de ces personnes. Mieux vaut donc qu'ils soient intéressés par le phénomène e-Sportif. Mais ce problème semble temporaire puisque les Digital Natives, aimant en vaste majorité les jeux-vidéos et étant en grande partie intéressés par l'e-Sport, seront à leur

42

tour, un jour, une des générations les plus anciennes, sans doute encore plus ouverte aux projets liés aux nouvelles technologies.

Grand-mère découvant la Wii, console de Nintendo, avec son mari, sa fille et son petit fils.

43

2.3 - Un soucis de mentalité lié à la culture ?

A

vec la différence de connaissance et d'intérêt porté par les générations nées avant 1980 au domaine du vidéoludique vient peut être également un soucis de mentalité. À savoir : des adultes ayant des avis négatifs et dépassés sur le divertissement apporté par les jeux-vidéos et donc ayant surement également une mauvaise opinion sur l'e-Sport. Historiquement en effet, la société française s'est pendant longtemps vu dire que les jeux-vidéos (lorsqu'ils commençaient à devenir de plus en plus importants) rendaient obèses, violents, enjendraient des troubles de la personnalité… Et peu d'arguments positifs étaient avancés pour contrebalancer ces affirmations. À l'occasion de tragédies diverses à travers le monde, aux alentours des années 2000, il était alors courant de pointer du doigt la "mauvaise influence" des jeux-vidéos(3). Ce fait est illustré par un avis que j'ai eu dans mon sondage. À la question "Que pensez vous de la pratique e-Sportive ?", la plupart des réponses furent constructives et souvent positives, mais une énonça ceci : "J'ai une très mauvaise opinion sur l'e-Sport. Cela cause de l'enfermement et des troubles de la personnalité." Sans donner plus d'explication. La personne ayant répondu ainsi est une des dix seules à avoir plus de 50 ans ayant répondu à mon sondage. Et aucun avis similaires ne se trouve chez les réponses données de ceux âgés de moins de 50 ans. Les personnes appartenant à la Génération X et celles antérieures à celle-ci ont donc été influencés par une couverture médiatique bien plus négative concernant les jeux-vidéos que les Millennials. Malheureusement, aujourd'hui encore, certains journalistes ou présentateurs d'émissions de télévision montrent une certaine fermeture d'esprit lorsqu'on leur parle des sports électroniques.

Mais nous pouvons penser que cela n'affecte pas autant le jugement des nouvelles générations.

Le plus gros soucis lié à la culture, notamment en France, reste l'analogie entre l'e-Sport et le sport, lié aux noms des disciplines. En effet, les gens débattent de manière éternelle en se demandant si l'e-Sport peut être considéré comme un sport. Voici pour rappel la définition du mot Sport, par le dictionnaire d'Oxford : "Le sport est une activité impliquant un effort physique et des compétences, et dans laquelle un individu ou une équipe sont en compétition avec une autre personne ou équipe, pour le divertissement."

44

Si l'on reprend la définition de l'e-Sport donnée en introduction du mémoire, on peut retrouver également quelques similitudes. Mais le débat devrait être futile. Les deux disciplines sont très différentes par le simple fait que les sports électroniques nécessitent un ordinateur (au sens large : consoles, smartphones…). Dès lors, on ne devrait pas les comparer, mais plutôt les considérer comme deux disciplines distinctes. Dans l'intitulé "Sport électroniques", le mot "Sport" réfère simplement à l'aspect compétitif.

Peut être que le mot "Sport" dans "e-Sport" peut poser un problème de définition. Mais lorsqu'on considère qu'en 2016, 51% des français ne pensent pas que l'e-Sport est un sport et que pourtant de plus en plus de personnes s'intéressent à la pratique, cela ne semble pas poser de problème, en tout cas pour l'acceptation des sports électroniques. Le débat, cela dit, ne trouvera peut être pas une réponse tout de suite en France. Mais il faut rappeler que dans certains pays du monde, l'e-Sport est bel et bien reconnu comme un sport, comme en Corée du Sud.

2.4 - Une erreur de la part des éditeurs ?

A

u vu des résultats des deux premières hypothèses, on peut donc en venir à penser que c'est la faute des éditeurs, via leur communication quasiment exclusive à l'attention des jeunes générations, si une meilleure acceptation de l'e-Sport est aujourd'hui compliquée. En fait, depuis la naissance et le développement des jeux-vidéos, la quasi-totalité des publicités vendant les jeux, lorsqu'elles incluaient une figure humaine, montraient des adolescents ou des jeunes adultes(4). À l'époque, il y avait en effet pour les éditeurs la problématique de séduire très rapidement un public lorsque la croissance dans le secteur du jeu-vidéo pouvait être faite, afin de créer un cercle vertueux de vente. Le cœur de cible choisit fut donc les jeunes en recherche de passion lors de leur adolescence, plutôt que les adultes qui avaient déjà leur hobby et leur travail, et donc moins de temps à accorder à une console. L'histoire se répète donc avec les sports électroniques. Lorsque le phénomène e-Sport a commencé à se manifester, il fallait également

45

déterminer un cœur de cible rapidement, pour ne pas rater le coche. Le choix fut vite réalisé : séduire les adolescent et jeunes adultes déjà conquis par les jeux-vidéos traditionnels. Il était bien plus facile pour les éditeurs de réaliser cette opération plutôt que de chercher un tout nouveau public qui, comme on a pu le voir précédemment, avait statistiquement moins de chance d'être intéressé. Nous trouvant toujours dans une forte phase de croissance de l'e-Sport et des jeux-vidéos non compétitifs, il est tout à fait compréhensible que les éditeurs choisissent de communiquer essentiellement sur les plateformes digitales utilisées en majorité par les Millennials et Digitales Natives, à savoir les forums et les différents réseaux sociaux. La quasi-totalité des jeunes âgés de moins de 18 ans jouant sur console, smartphone ou ordinateur, il apparait plus rentable de communiquer vers ces jeunes générations dans l'optique d'un accroissement des ventes. Dans mon sondage en effet, 97% des Digital Natives (257 sur 266) déclarent aimer les jeux-vidéos. À l'inverse sur les 26 personnes de plus de 35 ans m'ayant répondu, 8 n'aiment pas ou détestent les jeux-vidéos. La stratégie de communication des éditeurs pour vendre leurs jeux parait donc être la bonne pour générer des bénéfices. Mais cela restreint l'intégration des sports électroniques.

Maintenant, faire des publicités avec des adultes de plus de 50 ans (pour qu'il n'y ai pas de confusion sur qui est la cible) pourrait réellement convaincre les générations antérieures à la Génération Y que l'e-Sport peut être une discipline intéressante à regarder, jouer et dans laquelle s'investir. Le jeune public étant d'ores et déjà conquis, si les éditeurs souhaitent intégrer encore davantage les jeux-vidéos dans la société, communiquer vers les adultes nés avant 1980 semble être l'action logique à réaliser. D'après les avis que j'ai récolté auprès des 26 personnes de plus de 35 ans dans le sondage, seules 10 d'entre elles semblent éprouver un réel intérêt pour les sports électroniques, soit le pourcentage le plus bas des trois catégories de générations considérées dans ce mémoire. Et lorsqu'il est question d'acceptation de la discipline e-Sportive sur le territoire, nous avons vu que cela peut maintenant poser problème, ces personnes était souvent les décisionnaires pouvant mettre en place des projets conséquents visant à développer l'e-Sport. À l'origine donc, les éditeurs n'ont pas fait une erreur en axant leur communication sur les nouvelles générations. Néanmoins, à l'heure actuelle, il serait sûrement pertinent de la part de ces derniers de faire plus d'efforts pour intéresser les représentants de la Génération X.

46

2.5 - De manière générale dans les jeux-vidéos, le côté "fun" est préféré à l'aspect compétitif

D

ans le premier chapitre, d'autres chiffres nous laissent à penser qu'il existerait une autre raison à la limite de l'intégration de l'e-Sport en France. En effet nous avons vu que les éditeurs produisaient bien plus de bénéfices en France avec la vente de jeux-vidéo non compétitifs qu'avec l'e-Sport : plus de 4,3 Milliards d'euros contre 22,4 millions d'euros (26 millions de dollars). Même si cela s'explique, entre autres, par le fait que les jeux e-Sports ne nécessitent pas forcément un achat et que les évènements e-Sportifs nécessitent beaucoup de fonds, il reste malgré tout une différence gigantesque. Différence qui peut être expliquée par ce que recherchent les joueurs eux-mêmes.

Un sondage réalisé par Jeux-Vidéo.com, site web référence dans le domaine du vidéoludique en France, posa début 2018 la question suivante(5) : "Quels types de jeu préférez-vous ?". Sur 1065 réponses, les joueurs déclarent : - À 57% les jeux proposant une expérience solitaire. À savoir des jeux non multi-joueurs.

- À 5% seulement préférer les jeux multi-joueurs compétitifs, soit la pratique e-Sportive.

- À 25% ne pas avoir de préférences.

- À 11% préférer les expériences multi-joueurs sans être en ligne.

- 2% préféraient ne pas se prononcer.

Le constat est flagrant. Le coeur de cible des éditeurs, à savoir les jeunes aimant les jeux-vidéos, préfèrent avoir une expérience de jeu solitaire plutôt que de pratiquer des jeux de types compétitifs. Ce qui peut s'expliquer de plusieurs manières.

47

Il faut comprendre que jouer en "solo", de manière solitaire, sans personne avec qui partager l'expérience de jeu, peut être une expérience bien plus amusante pour la plupart des gens. En effet, la difficulté peut être réglable et il est possible de bien se débrouiller sur le jeu facilement et donc passer du bon temps. À l'inverse, les jeux e-Sports, sont, par définition, compétitifs.

Et de ce fait, pour s'amuser, il est préférable de ne pas se faire écraser par son opposant. Or cela est possible seulement si on se hisse à son niveau, ce qui demande des dizaines voire des centaines d'heures d'apprentissage et de pratique. Plus le jeu e-Sportif est complexe, plus de temps le joueur devra s'investir pour tenter d'être efficace et donc pour profiter de manière décente.

Malheureusement, la plupart des jeux-vidéos e-Sportifs, tels que League of Legends, Dota 2 ou Overwatch ont des règles complexes, ou au moins beaucoup de nuances qu'il faut comprendre pour espérer s'amuser sans être frustré en permanence. Sans parler des patchs (mises à jour du jeu de la part de l'éditeur, afin d'ajouter, soustraire, ou adapter du contenu), qui changent nombre de mécaniques des jeux, à fréquence assez variables en fonction des besoins des éditeurs. Ainsi, peut-être que des sports électroniques plus simples à prendre en main mais tout autant attractifs pourraient décider un plus grand nombre de joueurs à jouer de manière compétitive.

Il faudra néanmoins trouver un juste milieu entre les aspects "fun" et "compétitifs", de manière à ne pas délaisser ceux qui préfèrent la compétition.

Car dans toutes les générations, chacun recherche quelque chose de différent dans le vidéoludique. Rémi Grégoire avoue qu'il est "un compétiteur et est donc potentiellement bien plus intéressé par l'e-Sport que par les jeux-vidéos traditionnels". À l'inverse, l'internaute de Reddit, Hache_Goncille dit qu'il "aime jouer", mais qu'il "ne voit aucun intérêt à l'aspect compétitif"

2.6 - Comment une meilleure intégration de l'e-Sport serait donc possible en France ?

G

râce à notre approche UX du problème initial, il est possible de valider et invalider les hypothèses initiales. Pour résumer :

48

- L'acceptation de l'e-Sport par la société française est en effet lié au fait que les différentes générations entretiennent un rapport différent au digital et aux nouvelles technologies. Les jeunes générations étant plus attirées par ces secteurs. > L'hypothèse est validée - L'analogie entre les termes "Sport" et "e-Sport" peut être gênante pour certains, mais cela ne semble pas entraver l'intégration des sports électroniques dans le paysage culturel français. > L'hypothèse est invalidée - Oui, les éditeurs de jeux compétitifs ne communiquent pas, en France, vers les personnes nées avant les années 1980 et cela se ressent forcément lorsqu'on constate qui connaît ou ne connaît pas l'e-Sport. Ils ont néanmoins raison de le faire lors de la phase de croissance de l'e-Sport. Mais un élargissement de la cible pourrait dorénavant être bénéfique. > L'hypothèse est validée

Nous avons également constaté que, de manière générale, la cible des éditeurs de sport électroniques, préfère encore en majorité les jeux-vidéos proposant une expérience solitaire à l'e-Sport. Sachant tout ceci, on peut donc suggérer que ce qu'il faut est une réelle éducation de l'e-Sport. Et cibler les personnes qui connaissent le moins la discipline : la Génération X. Puisque les nouvelles technologies peuvent être difficiles à assimiler pour les personnes qui ne sont pas nées avec ou dedans, elles demandent un apprentissage. Il en va de même pour l'e-Sport. Il faut donc étendre la cible de la communication e-Sportive au delà des Digital Natives et rendre cette dernière suffisamment attrayante.

Si la cible est bel et bien les personnes nées avant les années 1980, soit non-Digital Natives, il faut également un cœur de cible. Ce cœur de cible sera donc les cadres, les chefs d'entreprises… En bref, les personnes pouvant

49

prendre les décisions susceptibles de mieux intégrer l'e-Sport en France, à travers des évènements ou via leur propre communication. Pour justifier cette sélection, le meilleur exemple reste la non intégration des sports électroniques aux Jeux Olympiques de Paris, en 2024. Alors que nombre d'athlètes supportent la démarche, le CIO a décidé de ne pas intégrer l'e-Sport à la prochaine édition des Jeux. Un premier sommet historique a eu lieu en juillet 2018, rassemblant le CIO et les représentants de l'association France e-Sports, représentée par Stéphan Euthine. Si le sommet s'est bien déroulé, il était surtout question de faire découvrir l'univers des sports électroniques. Car Stéphan Euthine l'avoue : "On s'est rendu compte qu'il y avait beaucoup d'a priori ou de méconnaissance d'un secteur comme de l'autre.". Ce n'est en soi pas un problème si tout le monde n'aime pas l'eSport, mais si les décisionnaires en entreprise, à défaut d'aimer, ne cherchent pas à accepter l'e-Sport, alors il faudra attendre que la génération des Digitale Natives accède à son tour aux postes de cadre pour avoir du changement sur la scène e-sportive. D'où le choix du cœur de cible.

Peut-on du coup intéresser ces personnes aux sports électroniques ? Dans mon sondage, sur les 14 personnes de plus de 35 ans non-intéressées par l'e-Sport, 29% (4) d'entre elles pensent que leur opinion peut changer si on leur fait découvrir correctement. Avec le faible nombre de réponse du sondage, cela ne paraît, certes, pas beaucoup, mais s'il y avait une possibilité d'intéresser à l'échelle du pays 29% des plus de 35 ans qui ne sont pas déjà attirés par la discipline, alors cela aurait un gigantesque impact sur l'acceptation des sports électroniques en France. En tout cas, ce sondage prouve au moins que la société française n'est pas totalement fermée. La difficulté étant de faire découvrir l'e-Sport de la bonne manière. Il y a déjà eu des tentatives pour faire des démonstrations d'e-Sport dans des évènement conséquents, comme aux Jeux Olympiques de Pyeonchang (Corée du Sud) début 2018.

Un tournoi de Starcraft 2 avait été organisé la veille du coup d'envoi des Jeux, grâce à un partenariat entre Intel - alors organisateur - et le Comité International Olympique. C'est bien sûr un grand pas en avant. Mais est-ce suffisant ? Lorsque l'on diffuse ces évènements, les gens peuvent bien évidemment "zapper", ils ne sont pas obligés de regarder, même si cela pourrait être très éducatif. Il faut donc continuer l'éducation e-Sportive et communiquer sur la discipline auprès des générations antérieures aux Millennials et aux Digital Natives. En essayant une approche nouvelle. Nous allons le voir en mettant en forme l'analyse UX dans la deuxième partie.

50

Des joueurs en finale du championnat EVO (Evolution Championship Series) à Las Vegas, le 15 Juillet 2017.

Les supporters de l'e-Sport restent en immense majorité des personnes de moins de 35 ans, soit des Digital Natives.

(Hypothèse 1)

51

52

Joueur de Counter-Strike - Global Offensive, appartenant à l'équipe G2 e-Sports, arrivant sur la scène lors d'un tournoi nommé Dreamhack.

Que le monde considère que l'e-Sport est un sport ou non n'a finalement que peu d'importance pour le public ou les joueurs.

(Hypothèse 2)

53

54

Vidéo de promotion pour League of Legends, réalisée par Riot Games et sortie en 2014, à l'occasion du coup d'envoi des championnats du monde.

Pour sa première vidéo mettant en scène des joueurs et non plus des personnages du jeu, Riot Games décide d'exclusivement montrer des adolescents, son coeur de cible.

(Hypothèse 3)

55

56

Jeune femme jouant seule à un jeu-vidéo sur ordinateur.

Aujourd'hui, les personnes aimant les jeux-vidéos préfèrent encore jouer de manière non-compétitive. L'e-Sport, même auprès des jeunes, a encore beaucoup à prouver.

(Constat complémentaire aux hypothèses pré-établies)

57

58

Part "Doming0" et "Tweekz", deux pionniers de la démocratisation de l'e-Sport en France, réalisant un shooting photo pour promouvoir le lancement de "BeIN e-Sport", émission dans laquelle ils seront les animateurs.

59

L

ie 2

a deuxième partie de ce mémoire est consacrée à la solution apportée à la problématique. Je vais maintenant vous présenter le projet que j'ai imaginé pour intégrer davantage l'e-Sport en France, en prenant compte de tout ce qui a pu être montré et expliqué jusqu'à présent. Celui ci prendra la forme d'une découverte immersive des sports électroniques. Dans un premier chapitre, le projet sera présenté de manière détaillé et ancré dans la réalité., grâce à une mise en forme des résultats obtenus lors de l'analyse UX. Puis, j'effectuerai une analyse des forces et des faiblesses du projet, afin de me préparer à toutes les éventualités si il venait à voir le jour.

60

Chapitre 1 Un projet pour une meilleure acceptation de la discipline e-Sportive en France

1.1 - Présentation du projet : faire venir l'e-Sport aux gens 1.1.a - On sait désormais ce qu'il faut faire et ne pas faire pour aboutir à un projet réussi

M

aintenant que le sujet a été posé et que les problèmes qui y sont liés ont été analysés, il y a suffisamment de données pour pouvoir concevoir un projet intéressant pour notre cible. La solution proposée doit donc intégrer des éléments indispensables pour sa réussite (éléments que nous avons déterminés tout au long de ce mémoire) et doit également exclure certains concepts, qui conduiraient le projet à son échec.

Sous forme de listing, voici donc ce qu'il faut intégrer et ce qu'il faut rejeter dans le projet proposé : À intégrer : - Transmission d'une réelle éducation e-Sportive, qui puisse également intéresser le business des entreprises (une présentation claire des secteurs économiques et politiques relatifs aux sports électroniques).

- Réalisation d'une présentation intéressante et dynamique, ainsi qu'une

61

adaptation du vocabulaire pour que des générations moins familières avec le domaine du digital puisse comprendre aisément (vulgarisation du sujet).

- Création d'un concept interactif pour tous les types de profils susceptibles d'être présents (compétiteurs / non compétiteurs / fan du digital / non intéressés par le digital, etc…). À rejeter : - Intégration de démonstrations sur des jeux trop complexes pour la prise en main des novices des jeux e-Sports (réfléchir à la sélection d'un jeu e-Sportif simple et donc "fun" peu importe le niveau).

- Formalisation excessive dans la présentation du sport électronique et pouvant ennuyer les employés qui font déjà l'effort de nous écouter (puisque ce n'est potentiellement pas un sujet qu'ils écouteraient normalement, la partie où ils jouent les intéressant davantage).

Aussi longtemps que ce projet respecte ce listing, alors il devrait pouvoir accrocher suffisamment à la cible pour au moins l'intéresser. Voyons donc maintenant quelle serait la forme globale de la solution.

1.1.b - Présentation du projet : idée générale

L

a volonté de mon projet est de faire rendre compte aux gens ce qu'est réellement l'expérience e-Sport car, comme j'ai pu l'écrire précédemment, il est compliqué de se rendre compte de ce que sont les sports électroniques tant qu'on n'a pas vécu un véritable événement e-Sportif. Lorsqu'il est question des personnes nées avant les années 1980, il ne faut pas nécessairement attendre que les gens viennent à l'e-Sport d'eux même. Car ce n'est pas forcément quelque chose de naturel pour eux. Autant donc les aider un peu.

Si les gens ne viennent pas à l'e-Sport, l'e-Sport ira à eux.

C'est pour cela que la forme du projet sera la suivante : un "Truck e-Sportif."

62

L'idée est de pouvoir avoir un lieu de découverte où vivre l'expérience complète. Mais dans le même temps avoir la possibilité d'être mobile pour faire vivre l'immersion à un maximum de personne. Pour parvenir à ses fins, le projet reposera sur l'achat d'un camion de 23m2 et l'emménagement de ce dernier pour créer une véritable scène e-Sport, avec tous ses composants.

Le cœur de cible est pour rappel la classe décisionnaire des entreprises, moins susceptibles de connaître l'e-Sport (pour les raisons citées en première partie) et pourtant cruciale lorsqu'il s'agit de donner le feu vert pour l'avènement de nouveaux projets. Qui pourraient, qui sait, peut-être servir à l'intégration des sports électroniques en France. "L'e-Sport Truck" (le nom du concept) interviendrait donc auprès des entreprises sous sollicitations de ces dernières, à l'occasion, par exemple, de séminaires organisés. En effet, de plus en plus, les entreprises décident de se calquer sur le modèle des Start-Ups et organisent davantage d'activités de groupes. Cette dynamique s'inscrit dans le cadre d'une volonté de modernisme des entreprises, qui souhaitent rester dans l'ère du temps. Les séminaires permettent d'alterner le travail et des activités où les employés peuvent renforcer les liens qui existent entre eux.

Souvent, les patrons d'entreprises optent pour des activités de groupe qui ne sont pas vécues tous les jours, tels que le kart, le paintball, la randonnée, le surf... Alors, à l'ère du numérique, pourquoi ne pas jouer une petite partie de jeu-vidéo relativement compétitive ?

63

Personne jouant à un FPS sur son lieu de travail. Aujourd'hui, il est de plus en plus courant que certains employés fassent une partie de jeu-vidéo durant leur pauses.

64

1.1.c - Personas

U

n persona est, dans le domaine du marketing, un personnage totalement imaginaire représentant un groupe ou segment cible dans le cadre du développement d’un nouveau produit ou service ou d’une activité prise dans sa globalité. Je propose ici deux personas afin de synthétiser le cœur de cible du projet.

Persona numéro 1 : Marc

Ici Marc est la définition du cœur de cible du projet, à savoir un décisionnaire issu de la Génération Y. Ce dernier est une véritable force de proposition au sein de son entreprise et si on lui fait découvrir un nouveau domaine du digital, il sera surement ravi de pouvoir l’intégrer dans les projets qu’il proposera à son entreprise.

65

Persona numéro 2 : Catherine

Catherine est également une des cibles que l'e-Sport Truck souhaite toucher, à savoir une personne influente dans sa société. Cette dernière souhaiterait découvrir les domaines du digital pour davantage comprendre la passion de nombre de ses jeunes collègues.

66

1.1.d - Customer Profile

L

e Customer Profile (Profil du Client), d'après les méthodes dites de Design Thinking, sert à mettre en forme les résultats des analyses UX et à représenter les besoins d’un client type, faisant partie du cœur de cible du projet, de manière détaillée. Si le Persona décrit un exemple de cible, le Customer Profil décrit le client type selon trois axes, ci-dessous en gras.

Persona numéro 1 : Marc

Le client type est une personne qui souhaite réellement découvrir les domaines du digital.

Néanmoins, lorsqu'on se projette, on constate que certains points peuvent freiner le client à appeler l'e-Sport Truck. Il faut donc faire attentions à ces risques lors du développement du concept.

67

1.1.e - Concept Card

L

a Concept Card décrit de manière détaillée et structurée toutes les spécificités du projet, pour répondre au problème constaté précedemment : les français ne connaissent pas assez l'e-Sport. Le graphique divise les valeurs de la proposition selon trois axes, ci-dessous en gras, afin de vérifier que la solution est en adéquation pour le problème de la cible.

Mis à coté du Customer Profile, la Concept Card présente bien tous les atouts nécessaires pour apporter une réponse efficace au problème de la cible.

68

1.1.f - Présentation du projet : détails de "l'e-Sport Truck"

L

es interventions de l'e-Sport Truck se feraient donc en deux temps, qui vont être détaillés ci-dessous :

Premier temps (partie éducative, dans l'ordre chronologique) : Présentation, dans l'entreprise, de l'e-Sport, comprenant : - Un historique de la discipline.

- Une énonciation des valeurs et des points positifs des sports électroniques, ainsi qu'une présentation des opportunités économique du phénomène.

- Un visionnage rapide des actions historiques des plus grandes stars e-Sportives pour créer auprès des employés la volonté de reproduire ces actes dans la phase de jeu.

Deuxième temps (période de jeu et d'expérimentation) : L'idée de cette partie est de créer une expérience immersive et interactive à tous niveaux, en faisant s'affronter en un contre un les différents employés volontaires et en proposant aux autres de regarder les matchs. C'est le cœur du projet et le moment où il faut vraiment se montrer convaincant. Car même si les employés auront eu une introduction à ce qu'est l'e-Sport, il faudra alors qu'ils le vivent pour réellement comprendre la discipline. L'idée de ce second temps est donc de créer une expérience immersive et interactive complète.

Le plan du camion fourni en annexe permettra de mieux comprendre ce qui va être présenté dans cette sous-partie.

Il faut donc, avec l'e-Sport Truck, donner un aperçu de tous les éléments que l'on retrouve d'habitude lors des grands évènements e-Sportifs. Pour les acteurs comme pour les spectateurs. Il faut en effet partir du principe que tous les employés ne joueront pas. Tous ne partageant pas le même désir compétitif. Voici donc ce qui se passera : les employés souhaitant s'affronter

69

s'inscriront sur une liste, à tout moment (même lorsque les matchs auront déjà commencé car, après tout, tout le monde peut changer d'avis). Après avoir formé des paires au hasard, les deux premiers compétiteurs entreront donc dans le camion, prendront place sur scène et, après un petit briefing sur les contrôles du jeu, s'affronteront dans une partie de 5 minutes. Les futurs compétiteurs ainsi que les employés ne désirant pas jouer s'assiéront soit dans les places disponibles dans le camion (à condition d'accepter d'applaudir les actions des joueurs et donner de la voix pour ces derniers pour mettre dans l'ambiance), soit en dehors, sur des chaises disposées en plein air, afin de pouvoir suivre les matchs sur un écran géant accroché sur le côté du camion. Une camionnette accompagnera l'e-Sport Truck pour fournir des sandwichs et des boissons aux spectateurs. Ces derniers, via une petite application, pourront d'ailleurs, pour ne pas rester inactifs, pronostiquer quel sera le vainqueur de chaque match. Celui qui, à la fin de l'intervention, aura le plus de pronostiques corrects, gagnera un "goodies"* de l'e-Sport Truck. Les joueurs, dans le camion, auront quant à eux la chance de s'affronter pour un autre goodies et expérimenteront aussi le fait de jouer...

Tout en étant commenté (même s'ils n'entendront que très peu à cause des casques insonorisant sur leurs oreilles). En effet, un des aspects qui rend l'e-Sport si attractif à regarder est la présence de commentateurs professionnels, expliquant au public ce qui se passe tout au long de la partie et créant des émotions lorsque l'action se déroule. Cela rend également le spectacle plus bien intéressant pour ceux qui regardent le match sur l'écran. À la fin du match, chaque joueur aura le droit à une interview commune d'une minute avec son adversaire, afin de partager leurs expériences et raconter comment ils ont vécu l'immersion. Si les employés sont d'accord avec le fait d'être enregistrés, les meilleures interviews pourront servir de support de communication sur le site web de l'e-Sport Truck, pour peu qu'elles "vendent" le projet suffisamment bien. Ainsi, chacun peut vivre à sa façon une expérience très proche de ce que vivent ou les joueurs, ou les spectateurs, lors des évènements e-Sportifs.

Par rapport au jeu sur lesquels s'affronteront les joueurs, ce sera donc Rocket League, le jeu de l'éditeur Psyonix. Ce jeu est parfait pour une première expérience e-Sportive dans le sens où il ne nécessite qu'un très faible apprentissage pour pouvoir s'amuser avec, tout en jouant pour gagner. Rocket League est donc un excellent compromis entre les aspects "fun" et "compétitifs".

Le "gameplay"* du jeu est simple : Rocket League est un mélange de jeu de "Goodies" : Objets - Accessoires en rapport avec un concept.

"Gameplay" : Jouabilité d'un jeu. Ensemble de ses règles et de ses contrôles.

70

voiture et de jeu de football. Par équipe ou en solitaire, le joueur contrôle un véhicule et peut ainsi frapper dans un ballon, avec pour objectif de marquer dans le but adverse. Le joueur possède notamment un "boost" permettant d'accélérer ou de voler dans les airs de façon temporaire, de faire des sauts pour réceptionner ou frapper la balle lorsqu'elle est en l'air, ainsi que des tonneaux sur le côté pour tirer dans toutes les directions. Si le jeu peut être très long à maitriser (en effet certains mouvements demandent des heures et des heures d'entrainement), il n'en reste pas moins extrémement fun dès la première prise en main. De ce fait, peu importe le niveau sur le jeu des participants, si les deux adversaires s'affrontent sur Rocket League sans n'y avoir jamais joué, alors l'amusement et la compétitivité sont garantis.

Rocket League, jeu développé en 2015 par l'éditeur Psyonix En plus d'être très joué, le jeu est disponible sur la plupart des consoles.

71

72

1.1.g - User Journey

T

oujours selon les méthodes de Design Thinking, un User Journey (Parcours Utilisateur) est une visualisation du processus qu’une personne doit suivre pour atteindre un objectif lié à un projet ou à un produit. Elle sert à comprendre et à synthétiser les besoins des clients, ainsi que les moment du parcours où certains points rendent l’expérience d'acquisition négative. Nous allons voir comment réagis Marc avec son entreprise lorsqu’on lui confie un projet en rapport avec le digital. Dans un premier schéma, nous analyserons l’expérience de Marc lorsqu’il ne fait pas appel à l’e-Sport Truck, puis nous comparerons ce parcours à un deuxième schéma, représentant l’expérience de Marc lorsqu’il appelle l’e-Sport Truck.

User Journey sans la solution de l'e-Sport Truck

73

User Journey avec la solution de l'e-Sport Truck

Grâce à la solution apportée par l'e-Sport Truck, l'User Journey de Marc devient bien plus positif sur la fin du parcours. En effet, ce dernier sera, après une intervention de l'e-Sport Truck, bien plus a même de s'exprimer dans des projets digitaux, grâce à un intérêt développé. Par extension, les deux premiers points du parcours seraient également être des expériences positives par la suite, si le schéma devait être reprit à zéro.

74

1.1.h - Expérience visée dans le stand présenté à e-Artsup en décembre 2018 Ce projet de l'e-Sport Truck, dans une démarche de concrétisation, sera présentée à e-Artsup en décembre 2018, sous forme de stand. L'objectif de ce stand est de faire découvrir à un jury la solution apportée à ma problématique et de dévoiler l'ensemble du travail à un public qui n'en a peut être jamais entendu parler. Ce travail de présentation physique est en fait un condensé de mon mémoire. Ainsi faudra-t-il arriver à faire vivre la même expérience aux personnes qui viendront visiter le stand qu'à la cible projeté dans ces dernières pages. L'expérience visée dans le stand est donc la suivante : Faire confronter en un contre un les visiteurs du stand sur Rocket League, dans une pseudo-scène e-Sportive - tout en leur faisant remporter un goodies que je réaliserai - et en diffusant le match sur un écran accroché aux murs du stand. Aussi, des applaudissements, bruits de salles variés et commentaires génériques seraient enregistrés au préalable par des commentateurs amateurs et redistribués pendant les parties dans les casques que porteront les joueurs, de manière à réellement faire vivre une expérience e-Sportive complète. Via des lumières aux couleurs du projet et des sports électroniques de manière générale, il sera également possible de se projeter dans l'ambiance d'une véritable scène e-Sportive.

Nous retrouverions donc parfaitement l'immersion que l'on vivrait lors d'une partie jouée dans l'e-Sport Truck.

Cette phase de jeu sera bien entendu la véritable expérience immersive, mais je souhaiterait également représenter la première phase de l'intervention de l'e-Sport Truck (la découverte de la discipline), via un petit questionnaire interactif, sous forme de quizz. Ainsi, même si certais visiteurs ne souhaitent pas jouer à Rocket League, il leur sera possible d'interagir avec le stand pour découvrir les sports électroniques.

Aussi, le concept sera présenté à travers un site internet, une application mobile et une simulation 3D du camion emmenagé. De cette manière, les visiteurs auront une parfaite idée d'à quoi ressemblerait le projet. Bien sur, chaque visiteur aura la possibilité de repartir avec une carte de visite, affiche ou flyer du projet de l'e-Sport Truck.

75

Un affrontement en un contre un dans le stand, avec un public naturel, serait la meilleure manière de faire dÊcouvrir l'e-Sport aux visiteurs.

76

1.2 - Ancrer le projet dans la réalité 1.2.a - Rétroplanning du projet Afin d'ancrer ce projet dans la réalité, il est important de se projeter en anticipant l'investissement nécessaire que ce dernier demandera. Pour cela il est dans un premier temps essentiel de réfléchir au temps qu'il faudra pour monter le projet sur pied. Puis nous parlerons du budget. Nous devons donc décomposer le projet et voir quelles seront les parties qui demanderont un investissement de temps conséquent et décider dans quel ordre réaliser les différentes étapes.

Pour commencer, il faudra continuer à travailler à la conception du projet jusqu'à janvier 2019 pour réfléchir à absolument toutes les éventualités liés au projet. Puis, afin de faire connaître le projet avant même qu'il ne soit sortit et pour créer un intérêt en anticipation, l'application mobile et le site internet du projet, tous deux faisant découvrir l'e-Sport Truck avec ses valeurs et ses objectifs, seraient conçus et développés en même temps. Il faudra alors réfléchir à un stand mobile pour présenter le concept à des salons tels que la Paris Games Week. Ce dernier pourra ressembler au stand présenté à e-Artsup. Enfin, les goodies et la communication du site (affiches / flyers / dépliants) seraient conçus. Durant tout ce laps de temps, il est important de préciser que l'aménagement de l'e-Sport Truck serait continuel, afin de trouver une disposition optimale, et qu'une recherche de commentateurs amateur ou professionnels serait effectuée. Une mise en forme du rétroplanning est disponible en annexe.

1.2.b - Budget

Le projet comprendra donc plusieurs composantes qui mettrons chacune un temps différent à être développé. Elles auront également et de manière logique toutes un prix différents pour leur installation, entretien ou bon fonctionnement. L'idée est donc de calculer le budget nécessaire au lancement de l'e-Sport Truck ainsi qu'à sa maintenance. En sachant qu'avec

77

ma formation de graphiste, je pourrai m'occuper de la charte graphique du projet, ainsi que des maquettes visuelles du site internet et de l'application Et que la voiture servant à transporter les boissons et la nourriture serait ma voiture personnelle, ce qui signifie que je n'aurai que l'essence à payer, les coûts seraient donc les suivants : - Achat du camion (Renault, neuf, 7x2,20 mètres, avec assurance) : 40 000 euros.

- Pour l'essence, si l'on dit que le trajet moyen pour se rendre chez un client est de 40 mètres, que je pourrai réaliser 100 interventions par ans, que la voiture consomme 7 litres par 100 kilomètres en milieu urbain et le camion 8,2, et que le prix de l'essence est d'1,40€ le litre, alors nous obtenons, sur l'année, les coûts suivants : 784 euros d'essence pour la voiture et 918 euros pour le camion. Soit un total de 1 702 euros sur l'année.

- Achat du matériel comprit dans le plan : 15 000 euros.

- Entretien du matériel (sans parler des véhicules) : environ 1 000 euros sur l'année.

- Création des goodies, en disant qu'un goodie est dans un premier temps une tasse aux couleurs de l'e-Sport Truck, que l'on intervient pour 20 personnes en moyenne par session, que la moitié joue, qu'une nouvelle moitié gagne, plus le vainqueur des paris, il faudrait 5 goodies par intervention. Soit 500 par an. Pour une base d'une tasse à 4 euros pour la personnalisation et avec les réductions pour les grosses commandes, le coût des goodies serait de 1 500 euros.

- Développement et maintenance du site internet : 3 500 euros + 50 euros sur l'année.

- Développement et maintenance de l'application mobile : 2 500 euros + 50 euros sur l'année.

- Payer les commentateurs professionnels, en Freelance*, à la demie-journée : 150 euros par personne. Sur l'année (100 interventions), il faut donc un

78

Une présentation sur l'univers du digital, réalisé lors d'un atelier d'entreprise.

Je souhaite, dans le premier temps des interventions de l'e-Sport Truck, présenter l'e-Sport d'une manière semblable.

79

budget de : 30 000 euros sur l'année.

- Prix des boissons et de la nourriture par intervention pour une moyenne de 20 personnes, sur l'année (100 interventions) : 10 000 euros sur l'année.

Au démarrage du projet, il faudrait donc un budget de 61 000 euros.

Puis sur l'année seraient répartis des coûts de 42 800 euros environ.

Le coût, par an, du projet, est d'environ 100 000 euros la première année, puis 40 000 les années consécutives (cela pouvant varier de 10% par an).

Quel est donc maintenant le prix de l'intervention de l'e-Sport Truck ?

On aurait les forfait suivants possibles : demi-journée / journée. Ainsi que pour les entreprises de moins de 10 personnes / entreprises d'entre 10 et 30 personnes / entreprises d'entre 30 et 50 personnes. Les prix seraient donc les suivants : - Demi-journée : Moins de 10 personnes = 500 euros / Entre 10 et 30 personnes = 800 euros / Entre 30 et 50 = 800 euros + 25 euros par personne.

- Toute la journée : Moins de 10 = 900 euros / Entre 10 et 30 personnes = 1400 euros / Entre 30 et 50 personnes = 1400 euros + 45 euros par personne.

En moyenne, sur un an, si l'on dit que les 100 interventions sont pour des groupes d'entre 10 et 30 personnes, sur des demies-journées, alors l'eSport Truck se verrait payé 80 000 euros par an. Si le projet comprend deux employés (sans compter les commentateurs), cela reviendrait à un potentiel salaire de 20 000 euros par ans, 40 000 euros servant à couvrir les coûts annuels. Il faudra donc cumuler une autre activité à côté, qui dans mon cas, peut être micro-entrepreneur en direction artistique. L'e-Sport Truck, quant à lui, deviendrait rentable au bout d'un peu plus d'un an et nécessitera un prêt d'une banque, ou l'investissement de sponsors, lors de son lancement, si je n'ai pas les moyens d'investir mon propre argent. En somme, le projet coûte cher, mais peut devenir rentable avec le temps.

80

1.3 - Univers visuel du projet et premières pistes graphiques 1.3.a - Inspiration et moodboard*

Pistes graphiques

Moodboard Ambiance et couleurs du projet

"Moodboard" : Planche tendance présentant sous forme d'images les inspirations à partir desquelles l'univers visuel du projet se fonde.

81

Les couleurs, d'un espace e-Sportif à l'autre, se ressemblent beaucoup. En effet, il est très souvent question de néons oscillants entre le bleu et le rouge.

82

Logotypes du milieu e-Sportif

83

Quant aux logotypes, ils sont souvent très simples, avec des polices aux tailles fines sur un mot et grasse sur un autre, afin de marquer un contraste pour signifier le dynamisme du milieu. Seuls les logos des équipes sont plus complexes, afin de réellement marquer l'originalité et les valeurs de la structure.

Les pistes graphiques ci-présentes ne reflètent pas l'identitée visuelle définitive du projet. Ces logos et couleurs sont des ébauches d'une future charte graphique définitive.

84

1.3.b - Premières pistes graphiques

85

Pistes graphiques Esprit visuel

86

Chapitre 2 Analyses des forces et des faiblesses du projet

2.1 - Introduction au SWOT

L

'analyse ou matrice SWOT, de l'anglais Strengths (forces), Weaknesses (faiblesses), Opportunities (opportunités), Threats (menaces), est un outil de stratégie d'entreprise permettant de déterminer les options offertes dans un domaine d'activité statégique. On parle aussi d'analyse FFOM (Forces - Faiblesses - Opportunités - Menaces). Ici je garderai la dénomination anglaise.

87

Après une présentation détaillée du projet et de ses objectifs, il est désormais nécessaire de réfléchir aux différents aspects de la solution à laquelle j'ai réfléchi. Qu'apporte-t-elle ? Comment la cible la percevra-t-elle ? Afin d'être préparé à toutes les éventualités, et pour déterminer la viabilité du projet, il faut répondre en anticipant de nombreuses questions. Ce chapitre contient donc une analyse SWOT poussée sous forme de listing, dans un soucis de clarté, où chaque sous-chapitre concernera une option du projet. Puis, je finirai l'analyse avec une analyse concurentielle, afin de voir où situer l'e-Sport Truck par rapport à une éventuelle concurrence.

2.2 - Forces du projet (S - Strengths)

- L'e-Sport Truck est avant tout un projet original. Ce n'est en effet pas tous les jours que l'on peut découvrir une scène e-Sportive mobile.

- L'e-Sport Truck est un excellent rendez-vous avec le digital. Certaines entreprises ne peuvent pas toujours utiliser les dernières technologies par soucis de compatibilité aux appareils réglés pour respecter un certain degré de confidentialité. Une intervention de l'e-Sport Truck est un moyen de remédier à cela "au travail".

- Le projet bénéficie d'une mobilité certaine. Étant un camion de taille raisonnable, il est possible de se déplacer partout et ainsi rencontrer tous les potentiels clients. Il est aussi de ce fait très réactif.

- L'environnement est participatif et potentiellement amusant pour tous.

Sans être familier avec l'e-Sport, on peut passer un bon moment, notamment grâce à la facilité de prise en main du jeu Rocket League.

- L'e-Sport Truck a, via le site internet de l'entreprise, un système de réservation sur plusieurs mois. Cela permet une planification à long terme pour le client et facilite une organisation de séminaires par exemple.

88

- Les interventions ne durant que quelques heures (en général une demijournée), on peut en organiser une, voire deux par jour, si les situations géographiques le permettent, l'e-Sport Truck se déplaçant uniquement dans la région parisienne dans un premier temps, pour toucher plus rapidement le cœur de cible. Néanmoins, si une entreprise offre bien plus que le tarif habituel, l'e-Sport Truck peut réfléchir à se déplacer plus loin en France.

- Une intervention de l'e-Sport Truck permet de potentiellement renforcer les liens entre collègues, comme beaucoup d'activités pratiquées au sein d'une même équipe.

- Les cadres et responsables d'entreprises peuvent, grâce à la compétition organisée, comprendre davantage leurs employés. On ne parle pas de profilage négatif, mais juste de découverte de nouvelles facettes de ces derniers.

- Les offres de paiement de l'e-Sport Truck sont simples car organisées en demi-journées ou journées et en fonction du nombre de personnes participant à l'activité.

2.3 - Faiblesses du projet (W - Weaknesses)

- Le projet de l'e-Sport Truck dépend énormément du matériel, ce qui demande un entretien constant. Si du matériel ne fonctionne pas bien, cela peut devenir difficile à réparer.

- Beaucoup d'argent doit être investit au début pour l'achat du matériel, puis pour la création continue des goodies, (sans oublier les dépenses récurrentes pour le carburant du camion et de la voiture) ainsi que pour soit recruter de bons commentateurs et les payer à chaque interventions, soit pour la formation de nouveaux commentateurs. Ce qui en plus de l'argent demandera du temps pour repérer et recruter des talents montants.

- Tout ceci implique que le coût de chaque intervention de l'e-Sport Truck

89

sera non-négligeable, pour couvrir les frais et être rentable. Les entreprises risquent donc peut-être, parfois, de réfléchir à deux fois avant de faire appel aux services du Truck.

- L'activité de l'e-Sport Truck dépend finalement et avant tout de l'intérêt des entreprises pour découvrir l'e-Sport. Si ces dernières ne souhaitent vraiment pas en entendre parler, alors le projet tombe à l'eau.

2.4 - Opportunités du projet (O - Opportunities)

- Si le concept plaît suffisamment et que les interventions créent vraiment un univers intéressant et attractif, alors peut être que l'e-Sport Truck pourrait envisager de créer une chaine Twitch ou YouTube, afin de diffuser les séminaires en direct, avec l'accord de la société. De cette manière, cette dernière pourra gratuitement et à tout moment retrouver la vidéo de leur session immersive. Cela créera également une communication moderne et positive.

- Si le projet fonctionne parfaitement, alors on pourra penser à monter un deuxième e-Sport Truck dans une autre grande ville française, puis un troisième etc. Pour ainsi avoir une meilleure communication sur l'e-Sport partout en France, pas seulement dans la capitale. Et faire plus de bénéfices.

- Lors de certaines interventions de l'e-Sport Truck, on pourrait avoir la possibilité de faire des tournois sur d'autres jeux que Rocket League. Ces tournois seraient à destination de gens connaissant déjà un peu le domaine e-Sportif. League of Legends, Fifa et Counter-Strike seraient installés dans le camion et moyenneraient un tarif un peu plus élevé pour un format tournoi.

- Peut être que l'e-Sport Truck pourrait réaliser des interventions en étant sponsorisé par certains éditeurs, si ces derniers souhaitent utiliser le Truck comme un moyen de communication. Ainsi se créerait la possibilité de réaliser des partenariats, de devenir ambassadeur de tel ou tel éditeur etc.

90

2.5 - Menaces pour le projet (T- Threats)

- Une menace pour le projet pourrait être de voir un l'éditeur de jeu utilisé dans l'e-Sport Truck poursuivre ce dernier de manière peut-être injustifiée, au prétexte que trop de bénéfices seraient réalisés en s'appuyant sur leur jeu...

- Si le carburant devient hors de prix, il sera alors compliqué de faire déplacer le camion et ainsi rencontrer les clients. Ce serait une fin pour le projet.

- D'éventuels avis négatifs donnés sur les réseaux sociaux et déconseillant l'expérience immersive seraient définitivement une menace pour le projet.

- Enfin, si des futures lois françaises délimitent les possibilités de faire des bénéfices grâce aux sports électroniques pour les acteurs autres que les équipes, les sponsors et les joueurs, cela pourrait être embêtant également devenir un frein pour le projet.

2.6 - Benchmark*

L

e concept de l'e-Sport Truck m'étant apparu comme assez original, il m'était logique de penser qu'il pouvait être le premier de son genre. Or ce n'est pas tout à fait le cas. Depuis plus d'un un an, deux trucks sillonnent l'Europe et l'Amérique du Nord et proposent une initiation aux jeux e-Sportifs mais surtout la diffusion de compétitions.

En Europe, c'est le Big Betty Truck(1). Un camion allemand contenant tout le nécessaire pour diffuser des événements e-Sportifs, ou bien organiser de petites compétitions. Il se déplace principalement en Allemagne mais aussi dans les grandes villes européennes. Ce Truck est cela dit en passant le premier Truck e-Sportif occidental. Ce projet a été lancé en 2017.

"Benchmark" : Le benchmarking est une technique marketing ou de gestion de la qualité qui consiste à étudier et analyser les techniques de gestion, les modes d'organisation des autres entreprises afin de s'en inspirer et d'en tirer le meilleur.

91

En Amérique du Nord, il existe l'e-Sport Arena Drive(2). Un concept du même principe que Big Betty (qui reconnaît même exister grâce à ce dernier), qui aurait prouvé l'intérêt que peuvent avoir les gens pour un truck e-Sportif. Ce projet a vu le jour fin 2017.

Enfin, il existe une société espagnole "Cloud Sports"(3), spécialisée dans la simulation, qui a réalisé une vidéo montrant un camion qui remplirait les mêmes fonctions que ses deux grands frères : l'e-Sport Arena Truck. La vidéo est sortie en 2017 mais pour l'instant rien ne concret ne semble avoir été réalisé.

Image du camion e-Sport Big Betty, avec sa scène sortie, lors d'une convention.

Ces concepts ou réels trucks sont très récents, puisqu'ils sont tous de 2017.

Et certes ils ressemblent à l'e-Sport Truck dans leur dénomination, mais ils ne ciblent pas les mêmes personnes et ne proposent pas tout à fait le même service. La différence principale est en effet que Big Betty en Allemagne et l'e-Sport Arena Drive en Amérique ciblent les jeunes et ont le clair objectif de diffuser des compétitions. Mon projet, pour rappel, cible les personnes de plus de 35 ans, travaillant en entreprise et qui sont novices en matière de jeux compétitifs, avec l'objectif de leur faire découvrir les sports électroniques via de réels matchs funs et compétitifs. De ce fait ce ne sont pas des concurrents directs. Mais si on devait définir notre plus proche concurrent malgré tout, ça pourrait être Big Betty qui, malgré tout, fait également découvrir l'e-Sport en faisant vivre des immersions et ce partout en Europe. Il existe aussi une différence de budget : ces projets étant sponsorisés par des grosses structures, ils disposent donc de bien plus de moyens.

92

Victoire en avril 2018 de l'équie française Renault-Vitality lors de la troisième édition des Elite Series, championnat annuel du jeu Rocket League.

93

Conclusion C

e mémoire arrive donc à son terme et il est maintenant temps de conclure en récapitulant les éléments de réponse apportés au problème initial, puis d'ouvrir ce travail sur d'autres sujets de recherches annexes.

Grâce à l'étude effectuée tout au long de cet exercice, il est désormais possible, de manière claire, d'apporter une solution à la problématique énoncée dans l'introduction : "Quels moyens mettre en place pour intéresser un public qui ne connaît pas, ou peu l'e-Sport ?". Question posée car, à l'heure du numérique, il est très étrange de constater qu'en 2016, seulement 49% des français avaient déjà entendus parler de l'e-Sport. Alors que la France est pourtant le troisième pays le plus dominant sur le marché de l'e-Sport européen (derrière la Suède et l'Allemagne). Certes la discipline est âgée de moins de 20 ans, mais elle se développe tellement vite dans le monde entier qu'on pourrait penser, au premier abord, que tous les français ou presque en avaient au moins une fois entendu parler. Il est donc apparu légitime de se demander quels étaient les freins à une meilleure intégration des sports électroniques dans le paysage culturel Français.

Après avoir défini, situé puis raconté l'e-Sport et son histoire mondiale, un constat sur l'intégration des sports électroniques en France a été effectué.

Ce dernier a permis d'observer de quelle manière la discipline interagit avec les domaines notamment politique, économique, légal, technologique et sociologique. Ce qu'il en ressort sont donc les points suivants : la France fait de plus en plus d'effort pour légitimer la pratique e-Sportive d'un point de vue politique, grâce notamment aux textes de lois approuvés par Axelle Lemaire (alors secrétaire d'État au Numérique), en 2016. Ce fut une action judicieuse réalisée de la part du gouvernement, puisque lorsqu'on regarde les retombées économiques, l'e-Sport est une activité à plus de 22 millions de dollars de bénéfices sur les trois dernières années. Le secteur des sports

94

électroniques devient une activité très rentable et intéresse beaucoup d'acteurs (sponsors, nouveaux éditeurs, grandes entreprises, jeunes joueurs…). Cette croissance est notamment due aux évolutions du numérique et aux nouvelles technologies telles qu'internet, la diffusion en direct, les ordinateurs toujours plus puissants, etc. Et d'un point de vue sociologique, cela intéresse énormément les médias, qui favorisent la communication autour de l'eSport, grâce à la diffusion de programmes spécialisés (comme le "Canal e-Sport Club" de Canal+ et "BeIn e-Sport" de BeIn).

Les premiers constats de ce mémoire ont été dans l'ensemble positifs et n'ont pas réellement permis d'expliquer le fait que seulement la moitié des français connaissaient l'e-Sport. Si la France fait des efforts pour intégrer les sports électroniques dans le paysage culturel, alors comment peut-on expliquer une reconnaissance du phénomène aussi peu élevée ? Une analyse portée directement sur les français et leur rapport à l'e-Sport a donc été effectuée dans le deuxième chapitre de ce mémoire. Les bilans tirés des sondages et des statistiques présents dans ce chapitre sont les suivants : - La faible intégration de l'e-Sport en France est un problème générationnel, puisque la Génération X semble bien moins connaître, voire pas du tout, la discipline. Il faut savoir qu'aujourd'hui, les français âgés de moins de 35 ans (Générations Y et Z) sont le public français majoritaire des compétitions de sports électroniques. Mais principalement parce que ce sont des Digitales Natives et qu'ils entretiennent de ce fait un rapport plus naturel aux nouvelles technologies.

- Les éditeurs de jeux-vidéos dédiés à l'e-Sport ont en majorité communiqué vers les adolescents et les très jeunes adultes lorsque la discipline a été lancée, afin de toucher un cœur de cible et séduire ainsi plus rapidement. Les sports électroniques étants encore en phase de croissance, il est normal que ces mêmes éditeurs continuent de faire en France de la publicité quasiment uniquement pour les Générations Y et Z. La Génération X française, de manière logique, a donc une moindre connaissance de ce qu'est l'e-Sport.

- Même dans le cœur de cible des éditeurs de jeux e-Sportifs (les personnes âgées de moins de 35 ans), on constate que seuls 5% seulement

95

de la population préfère avoir une expérience de jeu compétitive, parmi toutes les manières de jouer possibles. La manière de jouer compétitive plaît, mais vraiment pas autant qu'une expérience de jeu plus "traditionnelle", qui a tendance à procurer plus d'amusement.

- Et contrairement à ce que l'on pourrait croire, l'analogie créée par le mot "Sport" dans "e-Sport" ne gêne pas vraiment l'acceptation de la discipline en France, même si cela peut poser un problème de définition menant à de longs débats.

Grâce à ces constats, il a été finalement possible de comprendre les freins à une meilleure intégration de la discipline et de décider quoi faire pour y intéresser davantage les français. En effet, la solution proposée pour tenter de résoudre la problématique est une éducation e-Sportive ciblant les personnes âgées de plus de 35 ans, qui ont donc un rapport au numérique moins important que les Digitales Natives. Aussi ai-je décidé de faire des décisionnaires en entreprise mon cœur de cible, puisque ces derniers, si ils sont intéressés par l'e-Sport, peuvent donner l'accord à de potentiels projets conduisant à une meilleure intégration des sports électroniques en France.

Le projet que je propose donc pour faire connaître l'e-Sport à cette classe précise de français est "l'e-Sport Truck". Un camion mobile intervenant auprès des entreprises lors de séminaires ou de toutes autres sollicitations dans le cadre d'activités de groupe. Ainsi, même si ces gens ne vont pas à l'e-Sport, alors l'e-Sport ira à eux, ce qui demande un investissement physique et psychologique moindre. Le but de ce projet est de faire vivre aux non-initiés une véritable et totale immersion dans l'univers des compétitions de sports électroniques. Le camion sera donc emménagé comme une véritable scène compétitive et proposera tous les composants d'un événement e-Sport, tels que les enjeux, les commentateurs, les jeux de lumières, les interviews, et surtout… Les spectateurs, qui seront eux-mêmes des employés. Lorsque les compagnies intéressées par une activité digitale feront appel aux services de l'e-Sport Truck, les interventions se dérouleront en deux temps : cela commencera par une présentation de l'e-Sport, puis viendra la phase de jeu entre les employés.

Il était important également de déterminer les forces, faiblesses, opportunités

96

et menaces liées au projet, à travers une analyse SWOT. Ce qui en ressort est surtout l'originalité de l'e-Sport Truck, à savoir une arène mobile dont un seul autre exemple existe en Europe. C'est un excellent moyen de découvrir une facette du digital ainsi qu'une opportunité de passer du bon temps entre collègues. Les aspects découverte, compétitivité et "fun" sont donc réellement mis en avant. Avec le temps, les éditeurs s'intéresseront peut-être au concept et en le sponsorisant, pourront permettre une encore meilleure expérience. Simplement, l'e-Sport Truck coutera cher du fait de son matériel et le prix de l'offre, même s'il sera élevé, ne devra pas pour autant faire fuir les clients potentiels. L'e-Sport Truck n'est malgré tout pas menacé directement et devrait pouvoir prospérer sans trop de difficultés, pour peu qu'il y ait un réel intérêt de la part des entreprises. Une excellente communication autour du concept sera donc cruciale.

Voilà donc en quoi consiste mon projet : une solution qui je l'espère, permettra de résoudre la problématique de ce mémoire. Mais avec l'e-Sport Truck, je ne m'adresse finalement qu'à une seule cible, à savoir les plus de 35 ans travaillant en entreprise ou ayant les moyens de se permettre une réservation de l'e-Sport Truck. Or si l'on souhaite réellement une meilleure intégration de l'e-Sport en France, l'existence de plusieurs projets semblables semble nécessaire. Il se trouve justement que certaines entreprises et Start-Up se lancent dans des offres de découvertes du domaine e-Sportif. C'est le cas de l'agence de conseil aux entreprises au sein de laquelle je travaille : Change Factory. Cette dernière proposent différentes offres permettant d'accroître la culture digitale de leurs clients et se lance dans une nouvelle proposition : faire découvrir le domaine de l'e-Sport à travers des "Learning Expeditions", à savoir des journées de rencontre entre les clients et des acteurs majeurs du secteur découvert. Aussi, un petit-déjeuner autour du thème de l'e-Sport va bientôt être réalisé par l'agence, pour parler du phénomène à des invités dans un cadre détendu. L'invitation à cet évenement, que j'ai moi même réalisé pour Change Factory, est présente en annexe. Jean-Noël Chaintreuil, Florent Steyaert et Loïc Perrin, dirigeants de Change Factory, ainsi que Carole Ballereau, responsable des projets, ont donc fait même constat que moi avant ce mémoire : il y a actuellement tout à gagner à faire découvrir le domaine des sports électroniques. Lorsqu'ils ont décidé de créer cette offre de Learning Expedition, ni eux ni moi n'avaient alors conscience que chacun réfléchissait à comment faire connaître l'e-Sport. Ce mémoire peut donc

97

m'aider à les assister sur leurs réflexions, afin, pourquoi pas, de créer une offre qui intéressera beaucoup d'entreprises, ce qui aidera réellement à faire découvrir la discipline e-Sportive en France et à ma cible qui plus est. À quoi ressemblerait donc un futur français où l'e-Sport est plus accepté qu'il ne l'est actuellement ? On peut supposer que certaines personnes issues de la Génération X entreraient réellement dans l'univers compétitif des sports électroniques, pour pourquoi pas y devenir des champions. Les éditeurs essaieraient alors de fidéliser cette nouvelle catégorie de joueurs désormais intéressés et les jeux-vidéos deviendraient alors réellement un divertissement qui toucherait toutes les générations. Peut-être qu'alors la France deviendrait le premier acteur européen de l'e-Sport, en passant devant la Suède et l'Allemagne. Quant à une intégration aux Jeux-Olympiques, il faudrait attendre une acceptation mondiale du phénomène par toutes les générations, ce qui dépendra du temps que mettrons les autres pays à proposer des projets visant à une meilleure reconnaissance de la discipline.

Cela dit, si nous avons parlé de l'intégration précoce de l'e-Sport en Corée du Sud, nous ne savons pas à quel degré le phénomène est réellement accepté en Asie. Dès lors, il serait intéressant de se poser la question suivante : alors que les coréens ont fait de l'e-Sport un véritable sport national, comment les autres pays orientaux intègrent-ils la discipline ? Ont-ils suivi ou suivent-ils les mêmes démarches que les pays européens et notamment la France, pour rendre l'e-Sport connu de tous ? Il serait extrêmement complémentaire et enrichissant de répondre à ces interrogations de manière détaillée dans une nouvelle étude, ce mémoire s'étant voulu essentiellement focalisé sur la situation de la France.

.

98

99

Bibliographie L'e-Sport étant un phénomène relativement récent, il existe aujourd'hui malheureusement trop peu d'ouvrages pertinents sur la discipline et facilements trouvables en France.

Les meilleures articles sont souvents sur internet et en anglais.

Mes recherches s'étant presques exclusivement basées sur des travaux disponibles sur le web, cette bibliographie est en fait plutôt une sitographie.

100

Introduction / Résumé / Abstract (1) Dictionnaire d'Oxford (2) Article sur Medium - 2018 - medium.com/@BountieGaming/the-history-andevolution-of-esports-8ab6c1cf3257 (3) Reportage de CNN - 2016 - edition.cnn.com/2016/05/02/us/golden-ageof-arcade-games-billy-mitchell-pac-man-the-eighties/index.html (4) Blog de l'équipe e-Sportive Team Liquid - 2017 - teamliquid.net/ blogs/525627-a-brief-history-of-starcraft-part-1 (5) Article du site Dotesports - 2018 - dotesports.com/business/news/ esports-revenue-newzoo-21230 (6) Article de l'eSport Observer - 2015 - esportsobserver.com/esportsstatistics-the-growth-of-our-industry-in-five-charts/ (7) Étude de Statista - 2017 - www.statista.com/statistics/532689/annualesports-prize-pools-worldwide/ (8) Article de l'Équipe - 2018 - lequipe.fr/Esport/Actualites/Esport-dota-2-theinternational-2018-passe-la-barre-des-25-millions-de-dollars/932706 (9) Étude d'eSport Earnings - 2018 - https://www.esportsearnings.com/players (10) Article de Slingshot eSports - 2016 - slingshotesports.com/2016/05/17/ league-of-legends-chae-piglet-gwang-jin-fomos-interview/ (11) Reportage de LCI - 2018 - lci.fr/sport/l-esport-aux-jo-de-paris-en-2024-case-complique-2093872.html (12) Relai d'une étude menée par Publicis sur le site de CBNews - 2017 cbnews.fr/conseils/le-sport-analyse-par-publicis-media-a1034794 (13) Étude menée par l'Association Française du Jeu-Vidéo - 2017 - afjv.

101

com/news/8215_le-marche-francais-de-l-esport

Partie 1 Chapitre 1 (1) Informations disponibles sur le site de la Team Liquid - 2018 liquipedia.net/starcraft/2000_KBK_Masters_Season_1 (2) Reportage de France 2 pour Télé Matin - 2010 - youtube.com/ watch?v=HXstRfE9AVU (3) Informations disponibles sur Wikipédia - 2018 - fr.wikipedia.org/wiki/ Gamers_Assembly (4) Informations disponibles sur Wikipédia - 2018 - fr.m.wikipedia.org/wiki/ Sport_%C3%A9lectronique (5) Étude réalisée par Newzoo - 2017 - newzoo.com/insights/articles/esportsrevenues-will-reach-696-million-in-2017/ (6) Informations disponibles sur Wikipédia - 2018 - fr.wikipedia.org/wiki/ Lyon_E-Sport (7) Informations de l'éditeur Riot Games - 2018 - lolesports.com/en_US/ articles/2018-mid-season-invitational-numbers (8) Article du site Warlegend - 2013 - warlegend.net/esport-league-oflegends-reconnu-en-tant-que-sport-aux-usa/ (9) Article rédigé sur Le Petit Juriste - 2016 - lepetitjuriste.fr/droit-du-sport/esport-officiellement-reconnu-loi-republique-numerique/ (10) Relai d'une étude de Paypal sur le site commenjouer - 2016 commenjouer.fr/etude/derniers-chiffres-esport-france-paypal-superdata/ (11) Étude réalisée par L'AFJV - 2017 - afjv.com/news/8835_chiffre-d-

102

affaires-2017-18-d-ubisoft-1-731-9-m-18-6.html (12) Article du journal Le Point - 2017 - lepoint.fr/pop-culture/ jeux-videos/jeuxvideo-ce-qu-il-faut -retenir-des-chiffres-impressionnan de-2017--27-02-2018-2198194_2943.php

Chapitre 2 (1) Infographie de Riot Games relayée par Next Impact - 2012 - nextinpact. com/news/74822-league-of-legends-tous-chiffres-a-connaitre-en-infographie.htm (2) Étude réalisée par Cadreo - 2016 - cadreo.com/actualites/dt-15-chiffrescles-sur-les-cadres (3) Article de GameKult - 2001 - gamekult.com/actualite/massacre-decolumbine-jeux-en-cause-7489.html (4) Vidéo de type compilation sur Nintendo - 2010 - youtube.com/ watch?v=v02WFh_Kdl0 (5) Sondage réalisé sur jeux.video.com - 2018 - jeuxvideo.com/forums/4276-55056567-1-0-1-0-solo-coop-ou-multijoueur-competitif.htm

Partie 2 Chapitre 2 (1) Vidéo présentant le concept de Big Betty par ELC Gaming TV - 2016 youtube.com/watch?v=SfeoRKQX03E (2) Article présentant le concept de l'eSport Arena Drive par The Score eSports - 2017 - thescoreesports.com/news/13626-esports-arena-to-debutmobile-esports-truck (3) Vidéo présentant le concept de Cloud eSports - 2017 - youtube.com/ watch?v=VOszioZdbeM

Finale des Internationals 2018 de Dota 2, jeu de l'éditeur Valve.

Cette année là, la plus grande dotation financière jamais donnée en tournoi e-Sportif (25 millions de dollars) a été remporté dans la Rogers Arena de Vancouver, par l'équipe européenne OG. Le Paris Saint-Germain e-Sports (fusionné sur ce jeu à la structure chinoise LGD) a perdu en finale après un beau parcours.

103

104

105

Annexes

106

Annexe 1

Sondage / Questionnaire réalisé pour le mémoire.

Posté sur Reddit, Facebook et LinkedIn. Il fut également rempli par des personnes en dehors de ces réseaux.

107

108

109

110

Annexe 2

Plan de l'e-Sport Truck, avec les dimensions et le matĂŠriel nĂŠcessaire.

111

112

Annexe 3

Rétroplanning de la production des différents éléments consituants le projet de l'e-Sport Truck.

113

114

Annexe 4 Interview de Rémi Grégoire.

115

Annexe 5

Interview de l'internaute Hache_Gonville.

116

Annexe 6

Invitation au petit-déjeuner sur le thème de l'e-Sport, proposé par Change Factory.

117

118

119

120

MĂŠmoire professionel de fin d'ĂŠtudes yann.gregoire.17@hotmail.fr