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numéro

des collectivités territoriales

L’ordre de service, un outil efficace pour une bonne exécution - p.4

JURISPRUDENCE - p.7 Protection des travailleurs étrangers sur les chantiers et le recours à l’interprétariat

ANALYSE - p.13 Coopération conventionnelle : attention au spectre

de la commande publique !

ACTUALITÉS - p.2 RÉPONSES MINISTÉRIELLES - p.9 INITIATIVE - p.10 La ville de Six-Fours organise son second forum de la commande publique FICHE PRATIQUE - p.11 L’application de pénalités lors de l’exécution d’un marché public MÉTIER : ACHETEUR - p.16 Production : en finir avec le taylorisme

Mensuel • Mars 2018 • ISSN : 2115-1415 • Prix au numéro : 19 € TTC

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ACTUALITÉS Par Frédéric Boudeau, DGS d’une communauté de communes

Transmettre le savoir Le droit des marchés publics est une matière en constante évolution. Depuis 2001, en tout cas, la valse des textes, décrets, codes, guides, circulaires et autres documents n’arrête pas. De quoi faire tourner la tête au plus expérimenté des acheteurs ! Et des acheteurs expérimentés, il en faut. Des acheteurs formés aux nouvelles techniques, aux nouveaux process, aux nouveaux textes. Mais également des acheteurs prêts à évoluer rapidement, à accepter les changements incessants et à utiliser les expériences passées pour proposer des procédures efficaces pour un achat optimum. Mais ce savoir et cette expérience peuvent également s’effriter s’ils ne sont pas transmis. La valse des acheteurs est souvent rapide : changement de poste, promotions diverses et variées... le relais est-il toujours passé dans les règles de l’art ? Comme pour tout ce qui concerne cette riche matière, l’achat doit certes être réactif, mais il doit aussi être mûrement réfléchi pour parvenir au meilleur résultat. Les nouveaux diplômes qui s’offrent en matière d’achat et de marchés publics laissent présager que le message est passé et que les prochaines générations d’acheteurs arriveront préparées ! Et une petite pensée pour les acheteurs qui ne sont plus là, mais qui ont laissé un riche patrimoine utile à toutes les générations...

La commission épingle Cinq pays de l’Union européenne viennent d’être épinglés par la Commission européenne et mis en demeure d’apporter des réponses à d’éventuels manquements à la législation européenne en matière d’attribution des marchés publics de la défense. Dans un communiqué du 25 janvier dernier, l’institution européenne reproche, d’une part, l’attribution directe par l’Italie, la Pologne et le Portugal de plusieurs contrats de défense à des prestataires nationaux, en violation de la directive sur les marchés publics de défense. Selon celle-ci, les pouvoirs adjudicateurs sont tenus – sauf exception bien définie – d’octroyer les contrats en application de l’une des procédures de passation de marchés établies à l’article 25 de la directive 2009/81/CE et de faire connaître leur intention en publiant un avis de marché dans la base de données Tenders Electronic Daily (TED). D’autre part, elle suppose que le Danemark et les Pays-Bas ont institué des exigences injustifiées de compensation en réclamant une contrepartie de la part de fournisseurs non nationaux pour l’achat d’équipements. Selon la Commission, de telles exigences constituent des mesures restrictives qui entravent la libre circulation des biens et des services et sont incompatibles à la fois avec le traité UE et avec la bonne transposition et l’application de la directive.

Vanessa Lebon, attachée principale

Infractions routières… mais pas que… ? Le 18 janvier dernier, l’association anticorruption Anticor a porté plainte pour « favoritisme » au regard des conditions d’attribution du marché des radars automatiques dont sont dotés certains véhicules banalisés conduits par des sociétés privées. L’association conteste en particulier la légalité de la passation d’un contrat de 53,8 millions d’euros, attribué par le ministère de l’Intérieur sans mise en concurrence préalable, au motif que le titulaire du marché était le seul et unique détenteur d’un certificat d’homologation des véhicules.

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© Grecaud Paul - AdobeStock

BILLET

Commande publique d’outre-mer Le décret du 31 janvier 2018 pris pour l’application du troisième alinéa de l’article 73 de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique (Lerom) a été publié au Journal officiel de la République française du 2 février 2018. Ce décret a pour objet de définir, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, les conditions réglementaires de présentation d’un plan de sous-traitance aux petites et moyennes entreprises (PME) locales que les soumissionnaires doivent présenter aux acheteurs, dans le cadre des marchés publics passés dans les collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et en Nouvelle-Calédonie et dont le montant estimé est supérieur à 500 000 euros HT. Il précise notamment que « le caractère local de la petite ou moyenne entreprise est déterminé par la localisation de son siège ou de son principal établissement sur le territoire de la collectivité ultra-marine dans laquelle le marché public a vocation à être exécuté. »

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ACTUALITÉS

Allotisement et contrats globaux : deux fiches techniques Depuis le 24 janvier dernier, la direction des affaires juridiques (DAJ) a mis en ligne deux nouvelles fiches techniques dans l’espace commande publique. La première porte sur l’allotissement. Elle rappelle que l’ordonnance du 23 juillet 2015 et son décret d’application réaffirment et étendent, hors les différents cas de contrats globaux, le principe de l’allotissement à l’ensemble des acheteurs. La seconde présente le panel des contrats globaux, qui regroupent principalement les marchés publics globaux visés aux articles 33 et suivants de l’ordonnance du 23 juillet 2015 (marchés publics de conception-réalisation, marchés publics globaux de performance, marchés publics sectoriels) ainsi que les marchés de partenariat. Ces contrats constituent des exceptions de plein droit, par leur objet même et non pas sous condition de remplir l’un des critères prévus à l’article 32 de l’ordonnance, au principe d’allotissement.

Concours : le fruit de la discorde Dans une lettre ouverte en date du 9 février 2018, adressée au Premier ministre, le Conseil national de l’ordre des architectes (CNOA) et cinq organisations professionnelles du secteur de la construction et du bâtiment (Capeb, fédération Cinov, fédération des Scop BTP, SNSO et UNSFA) affirment la nécessité de « maintenir les règles actuelles de la commande publique, garantes d’une maîtrise d’ouvrage exemplaire et de constructions publiques de qualité, pour le bénéfice de tous ». En cela, ils tendent à contrer la position des organismes HLM qui considèrent que le recours à la procédure du concours de maîtrise d’œuvre renchérit et pénalise la production de loge-

ments sociaux. En effet, la Fédération des entreprises sociales pour l’habitat et l’Union sociale pour l’habitat ont fait connaître leur désir de bénéficier d’une dérogation à l’obligation d’organiser un concours de maîtrise d’œuvre. Pris en application de l’article 83 de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, le décret du 10 avril 2017 portant diverses dispositions en matière de commande publique prévoit que les offices publics de l’habitat doivent, à compter du 1er juillet 2017, organiser des concours d’architectes pour leurs projets de construction.

1630 panneaux publicitaires ©PUNTO STUDIO FOTO AG-AdobeStock

C'est le nombre de supports qui devront être démontés dans la ville de Paris. En effet, le 19 février dernier, le Conseil d’État a confirmé l’annulation par le juge des référés du tribunal administratif de Paris d’un contrat de mobilier urbain conclu avec une filiale commune des groupes JC Decaux et Publicis Groupe. Au cas d’espèce, le Conseil d’État a effectivement rappelé qu’« une personne publique peut, lorsque l’exige un motif d’intérêt général tenant à la continuité du service public, s’exonérer à titre provisoire (...) des règles de publicité et de mise en concurrence pour la conclusion d’une concession de service. Cependant, la haute juridiction administrative a constaté que l’urgence n’était pas caractérisée en considérant que, « compte tenu de la grande diversité des moyens de communication, par voie électronique ou sous forme d’affichage ou de magazines, dont dispose la ville de Paris, ceux-ci sont suffisants pour assurer la continuité du service public de l’information municipale en cas d’interruption du service d’exploitation du mobilier urbain d’information ». Enfin, rappelons que ce contrat transitoire fait suite à une première annulation en date du 18 septembre 2017 par le Conseil d’État de l’attribution à cette même société du marché des panneaux d’affichage de Paris.

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DOSSIER

Vanessa Lebon Docteur en droit, attachée principale

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Ordres de service, bons de commande, avenants, modifications du marché... Lors de l’exécution d’un marché, plusieurs outils s’offrent à l’acheteur pour veiller à son bon déroulement. L’ordre de service (OS), plus particulièrement, va lui permettre de préciser les modalités d’exécution des prestations prévues par le marché. Dans certains cas, l’OS pourra même être utilisé pour prolonger un délai d’exécution (1) sans être qualifié d’avenant. Pour autant, les conditions d’utilisation des OS sont strictes. Quelles sont-elles et comment doit-on les prévoir ?

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DOSSIER

L’ordre de service, un outil efficace pour une bonne exécution À quoi sert un ordre de service ? L’ordre de service est un acte d’exécution du marché permettant à l’acheteur de notifier une information ou une décision au titulaire d’un marché public dans les conditions prévues par ce dernier et ne nécessitant pas l’accord des deux parties. L’ordre de service peut préciser le marché, mais il peut également avoir pour objet de le modifier. L’OS est un acte unilatéral. Des confusions se font parfois entre ordre de service et bon de commande. À la différence de l’ordre de service, utilisable dans n’importe quel marché afin de permettre au pouvoir adjudicateur d’exprimer son pouvoir de direction du marché et d’information du titulaire, le bon de commande ne sert qu’à commander des prestations. Le bon de commande est lui aussi un acte d’exécution du marché, unilatéral et écrit du pouvoir adjudicateur. Mais son objet se limite à commander des prestations décrites au marché.

Modifier le marché avec un ordre de service L’ordre de service a normalement pour objet de transmettre les prescriptions du pouvoir adjudicateur dans les limites des stipulations contractuelles prévues soit au cahier des clauses administratives particulières (CCAG), soit au cahier des

clauses administratives générales applicables. Ainsi, il est prévu à l’article 14 du CCAG travaux la possibilité de prescrire, par ordre de service, des prestations supplémentaires ou modificatives dont la réalisation est nécessaire au bon achèvement de l’ouvrage et pour lesquelles le marché n’a pas prévu de prix. Le droit des marchés publics ne prévoit pas que les dispositions contractuelles puissent être modifiées par ordre de service. Cependant, dans certaines hypothèses, le CCAG organise lui-même l’articulation entre OS et avenant. Tel est le cas dans la gestion des délais d’exécution du marché. Le principe est bien que « la prolongation du délai d’exécution ne puisse résulter que d’un avenant » (CCAG travaux, art. 19.2.1). Ce même article prévoit deux séries de motifs pour lesquels l’avenant ne sera pas nécessaire. Au titre de l’article 19.2.2, le délai d’exécution pourra être prolongé par OS en cas de modification suffisante dans la masse des travaux ou de l’importance de certaines natures d’ouvrages (CAA Marseille, 27 avril 2004, req. n° 99MA01468). Mais également lorsque des difficultés imprévues apparaîtront en cours de chantier ou lorsqu’il sera procédé à une substitution d’ouvrages différents à ceux initialement prévus (CAA Nantes, 30 décembre 1998, req. n° 95NT00544). L’article 19.2.3 vise quant à lui les situations de prolongation des délais d’exécution en cas d’intempéries.

Respecter le formalisme de l’ordre de service L’OS doit être écrit. Il peut être rédigé librement, à condition d’être au moins daté et numéroté (CCAG travaux, art. 3.8.1). Il est signé par la personne physique habilitée à représenter le maître d’ouvrage ou le maître d’œuvre. La direction des affaires juridiques du ministère de l’Économie propose un formulaire EXE1-T, qui est un modèle d’OS pour les marchés de travaux. Une attention particulière doit être portée aux modalités de notification de l’OS (CAA Lyon, 28 février 2013, req. n°12LY00477). L’OS doit être notifié de telle sorte que la date et l’heure de sa réception soient établies avec certitude. L’OS est notifié au mandataire du groupement en cas de cotraitance et au titulaire pour les prestations sous-traitées. Il est ensuite communiqué par le mandataire aux cotraitants et par le titulaire aux sous-traitants (de premier rang).

Dans quels cas prendre un ordre de service ? L’OS intervient dans tous les aspects de l’exécution contractuelle. Il peut concerner des questions substantielles, comme le démarrage des travaux, en précisant la date à partir de laquelle s’ouvre la période de préparation du marché. Dans le cas de travaux allotis, le calendrier détaillé d’exécution doit être fff n°172 Mars 2018 • La revue des marchés publics

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DOSSIER

fff notifié aux titulaires de chacun des lots

(CCAG travaux, art 28.2.3), ou encore pour l’affermissement d’une tranche conditionnelle ou la notification d’un ajournement des travaux. Si le maître d’œuvre présume l’existence d’un vice de construction dans l’ouvrage, il prescrit par OS les mesures de nature à le déceler, ceci pouvant conduire, le cas échéant, à la démolition partielle ou totale de l’ouvrage (CCAG travaux, art. 39.1).

prendre en cas de découverte d’ouvrages souterrains (CCAG travaux, art. 27.3.3) ou les mesures à prendre pour déceler un vice de construction (CCAG travaux, art. 39.1).

Les effets des ordres de service Lorsque le titulaire estime que les prescriptions d’un ordre de service qui lui est notifié appellent des observations de sa part, il doit les notifier au signataire de l’ordre de service concerné, dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception de l’ordre de service, sous peine de forclusion. Il doit, dans un premier temps, retourner immédiatement au maître d’œuvre un exemplaire signé de l’ordre de service sur lequel il est indiqué la date et la mention manuscrite « signé avec réserves » au-dessus de sa signature. Puis, dans un délai de 15 jours, il doit expliciter ses réserves au maître d’œuvre par lettre recommandée avec accusé de réception ou contre récépissé. En effet, l’OS est un ordre. Le titulaire du marché doit donc l’exécuter, quelles que soient ses conséquences techniques ou financières, et même s’il refuse d’en accuser réception ou s’il fait des réserves à son encontre (CCAG travaux, art. 3.8.3). À défaut, le pouvoir adjudicateur peut infliger des pénalités si le marché le prévoit ou décider d’une réfaction sur le prix du marché. Le refus d’exécuter l’OS est une faute qui pourrait justifier la résiliation du marché. L’entreprise doit se conformer strictement à l’ordre de service sous peine d’engager sa responsabilité contractuelle et de s’exposer à des sanctions coercitives prévues au marché (CCAG

« En cas de notification tardive de l’ordre de service de démarrage, les entrepreneurs peuvent demander la résiliation du marché ou le report de la date de commencement des travaux (CCAG travaux, article 42.2.1). »

Le maître d’ouvrage doit notifier l’état d’acompte dans les 7 jours qui suivent la réception de la demande formulée par le titulaire. Le maître d’ouvrage doit également notifier la décision d’arrêter les travaux (CCAG travaux, art. 15.4.2). Une telle notification aura pour effet d’interdire au titulaire de continuer les travaux au-delà du montant du marché. Le maître d’ouvrage doit, notamment, notifier par ordre de service la réfaction de prix appliquée en cas de transport en surcharge (CCAG travaux, art. 25.2), le piquetage général d’implantation des ouvrages (CCAG travaux, art. 27.1), les mesures à

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travaux, art. 49 - CE, 17 février 1978, Sté Cie française d’entreprises CE, 25 juin 1971, Sté établissements Marius Sériès). Il faut savoir cependant que les CCAG rappellent l’obligation d’obéir aux ordres de service, sous réserve de quelques rares hypothèses. Ainsi, le CCAG travaux prévoit dans ses articles 15.2.2 et 3.8.2 que l’entreprise peut s’opposer dans les quinze jours à l’exécution d’un ordre de service si la masse des travaux modifiés excède le dixième de la masse initiale. Dans son article 46.2.1, il est indiqué que l’entreprise peut refuser d’exécuter un ordre de commencer les travaux qui intervient après un délai de six mois suivant la notification du marché (ou après dépassement du délai indiqué dans le marché). (1) CAA Marseille, 27 avril 2004, req. n° 99MA01468

À retenir L’ordre de service est la décision de l’acheteur qui précise les modalités d’exécution des prestations prévues par le marché. L’OS doit être écrit, daté, numéroté et signé par le maître d’œuvre, en veillant particulièrement aux modalités de sa notification.

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JURISPRUDENCE Par Patrick Martin-Genier, rapporteur public, tribunal administratif de Paris

Protection des travailleurs étrangers sur les chantiers et le recours à l’interprétariat Le Conseil d’État (1) admet la légalité des « clauses d’interprétariat » d’un marché public imposant le recours à un interprète pour exposer les droits sociaux dont disposent les travailleurs et les règles de sécurité qu’ils doivent respecter sur le chantier. Une telle clause n’est pas discriminatoire et ne va pas au-delà ce qui est nécessaire pour poursuivre un objectif d’intérêt général.

A

près une première consultation déclarée sans suite, la région Pays de la Loire avait publié un avis d’appel public à la concurrence en vue de la passation d’un marché public. Avant la date limite de remise des offres, le préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, avait demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes d’annuler cette procédure de passation pour supprimer les « clauses d’interprétariat » introduites dans les pièces de ce marché en référence à l’article L.1262-4 du code du travail qui concerne les règles applicables aux travailleurs détachés. Il s’agit de la mise en œuvre en droit national de l’article 3, §1, de la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services. L’objectif est notamment de veiller aux libertés des travailleurs dans la relation de travail, d’éviter les discriminations, de prévoir l’exercice du droit de grève, d’assurer l’égalité hommes-femmes. Le code du travail, qui doit lutter contre la concurrence sociale déloyale, instaure une obligation de vigilance et responsabilité du maître d’ouvrage en matière d’application de la législation du travail. En application des dispositions de la directive et du code du travail, un pouvoir adjudicateur peut imposer des exigences particulières pour prendre en compte des considérations relatives à

l’économie, l’innovation, l’environnement, au domaine social ou à l’emploi. Mais elles doivent présenter un lien avec l’objet du marché. Pour le Conseil d’État, « une mesure nationale qui restreint l’exercice des libertés fondamentales garanties par le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ne peut être admise qu’à la condition qu’elle poursuive un objectif d’intérêt général, qu’elle soit propre à garantir la réalisation de celui-ci et qu’elle n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire ». Il appartient au juge des référés, saisi sur le fondement de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, de constater le manquement du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence.

Les travailleurs étrangers et leurs droits sociaux Ainsi en va-t-il de la clause d’exécution relative à une information sur les droits sociaux. Selon la « clause d’interprétariat » (art. 8.4.1 du CCAP) en matière de protection sociale, l’intervention d’un interprète qualifié peut être demandée aux frais du titulaire du marché pour permettre au maître d’ouvrage d’exercer son obligation de prévention et de vigilance en matière d’application de la législation du travail. Il s’agit de s’assurer que les personnels sur le chantier ne maîtrisant pas la langue française comprennent le socle minimal de normes sociales (en vertu notamment de l’article L.1262-4

du code du travail). Une telle clause présente un lien suffisant avec l’objet du marché de travaux en cause. De plus, elle s’applique à toute entreprise quelle que soit sa nationalité : elle n’est donc pas discriminatoire ni ne constitue une entrave à la libre circulation. Mais le ministre de l’Intérieur estimait que cette clause était susceptible, par ses effets, de restreindre l’exercice effectif d’une liberté fondamentale garantie par le droit de l’Union. Pour le Conseil d’État, une telle clause doit garantir la réalisation d’un objectif d’intérêt général lié à la protection sociale des travailleurs du secteur de la construction en rendant effectif l’accès de personnels peu qualifiés à leurs droits sociaux. Mais sa mise en œuvre par le maître d’ouvrage ne doit pas occasionner de coûts excessifs au titulaire du marché. L’appréciation du niveau suffisant de maîtrise de la langue française se fait au cas par cas parmi les personnels employés. Un échange oral, avant l’exécution des travaux, avec un interprète qualifié, doit permettre d’expliquer aux travailleurs leurs droits sociaux essentiels. Ainsi, si une telle clause peut être susceptible de restreindre l’exercice effectif d’une liberté fondamentale garantie par le droit de l’Union, elle poursuit un objectif d’intérêt général dont elle garantit la réalisation « sans aller au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre ». (1) CE, 4 décembre 2017, ministre de l’Intérieur c/région Pays de la Loire, req. n° 413366

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JURISPRUDENCE Par Théo Martin, attaché territorial

Une commune a résilié, pour motif d’intérêt général, un marché de maîtrise d’œuvre. Le juge des référés a fait droit à la demande de certains membres du groupement qui avaient demandé la reprise des relations contractuelles, dans le cadre d’un référésuspension. Le Conseil d’État rappelle les dispositions de l’article L.521-1 du code de justice administrative sur les pouvoirs du juge des référés dans le cadre d’une requête en annulation. Le juge des référés peut ainsi ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie. La notion d’urgence est-elle ici remplie ? En l’espèce, le Conseil d’État relève que le juge des référés s’est fondé sur l’absence de manquement des titulaires du marché à leurs obligations pour caractériser la condition d’urgence, « alors qu’une telle circonstance est sans incidence sur l’appréciation de l’urgence et qu’en tout état de cause, l’urgence attachée à la reprise des relations contractuelles ne saurait se présumer ». Le Conseil d’État considère que les sociétés requérantes n’établissent pas que la résiliation litigieuse porterait une atteinte grave et immédiate à leurs intérêts et, par suite, de l’urgence à ordonner la reprise des relations contractuelles. Le Conseil d’État décide qu’il n’y a pas lieu de suspendre l’exécution de la décision de résiliation du marché en vue d’une reprise des relations contractuelles et annule par conséquent l’ordonnance du juge des référés. Conseil d’État, req. n° 412066

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Reprise des relations contractuelles et référé-suspension

Légalité d’un avenant Un syndicat intercommunal de valorisation des déchets a conclu un marché de travaux de mise aux normes d’une usine d’incinération. Trois avenants ont été convenus en cours d’exécution afin de modifier les travaux et augmenter le montant du marché. Si le premier avenant a également eu pour objet de modifier la clause de révision des prix, le troisième a, tout en modifiant certains travaux, déterminé un montant du marché « ferme et définitif ». Dans le cadre d’un pourvoi en cassation menée par la société requérante, le Conseil d’État doit se prononcer sur la légalité de cet avenant modifiant les règles de détermination du prix initial du marché public. Le juge s’appuie sur l’article 17 du code des marchés publics, dans sa version de 2001 applicable en l’espèce. Cet article ne s’oppose pas « à ce que les parties à un marché conclu à prix définitif puissent convenir par avenant, en particulier lorsque l’exécution du marché approche de son terme, de modifier le mécanisme d’évolution du prix définitif pour passer d’un prix révisable à un prix ferme ». Pour le juge, même si le troisième avenant a modifié le mécanisme de fixation des prix du marché, en fin d’exécution de celui-ci, dans un sens désavantageux à son titulaire, la suppression de la clause relative à la révision des prix n’a pas bouleversé l’économie générale du marché. Conseil d’État, 20 décembre 2017, req. n°408562

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RÉPONSES MINISTÉRIELLES

Un bail rural peut-il être oral ? Conformément à l’article L.411-4 du code rural et de la pêche maritime, les contrats de baux ruraux doivent être écrits. Toutefois, le même article précise que, à défaut d’être écrits, les baux conclus verbalement sont censés être faits pour neuf ans aux clauses et conditions du contrat type établi dans chaque département par la commission consultative des baux ruraux. La preuve de l’existence d’un bail même verbal peut être apportée par tous moyens (par exemple preuve de paiement d’un fermage). Elle appartient selon les règles du droit commun à celui qui réclame l’exécution de l’obligation. Rép. min. à QE n° 02039, JO Sénat du 25 janvier 2018, p. 300

Lorsqu’un marché est traité à prix global et forfaitaire, l’offre du candidat doit-elle être accompagnée d’un cadre de décomposition de ce prix ? Aucune disposition du droit des marchés publics, lorsqu’un marché est traité à prix global et forfaitaire, n’impose à un candidat de produire une décomposition du prix global et forfaitaire si l’acheteur ne la demande pas. De même, les acheteurs ne sont pas plus obligés d’en prévoir une au titre du dossier de consultation, ni de l’exiger si l’analyse du prix du marché ne le nécessite pas. Par ailleurs, si le règlement de consultation est obligatoire dans tous ses éléments (CE 23 novembre 2005, SARL Axialogic, req. n° 267494), l’acheteur « peut s’affranchir des exigences du règlement de consultation quand la fourniture des éléments demandés ne présente pas d’utilité pour l’appréciation de l’offre » (CE 22 décembre 2008, ville de Marseille, req. n° 314244). A fortiori, l’acheteur n’est pas tenu de prendre en compte un document dont il n’a pas sollicité la production, notamment si ce dernier n’est pas jugé utile à l’analyse de l’offre. D’une façon générale, l’offre d’un candidat qui avait fourni à l’appui de celle-ci une décomposition du

prix global et forfaitaire, sans qu’elle eût été demandée par l’acheteur, et qui n’a en principe vocation qu’à expliciter le prix proposé, n’apparaît pas, par elle-même, non conforme. Toutefois, le juge a par ailleurs considéré qu’un pouvoir adjudicateur peut rejeter une offre qui méconnaîtrait les exigences du dossier de consultation et, notamment, le cas échéant, le bordereau de décomposition des prix (CAA de Nantes, 6 juillet 2017, Sté Erri, req. n° 16NT01702). En fonction des circonstances de l’espèce, la réponse à apporter peut donc être différente. En toute hypothèse, il convient de rappeler « que l’utilité d’une information au regard de l’appréciation des offres relève de l’appréciation souveraine des juges du fond » (CE 22 décembre 2008, ville de Marseille, précité). Rép. min. à QE n° 01806, JO Sénat du 18 janvier 2018, p. 214

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Les collectivités locales peuvent-elles légalement acquérir des biens pour pourvoir à leurs besoins auprès de vendeurs dépourvus de numéro Siren ou Siret ? Les articles 4 et 5 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics permettent aux collectivités territoriales de conclure, à titre onéreux, un marché public pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures et de services et d’acquérir ainsi des biens d’occasion auprès de tout opérateur économique que ce dernier soit une personne morale ou une personne physique. L’annexe C du décret n° 2016-33 du 20 janvier 2016 fixant la liste des pièces justificatives des dépenses des collectivités territoriales, des établissements publics locaux et des établissements publics de santé, n’exige pas un code Siret lorsque le vendeur est une personne physique. En effet, l’annexe C précise, parmi les mentions obligatoires devant figurer sur les factures ou les mémoires, qu’y figure « le cas échéant, le numéro de Siren ou de Siret ». Aussi, lorsque l’opérateur économique est un particulier qui ne saurait posséder un code Siret du fait de sa qualité de personne physique, le numéro de Siret n’a pas à être exigé pour le paiement de la dépense. Rép. min. à QE n° 02014, JO Sénat du 1er février 2018, p. 422

n°172 Mars 2018 • La revue des marchés publics

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INITIATIVE Par Frédéric Boudeau, DGS d’une communauté de communes

La ville de Six-Fours a organisé son second forum de la commande publique Consciente de la nécessité d’une relation de proximité entre les entreprises locales et les prescripteurs de la commande publique, la ville de Six-Fours-les-Plages a organisé le 1er février dernier la deuxième édition de son forum consacré à la commande publique. Une manifestation qui remporte un franc succès auprès des opérateurs économiques.

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L’objectif de la manifestation Le principal objectif de la manifestation était, comme en 2015, de sensibiliser les petites et moyennes entreprises aux dispositifs d’accès à la commande publique, et en leur rappelant le mécanisme des clauses d’insertion sociale dans les marchés publics de la ville. Ce faisant, les élus et les techniciens municipaux n’ont pas manqué de souligner le contexte particulier dans lequel se déroulait cet échange en raison de la création de la métropole de Toulon Provence Méditerranée (TPM). En effet, cette nouvelle circonstance induit une nouvelle répartition des compétences entre l’intercommunalité et la ville et, donc, une évolution du contexte juridique de la commande publique pour les entreprises. Cependant, il a été confirmé le rôle de référent

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La visite des stands était libre et possible dès le début de la manifestation.

©Florian Pépellin-Wikimedia

n 2015, la ville de SixFours avait organisé le premier forum de la commande publique, permettant de réunir entre 130 et 140 entrepreneurs. Forte de cette première expérience, la ville a décidé de renouveler cette année la manifestation, qui a été également l’occasion de signer la charte de soutien à l’activité économique de proximité avec la chambre des métiers et de l’artisanat. de proximité de la commune vis-à-vis des acteurs de la commande publique, notamment dans l’accompagnement et l’information des entreprises. La manifestation comportait quatre temps bien distincts sur une tranche horaire réduite de deux heures : • accueil et discours d’accueil de Jérémy Vidal (conseiller municipal, président de la commission d’appels d’offres et conseiller métropolitain) ; • retours d’expériences et interventions de la métropole TPM, de la ville de Six-Fours et de la maison de l’emploi TPM ; • signature par Jean-Sébastien Vialatte, député honoraire, maire de Six-Fours-les-plages, vice-président de la métropole TPM, de la charte de soutien à l’activité économique de proximité avec la chambre des métiers et de l’artisanat ; • cocktail de clôture.

Une manifestation soutenue par les prescripteurs de la commande publique et les entrepreneurs

Signe de l’intérêt que portent les grands prescripteurs de la commande publique locale et les entrepreneurs à cet évènement, les participations de la métropole Toulon Provence Méditerranée, du conseil départemental, de l’office public de l’habitat « Var Habitat », du syndicat intercommunal varois d’aide aux achats divers (Sivaad) et du syndicat mixte d’électrification du Var (Symielec) ont été remarquées, tout comme celles des organisations professionnelles : Capeb, la fédération du BTP, la chambre de commerce et d’industrie du Var, la chambre des métiers et de l’artisanat et la jeune chambre économique de Toulon.

Contact Mairie de Six-Fours-les-Plages Service des marchés publics 2 place du 18-Juin-1940 83140 Six-Fours-les-Plages Téléphone : 04 94 34 93 09.

La revue des marchés publics • n°172 Mars 2018

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FICHE PRATIQUE Par Frédéric Boudeau, DGS d’une communauté de communes

L’application de pénalités lors de l’exécution d’un marché public L’application de pénalités par le pouvoir adjudicateur à l’occasion de l’exécution d’un marché public de travaux, de fournitures ou de services suppose le respect de certaines conditions de fond et de forme dont dépend la légalité des sanctions infligées.

L

es clauses de pénalités prévues dans les marchés publics présentent, à la fois, un caractère curatif en réglant contractuellement la sanction de l’inexécution totale ou partielle d’une obligation mais également un caractère préventif en tant qu’elle affiche la sanction à laquelle l’entreprise s’expose en cas d’inexécution de ses obligations.

Le caractère express de la clause pénale L’application de pénalités suppose expressément l’existence d’une clause dans le cahier des charges du marché public. Le juge a estimé « qu’en l’absence de prévisions contraires du cahier des clauses administratives particulières (CCAP), le cahier des clauses administratives générales (CCAG) permet l’application de pénalités en cas de retard d’exécution du marché dans sa globalité ou de l’une de ses tranches ; que seul le cahier des clauses administratives particulières peut prévoir des pénalités en cas de non-respect de délais partiels relatifs à certains ouvrages, parties d’ouvrages ou ensemble de prestations qui ne constituent pas des tranches (CE, 23 février 2004, région Réunion, req. n° 246622) ».

La clause pénale, élément substantiel de l’offre Dans une affaire relative à la dévolution d’un marché public en vue de l’acquisition d’un progiciel de gestion

du parc locatif au terme d’une procédure de dialogue compétitif dévolu sous l’empire de l’ancien code des marchés publics, le juge administratif a indiqué que la prise en compte des clauses de pénalités et leur acceptation constituent un élément substantiel de l’offre du candidat. Ainsi, il a été jugé « qu’eu égard à ses effets sur l’équilibre économique du contrat, la modification du régime des pénalités de retard touchait aux éléments substantiels de l’offre de la société, au sens des dispositions du VIII de l’article 67 du code des marchés publics » (CE, 1 er juillet 2015, Société Aareon France, req. n° 384209).

Les conditions de légalité des clauses pénales Le droit des contrats publics laisse une grande liberté contractuelle au pouvoir adjudicateur pour définir et aménager des clauses pénales dans le cahier des charges de chaque marché public, soit par disposition des documents propres au marché, soit par renvoi au CCAG. S’agissant des conditions de fond, le pouvoir adjudicateur dispose d’un pouvoir d’appréciation discrétionnaire pour déterminer les causes justifiant la mise en œuvre de pénalités en exécution d’un marché public. Cependant, les cahiers des clauses administratives générales constituent des documents de référence, dont s’inspirent souvent les pouvoirs adjudicateurs dans la rédaction de leur cahier des clauses administra-

tives particulières. Classiquement, il convient de distinguer deux séries de motifs : • d’une part, ceux qui ont trait à l’inexécution totale ou partielle, sur les plans quantitatifs et qualitatifs, des prestations du marché public, et qui se traduiront par le non-respect des délais contractuels d’exécution ; • d’autre part, ceux qui portent sur l’absence ou le retard de communication de documents (documentation technique, documents juridiques et décomptes financiers) dans les délais impartis par le marché public. Par ailleurs, le manquement aux obligations contractuelles doit être imputable à l’entreprise titulaire du marché. L’administration doit caractériser la faute contractuelle de l’entreprise pour prétendre au déclenchement du versement de pénalités. Le pouvoir adjudicateur doit prouver la causalité adéquate entre le comportement de l’entreprise et l’inexécution du marché (CAA Marseille, 30 mars 2004, Buromag Ugolini, req. n° 02MA00551). En cas de sous-traitance, le juge administratif a également consacré le principe selon lequel « le titulaire du marché reste seul tenu, à l’égard du maître d’ouvrage, de l’exécution du contrat tant pour les travaux qu’il réalise lui-même, que pour ceux qui ont été confiés à un sous-traitant, ou pour la qualité des produits utilisés (CAA Versailles, 3 juillet 2013, Alliance Entreprise, req. n°11VE01545). Dans l’hypothèse de l’application fff

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FICHE PRATIQUE

fff de pénalités de retard, les moda-

lités de détermination des délais d’exécution et de retard servant à la détermination des pénalités sont les suivantes. L’établissement d’un décompte de pénalités pour dépassement des délais d’exécution suppose que l’acheteur public maîtrise deux informations : le délai d’exécution du marché et la date de démarrage d’exécution des prestations. En ce qui concerne le dernier point, il s’agit le plus souvent soit de la date de notification du marché ou d’une de ses pièces, soit une date déterminée par le marché ou un ordre de service. S’agissant de la date à laquelle le délai de retard commence à courir, il est admis en principe par la jurisprudence qu’il s’agit du lendemain du dernier jour d’exécution ou à la date d’expiration du délai contractuel, sauf stipulations contraires dans le marché. Sur le plan procédural, l’application de pénalités ne peut exister dans le silence des stipulations du marché. Les acheteurs publics renvoient à la rédaction des cahiers des clauses administratives générales pour la détermination de la procédure d’application des pénalités. Cependant, les acheteurs publics écrivent de plus en plus fréquemment leurs propres documents contractuels ou dérogent dans leur cahier des clauses administratives particulières aux dispositions du CCAG. L’acheteur public ne doit jamais perdre de vue que le principe juridique guidant la rédaction de la clause pénale est celui du contradictoire. Le rédacteur des documents contractuels du marché devra prendre garde à respecter certaines précautions juridiques. D’une part, le rédacteur du marché peut prévoir ou non la notification d’une mise en demeure préalablement à l’application de pénalités. Si les stipulations du marché prévoient la notification préalable d’une mise en demeure, cette condi-

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tion substantielle de procédure doit être impérativement respectée sous peine d’entacher d’irrégularité le titre de recette correspondant aux décomptes des pénalités. D’autre part, l’automaticité de l’application de pénalités, quand bien même dispensée expressément de mise en demeure préalable, doit reposer sur des constats incontestables, quantifiés et vérifiables, de sorte à garantir le respect du principe du contradictoire.

Le pouvoir de modulation des pénalités du juge administratif La haute juridiction administrative a eu l’occasion de consacrer le pouvoir de modulation des pénalités des juges du fond en indiquant « qu’il est loisible au juge administratif, saisi de conclusions en ce sens, de modérer ou d’augmenter les pénalités de retard résultant du contrat, par application des principes dont s’inspire l’article 1152 du code civil, si ces pénalités atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire eu égard au montant du marché ; qu’après avoir estimé que le montant des pénalités de retard appliquées par l’office, lesquelles s’élevaient à 147 637 euros, soit 56,2 % du montant global du marché, était manifestement excessif, la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en retenant une méthode de calcul fondée sur l’application d’une pénalité unique pour tous les ordres de service émis à la même date, aboutissant à des pénalités d’un montant de 63 264 euros » (Conseil d’État, 29 déc. 2008, office public d’habitations à loyer modéré de Puteaux, requête n°296930). Cette position a été confirmée par un arrêt récent (CE, 20 juin 2016, Société Eurovia Haute-Normandie et Colas Île-de-France Normandie, req. n°376235), dans lequel il a été rappelé « qu’il est loisible au juge

administratif, saisi de conclusions en ce sens, de modérer ou d’augmenter les pénalités de retard résultant du contrat, par application des principes dont s’inspire l’article 1152 du code civil, si ces pénalités atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire eu égard au montant du marché ».

Précision Il convient de rappeler la simplification opérée par l’ordonnance du 23 juillet 2015 ainsi que les décrets 2016-360 et 2016-361 relatifs aux marchés publics qui n’imposent plus la référence aux cahiers des clauses administratives générales, même s’il s’agit d’un marché passé selon une procédure formalisée. Désormais, la référence aux CCAG demeure une simple faculté de l’acheteur public, en fonction de l’objet de la consultation, qui devra préciser dans les documents du marché les dispositions du CCAG auxquelles il déroge. Pour un même préjudice, le juge administratif a rappelé qu’il ne peut y avoir de cumul entre le paiement de pénalités par l’entreprise et la réclamation de dommages et intérêts. Il a été jugé que le préjudice allégué, étant la conséquence du retard apporté à l’exécution du marché, ne saurait donner lieu à la condamnation de l’entreprise à payer à l’hôpital des dommagesintérêts en sus des pénalités de retard prévues par le marché (CE 15 mai 1987, Hôpital rural de Breil-sur-Roya, req. n° 41974). Le montant des pénalités s’applique au montant hors taxes lors de l’établissement des décomptes ou du décompte général et définitif. La taxe sur la valeur ajoutée est donc calculée sur la base d’un montant de prestations hors taxe diminué préalablement du montant des pénalités.

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ANALYSE Anne Gardère, avocate au barreau de Lyon, docteure en droit public

Coopération conventionnelle : attention au spectre de la commande publique ! Principe Les relations conventionnelles conclues à titre gratuit entre communes ou entre communes et EPCI n’entrent pas dans le champ d’application des règles de la commande publique.

S

i, dans la droite ligne du principe d’autonomie institutionnelle régulièrement rappelé par la Cour de justice de l’Union européenne, les transferts de compétences consentis à un groupement de collectivités territoriales par ses membres ne constituent pas des marchés publics (1), tout comme les « délégations de compétences » (2), il n’en va pas nécessairement de même des conventions et contrats divers passés entre collectivités territoriales. Attention donc aux modalités de passation ! En effet, l’article 4 § 2 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics définissant un marché public comme un contrat à titre « onéreux », toute convention de ce type entre collectivités suppose que soit posée préalablement la question de sa soumission, ou pas, aux règles de la commande publique. Certes, les relations conventionnelles conclues à titre purement gratuit entre communes, ou entre communes et établissement public de coopération intercommunale (EPCI) n’entrent pas dans le champ d’application des règles de la commande publique, mais la définition du contrat à titre « onéreux » (3) est large, en tant qu’elle inclut, notamment, les conventions se bornant à prévoir de simples remboursements de frais (4). À noter que les « subventions », au sens de l’article 9-1 de la loi

Examen La question de la soumission préalable, ou pas, d’une convention aux règles de la commande publique suppose un examen préalable minutieux.

n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, sont exclues du champ d’application des deux ordonnances par les articles 7 de celles-ci. Les subventions sont définies comme les « contributions facultatives de toute nature, valorisées dans l’acte d’attribution, décidées par les autorités administratives et les organismes chargés de la gestion d’un service public industriel et commercial, justifiées par un intérêt général et destinées à la réalisation d’une action ou d’un projet d’investissement, à la contribution au développement d’activités ou au financement global de l’activité de l’organisme de droit privé bénéficiaire. Ces actions, projets ou activités sont initiés, définis et mis en œuvre par les organismes de droit privé bénéficiaires. Ces contributions ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités ou organismes qui les accordent ». Dès lors, la question de la soumission préalable, ou pas, aux règles de la commande publique d’une convention suppose un examen préalable minutieux, compte tenu des enjeux potentiels induits, tant au plan du contentieux administratif que pénal. Bien souvent (et indépendamment d’éventuels autres cas d’exemption au regard des règles de la commande publique), les collectivités doivent se poser deux

Type de contrat Les collectivités locales doivent déterminer si le contrat relève d’une exception « in house » ou des « contrats de coopération » entre personnes publiques.

questions successives : le contrat relève-t-il (notamment) d’une exception « in house » ou, sinon, dépend-il de la définition des « contrats de coopération » entre personnes publiques ?

Conventions de quasi-régie Selon l’article 17 de l’ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et l’article 16 de l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession, échappent à l’application des règles de la commande publique les contrats répondant aux critères des contrats communément appelés « in house » ou « prestations intégrées », ou de « quasi-régie », ce dernier vocable étant le terme officiel retenu par les deux ordonnances. Plus particulièrement, le principe est que les règles de la commande publique ne sont, suivant ces dispositions, pas applicables aux prestations accomplies par un groupement constitué de personnes publiques (il ne doit pas comporter de participation directe de capitaux privés, sauf « des formes de participation de capitaux privés sans capacité de contrôle ou de blocage requis par la loi qui ne permettent pas d’exercer une influence décisive sur la personne morale contrôlée »), pour le compte de l’un de ses membres, sous réserve, toutefois, de respecter, outre cette première condi- fff n°172 Mars 2018 • La revue des marchés publics

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ANALYSE

fff tion « organique », deux autres condi-

La plus grande prudence doit être de mise, car le juge, tant national qu’européen, exerce un contrôle précis et in concreto sur le respect des conditions posées par les ordonnances et la jurisprudence.

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tions cumulatives. Tout d’abord, le pouvoir adjudicateur doit être considéré comme exerçant sur le groupement un contrôle « analogue », comparable à celui qu’il applique à ses propres services internes, pouvant, le cas échéant, être mis en œuvre de manière conjointe, voire indirecte (« ce contrôle peut également être exercé par une autre personne morale, qui est elle-même contrôlée de la même manière par le pouvoir adjudicateur ») par les membres du groupement sur ce dernier. La relation « in house » peut même être soit « inversée », puisqu’il est admis que l’entité contrôlée puisse attribuer un marché au « pouvoir adjudicateur qui la contrôle » (y compris en cas de contrôle conjoint), soit « horizontale », puisque l’entité contrôlée peut attribuer un marché « à une autre personne morale contrôlée par le même pouvoir adjudicateur » (sous réserve que cette dernière « ne comporte pas de participation directe de capitaux privés, à l’exception des formes de participation de capitaux privés sans capacité de contrôle ou de blocage requis par la loi qui ne permettent pas d’exercer une influence décisive sur la personne morale contrôlée »). Le contrôle analogue d’un pouvoir ou entité adjudicatrice est désormais expressément défini, dans la droite ligne de la jurisprudence européenne, comme le fait d’exercer une influence « décisive » tant sur les « objectifs stratégiques » que sur les « décisions importantes » du groupement contrôlé. Au-delà du critère du contrôle analogue, le groupement doit ensuite réaliser l’essentiel de ses activités pour le compte de ses membres, soit, en l’état actuel des deux ordonnances, « plus de 80 % de son activité dans le cadre des tâches qui lui sont confiées par le pouvoir adjudicateur qui la contrôle ou par d’autres personnes morales qu’il contrôle ». Lorsque toutes ces conditions sont remplies, la convention est alors située hors du champ d’application des règles de la commande publique. À ce titre sont plus particulière-

ment susceptibles de relever, par exemple, de cette exception, les services communs gérés par un EPCI pour le compte de ses membres (art. L.5211-4-2, CGCT), les mises à disposition de services (art. L.5211-4-1, CGCT) entre EPCI ou groupements de collectivités et leurs membres, de même que les relations entre les actionnaires d’une société publique locale (SPL) et celle-ci. Attention, néanmoins, dans ce dernier cas, car les statuts de la SPL doivent prévoir une rédaction ad hoc et un contrôle renforcé des actionnaires pour que l’exemption puisse jouer (5). La plus grande prudence doit toutefois être de mise car le juge, tant national (6) qu’européen (7), exerce un contrôle précis et in concreto sur le respect des conditions posées par les ordonnances et la jurisprudence.

« Contrats de coopération » entre personnes publiques Nonobstant l’élargissement des cas du « in house », il existe des situations où, faute d’en réunir les conditions et critères, cette théorie ne peut être appliquée dans des relations conventionnelles à titre onéreux entre personnes publiques. Une seconde éventuelle exception doit alors être examinée, celle des « contrats de coopération entre personnes publiques ». En effet, dans la droite ligne de la jurisprudence européenne, l’article 18 de l’ordonnance sur les marchés publics et l’article 17 de l’ordonnance sur les contrats de concession mettent hors de leur champ d’application les contrats entre pouvoirs ou entités adjudicatrices instaurant une coopération ayant pour objet de garantir que les services publics gérés par eux sont « réalisés en vue d’atteindre les objectifs qu’ils ont en commun ». À noter qu'une entité publique peut toujours se porter candidate à un marché, mais « la candidature d’une collectivité territoriale ou de l’un de ses établissements publics de coopération à l’attribution d’un contrat de la commande publique pour répondre aux besoins d’une autre personne publique ne doit pas fausser les conditions de la concurrence ;

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qu’en particulier, le prix proposé par la collectivité territoriale ou l’établissement public de coopération doit être déterminé en prenant en compte l’ensemble des coûts directs et indirects concourant à sa formation, sans que la collectivité publique bénéficie, pour le déterminer, d’un avantage découlant des ressources ou des moyens qui lui sont attribués au titre de ses missions de service public et à condition qu’elle puisse, si nécessaire, en justifier par ses documents comptables ou tout autre moyen d’information approprié » (8). S’agissant des contrats de coopération entre personnes publiques, deux conditions cumulatives doivent être remplies. En premier lieu, la mise en œuvre d’une telle coopération ne doit être motivée que par « des considérations d’intérêt général ». Par référence à la jurisprudence européenne (9) et nationale (10) sur cette question, il convient donc de pouvoir démontrer l’exercice d’une mission de service public qui soit commune aux deux entités, et d’une coopération réciproque entre les parties à la convention. En second lieu, au-delà des clauses financières de la convention, qui doivent se limiter à un remboursement des frais induits par l’application de cette dernière (cf. la jurisprudence citée ci-dessus), les pouvoirs adjudica-

teurs concernés doivent « réaliser sur le marché concurrentiel moins de 20 % des activités concernées par cette coopération ». Ce pourcentage d’activités étant déterminé dans les mêmes conditions que pour les marchés « in house », à savoir en prenant en compte, au cours des trois exercices comptables précédant l’attribution du marché, soit le chiffre d’affaires total moyen, soit « tout autre paramètre approprié » fondé sur les activités, tel que les coûts supportés, par exemple. Au vu de ces critères sont ainsi susceptibles d’entrer dans le champ de cette exception les ententes intercommunales au sens de l’article L.5221-1 du CGCT ou les conventions de prestations de services visées par l’article L.5111-1-1 de ce même code, mais, là aussi, la plus grande prudence s’impose, car, au cas par cas, il est indispensable de vérifier que les critères ci-dessus sont bien remplis.

Références • Ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession. • Code général des collectivités territoriales (CGCT), art. L.5211-4-1 et L.5211-4-2.

(1) CJUE, 21 décembre 2012, « Remondis GmbH & Co. KG region Nord », aff. C-51/15 : « ne constitue pas un marché public un accord passé entre deux collectivités territoriales sur la base duquel celles-ci adoptent un règlement statutaire portant création d’un syndicat de collectivités, personne morale de droit public, et transférant à cette nouvelle entité publique certaines compétences dont ces collectivités étaient investies jusqu’alors et qui sont désormais propres à ce syndicat de collectivités. Toutefois, un tel transfert de compétences concernant l’accomplissement de missions publiques n’existe que s’il porte, à la fois, sur les responsabilités liées à la compétence transférée et sur les pouvoirs qui sont le corollaire de celle-ci, de sorte que l’autorité publique nouvellement compétente dispose d’une autonomie décisionnelle et financière ». (2) Article 7 de l’ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession. L’article 7 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics place également hors de son champ d’application, outre les contrats de travail, « les transferts de compétences ou de responsabilités entre acheteurs soumis à l’ordonnance en vue de l’exercice de missions d’intérêt général sans rémunération de prestations contractuelles ». (3) Selon le code civil (art. 1107), le contrat est à titre onéreux « lorsque chacune des parties reçoit de l’autre un avantage en contrepartie de celui qu’elle procure. Il est à titre gratuit lorsque l’une des parties procure à l’autre un avantage sans attendre ni recevoir de contrepartie ». (4) CJUE 19 décembre 2012, « Azienda Sanitaria Locale di Lecce », aff. C-159/11. (5) CAA de Lyon, 7 novembre 2012, « Commune de Marsannay-la-Côte », req. n° 12LY00811 CAA de Marseille, 6 juillet 2015, « Commune de Saint-Georges-d’Orques », req. n° 13MA03152. (6) CE, 4 mars 2009, « Syndicat national des industries d’information de santé », req. n° 300481 ; TA de Pau, 6 janvier 2009, « Communauté de communes du canton d’Orthez », n° 070188.1. (7) CJCE, « Carbotermo », 11 mai 2006, aff. C-340/04 - 13 novembre 2008, « Coditel Brabant SA », aff. C-324/07 - 10 septembre 2009, « Sea SRL c/Comune di Ponte Nossa », aff. C-573/07 29 novembre 2012, « Econord SpA », aff. C-182/11 et 183/11. (8) CAA de Nantes, 12 avril 2017, n° 15NT00322. (9) CJUE, 9 juin 2009, « Commission des Communautés européennes / République fédérale d’Allemagne », aff. C-480/06 ; 19 décembre 2012, « Azienda Sanitaria Locale di Lecce », aff. C-159/11 ; 16 mai 2013, « Consulta regionale ordine ingegneri della Lombardia c/Comune di Pavia », aff. C-564/11 ; 20 juin 2013, « Consiglio nazionale degli ingegneri c/Comune di Castelvecchio Subequo », aff. C-352/12. (10) CE, 3 février 2012, « Commune de Veyrier-du-Lac », req. n° 353737.

La candidature d’une collectivité territoriale ou de l’un de ses établissements publics de coopération à l’attribution d’un contrat de la commande publique pour répondre aux besoins d’une autre personne publique ne doit pas fausser les conditions de la concurrence.

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MÉTIER : ACHETEUR Par Franck Pistone, acheteur public

Production : en finir avec le taylorisme Dans une collectivité, la litanie des marchés à monter aboutit à des chiffres assimilables à une production annuelle tant ils sont importants. Ce volume est perpétuellement en croissance et pèse souvent sur les agents concernés. Le dévouement de ces agents en charge des « marchés » ne suffit pas toujours à éviter les pièges de cette production en série de pièces marchés.

L

a problématique inhérente à la production de pièces de marchés publics est un marronnier qui prospère. Si l’on en est venu à parler de « production » en matière de marchés publics, ce n’est pas un hasard, car les problématiques générées par le volume des marchés lancés impactent souvent et sévèrement la qualité des pièces de marchés créées par l’acheteur. Un vrai problème industriel en quelque sorte. Théoriquement, l’accroissement de travail peut améliorer la compétence en « montage de pièces marchés » de l’agent qui en est chargé, puisqu’il pratique non plus ponctuellement mais régulièrement. Mais, au-delà d’un certain point d’équilibre, ce volume de production rejaillit sur la qualité : nous entrons dans le domaine du copier-coller et de la repasse. Avouons-le : nous avons tous pratiqué la repasse, en régénérant des pièces marchés pour les réutiliser sur plusieurs marchés successifs, quitte à constituer des « réservoirs » de pièces utilisables en cas de lancement de nouveaux marchés. Dans les faits, cette solution pragmatique au problème posé par la « repasse » a sou-

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vent abouti à la catastrophe. Une catastrophe silencieuse, à coup de coquilles et de mauvais copier-coller, une accumulation d’inexactitudes, de mauvais indices Insee pour la révision des prix, d’articles portant sur un CCAG services dans un marché de produits, et vice versa, cochez la mention inutile. Cette pratique est sans conséquence grave jusqu’à ce qu’un référé précontractuel se présente et que la situation dégénère. Alors, il convient de se poser la question cruciale : quelle est la valeur juridique de ces pièces marchés farcies de ce que l’on appelle trop aimablement et avec une bienveillance un peu déplacée « coquilles » voire « approximations »… Cette valeur juridique est sévèrement écornée, au même titre que la crédibilité de l’acheteur public et de la collectivité. L’arrivée des logiciels n’a pas mis fin à ce genre de danger : le logiciel marchés ne bénéficie pas d’une intelligence artificielle qui exonérerait l’acheteur public de ses mauvaises habitudes. Trop souvent la routine prend le pouvoir et fait répondre à l’agent de manière approximative sans nécessairement prendre conscience que l’orientation du document final en sera changée, subtilement...

L’art contemporain se substitue au code des marchés Résultat, là où le logiciel devrait éradiquer les approximations, il se produit le contraire. Nous avons pu constater dans les cas les plus pimentés que les pièces produites confinaient à l’abstraction et relevaient non plus du code des marchés publics mais bel et bien d’art contemporain.Comment sortir par le haut de cette situation intenable : - Vous ne disposez pas de logiciel marchés dans votre collectivité : mettez en place une archive de pièces marchés, mais en extrayant des pièces

de référence. Celles-ci, vérifiées, classées et actualisées, pourront vous servir de réservoir en libre-service pour les agents chargés de lancer des marchés. Avantage : vous contrôlez la source des pièces marchés et limitez drastiquement toute conséquence funeste de la «repasse ». - Vous disposez d’un logiciel marchés : approfondir la compréhension de l’interaction entre la fabrication de la pièce (généralement un QCM) et le produit final est nécessaire pour tous les référents marchés. Avantage : vous réduisez l’effet classique d’un logiciel marchés qui, généralement, déconnecte l’agent des bases de son métier « marchés ». In fine, nous réalisons que le métier « marché », assisté ou pas par un logiciel, recèle des spécificités et des problématiques particulières que seule une professionnalisation de la filière peut solutionner, recoupant ainsi la question de la polyvalence des agents et de la spécialité par métier. Ceux qui parlent de coquilles ne saisissent pas cet enjeu ; ceux qui parlent de valeur juridique du document le saisissent. Choisissez votre camp.

À retenir • La production de pièces « marchés » est un des socles du métier. La routine peut vite s’installer, et la routine est assassine. • Contrôler la source ou la production de ces pièces marchés est vital pour la sécurité de vos achats : aucune coquille n’est anodine. • Logiciel de génération de pièces ou réservoir de pièces marchés, il faut s’assurer que l’outil est qualitatif mais surtout que l’agent a la formation nécessaire pour comprendre les pièces marchés. Cela relève du métier achat, pas du secrétariat.

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JOURNÉE D’ÉTUDE

MARDI 29 MAI 2018 - PARIS Mensuel édité par Territorial, SAS au capital de 1 259 907 euros - Siège social : Antony Parc 2 - 10 place du Général de Gaulle - La Croix de Berny - BP 20 156 92186 Antony CEDEX Bureaux : Espace Cévé, 58 cours Becquart Castelbon, 38500 Voiron RCS NANTERRE : 404 926 958 • N° SIRET : 404 926 958 00020 - Code APE : 5813Z N° TVA intracommunautaire : FR 28 404 926 958 • Commission paritaire : 1021 T 79071 • ISSN 2115-1415 • Dépôt légal : à parution www.territorial.fr

Travaux routiers QUELLES SOLUTIONS POUR ATTEINDRE LES OBJECTIFS DE RECYCLAGE DES MATÉRIAUX • Quelles obligations réglementaires s’imposent aux maîtres d’ouvrage en matière de recyclage

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• Matériaux alternatifs : quelles sont les ressources • Sécurité, caractéristiques mécaniques, contraintes environnementales, quels sont les freins à l’usage de ces matériaux alternatifs

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• Comment intégrer des clauses « matériaux recyclés » dans les dossiers de consultation des entreprises

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• Quelles données collectées et quels outils de suivi utiliser pour répondre aux objectifs de la loi

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La revue des marchés publics • n°172 Mars 2018

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DOSSIERS D’EXPERTS

La gestion administrative et financière des marchés publics Du management à la modification du marché Par Patrice Cossalter, avocat à la cour, société d’avocats Légitima

L’ouvrage propose une approche synthétique de la gestion financière comme de la gestion administrative, de la notification du marché jusqu’à son solde. Il aborde ainsi des thèmes tels que les prix, leurs variations, les avances et acomptes, les garanties, les décomptes et la demande de solde pour ce qui est de la gestion financière, mais aussi les ordres de service ou les constatations pour la gestion administrative. Une part importante de l’ouvrage est consacrée à la modification du marché, domaine qui a toujours été très sensible. L’ouvrage est à jour de la jurisprudence et des textes les plus récents. Il comprend aussi de nombreux exemples et des documents types pour faciliter le travail quotidien du praticien.

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