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V. La Petite Coursière

Sophia était une enfant douce et joyeuse, qui vivait avec ses parents dans un

village sorcier. Sa famille tenait une boutique d’Apothicaire, et souvent Sophia

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aidait ses parents à livrer les remèdes. Tout le monde la connaissait au village,

et tout le monde l’aimait, la petite coursière de l’Apothicaire.

Toutes les portes lui étaient ouvertes.

Un jour, alors qu’elle jouait dans le grenier avec deux de ses amis, les deux

garçons se chamaillèrent et ils firent tomber un grand drap ; le tissu glissa sur

un cadre suranné et révéla leur reflet. Les deux garçons se désintéressèrent vite

du vieux miroir, et Sophia les suivit pour aller jouer près de la rivière. Mais le

soir venu, elle revint admirer le Miroir au grenier, pour en caresser le cadre

gravé en contemplant les spirales qui l’ornaient… Et c ’est ainsi qu’elle reçut la

Pierre.

Mais l’Onyx brumeux réagit différemment cette fois.

Quand Sophia croisa la doyenne du village, le ciel s’assombrit et une lune

ronde éclipsa le soleil. Sur le chemin qui menait au puits, elle vit la doyenne

face à un loup-garou gris. Le soleil revint et les oiseaux continuèrent leur

chant, Sophia salua la doyenne en ignorant son imagination d’enfant. Le lendemain la doyenne n’était plus là et le puits était plein de sang.

Le jour suivant, la petite coursière croisa le marchand qui partait en ville, elle

vit qu’il serait attaqué par des Brigands. Cette fois, elle se fia aux visions de la

Pierre et le prévint. Le marchand, alerté, prit son fils avec lui, celui qui était

bon duelliste, ils chassèrent les Brigands et ils revinrent vivants.

Sophia ne voyait pas son propre destin comme les précédents propriétaires de

la Pierre, elle ne voyait que celui des autres. Effrayée par tous les malheurs qui

allaient survenir, elle se mit à conseiller les gens à l’aide de ses visions et à leur interdire de sortir ou d’agir à leur façon. Elle ne pensait qu’à leur bien, mais à

chaque malheur qui survenait, elle s’en faisait le messager.

Les villageois commencèrent à s’effrayer de cette petite coursière qui ne portaient plus désormais que les malheurs et les chagrins.

Toutes les portes se fermèrent.

Abandonnée de tous, elle partit pleurer seule près de la rivière ; là, elle sentait

l’aura glacée de la Pierre irradier dans sa main. Elle se rappela le temps où

elle n’était que la petite Coursière qui courait joyeusement pour apporter les remèdes, sans connaître les lendemains et les destins. Sophia regarda une

dernière fois les voiles brumeux qui tournoyaient comme des spectres dans

l’Onyx noir ; elle avait fait son choix. La Pierre s ’envola jusque dans la rivière.

Aussitôt les visions se dissipèrent comme des nuages d’orage découvrant le ciel

bleu. La petite coursière prit sa baguette et retira le souvenir du Miroir aux

malheurs de son esprit, elle contempla le fil nacré un instant puis le versa dans

la rivière également. Ainsi, elle ne serait plus tentée de retourner le voir.

Bien vite, elle redevint la petite Coursière qui courait en riant, ne portant plus

désormais que les remèdes de l’Apothicaire, et de nouveau tous l’aimèrent.