Courrier International

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28/01/09

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▶ Les heurts entre

Shaul Schwarz/Getty Images/AFP

la police israélienne et les colons sont fréquents. Ici, des habitants juifs d’Amona, en Cisjordanie, font barrage aux forces de l’ordre.

Expulsion

“Les Arabes de Jérusalem-Est, qui peuvent se déplacer librement dans la capitale grâce à leur carte d’identité, tirent profit de leur statut privilégié pour semer la mort et la destruction”, affirme Sam Goldenwood, ancien membre des services de sécurité israéliens, dans Ha’Aretz. Il préconise de retirer le droit de résidence aux membres des familles de terroristes, de les expulser de Jérusalem, de supprimer le droit au travail de tous les résidents de Jérusalem-Est ayant un passé criminel, voire de leur retirer le droit de résidence et de les expulser vers Gaza.

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Il faut évacuer le quartier juif d’Hébron VIOLENCE Jouissant d’une réelle

impunité, les colons juifs religieux font la loi à Hébron. Le massacre des Palestiniens est une question de temps, prédit Ha’Aretz. HA’ARETZ (extraits)

Tel-Aviv

Y

igal Amir prétend que les opposants aux accords [de paix] d’Oslo de 1993 (c'est-à-dire les leaders de droite comme Ariel Sharon, Rehavam Zeevi et Raphaël Eytan) lui ont fourni le mobile pour assassiner le Premier ministreYitzhak Rabin [à Tel-Aviv, le 4 novembre 1995]. Amir aurait puisé son inspiration auprès de Baruch Goldstein et de ses camarades. En février 1994, Amir était allé aux funérailles de Goldstein pour rendre un dernier hommage à celui qui avait assassiné vingt-neuf Palestiniens pendant qu’ils priaient au caveau des Patriarches [à Hébron, le 24 février 1994]. Si Baruch Goldstein a fini par devenir un héros et par faire l’objet d’un pèlerinage sur sa tombe à Kiryat Arba [colonie urbaine jumelle d’Hébron], on le doit à l’activisme de Kahana Haï [“Kahane est vivant”, du nom de Meir Kahane, fondateur du mouvement fasciste juif Kakh, assassiné à New York en 1990]. La violence déployée par les colons juifs d’Hébron contre les soldats devrait suffire à convaincre nos responsables militaires et politiques qu’autoriser la présence de ces voyous au cœur d’une zone si volatile revient à jouer avec le feu. Cer tes, pour l’instant, ce gang “se contente” de saccager les tombes du vieux cimetière musulman, de caillasser les

maisons et les véhicules appartenant aux voisins palestiniens et de mettre à sac leurs champs. Mais le prochain massacre de Palestiniens n’est sans doute plus qu’une question de temps. Les armes ne sont pas précisément ce qui manque à tout ce beau monde, tandis que la mort ne semble pas les effrayer. “On meurt tous un jour”, répond Anat Cohen, une habitante de la colonie juive de la vieille ville d’Hébron, à Jeffrey Goldberg, un reporter du New York Times, qui lui demande comment elle peut laisser son jeune fils jouer dans une rue où il risque d’être abattu par des snipers palestiniens. “Mais, au moins, sa mort sanctifiera le nom de Dieu”, conclut-elle. Anat Cohen est la fille de Moshe Zar, un responsable de l’ancien Mouvement de la clandestinité juive [groupuscule ultranationaliste religieux des années 1980, responsable d’attentats antipalestiniens et d’une tentative de destruction à l’explosif des mosquées du dôme du Rocher et d’Al-Aqsa]. Quant à Dov Lior, président du conseil rabbinique de Judée et Samarie [appellation biblique de la Cisjordanie] et aumônier principal de Kiryat Arba, il consacre toute son énergie à fournir une légitimité religieuse à la mise sur pied d’une unité de “partisans” juifs pour combattre “l’ennemi israélien”. Lior n’hésite pas à comparer l’évacuation des avant-postes illégaux à la déportation de sa famille par les nazis. Le lendemain du massacre d’Hébron, certains proches de Yitzhak Rabin avaient tenté de persuader le Premier ministre de profiter du choc provoqué dans l’opinion pour expulser les fanatiques du quartier juif. Le conseiller juridique du gouvernement lui avait même assuré que le commandant de la région militaire [israélienne] d’Hébron était pleinement compétent

pour invalider les arrêtés d’expropriation émis par le gouvernement militaire dans les années 1970 pour “raisons de sécurité”, lequel avait légalisé l’implantation des colons au cœur de la vieille ville. Seulement, plutôt que d’évacuer les colons, Rabin, craignant plus que tout une “guerre fratricide”, avait décidé d’imposer un couvre-feu étendu aux quartiers palestiniens d’Hébron, pour prévenir toute vengeance de leur part. Six mois plus tard, le Hamas lançait sa vague d’attentats suicides. Steinberg, un ancien expert du Shabak [Renseignements généraux israéliens] pour les Affaires palestiniennes, affirme que le massacre commis par Baruch Goldstein et les suites données par le gouvernement israélien sont la cause directe du virage opéré par le Hamas, qui dès lors ne concentra plus ses attaques contre des cibles militaires dans les Territoires, mais contre des cibles civiles sur le territoire israélien. Aujourd’hui, la vie suit son cours. Les admirateurs de Goldstein continuent de violenter leurs voisins palestiniens, dont beaucoup ont abandonné leurs maisons, tandis que ceux qui, parmi les policiers et les militaires israéliens, refusent de fermer les yeux sur les crimes des colons sont victimes de leur harcèlement. Au point que certains colons commencent eux aussi à appréhender l’apparition d’un “Yigal Goldstein”. Ehoud Barak [ministre de la Défense] et Ehoud Olmert [Premier ministre démissionnaire] ont jusqu’aux élections [du 10 mai 2009] pour réparer l’erreur de Yitzhak Rabin et montrer aux peuples israélien et palestinien qu’Israël ne se contente plus de faire des déclarations d’intention en faveur de la paix. Il faut évacuer le quartier juif d’Hébron. Akiva Eldar


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