D irecteur :
Antoine TURMO Adresse : Vle Union Régionale C. N. T. Bourse du T rav ail P lace S a in t-S e rn in TO U LO U SE (H .-G ) TéL : 62-64-90
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HEBDOMADAIRE N° 203
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ORGANE DE LA
* j ’f LS existèren t toujours, de l’antiquité la plus lointaine aux temps ■I modernes. M ais on é ta lt en d roit d’espérer que dans des pays iA clvilisés, avec une organisation soctale qui semble garan tir à tous les citoyens la sécurité personnelle, les crim es politiques ne pouvaient s’accom plir com me dans des pays soumls à dictatures. Une disparition comme celles de Lum umba, Okito et M’Bolo au Congo — les corps furent, parait-11, dlssous dans de l’acide sulíurique __ sem blait inim aginable en France. 11 y av ait d éjà le precedent de Je sú s de Galindez, l’écrivain et jo u rn aliste espagnol — basque — m ort pour avoir é crit un livre sur la vie de la République Dom inicaine aux temps de Tru jillo. Galindez disparut un jo u r par une bouche de M étro, à New-York, et ja m a is plus personne n e l’a vu, ni m ort ni vivant. Mème ceux qui intervin rent de façon plus ou moins directe dans son enlèvem ent, fu ren t assassinés — les aviateurs, l’infirm ière qui s’occupa d’un soi-d isant m alade confié à ses soins dans l’avion. Tous trouvérent des m orts m ystérieuses et horribles. De Galindez, on ne sut plus rien. Lum umba et ses com pagnons, arrètés au m épris de tout droit, livrés aux « affreu x » de Tshom bé et au x forces du colonel Mobotu, disparurent de la méme m aniere. P en d an t Iongtemps, on cam oufla leur assassinat, invoquant la fugue, la disparition, la vengeance de certain es tribus. Les langues fin iren t par se délier et on ap p rit la vérité, bien plus horrible que tout ce qu’on au rait pu im aginer. F a isa n t suite au cas de Lum um ba, d’O kito e t de M’Bolo, on eut celui de H um berto Delgado, de sa secrétaire et d’un de ses accom pagnants. A ttirés en Espagne dans un gu et-apens soigneusem ent préparé, d ans lequel jo u èren t leur róle des agen ts provocateurs, qui ne m anquent dans aucun miüeu, Delgado et ceux qui l’accom p agnaien t fu ren t mis en terre. L a Pólice espagnole et la Pólice portugaise doivent en savoir long sur ce crim e, Q U I NE SER A JA M A IS M IS AU CLA IR. Nous voilà m ain ten an t en F ran ce, en plein P aris, au Drugstore des Cham ps-Elysées. Un hom me politique, ch ef d’un des groupes de l’opposition m arocaine, disparaít en plein jo u r. Deux hommes, déguisés en policiers, l’em barquent dans une auto, tandis qu’une vingtaine d’autres entourent un jeu n e étud iant qui l’accom pagnait, l ’em péchant d’appeller au secours, le terro risen t suffisam m ent pour que ni lui ni sa fem m e n’d lertent la pólice qu’un jo u r plus tard. L a Pólice fran çaise, de son cóté, laisse passer 48 heures avant de fa ire des perquisitions d ans des villas oú l’on é ta it en droit de supposer que B en B a rk a — car il s’ag it de lui — a pu y ètre amené. M ain ten an t, que l’hom m e a disparu, que son corps s’est volatilisé com me ceux de Galindez, de Lum um ba et de ses compagnons, les langues se délient aussi et nous apprenons de choses fo rt in te r e s a n t e s sur la M affia in tern atio n ale qui fo u rn it des hom mes de m ain aux gouvernem ents lorsqu’il s’agit de fa ire disparaítre quelqu’un de gènant. Nous sommes, done, livrés au bon plaisir des assassins. N’im porte qui, en F ra n ce méme, peut s’em parer d’un citoyen, fran çais ou étranger, et le fa ire d isparaítre im puném ent... La Pólice arrivera toujours 48 heures trop tard , qu’il s’agisse de la Pólice espagnole ou de la pólice fran çaise... Laissons de cóté le Congo e t la République D om inicaine, pays qu’on est en droit de supposer moins « civilisés ». M ais daus le nótre, que l’on croit le pays oü les citoyens sont les plus à l’abri de toute agression et de tout com plot, ici la chose ap p arait tout aussi facile, d’une fa cilité surprenante et qui nous révèle d’étranges dessous... C ar cette M affia intern atio n ale de tueurs professionnels, qui sont payés pour livrer un hom m e à ses bourreaux, ont été, à ce qu’il parait, utilisés à tour de róle par plusieurs pouvoirs, p a ra llèles ou non. II p arait que ceux qui se charg èrent de l’opèration Argoud, se sont chargés aujourd’hui de l’opératio.n B en B ark a. Cela expliquenait beaucoup de choses, m ém e les retards. Nous n’avons pas découvert cela, c’est « L’Express » qui l’avance. Que tout ceci soit possible sous De Gaulle, voilà quelque chose d’étonnant. Sous Fran co, encore, on le com prend. M ais ici, sous la protection d’un guide aussi éclairé et aussi pointilleux à l’égard de la souveraineté de la F ran ce, que des tueurs et des policiers à la soldé d’un au tre pays puissent agir im puném ent, a rrètan t un homme et le fa isa n t disparaítre com me par un jeu de prestidigitation, crée le plus profond désarroi et la plus grande surprise. H y a quelque chose de pourri dans le rovaume de D anem ark, ne croyez-vous pas ?
Quoique avec un certain retard à cause de diverses circonstances, je tiens à donner une courte suite à la précédente chronique : « DE CAUSES A EFFE7TS », en commentant le comDte rendu du V I' CONGRES DE CRIMINOLOGIE qui s’est tenu à Toulouse du 7 au 9 octobre 1965 à la Faculté de Droit, réunissant d’éminentes personnalités scientifl-
ques concernant le Droit, la Médecine et la Criminologie. Done des personnalités internationales se penchant sur de telles qüestions, dès le début ont fait connaitre les conclusions du congrés international de crimi nologie de Montréal (Canadal qui, voilà cinq semaines, s’est penché sur le traitem ent de la tíélinquance.
REGIONALE DE LA C. N. T. F.
21 NOVEMBRE 1965
UNE
C r im e s p o lít iq u e s
VI* UNION
VIE
Prix : 0,50 F
AGITEE
:
BAKOUNINE _ A
i _
BAKO U N IN E.
T a pensée a le cours fécondant du soleil : L 'O rient la je ta des neiges immobiles A l'O ccident des mers, que l’énorm e réveil Des volcans incoainus peuple d’orages et d’íles Ses rayons de révolte ont brúlé le sommeil Oú l’hom me résignait ses m isères útiles, II éclate sous eux en un verbe pareil Aux grondem ents du feu dans le chaos des villes. II dit l’aube du travail libre e t fratern el, Les guerriers sans exploit, les prétres sans autel. Les nations qu’il bat ch an cellen ! sur leurs bases II dissipc l’H istoire, étein t glaives et croix, E t sur l’éternité que sa jeun esse embrasse, S ’allum e et dit, m algré la haine et ses effrois, L'am our qui fa it le ciel sans dieu de nos extases. Georges
Un homme non seulement grand penseur, profond remucur d’idées, mais en plus et avant tout Jjomme d’action : tel fut Bakounine. II est important d’étudier l'enseignement légué par un tel personnage. M ichel Bakounine est né le 8 mai 1814, ci’une íamille noble et riche, à Priamoukino, dans le gouvernement de Tver, en Russie, au jourd’hui rebaptisée par les maitres du Kremlin : Kalinine. Décembre 1825, Bakounine a onze ans. La révolution russe est vaincue et donne son nom à ceux qui s’y sacnfièrent corps et ame. Tandis que leurs gibet9 s’alignent indéfiniment. lis resteront une lumière pour l’avenir. Plus tard, évoquant les Décembristes, Bakounine écrira : Un russe qu i aim e sa patrie ne peu t parler froidem en t d e ces hom m es; Us sont notre gM re la 'plus puré... ils sont nos saints, nos /te ros, les martyrs d e notre liberté, les prophètes d e notre avenir ! A 18 ans, après un séjour de trois ans à l’Ecole d’Arüllerie de Saint-Pétersbourg, il est envoyé comme officier dans un pays perdu. II v mène une vie qui le dégoüte profondément, aussi, deux ans après, compfenant qu’il s’acheminait sur une mauvaise route, il démissionne et va se fixer à Moscou, comme étudiant à l’Université. Pendant six ans, il travaille, il médite, il lit intensément. Jusqu’ici, il n’a rien d’un revolutionnaire. I! semble au Contraire étre un enragé conservateur, qui aeceptera le despotisme de Nicolás Ir. Vers 1840, il évolue et se determine dans un sens révolutionnaire. Pris d’un impérieux désir de respirer une atmosphére un peu moins suffocante que celle de Saint-Pétersbourg, il va poursuivre ses études à Berlín, oú il se lie d’amitié avec Ivan Tourguénief, l’illustre romancier russe. A 28 ans, ses idées se précisent. Hégélianiste d’avant-garde, il se révèle sous un nouveí aspect determinant sa conception nouvelle de la vie sociale : « homme nouveau fait pour la vie nouvelle ».
PIOC'H
Au printemps 1842, Bakounine habite Dresde et publie dans « Les Annales Allemandes » d’Amold Ruge, « La réaction en Allemagne, fragment par un Fiançais », étudc puissante qu’Herzen notait comme un chef-d’cEuvre; « Le désir de la destruction est également un dé sir créateur », publié sous le pseudonvme de Jules Elizard. Cet écrit permet à certains, de qualifier loute théorie de Bakounine, cntachée d'esprit destructeur, ce qui lui valut d’étre appelé, bien à tort, le génie de la pan-destruclion alors qu’il fut un esprit constructif, ré volutionnaire, créateur d’un monde social nouveau. En effet, cette forcé négative, belliqueuse méme n’était que l’affirmation de ce monde nouveau « assis uniquement sur le travail emancipé, et se créant de lui-méme, sur les ruines du monde ancien, par l’organisation et par la fédération libre des associations ouvrières délivrées du joug tant íconomique, politique, des classes privilégiées, II s’est expliqué dans « La Pro testaron de l’Alliance » d’une fa çon quí ne peut préter à équivoque : C es deux cotes d e la m éme question, l un négatif et i autre positif, sont inseparables. Nul ne peut voploir détruire sans avoir au moins une imagination lointaine, vraie ou fausse d e l’ordre d e choses qui devrait selon lui, succéd er à celui qui existe présentem ent; et plus cette imagination est vivante en lui, plus sa forcé destructive devient puissante; et plus elle s’ap p roche d e la vérité, cest-á-
dire plus elle est conform e au développem ent nécessaire du m onde social actuel, plus les effets d e son action destructiva deviennent salutaires et útiles. Car l action destructive est toujours déterm inée, non seutem net dans son essence et dans le degré, d e son intensité, mais en care dans ses m o des, dans ses voies et dans les m oyens qu ’elle em ploie par l klcal positif qui constitue son inspira tiva prem iére, son ám e ( l i li reviendra sur ce théme pour le développer plus largement. Ce qui le préoccupe toujours, c’est la recherche d’un esprit rénovateur, un esprit éternellement jeune, qu’il alfirme en ces termes : Soyons done confiants en cet éternel Esprit qui détruil et anéantit, parce qu e reside en lui Véterneüe source d e tout c e qui vit. L ’atm osphére d e la destruction est en m èm e tem ps celle d e la vivification. H.E. Kaminski. dans son pre mier chapitre de « La vie d’un Ré volutionnaire », faisant allusion aux décembristes, écrit : L es décem bristes n’ont pus d e successeurs. L e peu ple pour le quel ils sont morts, ne sait ou ne com prend rien d e leur sacrifice. Dans la noblesse leur m ém oire ne suscite t/ue d e vagues sentiments d e hontc, d e gène, d e peur; à peine ose-t-on parler d e « ces mallieureux ». Deux jeunes gens, H erzen et Ogureff, se jurent d e les venger, sans q u ils pensent, eux non plus, à franchir les limites qui les séparent des masses populaires. Pendant un cleini siécle, la ilussie ne bou ge pas. L e plus grand em pire du m onde s’incline sans aucune résistance devant le knout d e Nicolás Ir. Autour du tzar, le vide est absolu : aucun m ouvem ent po litique, à peine d es discussions littéraires. 11 n y a rien. Dans ce silence, dans cette obscurité, un seul hom m e fait la guerre contre le tzar. Lui, le pre mier, se révolte cnevertement, lui, le ch ef d e file. Toute une jeunesse m archera sur* ses traces et des générations entiéres dans leurs luttes, leurs espoirs, leurs sacrifices, auront les yeux fixés sur lui, Sa silhouette gigantesque planera Suite en p ag e 7.
II est bon de noter la définition de la Criminologie : « Nous avons d éjà expasé les grandes lignes de cette sciencecarrefour essentielle qu’est la crim inologie et que le grand pú blic m éconnaít encore, ou confond avec des méthodes de répression et de jugem ent, alors
(Svits en page 8.)
J e crois qu’il s’agit d’un professeur anticonform iste.