Le guide complet de l'allaitement

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proLoNgEr soN ALLAiTEm EnT

L’ocytocine

« L’hormone de l’amour », rien que ça. Celle-ci est responsable de l’éjection du lait – parce que le lait ne coule pas, il est éjecté ! Également libérée par l’hypophyse lorsqu’un bébé tète, elle permet aux cellules musculaires entourant les alvéoles de se contracter, expulsant le lait vers les canaux galactophores puis vers la sortie.

Bon à savoir

Cette hormone est synthétisée lors des câlins (pendant le peau à peau donc !), mais aussi lors de certains stimuli visuels ou auditifs agréables (l’hormone de l’amour, on vous dit). Voilà pourquoi (entre autres raisons), on insiste dès l’accouchement sur l’importance du peau à peau. Il n’est d’ailleurs pas rare de se retrouver avec un teeshirt trempé de lait lorsqu’on câline son bébé : c’est l’ocytocine qui déclenche un réflexe d’éjection, même sans tétée !

AdIéTéTiciENn

Comment le lait est-il produit ?

Le lait maternel est produit dans les lactocytes. Mais ils viennent d’où, les ingrédients qui composent le lait maternel ?

Pour fabriquer du lait, l’organisme dispose de différentes voies d’approvisionnement :

⚫ le sang : par filtration ou autres phénomènes, l’eau, les vitamines, les minéraux, les hormones et les facteurs immunologiques passent du sang aux lactocytes ;

⚫ le lactocyte : il produit directement les protéines, les lipides et le lactose.

Le lait est produit en continu, mais la vitesse de production dépend de la demande, c’est-à-dire de la fréquence et de la vitesse à laquelle le lait est exprimé du sein.

Au fil de l’allaitement, la quantité de lactocytes impliqués dans la production de lait diminue, mais ils semblent devenir plus sensibles à la prolactine17. Bref, encore un exemple de la magie du corps qui s’adapte à l’évolution de l’enfant !

Pour réguler la production et l’éjection du lait, on parle de deux mécanismes de contrôle : une régulation endocrine et une régulation autocrine. Qu’est-ce qu’on entend par là ?

⚫ La régulation endocrine

La régulation « endocrine » (ou régulation « centrale ») définit une glande qui secrète des substances (ici les hormones) dans le sang. L’hypophyse est une glande endocrine. Cette régulation endocrine, c’est donc la régulation réalisée par l’hypophyse via la synthèse de prolactine et d’ocytocine. Elle joue un rôle permissif de la production (si on produit ou non du lait) et de la vitesse de synthèse du lait. Elle n’a pas de rôle dans la quantité de lait produite.

Cela se passe en quatre mouvements :

1. Stimulation des terminaisons nerveuses du mamelon et/ou câlin.

2. Message transmis par voie nerveuse à l’hypophyse, dans le cerveau.

3. Libération d’ocytocine et de prolactine dans le sang.

4. Message aux lactocytes de produire du lait, puis réflexe d’éjection.

c’EsT pArTi MoN (MIL)kI kI !

Ça y est, votre petite merveille est arrivée, vous n’en croyez sans doute pas vos yeux ! Alors, que se passe-t-il donc maintenant dans votre poitrine ? Et que se passe-t-il du côté de la merveille, justement ?

WELcoME coLosTruM !

Dans l’espèce humaine, l’activité sécrétoire n’est pas synchrone avec l’accouchement. Cela signifie qu’au moment où votre bébé naît, bien que votre glande mammaire soit mature, elle ne sécrète pas immédiatement du lait. En effet, dans un premier temps, elle sécrète du colostrum.

AdIéTéTiciENn

De quoi le lait maternel est-il composé ?

Le lait maternel, c’est un fluide corporel, mais surtout, un aliment-boisson (deux en un !). Il a le pouvoir magique de nourrir et d’hydrater le petit être humain, de façon exclusive jusqu’à 4 à 6 mois et aussi longtemps que la mère et l’enfant le souhaitent. C’est l’aliment de référence pour le nourrisson, la norme physiologique de notre espèce.

Globalement, il est composé de beaucoup d’eau (environ 88 %), de glucides, de lipides, de protéines et de nombreux éléments autres que des nutriments comme des enzymes, des hormones, des substances de l’immunité, des micro-organismes, etc.

Le lait maternel est vivant et sa composition se modifie et s’adapte en fonction de la mère, l’enfant, le terme de naissance, le moment de la journée, la demande, la durée de l’allaitement et les facteurs environnementaux28.

On distingue généralement trois stades de l’allaitement qui se traduisent par des évolutions relativement marquées de la composition du lait : le colostrum, le lait de transition, puis le lait mature

Qu’est-ce que le colostrum ?

C’est le premier lait produit, jaune doré, visqueux et épais, fabriqué en toutes petites quantités.

Les caractéristiques nutritionnelles du colostrum

Dans le fond, le but du colostrum n’est pas particulièrement de nourrir notre bébé tout fraîchement sorti de sa bulle utérine. Son objectif est surtout de fournir un shoot d’immunité et de maturation dans les premiers jours de vie : apporter des nutriments essentiels, renforcer le système immunitaire, contribuer à l’établissement et à l’équilibre du microbiote intestinal29, et assurer la croissance, la maturation et la réparation de plusieurs tissus30. Il exerce également un effet laxatif et favorise la bonne expulsion du méconium (des selles à l’aspect de goudron, disons-le !), qui contient de la bilirubine. Cette action diminue le risque de jaunisse du nouveau-né (voir p. 80).

Sa composition est donc adaptée aux fonctions pour lesquelles il est conçu : il est riche en composants immunologiques, en lactoferrine et en HMO (human milk oligosaccharides, des petits glucides, boosters du microbiote intestinal et de l’immunité), plus pauvre en lactose et en calcium, mais plus riche en sodium, en protéines et en cholestérol que le lait mature.

Colostrum vs lait mature

⚫ protéines : 4 à 5 fois plus ;

⚫ lipides : 3 fois moins ;

⚫ lactose : 1,5 fois plus ;

⚫ autres glucides : 2 fois plus ;

⚫ anticorps : 4 à 5 fois plus ;

⚫ enzymes : 2 à 4 fois plus ;

⚫ sels minéraux : 1,5 fois plus.

Le colostrum est aussi concentré en vitamine A, essentielle au système immunitaire et à la vision, qui lui confère d’ailleurs sa couleur jaune si caractéristique.

Un lait produit en toutes petites quantités

Pourquoi est-il produit en si petites quantités ? Pas de panique si la vision de seules quelques gouttes de ce liquide jaune vous donne une sueur froide.

C’est normal : cela permet un démarrage en douceur pour tout le monde ! Le bébé doit quand même apprendre à téter et déglutir au sein. Qui plus est, ses fonctions digestives sont encore immatures et vont progressivement monter en puissance (très petit estomac, enzymes digestives et reins immatures, etc.). Chacun prend ses marques doucement mais sûrement.

Si l’estomac du nouveau-né était un fruit selon son âge, il serait…

1 jour = une noisette 3 jours = une noix 5 jours = un abricot 7 jours = un œuf

Le colostrum est produit pendant trois jours environ, puis laisse la place au lait dit « de transition »… Mais ne brûlons pas les étapes, je redonne la parole à Hélène et on se retrouve p. 65 pour en parler !

À LA NAissANcE, un BéBé çA pErD du poi Ds

C’est bien de le savoir, et c’est encore mieux de savoir pourquoi – et c’est encore mieux de savoir que c’est NORMAL !

Par « normal », on entend « prévu par dame Nature », et que cela ne remet pas en cause la survie de l’espèce (je parle ici de bébés nés à terme, dont le poids, la taille et le périmètre crânien se trouvent dans les normes attendues ; les cas particuliers comme les prématurés seront développés p. 61).

Bébé perd du poids parce qu’il est gonflé

Un bébé passe neuf mois dans du liquide amniotique. Il est donc gonflé d’eau à la naissance. Il va dans les premiers jours de vie perdre son excès d’eau (via l’urine) et perdre du poids. C’est physique.

Un autre facteur à prendre en compte dans cette perte en eau : le volume de produits perfusés à la mère lors de l’accouchement. En effet, pendant l’accouchement, la mère va être perfusée en plus ou moins grande quantité. Or, plus on administre de liquides à la mère en per-partum (pendant l’accouchement), plus le bébé perdra du poids. C’est corrélé31 ! Au cours des quatre premières heures de vie, la quantité d’urines éliminée par le nouveau-né sera d’autant plus grande que la mère aura reçu de grandes quantités de soluté.

Autre paramètre : votre bébé naît les intestins pleins ! Le fameux méconium dont Stéphanie a parlé va être évacué. Et un bébé qui fait caca, dans les premiers jours post-partum, ça fait quoi ? Je vous le donne en mille : ça fait perdre du poids !

Bébé perd du poids parce que c’est prévu

Comme nous l’avons vu, le colostrum est peu calorique, et c’est là aussi normal : la nature a prévu le coup. En effet un bébé naît avec des réserves de graisse (environ 10 % de sa masse corporelle) suffisantes pour se passer de calories pendant quelques jours. De plus, son estomac est minuscule (on parle de la taille d’une noisette, avec une capacité de 5 à 7 ml, soit un peu plus d’une cuillère à café). Ce serait quand même très mal fichu si l’humain naissait avec un estomac capable de n’avaler quasi rien alors qu’il meurt de faim, non ? Eh bien, merci dame Nature : ce n’est pas le cas !

Le colostrum, c’est pas pour les chiens !

Jusqu’à la fin du xviie siècle, on croyait que le colostrum était néfaste pour le bébé (du lait pas blanc, quelle idée !). D’ailleurs, tant que la femme avait des pertes sanguines (lochies), son lait était considéré comme non comestible. Elle ne devait donc pas allaiter pendant les trois premières semaines post-partum. Le bébé était alors nourri idéalement par une nourrice, ou par des bouillies. Comme il fallait malgré tout vider les seins de la mère, on faisait alors téter des petits chiens pour vidanger ! Bonne nouvelle pour ces chiens qui ont dû profiter d’un véritable or liquide des siècles durant ; moins bonne nouvelle pour les bébés qui risquaient de manquer cruellement des précieuses défenses apportées par le colostrum32 !

LE pEAu à pEAu (EncorE)

Restez le plus possible en peau à peau. C’est une continuité sensorielle pour votre bébé et c’est le meilleur moyen de :

⚫ l’amener à prendre le sein naturellement ;

⚫ activer les mécanismes hormonaux nécessaires à la lactation.

Le peau à peau, oui, mais en sécurité !

On veille à ce que les voies respiratoires du bébé soient dégagées : visage non enfoui, tête sur le côté. Le dos du bébé est couvert par une couverture ou un bandeau de peau à peau (voir p. 41). On ne s’endort pas avec bébé sur soi ; si on sent la fatigue poindre, on pose alors bébé dans son lit à lui. Si on sait la maman fatiguée, alors on ne la laisse pas seule en peau à peau avec son bébé. La maman se trouve dans une position confortable, semi-allongée (pas « à plat dos »). Et on surveille régulièrement la couleur et le comportement du bébé49.

Encore une fois, en peau à peau, dans son habitat naturel, le nouveau-né va venir prendre le sein au besoin. Ce faisant, il va ajuster sa succion et stimuler votre lactation. Une pierre, deux coups !

Tous LEs coMBi EN dE TEM ps

MoN BéBé doiT-i L TéTEr ?

Nous l’avons vu dans la physiologie de la lactation (voir p. 28), en vidant le sein par la tétée, votre bébé active la production de lait. Ce lait va s’adapter petit à petit à ses besoins. On va donc, en toute logique, vous conseiller de mettre bébé au sein au moins toutes les deux ou trois heures.

Vous voici donc, montre en main, à coller un téton à proximité de la bouche du bébé toutes les deux heures. Prête à noter quel sein il a tété ? Combien de temps ? Avant ou après la pesée ? Et vous, c’était quand la dernière fois que vous avez mangé, déjà ?

Et voilà qu’au milieu de tous ces questionnements, bébé ne tète pas. Pire, il s’endort. Et on vient vous reparler de perte de poids. « Allez, madame, il faut qu’il tète ! » Mais on va quand même pas le forcer, si ? Eh bien non !

Combien de temps dure une tétée ?

Arrivée ici, vous avez sans doute compris : il n’y a pas de norme en allaitement, donc ça dépend ! C’est selon la mère, sa capacité de réserve, le bébé, sa succion, son envie de faire beaucoup de petites tétées ou peu de grosses tétées, parfois cinq minutes, parfois vingt… Impossible de normer la durée. Si votre bébé montre tous les signes d’une bonne extraction de lait (voir p. 80) et que cela ne vous est pas inconfortable (s’il tète une heure et que vous avez mal au sein, vous avez le droit de l’arrêter !), alors peu importe ! N’écoutez pas les discours normatifs (« Pas plus de quinze minutes par sein ») : PERSONNE N’EST UNE NORME ! Ce genre de propos risque d’entraîner des restrictions (perte de poids chez le bébé) et des engorgements (voir p. 100) par extraction insuffisante.

Fait extrêmement important à connaître, bien que cela semble un secret bien gardé tant personne n’a l’air de s’y attacher : dans les premières 24 à 48 heures, il n’est pas rare qu’un bébé tète peu. Et le tout sans incidence sur la « réussite » d’un potentiel allaitement.

LEs crEvAssEs

Rien que le mot : AÏE ! Les crevasses désignent des lésions (blessures) plus ou moins visibles sur le mamelon. Visuellement, on peut retrouver des fissures, un saignement, une inflammation ou des croûtes. Ça peut même saigner, et c’est très (très) douloureux. Si, entre les tétées, la douleur s’apaise, elle revient illico presto lors des tétées.

Pourquoi les crevasses ?

Les crevasses sont dues à une mauvaise prise du sein. On pense toujours en première intention à une mauvaise position du bébé lors de la tétée. En effet, un bébé « mal » positionné peut entraîner des lésions par différents mécanismes :

⚫ frictions anormales entre le palais, la langue, les lèvres ;

⚫ dépression intrabuccale élevée (le bébé tète plus fort pour compenser un faible flot de lait, par exemple) ;

⚫ en cas d’hyperlactation (voir p. 107), le bébé peut téter « faiblement » pour compenser et « mal » prendre le sein ;

⚫ en cas de mamelon plat ou ombiliqué, la prise au sein peut être plus compliquée pour le bébé qui adapte mal sa position ;

⚫ on peut également trouver des cas d’inadéquation entre la mère et le bébé qui n’arrive pas à adapter sa succion à la poitrine de sa mère pour obtenir du lait sans la blesser. Bien que rare, cela est possible. Si vous souhaitez malgré tout donner votre lait au bébé, le tire-allaitement pourra être une solution (voir p. 147).

Si le positionnement mère-bébé est la première chose à explorer, on peut aussi s’intéresser dans le cas de crevasses au frein de langue du bébé (voir p. 37) ou à la présence d’un torticolis (voir p. 39).

Que faire devant une crevasse ?

On l’a dit : consulter ! Trouver un professionnel de santé qui va prendre le temps d’évaluer la douleur, l’aspect du sein, observer une tétée, vous écouter, vous aider à trouver la cause et les solutions possibles (repositionnement, chirurgie du frein de langue, kinésithérapie en cas de torticolis, compression du sein si le débit de lait est insuffisant).

Cette blessure, il faut bien évidemment la faire cicatriser. Plusieurs solutions sont possibles (mais sans évaluation suffisante à ce jour pour vous dire « voici LA solution ») :

⚫ Appliquer sur le sein entre les tétées (au choix) : de la lanoline (Lansinoh®, Medela®), des compresses imprégnées de lait maternel, du miel médical stérile (Melicare®, Revamil®) ou des pansements hydrogel (Medela®). L’idée est de maintenir l’hydratation du mamelon pour éviter la croûte.

⚫ Utiliser temporairement un bout de sein (voir p. 41) pendant les tétées si cela limite la douleur.

⚫ Parfois, il sera nécessaire d’arrêter l’allaitement au sein le temps de la cicatrisation. On tirera alors son lait pour éviter l’engorgement et entretenir la lactation, et on nourrira le bébé avec un contenant alternatif (voir p. 145) le temps de résoudre le problème.

Mon bébé peut-il téter malgré une plaie au sein ?

La réponse est oui. Même si ça saigne ? Oui. Vous pouvez bien évidemment utiliser le relais du tire-lait si cela vous gêne, mais la tétée n’est pas dangereuse pour votre bébé, même s’il avale un peu de votre sang.

Les crevasses, est-ce seulement

au début de l’allaitement ?

Pas forcément. Si elles sont beaucoup plus fréquentes en début d’allaitement pour des questions d’ajustement mère-bébé, on peut plus rarement en retrouver à d’autres moments clés, par exemple lorsqu’on reprend le travail et que le bébé est gardé. Il peut parfois modifier sa succion en recevant alors des biberons la journée et le sein de la mère peut être modifié par un engorgement dû à des tirages insuffisants au travail.

Pas de panique, les solutions précédentes peuvent être proposées. Vous pouvez aussi essayer de changer de contenant pour donner le lait (ou donner le biberon différemment, voir p. 143) afin de récupérer une « bonne » succion. Un bébé peut également modifier sa succion (et être alors à l’origine d’une crevasse) lorsqu’il souffre lui-même d’une pathologie transitoire buccale (muguet, angine, herpès…). N’hésitez pas à consulter devant une crevasse soudaine et inexpliquée.

LEs cAs pArTicuLi Ers

ch Ez LE BéBé

À l’instar de la maman, le bébé aussi peut être livré avec des difficultés rendant l’allaitement potentiellement difficile. Les connaître permet de mieux les appréhender pour les surmonter.

LE rEfLux gAsTro-œsophAgIEn (rgo)

Le RGO, aussi appelé « reflux » (quand il est interne, c’est-à-dire que le contenu ne ressort pas par la bouche) ou «  régurgitation » (quand c’est extériorisé, c’est-à-dire que ça ressort par la bouche), c’est quand le contenu de l’estomac remonte dans l’œsophage. L’estomac possède un sphincter qui permet à la nourriture d’entrer et d’éviter qu’elle ne ressorte par le haut. Problème : ce sphincter est immature chez le bébé et il est fréquent que le contenu de l’estomac remonte. Ajoutons à cela que le volume de l’estomac du bébé est faible : on arrive vite au trop-plein et donc aux remontées intempestives

Cas numéro 1 : le RGO physiologique

Il s’agit de remontées de lait (ou régurgitations) qui surviennent sans gêner le bébé. Il ne semble pas souffrir, n’en pleure pas particulièrement. Il n’y a pas de définition concernant leur quantité, un bébé peut régurgiter fréquemment sans que cela soit un problème.

Ce reflux va finir par disparaître progressivement, avec la maturation du système digestif, l’acquisition de la position assise, puis de la marche (forcément, on régurgite moins en position verticale).

Cas numéro 2 : le RGO compliqué

On vient se poser des questions devant la présence de sang dans les régurgitations, des pleurs excessifs (à nuancer selon votre niveau de tolérance), un inconfort chez le bébé, des troubles du sommeil (à nuancer également, les bébés dormant rarement « comme des bébés ») ou une mauvaise courbe de poids/croissance. On peut parfois dans ce cas retrouver des bébés particulièrement pâles : l’œsophage est irrité par les remontées acides du contenu de l’estomac, c’est ce qui provoque des saignements. Ces saignements entraînent une perte en fer (anémie) expliquant la pâleur.

Autre reflux possible : celui qui ne se manifeste pas par la régurgitation ! On le dit interne. Le bébé ne régurgite pas mais pleure intensément, mâchonne, le parent entend des bruits de liquide dans le thorax. Le contenu de l’estomac remonte ici aussi dans l’œsophage, provoquant l’irritation.

Les manifestations peuvent aussi concerner la sphère ORL (les oreilles, le nez, le larynx) ; on retrouvera des otites et autres rhumes à répétition. On retrouve aussi des manifestations broncho-pulmonaires à base de toux, sifflements et pneumopathie.

Que faire devant un RGO ?

On consulte !

⚫ Le RGO est physiologique ?

Alors on prend son mal en patience et on accepte l’idée de se changer soi-même ainsi que bébé plusieurs fois par jour pour éviter de sentir la régurgitation (encore une bonne raison de s’acheter toujours plus de vêtements d’allaitement !).

Chose à savoir : le RGO n’est jamais une raison d’arrêter l’allaitement ! On entend encore parfois le très mauvais conseil de passer à une PCN épaissie pour limiter le RGO : c’est non. Même s’il n’est pas « épais », le lait maternel permet une vidange de l’estomac de bébé deux fois plus rapide : si l’estomac se vide plus vite, son contenu risque moins de remonter. Le volume de lait pris au sein est également généralement inférieur à celui pris au biberon88, ce qui limite également le trop-plein. Ajoutons à cela que le lait maternel permet d’augmenter le pH du contenu de l’estomac pour en diminuer l’acidité. Des études tendent même à montrer que, globalement, les reflux sont moins fréquents et de durée plus courte chez les bébés nourris au sein89

ET sI jE MANquE dE LAiT ?

Attention, une stagnation sur une courbe de poids ne doit pas être prise à la légère. Cependant il arrive qu’un professionnel de santé ou un proche peu informé au sujet de la lactation s’alarme et vous recommande de complémenter votre bébé. Respirons. Et avant de sortir les PCN, relançons la lactation.

Règle n° 1

Tétée à volonté

Règle n° 2

Faites du peau à peau (eh oui, ce n’est pas que pour la maternité !), prenez un bain avec votre bébé, proposez le sein dans un environnement calme… Bref, retrouvez la sensorialité de l’allaitement pour faire monter le taux d’ocytocine.

Règle n° 3

Aidez votre bébé lors des tétées en « comprimant » votre sein. Cela pourra aider un bébé avec une succion faible, l’aider à aller « au bout » de la tétée et à obtenir ce qu’il lui faut de lipides pour prendre du poids. En pratique : on vient placer sa main en sandwich autour du sein et on vient appuyer comme si on cherchait à regonfler une roue de vélo. On peut ensuite déplacer sa main sur le sein pour aider à « vider » toutes les alvéoles.

Lait de début et de fin de tétée

Vous avez peut-être entendu que le lait de début de tétée était riche en « sucre » (en lactose), alors que le lait de fin de tétée était bien gras. Disons que cette explication est un peu réductrice et pas d’une grande aide… Je vous explique !

Déjà, il n’y a pas deux laits, mais un seul, dont la composition évolue au fil de la tétée. Schématiquement, le lait, c’est de l’eau – avec du lactose, des protéines dedans – et du gras. Le lait est stocké dans les alvéoles et les globules gras ont une fâcheuse tendance à s’accrocher aux parois. C’est bien simple, plus le lait reste longtemps dans les alvéoles, plus les globules gras quittent la partie aqueuse pour se coller contre les parois.

Résultat, le lait contient moins de lipides au début de l’éjection (c’est pratique : ça hydrate un bébé qui a soif) et davantage à la fin, le temps que les globules gras lâchent leurs parois (c’est pratique : ça rassasie un bébé qui a faim) !

En conséquence, plus l’intervalle entre les tétées est long, plus le gras se sera accroché aux alvéoles, plus le tout début du lait sera aqueux et moins riche en lipides. Ce même principe s’applique aussi en cas de réflexe d’éjection fort. À l’inverse, plus l’intervalle est court et les seins drainés, plus les globules « restent » dans le lait, plus le lait sera gras dès le départ. Et cela n’a, dans la plupart des cas, rien à voir avec la durée de la tétée, qui dépend de très nombreux critères.

Donc :

⚫ tant que votre bébé « vide » le sein, à sa fréquence, tout va bien, le gras arrive, pas de problème ;

⚫ si, en revanche, vous avez un REF, que votre bébé s’y est habitué, qu’il est difficile pour lui de poursuivre la tétée une fois le REF passé, qu’il s’énerve car ça ne sort plus tout seul et que donc, vous passez sur l’autre sein, là oui, en effet, votre bébé reçoit probablement moins de lipides.

La conséquence, c’est un lait pauvre en lipides qui passe rapidement dans l’intestin, avec donc une dose relativement élevée de lactose, puisqu’elle n’est pas ralentie par les lipides. La capacité enzymatique peut se retrouver débordée avec beaucoup de lactose d’un coup. Cela peut provoquer un « déséquilibre en lactose » : plus de lactose d’un coup par rapport à la capacité du corps à produire de la lactase pour le digérer. En conséquence, une partie du lactose est fermentée par le microbiote intestinal. Résultat, ça pétarade et ça peut faire des selles vertes et explosives !

Dans ce cas, on fait quoi ? On se rend p. 106 et/ou on file voir son bien-aimé professionnel de santé expert en lactation pour comprendre précisément d’où vient le souci, pour le régler en fonction de la cause.

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