Les coureurs au large racontent... - 30 histoires de mer extraordinaires

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Olivia Maincent, Anne Millet et Vanessa Lambert

LES COUREURS AU LARGE RACONTENT…

Préface de Loïck Peyron

30 histoires de mer extraordinaires

30 histoires de mer extraordinaires

Romain Attanasio

Avancer à petits pas me donne de l’espoir

Alexia Barrier

Je suis invitée à un accouchement !

Yannick Bestaven

Ce Vendée Globe, je suis allé le chercher

Jérémie Beyou

Cette non-victoire m’a construit

Pascal Bidégorry

Je quitte mon emploi et décide de me mettre à fond dans la course au large

Arnaud Boissières

Le dur retour à la civilisation

Louis Burton

Il y a un oiseau gigantesque qui tourne autour de moi, c’est comme dans un film d’Hitchcock, j’ai la trouille

Franck Cammas

suis cap-Hornier !

Thomas Coville

Je m’engage dans un goulot d’étranglement

Clarisse Crémer

Piégée à Gough Island, pour rien au monde je n’aurais voulu passer ailleurs

Charlie Dalin

“Je vois les portraits de vainqueurs du Vendée Globe, je n’y suis pas. Je sais que je dois y retourner

Samantha Davies

Cette montée au mât, c’est un souvenir encore très vivant

Michel Desjoyeaux

Je me suis pris un éclair entre les pieds

Violette Dorange

C’est sur cette traversée de la Manche en Optimist que la petite graine a germé

Yann Eliès

bout de forces

” 9
” 15
” 19
” 23
” 27
” 31
” 37
“ Je
” 43
” 49
” 55
” 61
” 67
” 71
” 77
“ À
” 81

Kevin Escoffier

C’est étrange, mais je vois une beauté de la mer. Une beauté lugubre ” 87

François Gabart

Je sais qu’il y a des icebergs grands comme la Corse

Pip Hare

91

Jean Le Cam

Le Vendée Globe a tout changé pour moi ” 97

Isabelle Joschke

J’ai dû faire un double deuil ” 101

Sébastien Josse

Scritch, scritch, scritch ” 107

Roland Jourdain

Être en solitude plus qu’en solitaire

Tom Laperche

“François Gabart me laisse barrer son grand bateau pour le départ de la Transat Jacques Vabre !

Yves Le Blevec

111

117

Ce qui me faisait profondément rêver est possible !

123

Erwan Le Roux

127

Les choses difficiles, voire très difficiles, quand elles s’arrêtent, c’est d’autant plus fort en émotions

Le bateau me parle, je sens son cœur battre ” 133

Éric Péron

On se trimbale dans les rues d’Ushuaïa comme des vagabonds ” 137

Marie Riou

Le cap Horn n’est qu’une illusion de la délivrance

Alan Roura

143

Qu’est-ce que je fais là ? ” 147

Thomas Ruyant

Comme un accident de voiture

Armel Tripon

151

Le multicoque en solo, c’est comme le lait sur le feu ” 155

Samantha Davies

“ Cette montée au mât, c’est un souvenir encore très vivant ”

PARCOURS

NÉE LE 23 AOÛT 1974

Transat Jacques Vabre 7e avec Paul Meilhat, 2019 ; 5e avec Nicolas Lunven, 2021

Transat anglaise 5e, 2008

Volvo Ocean Race 6e, 2014

Vendée Globe 4e, 2008-2009 ; abandon, 2012-2013 et 2020-2021

Sam Davies embarque à vingt-trois ans sur le grand catamaran Royal Sun Alliance, aux côtés de Tracy Edwards, pour tenter de battre le record du Trophée Jules Verne.

La toute jeune Britannique qui, depuis a tracé son sillage avec brio dans la course au large, se souvient de sa toute première montée au mât dans le grand Sud et dans la nuit noire… Perchée à 42 mètres de haut dans des conditions de mer et de vent musclées, Sam raconte cet incroyable fait de mer comme si c’était hier !

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En1997, je viens tout juste de terminer mon master en ingénierie à Cambridge. Je fais de la régate en équipage, et j’apprends que Tracy Edwards veut monter un équipage féminin pour le Trophée

Jules Verne. Tracy, c’est mon idole ! C’est un peu la Florence Arthaud britannique, une des pionnières de la course au large. Quand j’étais adolescente, elle m’a beaucoup influencée parce qu’elle luttait contre les idées reçues sur les femmes et la voile. Je l’ai toujours regardée avec émerveillement. Je lui envoie une lettre avec mon CV, au cas où. Mais je n’y crois pas trop. Je suis jeune et je n’ai pas assez d’expérience, mais je veux au moins faire un essai : non seulement Tracy est mon idole, mais son bateau aussi est mon idole ! C’est celui de Peter Blake, détenteur, justement, du Trophée Jules Verne 1994 ! Si je peux juste monter sur ce bateau et passer une journée de rêve je serai la plus heureuse…

Je fais un essai et finalement, ça marche bien. Me voilà dans l’équipage 100 % féminin du Trophée Jules Verne pour l’année suivante !

J’ai à peine rangé mes derniers cours que je prends l’avion pour New York où est amarré le bateau. C’est parti pour six mois de prépa ration avec les filles. Et le grand jour arrive. Le début de la course se passe bien, mais c’est dur ! Malgré l’entraînement, le coaching et l’entourage dont nous avons bénéficié en amont, nous restons un équipage de débutantes. D’ailleurs, qu’est-ce qu’on a pu être critiquées, ne serait-ce que pour avoir eu l’idée de se lancer sur un tel défi ! Le bateau aussi est difficile, mais il avance vite et bien. Dans les mers du Sud, nous accélérons de plus en plus, et nous arrivons à couvrir des distances importantes. Nous ne sommes d’ailleurs pas loin du record, alors détenu par Olivier de Kersauson. Comme nous allons vite, forcément, nous poussons beaucoup le bateau, et les problèmes arrivent sur les drisses, sur les spis. Il devient impossible de tenir les voiles dans le mât ! Le risque, c’est que le spi tombe à l’eau. Alors nous mettons des sécurités partout, notamment en tête de mât.

Nous sommes sous spi, poussées par des grains très puis sants. Il faut absolument que l’une d’entre nous grimpe en tête de mât pour sécuriser les drisses, c’est-à-dire à 42 mètres au-dessus de l’eau ! Une des filles ne se sent pas de le faire et, alors que je suis au chaud dans mon sac de couchage, en train de dormir, on vient me chercher : “Sam, Sam, il faut monter dans le mât !” J’essaie d’ouvrir les yeux, je m’habille en catastrophe, j’y vais un peu la tête dans le brouillard, mais il faut le faire, il faut affaler le spi. Le grain arrive et le bateau est déjà en surpuissance. Quand j’arrive sur le pont, je ne vois rien, il fait mauvais, c’est un peu la guerre.

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Il faut monter vite. Je mets mon harnais. J’ai confiance en Miki [Mikaela Von Koskull] qui tient la barre, je sais qu’elle va gérer le bateau. “Tu montes, on affale le spi, on prend le ris et tu redescends.” Ça, c’est la théorie. En pratique, je dois déjà monter, en restant bien accrochée, avec ma seule frontale. Nous n’avons aucun moyen de communication, nous nous faisons juste des signes, mais la nuit va bientôt tomber, la météo est mauvaise et je ne vois pas bien. Pas de panique, je ne me pose pas de questions, j’ai confiance en ces filles-là et je fais exactement ce qu’elles me disent. Accrochée en haut du mât, je les laisse faire la manœuvre. Moi, je suis au-dessus des albatros et ça me fait sourire, parce que d’habitude, les albatros ont toujours ce petit air supérieur, un peu comme un prof qui te regarde par-dessus ses lunettes. Là, c’est moi qui les regarde de haut !

Le bateau bouge dans tous les sens, je me demande combien de temps je vais rester perchée à plus de 40 mètres. J’essaie de rester connectée au bateau pour comprendre où elles en sont, et pour savoir quand je peux commencer ma descente. Je prie pour que le bateau ne plante pas, il n’est pas très stable, il est même très bas sur l’eau, avec peu de volume dans les étraves. Et nous sommes dans le grand Sud, avec de grosses vagues. Je reste concentrée, il ne faut pas lâcher, je suis en mode survie, je ne pense qu’à ça.

Après trente minutes d’équilibrisme, je suis bien contente d’avoir de nouveau les deux pieds sur le pont. C’est un souvenir vraiment fort en émotions. Plus de vingt ans après, je le garde encore en tête. Cette montée au mât, c’est un souvenir encore très vivant.

Malheureusement, cela ne nous a pas porté chance. Nous démâterons quelques jours plus tard, et nous abandonnerons notre tenta tive de record. Mais c’était mon premier tour du monde, cela m’a ouvert des portes, je suis très fière de ce que nous avons fait avec cet équipage. Nous étions des pionnières, les premières et les seules à tenter ce Jules Verne au féminin. Personne ne l’a refait depuis !

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Michel Desjoyeaux

“ Je me suis pris un éclair entre les pieds ”

PARCOURS

NÉ LE 16 JUILLET 1965

Solitaire du Figaro 1er, 1992, 1998 et 2007

Transat anglaise 1er, 2004

Route du Rhum 1er, 2002

Transat Jacques Vabre 1er avec Emmanuel Le Borgne, 2007

Vendée Globe 1er, 2000-2001 et 20082009

Avec plus de vingt-cinq grandes victoires à son actif, Michel Desjoyeaux fait partie des navigateurs en solitaire les plus titrés de l’histoire de la voile. En 1991, il participe à la Mini-Transat, une course en solitaire sur les plus petits bateaux de course au large. Il marquera cette édition en étant le premier à installer, en course au large, une quille basculante sous la coque. Mais pour « le Professeur », cette compétition a surtout été marquée par la météo, capricieuse et imprévisible !

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« Le bateau me parle, je sens son cœur battre. »

« Je me suis pris un éclair entre les pieds. »

« Piégée à Gough Island, pour rien au monde je n’aurais voulu passer ailleurs. »

« Il y a un oiseau gigantesque qui tourne autour de moi, c’est comme dans un film d’Hitchcock, j’ai la trouille… »

Ils s’appellent Erwan Le Roux, Michel Desjoyeaux, Clarisse Crémer, ou encore Louis Burton… Trente marins dévoilent, avec émotion, générosité et parfois une certaine dose d’humour, l’aventure en mer qui les a le plus marqués durant leur parcours de coureurs au large.

Leurs récits racontent la peur, les galères, le dépassement de soi, le courage, l’épuisement, le plaisir, la victoire ou l’échec, et toujours ce désir puissant et irrésistible de larguer à nouveau les amarres.

Voici leur histoire.

Avec Romain Attanasio, Alexia Barrier, Yannick Bestaven, Jérémie Beyou, Pascal Bidégorry, Arnaud Boissières, Louis Burton, Franck Cammas, Thomas Coville, Clarisse Crémer, Charlie Dalin, Samantha Davies, Michel Desjoyeaux, Violette Dorange, Yann Eliès, Kevin Escoffier, François Gabart, Pip Hare, Isabelle Joschke, Sébastien Josse, Roland Jourdain, Tom Laperche, Yves Le Blevec, Jean Le Cam, Erwan Le Roux, Éric Péron, Marie Riou, Alan Roura, Thomas Ruyant, Armel Tripon.

Olivia Maincent, Anne Millet et Vanessa Lambert sont journalistes et spécialistes de l’univers de la voile. Elles sont les créatrices et animatrices du podcast Les Dessous de la Voile.

MDS : VA07180 29,95 € www.vagnon.fr

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