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PRODUIRE SA NOURRITURE
Le système agricole et alimentaire actuel est une bombe à retardement. Les dernières crises vécues ont été révélatrices de certaines carences de ce système. Les villes ne reposent plus sur leurs campagnes pour se nourrir mais sur la mondialisation. La ceinture verte de Paris a totalement disparu et la ville, devenue mégalopole de 12 millions d’habitants, ne disposerait plus que de 3 jours d’autonomie alimentaire si les moyens de distribution actuels étaient à l’arrêt. Cette problématique ne concerne pas que cette région, puisque c’est 70 % des Françai•se•s qui achètent leurs produits alimentaires en supermarché. Il devient alors légitime de se questionner sur l’origine de son alimentation et comment gagner en autonomie.
Reprendre En Main
Son Alimentation
Malgré un excédent commercial de 6 milliards d’euros pour l’agroalimentaire (2020), la France dépend largement des importations pour un grand nombre de produits agricoles, puisque c’est 70 % des fruits et 30 % des légumes consommés qui sont importés… En échange, elle exporte massivement ses céréales (80 % de sa production).
La politique agricole
Alors où en est-on dans l’objectif d’autosuffisance agricole ? Avec la politique agricole commune (PAC) lancée en 1962, cet objectif devait permettre de nourrir la population dans une période d’après-guerre encore rude concernant la production et l’approvisionnement alimentaire. L’objectif d’autonomie a été transformé, par cupidité et logique capitaliste, en désir de nourrir le monde, bien souvent au détriment des agricultures et de l’intérêt des populations locales.
Nous exportons nos céréales et importons du soja brésilien pour nourrir notre bétail qui ne voit plus d’herbe. Les accords commerciaux internationaux (TAFTA, CETA, UE/MERCOSUR…) favorisent l’importation de produits souvent cultivés dans des pays où les contraintes environnementales et sociales sont plus légères et où la déforestation est un désastre. Chaque année, 1,7 million d’hectares de forêt tropicale amazonienne sont transformés en terres agricoles. À l’inverse, près de 20 millions d’hectares de terres arables sont rendus inutilisables dans le monde par l’érosion des sols dont les principales causes sont l’agriculture intensive, la déforestation, le surpâturage, et l’irrigation. Les terres cultivables ne représentent pourtant que 6 % de la surface de notre planète !
Selon la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) : « En diminuant les éléments nutritifs disponibles pour les plantes ainsi que l’espace dont elles disposent pour s’enraciner, l’érosion peut réduire le rendement des cultures jusqu’à 50 %. » La conservation des sols est un enjeu majeur pour préserver le potentiel de production alimentaire et nourrir une population toujours croissante. L’aggradation des sols devrait être l’un des objectifs prioritaires des agriculteurs•rices pour préserver leur principal outil de travail.
Toujours plus La PAC a été instrumentalisée par l’agrobusiness pour fournir des denrées à bas prix et être « compétitif » sur le marché mondial. Ses orientations ont encouragé une agriculture spécialisée et favorisé le gigantisme des exploitations. La France est passée de 2,3 millions de fermes en 1955 à moins de 400 000 exploitations agricoles aujourd’hui (notez le changement de terminologie : nous sommes passés de paysans à exploitants). Cette chute n’est pas due à une réelle fuite de cette profession, mais à la mise à disposition d’engins toujours plus puissants pour exploiter des surfaces toujours croissantes, favorisant les grands exploitants au détriment des petits paysans ; 20 % de la profession capte 80 % des aides publiques au secteur. Pour produire plus, plus vite et percevoir plus d’aides, les agriculteurs doivent se spécialiser, s’agrandir, passer à la monoculture et utiliser des pesticides. Les conséquences sont visibles sur les paysages avec la disparition des haies, des bosquets, des arbres isolés et de la faune. Ce service rendu à l’agrobusiness est financé grâce à nos impôts et capte 40 % du budget de l’Union européenne.


Les spirales à aromatiques

L’entrée centrale de la maison a été ornée de deux spirales à aromatiques. Ces spirales, en plus d’être esthétiques, ont aussi un rôle pratique. Elles permettent une cueillette facile au plus près de la cuisine. La forme de la spirale permet également d’étager les plantes aromatiques en fonction de leurs besoins : celles qui aiment les sols secs en haut, où elles profiteront d’un meilleur drainage, celles qui aiment l’humidité en bas pour recevoir davantage d’eau, celles qui aiment le soleil au sud et celles, moins exigeantes, au nord ou derrière une partie du muret. La complexité du design permet de proposer une diversité d’habitats, y compris pour les lézards et les petites bêtes qui peuvent s’abriter entre les pierres qui accumulent la chaleur et permettent de cultiver des plantes plus méridionales.

Les champignons
En ce qui concerne les apports nutritionnels, les champignons sont aussi très intéressants pour les vitamines et les antioxydants qu’ils peuvent apporter. Ils sont avant tout intéressants pour leur intérêt gustatif ! Sur nos 4 000 m², la récolte est cependant assez maigre. Tous les ans, nous y trouvons une dizaine de coprins chevelus qui se plaisent à pousser sur les bordures d’un chemin, quelques bolets aux pieds des chênes, mais surtout beaucoup de champignons non comestibles ou toxiques. Savoir déterminer les champignons est essentiel et il ne faut prendre aucun risque : en cas de moindre doute, évitez de manger ! Nous avons aussi eu la surprise de découvrir, durant la construction, trois belles morilles, de la taille d’une main, qui avaient poussé dans la terre de remplissage des pneus. Mais nous ne saurions conseiller cet aménagement pour réaliser une champignonnière !
Au jardin, la culture de champignons peut se faire à partir de spores à répandre au sol (bolets, morilles, girolles…) ou de chevilles ensemencées de mycélium à insérer dans des bûches (pleurotes, shiitaké).

La forêt voisine nous permet de faire de plus importantes récoltes et d’avoir des champignons en bonne quantité, sans bien évidemment piller la forêt. Nous sommes très attentifs à ne pas en prendre trop puisque le champignon n’est en fait que l’organe reproducteur du mycélium s’étendant dans le sol, il est donc nécessaire d’en laisser quelques-uns pour s’assurer de la pérennité de cette vie mycologique. Notre récolte annuelle se limite à de quoi faire quelques poêlées, d’en sécher un peu et d’en transformer en pickles (bolets), un régal !

LA SERRE « D’ABONDANCE »
Une troisième serre est directement accolée à la maison (voir p. 74). Cette serre est exposée plein sud et réalisée avec du double vitrage sécurité. Elle permet d’y produire des cultures de plantes vivrières plus « exotiques » pour diversifier et compléter la production et aller plus loin dans l’autonomie alimentaire.
Hors gel
Cette serre, qui est réellement hors gel en période hivernale (température d’au moins 5 °C lors des nuits très froides d’hiver), ne permettra pas à elle seule l’autonomie alimentaire, mais de faire un pas de plus en sa direction en permettant d’y mener des cultures qui ne passeraient pas l’hiver sous notre climat : un citronnier vert et un citronnier jaune, un aloé véra, du basilic, du curcuma, deux bananiers (‘Cavendish nain’) et un théier y ont notamment trouvé place aux côtés de plantes potagères (tomates, courges, aubergines, courgettes…).
Cette pièce est un espace de vie supplémentaire, une chaise hamac y a d’ailleurs été installée pour se poser, se relaxer, observer le jardin, lire… En permaculture, il faut penser à soigner la terre mais aussi à soigner l’humain !

Verte en toute saison, cette serre offre de la végétation toujours luxuriante à regarder même lorsque la vie est en pause à l’extérieur, de quoi participer à un moral au beau fixe en toute saison.
Ces végétaux sont quasiment autonomes en arrosage grâce à l’irrigation par les eaux grises de l’habitat (voir p. 130).
Retour sur la non-irrigation (autonomie avec les eaux usées)

Au moment des jeunes plantations, 3 à 4 arrosages seulement ont été nécessaires sur une période de deux semaines. Les plantes lancent dès lors leurs racines pour aller rapidement puiser l’humidité présente à 30 à 40 cm en profondeur, par le déversement dans cette fosse étanche des eaux grises de la maison (douche, lavabo, évier).
Les plantes s’épanouissent, deviennent luxuriantes.

Plus tard, les besoins en arrosage se comptent sur les doigts de la main. Ils se limitent à certaines périodes de très fortes chaleurs, ou lorsque le niveau d’eau des eaux grises diminue en cas d’absence prolongée ou de très faible consommation et rejets d’eau.
