


Loÿs Pétillot André Sève
Dessin
Scénario
Dessin
Scénario
« Aimer Dieu et le faire aimer »
Aujourd’hui Jean-Marie Vianney est sans doute plus connu à l’étranger qu’en France où il a vécu. Sa notoriété grandissante a fait venir à Ars des pèlerins de plus en plus nombreux, jusqu’à quatre-vingt mille pèlerins en 1859, dernière année de sa vie. Né en 1886, trois ans avant la Révolution française, il a vécu les bouleversements d’une période politique tourmentée, marquée par l’hostilité à la vie chrétienne, dans une famille aimante, qui n’a jamais perdu ni la foi ni la fidélité à l’Église.
Petit prêtre, insignifiant aux yeux de beaucoup mais apprécié par les humbles, Jean-Marie Vianney vécut 41 ans dans ce petit village de la Dombes, tout donné à Dieu et aux hommes. Attentif à l’évangélisation et au salut de tous, il était écrasé par sa charge de curé qu’il n’avait pas choisie. Il n’a cependant jamais pensé un seul instant se dérober, trop soucieux d’aimer le Seigneur et de répondre à son appel. Manifesté par son audace évangélique, son « bonheur était d’aimer Dieu et de le faire aimer » pour « conduire les âmes » sur le chemin de la Miséricorde par la confession des péchés, de la Vérité par la conversion des pécheurs et de la Charité par la transformation de la société. De même que Saint Jean-Eudes, il fut canonisé à Rome le 31 mai 1925, à peine quinze jours après Sainte Thérèse de Lisieux.
Si les pages qui vont suivre contribuaient à donner une image renouvelée de la joie d’être prêtre, à travers la vie de Jean-Marie Vianney, désormais cité comme « modèle dans son ministère comme dans sa personne » (Jean-Paul II), « saint patron de tous les prêtres de France » (Pie XI) et « saint patron des curés de l’univers » (Pie XII), nous ne pourrions que nous en réjouir !
Père Rémi Griveaux, Curé d’Ars, janvier 2025
Pour venir à Ars et retrouver les lieux où a vécu Jean-Marie Vianney : Sanctuaire d’Ars
451, rue Jean-Marie Vianney
01480 Ars-sur-Formans 04 74 08 17 17 arsnet.org
Juché sur une colline entourée de jolis vallons, Dardilly est un petit bourg proche de Lyon.
a
là, naquit Jean-Marie Vianney, connu plus tard sous le nom du saint curé d’Ars.
Matthieu Vianney, brave chrétien, épouse, en 1778, une fille du village d’écully, qui est à une lieue de Dardilly. Elle s’appelle Marie et c’est une excellente chrétienne.
ils ont six enfants. Jean-Marie est le quatrième. il est baptisé le jour même de sa naissance, le 8 mai 1786.
Mais il avait un caractère vif et n’était pas toujours commode !
Maman, ! Gothon m’ennuie. Elle veut me prendre mon chapelet !
Marie Vianney n’attend pas que ses enfants soient grands pour éveiller leur cœur à l’amour de dieu.
Donne-le, mon petit, donnele pour l’amour du bon dieu.
à 2 ans, déjà, Jean-Marie se joint aux autres pour cette belle prière du soir qui est le meilleur moment dans la vie des familles chrétiennes.
Pour le récompenser, sa maman lui fait cadeau d’une vierge en bois.
à moi ?...
Oh ! Maman, je suis content !...
Jean-Marie le donne...
Cette vierge, il ne s’en séparera plus, ni le jour, ni la nuit.
Il arriva même une chose bien amusante...
Dites donc, Matthieu. Est-ce que votre petit brunet me prend pour le diable ?
Chez les Vianney, on s’agenouille au premier tintement de l’angélus, quels que soient le lieu ou la besogne.
Pourquoi fais-tu ça, Jean-Marie ? Mais, papa, je bénis l’heure !
En effet, Marie Vianney l’a habitué à faire un signe de croix et à réciter un ave quand sonnait l’heure.
Et deux ans plus tard, la constitution civile du clergé fait planer sa menace sur les prêtres du lyonnais.
Le curé de Dardilly a prêté le serment schismatique.
Très tôt, l’enfant est saisi par le goût de la prière...
Comment ça ?
hé ! dès qu’il me voit, il fait des signes de croix à tour de bras !
Messire Rey ? il a peur !
Non, on a dû le tromper.
Pris de remords, le pauvre vieux prêtre quitte Dardilly, hélas ! Il est remplacé par un autre curé « jureur » un vrai « patriote », celui-là !
1789, la révolution éclate...
dépassée par ces événements, la bonne Marie Vianney essaie de se faire expliquer pour mieux comprendre ce bouleversement.
Vous ne devez pas aller à la messe du jureur ! Son serment l’a séparé de l’église catholique.
Dis, maman, pourquoi notre nouveau curé prêche-t-il sur le civisme et la constitution ? Quelle constitution ?
Fouillez cette grange !
à partir de cette époque, les prêtres fidèles sont traqués partout.
Jean-Marie ne comprend pas toutes ces choses, bien sûr, mais il voit que ces prêtres héroïques risquent leur vie pour l’amour des âmes. Et dans ces réunions tragiques, il commence à entrevoir la grandeur du sacerdoce.
à Lyon, la terreur règne : les soldats sillonnent les rues, les églises sont fermées. les cloches ne sonnent plus.
On abat les croix des calvaires.
On cache tous les objets de piété, mais Jean-Marie ne se sépare jamais de sa statuette.
Avec sa sœur Gothon, il doit garder les bêtes. Par de jolis sentiers, ils emmènent l’âne, les vaches et les brebis.
Mais Jean-Marie quitte souvent le sien, car son goût pour la prière ne fait que grandir.
Et ton bas, Jean-Marie ?
Les deux petits aiment par-dessus tout leur cher vallon de Chantermerle, avec ses oiseaux, ses belles prairies, ses grands arbres et le joli ruisseau bordé d’aulnes et d’églantiers.
Fais-le pour moi, Gothon, s’il te plaît, je construis un autel.
D’autres enfants de Dardilly gardent aussi les bêtes. Ils viennent voir à quoi joue Jean-Marie, et celui-ci, tout naturellement, se met à leur faire de petits sermons.
début 1795
On va avoir un maître ! On va aller à l’école !
Mais les autres ne l’écoutent pas longtemps ! Alors, il organise des processions. Et c’est toujours lui qui fait le curé.
à 9 ans, notre Jean-Marie sait tout juste ses lettres.
Jé-sus-dità-ses-di-di...
Imaginez sa joie quand on annonce la bonne nouvelle !
Tu sauras bientôt lire et écrire comme il faut.
et j’apprendrai aussi le calcul et la géographie !
Depuis qu’en 1791 les révolutionnaires ont chassé l’instituteur, la petite école est restée fermée.
Au mois de février, à la campagne, les parents n’ont guère besoin des enfants. Aussi, le matin de la rentrée, tous les chemins de Dardilly retentissent du bruit des petits sabots.
Tu vas à l’école ?
Bien sûr ! Comment s’appelle-t-il, le nouveau maître ?
Le citoyen dumas.
Le citoyen Dumas est très content de voir sa classe remplie de visages attentifs.
Et il ne tarde pas à remarquer un garçon encore plus appliqué que les autres.
Bravo, Jean-Marie ! toi, tu mets les bouchées doubles.
Si vous faisiez tous comme le petit Vianney, vous rattraperiez vite le temps perdu !
Dis, papa, il n’aime pas dieu, notre nouveau maître ?
Puisque tu sais lire, maintenant, c’est toi qui liras tout haut la vie des saints chaque soir à la prière.
Si, Jean-Marie, mais il n’a pas le droit d’en parler à l’école.
Et quand aurons-nous un prêtre à Dardilly ?
Je ne sais pas. Depuis la mort de Robespierre, les choses ont l’air de changer à paris, et pourtant la persécution continue.
Dis, mon gars, tu connais une bonne maison dans ce village ? Oh ! oui.
Mais le vrai chrétien n’est pas seulement celui qui prie dieu, c’est aussi celui qui soulage les autres. Les Vianney sont célèbres dans toute la région pour leur charité fraternelle et Jean-Marie n’est pas le dernier à rendre service !
Je peux aller porter du bois à la mémé de pierre ?
Oui, bien sûr, mets deux ou trois bûches.
C’est triste, papa, une paroisse sans prêtre. Les gens finiront par oublier le bon dieu.
Tu as raison, fils, mais chez nous on tiendra tant qu’il faudra.
Oh ! et puis, mets-en tant que tu pourras !
Tu vois, à lui, il faudrait aussi un pantalon.
Et où veux-tu que je le trouve, ce pantalon ?
Encore un ! Mais il y en a déjà dix-neuf !
Cette fois, je n’ai plus assez de soupe pour tous !
Bah !
Pour une fois, je m’en passerai !
Regarde encore bien, maman. Il sera si content, mon pauvre.
Quand il pleut, Jean-Marie, après avoir conduit les mendiants dans la grange, étend soigneusement les misérables manteaux pour les faire sécher...
Un soir de l’année 1797, la maison des Vianney reçoit une visite toute différente.
Vous êtes un prêtre ?
Mes enfants, voici monsieur Groboz. C’est un prêtre qui a refusé de prêter le mauvais serment.
Oui, mon petit par précaution, je me fais passer pour cuisinier, mais je n’exerce guère ce métier.
eh bien ! Faisons cela tout de suite. Je t’aiderai.
quel âge as-tu ?
onze ans, cit... Monsieur... Monsieur le curé.
Il est obligé de se cacher, mais nous le verrons quand même assez souvent, car il fait partie du groupe des missionnaires d’écully.
Un confesseur voit vite à quelle âme il a affaire. celle de Jean-Marie émerveille le missionnaire.
Nous avons des dames catéchistes à écully. il faut nous envoyer ce petit.
Ce n’est pas impossible. à écully, j’ai ma sœur Marguerite.
La femme de François Humbert ? jean-Marie y sera très bien.
Il vaut mieux que tu dises citoyen Groboz, c’est plus prudent. Depuis quand t’es-tu confessé ?
Mais... Je ne me suis jamais confessé !
Alors, qu’en dis-tu, Matthieu ? C’est à voir. Mais l’an prochain seulement. D’ici là, il faut qu’il profite encore des leçons du citoyen Dumas.
Les jours passèrent. un matin de mai, Marie Vianney peut enfin emmener Jean-Marie à écully.
Mon cœur chante comme les oiseaux !
jean-Marie vit là une année heureuse. en juin 1799, il fait sa retraite avec les quinze autres communiants de Dardilly.
Celui-là, je me demande qui lui a appris à prier aussi bien ! On dirait un ange !
On ne peut donc pas célébrer avec éclat cette belle cérémonie de la communion.
demain matin, vous viendrez au petit jour chez madame de Pingon.
Les catholiques sont plus persécutés que jamais. Prisonnier du directoire, le pape Pie VI est traîné à travers les alpes. il mourra deux mois plus tard, à la citadelle de Valence. Par centaines, les prêtres sont déportés en guyane ou martyrisés sur les pontons de Rochefort.
Tante marguerite habitait une grande ferme joliment appelée : le point-du-jour.
En robe blanche ?
Mais non, voyons ! En habits ordinaires. Il ne faut pas vous faire remarquer. Venez séparément.
C’est à l’époque des foins, ce qui donne une bonne idée à M. Groboz.
Entendu ! je serai là demain.
ils déchargent le foin !
C’est exprès, ils vont le faire lentement pendant toute la cérémonie. comme ça, personne ne fera attention à nous.
Les mamans dissimulent toutes quelque chose sous leurs capes.
Des voiles, des brassards et des petits cierges.
Jean-Marie ne se laisse distraire par rien. Sa sœur Gothon assiste à la cérémonie.
Viens, mon petit, c’est fini !
Le jour même, il revient à Dardilly. Une nouvelle période de sa vie commence.
Fils, tu es allé quatre ans à l’école, tu as eu un an pour apprendre le catéchisme et faire ta communion. Maintenant, j’ai besoin de toi.
il était si heureux qu’il ne voulait pas sortir de la chambre.
Le soir, il rentre à bout de forces.
Je ne peux pas arriver à suivre françois !
Il est vraiment fatigué. Tu devrais l’aider ou aller moins vite.
Il n’est pas obligé d’en faire autant que moi ! Il a treize ans et moi j’en ai quinze. Que diraient les gens si l’aîné n’avançait pas plus que le cadet ?
Le lendemain matin, Jean-Marie s’en va à la vigne avec son frère aîné.
Mais Jean-Marie trouve des forces nouvelles d’une façon peu ordinaire. Une religieuse lui a fait cadeau d’une petite statue de la sainte vierge.