L'Affaire Circé

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ADRIEN TOMAS

Illustration de couverture : Charlotte Blay

Graphisme de couverture : Julie Bureau

Dans l’esprit de la couverture des Dossiers du Voile, réalisée par Noëmie Chevalier (2021)

Direction : Guillaume Pô

Direction éditoriale : Sarah Malherbe

Édition : Elsa Tirel

Composition : Julie Bureau et Text’oh

Correction : Catherine Rigal

Direction de fabrication : Thierry Dubus

Fabrication : Julia Mirenda

© Fleurus, Paris, 2023, pour l’ensemble de l’ouvrage.

www.fleuruseditions.com

ISBN : 978-2-2151-8091-3

MDS : FS80913

Tous droits réservés pour tous pays.

« Loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse, modifiée par la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011. »

PROLOGUE

Un fjord isolé en Norvège.

C’était l’hiver. Recroquevillée au coin du feu, une tasse de thé noir refroidissant à portée de main, la vieille dame tricotait avec application.

L’éclatante blancheur de la neige, réverbérée par le rideau de stalactites dévalant l’avancée du toit, baignait l’intérieur de la maison d’une pâleur spectrale. La lumière froide dévorait les ombres des meubles soigneusement cirés, des matriochkas alignées sur les étagères et du samovar encore chaud, et plaquait des reflets bleutés sur les icônes colorées accrochées aux murs.

La vieille dame leva le nez de son tricot et regarda par la fenêtre, contemplant la forêt immaculée avec un certain amusement. La météo avait annoncé une « neige abondante sur la région », mais c’était à peine si vingt centimètres s’étaient amoncelés depuis lors.

En Russie, c’était ce qu’on appelait un été capricieux. Elle retint un soupir mélancolique. Parfois, elle regrettait son ancien pays. Cela faisait pratiquement un siècle qu’elle

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s’était établie en Europe du Nord, en espérant que la similarité du climat adoucirait son exil (tu parles).

La vieille dame considérait les événements du vingtième siècle en Russie avec une retenue qui confinait à la pudibonderie. La révolution, le communisme (brièvement utopique, notoirement autoritaire), la guerre froide, le rideau de fer… À l’échelle de sa très longue vie, il ne s’agissait que d’anecdotes. Des anecdotes cependant suffisantes pour la chasser de la mère patrie. Ni les tsars ni les communistes n’aimaient les sorcières.

Elle n’avait jamais considéré l’Empire russe ni l’Union soviétique comme la mère patrie, de toute façon. Sa mère patrie à elle était la Rus’ des temps anciens, lorsqu’elle était encore crainte et respectée, lorsque l’on venait chercher son conseil et qu’on l’invitait avec faste à la somptueuse cour de Kyiv. L’Empire des tsars ne lui avait jamais inspiré que du mépris, et l’URSS, bien que l’ayant intriguée au départ, avait suivi le chemin de toutes les révolutions inspirées d’un vœu pieux : un brutal retour à la réalité, des armes retournées contre le peuple, et des légions de bottes de cuir se pavanant au milieu de la misère.

Alors, un beau jour de 1924, elle avait rassemblé ses affaires, fermé ses volets, et ordonné à sa maison de la porter loin de là. Sa chaumière s’était dressée sur ses énormes pattes de poulet et dandinée jusqu’en Scandinavie.

La dernière marche de Baba Yaga.

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Elle ne s’était pas embarrassée avec des sorts de dissimulation : sa maison à pattes avait arpenté la mère patrie au vu et au su de tous. Bien évidemment, le Kremlin avait étouffé l’affaire – à moins que ce ne fût les dirigeants du Voile local. Ce qui revenait plus ou moins au même : les sortilèges d’amnésie produisaient le même effet que les menaces et potsde-vin.

Oubliée, la dernière apparition de la sorcière du folklore russe. Remisée à un vague racontar de moujik imbibé à la vodka, ou à un conte de fées destiné à terroriser les enfants pas sages.

Sa maison s’était d’abord posée au milieu de la forêt finlandaise, puis à l’extrême nord de la Suède (de bien belles aurores boréales), et finalement dans un fjord norvégien anonyme et difficile d’accès, uniquement connu des clans trolls qui dominaient la région – et qui avaient rapidement appris à lui ficher la paix. La vieille dame avait toujours préféré la solitude. Elle faisait pousser ce dont elle avait besoin, par magie ou par compétence, et chassait le reste.

Quarante-deux ans dans ce fjord, dos à la forêt, face à la mer.

À la chute du Mur, en 1989, la vieille dame avait envisagé de repasser à l’Est. Mais elle avait jugé plus prudent d’attendre de voir comment évolueraient les choses. Aujourd’hui, elle était heureuse de ne pas s’être précipitée : elle aurait eu toutes les peines du monde à s’empêcher de bombarder le Kremlin de malédictions suppurantes.

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Elle poussa un long soupir, but une gorgée de thé tiède et se remit à son tricot, le cliquetis de ses longues aiguilles affrontant vaillamment le silence ouaté qui régnait dans la maison.

Elle ne les entendit pas arriver.

Le feu prit presque instantanément, intense, brûlant, aveuglant, de tous les côtés à la fois. Les matriochkas et les icônes furent englouties par les flammes, tandis que le samovar basculait sur le côté, son flanc rebondi ramolli par la chaleur. Les sortilèges supposés protéger la maison lâchèrent les uns après les autres, déformés puis réduits à néant par la chaleur surnaturelle de l’incendie. La vieille dame regarda par la fenêtre et nota avec un calme hors de propos que les stalactites avaient déjà fondu.

Alors, c’est aujourd’hui, soupira-t-elle intérieurement.

Elle abandonna son tricot sur le plancher de bois, ferma les yeux et, tout en lançant son sort, s’imagina ailleurs. Elle se retrouva les pieds dans la neige, au milieu du fjord voisin, à l’emplacement exact où elle avait envisagé plusieurs fois de déplacer sa maison ces dernières années, sans jamais parvenir à s’y décider (meilleure lumière, mais plus de vent).

Elle se retourna et contempla avec tristesse la colonne de fumée noire tachetée d’orange qui remplaçait déjà son foyer.

Puis elle haussa les épaules. Bien avant l’arrivée du communisme en Russie, Baba Yaga avait compris que l’attachement aux biens matériels était une erreur. Elle reconstruirait sa maison à pattes de poule, rachèterait un samovar et

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commanderait de nouvelles icônes et de nouvelles matriochkas en ligne. Et, cette fois, elle se montrerait plus prudente. Personne ne devrait plus jamais apprendre où elle s’était installée – et tant pis pour les « règles déclaratives » qui imposaient à tous les ressortissants du Voile d’indiquer leur adresse aux autorités.

Un instant, elle envisagea de prévenir les autres. Et puis elle renonça.

Si les incendiaires avaient osé s’en prendre à elle, l’une des plus anciennes et puissantes sorcières du monde, la conclusion s’imposait.

C’était déjà fichu.

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CHAPITRE 1 TIA

– Encore un peu de thé, dear ?

Le nez de Tia Morcese émergea du plaid duveteux, sous lequel elle disparaissait jusqu’alors entièrement, juste assez pour acquiescer. Gwen versa le liquide ambré dans la tasse de porcelaine d’un geste expert, avant de déposer sur l’assiette assortie deux scones chauds et un petit pot débordant de custard cream.

La vieille dame semblait avoir reçu pour mission divine de remplir Tia de thé et de pâtisseries, et cette dernière ne voyait aucune raison de contrecarrer pareil dessein. Elle repoussa doucement Percy, l’énorme chat gris de la maison qui, depuis trois semaines, avait revendiqué ses genoux comme territoire souverain. Le greffier lui jeta un regard courroucé avant de sauter à terre avec toute la délicatesse d’un sac de ciment. Tia se pencha vers la petite table basse et s’empara de la tasse, d’où émanait une merveilleuse senteur parfumée. Ce faisant, elle fit glisser la couverture sur ses épaules et révéla sa crinière de lionne. Sa chevelure de flamme accrocha le maigre rayon de

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lumière qui avait héroïquement transpercé les nuages, puis disparut à nouveau sous les couvertures.

D’ordinaire, Tia abhorrait le thé. Avaler une macération de feuilles mortes plongées dans de l’eau bouillante n’avait jamais fait que lui laisser un goût atroce en bouche et une sensation pesante au niveau de la vessie. Mais le thé d’Avalon était différent. Tia l’associait aux vacances, à la pluie frappant aux carreaux, au feu ronflant dans la cheminée, aux plaids, aux scones et aux ronronnements de Percy. Le cottage de Gwen et Arthur était le seul endroit au monde où Tia oubliait son addiction à l’espresso, héritée de ses ancêtres italiens.

Cela faisait plus de trois semaines que la jeune femme se prélassait dans les vertes collines d’Avalon. Trois semaines de congé forcé, après une période particulièrement éprouvante pour l’enquêtrice de la Brigade de régulation des espèces méta-humaines.

Non pas que son métier soit habituellement de tout repos, tant s’en fallait. En temps normal, la mission du lieutenant de police Tia Morcese consistait à empêcher le Voile de se déchirer. Son rôle était de maintenir l’ensemble de règles, lois et sortilèges qui dissimulaient l’existence des mages, fées, trolls et autres loups-garous aux yeux du reste du monde. Une tâche ardue, compte tenu du fait que tout le monde au sein de la communauté méta-humaine (également appelée « Voile », par abus de langage) détestait cordialement ses voisins, et déployait avec une constance et une inventivité qui forçaient le respect

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de nouveaux moyens de se mettre sur la gueule. Tia éprouvait régulièrement l’impression de se débattre avec une cocotteminute sur le point d’exploser.

L’automne précédent, la cocotte-minute s’était brutalement changée en Sainte-Barbe de galion pirate. La Brigade avait dû faire face à l’Ordre de la Croix Vermeille, des néo-chevaliers fanatiques qui avaient fait régner sur le Voile parisien un climat de guerre. Persuadés que le salut de l’espèce humaine passait par l’extermination totale des méta-humains, ils avaient savamment déchiré le Voile à plusieurs reprises, montant les différentes communautés méta-humaines les unes contre les autres afin de les amener à un conflit ouvert.

L’objectif de la Croix Vermeille était simple : forcer l’humanité à constater enfin l’existence des fées, vampires, sorciers, trolls et lycanthropes. Ce qui, compte tenu de la nature humaine, aurait immanquablement conduit à la vocale exigence de leur anéantissement.

Une mission que les chevaliers de la Croix Vermeille, formés à la capture et au meurtre de méta-humains, auraient été trop heureux d’entreprendre, au nom de l’intérêt général.

Ils étaient allés jusqu’à enlever la petite sœur de Tia, Mona, afin de faire pression sur son aînée et la pousser à lâcher l’affaire. Cela s’était avéré être une colossale erreur : s’en prendre à sa famille n’avait fait qu’enrager Tia. Elle avait enquêté avec d’autant plus d’ardeur, ce qui avait accéléré le démantèlement

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de la cellule terroriste et conduit son dirigeant à recevoir une balle entre les deux yeux.

Lors des semaines qui avaient suivi, l’énergie physique et mentale de Tia avait atteint un niveau historiquement bas. Son supérieur, le capitaine Isidore Tréjean, avait décidé de la catapulter en vacances sitôt son dernier rapport rédigé. Malgré ses protestations véhémentes, Tia avait été privée de ses armes de service et mise à la porte du commissariat avec interdiction formelle d’y remettre les pieds avant un mois.

Lorsqu’elle était rentrée chez elle, désœuvrée et la mort dans l’âme, elle avait découvert que le complot pour la forcer à se reposer courait plus profondément encore. Dans son salon l’attendait une valise rouge flambant neuve (cadeau de ses frères et sœurs), ainsi qu’une enveloppe contenant un billet d’avion pour le pays de Galles et un ticket de ferry vers Avalon. Son téléphone avait sonné à ce moment précis. Sa mère lui avait alors annoncé qu’Arthur et Gwen l’attendaient de pied ferme, et que son collègue, Pascal Guthier, patientait en bas de son immeuble pour la conduire à l’aéroport.

Tia, encerclée et assaillie de toute part, avait dû capituler.

La cloche de l’entrée retentit. Tia entendit Arthur se lever, ouvrir la porte, échanger quelques mots secs avec l’importun, puis refermer brutalement la première au nez du second. Le vieil homme parut quelques instants plus tard dans le salon et adressa un signe de tête à Tia.

– Encore un envoyé de la Cour d’Été. Je l’ai envoyé paître.

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Tia sourit. Arthur était déterminé à empêcher quiconque de troubler le repos de son invitée. Le coriace vieillard n’avait rien perdu de sa hargne légendaire : tout le monde à Avalon se souvenait de la manière dont il avait, quinze siècles plus tôt, repoussé les Pictes, les Saxons et les armées unies de Mordred et Lancelot. Se déclarer l’ennemi d’Arthur Pendragon faisait drastiquement décroître l’espérance de vie, c’était un fait établi. Rares étaient ceux qui éprouvaient encore le besoin de le vérifier.

Depuis que Tia était arrivée à Avalon, elle n’avait pas croisé un seul méta-humain. Pourtant, beaucoup avaient vu en sa venue l’opportunité de se faire bien voir d’Elena Morcese, Grande Enchanteresse de Paris et, accessoirement, mère de Tia. Mais Arthur et Gwen se montraient inflexibles : personne n’était autorisé à lui « présenter ses hommages », pas même les puissants sorciers du Cercle de Merlin ou les fées de la Cour d’Été, qui régentait autant l’île que la diaspora féerique répartie un peu partout dans le monde.

Les Pendragon étaient catégoriques : Tia était là pour se ressourcer, loin de la politique et des jeux de pouvoir.

Ce qui n’était pas pour déplaire à leur invitée.

Elle sirota son thé avec délectation, absorbée dans la contemplation des flammes qui crépitaient paresseusement dans la cheminée. Son regard dériva sur le manteau, où avait été accrochée une très vieille épée celte à la lame luisant d’un étrange reflet bleu. Arthur avait raccroché Excalibur le jour de

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son arrivée à Avalon et n’y avait plus jamais touché depuis. Il était cependant passé très près de s’en emparer de nouveau au début des années 80. À l’époque, il avait fallu toute la diplomatie d’Elena Morcese pour empêcher le vieux roi d’embrocher l’intégralité du gouvernement Thatcher.

Tia se laissa à nouveau engloutir par les plaids en patchwork. Elle voulait rester ici pour toujours. Elle voulait fusionner avec le vieux sofa aux coussins brodés, ne faire plus qu’une avec le silence ouaté, la chaleur du feu et l’odeur de cire à bois. Percy s’installa à nouveau sur ses genoux et émit un miaulement d’avertissement : il ne tolérerait pas d’être dérangé à nouveau.

C’est évidemment à ce moment que son portable vibra sur la table basse, faisant tinter le service à thé. Percy enfonça aussitôt ses griffes dans les rotules de Tia, la faisant grimacer de douleur. Elle ne s’en formalisa pas : il l’avait prévenue, après tout.

Gwen décocha un regard glacial à l’engin : elle ne l’acceptait dans sa maison qu’en raison du métier de son invitée, qui lui imposait d’être joignable à toute heure du jour et de la nuit.

Tia se recroquevilla en saisissant son téléphone. La légendaire reine Gwenhwyvar pouvait se montrer tout aussi effrayante que son époux. La manière dont elle avait cassé deux doigts et le poignet d’un Lancelot trop entreprenant, alors même qu’elle était sa captive, était une histoire au moins aussi connue à Avalon que les exploits guerriers d’Arthur.

Tia baissa les yeux sur l’écran.

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De : Cap. Tréjean

À : Tia

Morcese, N’oubliez pas le briefing de présentation d’équipe, lundi à 17 h 45.

Bonne fin de vacances.

Tia sourit. Elle connaissait suffisamment son supérieur pour déceler, sous le ton lapidaire du message, une certaine inquiétude pour sa santé. Il espérait sincèrement la voir revenir suffisamment fraîche et reposée pour maintenir l’ordre dans le Voile parisien.

Tia regarda par la fenêtre. Elle n’avait plus aucune envie de rentrer. Elle savait qu’elle retrouverait à Paris les mêmes nuages lourds de février, la même pluie fine et glacée, le même vent tourbillonnant qu’à Avalon – mais ils n’auraient pas la même saveur.

Elle voulait continuer à grossir sous l’assaut des pâtisseries de Gwen, elle voulait écouter tous les soirs Arthur conter leurs exploits passés de sa belle voix de basse…

La fois où Gwen avait secrètement revêtu une armure noire, puis défié et vaincu en combat singulier tous les chevaliers de la Table ronde, Arthur compris. La fois où Arthur avait découvert deux dragons, l’un rouge et l’autre blanc, qu’Uther Pendragon avait enfermés vivants dans une grotte sous son château et qui causaient des tremblements de terre en série.

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La fois où Yvain était revenu à Camelot avec un bébé lynx qu’il avait pris pour un lion, lui valant un surnom moqueur qui avait traversé l’Histoire…

Tia balança son téléphone entre les coussins du sofa, s’empara d’un scone beurré et réclama au vieux roi une nouvelle histoire. Il ne lui restait plus que quelques heures de répit, et elle comptait bien en profiter.

L’Affaire Circé

« Si leS incendiaireS avaient oSé S’en prendre à elle, l’une deS pluS ancienneS et puiSSanteS SorcièreS du monde, la concluSion S’impoSait. c’était déjà fichu. »

RetRouvez Tia et Mona MoRcese, pouR une nouvelle affaiRe au coeuR du Voile !

Le monde du Voile n’est jamais en paix. La preuve : le lieutenant de police Tia Morcese rentre à peine de vacances qu’un attentat est signalé à Belleville, le quartier des fées. Lorsqu’un second incendie se déclare, visant la communauté des mages, Tia doit se rendre à l’évidence. Le Voile menace de se déchirer, et c’est un nouvel adversaire qui tire les ficelles de ce désastre.

Alors qu’elle se rend de toute urgence à Lille, pour y alerter les maisons sorcières de France, sa jeune sœur Mona mène sa propre enquête. Que signifie ce seul indice dont elles disposent : « Circé agonisante » ?

Les sœurs Morcese pourront-elles résoudre cette affaire avant que le Voile ne s’embrase ?

Adrien Tomas revient avec un nouveau roman dans l’univers des Dossiers du Voile, paru en 2021.

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Charlotte Blay Graphisme
couverture
Julie Bureau

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