9782215117827 voyage centre terre ext

Mes Grands Classiques

de la Terre

Mes Grands Classiques

9 782215 117827

www.fleuruseditions.com

Jules Verne

Fleurus

9782215117827_couv_voyageok-REIMP.indd 1

07/09/2015 16:56

Dirrection : Guilllaum me Arnau ud Directtion éditooriale : Saaraah Mallherbe Édittion : Clairee Renaud d, assiistée d’Anne-Sophiee Rah hm Directiion artistiique : Éliisaabeth Hebert Fabbrication n : Thierrry Du ubuss, Sabinee Marioni © Grou upe Fleurus, Paris, 20012, pou ur l’ensem mble de l’ou uvraage.

Sitee : www.fl fleuru usediitions.coom ISSBN : 978-2-2 21511-1782-7 7 MDS : 6551 589 N° d’éd dition n : 12088 Tous droits résservéss pou ur tous pays. « Loi n°49--956 du 16 juilleet 1949 su ur less publication ns destin nées à la jeuneesse. »

Les Gran nds Classiq iqu uess dess Av Aven nturierss

de la Terre Juless Vern Ve ne

Adaapté paar Alain n Hobbbé Illusttré parr Fabbieen Moontes

1

Un retour précipité

C

e dimanche 24 mai 1863, mon oncle, le professeur Lidenbrock, rentra à une heure qui n’était pas habituelle. La bonne Marthe, le voyant revenir à grands pas, en fut toute catastrophée.

Le dîner n’était pas encore prêt et nous savions, elle et moi, qu’il n’aimait pas qu’on le fasse attendre. Allait-il se montrer de très mauvaise humeur ? Et que pouvait donc vouloir dire un retour si précipité ? Elle jugea plus prudent de rebrousser chemin vers sa cuisine et moi, de regagner ma chambre. Mais au moment où j’allais sagement déguerpir, mon oncle, qui rejoignait déjà son cabinet de travail, me lança d’une voix retentissante : – Axel, suis-moi !

Et avant même que j’aie fait le moindre geste, il me criait déjà : 5

Voyage au centre de la Terre

– Et alors ? Tu n’es pas encore ici ?

Otto Lidenbrock n’était pas un méchant homme, mais un savant d’un genre un peu particulier. C’était un spécialiste des minéraux. Il faisait cours à des étudiants qui venaient nombreux le voir, même si lui ne semblait pas beaucoup s’intéresser à eux. C’est qu’il était captivé par la science. Il en oubliait ceux qui s’amusaient de sa difficulté à prononcer certains des mots tordus dont la science a le secret. Ce défaut le faisait entrer dans des colères volcaniques, pour la plus grande joie de ceux qui étaient venus l’écouter. Le professeur Lidenbrock amusait ainsi bien souvent son auditoire et cependant, son grand savoir inspirait le respect. Sa connaissance des cristaux, des résines et des roches avait fait sa renommée bien au-delà de la bonne vieille ville de Hambourg, où nous vivions.

Nous logions à quatre dans sa maison ancienne de la Königstrasse : lui, sa fidèle Marthe et moi-même, son neveu, ainsi que sa jeune filleule Graüben. Et si la vénérable demeure donnait quelques signes de fatigue dus à son grand âge, nous nous y sentions bien. Nous étions heureux de partager son toit malgré le caractère assez imprévisible du propriétaire des lieux. Car ses impatiences, au fond, cachaient un bon cœur. Et comme j’avais moi aussi pris goût aux sciences géologiques, j’avais fini par le seconder dans ses tâches et le suivre dans chacune de ses fantaisies…

J’entrai sans tarder dans le cabinet de travail. C’était un vrai musée. À l’intérieur, on pouvait trouver des échantillons de tous les minéraux du monde. Il y en avait tant, de ces petits bijoux, que je crois bien qu’ils auraient suffi pour reconstruire la maison tout 6

Voyage au centre de la Terre

entière. Et j’avais passé tant de temps à les épousseter, les uns après les autres, qu’il me semblait les connaître tous.

En entrant, pourtant, je ne vis que mon oncle absorbé par la lecture de l’ouvrage qu’il tenait dans ses mains.

– Quel livre ! Quel livre ! s’écriait-il.

Il ouvrait et refermait un volume un peu jauni, et n’en finissait pas de l’admirer comme une pièce rare. Il s’agissait sans doute de l’un de ces écrits qu’il affectionnait pour la bonne raison qu’ils étaient introuvables, ou illisibles. Il l’examinait avec la minutie de l’amoureux des livres anciens qu’il était. Il se montrait soucieux du plus petit détail de sa fabrication, coupant son observation d’exclamations enthousiastes.

– Vois ! Est-ce admirable ? Oui, c’est admirable, disait-il en se répondant à lui-même. Et quelle reliure ! Et ce dos qui ne montre pas une seule égratignure après sept cents ans d’existence !

– Et quel est donc le titre de ce merveilleux ouvrage ? demandai-je en forçant mon intérêt pour cette chose d’une autre époque.

– Cet ouvrage ! s’écria-t-il. Mais c’est l’histoire des princes norvégiens qui régnèrent en Islande, racontée par Snorre Turleson, le célèbre auteur islandais du XIIe siècle ! Et dis-toi bien qu’il s’agit là du livre original, écrit dans cette magnifique langue islandaise, si riche et si simple à la fois !

– Ah ! fis-je, quelque peu intrigué. Et les caractères sont-ils beaux ?

– Mais malheureux ! Des caractères ! Oui, ce sont bien des caractères, mais écrits à la main ! Car c’est un manuscrit que je tiens là ! Comprends-le bien : un manuscrit runique !

– Runique ?

8

Un retour précipité

– Oui, runique. Et puisque tu me le demandes, apprends que les runes étaient des caractères d’écriture utilisés en Islande il y a de cela des siècles et des siècles…

J’étais à deux doigts de m’émerveiller avec lui quand un incident nous arrêta : un parchemin tout sale venait de s’échapper des pages, et tomba par terre. Mon oncle le ramassa aussitôt avec la curiosité qu’on imagine.

– Qu’est-ce que cela ? demanda-t-il tout en dépliant le feuillet qu’il posa sur la table.

Sous nos yeux étonnés se trouvaient alignés un ensemble de caractères disposés en trois colonnes, tous plus étranges les uns que les autres :

Nous ne savions pas encore dans quelle extraordinaire aventure allaient nous entraîner ces signes énigmatiques.

– Ce sont des runes, constata mon oncle, tous identiques à ceux du manuscrit.

Il reconnut la vieille langue islandaise. Cependant, à la vue de ses mains agitées, je compris que sa connaissance des langues ne lui serait d’aucun secours : tout professeur Lidenbrock qu’il était, il 9

Voyage au centre de la Terre

n’y comprenait rien. Et j’eus en même temps une autre certitude : il allait s’en trouver très fâché.

– La soupe est servie, déclara Marthe pile au moment où deux heures sonnaient.

– Au diable la soupe, s’écria le savant contrarié, et celle qui l’a faite et ceux qui la mangeront !

Marthe fit demi-tour. Je la suivis jusqu’à la salle à manger.

J’attendis à table, quelques instants… en vain. Je mangeai donc pour deux. Dire que c’était la première fois que mon oncle manquait un repas !

– Je n’ai jamais vu ça ! disait la bonne. M. Lidenbrock qui ne vient pas à table !

Elle prit cela pour un mauvais présage. Et moi, pour la promesse d’une colère épouvantable au moment où mon oncle reviendrait. J’allais terminer ma délicieuse compote de prunes, lorsque sa voix retentissante m’appela une nouvelle fois. Je bondis jusqu’à lui.

2

Un message incompréhensible

I

l y a un secret, et je le découvrirai, disait le savant, qui n’avait pas quitté son cabinet de travail. Il fronçait les sourcils, penché sur le précieux document, quand soudain, d’un geste brusque, il me montra la table.

– Mets-toi là, et écris !

Aussitôt dit, aussitôt fait. Je m’installai, et il me fit alors la dictée de la traduction, caractère après caractère, jusqu’à former la suite de mots sans queue ni tête que voici : –

11

Voyage au centre de la Terre

m.rnlls sgtssmf kt,samn emtnael Atvaar ccdrmi dt,iac

esreuel unteief atrateS nuaect .nscrc eeutul oseibo

seecJde niedrke Saodrrn rrilSa ieaabs frantu KediiY

– Un cryptogramme ! dit mon oncle en s’emparant de la feuille.

Toutes les lettres sont brouillées de sorte à former un message secret… Un message secret qui doit vraisemblablement cacher une grande découverte !

En comparant le livre et le parchemin, il s’aperçut qu’ils ne dataient pas du tout de la même époque : le livre était de deux cents ans plus ancien ! Ce qui voulait donc dire que le mystérieux message avait été glissé là par un des lecteurs de l’ouvrage.

– Mais qui diable était cet homme ? N’aurait-il pas noté son nom quelque part ?

Le savant prit une grosse loupe. En la passant sur les premières pages du livre, il tomba sur une tache d’encre à travers laquelle il devinait des caractères presque illisibles. Il comprit qu’il tenait sa réponse. Il s’approcha encore, encore, à l’aide de sa grosse loupe… et ce fut bientôt pour lui un jeu d’enfant de déchiffrer le nom caché derrière les caractères runiques qui s’enchevêtraient là.

– Arne Saknussemm ! s’écria-t-il. Le fameux alchimiste islandais du XVIe siècle ! Encore un de ces grands savants qui nous étonneront toujours ! Et sans doute aussi une surprenante invention qui pour l’instant reste mystérieuse !

12

Un message incompréhensible

– Sans doute, lui répondis-je. Mais quel intérêt aurait eu ce Saknussemm à nous cacher ainsi sa découverte ?

– Je n’en sais rien, Axel, rien du tout. Mais dis-toi bien qu’il me tarde déjà de percer ce secret. Tant et si bien qu’il ne saurait être question pour moi de manger ni de me coucher avant de savoir le fin mot de cette affaire… Ni pour toi non plus d’ailleurs !

Je fus en cet instant bien content d’avoir suivi Marthe tout à l’heure et d’avoir pu manger pour deux.

– Et le plus important est tout d’abord de savoir de quelle langue il s’agit, ajouta-t-il.

Le savant qu’il était remarqua bien vite que le nombre de voyelles était identique à celui d’une langue du sud de l’Europe. Et de la même façon, sa connaissance des sciences et de l’histoire lui permit d’être sûr qu’il s’agissait là de la langue que tous les grands esprits de l’époque utilisaient entre eux : le latin.

– Oui, du latin, ajouta-t-il. Mais du latin brouillé. Ces cent trente-deux lettres en désordre n’ont sûrement pas été groupées n’importe comment. Cherchons, ce n’est qu’une question de mathématiques !

Il n’en doutait pas : ce méli-mélo de lettres apparemment rangées en dépit du bon sens n’était, en fait, pas dû au hasard. Il avait été obtenu à partir d’une phrase ordinaire au départ, qu’on avait retournée en suivant une règle bien précise : un code secret ! Et c’était justement ce code secret qu’il nous fallait chercher, comme on cherche une clé…

Mais je ne suivais plus la pensée du professeur Lidenbrock. Mes yeux s’étaient perdus dans la contemplation du petit portrait accroché au mur. C’était celui de sa filleule Graüben, ma fiancée secrète et 13

Voyage au centre de la Terre

adorée, dont l’absence me rendait si triste. Son départ chez une parente avait laissé place au souvenir de ses yeux bleus sous ses longs cheveux blonds. Je me rappelais les doux moments partagés dans nos travaux communs. J’enviais alors le sort de ces pierres insensibles qu’elle maniait de ses charmantes mains. Et revenaient aussi à ma mémoire les promenades au bord de l’eau que nous faisions, l’un contre l’autre. On parlait, elle riait. Puis les cygnes au milieu des grands nénuphars blancs nous regardaient partir en barque…

– C’est sûr, dit mon oncle en frappant sur la table, la première idée qui vient, c’est de noter les lettres de haut en bas et non de gauche à droite ! Donc de passer de l’écriture couchée à l’écriture debout… Axel, faisons un essai pour voir ce que ça peut donner !

Je pris tout de suite un papier et j’écrivis comme il le demandait, par bâtons de cinq ou six lettres, la première phrase qui me passait par la tête : JmneGe ee,trn t’bmia! aiatü iepeb Et je mis ensuite bout à bout ces lettres, pour former le message suivant : JmneGe ee,trn t’bmia! aiatü iepeb – Parfait ! fit mon oncle. Voilà qui ressemble bien à ce qu’on peut lire sur le manuscrit de Saknussemm. Et maintenant, pour 14

Un message incompréhensible

retrouver ta phrase, il ne me reste plus qu’à prendre l’une après l’autre chacune des premières lettres de chaque mot, puis les deuxièmes, puis les troisièmes.

Et peu à peu, sous des regards étonnés, ma phrase imprudente apparut : Je t’aime bien, ma petite Graüben !

– Ah ! Tu aimes bien Graüben ! Tu aimes bien Graüben ! répéta mécaniquement mon oncle en découvrant ces mots choisis sans réfléchir. Eh bien, puisque c’est ainsi… voyons un peu maintenant ce que cela donne avec le manuscrit !

Et à mon grand soulagement, il se replongea dans l’étude du parchemin secret. Le moment était trop important. Car comme il l’avait fait pour ma phrase, mon oncle allait enfin découvrir le sens du message laissé par l’alchimiste islandais. Il était sur le point de percer le mystère ! Ses yeux étincelaient à travers ses lunettes, ses mains tremblaient. Il toussa fortement. Puis sa voix grave s’éleva tandis qu’il me dictait, lettre après lettre, l’énoncé que voici : messunkaSenrA.icefdoK.segnittamurtn ecertserrette,rotaivsadua,ednecsedsadne lacartniiiluJsiratracSarbmutabiledmek meretarcilucoYsleffenSnI Que s’était-il passé ? Des lettres en bazar s’étalaient sous nos yeux.

Le beau latin que je pensais entendre sortir de la bouche du 15

Voyage au centre de la Terre

professeur Lidenbrock ne vint pas. Au lieu de cela, sans crier gare, il frappa la table du poing. L’encre rejaillit, la plume me glissa des doigts.

– Ça ne veut rien dire ! cria-t-il. Ça n’a aucun sens !

Puis il se leva, quitta la maison comme une furie et disparut dans la Königstrasse.

3

La révélation

E

n entendant la porte claquer, la bonne Marthe accourut.

– Mais quand va-t-il dîner ? demanda-t-elle, les bras levés au ciel.

– Le professeur ne mangera pas, lui répondis-je. Et il a décidé que nous ne mangerons pas non plus. Jusqu’à ce qu’il réussisse à déchiffrer un vieux parchemin !

– Mon Dieu ! gémit la pauvre femme en refermant sur elle la porte de sa cuisine.

Une fois seul dans le cabinet, je me mis à classer quelques pierres que je venais de recevoir. Mais le cœur n’y était pas. Je songeai d’abord à Graüben que je n’irais pas voir. Puis je pensai à mon oncle que j’imaginais sur le chemin. Je me le figurais marchant à 17

Voyage au centre de la Terre

grands pas, fouettant de colère de pauvres fleurs avec sa canne…

Dans quel état d’esprit reviendrait-il ?

Après avoir rangé les pierres, je me laissai aller dans son fauteuil et repris le parchemin. J’observai la suite incompréhensible de lettres et me répétai : – Qu’est-ce que cela peut donc vouloir dire ?

Il devait pourtant bien exister un ordre à ces fichus cent trentedeux caractères ! J’isolai des morceaux de français, et d’autres venus de langues étrangères : du latin, de l’anglais, de l’hébreu même ! Des mots que je reconnaissais par-ci, par-là… mais rien qui puisse être assemblé en une phrase intelligible.

Je restai ainsi un bon moment à réfléchir activement, tant et si bien que ma tête s’embrouilla. Je m’étais échauffé l’esprit à vouloir percer le secret de ces lettres. Et machinalement, je me donnai un peu d’air en agitant la feuille à la manière d’un éventail, de gauche à droite… Quelle ne fut pas ma surprise de lire alors, à l’envers, des mots latins parfaitement compréhensibles : « craterem », « terrestre », et d’autres encore ! Était-ce possible ? Oui, mon oncle avait raison, c’était bien du latin ! Et je venais, moi, sans aucun doute, de découvrir la clé du mystère : il suffisait tout bonnement de lire en commençant par la fin ! Quelle émotion ! Je me levai. Je fis deux fois le tour de la pièce pour me calmer, et me calai de nouveau dans le vieux fauteuil.

Le parchemin était devant moi, sur la table. Je n’avais plus qu’à tout remettre dans le bon sens. Ce que je fis, du bout du doigt, lettre après lettre, jusqu’à révéler le message en entier. Et ce message se fit le plus clair possible, et pour moi le plus terrible : il s’était donc trouvé un homme avec assez d’audace pour visiter… Était-ce 18

Voyage au centre de la Terre

croyable ? Un pareil voyage ! Bon sang ! Il ne fallait pas que mon oncle le sache. Obstiné comme il l’était, il allait vouloir tenter à son tour l’aventure. Non ! Pour rien au monde, il ne devait découvrir quoi que ce soit de cette histoire. Il fallait ne courir aucun risque. Et une seule solution se présentait à moi : détruire le document.

Un peu de feu fumait encore dans la cheminée. Je m’approchai, prêt à faire disparaître pour toujours le dangereux parchemin lorsque la porte s’ouvrit. J’eus tout juste le temps de reposer le document sur la table. Le professeur Lidenbrock était là, visiblement perdu dans ses pensées.

Il ne tarda pas à se remettre au travail. Il griffonna des formules, puis d’autres, et d’autres encore. Des quantités de formules qu’il ratura, qu’il effaça, qu’il recommença sans prendre un instant de repos. Les heures passaient. Il griffonnait toujours. Il ne vit même pas Marthe venue s’inquiéter de son repas. Et ne se rendit pas compte non plus que, peu de temps après, je m’endormais au bout du canapé. À mon réveil, je le trouvai comme je l’avais laissé : penché sur sa table, travaillant sans relâche à l’élucidation de la terrible énigme.

Il était malgré tout gagné par la fatigue, et j’eus de la pitié pour lui en le regardant s’épuiser ainsi. Et dire que quelques mots de moi auraient suffi à le délivrer de son tourment ! Pourtant, je ne pouvais me résoudre à les lui dire. Il se serait empressé de partir sur les traces du savant islandais. C’était une évidence : je risquais de faire son malheur. Et je ne voulais pas avoir à me sentir un jour responsable d’un tel drame.

20

La révélation

Cependant, je sentais venir en moi la faim. Nous n’avions pas mangé depuis le déjeuner de la veille, et j’étais pris de crampes à l’estomac. La bonne Marthe elle-même ne pouvait plus aller au marché, la clé de la grande porte avait disparu ! Nous étions donc enfermés dans la maison et cet enfermement me causait un autre souci : je me trouvais empêché d’aller faire mes petites visites…

La situation devenait de plus en plus difficile. Mon oncle s’épuisait toujours à la tâche, et il me sembla peu à peu que j’avais peut-être donné trop d’importance à cette histoire. Après tout, le professeur pouvait aussi ne pas y croire. Ou bien nous trouverions bien un moyen quelconque de le retenir. Et puis, de toute façon, lui-même allait finir par découvrir la clé du mystère. Alors autant mettre fin à cette absurdité. Je décidai de lui révéler le secret.

Au moment où il s’apprêtait à sortir une nouvelle fois, je l’appelai : – Mon oncle ! Mon oncle Lidenbrock !

– Quoi ? fit-il en se retournant.

Il me regarda par-dessus ses lunettes et comprit en me voyant que j’avais une chose importante à lui confier. Il s’approcha.

– Eh bien ?

– La clé, la clé du document…

Il me saisit brusquement par le bras et planta son regard dans le mien comme pour m’interroger. Il ne dit pas un mot. Je fis oui de la tête. Il me secoua le bras plus fort. Je fis oui, une seconde fois.

– Que me racontes-tu ? s’écria-t-il au comble de la nervosité.

– Oui, la clé… Je l’ai trouvée. Tenez…

Je lui tendis la feuille où j’avais pris mes notes.

21

Voyage au centre de la Terre

– Mais, il n’y a rien de nouveau là-dessus, dit-il en froissant le papier.

– Rien, non, si on lit de gauche à droite. Mais en lisant de droite à gauche…

Il poussa un cri de joie.

– Sacré Saknussemm ! s’exclama-t-il. Tu avais donc écrit à l’envers !

Et il eut tôt fait de lire et traduire le document tout entier : Descends dans le cratère du Yocul de Sneffels que l’ombre du Scartaris vient caresser avant les premiers jours de juillet, voyageur audacieux, et tu parviendras au centre de la Terre. Ce que j’ai fait. Arne Saknussemm. À la lecture du message, mon oncle fut pris d’un moment de folie. Il sauta en tous sens, courant en large et en travers de la pièce.

Il remua ses livres, ses pierres, tout ce qui lui tombait sous la main.

Mais la fatigue s’était accumulée, elle eut bientôt raison de son enthousiasme. Et il s’affala dans son fauteuil.

– Quelle heure est-il ? me demanda-t-il.

– Trois heures, mon oncle.

– Tiens donc ! Il serait temps de passer à table, après quoi… tu feras mes valises !

– Hein ! m’écriai-je.

– Et les tiennes ! ajouta l’incorrigible professeur en entrant dans la salle à manger.

Table des matières

1.

2.

3.

4.

5.

6.

7.

8.

9.

10.

11.

12.

Un retour précipité ...................................................

Un message incompréhensible ..................................

La révélation .............................................................

Un départ mouvementé ............................................

Vers un nouveau pays ...............................................

Une rencontre islandaise ...........................................

En route vers le volcan .............................................. À l’assaut du Sneffels .................................................

Une descente vertigineuse .........................................

Les premiers pas sous terre ........................................

La grande soif ...........................................................

Un nouveau départ ...................................................

167

5 11 17 23 32 38 44 50 57 63 68 75

Voyage au centre de la Terre

13.

14.

15.

16.

17.

18.

19.

20.

21.

22.

23.

24.

25.

26.

Descendre, encore et encore… ..................................

Seul dans les ténèbres ................................................

Quel étrange réveil ! ..................................................

La mer Lidenbrock ...................................................

Embarquement pour l’inconnu .................................

Navigation en mer Lidenbrock .................................

Un voyage mouvementé ...........................................

De l’électricité dans l’air ............................................

Une mauvaise surprise ..............................................

De surprise en surprise ..............................................

Une apparition et une réapparition ...........................

Emportés par les flots ................................................

Une ascension fulgurante ..........................................

La gloire du professeur ..............................................

81 86 91 99 105 110 117 123 128 133 139 144 151 158

Mes Grands Classiques

de la Terre

Mes Grands Classiques

9 782215 117827

www.fleuruseditions.com

Jules Verne

Fleurus

9782215117827_couv_voyageok-REIMP.indd 1

07/09/2015 16:56