Projet de fin d’études – Juin 2024 Navech Benoit et Walz Nicolas

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GARE AUX RESSOURCES !

UNE NOUVELLE STRUCTURE

POUR L’ANCIEN QUARTIER DE LA GARE

PROJET PAR

BENOÎT NAVECH

WALZ

ECOLE NATIONALE SUPÉRIEURE D’ARCHITECTURE DE VERSAILLES

NICOLAS

INTRODUCTION

UNE RURALITÉ INDUSTRIELLE

UNE INJONCTION À RÉINDUSTRIALISER ET APRÈS L’INDUSTRIE ?

ECHASSIÈRES, UNE MINE DU FUTUR ?

D’ÉCHASSIÈRES À SAINT-ELOY-LES-MINES, VILLES JUMELÉES

L’AUVERGNE SUR LES RAILS

LA GARE DE SAINT-ELOY-LES-MINES

SAINT-ELOY, DES PUITS À L’USINE UNIQUE

1 Etudé réalisée par la Direction de l’Intelligence Territoriale et de la Prospective (DITP) - Pôle DATAR, L’industrie en milieu rural en France et en Nouvelle-Aquitaine, Mai 2021

Listes d’accidents industriels récents

Le 6 juin 2018, Explosion d’un silo à grain à Strasbourg (Bas-Rhin) ; le 17 février 2019, Fuite d’un pipeline à Autouillet (Yvelines); le 3 juillet 2019, Incendie d’une usine de traitement classée « Seveso seuil haut » à Saint-Germain-en-Laye (Yvelines); le 26 septembre 2019, Incendie de l’usine Lubrizol, classé « Seveso seuil haut » à Rouen (Seine-Maritime).

UNE RURALITÉ

INDUSTRIELLE

Traditionnellement les espaces ruraux se sont construits autour de la fonction agricole et sont considérés comme des espaces de production de denrées alimentaires. L’agriculture y a muté au fil des années pour prendre en France des formes de plus en plus industrielles.

Depuis la révolution industrielle, l’industrie a pris une place grandissante dans ces territoires. Auparavant artisanale, l’évolution technique de cette période a amené des nouvelles manières de production.

La définition de la ruralité a également évolué. D’abord définie par le vide laissé entre les villes, à l’époque où elles étaient plus concentrées, la «ruralité» est utilisé aujourd’hui pour décrire des territoires situés en dehors des réseaux denses et matérialisés des métropoles. Ce qui en fait un définition floue à l’heure où les réseaux numériques permettent également de lier des territoires isolés géographiquement.

En France, on considère que le milieu rural concentre 33% de la population1 soit 21,8 millions de personnes. Environ 5,7 millions de personnes travaillent dans une commune rurale, cela représente donc une part de 22% d’actifs occupés. En croisant ces chiffres avec ceux du nombre d’emplois industriels en milieu rural. On se rend compte que l’emploi industriel (hors agriculture) est 1,7x plus présent en zone rurale qu’en ville 1

Cependant les types d’industries présentes en milieu rurales ne sont pas les mêmes que ceux développés en urbain et périurbain . Elle concentre notamment 67% des industries extractives , 61% du travail du bois ou encore 53% de l’industrie du cuir et de la chaussure.

Il y a des raisons logiques à ce que ces industries se situent dans ces territoires : - La proximité à la ressources. De la ressource à la transformation, la réduction des transports permet de réduire les coûts et la logistique lié à la production.

- La proximité d’une source d’énergie. De nombreuses industries se sont implantées sur les cours d’eau afin de bénéficier de l’énergie et d’avoir une ressource en eau illimité.

- Disponibilité de main d’oeuvre. Bien qu’implanté en milieu rural, de nombreux industriels ont bénéficié d’une main d’oeuvre qui gardait un mode de vie mi-ouvrier mi-paysan, permettant une plus grande flexibilité d’embauche en fonction des besoins, mais également d’ancrer des populations proche des usines.

- Attractivité fiscale. L’implantation en milieu rural fait l’objet de nombreuses aides notamment par des dispositifs tels que les ZRR - Zones de revitalisation rurale qui permettent un certain nombre d’éxonérations fiscales.

- Ecarter les risques de pollutions de la ville. Industrie et densité ne font pas forcément bon ménage. Le risque de catastrophe industriel accroit le potentiel risque sur la population. De nombreux exemples peuvent être cité sur ces dernières années en France. ( liste ci contre)

Les politiques actuelles tendent à renforcer l’industrie française, impactant de fait le futur des villes rurales.

Photo ci-dessous Commentry (Allier)

Nombre d’emplois dans l’industrie entre 1970 et 2014

Source La désindustrialisation quelles réalités dans le cas français ?

Carte du potentiel minier en France métropolitaine en 2024

En complément sur les mines actuelles, certains de ces sites actuels ne sont pas des mines. Le site d’Echassières est une carrière de kaolin, mais dont l’extraction entraine la découverte de petites quantités d’Etain, de Tantale et de Niobium.

Sur le potentiel minier de la France, comme certains géologues le précisent, le sous-sol français est encore peu connu et exploité. Probablement marqué par les années de Révolution Industrielle qui ont marqué les mémoires. Nous avons principalement identifié

les opportunités minières dans des espaces qui conviennent déjà à l’exploitation minière, hors des villes, et qui sont déjà maîtrisés au niveau foncier par l’Etat ou des propriétaires qui exploitent déjà des ressources.

Le Nord et Nord-Est de la France regorge probablement de ressources intéressantes, mais cette carte semble concentrer les opportunités minières dans l’Ouest, le Centre et le Sud-Ouest de la France

UNE INJONCTION À RÉINDUSTRIALISER

L’année 1972 semble marquer l’apogée ultime de l’industrie française. Marquée par les crises pétrolières, les grèves ouvrières de 1968 et un rejet croissant de certaines formes d’organisation du travail, l’industrie française a progressivement décliné.

En passant de près de 34 % du PIB en 1972 à environ 10 % en 2012, le gouvernement français a décidé de réagir à partir de 2012 en créant le ministère du Redressement productif. Ce dispositif semble être efficace, car il a permis d’obtenir des résultats en quelques années, redressant la part de l’industrie dans le PIB à environ 15 % aujourd’hui. Des initiatives telles que Choose France, mises en place depuis 2018, mettent en avant chaque année les milliards d’investissements réalisés par des entreprises étrangères sur le sol français.

1 Loi ZAN - Zéro Artificialisation Nette

2 En Avril 2024, Le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, a publié un arrêté concernant une liste de 424 projets industriels qui pourront être exclus du dispositif «zéro artificialisation nette des sols» (ZAN) et ainsi déroger à la loi «Climat et résilience».

3 Expression utilisée par Tesla lors de la création de sa première usine de fabrication de batterie dans l’état du Nevada. L’expression tend à être utilisé pour décrire des usines à très grande capacité de produiction . La Gigafactory de Tesla dans le Nevada est la deuxième plus grande usine du monde avec 53,88 hectares. Tesla tente actuellement de construire une nouvelle usine de production de batterie à Dunkerque. Il y promet entre 2000 et 3000 emplois directs.

Cependant, cette réindustrialisation n’est pas sans conséquences. Tout d’abord pour les ouvriers : bien que les techniques évoluent, de nombreuses industries conservent des méthodes archaïques, avec les conséquences que cela a sur l’environnement et la santé des travailleurs. Il faut également réussir à intégrer harmonieusement ces industries dans un paysage français de plus en plus saturé. Malgré la mise en place de politiques qui empêchent l’artificialisation des sols (loi ZAN ), 424 projets industriels ont déjà obtenus des dérogations pour s’étendre2.

Pour éviter les conflits, la plupart des investissements se font plus volontier sur des installations déjà existantes. Cependant, de nouvelles industries, qui ne correspondent pas toujours à celles mises en place par le passé, tentent de s’installer sur de nouveaux sites et font l’objet de nombreuses contestations. Voici une liste des types de projets (notamment de «Gigafactorys»3 actuellement concernés en France : Production de batteries électriques, Production de produits pharmaceutiques, Production de panneaux photovoltaïques, Production de voitures électriques

Cette compétition industrielle se joue à l’échelle européenne, voire internationale, et laisse parfois certains territoires impuissants devant l’implantation inéluctable de ces industries, tant elle est stratégique pour les nations. La crise du Covid, les tensions internationales et les conflits actuels poussent les nations à se réorganiser face à l’explosion du coût des matières premières, notamment des ressources minérales, et à leur potentielle pénurie. Un autre problème est la dépendance à l’égard de certains pays pour l’acquisition de ces ressources, particulièrement lorsque l’on est en désaccord sur des sujets diplomatiques (Russie, Chine, Iran, etc.).

Le renouveau voulu et forcé de l’industrialisation ne semble pour l’instant pas encore à la hauteur des enjeux environnementaux et sociaux qu’un pays comme la France attend. Malheureusement, leur implantation dans des zones rurales semble plus facile en raison d’une contestation moins forte et organisée, et d’un pouvoir politique demandeur des retombées économiques que ce type de projets peut produire.

A l’heure du retour forcé de l’industrie en France, que pouvons nous apprendre de la désindustrialisation massive qui a eu lieu en France et de ses conséquences sur le territoire ?

Parc

ET APRÈS L’INDUSTRIE ?

En s’intéressant au développement des villes principalement basées sur l’industrie, nous avons pu constater un manque d’anticipation concernant l’épuisement des ressources et l’obsolescence de certains matériaux. Des villes comme Commentry (Allier) ont connu des années fastes à la fin du XIXe siècle, atteignant presque 13 000 habitants en 1872. Les bâtiments publics de cette époque, tels que la mairie, le théâtre et le marché couvert, témoignent de cette dynamique florissante. Cependant, à partir des années 1970, avec le déclin de l’industrie, la population a brusquement chuté pour atteindre aujourd’hui seulement 6 300 habitants, laissant de nombreux bâtiments à l’abandon et des vestiges du passé. Commentry, qui était un village de 600 habitants en 1821, a connu une ascension rapide, et il était probablement inimaginable à l’époque que la décroissance pourrait frapper un jour cette ville prospère.

L’épuisement des ressources est une menace réelle pour ces villes. Les ressources, autrefois accessibles en surface, deviennent de plus en plus coûteuses à extraire, rendant l’attractivité et la rentabilité de ces sites industriels obsolètes. La mondialisation et les évolutions technologiques permanentes influencent également le cours des matières premières. Comme pour le charbon, des villes comme Commentry sont devenues obsolètes. Bien qu’elle tente de reconvertir une partie de son activité vers le recyclage des batteries, la rentabilité et les investissements nécessaires semblent décourager les industriels.

Des corons du Nord à la cité Lafarge de Viviers, en passant par les carrières de Carmaux, les exemples de sites industriels abandonnés sont nombreux. Autrefois, les composants de ces bâtiments ou infrastructures auraient été réutilisés pour la reconstruction (par exemple, transformation de bâtiments en pierre en carrières pour reconstruire). Aujourd’hui, les matériaux restent sans avenir, dégradés par le temps et les éléments.

Une forme de renaissance se manifeste sur certains sites industriels, souvent par la création de sites touristiques exploitant la monumentalité et les spécificités des terrains :

- Musées de l’industrie, musées de la mine

- Parcs arborés (comme le parc du haut fourneau U4 à Uckange)

- Parcs de loisirs (pistes de ski sur les terrils du Nord, ou sur l’ancienne carrière de Carmaux)

Cependant, bien que ces initiatives permettent de redonner une certaine vitalité à ces territoires abandonnés, elles ne sont que des plaisirs artificiels dissimulant le chômage, la pollution et l’abandon de ces régions, sans offrir la stimulation nécessaire à une véritable revitalisation économique.

La hausse des prix des matières premières remets sur la table de nombreux projet d’exploitation de mine, et notamment un projet de mine de lithium dans le centre de la France qui a été largement touché par la fermeture des mines de charbon et des forges d’acier. Ces projets peuvent-ils relancer toute une économie locale ?

Arudy (Béarn) photo archive-arn.fr
Théâtre de Commentry (Allier) photo personnelle
Parc de Loisirs Cap Découverte, Carmaux (Tarn)
Marché couvert de Commentry (Allier ) photo personnelle
Messeix (Puy-de-Dôme) photo archive-arn.fr
du haut Fourneau U4, Ukange (Moselle) photo CAUE 57
Piste de ski synthétique sur Terril 42, Noeudles-Mines (Nord)
Pulversheim-Ochsenfeld (Haut-Rhin) photo archive-arn.fr
Mairie de Commentry (Allier ) photo personnelle
Carmaux (Tarn) photo archive-arn.fr

RÉSUMÉ EN CHIFFRES

- Deviendrait la 2e plus grande mine de lithium en Europe

- 1 Milliard d’investissement

- 40 ans - période prévue d’exploitation avant épuisement du site

- 1 Million de tonnes de lithium à extraire soit 700 000 batteries de voiture par an pendant 40 ans

- 1% est la teneur en lithium des volumes qui seraient extraits.

- 8kg de CO2 produit par tonne extrait contre 16à 20 kg dans les mines au Chili ou en Australie

- 750 m - Profondeur maximale envisagée de la mines

- 600 000 m3 consommation

annuelle prévue de la mine

- 1000 emplois crées - 300 à 350 emplois direct à Echassières

ÉCHASSIÈRES, LA MINE DU FUTUR ?

1 Dominique Duhamet, géologue et dirigeant de la carrière de Beauvoir, l’appelle ainsi dans un article de presse de La Montagne qui date du 26 Février 2013 . « Imerys ne connaît pas la crise avec l’exploitation d’une « anomalie géologique » à Échassières »

Situé dans l’Allier bourbonnais, à la frontière avec le Puy-de-Dôme, Echassières est un village qui bénéficie d’une situation géologique particulière. Appelé par certains géologues «une anomalie»1, elle regorge à un endroit particulier d’un certain nombre de ressources minières : kaolin, étain, tantale, niobium, wolframine, feldspath ... et lithium.

Comme beaucoup d’autres histoires industrielles, la découverte de ce gisement a été fortuite. En 1825, Pierre-Antoine JOUHET, propriétaire du chateau de Beauvoir, découvre en drainant ses champs des affleurements de kaolin. Il comprend l’intérêt d’une telle ressource et développe une carrière de kaolin dans le domaine du chateau. Cette activité est florissante, et son nom reste aujourd’hui gravé dans l’histoire de la commune. A sa mort en 1870, il avait permis à la commune de se doter d’une école, d’un nouveau cimetière, d’un hospice, de nouvelles routes et avait fait agrandir l’église.

2 Le Kaolin rentre dans la composition de la céramique, mais également dans d’autres applications industrielles telles que le polissage ou la fabrication de papier.

L’activité connait son pic à la fin du XIXème siècle, le village comptait à cette époque 1200 habitants, et l’on exploitait le kaolin, mais également le wolframine. La fermeture de certains sites d’exploitation, ainsi que la mécanisation de l’activité a fait graduellement chuter la population jusqu’à avoir aujourd’hui environ 360 habitants, dont une maison de retrait de 60 lits.

Cette carrière représente aujourd’hui une petite production mais d’un kaolin de grande qualité2, avec une extraction dans les stériles des autres minéraux (Etain, niobium, tantale). Elle emploie aujourd’hui seulement 19 personnes, mais elle est promise à un grand avenir.

3 Pacte Vert européen : Il s’agit d’un plan d’action qui vise à la neutralité carbone dans l’union européenne en 2050. Le but étant d’aller vers des mobilités zéro émission, il a été validé en Mars 2023 la fin de la vente de voitures neuves à moteur thermique pour 2035.

Nous connaissons la présence de lithium dans le sous-sol de la mine depuis les années 1980, mais il y avait à l’époque une utilisation très restreinte. Aujourd’hui composant principale des batteries de voitures électriques, il s’agit d’une ressource clé pour mettre en place la politique du Pacte vert3 décidée pour l’union européenne.

La société Imerys, propriétaire de la carrière de Beauvoir a donc proposé la création d’une mine souterraine de lithium. Il s’agit d’une exploitation par extraction mécanique. Il faut ici extraire la matière pour en séparer le lithium. Le plan d’investissement pour la construction de cette mine est d’un milliard d’euro .

Vue aérienne de la carrière de kaolin d’Echassières ( Allier ) photo personnelle

Vue aérienne de la carrière de kaolin d’Echassières ( Allier ) photo personnelle

Marquages sur asphalte à l’entrée du village d’Echassières ( Allier ) photo personnelle

Il comprend la construction de l’infrastructure souterraine sous la carrière d’Echassières, et de son condition pour un transport par pipeline. Le pipeline souterrain d’une dizaine de kilomètres débouche sur une station de chargement. La matière est ensuite envoyée par la route (pour le feldspath) ou par le train (pour le lithium). L’usine de conversion se situe enfin en banlieue de Montluçon, à environ 50km. De nombreuses infrastructures ferroviaires devront être construites.

Le projet devrait créer 300 à 350 emplois sur le site d’Echassières et environ 1000 sur l’ensemble des sites du projet.

LOCALISATION DE SAINT-ELOY-LES-MINES ET PRÉSENCE DE LA HOUILLE EN FRANCE

Source BRGM

VACANCE DE LOGEMENTS DANS UN RAYON DE 10 KM AUTOUR D’ECHASSIÈRES

LALIZOLLE (03)

407 habitants

Densité 17.2 hab/km²

Logements vacants : 38 ( 14.2%)

NADES (03)

150 habitants

Densité 17.7 hab/km²

Logements vacants : 17 ( 14.6%)

COUTANSOUZE (03)

154 habitants

Densité 11.5 hab/km²

Logements vacants : 15 ( 10.2%)

MOUREUILLE (63)

385 habitants

Densité 22.9 hab/km² Logements vacants : 43 ( 17.6%)

SERVANT (63)

557 habitants

Densité 21 hab/km²

Logements vacants : 43 ( 9.6%)

LOCALISATION D’ECHASSIÈRES ET PRÉSENCE DE LITHIUM EN FRANCE

Source BRGM

DURMINGNAT (63)

213 habitants

Densité 17.2 hab/km² Logements vacants : 0 ( 0%)

SAINT-ELOY-LES-MINES (63)

3492 habitants

Densité 157.9 hab/km² Log. vacants : 521 ( 21.3%)

LAPEYROUSSE (63)

520 habitants

Densité 14.4 hab/km² Logements vacants : 66 ( 18.1%)

BUXIERE SOUS MONTAIGUT (63)

235 habitants

Densité 21.6 hab/km² Logements vacants : 9 ( 6%)

LOUROUX DE BOUBLE (03)

230 habitants

Densité 13.6 hab/km² Logements vacants : 30 (13%)

ECHASSIÈRES (03)

373 habitants

Densité 15.6 hab/km² Logements vacants : 43 ( 16.2%)

D’ÉCHASSIÈRES, À SAINT-ELOY-LES-MINES, VILLES JUMELÉES

Aujourd’hui, Échassières est sur le point d’accueillir une croissance significative pour un si petit village : 350 futurs emplois contre 360 habitants actuellement. Le village serait incapable d’intégrer seul sur sa commune les installations nécessaires à ce développement soudain.

Avec l’arrivée de cette nouvelle industrie minière, nous observons un potentiel de jumelage entre Echassières et la ville de Saint-Eloy-les-Mines a environ 8km plus à l’Ouest. Il s’agit également d’une ville dont le développement a été fortement impacté par les découvertes minières du XXe siècle et leur industrialisation. Leur apogée et leur déclin semblent avoir suivi des courbes similaires. Bien que seulement 8 km les séparent, il n’y a que peu de reconnaissance de l’influence que l’une pourrait avoir sur l’autre. Ce constat peut s’expliquer par le fait que, malgré leur proximité, ces deux villes se situent dans deux départements différents1, et donc que leurs modes de fonctionnement sont indépendants : au niveau des transports locaux, des services de gestion des déchets, peu de choses les rapprochent.

La piste dun rapprochement entre ce projet de mine et Saint-Eloy nous a été révélée en cherchant à proximité de la future mine de lithium des logements vacants. SaintÉloy-les-Mines s’est révélée être une ville parfaite pour tenter d’accueillir tout ou partie des futurs travailleurs.

Cette ville de 3 500 habitants a compté jusqu’à 7 000 habitants dans les années 70. Malgré cette décroissance, elle reste la plus grande ville des environs et joue donc un rôle de pôle « rural » avec quelques commerces et supermarchés. La ville comporte également le plus fort taux de vacance de logements des environs avec près de 21,3 % de logements vacants, dont beaucoup sont abandonnés. En analysant la ville de plus près, nous pouvons même affirmer que ces maisons inoccupées sont concentrées dans certains quartiers, notamment le quartier de l’ancienne gare au nord de la ville.

Les nombreux logements à réhabiliter de Saint-Éloy-les-Mines datent pour la plupart de la période d’exploitation minière et furent pour certains les logements offerts en nature aux salariés et donc propriétés de la mine. Avec la faillite de la mine, ces logements sont revenus à des propriétaires privés.

Comment peut-on envisager qu’une entreprise privée d’exploitation minière puisse aujourd’hui faire ruisseler le bénéfice international que va créer ce gisement de lithium sur ce territoire ? A l’image de l’industrie plus paternaliste du XIXème siècles, sommes-nous capables de trouver des formes d’investissement pour les entreprises et industries locales pour permettre aux ouvriers de vivre dans de meilleurs logements ?

Avant de développer cette question, Saint-Eloy-les-Mines a aussi un autre argument fort pour accueillir ce développement, c’est que la ville a vu sa ligne de train qui circulait depuis 1871 , fermer car les travaux de remise en état de la ligne étaient trop conséquent. Un projet de pareil ampleur pourrait permettre de réparer cette anomalie à l’heure ou l’on parle de relancer les mobilités vertes et les petites lignes. 15

1 Echassière se situe dans l’Allier, Saint-Eloy-les-Mines dans le Puy-de-Dôme.

MONTLUÇON

ST-ELOYLES-MINES

CLERMONTFERRAND LE-PUYEN-VELAY AURILLAC

LES-MINES

CLERMONTFERRAND LE-PUYEN-VELAY AURILLAC

Evolution de la carte ferroviaire en Auvergne de 1855 à 2015 à partir des informations de l’Inventaire général du patrimoine culturel

LIGNES DÉCLASSÉES

LIGNES EN FONCTIONNEMENT

Pont-rail traversant la rue Jean Jaurès de Saint-Éloy-les-Mines, un ouvrage aujourd’hui inutilisé.

ST-ELOYLES-MINES

CLERMONTFERRAND

ST-ELOYLES-MINES

CLERMONTFERRAND LE-PUYEN-VELAY

LES-MINES

CLERMONTFERRAND

ST-ELOYLES-MINES

CLERMONTFERRAND LE-PUYEN-VELAY

LIGNES DÉCLASSÉES

LIGNES EN FONCTIONNEMENT

LE-PUYEN-VELAY

Le viaduc des Fades (à gauche) et le viaduc des Colettes (à droite) sont des ouvrages d’art réalisés pour la ligne Lapeyrouse-Volvic. Aujourd’hui, un petit tourisme se développe autour des ouvrages d’art présents autour de Saint-Éloy-lesMines, notamment grâce à la création de parcours de vélo-rail.

ST-ELOYLES-MINES

CLERMONTFERRAND

EN-VELAY AURILLAC

L’AUVERGNE SUR LES RAILS

L’histoire du chemin de fer en France est étroitement liée à l’exploitation de la houille. L’inauguration de la première ligne de chemin de fer entre les mines de charbon de Saint-Étienne et les bords de la Loire à Andrézieux en est le parfait exemple. L’industrie extractive a largement soutenu le développement du chemin de fer en finançant les voies ferrées et les ouvrages d’art nécessaires au bon transport des matières premières.

ST-ELOYLES-MINES

CLERMONTFERRAND

La première ligne d’Auvergne ne déroge pas à cette règle. Il s’agissait d’un tronçon de 16 km reliant une mine de Commentry au canal du Berry. La première ligne de voyageurs a été inaugurée entre Paris et Moulins, puis rapidement étendue jusqu’à Clermont-Ferrand en 1855.

LE-PUYEN-VELAY

AURILLAC

Les lignes ferroviaires se sont ensuite développées au rythme des intérêts industriels, notamment autour des bassins miniers de Messeix, Brassac-les-Mines et Champagnac. D’autres industries ont également saisi l’opportunité offerte par ce nouvel outil : le bois, les céréales, le transport de bovins et la pierre (pierre de Volvic, basalte, pouzzolane). À cette époque, l’Auvergne se situait également sur le chemin le plus court entre Paris et le Languedoc, connu alors pour sa production massive de vin. Les opérateurs privés (PLM - Paris Lyon Méditerranée, PO - Paris Orléans, Compagnie du Midi et Lignes industrielles) ont été nationalisés avec la création de la SNCF.

Le déclin progressif de l’industrie et, par conséquent, de son transport, ainsi que l’intensification du transport routier, ont progressivement mis fin à l’exploitation de nombreuses lignes.

La gare de Saint-Eloy-les-Mines fait partie de ces victimes avec la fermeture de sa gare sur la ligne Lapeyrouse - Volvic. Malgré son abandon, la présence du rail à Saint-Éloy reste significative. La voie ferrée traverse la ville de part en part, avec notamment un pont imposant qui enjambe l’axe principal nord-sud de la ville : la Rue Jean Jaurès.( page de gauche)

LA GARE DE SAINT-ELOYLES-MINES

La ligne Lapeyrouse - Saint-Éloy, initiée à partir de 1862 par une convention entre le ministère des Travaux publics et plusieurs sociétés civiles des houillères, dont celles de La Roche, de La Vernade et la Chaux, a été rapidement reprise par la Compagnie anonyme des houillères et du Chemin de fer de Saint-Éloy. Cette compagnie a permis l’ouverture du tronçon dès 1865 pour le transport de marchandises, tandis que le transport de passagers ne débuta qu’en 1871, marquant un tournant significatif pour les infrastructures de transport régionales.

La ligne s’est progressivement étendue vers le sud, atteignant Volvic en 1908 et Saint-Gervais aux Ancizes en 1909. À son apogée, ce tronçon ferroviaire comprenait le plus haut viaduc du monde, une prouesse d’ingénierie qui soulignait l’importance stratégique et économique de la ligne. Outre le transport du charbon, elle a contribué au développement industriel et commercial des régions qu’elle traversait.

Cependant, en raison de préoccupations croissantes concernant la sécurité des infrastructures telles que les viaducs et les tunnels, la ligne a été suspendue le 8 décembre 2007. Initialement vue comme un levier essentiel de développement économique et de mobilité, la perspective de sa réouverture a perdu de son élan au fil du temps, diminuant son importance dans les discussions locales.

Aujourd’hui, certains tronçons de la ligne ont été réaménagés en vélo-rails, une activité touristique appréciée permettant aux visiteurs de découvrir les paysages locaux de manière unique. En revanche, la section de Saint-Éloy-les-Mines demeure inoccupée, bien qu’elle soit minimement entretenue pour éviter sa détérioration complète.

Les vestiges de la gare, témoins silencieux de l’histoire ferroviaire locale, ont été plusieurs fois endommagés par des glissements de terrain, compromettant leur structure. Jusqu’en 2017, ces bâtiments en ruines servaient de décors pour des scènes de gare déserte et abandonnée, ajoutant une touche pittoresque mais mélancolique à leur histoire. Leur récente démolition marque la fin d’une époque et le début d’une nouvelle phase dans la gestion des infrastructures ferroviaires régionales.

Ainsi, l’histoire de la ligne Lapeyrouse - Saint-Éloy illustre les défis et les évolutions du réseau ferroviaire français, entre son âge d’or industriel et son adaptation aux réalités contemporaines.

Vers Montluçon

Ancienne Gare de Saint-Eloy-les-Mines

Route historique de Montluçon à Clermont-Ferrand

Ancienne ligne ferroviaire de Lapeyrouse à Volvic

Vers Volvic

Bourg Historique de Saint-Eloy-les-Mines

Vers Lapeyrouse
Vers Echassières
Vers Clemont-Ferrand
500M
NORD

Carte d’Etat major 1820-1866

SAINT-ELOY, DES PUITS À L’USINE UNIQUE

Au XVIIe siècle, un village connu sous le nom de « Saint-Hilaire-de-Montaigu » découvre un filon de plomb argentifère. Cette découverte marque un tournant dans l’histoire du village, qui est alors renommé « Saint-Eloy-les-Mines », en hommage au charbon qui dominera son développement. Initialement sous l’influence de la ville de Montaigu, située dans les Combrailles, Saint-Eloy compte alors moins de 600 habitants.

L’essor de la ville est fulgurant avec l’expansion de l’extraction du charbon. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, la population atteint 7200 habitants, dont 3000 travaillant dans les mines. À cette époque, près de 700 000 tonnes de charbon sont extraites annuellement du sous-sol.

Malgré son activité principalement centrée sur le charbon, la ville se compose en réalité de plusieurs puits fonctionnant comme des entreprises indépendantes : Puits Sainte-Barbe, Puits du Manoir, Tranchée de Morny, Puits N°1, Puits N°2, Puits N°3, Puits Nord, Puits Saint-Joseph, Plis de la Billaude, et d’autres.

La croissance de la ville s’organise le long de la route départementale reliant Clermont-Ferrand à Montluçon et autour des puits, morcelant la ville en différents quartiers tels que La Vernade, Lachaux, Les Nigonnes, etc.

Carte IGN Carte 1950

À partir des années 1960, Saint-Eloy-les-Mines entame un déclin progressif, culminant avec la fermeture de la mine en 1978. À ce tournant, la ville décide de tourner la page de l’industrie du charbon, démolissant une grande partie des infrastructures liées aux mines.

C’est à ce moment-là qu’intervient l’entreprise danoise ROCKWOOL, intéressée par l’implantation à Saint-Eloy-les-Mines. La ville présente plusieurs atouts majeurs pour l’entreprise :

- Proximité de roches basaltiques permettant la fabrication de laine de roche. - Position centrale en France, facilitant la distribution sur le marché français et européen via un réseau routier efficace, bien que le réseau ferroviaire soit peu utilisé pour la logistique.

- Bassin industriel existant avec une main-d’œuvre qualifiée et une culture industrielle bien ancrée parmi les habitants, habitués à gérer les défis industriels malgré les changements de secteur, moins polluants et dangereux que l’extraction du charbon.

Aujourd’hui, Saint-Eloy-les-Mines dépend largement de ROCKWOOL, qui offre la moitié des emplois disponibles (900 sur 1900) dans la ville. Bien que la ville cherche à diversifier son économie, les grandes entreprises montrent peu d’intérêt pour ce territoire et les PME rencontrent des difficultés pour trouver des locaux, préférant souvent s’installer dans les communes voisines de Youx et Montaigut.

Avec les entreprises, les emplois se déplacent également, laissant à l’abandon de nombreux bâtiments et maison.

Carte de Cassini XVIIIème siècle
Extrait de la Vue du bassin houillier de Saint-Eloi - 1868 - source BNF Gallica
ANCIENNE GARE DE SAINT-ELOY-LES-MINES
Vers Lapeyrouse
EMPRISE ROCKWOOL
500M NORD
Carte de l’emprise de l’usine ROCKWOOL par rapport à la ville de Saint-Eloy-les-Mines

Mairie de Saint-Eloy-les-Mines

IMPRESSIONS D’ARTISAN SUR LE BÂTI EXISTANT

Sous le crayon d’un maître d’œuvre d’exécution et ancien maçon, et derrière l’objectif de nos appareils photo, nous avons répertorié des matériaux, des techniques, des modifications et des couleurs qui nous ont semblé intéressants, et que nous retranscrivons dans ce chapitre.

Ancienne maison de la direction des mines
rue Pasteur
Rue des camélias

LA DISPARITION

À Saint-Eloy-les-Mines, l’évolution urbaine récente observée à travers l’historique de Google Street View montre une tendance marquée par la démolition de nombreux bâtiments au cours des dix dernières années. Cette pratique est courante dans le cadre de projets immobiliers visant à revitaliser ou réaménager des zones urbaines. Cependant, ce qui distingue les démolitions récentes à Saint-Eloy-les-Mines, c’est que les terrains ainsi dégagés restent souvent inutilisés pendant de longues périodes.

Certains sites sont sécurisés avec des clôtures de chantier et un revêtement stabilisé pour empêcher la végétation de reprendre possession des lieux, mais ces mesures semblent plus destinées à prévenir les dépôts sauvages et autres utilisations non autorisées qu’à préparer une nouvelle construction immédiate. D’autres sites démolis sont laissés en friche, laissant la place à la croissance naturelle de la pelouse.

Le faible coût de l’immobilier à Saint-Eloy-les-Mines est un facteur déterminant dans ce phénomène. Les prix des maisons varient de 100€ à 1000€ du m², avec une moyenne autour de 600€/m² dans le quartier de l’ancienne Gare. Ces prix bas expliquent pourquoi de nombreux propriétaires choisissent de démolir des bâtiments dont le coût de rénovation dépasse souvent la valeur du bien lui-même. Le quartier de l’ancienne Gare est particulièrement touché, avec un grand nombre de maisons en mauvais état ou à l’abandon.

Une question importante qui se pose est celle de la gestion des déchets de matériaux provenant de ces démolitions. Il est important de se demander où partent ces déchets et d’évaluer s’il est possible de les réutiliser sur place pour un développement urbain durable.

SAINT-ELOY-LES-MINES

> VALTOM

63,1 KM

4300 TONNES TRANSPORTÉES VERS LE SITE VALTOM

35000 KM PARCOURU POUR CES ALLERRETOUR

SOIT 277 ALLER-RETOUR DE 63,1 KM

PARCOURU PAR DES CAMIONS CHARGÉ D’ENVIRON 15 TONNES

SOIT ENVIRON 10000 L D’ESSENCE ANNUEL POUR LE TRANSPORT DES DÉCHETS ENTRE SAINT-ELOY-LES-MINES ET

Carte et Chiffres du transport des déchets entre Saint-EloyLes-Mines et VALTOM

RIEN NE SE PERD, RIEN NE SE CRÉE TOUT S’ENFOUIT.

Le site VALTOM, situé en banlieue de Clermont-Ferrand, est un centre de traitement des déchets centralisé pour le Puy-de-Dôme et certaines zones limitrophes du département. En 2023, il a traité environ 370 000 tonnes de déchets de divers types (ordures ménagères incluses). Sur cette quantité totale, environ 76 000 tonnes, soit environ 20%, ont été enfouies. L’enfouissement des déchets consiste à les disposer dans des casiers spécifiques sur le site. Ces casiers sont successivement stratifiés créant ainsi des montagnes artificielles de déchets dans le paysage valloné du Puy-de-Dôme.

L’association METABATIK, située à proximité du site VALTOM a pour mission la valorisation des déchets de construction. Actuellement, son installation est modeste, composée de quelques containers sur une zone asphaltée. Avec seulement deux salariés à temps plein, METABATIK semble davantage axée sur la sensibilisation et l’éducation au réemploi des matériaux de construction plutôt que sur une action de grande envergure sur le territoire.

La filière de la réutilisation des déchets de construction est aujourd’hui sousdéveloppée, et mis à part la récupération de certains gravats pour stabiliser les routes, il est fort probablement que la plupart des maisons démolies (vues précédemment) sont venues directement enrichir cette montagne de déchets, avant ou après incinération.

Le plan régional de gestion des déchets, validé courant 2019, impose que plus aucun déchet ne soit enfouit à partir de 2027 dans le Puy-de-Dôme. L’entreprise VALTOM dénonce cette situation en raison de son impréparation à la valorisation des déchets enfouis. Cependant, cela nécessite de nouvelles perspectives de valorisation.

Nous devons donc porter un nouveau regard sur les matériaux-ressources à notre disposition pour réaliser les projets de demain, notamment la potentielle réhabilitation des quartiers de Saint-Eloy-les-Mines pour accueillir les nouveaux habitants.

Pour cela, il est nécessaire de rassembler les expertises, d’architectes et d’artisans afin de pouvoir indentifier les ressources directement sur site, et de pouvoir les orienter vers les filières de réemploi existantes.

Béton de plâtre Etude pour une chape post - ciment par Cigüe

Illustration issue du rapport REPAR#2 Le Réemploi, passerelle entre architecture et industrie

Bellastock + ADEME + CSTB

Le TRANS305 est un lieu d’expérimentation artistique, mis en place par l’artiste Stefan Shankland de 2008 à 2019 sur la ZAC du plateau à Ivry-sur-Seine. En accompagnant la démolition des bâtiments qui permettront la construction notamment de l’annexe du ministère des finances, Stefan Shankland récolte les matériaux issus de la démolition et propose en concertation

avec les habitants de produire des oeuvres artistiques à partir de ces matériaux. Il en résultera la production d’oeuvre qui resteront permanentes sur le site définitif, comme le «marbre d’ici»

DES YEUX POUR VOIR

LES MATÉRIAUX

L’histoire industrielle de Saint-Eloy-les-Mines résonne à travers ses bâtiments abandonnés, témoins silencieux de l’ère minière révolue. Face à ces vestiges, la question de la rénovation, de l’extension ou de la démolition se pose. Cependant, au-delà de la simple déconstruction, et au regard du nouvel élan que pourrait voir venir ce territoire, on pourrait imaginer que ces déchets deviennent les pierres de la reconstruction de cette même ville . Une ville-carrière a ciel ouvert.

Inspirés par les méthodes développées par Actlab/Bellastock ou Rotor, l’avenir passera par la récupération et la réutilisation. Le bois des poutres anciennes, les briques patinées par le temps, les pierres de carrière locales — tout ces matériaux peuvent retrouver directement une seconde vie, transformés en éléments essentiels de nouveaux projets architecturaux.

Dans le monde rural, il s’agissait d’une pratique courante : «Faire avec» mais l’industrialisation des matériaux de construction et la perte de transmission des connaissances en construction nous a fait oublier ces réflexes primaires. Il faut aujourd’hui réintroduire ces pratiques, mais les acteurs manquent. Dans un contexte comme celui de la ville de Saint-Eloy, les architectes sont souvent écartés de ces petits projets de rénovation, en raison de la taille du projet (qui ne nécessite pas l’intervention d’un architecte) et du poids financier considérable qu’il pesèrait sur les coûts de construction pourrait muter en un conseiller d’auto-réhabilitation de sa maison. Il n’y en a d’ailleurs aucun qui exerce sur cette commune.

L’apport des connaissances d’artisans locaux sur les différentes techniques qu’ils ont repéré sur le territoire serait un atout majeur au succès d’un tel projet. Il s’agirait de réinventer un territoire sur lui-même en s’adaptant aux exigences contemporaines.

Cependant des questions subsistent ... comme celle du financement de ces experts en réhabilitation et réemploi de matériaux. Il est évident que le poids de cette mission ne peut reposer sur des propriétaires dont les biens ont déjà des prix plancher. L’intervention de subventions régionales ou d’état, totale ou partielle en fonction de zones identifiées, serait une piste à privilégier. Le projet pourrait être porté par une association ou une entreprise privée via une délégation de service public.

En attendant les propriétaires et artisans débrouillards trouvent d’autres solutions...

Bar « Le Bon Coin » - Auzances (Creuse)

Source : ARN - Eric Tabuchi

Tableau de recherches personnelles de matériaux en vente autour de Saint-Eloy-les Mines sur Le Bon Coin

SOURCER LES MATÉRIAUX AUJOURD’HUI

Faute de filières réelles de valorisation de matériaux, il faut reconnaître qu’aujourd’hui, le meilleur acteur sur le marché pour sourcer des matériaux de réemploi s’appelle « Le Bon Coin ». Cette plateforme de petites annonces gratuites entre particuliers permet aux personnes possédant des matériaux de les céder, gratuitement ou contre rémunération. Une économie parallèle sans réseau de distribution, certes imparfaite, mais qui permet à de nombreux bricoleurs et artisans de faire circuler leurs matériaux de démolition ou de fin de chantier. Cette filière est d’autant plus importante dans les zones rurales où l’accès aux matériaux est parfois plus difficile et où les budgets sont également moindres.

Comment rendre « Le Bon Coin » physique pour les matériaux de construction ? Des initiatives associatives se développent, de METABATIK (comme présenté plus tôt) aux ressourceries, des projets frugaux et parfois à but d’inclusion sociale. D’autres plateformes en ligne tentent de se spécialiser dans la valorisation des matériaux de construction : on peut y retrouver REEMPLY, CYCLE UP ou BACKACIA.

Enfin, des magasins physiques commencent à voir le jour. Ils mêlent réemploi, déstockage et vente directe d’usine avec des prix compétitifs. C’est le cas d’ARTICONNEX et de MATERIAUTHEQUE SILEO, deux initiatives situées dans l’Ouest de la France. En combinant réemploi et matériaux neufs, ils apportent une valeur ajoutée et mettent sur un pied d’égalité des matériaux qui n’auraient pas été comparés autrement.

Il faut également évaluer le potentiel de récupération directement depuis l’industrie. Permettre aux industriels de réduire leurs déchets et donc leurs coûts de fonctionnement est une méthode efficace et facile à mettre en place. C’est aussi une manière de concilier industrie et habitations en démontrant qu’au-delà des taxes et des emplois, ils peuvent collaborer ensemble.

Pour revenir plus spécifiquement au site de Saint-Eloy-les-Mines, l’usine ROCKWOOL pourrait bénéficier de la valorisation de laine de roche en vrac. Ces chutes, produites par le processus de découpe des plaques, pourraient être réutilisées sans reconditionnement. Aujourd’hui, elles sont repassées au four à 1500°C pour être remélangées avec de la matière neuve, produisant à nouveau des chutes de matière. Une forme de recyclage qui demande beaucoup d’énergie pour une matière dont les propriétés étaient déjà bonnes.

D’autres entreprises locales pourraient produire des déchets intéressants, notamment une grande entreprise de revêtements de sol extérieur en caoutchouc vers Montaigut.

INTRODUCTION AU PROJET

Vue de l’actuel quartier de l’ancienne gare de Saint-Eloy-les-Mines.

Ancien Hôtel du commerce au premier plan

Usine Rockwool au second plan

Sur la butte de gauche entre l’hôtel et l’usine se situe les rails de l’ancienne ligne Lapeyrouse-Volvic aujourd’hui arrêtée.

Photographie : TABUCHI Eric - Atlas des Régions Naturelles

L’appel à réindustrialiser offre de nombreuses opportunités aux territoires concernés par ces mutations rapides. Cependant, retourner aux schémas classiques, tels que la construction à bas coût de barres d’immeubles pour loger les futurs ouvriers, ou pire encore, laisser le marché s’autoréguler en favorisant l’étalement urbain et les déplacements en voiture, ne sont plus des solutions acceptables.

Il est essentiel de se souvenir des erreurs du passé et d’imaginer de nouvelles approches dans un contexte de ressources limitées et de nécessité de rendre nos constructions plus durables. Les villes doivent être en mesure de se régénérer par elles-mêmes.

Cependant, cette régénération nécessite un soutien externe. Architectes et artisans doivent trouver une nouvelle place dans ce contexte et sur ce territoire. Pour information, la ville de Saint-Eloy est dépourvue d’architecte. Ils travaillent pour la plupart à Montluçon. De plus la rénovation de ces maisons, pour la majorité inférieures à 150m² de SDP, passent sous l’obligation d’intervention d’un architecte.

En explorant l’ancien quartier de la gare de Saint-Eloy-les-Mines, nous avons réalisé que les aides de l’État pour la rénovation énergétique des habitats, se revèlent assez inefficace sur ce territoire. Les propriétaires vendent des passoires thermiques. Ceux qui ont pu se payer cette rénovation, créent des languages architecturaux nouveaux ( disparition de la brique au profit d’enduits colorés sans modénatures,, de bardages bois ou PVC) Nous avons également pu constater de nombreuses auto-constructions / auto-rénovations. De plus, de nombreux «investisseurs immobiliers» tentent de maximiliser financièrement ces biens, en divisant des maisons en appartements, cherchant ainsi à répondre aux budgets de plus en plus restreints des ménages .

Il est également crucial que les industriels locaux soient impliqués dans cette démarche, qui aurait un impact direct dans l’amélioration du cadre de vie de ses employés. Pour un territoire dont les maisons étaient à l’époque des avantages en nature pour les salariés de la mine, il s’agirait de réintégrer une forme de responsabilisation des entreprises dans leur lien avec leur environnement direct.

Notre intervention visera à mettre en lumière les possibilités d’une nouvelle relation entre ville et industrie, favorisant une économie circulaire dans la construction, pour la renaissance de ce quartier de la gare. .

UNE GARE AU COEUR DES ENJEUX

Du rail à la route, de l’usine au quartier ouvrier, le site de la gare se présente comme un carrefour à réinventer pour devenir un nouveau pôle de centralité dans le nord de Saint-Éloy-les-Mines. Le programme de cette nouvelle gare consiste en une ressourcerie de matériaux de construction, mais le projet proposé va bien au-delà de l’architecture.

Tout d’abord, ce quartier doit être identifié comme prioritaire pour le logement des futurs habitants, en favorisant l’aide à l’acquisition de maisons en mauvais état. Chaque projet bénéficierait ainsi d’un accompagnement à toutes les étapes, non seulement pour soutenir les acquéreurs, mais aussi pour garantir la continuité architecturale des propositions. L’objectif est de préserver et renforcer l’identité architecturale de ce quartier ouvrier grâce au réemploi de matériaux déjà présents sur le territoire. La ressource principale de ces rénovations doit donc provenir du réemploi : les maisons deviennent des carrières à ciel ouvert, le rail reprend du service pour transporter outils et matériaux, et cette ressourcerie devient un lieu d’échange et de partage. L’industrie voisine ne doit pas être négligée, d’une part parce qu’elle est liée à la rénovation énergétique par la production de laine de roche, mais aussi parce qu’elle porte une responsabilité sociale (étant le premier employeur de ce territoire) et environnementale en raison de la pollution qu’elle génère. Ce quartier a été construit par l’industrie ; bien que l’implication des industriels ait diminué, nous pensons qu’il est essentiel de les réintégrer dans la vie de la commune, et donc rétablir une responsabilité sociale. Cela pourrait se faire par un financement solidaire dédié à ce projet concret, mais aussi par une contribution active au fonctionnement du lieu, par la mise à disposition d’outils et de matériaux de réemploi, et à l’animation de ce lieu.

Enfin, ce projet doit être nourri de savoir-faire et d’une recherche continue. Il est nécessaire de puiser dans les connaissances traditionnelles tout en expérimentant de nouvelles combinaisons qui sortiraient du cadre réglementaire national. Ces expérimentations pourraient générer des solutions d’auto-construction pour de nombreux quartiers en attente de régénération à bas coûts.

LA GARE AUX RESSOURCES

Dans cette volonté de créer un carrefour, cette gare aux ressources s’est imposée comme une croix. Une longue halle s’étend d’abord parallèlement aux rails, à la manière d’une ancienne gare, exploitant toute la longueur de la parcelle. Au sud, l’avenue Aristide Briand, qui relie ce quartier à l’axe commerçant de la ville, rejoint le projet, recréant un espace de type parvis. Un second axe traverse cette composition. Au nord, le projet se connecte à la voie routière pour faciliter l’acheminement par la route, permettant ainsi le dépôt de matériaux sur le quai via le rail adjacent sur toute la longueur du bâtiment.

Perpendiculaire à cette première halle, une autre structure vient se connecter. Son aile ouest est dédiée à la transformation des matériaux, avec des ateliers mobiles ouverts sur le quartier. À l’est, cette structure s’avance au-dessus des rails, permettant de décharger des wagons sur d’autres voies grâce à un palan mobile. Elle établit également un lien avec l’usine Rockwool, qui pourra approvisionner la gare en matériaux réutilisables.

Le rail reprend donc une place centrale dans le projet. L’idée est de le réutiliser grâce à des wagons-outils mobiles : certains existent déjà et sont employés par les services d’entretien des voies, tandis que d’autres pourraient être conçus pour répondre aux besoins spécifiques du projet. Des prototypes de petits trains électriques et autonomes sont également en développement et pourraient offrir de nouvelles perspectives pour cette ligne aujourd’hui désaffectée

Dans une démarche de détournement et de réemploi, la structure de la gare est conçue comme un assemblage de rayonnages métalliques identiques à ceux utilisés sur les plateformes logistiques. Ces rayonnages servent autant de structure et de façade que de charpente, habillés de bardage métallique. En somme, il s’agit d’une immense étagère, traversée par la lumière et le vent, où les matériaux en transit sont exposés.

L’espace de la Gare est couvert mais demeure ouvert. Afin de lui attribuer certaines fonctions, des modules encastrés dans la structure ont été conçus pour proposer des espaces d’accueil, des sanitaires, des vestiaires pour les travailleurs, ainsi que des ateliers de transformation de matériaux. Des aménagements permettent d’autres usages que celui de la ressourcerie, tels que des gradins rétractables, ouvrant ainsi la porte à de nouvelles perspectives d’utilisation.

Les façades évoluent au rythme des apports en matériaux. On y imagine des nappes de matériaux qui apparaissent et disparaissent, permettant de changer l’aspect et les couleurs de ces façades au fil des saisons de démolitions, pour donner une expression vivante à ses habitants. Il doit devenir un lieu d’inspiration et d’expression.

Ce nouvel espace fonctionnerait comme une ressourcerie en journée, mais pourrait se transformer en d’autres lieux les soirs et week-ends. Il deviendrait une nouvelle halle pour la vie locale : friperie, brocante, tournoi de basket 3x3, street workout, répétitions de fanfare… Un équipement offert à l’imaginaire de la population.

LA RÉSIDENCE ARTISANE

Pour faire vivre la gare aux Ressources et pour amorçer un exemple de réhabilitation et de réemploi de matériaux dans la quartier, tout en forgeant une identité commune, un programme de résidence artisane a été imaginée. Elle doit permettre de loger 6 acteurs de la construction qui pourraient venir développer un travail de recherche en réemploi de matériaux orienté vers la réalisation de prototypes échelle 1 et de chantiers participatifs. Ce lieu serait à la fois leur lieu de vie, et de restitution et de partage avec les habitants.

À partir d’une maison qui, au fil du temps, s’est transformée en trois appartements, la partie existante est destinée à la section « hébergement ». En nous appuyant sur un mur porteur central aligné au faîtage, nous avons choisi de conserver la moitié des planchers pour créer 6 chambres (2 par étage), tandis que l’autre moitié est entièrement ouverte sur trois niveaux pour former un grand séjour commun. Des coursives suspendues au-dessus de l’espace commun permettent l’accès aux chambres. L’extension, construite en symétrie, offre un grand espace à triple hauteur donnant sur la rue, permettant l’organisation de réunions avec projection. Les espaces en vis-à-vis servent d’espaces de documentation, d’archives, de bureaux et de repos.

CONSOLE EN PORTE-À-FAUX ET GARDE CORPS INTÉGRÉ

POTEAU ISOLÉ À COFFRAGE DE BRIQUES

CLOISON ISOLÉE EN OSSATURE DE PETITS BOIS

CLAUSTRA DE FAÇADE À PARTIR DE BOIS DE PALETTE

D’ACCÈS AUX MEZZANINES DE BUREAUX

DE

UTILISÉS DANS LA RÉSIDENCE

Ce projet incorpore diverses techniques de réemploi visant à proposer des alternatives aux produits industriels de la construction. Les cloisons sont conçues avec une structure interne en petits bois, recouverte ensuite de plaques de contreplaqué. La structure des poteaux est réalisée à partir de briques de réemploi en façade, qui servent de coffrage perdu pour un béton contenant des agrégats de type briques et tuiles. Ce poteau intègre en son centre une épaisseur d’isolant permettant de distinguer une partie intérieure et une partie extérieure sans pont thermique.

ECHELLE 1:100E

ECHELLE 1:100E

ECHELLE 1:100E

ECHELLE

ÉLÉVATION PROJET SUD

Cette extension s’inscrit dans le gabarit de la maison existante et propose une nouvelle approche de l’utilisation de la brique ainsi que des menuiseries de réemploi ou fabriquées sur place, en atelier, à partir de ressources locales. En se plaçant en miroir, tant en plan qu’en usage, elle inverse également la proportion structure/ouverture, adaptée aux besoins de confort thermique distincts entre bureaux et habitation. Les piliers de briques sont massifs, mais moins présents que les murs en briques. Les menuiseries, quant à elles, créent un motif complexe, rappelant des motifs décoratifs et proposant une identité unique pour le quartier. Comme un appel à reconstruire différemment ce quartier ouvrier en redonnant de la fierté à ceux qui y habitent par une esthétique singulière.

Pages précedentes:

Photographies de la présentation du PFE le 26 Juin 2024

Crédits : Pierre-Louis Mabire

BIBLIOGRAPHIE

BELLI-RIZ Pierre. Réemploi, architecture et construction. Éditions Le Moniteur. 2022 BIGOT Audrey, MARTIN Barraud. Auto construire en réemploi. Éditions Ulmer. 2021 CIGUË. Béton de plâtre, Étude pour une chape post-ciment. Pavillon de l’arsenal. 2021

EDELBLUTTE Simon. Ville-usine, ville industrielle, ville d’entreprise… Introduction à des approches croisées du fait industrialo-urbain. Revue Géographique de l’Est, vol. 58, no. 3-4, 2018. Revue Géographique de l’Est, 23 July 2020

EDELBLUTTE Simon. Espace rural et industrie : des liens anciens, forts et essentiels. Les espaces ruraux en France, Atlande, 2018, pp. 229-248

ENCORE HEUREUX. Matière Grise. Paris : Pavillon de l’Arsenal. 2014

FAVIER Lionel, AMI Centre-Bourg de Saint-Eloy-les-Mines, Conférence donnée par Lionel Favier, architecte-conseil au CAUE du Puy-de-Dôme, aux archives départementales de l’Aveyron à Rodez, diffusé sur Youtube

SIMAY Philippe. Le réemploi comme ressource première. Les Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère, no. 11, 2021, online TOULHOAT Pierre, Tirer les leçons du passé pour préparer l’avenir des activités minières, conférence dans le cadre de la Chaire «Développement Durable, Energie, Environnement et Société» Collège de France, le 10 Février 2015

Autres influences remarquables

ATLAS DES REGIONS NATURELLES - https://www.archive-arn.fr/ AUBURN UNIVERSITY RURAL STUDIO - https://ruralstudio.org/ BELLASTOCK - https://www.bellastock.com/ CIGUË - https://cigue.net/fr/projets/ ROTOR - https://www.rotordb.org/en

REMERCIEMENTS

La réflexion et la production autour de ce projet ont été un travail de longue haleine, à la fois passionnant et très enrichissant. Il n’aurait certainement pas été le même sans la contribution de nombreuses personnes que nous souhaitons remercier :

Tout d’abord, nous remercions chaleureusement notre professeur accompagnant, Vincent CHEVALIER, qui nous a guidés avec enthousiasme et dévouement tout au long de ce PFE.

Nous tenons également à exprimer notre gratitude envers nos familles et amis pour leurs encouragements constants et leur soutien sans faille.

Un grand merci également à nos camarades Vincent, Ara et Michel, dont les réflexions et les conseils avisés nous ont été d’une grande aide, ainsi qu’à nos collègues de la formation professionnelle pour leur soutien actif.

Merci à toutes les personnes, associations et entreprises sollicitées au cours de nos recherches, qui ont chacune contribué à ce résultat.

Enfin, un grand merci aux différents professeurs qui nous ont encadrés depuis le début de notre formation en architecture, ainsi qu’à toute l’équipe de l’école d’architecture de Versailles, sans qui nous n’aurions jamais eu l’opportunité de réaliser ce PFE.

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