2019 / ENSAE Paris (IP Paris) / Annuaire des Ingénieurs

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ASSOCIATION ASSOCIATION DES ANCIENS DES ANCIENS DE L’ENSAE L’ENSAE

Annuaire 2019




Site institutionnel : https://sfil.fr/ Site carrière : https://sfil.fr/candidat/

DESCRIPTION DE L’ENTREPRISE

7 banque française, SFIL accompagne les territoires et les grands exportateurs français pour leur offrir accès aux meilleures conditions de financement du marché. SFIL s’est imposée comme le 1er financeur du secteur public local en France et le 1er apporteur de liquidité sur le marché du crédit export français. La force de sa signature sur les marchés financiers la place comme le 1er émetteur obligataire du secteur public français après l’Etat. e

400 collaborateurs France dont 36 alternants SFIL est une structure à taille humaine où chaque collaborateur peut nourrir, développer et exprimer son projet professionnel.

SFIL Handi’accueillante La démarche RSE de SFIL s’inscrit dans sa raison d’être

Financer un avenir durable

► en soutenant de manière pérenne le développement des territoires et les grandes exportations françaises, ► par la mobilisation de l’épargne internationale, ► avec un objectif de rentabilité positive mais modérée, ► dans le cadre d’une prise de risque maîtrisée et d’un modèle social équilibré.


ASSOCIATION DES ANCIENS DE L’ENSAE

Annuaire 2019

ENSAE Alumni 5 avenue Le Chatelier - 91120 Palaiseau Tél. : 01 70 26 67 29 - Mél : info@ensae.org



SOMMAIRE

• Édito du directeur de L’INSEE ............................................. 5 • Édito de la Directrice du GENES .......................................... 7 • Le mot du Directeur de l’ENSAE .......................................... 9 • Édito du Président d’ENSAE Alumni................................... 11 • Qu’est-ce que L’ENSAE, aujourd’hui et hier ?...................... 13 • La vie quotidienne à L’ENSAE............................................ 17 • Carrières et partenariats .................................................. 19 • L’ASTEC........................................................................... 21 • L’étudiant ENSAE ............................................................. 23 • L’ENSAE en 1968.............................................................. 25 • L’ENSAE et la crise de 1988 .............................................. 27 • Le voyage en URSS de 1989 .............................................. 30

• Annuaire des anciens élèves - Liste alphabétique ...................................................... 33 - Liste par promotion .................................................... 67 - Liste géographique ................................................... 177 - Liste par entreprise .................................................. 195 - Liste des organismes internationaux ......................... 213 - Liste alphabétique des annonceurs............................. 223

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L’ÉDITO DU DIRECTEUR DE L’INSEE

L’

association des alumni de L’ENSAE actualise l’annuaire des anciens élèves et je m’en félicite. En effet, au-delà de la valeur des formations que cette école délivre, il convient que ses anciens élèves se retrouvent dans une communauté pour promouvoir les savoirs et compétences qui font l’originalité de cette école.

Comme directeur général de l’Insee, j’assure la tutelle de L’ENSAE en délégation du ministre de l’économie. Cette école, créée en 1946, pour former les administrateurs de l’Insee continue à le faire pour une quinzaine d’entre eux par an, mais a rapidement élargi son public avec plus d’une centaine d’ingénieurs qui exercent ensuite dans tous les secteurs de l’économie. Les élèves fonctionnaires suivent les mêmes enseignements et obtiennent le même diplôme à l’issue de leurs études. C’est à ces titres que j’encourage tous les anciens élèves à soutenir et adhérer à l’association des alumni de L’ENSAE car celle-ci intervient de multiples manières dans le fonctionnement des différents conseils de l’École. Elle s’attache en particulier à proposer des innovations dans les enseignements de manière à maintenir l’enseignement au meilleur niveau de manière à répondre aux attentes des entreprises ou des administrations et à anticiper les besoins futurs. De plus, j’incite les anciens de l’école à actualiser régulièrement les informations les concernant au bénéfice de la collectivité.

J. L. TAVERNIER Directeur général de l’Insee

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L’ÉDITO DE LA DIRECTRICE DU GENES*

J’

ai été nommée récemment directrice générale du groupe des écoles nationales d’économie et de statistique*. Je porterai un regard vigilant sur la préservation de l’excellence du positionnement des écoles et de la recherche, qui ont comme caractéristique une grande continuité entre les champs scientifiques de l’économie, de la statistique et de l’informatique, et je sais quel atout constitue pour l’établissement le réseau des anciens élèves. Je saisis donc l’occasion de la parution de l’édition 2019 de l’annuaire des diplômés de l’ENSAE pour saluer l’engagement et le dynamisme de l’association ENSAE- Alumni, et l’en remercier. Je souhaite que ce document vous soit utile.

Catherine GAUDY, 2019

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LE MOT DU DIRECTEUR

Cher(e)s Camarades,

L’

ENSAE vit un moment charnière de son développement ! Installation sur le plateau de Saclay à la rentrée 2017 et construction de l’Institut Polytechnique de Paris, dont elle est l’un des cinq membres fondateurs, aux côtés de l’X, de l’ENSTA, de Télécom Paris et de Télécom SudParis, et en lien avec HEC… Notre implication dans l’IP Paris vise à faire fructifier encore le projet historique de l’ENSAE, qui se réinvente sans cesse au croisement de l’analyse économique, de la statistique, de la finance, de l’actuariat, de la sociologie. L’ENSAE, c’est une école avec ses élèves, ses enseignants, son équipe de direction, c’est aussi bien sûr son réseau d’Alumni, et il nous tient plus que jamais à cœur de tout faire pour que ce réseau soit mobilisé au service de l’école et de chacun d’entre nous : - en aval de l’école, partager au sein du réseau nos expériences, nos analyses, et enrichir nos perspectives de carrière en faisant connaître au sein des entreprises les qualités uniques de la formation ENSAE ; -mais aussi transmettre aux élèves durant leur scolarité, en apportant le regard du praticien dans leur formation, par le biais de projets, de stages, de conférences, de séminaires, de cours. Le contact avec les Alumni donne aux élèves une chance d’apprécier la richesse de parcours toujours plus grande que leur ouvre la formation ENSAE, et de se projeter dans une variété de trajectoires ; -et en amont de l’école, témoigner, pour convaincre les meilleurs candidats de nous rejoindre : vous incarnez les métiers, les carrières auxquelles prépare l’école, et il est essentiel que de tout jeunes candidats qui ont encore souvent peu mûri leur projet de formation, puissent s’identifier à des femmes et des hommes de toutes origines, au-delà de la présentation abstraite de programmes d’enseignement. Les projets entre l’école et ses Alumni sont multiples, et stimulés par l’évolution rapide de notre environnement (IP Paris et son campus, révolution de l’intelligence artificielle à laquelle l’ENSAE doit contribuer en apportant son exigence mathématique, mais aussi son souci d’analyse et d’interprétation). Ces projets communs visent à nous mobiliser pour faire vivre notre identité et nos valeurs, à renforcer nos liens et faire en sorte que les élèves deviennent des Alumni actifs. Cet annuaire y contribue. Bonne lecture à toutes et tous !

Pierre BISCOURP Directeur de l’ENSAE

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L’ÉDITO DU PRÉSIDENT

Cher(e)s Camarades,

C

omme annoncé à l’occasion de mes vœux, après quelques années d’interruption, j’ai le plaisir de vous adresser la nouvelle édition de l’annuaire des diplômés de l’ENSAE-Paris Tech. Une véritable somme, par sa forme et son poids, mais aussi une brique symbolique de notre maison commune.

Derrière chacun de ces 7 500 adresses mail ou numéros de téléphone, il y a peut-être pour vous une opportunité d’échanges, de conseil, un lien d’amitié à renouveler ou à découvrir ! Votre annuaire est également disponible via notre site internet1 et sur l’application mobile ENSAE Alumni, que vous pouvez facilement télécharger sur iTunes et Google Play. Désormais il est encore plus simple de trouver les coordonnées que vous cherchez, d’entrer en contact avec qui vous le souhaitez. Grâce à l’application et à la géolocalisation, vous pouvez visualiser en un clic les ENSAE présents autour de vous !

Ces fonctionnalités nouvelles, qui incarnent le tournant digital pris par votre association depuis un an, contribuent à la vitalité de notre réseau, riche de ses centaines d’événements annuels et de ses nombreux bénévoles. Ce dynamisme a été salué cette année par le fait que l’ENSAE- Paris Tech a rejoint l’Institut Polytechnique de Paris, ce qui en fait un leader des écoles d’ingénieur dans le monde.

Le lien qui nous rassemble est fort, riche des valeurs d’ouverture, d’engagement et d’entreprenariat qui caractérisent les diplômés de l’ENSAE- Paris Tech. Nous continuons à le faire vivre grâce à vous et avec vous. Notre annuaire va ainsi continuer à s’enrichir, l’association des alumni accompagnera ce mouvement pour faire rayonner toujours plus la marque ENSAE- Paris Tech autour de ce qui nous rassemble.

Arthur RENAUD (ENSAE 2014) Président d’ENSAE Alumni

(1) www.ensae.org

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I

ntégrée au sein du groupe Savane qui lui donne les moyens de son ambition, Savane.data propose à ses clients son expertise dans les domaines du data management, de la BI et de la data science. La puissance des machines, les possibilités de stockage et la performance des outils de data visualisation ou de machine learning ont certes bouleversé notre métier mais la ressource la plus importante et la plus rare reste l’humain. Plus que jamais, l’expérience et la compétence sont les deux facteurs essentiels de la réussite des projets. Les challenges scientifiques et techniques des projets réalisés par Savane.data nous permettent de mettre notre savoir-faire au service de nos clients sans jamais cesser d’apprendre et de progresser. Nous travaillons sur les outils du moment comme R ou Python sans oublier de nous projeter sur les outils de demain encore à découvrir, nous accompagnons le développement des outils Microsoft et nous travaillons en étroite collaboration avec notre partenaire SAS pour moderniser les usages de la data chez nos clients. Diplômé.e.s de l’ENSAE, de par l’excellence du recrutement de l’école et de votre formation, vous êtes particulièrement bien préparés à ce contexte. N’hésitez pas à nous contacter pour échanger sur ce métier de “consultant data” en perpétuelle mutation. Olivier, SEA 1991 Olivier DUMAS - 06 15 15 33 93 Directeur et Associé 43-45 rue de Naples 75008 Paris Olivier.dumas@savane-data.fr


QU’EST-CE QUE L’ENSAE, AUJOURD’HUI ET HIER ? “Compter pour comprendre, savoir pour prévoir” (pour les analphabètes du Gaffio)

de l’ENSAE. De plus, celle-ci profite des dernières méthodes statistiques et économiques grâce à la recherche de l’INSEE, étroitement liée à l’ENSAE. En sortant de l’atmosphère ouatée et maternelle de votre chère taupe pour découvrir ce monde si nouveau pour vous qu’est une grande école scientifique (n’ayons pas peur des mots) encore comme l’ENSAE, il semble nécessaire de commencer à parfaire votre culture si lacunaire sur ce point : qu’est ce que l’ENSAE et qu’allez-vous y trouver ? Nous vous conseillons tout d’abord très vivement une lecture aussi attentive que fastidieuse des brochures administratives, certes austères mais ô combien détaillées. Mais il semble intéressant de vous livrer un portrait de l’école vue du côté des élèves. Suivez bien car c’est compliqué.

L’ENSAE ou l’originalité incarnée • Premièrement, l’ENSAE c’est 3 écoles en une : - la division S.E.A. (statisticiens-économistes et administrateur) - la division C.G.S.A. (cadres de gestion statistique et attachés) - le C.E.S.D., qui est en fait une école dans une Ecole avec sa propre structure administrative, ses fonds propres (une caisse noire ? jeu de mots intraduisible) mais dont les élèves suivent la majorité des cours de division SEA. A propos, CESD veut dire : Centre Européen de formation de statisticiens-économistes des pays en voie de Développement (ouf !) et cet organisme a été créé par la CEE dans le cadre de son programme de coopération internationale. La plupart des CESD viennent du continent africain (Maghreb, Afrique noire subsaharienne, Madagascar…) et leurs cultures différentes enrichissent considérablement le tissu humain de l’Ecole en lui donnant une ouverture internationale. • Deuxièmement, l’ENSAE comporte dans les deux divisions deux catégories d’élèves :

1991

- les titulaires (statisticiens-économistes en SEA et attachés) qui se sont engagés à travailler, à la sortie de l’école, dans l’administration et plus particulièrement à l’INSEE mais qui, en contrepartie, sont payés pendant leur scolarité.

L’ENSAE est une école particulière à mi-chemin entre l’école de gestion, l’école d’ingénieurs, et l’école de la fonction publique.

• Troisièmement, les recrutements sont extrêmement variés : dans chaque division, les élèves sont recrutés selon plusieurs concours différents :

PRÉSENTATION DE L’ENSAE L’ENSAE, l’École de l’INSEE

L’ENSAE est l’école d’application de l’INSEE. L’INSEE est un outil indispensable pour une bonne appréhension de la conjoncture. Reconnu internationalement pour son professionnalisme, l’INSEE est un gage de qualité et de sérieux pour les diplômes

- le concours option mathématiques - le concours option économie - le concours interne et le concours option statistique pour la division CGSA. Le recrutement de l’école est donc très diversifié, ce qui assure une large ouverture sur les différents domaines de l’enseignement supérieur français et contribue à son originalité.

LE SERVICE NATIONAL Tu souhaites faire ton service à Colmar comme commando de l’air ? Dans un régiment disciplinaire qui plus est ? Alors, ne viens pas à l’ENSAE. En effet, les ENSAE n’ont pas de problème pour leur service : - l’armée de l’air et de la marine leur proposent de devenir officier directement (sans PMS… privilège rare..) - 11 des 12 ENSAE ayant demandé scientifiques du contingent ont été acceptés (mieux que Centrale…) - tu recevras un certain nombre d’offres de VSNE* (à titre d’exemple, la Société Générale a deux VSNE pour des ENSAE cette année…) et pour la coopération. Viens donc tranquille …Tu recevras plus d’informations au cours de l’année. Nouveau site de Saclay ENSAE Alumni Annuaire 2019

*VSNE : Volontaire Service National en Entreprise. 13


QU’EST-CE QUE L’ENSAE, AUJOURD’HUI ET HIER ? LE SAVIEZ-VOUS ?

1992-1993

TOPOGRAPHIE Il y a un jardin à l’ENSAE… Vous passez tous les jours à côté, il fait l’angle de la rue Pierre Larrousse et du boulevard Adolphe Pinard. Dans ce jardin, il y a un amphi de plein air… Produit de la révolution culturelle ? Idée d’un architecte humaniste ? Il y a un labo photos pour les élèves de l’ENSAE… Au niveau -1 (le nôtre), à côté de la JE. Pour accéder aux parkings, vous aurez plus vite fait de passer derrière la JE. Il y a des terrasses à l’ENSAE… C’est au troisième étage. Les bâtiments de la-fac-d’en-face abritaient antérieurement Supélec… C’est écrit dessus… Si vous avez des angoisses pour votre avenir professionnel ; n’hésitez pas à utiliser les cassettes d’information sur les métiers… C’est au deuxième étage de l’aquarium, et c’est tout à fait adapté et mis à jour… Les salles d’entrepôt de la bibli de l’Insee se trouvent sous la Kfet… Pourquoi croyez-vous donc que bon nombre de documents ont été imbibés d’eau ?

L’IBM 9370, l’ordinateur central de l’école, a été installé en 1989… Il sera remplacé à la rentrée par des stations Sun. Le point d’Ab’ a été fondé en 1985. Son prédécesseur s’appelait le Corrélateur, 25 ans d’existence... Le debatting X-ENSAE a été lancé en 1991… L’an prochain, il devrait s’ouvrir à l’ENA et à Sciences PO… L’ASTEC et l’ASCAS attribuaient jusqu’en 1989 deux prix du meilleur GT. Le prix Eugène MORICE et le prix René CARMILLE (1 pour chaque division). L’idée a été relancée par l’ASTEC qui dès cette année distribuera un prix de 4000F au meilleur groupe de travail. L’option Eco a été ouverte aux KS en 1984… Elle a été élargie aux HEC en 1992. Le système de bonification des stages a été introduit en 1986… Chouette alors ! La séparation des écoles ne date pas d’hier… On en parle depuis 1987, dans une interview de M. MAIRESSE au Corrélateur. La mastère Finance-Actuariat a été créé en 1987… depuis, il s’en est créé un second, le Mastère Informatique-Statistique. Le GENEPI, mouvement étudiant caritatif de visite aux détenus, a fonctionné à l’école jusqu’en 1991… Les jeunes générations ont sans doute des intérêts moins altruistes. Le BDE distribue “Le Monde” à ses adhérents depuis 1987… A l’origine, il s’agissait de lutter contre le monopole du Figaro (et contre l’analphabétisme, dixit Lionel). La soirée Cabaret a lieu à la salle des fêtes de Malakoff depuis 1987… Elle existe depuis au moins 1986, et sans doute bien avant. La devise de l’école, “Compter pour prévoir, savoir pour comprendre” vient du titre d’une conférence donnée par Pierre Bourdieu à l’école en 1987 sur le contenu des enseignements… Cette conférence a été organisée à l’initiative du Corrélateur. En 1984, une section de boxe française fut ouverte à l’école… A l’ENSAE, il est indispensable de savoir jouer des pieds et des mains pour réussir les examens. Le Ski-Club a été crée en 1985… Le premier séjour eut lieu en Autriche (et c’est depuis cette époque que le trou de la Sécu a commencé à se creuser dangereusement…).

HISTOIRE En 1985, un Ciné-Club a été fondé à l’école et diffusait des films tous les 15 jours (un Mercredi sur Deux)… A votre avis, à quoi servent la salle de projection et l’écran de l’Amphi !? Il a cessé de fonctionner en 1988. La JE a été fondé en 1979… Elle s’appelait alors EPSI, avant de changer de nom en 1989. Jusqu’à une certaine époque, les élèves de l’ENSAE organisaient un gala… C’était la fameuse Nuit Tropicale, à la mairie du XIVème. La première eut lieu en 1986, et la dernière vraisemblablement en 1990. Avant que vous vous battiez pour obtenir un micro en salle F, il y avait un club micro-informatique à l’ENSAE… Il disposait d’un apple II, d’un olivetti à 128 K de RAM, d’un PC Commodore avec système à disquette… Pour réduire le prix des soirées et s’épargner la location d’une sono, un BDE eut l’idée géniale de bricoler son propre matériel (spots, platine, table de mixage…). A l’époque, on ne parlait pas de soirée mais de “boums” ENSAE... En 1989, l’ENSAE a organisé un voyage d’études en URSS... Un exemplaire du (long !) rapport, qu’ils rédigèrent ensuite, est disponible au BDE 14

Il semblerait que l’ENSAE ait déjà participé à la course de l’EDHEC… C’était en 1984. Vous vous souvenez sans doute de cette célèbre formule des Spécial-Alpha 91 et 92 et devant laquelle s’extasia la rédaction de Génération dans un numéro comparatif consacré aux numéros spécial admissibles ? Elle parlait de “la vie de légumes ravi des intégrés”... Elle date du spécial-alpha 88… La première soirée Péniche eut lieu en 1990, le jeudi 3 mai… Depuis, l’ENSAE et Boer II ne font plus qu’un. En décembre 1990, le déficit de la Kfet était de 20 000 F… Depuis, les bénéfices sont tenus Top Secret. Stat’dev a été créée en 1988… Cette assoce a été remplacée en 1993 par Ingénieurs Sans Frontières. Le Club Jeux de Rôles a été fondé en 1990… Ils n’ont toujours pas fini leur première partie ! La section Squash a été ouverte en 1986… L’ENSAE organisait chaque année un rallye depuis 1983… Enfin pour finir, une news émouvante : le premier week-end d’intégration a été organisé en 1985… ENSAE Alumni Annuaire 2019


QU’EST-CE QUE L’ENSAE, AUJOURD’HUI ET HIER ? LES JOURNAUX DE L’ENSAE L’histoire de l’école est rythmée par la parution des ses publications internes. Plus ou moins régulière selon les années, on observe cependant que cette régularité tend à s’accroître au fur et à mesure des améliorations techniques apportées aux outils de traitements de texte : machine à écrire, stenciels, TTX sou PC, puis TTX sous Mac et enfin PAO. Mais c’est surtout l’augmentation sans précédent de la production qui reste le fait marquant pour atteindre cette année un record historique : 9 numéros, sans compter les Petits Points et le Spécial-Alpha !

industrie ou le conseil. Niveau économies, l’ENSAE est classée dans le premier groupe pour les salaires d’embauche (entre 2ème et 4ème selon les années). Maintenant que tu sais ton avenir assuré si tu passes par l’ENSAE, profite de tes trois ans : bien sûr, SAS n’aura plus de secrets pour toi, ni la théorie de la mesure ou la macroéconomie de l’ajustement dans les économies en développement (selon que tu te sens plutôt statisticien, financier, micro, ou macroéconomiste au moment de choisir tes majeures en troisième année). Mais tu apprendras aussi tous les secrets de la tirée et des bandes lors de problèmes d’optimisation concrets (exem-

LE CORRÉLATEUR Son nom demeure lié à l’ENSAE pour des générations … d’anciens. Car le Corrélateur a effectivement cessé de paraître en 1988. Le dernier exemplaire disponible est le Spécial-alpha 88 : l’année suivante le Spécial-alpha paraissait sous les armoiries déjà glorieuse du Point Aberrant. Il semblerait que l’existence du Corrélateur remonte à plus de 25 ans, à moins qu’il ne s’agisse d’une blague d’un rédacteur… pour notre part en tout cas, le plus vieil exemplaire dont nous disposons date de 1985… Toujours est-il que le corrélateur était un journal bien organisé, avec une rédaction solide, comme en témoigne les notes de travail des rédacteurs de l’époque. Le ton du journal se voulait d’ailleurs en général des plus sérieux. Les articles tournaient souvent autour des enseignements de l’ENSAE, mais le journal demeurait ouvert à tout autre type de publications : articles humoristiques, essais, nouvelles, poésies, pub des sports et des clubs, vie pratique et surtout une rubrique jeux très régulière qui proposait de nombreuses énigmes à ses lecteurs. LE POINT ABERRANT Difficile d’identifier le premier numéro, vous vous en doutez bien compte tenu du nom de ce journal qui inaugure son histoire à la rentrée 1988 par un numéro 6… faisant d’ailleurs référence à un Numéro 5 ! Mais l’édito est très clair : “(…)nous créons un journal des élèves de l’ENSAE. Attention, rassurons déjà les anciens, le Corrélateur continue à paraître. Nous faisons autre chose, mais lisez plutôt ce numéro.” (Point Aberrant numéro 6, rentrée 1958). Vous l’aurez compris, Le Point Aberrant est né comme concurrent du Corrélateur, sans doute jugé trop “institutionnel” par les joyeux drilles de la rédaction. Ce Numéro 6 aborde en effet des sujets particulièrement graves : “Les origines de la bête à cornes des origines”, “le Club des Supers Héros”, en passant par l’épluchage de la crevette grise et la recette des nouilles au beurre… De cette situation, on pourrait établir un parallèle facile avec le Ruminant : publié sur une demi-page A4, comptant en tout et pour tout une quinzaine de page et une seule agrafe, le Point Aberrant pouvait se poser comme feuille de chou complémentaire à l’ancêtre institutionnel. Mais le parallèle s’arrête là… Sa parution connut sans doute un vif succès – à moins que le Corrélateur ne se soit doucement éteint par manque de rédacteurs – puisqu’à la fin de l’année il prenait en charge la publication de Spécial-Alpha, d’ailleurs largement pompée des versions précédentes du Corrélateur alpha, mais c’est une tradition…

SPÉCIAL ∝

ÉDITO

ple : comment maximiser l’utilité de mon gosier sous la contrainte de mon compte K-Fet ? – Réponse : Fanyuabar, cf : Petit Lexique Utile …) (“Fred, il est à combien ton compte K-Fet ?!”.) Tu bénéficieras aussi de ce qui fait l’originalité et la force de l’ENSAE, ce qui fait la vie y est “à la fraîche”, malgré les maths (pour les éco) et l’éco (pour les matheux) : son éclectisme. Un esprit à part, différent des autres écoles (requins de la finance vs économistes du développement ; khageux vs taupins, rugboeufs vs reste du monde…). Franchement, trouveras-tu une école qui te permettras d’aller assister en voisin et pour quasiment rien aux représentations théâtrales, opéras, et concerts donnés à Paris, de briller dans les cocktails mondains avec ton mayot yaune (les maillots de l’ENSAE sont jaune et bleu), de danser torse nu en soirée au milieu du XV au son d’un orchestre de salsa, de mettre l’ambiance dans les cars des autres écoles lors départs pour les tournois sportifs (demandez à Centrale…)… Il ne te reste plus désormais qu’à lire ce Spécial Alpha 1998 de l’école dont tu rêves, et à attendre tranquillement la venue de Melle Sullivan Rosen dont tu connaîtras bientôt la patience en oral d’anglais…

PRÉSENTATION

Cher Tu as récemment appris an tapotant fiévreusement sur ton minitel que tu étais proche de l’accomplissement de ton rêve de toujours. Chez toi, assis devant la salle R4 ou battant le pavé devant la salle 17, tu peines encore à réaliser ce qui t’arrive : tu vas peut-être devenir statisticien-économiste. D’accord, présenté comme ça, c’est pas forcément alléchant. Pourtant, l’ENSAE peut réaliser tous tes rêves (ou presque). Les sondages d’opinion auprès des entreprises sont plus que flatteurs pour l’école (comment ça ‘Normal, c’est nous qu’on les fait” ?). Les statistiques en sortie d’école montrent des cursus très divers, de l’incontournable finance à la plus attrayante recherche (c’est un point de vue personnel), en passant par la haute fonction publique, l’informatique, la grande ENSAE Alumni Annuaire 2019

L’équipe spécial alpha 1998

L’équipe spécial alpha 1999 15


QU’EST-CE QUE L’ENSAE, AUJOURD’HUI ET HIER ? LE GADGET 98

1998

Cette année, nous innovons : ce spécial alpha est un fait spécial alpha gadget. Le gadget de cette année est unique en son genre ! Il s’agit, au cas où tu ne l’aurais pas remarqué, d’une balle de BAB. D’autres écoles te fourniront dans doute des CD-ROM, ou bien un T-shirt (merci les mines de Sainté pour votre T-shirt à 1400 balles !). Nous, nous sommes pragmatiques ! Cette balle est en effet indispensable pour ta survie dans la jungle Malakoffiotte ! En effet, elle te servira de porte-bonheur en oral d’anglais, et elle te permettra en la dissimulant dans ta manche droite pendant les quelques premiers mois de ta scolarité de faire comme si tu étais capable de pêcher (cf lexique) et d’éviter ainsi la Fanny. Ensuite, tu pourras la faire monter en porte-clefs, ou encore l’accrocher au rétroviseur intérieur de ta voiture histoire de frimer un peu.

LES DÉCIDEURS

1996

De l’ENSAE sont issus des dizaines de décideurs du monde économique, ou politique ; nous pouvons citer : - Edmond Malinvaud, prix nobel professeur au collège de France - Paul Champsaur, directeur général de l’INSEE - Jean-Claude Milleron, secrétaire général et adjoint des Nations-Unis - Gilles Oudiz, directeur général de la banque Pallas Stern - Olivier Legrand, vice-président de la banque Cortal - Shemaya Lévy, président-directeur général de Renault Véhicules Industriels - Michèle Debonneuil, directeur des études économiques de la Banque Indosuez - Xavier Debonneuil, directeur de la salle des marchés de la Société Générale - Patrick Artus, directeur des études économiques de la Caisse des Dépôts et Consignations - Jacqueline Aglietta, président-directeur général de Médiamétrie - Alain Closier, président-directeur général de la banque FIMAT - Jean Bergougnoux, ex-président de la SNCF - Thierry Chassaing, vice-président du Boston Consulting Group - Didier Neglar, directeur associé de MacKinsey - Bernard Brunhes, fondateur et président du groupe Bernard Brunhes (l’un des premiers groupes de conseil) - Patrice Mantz, directeur financier de GEC-Alsthom - Denis Cochet, secrétaire général de GEC-Alsthom - Bernard Mignucci, directeur de la filiale japonaise du Crédit Lyonnais - Thierry Granjon, directeur commercial de HONDA France - Jean-Claude Demerson, directeur général d’Abeille Assurance - Pierre Leroux, directeur financier d’Alcatel - Philippe Moussier, directeur du marketing Europe de Renault - Claude Darmon, président-directeur général de GEC-Alsthom transports - Bruno Durieux, ex-ministre de la Santé.

PETIT ENSAE DEVIENDRA CÉLÈBRE

1998

De l’ENSAE sont issus des dizaines de décideurs du monde économique ou politique. Malgré la jeunesse de l’école, qui n’a qu’à peine plus de cinquante ans, une “mafia” d’ENSAE est constituée dans certaines entreprises et l’esprit de corps des ENSAE se crée progressivement. Il a déjà atteint un certain stade grâce à l’association des anciens élèves (Astec) qui se préoccupe de tenir vivace les liens entre des personnes aux destins souvent très variés, du fait de l’ouverture de l’école. Parmi les anciens,

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on trouve en effet des parcours très différents. Entre autres anciens, bien évidemment, E.Malinvaud, professeur au Collège de France, mais aussi CH.Sautter (ENSAE 1965), l’actuel secrétaire d’État au Budget, ancien président du BDE et de l’Astec. Il n’est d’ailleurs pas seul, B.Durieux, ancien Ministre de la Santé est aussi ENSAE… Les administrateurs de l’Insee occupent “naturellement” les postes de décision importants au sein du ministère de l’Économie et des Finances, de la Direction de la prévision, et d’autres administrations. P.Champsaur, le Directeur Général de l’Insee est un ancien, de même que J.C Milleron, tout récent ancien secrétaire général des Nations Unies (le numéro 2 de l’ONU en quelque sorte). Si tes héros occupent plutôt des postes de responsabilités dans les entreprises, sachez que J.Bergougnoux, ex-PDG de la SNCF, Shemaya Lévy PDG de RVI, sont aussi ENSAE, de même que le PDG de la Poste et qu’une bonne partie de la Direction d’Alsthom (le directeur financier, le secrétaire général, le PDG de GEC-Alsthom Transport…). Si tu es plutôt financier ou banquier, hormis les directions des grandes banques, on trouve un ENSAE à la tête du directoire de la Banque Cortal (O.Legrand). B.Brunhes est le président-fondateur du groupe Bernard Brunhes (l’un des premiers groupe de conseil), X.Dubonneuil est directeur de la salle des marchés de la Société Générale, J.CI.Demerson est directeur général d’Abeilles Assurances, etc. Les ENSAE sont aussi très demandés à l’étranger, ainsi Th.Chassaing est vice-président du Boston Consulting Group. La dernière porte de sortie de l’ENSAE, si l’on excepte les stats (J.Aglietta est la PDG de Médiamétrie), est la recherche. L’arbre Malinvaud cache une forêt : P.Artus (directeur des études économiques à la Caisse des Dépôts et consignations), M.Aglietta (économiste), A.blum (démographe), CI.Thélot (sociologue)…

Another brick in the wall

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LA VIE QUOTIDIENNE À L’ENSAE QUELQUES RENSEIGNEMENTS PRATIQUES 1985 Pour se rendre à l’école Vous avez surement déjà trouvé un moyen d’y arriver ; mais peut-être ignorez-vous les multiples autres possibilités ? En métro : ligne 13 (Châtillon, Asnières-Gennevilliers), station Porte de Vanves ou Plateau de Vanves-Malakoff En bus :

PC (petite ceinture), arrêt Porte de Vanves Ligne 48, arrêt Porte de Vanves Ligne 58, arrêt Pont de la Vallée

En train : Montparnasse-Versailles, arrêt Ouest-Ceinture En voiture :périphérique, sortie Porte Brancion.

RUGBY MASCULIN

1996

Rugbyman : nom très masculin (n.t.m.) du vieux languedocien rugboeuf signifiant charrue. Chaînon manquant de l’évolution se reconnaissant au braillement qui l’accompagne, à son poids souvent au-dessus de la moyenne, à sa nourriture exclusivement constituée de bière, et à sa fourrure jaune et bleue. Encyl. Issue d’un erreur de manipulation génétique, c’est une espèce en voie de fermentation (surtout pendant les troisièmes mi-temps). Le rugbyman subit une transhumance hebdomadaire l’amenant des vertes prairies de Bagatelle, à l’étable dorée de la Kfêt de l’ENSAE, où un irrésistible instinct le pousse à se déshabiller. L’hiver, il migre en Angleterre, où toute l’espèce se réunit sans pour autant parvenir à se reproduire. Son seul moteur psychologique est le “fighting spirit”. on a récemment découvert des spécimens féminins de cette espèce, pratiquant les mêmes rites dans une version à VII au lieu de XV. Sa devise – In Kro veritas

Le logement C’est le gros problème de tous les ENSAE qui arrivent ! L’école ne dispose pas de maison des élèves, ni de facilités particulières. Chacun doit donc se débrouiller du mieux qu’il peut mais depuis cette année, un service logement a été mis en place par deux élèves de l’école pour faire la liaison entre les élèves qui abandonnent leur logement et ceux qui en cherchent un. On souhaite beaucoup de réussite à cette heureuse initiative. Voici tout de même quelques adresses pour vous aider dans cette difficile épreuve : • Cité Internationale Universitaire de Paris, 19 Boulevard Jourdan 75014 Paris. Chaque année plusieurs élèves de l’école y logent. • CROUS, 139 avenue Georges Bernanos 75213 Paris – Tél : 326.07.49 • CIDJ , 101 Quay Branly 75740 Paris cedex 15 – Tél : 566 40 20 • UPEL (Union Parisienne des Etudiants Locataires)

LE BAB

1996

Il y a dans ta future superbe géniale école de tes rêves une bande de jeune complètement tarée qui passent leur temps autour d’une table verte avec des mouvements convulsifs : j’ai nommé les adorateurs de BAB. OH BAB, TU ES GRAND, BEAU, FORT ET INTELLIGENT

AVANT Le principe est débile : y’a une baballe qui n’arrête pas de faire le tour d’un terrain nain, qui court, qui saute partout et qui rigole quand tu loupes la super injection (rite barbare super fêtatoire) qui aurait dû gameller sans que l’abruti en face ait le temps de dire : “Et si je remettais une piessdedeux avant que ça soit repris, car je nous vois mal pêcher et comme ça ratisse à donf, il va y avoir demi sans compter les reprises et les pissettes… NEEEEEEEXT. Sinon, il suffit de tourner des poignées. A priori, c’est nul mais quand vous aurez vu un ensaeien moyen, sourire débile et air heureux, errer dans la K-Fêt misérablement en gémissant « Vouzauriépasunepetitepièssdedeux », vous comprendrez.

APRÈS Alors, ça c’était la phrase rituelle qui permet de communier pleinement avec BAB et qui faut t’apprennes pendant les vacances sinon tu vas être largué dés le début et puis après y’aura Fannyàboire et c’est pas bon pour ton compte K-Fêt sauf que c’est pas vrai parce que tout est gratuit le premier mois pour que tu essaies d’apprendre à jouer. Tout ça parce que nous on t’aime déjà et qu’on veut que tu aimes le BAB (et puis nous un peu aussi). ALORS, TU REPRENDS ?

LE CORRÉLATEUR CLUB THÉÂTRE

1988

Acte premier La lumière est absente et notre soif est loin d’être éteinte. Une musique lente mais captivante, un peu contenue, comme si en l’ombre d’un instant tout pouvait s’accélérer et remémorer l’agitation passée. Une musique lente nous charme, nous met en confiance comme une sirène. Une musique lente nous appelle… et le public est là. Les projecteurs en marche, on ne le voit pas. L’atmosphère est tendue, il est attentif. On ne l’entend pas… mais il est là. Nous ne le connaissons pas mais lui commence déjà à nous scruter, à nous cueillir. Certes il n’épie pas nos craintes, nos peurs, mais cherche plutôt à s’enrichir les yeux du plus petit de nos gestes. Il va nous prendre ! C’est certain, et comme asservis nous lui donnons déjà ! Et puis et puis, et puis unis par un même désir complice les deux acteurs, comédiens et public s’animeront interprétant leur rôle respectif, l’un écrit et l’autre non. Et comme si nous n’avions encore rien reçu, les spectateurs applaudiront. Mais écoutez et voyez plutôt car rien n’a encore débuté puisque le rideau se lève à l’instant. “Hommes et femmes de théâtre, bonsoir. Je suis récitant. Voici conté brièvement le club théâtre de l’ENSAE” “Tristes, blasés seront amoureux, exaltés Lorsqu’ils sauront l’histoire de vingt êtres rêvant D’espace et nourris de murmures chuchotés Par l’auditoire uni dans un soufflet haletant. Nous allons souffler notre deuxième bougie Mais n’éteindrons pas celle qui nous anime Peut-être un peu vacillante me direz-vous ? Si ! Et cette flamme activera vos rimes ? Un fol animateur tel un tyran nous veille, Jouer “Peines d’amour perdues” de Shakespeare, Est une approche du théâtre sans pareille. Les grandes joies nous font imaginer le pire, Et pour que nous ne nous en allions pas en vain, Vole, accoures et prends la bougie entre tes mains.”

Pour les fous du BAB Bertrand ENSAE Alumni Annuaire 2019

Henri-J Lavergne, Jacques Mural 17


LA VIE QUOTIDIENNE À L’ENSAE SAS : L’INCONTOURNABLE

1991

Seul un SASeur sachant SASer sans sa pieuvre Est un bon SASeur… Extrait du fameux livre sacré : SAS LISTING A D’après Roberta Bleussasse Evidemment, tu ne connais pas encore LE progiciel, celui qui tourne 24h sur 24h au centre du calcul de l’ENSAE que tu peux même (ô joie sans mélange ô sublime artificiel) atteindre par l’intermédiaire du Minitel et qui hantera, telle la statue du Commandeur, durant les trois ans que tu passeras ici. Non, un SASeur n’est pas une sorte d’explorateur de l’espace et sa pieuvre l’animal tentaculaire au flair surdéveloppé qui lui permet de traquer sa proie … C’est l’utilisateur d’un très répandu progiciel (un peu comme un logiciel de pro). Si tu n’aimes pas l’info ? Hé bien, tu te contenteras de consulter régulièrement les trois pieuvres (manuels d’instruction qui nous sont fournis et dont le dessin de couverture justifie l’existence de ces petits animaux qui parcourent ces pages en y crachant des nuages d’encre qui forment des points aberrants) qui sont suffisants pour concaténer, presser, déployer, tordre …bref : exploiter de A à Z les bases que te fournira l’administration de l’école. Si au contraire tu es un passionné d’info, saches que SAS (Statistical Ananlysis System pour les intimes) est écrit en Turbo C (soit un des langages compilés les

plus proches du système) et dispose de “vecteurs” (équivalents des pointeurs Turbo Pascalesques) et autres instruments étranges et merveilleux qui lui permettent de prétendre au titre tant convoité de progiciel (un mélange savamment dosé entre le langage de PROgrammation de loGICIEL). Dans les deux cas, il faut que tu saches qu’ici, notre vie bat au rythme des pulsations de l’IBM du centre de calcul et des équations SAS. Ton cœur balancera sans doute entre les PROCCORRESP, les %CAHEUCL, et autres outils de notre cher progiciel. D’une façon ou d’une autre, tu deviendras toi aussi un(e) SASeur(euse), comme nous les appelons ici, et même si c’est seulement la veille de la date de rendu des mémoires, tu tenteras d’extirper de ces tableaux cryptés une pseudointerprétation qui, si elle te contentera souvent, ne sera pas toujours du goût des tes professeurs. EARN, c’est le réseau international de communication des ordinateurs des grandes écoles et université. Grâce à EARN, tu pourras envoyer un message à un (e) ami (e) à Ulm ou à Supélec par exemple. Tu pourras même te mettre en rapport aves des universitaires américains. Alors rejoins le club des utilisateurs fous de EARN : Xearn Club, mon adresse : SEA 31012 at Ensae 11.bitnet Serais-tu aussi un Babasseur fou passant tes nuits dans le centre du calcul ? Malheureusement pour toi, le centre est fermé la nuit… Tu peux cependant te brancher sur l’ordinateur central la nuit par modem… génial…

LE POINT-HEURE, OU L’INFORMATIQUE AMUSANTE A l’heure ou l’ENSAE investit dans les messageries de tous types, il convient de donner aux utilisateurs un aperçu des pratiques amusantes en vigueur dans les courriers électroniques américains. Ceux-ci utilisent dans leurs messages des petits signes de reconnaissance qui permettent de souligner le côté sarcastique d’une réflexion : les smilies. En voici une liste non-exhaustive qui vous permettra d’égayer vos messages. Un détail tout de même, les smilies se lisent le plus souvent en penchant la tête à gauche.

Les sourires de base :⋅) :−) :−( :⋅I

:−> > :−> > ;−> (@ @)

Le sourire de base. Il est utilisé pour accentuer une plaisanterie. Sourire clin d’œil. A utiliser en cas de remarque sarcastique ou pour flirter. Sourire orageux. L’utilisateur n’a pas aimé la dernière remarque. Sourire indifférent. Mieux qu’un sourire orageux, mais pas aussi réjoui qu’un vrai sourire. Sourire moqueur, plus mauvais que :⋅) Sourire démoniaque Sourire démoniaque et clin d’œil. Ponctue une remarque obscène ou lubrique. Tu plaisantes !?! Yeux exhorbités (Format horizontal).

Les sourires moins communs (- : J :-” :*) 18

L’utilisateur est : est gaucher fait la moue est ivre

[ :] 8-) B :-) B-) 8 :-) :-)-8 :-{) :-{} { :-) :-{ :-[ :-E :-F =I :-)= 7 :-) %•) :-* :-~) :’-( :’-) ‘-) :-@ :-<) :-() :-<)= :-& - :-)

est un robot porte des lunettes de soleil porte des lunettes de soleil sur le front porte des lunettes de soleil à grosse monture est une petite fille (nœud dans les cheveux) est une grande fille porte la moustache met du rouge à lèvres porte une perruque est le conte dracula est un vampire est un vampire aux jolies dents est un vampire aux jolies dents avec une dent en moins est l’oncle Sam est Reagan a eu les yeux fixés sur un écran pendant 15 heures vient de manger quelque chose de pas très frais est enrhumé pleure pleure de joie cligne de l’œil crie vient d’Ivy League School (Université BCBG US) a des lèvres charnues porte la barbe est muet est un punk

1993 - :-( O :-) :-w :-W :-S :-D :-X :-c :-C <|-) <|-(

(les vrais punks ne sourient jamais) est un ange parle avec une langue fourchue crie avec une langue fourchue est innocent parle en souriant dit un secret est incrédule est vraiment déçu est chinois est chinois mais n’aime pas ce genre de plaisanterie :-/ est sceptique C= :-) est un chef cuisinier *< :-) est le père noël (ou porte un chapeau) E-:-) est radio amateur P-) est un pirate :-9 se lèche les babines ( :J a un crâne d’œuf < :-I est un cancre @ :-) porte un turban O-) fait de la plongée :-x embrasse :_) a le nez qui glisse .-) est borgne ,-) idem mais avec un clin d’œil C = )> ;*{)) est un chef cuisinier démoniaque avec une perruque, une moustache et un double menton !!!

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CARRIÈRES ET PARTENARIATS SALAIRES ET CARRIÈRES DES ÉLÈVES DE L’ENSAE 1985 DIVISION SEA CARRIÈRES L’ASTEC (Association des anciens élèves de l’ENSAE) a mené de janvier à mai une enquête destinée à déterminer les carrières et l’évolution professionnelle de ses membres. Les résultats qui suivent ont été obtenus fin Juin. Un rapport complet sera édité pendant l’été. 49% des anciens élèves ont été admis à l’ENSAE sur titres, 39% par le concours Maths, 8% par le concours Eco et 4% par le concours interne. Il faut savoir que l’école a changé de statut en 1961 : jusqu’à cette date, elle ne recrutait que des fonctionnaires, généralement anciens élèves de Polytechnique. Environ 40% des élèves ont obtenu un autre diplôme pendant ou après leurs études à l’ENSAE. En particulier, un élève sur cinq a obtenu un DEA. 9 anciens élèves sur 10 travaillent en France. La région parisienne accueille 76,8 % d’entre eux (46,1 % pour Paris, 21,1 % pour la petite couronne et 9,6 % pour la grande couronne). Dans les autres régions, la proportion ne dépasse pas 1,1 %. A l’étranger, les ENSAE travaillent principalement aux USA, en Tunisie et en Côte d’Ivoire. Les ENSAE travaillent principalement dans les administrations (plus de 45 % des cas), et dans les entreprises publiques (25 %). Les PME ne les attirent pas beaucoup, puisque 30 % d’entre eux seulement travaillent dans des entreprises de moins de 1000 salariés. Administrations (INSEE et autres) et Banques emploient plus de 50 % des anciens élèves. Le secteur d’activité qui vient en troisième position est le secteur des sociétés de services et de conseils. En ce qui concerne les activités professionnelles annexes, il est intéressant de noter que 30 % d’entre eux donnent des cours en dehors du cadre de leur travail.

Bien sûr, vas-tu nous dire, tu n’en es pas encore là… Pourtant, il est déjà grand temps de se faire la main (et les dents) sur le marché Parisien à l’aide du dernier Pascal que ta grand-tante ne manquera pas de t’offrir pour ton intégration. Sans jouer à “Nick Leeson, fais pêter la baraque !”, pourquoi ne pas tenter ta chance sur quelques junck bonds singapouriens à l’aide d’un délit d’initié béton ou quelques futurs Zaïrois sur la foi d’un charting délirant, ou même tenter le diable avec un put sur le CAC 40 un jour de clôture estivale, ou pire, avec une OPE sur la CIP ? (merci Tomadak). Plus sérieusement, si la bourse t’intéresse, si tu veux découvrir les ficelles d’un métier qui sera peut-être le tien, te familiariser avec les techniques financières actuelles, et si en plus tu veux profiter de quelques opérations rentables, alors n’hésites plus et rejoins nous ! Pour gérer notre fantastique portefeuille ultra performant, ton travail consistera, en autres, à suivre régulièrement les journaux (on reçoit gratuitement le Figaro et les Echos), à être à l’affût des bons coups, et à venir aux réunions (c’est promis, il y en aura moult) en présence de notre cher blondinet de banquier, qui ne manquera pas, prenons le risque de l’affirmer, de nous dévoiler les mille et un tuyaux qui feront de toi un trader aguerri et heureux !

ÉCHANGE ENSAE / LSE

1985

Le 10 février 1984, bien avant que le soleil ne rosisse le ciel de Paris, quelques élèves de l’ENSAE (dont votre humble narrateur) se rendirent à la gare routière de Stalingrad. Ils étaient vaillants et deux heures d’attente ne les empêchèrent nullement de s’acquitter avec bonne humeur de leur lourde tâche : ramener jusqu’aux locaux de l’ENSAE une trentaine de fins gaillards britanniques, dont un éclopé, fraîchement débarqués de Londres…

1996

Ce jour-là vit la naissance d’un jumelage sportif entre l’ENSAE et la LSE (London School of Economics), il était temps que l’ENSAE sortit de son isolement national. En 1985 une cinquantaine d’élèves de l’ENSAE (rugbymen, footballeurs ou simples supporters) furent invités à Londres à l’occasion du match France-Angleterre à Twickenham. Les rencontres sportives opposèrent le vendredi les équipes de foot et de rugby de l’ENSAE et de la LSE, la journée se termina par une soirée organisée par les étudiants anglais dans les locaux de leur école. Samedi, ceux qui le désirèrent “supportèrent” l’équipe de France dans ses démêlés avec les bulldogs britanniques. Dimanche, aussi fatigués que satisfaits, avec des promesses de revoyure, nous reprenions le chemin de Malakoff. En 1986, vous aurez le plaisir d’accueillir les étudiants de la LSE, et peut-être sera-t-il possible d’élargir cet échange à d’autres sports.

Tu es ici, n’en doutons pas, pour découvrir les mécanismes les plus secrets de l’économie de marché, pour apprendre à maximiser les profits au delà de tout scrupule, et surtout pour devenir l’un des plus impitoyables requins de la finance, à la tête du holding le plus tentaculaire dont on puisse rêver.

D’autre part, afin de poursuivre ce jumelage, l’administration de l’École a mentionné l’éventuelle possibilité, pour des élèves de l’ENSAE, d’effectuer une année de leur scolarité à la LSE, possibilité dont le charme ne manquera pas de retenir l’attention des futurs ENSAE anglophiles.

TRAJECTOIRES POSSIBLES

1985

Alors je vous rappelle que l’ENSAE est un tremplin pour nombre d’administration et d’écoles administratives (ENA, Banque de France, ENSPTT, impôts…), permet d’entrer sur titres dans d’autres Écoles (Telecom, Ensam…), a des accords avec beaucoup de DEA économiques ou scientifiques (Dauphine, Paris I, Jussieu…). Et puis toutes les initiatives sont possibles.

ENSAE TRANSACTION

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CARRIÈRES ET PARTENARIATS STATISTIQUE ET DÉVELOPPEMENT

1991

Qu’est ce que statistique et développement ?

Une association… Enfin, peut-être plus pour très longtemps … car être une association, ça donne un travail administratif très très em …bêtant alors qu’être un club, c’est plus simple … Ce sera à vous de voir l’année prochaine. Bon.

Pourquoi Statistique et développement ?

Ça, c’est le plus important. Tu ne le sais peut-être pas encore, mais l’ENSAE accueille dans ces locaux le CESD, centre de formation des statisticiens Économistes des pays en voie de Développement, bref, il y a à l’école des Africains de tous les coins de l’Afrique, d’Afrique Noire bien sûr, mais aussi du Maghreb et de Madagascar. C’est une des richesses cachées de l’ENSAE. Toi qui pendant deux ou trois (ou quatre !) années de prépa est resté enfermé dans ta chambre ou dans tes cinq mètres carrés de l’internat, à bosser comme un forçat, voilà une belle occasion de t’ouvrir au monde. “Stat Dev” (pour les intimes mais tu en fais partie) est née du contact entre les Africains et les Français de l’école.

Que fait Stat Dev ? Nous avons deux objectifs : • Mettre nos compétences statistiques acquises à l’école au service des organisations non gouvernementales (ONC). Notamment cette année, un travail a été fait pour le DIAL, groupement d’intérêt scientifique comprenant l’INSEE et le Ministère de le Coopération. Il faut noter que cet objectif a été critiqué par des Africains de l’école qui d’ailleurs remettent en cause l’aide par les ONG. Un débat pourra être organisé sur le thème : “l’aide au développement est-elle adaptée aux besoins des PVD ?”. • Développer les échanges culturels entre les Français et les Africains de l’École, Comment ? Voici quelques exemples : il y a deux ans, les membres de Stat Dev s’étaient réunis à Cabourg dans une grande maison, le temps d’un week-end coloré animé et épicé… Cette année, deux Africains nous ont présenté leur pays à travers des films documentaires, un autre nous a parlé du roman qu’il venait d’écrire à la manière d’un conteur africain…. Et puis nous avons organisé 3 jours africains qui comprenaient un repas à la cantine, une conférence sur la littérature, un film, une soirée avec son joueur de tam tam et son joueur de balafon.

Centralisation, Décentralisation, Internationalisation

Que va faire Stat Dev ? Nous ne le savons pas encore. Les projets de Stat Dev pour l’année prochaine, ce sont les tiens et ceux des autres nouveaux à l’ENSAE… Il y a quand même la soirée Tropicale, une méga fête africaine, avec musique, bouffe, danseurs, chanteurs et j ‘en passe… qui n’a pas été organisée cette année et c’est comme un gros vide : c’est un projet à reprendre… Absolument ! Aucun doute : tu es maintenant convaincu que Stat Dev est une autre raison d’intégrer l’ENSAE… Alors à l’année prochaine !

LA TONTINIÈRE NATIONALE SA Recouvrement de créance

• Vous avez fourni des produits ou des prestations à une administration publique ou privée, et vos factures sont en souffrance, • Vous avez signé des contrats de location avec l’État ou un privé et vos loyers sont en souffrance, • Vous avez été sinistré, et vos indemnisations d’assurance sont en souffrance, • Vous avez obtenu un droit sur l’État, une entreprise ou une personne, et vos paiements sont en souffrance, • Vous avez une créance en souffrance... Bénificiez de l’expertise de 32 modalités de la LTN SA pour leur recouvrement contact@latontiniere.cm - Tél. : + 237 682 24 40 76 / 682 24 35 07 boîte postal BP 5366 - Yaoundé

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L’ASTEC ENTRETIEN DE L’ASTEC AVEC LE CORRÉLATEUR

1987

Jacqueline Aglietta est présidente de l’ASTEC depuis juin 1986. Elle est PDG de Médiamétrie, société leader dans le domaine des mesures d’audience dans l’audiovisuel. Philippe Tassi, est vice-président de l’ASTEC depuis juin 1986. Il est directeur de la formation CGSA à l’ENSAE où il enseigne également. Le Corrélateur Pouvez-vous nous présenter l’ASTEC ? Quels sont les objectifs de cette association ? J. Aglietta l’ASTEC est l’association des anciens élèves de la division des statisticiens économistes et administrateurs de l’ENSAE et du CESD, 2000 anciens élèves environ dont 800 environ sont membres actifs de l’ASTEC. La plupart travaillent dans le secteur privé. Les objectifs de l’association sont multiples : développer les liens amicaux et professionnels entre les anciens des différentes promotions ou entre anciens élèves et élèves, participer à la promotion de l’école, faire connaître ce que font les diplômes de l’ENSAE… P. Tassi Nous étudions la population des anciens élèves par le biais d’enquêtes-emploi biennales. L’ASTEC aide aussi ponctuellement des élèves en cours de scolarité avec son fonds de solidarité. Le Corrélateur Quelles sont les manifestations organisées par l’ASTEC ? Pouvez-vous nous décrire les activités de l’Association ? J. Aglietta Nous éditons chaque année l’annuaire des anciens élèves, élément de liaison et d’information fondamental, distribué gracieusement aux élèves de troisième année. Nous organisons des déjeuners-débats. Par exemple depuis novembre 1986, nous avons invité M. Saint-Geours, alors directeur du Crédit National, M.Ruault, ancien conseiller économique du ministre des finances puis du président Giscard d’Estaing, directeur à l’UAP, M. Calot, directeur général de l’INED à la mi-juin. M.Tassi nous parlera de l’histoire des sondages. Nous avons mis au point trois colloques. Le premier qui a lieu en octobre 1986, avait pour thème “la dérèglementation des marchés financiers” il a réuni deux cent personnes, dont des experts financiers. Le second s’intitulait “Télévision et sondages, l’art et la science” et s’intéressait aux problèmes de mesures d’audience télévisuelle et aux retombées sur les médias ; y participaient les grands noms du monde audiovisuel. Enfin, le troisième colloque avait pour thème la Déontologie du statisticien. Les trois réunions ont attiré chacune 200 personnes et ont fait l’objet de nombreuses reprises de presse. P. Tassi L’ASTEC aide également à l’organisation de manifestations gérées par le BDE ou l’école. Ainsi l’ASTEC a participé au financement de la Nuit Tropicale (9000 F), de la nuit X-ENSAE (5000 F), du week-end d’intégration. Le prix Eugène Morice récompensant le meilleur groupe de travail de troisième année est financé entièrement par l’ASTEC (prix de 3000 F). L’ASTEC a également acheté un micro-ordinateur mis à la disposition de BDE. L’Association fait également confiance à EPSI, la junior Entreprise de l’ENSAE à laquelle est confiée l’exploitation de l’enquête-emploi. Le Corrélateur Voyez-vous un moyen de résumer l’action de l’ASTEC en faveur des élèves actuels de l’ENSAE ?

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J. Aglietta Je dirais que nous avons un rôle de relations extérieures de l’École dont bien sûr tirent profit les étudiants de l’ENSAE. Peut-être avons-nous privilégié les actions envers les anciens élèves au détriment de l’information des élèves en cours de scolarité ; il faut absolument que l’ASTEC existe également pour les étudiants et nous comptons nous y employer dès la rentrée. L’ASTEC peut en particulier informer les futurs statisticiens économistes sur les secteurs, les débouchés, les carrières, les salariés et donc jouer un rôle actif. Le Corrélateur Quelles sont les relations entre l’ASTEC et l’administration de l’école ? J. Aglietta En tant que présidente de l’ASTEC, je suis conviée aux réunions du Conseil de perfectionnement de l’École. Nous contribuons ainsi à l’évolution de l’école. P. Tassi A titre d’exemple, les anciens élèves ont joué un rôle dans la création de la filière Actuariat. Quelques - uns des anciens élèves qui ont réussi dans ce secteur ont été consultés pour participer à la mise en place de cette filière et y enseignent. J. Aglietta Dans mon domaine, l’image de l’ENSAE est bonne. L’Ecole apporte à la fois une formation spécialisée et assez généraliste, ce qui correspond à la demande actuelle des entreprises. P. Tassi Notre réponse est sans doute biaisée car nos interlocuteurs sont d’anciens élèves. De plus, soulignons que l’école n’a pas ou peu de concurrence dans le secteur statistique et économique. Reconnaissons que si l’École est bien connue dans les secteurs où les méthodes quantitatives ont bien pris, il y a encore beaucoup d’efforts à faire. Être connu du système productif représente un travail de longue haleine et impose une présence constante. L’ASTEC peut être un bon relais pour l’ENSAE dans cette optique. Il y a eu par le passé des tentatives auprès de la Commission d’Habilitation qui n’ont pas abouti. Le titre d’ingénieur fait référence à la notion de production de biens et non pas de services et en particulier il est difficile d’accorder le mot ingénieur au qualificatif d’économiste : tel est en tout cas le jugement de la commission. Néanmoins, nous pensons qu’à la sortie, cela ne joue pas pour trouver un bon emploi. En revanche, à l’entrée, certains étudiants peuvent se détourner de l’école parce qu’elle ne donne pas le titre d’ingénieur. Ponctuellement, on trouve aussi des organismes qui n’ouvrent leur porte qu’aux titulaires d’un diplôme d’ingénieur, par exemple l’ENS Télécom. Là, le titre d’ingénieur serait appréciable. J. Aglietta Je ne m’exprime qu’à titre personnel, je pense que la notion d’ingénieur est un peu dévalorisée par l’évolution du monde professionnel où le tertiaire occupe désormais une place de choix et où beaucoup de métiers ne relèvent pas du statut d’ingénieurs strico-sensu. Le Corrélateur La relation ENSAE-INSEE est-elle un élément favorable pour l’école ? J. Aglietta L’INSEE a une excellente réputation. C’est souvent un raccourci pour s’introduire, présenter l’école auprès de personnes ne la connaissant pas. P. Tassi Les valeurs véhiculées par l’INSEE sont à la fois morales et scientifiques et sont en général perçues de façon positive. 80 % des élèves d’une promotion vont travailler dans la privé et nous pensons qu’ils portent avec eux ces valeurs.

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L’ASTEC LE MOT DES ANCIENS

1998

Alors l’ASTEC, Maryse, comment ça marche ? Et puis surtout d’abord et avant tout, Kézocko ? L’ASTEC, ce n’est pas le nouveau parfum viril et raffiné, de la ligne de déodorant Axe, marque déposée qui exalte la puissance de séduction masculine qui est en chacun de nous par cette injonction torride : “laissez le charme agir”, enfin, empiriquement j’aurais tendance à dire qu’il est parfois nécessaire de lui filer un coup de main, au susnommé Axe, mais bon l’objet de cet article n’est pas d’accabler le publiciste qui a lancé ce produit et qui depuis vit de cueillette et de sculpture sur pâté de sable dans un coin reculé de l’île de Sumatra pour cacher sa honte et son déshonneur. L’ASTEC, disais-je avant de me laisser entraîner dans des digressions parfumocommerciale d’un goût aussi douteux que la propreté d’un maillot jaune à l’arrivée du tour, l’ASTEC donc est l’assoce des anciens élèves où se réunissent de frais anciens élèves comme bientôt moi très probablement aussi vous, et qui parlent durant de vraies réunions dont j’atteste l’existence puisque j’ai personnellement assisté à deux de ces messes noires solennelles (bon d’accord, c’était pour demander des sous , mais on ne m’a pas mandaté pour disséquer les modalités du financement occulte du BDE…). L’ASTEC essaie donc de maintenir le contact entre les anciens élèves, tout en participant activement à la vie associative de l’école et pas seulement en aidant le BDE (parfois c’est le ski-club qui réclame son soutien …et ne me dîtes pas que les deux sont étroitement liés, personne n’est sensé le savoir). Quoi qu’il en soit, merci à eux, que vous rencontrerez des le WEI, pour leur présence et leur sympathie… et pour leur aide ! Fabien

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L’ÉTUDIANT ENSAE PETIT LEXIQUE FINANCIER, extrait

1997

Actif : présentation synthétique de ce qui va bien dans une entreprise Arbitrage : 1) action de compter les points entre deux trédeurs au cours du debating X-ENSAE. 2) technique financière destinée à gagner de l’argent tout en se couvrant contre les risques. Le pied, quoi ! Si vous tenez à découvrir le secret de l’arbitrage, venez donc à l’ENSAE ! Bourse : arène commerciale où s’affrontent mercenaires de la finance et chevaliers de l’industrie. Clôture : moment de la journée où le trèdeur constate qu’en dépit de toutes ses gesticulations le marché est resté équilibré alors que lui a gagné beaucoup d’argent. Ouf ! Création monétaire : 1) pouvoir magique possédé exclusivement par les banques. Grâce à la création monétaire, la banque peut prêter de l’argent qu’elle n’a pas. Ah, ça vous épate çà ! Encore un secret qui vous sera révélé à l’ENSAE ! 2) Négation absolue du 1er terme du principe de Lavoisier. La finance est donc plus intéressante que la chimie. 3) source d’ennuis et d’inflation , néanmoins indispensable au bon fonctionnement de l’économie. Economiste : ENSAE qui fait semblant de comprendre le monde dans lequel il évolue (et Matheux) Mathématiques : science intuitive autant qu’indispensable pour devenir un jeune loup dynamique et néanmoins sympathique. Matheux : ENSAE qui ne comprend rien au monde dans lequel il évolue mais qui calcule quand même (cf Economiste). Taux d’intérêt : 1) ratio mesurant la passion d’un trèdeur pour un titre. Le taux d’intérêt dépend de ses obligations : si elles sont élevées le taux d’intérêt est faible ; réciproquement, si le trèdeur n’a pas d’obligations, son intérêt augmente fortement pour un week-end à Deauville. 2) par ext : ratio compliqué et versatile variant avec la conjoncture politique et déterminant néanmoins la conjoncture économique. Taux d’intérêt à court terme : taux d’intérêt de trèdeur tout de suite, ici et maintenant ! Taux d’intérêt à long terme : taux d’intérêt du trèdeur moins pressé et plus romantique… Taux d’intervention : nombre d’interventions mensuelles de la Banque Centrale pour rétablir l’ordre sur le marché interbancaire.

CORRÉLATEUR N° 23

Supplément trimestriel et intellectuel de gauche à la chronique d’Edgard Schneider

1978

marxiste du programme commun, cette organisation avait du mal à s’édifier : il était désormais sûr que l’avenir dans le snobisme comme dans le reste était aux mains de la gauche. Ma décision fut prise ; j’abandonnerai de temps à autre “la grande Cascade” pour “Lipp” et me mis à l’écoute de l’intellectualisme de gôche. La première manifestation fut la fête nationale de la RPC (La République Populaire de Chine, enfin quoi !). Pour cette occasion, l’ambassade organisait en avant première la projection du film “la milicienne de la mer”. Le public est à l’image du mouvement maoïste : rare et de moins en moins cher, Glücksman n’est pas là, on ne sait pas si Philippe Sellers fut ou non “mao” ses idées changent si vite. Le film est promis à un grand avenir pour autant que j’ai pu en juger car lors de la projection eut lieu une inversion de bobine : entre la critique de la clique Lin Piao et la condamnation de la bande des Quatre par la milicienne, l’auto-critique du paysan moyen ayant par amour adopté le point de vue révisionniste du Kroutchev chinois venait avant la condamnation par la commune populaire des impérialistes américains et des renégats révisionnistes sociaux-impérialistes de Moscou, et non l’inverse, comme nous l’avons vu ce soir-là ; cette inversion ne nuisait pas vraiment au suivi du film, néanmoins le projectionniste fit son autocritique. A l’issue, tandis que je buvais mon thé, acheté avec des bons et non l’argent du capital, –certes j’avais acheté mes bons avec de l’argent des capitalistes – je regardai l’assistance avec plus d’attention et la constatation fut immédiate : la rue d’ULM n’aime plus la Chine. La rue d’ULM désormais aime Beaubourg, la nouvelle coqueluche y officie ; grand, l’air romantique, les cheveux bruns et la cigarette blonde, DHL a fait comme ses idées : il est passé de la rive gauche à la rive droite. Ce soir-là, la salle est pleine, le public est averti, la conversation animée : les orateurs n’emploient jamais un mot plus bas que l’autre, si ce n’est lorsqu’ils sont aphones : Marx sert beaucoup, ses idées peu ; soudain un cri fusa : y-a-t-il un ouvrier parmi vous ce soir ? Le silence s’établit ; mon voisin, professeur de philo à LLG, sourit ironiquement : il est incontestable qu’il n’y ait pas d’ouvriers ; la question est vraiment saugrenue, la discussion reprend, et si les ouvriers ne sont pas dans la salle, ils sont largement dans les propos. DHL joue du micro : il se souvient qu’il a écrit que prendre la parole c’est prendre le pouvoir. A 11 heures, la conversation s’interrompit : elle reprendra pour les happy few chez Lipp : décidément, la tradition demeure, même si la philosophie se veut nouvelle. Hop, hop, hop : je cours boulevard du Montparnasse au cri de “Libérez Klaus Croissant” ; sur le trottoir j’aperçois Laurent Fabius qui regarde passer la manif : ou bien le PS se refuse à mécontenter le camarade Schmidt, ou bien Laurent n’est pas sportif, mais il ne se joint pas à nous : il faut dire que la Ligue se refuse toujours à la cravate !

Chers lecteurs, Cette année, lorsque je revins de New York en compagnie de Régine, à la fin de l’été, je fus surpris de constater la morosité qui régnait non loin du rond-point : bien que la “Démocratie chrétienne” fût le seul rempart sérieux contre le collectivisme

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L’ÉTUDIANT ENSAE Après cet exercice, je vais me reposer à Artcurial ; Anita Tulio lit “Libération”, une fourrure négligemment jetée sur ses épaules ; ses sculptures attirent un public averti ; pourtant elle regarde avec méfiance un amateur qui s’approche de son œuvre principale, “Tas de Cailloux”, dont le titre évoque assez bien la forme. Mais le vent tourne, l’hyperréalisme est déjà présent dans la salle à côté, naguère dominée par l’abstrait : Anita va devoir consacrer plus de temps à la confection de ses sculptures. Joan Baez est venue : tous les anciens de Woodstock sont là, on vend du “Coca” en boîte, on fume du tabac – si, si, du tabac… Quand soudain apparaît la vedette : drame ! Elle a une laryngite ; ça la gêne pour chanter mais heureusement elle nous apprend qu’elle est toujours la même, qu’elle est toujours révolutionnaire, qu’il y a longtemps qu’on ne l’a pas mise en prise et que c’est une erreur. Ah ! tout était si simple sous Nixon ! L’ISER (Institut Socialiste d’Étude et de Recherche) se penchait l’autre jour sur le problème de la science et du pouvoir. Si le PS n’est plus sûr d’être le pouvoir, ses interlocuteurs sont convaincus d’être la science. Débat sur la sociologie : Touraine se veut intellectuel plus que savant, Poulantzas proteste : le marxisme est une science. Touraine affirme que le pouvoir n’exerce pas de contrainte sur les intellectuels car il préfère les mépriser (“le pouvoir qui tire sur les ouvriers en 1848 a autorisé les Saint-Simoniens à faire leur petite société socialiste”) ; la salle conteste : il est dur de se sentir totalement inutile. Duvignaud crie qu’on lui donne une quantité d’argent ridicule ; quelqu’un objecte que le pouvoir l’a acheté puisqu’il lui a donné un diplôme et le salarie ; nul ne répond : il est dur de se sentir inutile et acheté. Leroy-ladurie arrive en courant : la parole est à lui. Bernard Chapuis semble las, Poulentzas tient conférence. L’historien lit laborieusement un texte qu’il n’a visiblement pas rédigé. La discussion s’enlise par la suite, l’Université s’interroge sur elle-même : finalement il n’est pas si dur que cela d’être intellectuel de gauche ! Film militant s’il en fut, “le Fond de l’air est rouge” passe sur les écrans. Je suis dans une salle du Quartier Latin. Les lumières s’éteignent, les “Monde” se plient, la messe commence. Ma voisine, dès qu’apparaît une manif de moins de cinq ans, reconnaît tout le monde ; elle a d’ailleurs rencontré son petit ami à une manif du MLAC. Fidel a pris de l’embonpoint peu à peu et son uniforme de la dorure, Geismar est enseignant à Jussieu et Rudi Dutschke traduit BHL… Mais aujourd’hui, on est écolo : la dernière boutique à la mode est Rue Lalure (elle s’appelle la Marjolaine): produits non traités, gérant sans chaussettes (ça donne le cancer) qui fait de vous un coopérateur de son épicerie (10F l’action), prix que Barre ne connaît pas sinon il le mettrait dans son indice avec un gros coefficient: finalement, en dégustant son miel d’acacia et ses sablés naturels, on se dit que ce n’est vraiment pas dur d’être intellectuel de gauche, et que l’expérience mérite d’être poursuivie. p.c.c J. M. Daniel

LE POINT ABERRANT : ENJEUX ÉCONOMIQUES

1992

Illustration du thème de la conférence “Les enjeux économiques de l’Environnement” L’élaboration de ce sujet correspond à une double volonté : - renouveler nos thèmes tout en restant dans un cadre économique et européen - Analyser l’émergence d’un phénomène nouveau et tenter de prévoir ses évolutions possibles Les enjeux économiques de l’environnement constituent un champ très large et recouvrent des aspects tels que :

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LES NOUVEAUX DÉBOUCHÉS INDUSTRIELS - Le secteur automobile : les pots catalytiques obligatoires pour les véhicules de la CEE, le recyclage des voitures usagées et le développement avancé de voitures électriques font de l’automobile un symbole des enjeux technologiques et commerciaux de l’environnement. - Le secteur de l’eau et de l’industrie chimique : la limitation de la pollution est à la fois une nécessité écologique et un impératif commercial. Les efforts menés sont considérables et les investissements très coûteux. - Le secteur de l’énergie : on peut noter en particulier l’apparition de biocarburants pour les voitures individuelles (une solution pour l’agriculture française ?), le développement de l’hydrogène comme combustible, la nécessaire rénovation des centrales nucléaire à l’Est, les problèmes de rentabilité et de viabilité à long terme des énergies renouvelables (l’énergie solaire… ou la fusion thermonucléaire). - Le secteur alimentaire et agro-alimentaire : les entreprises tentent de limiter l’utilisation des emballages et de recycler ceux qui sont absolument indispensables. On voit aussi apparaître des labels pour les entreprises les plus respectueuses de l’environnement. LE RÔLE DES ASSUREURS ET DES JURIDICTIONS Comment réagissent les compagnies d’assurance vis à vis des risques écologiques ? d’ailleurs, existe-t-il aujourd’hui une notion de responsabilité écologique ? LE RÔLE DES RESPONSABLES POLITIQUES L’affaire des déchets hospitaliers a montré la nécessité d’une meilleure coordination européenne, celle du pyralène australien, a révélé la volonté du ministre de l’industrie de constituer un pôle industriel français de traitement de déchets. Les règlementations européennes sont-elles trop laxistes ou trop strictes ? sontelles adaptées à la situation économique et écologique actuelle ? Quel rôle peuvent jouer les responsables politiques pour favoriser à la fois l’environnement, l’économie et l’emploi ? Faut-il instaurer comme aux Etats-Unis un marché des droits à polluer ? L’état de l’environnement est particulièrement dégradé dans les PVD et les pays de l’Est. Comment effectuer les nécessaires transferts de technologie dans les pays au niveau scientifique moins élevé ou à la situation politico-économique très précaire ? LA MONTÉE DE LA PENSÉE ÉCOLOGIQUE ? Cet aspect, plutôt philosophique et politique, ne sera pas traité lors du débat, essentiellement économique. Toutefois, il serait intéressant de demander l’avis d’un philosophe lors d’un entretien précédant la conférence : en étudiant l’engouement actuel pour l’écologie, on pourrait mieux déterminer s’il épouse ou bouscule les bases de notre société, s’il est durable ou passager … éléments fondamentaux pour connaître l’étendue réelle et la pérennité des enjeux économiques de l’environnement.

IDÉES REÇUES

1994

ANGLETERRE : Ne jamais oublier que c’est une île : l’Anglais est avant tout typique. Oxford est la seule université au monde où l’on prend un accent, comme à Marseille (par ailleurs, un nid d’espions homosexuels). A soixante ans, l’Anglais devient colonel en retraite et cultive des courges qui gagnent des concours. Au même âge, l’Anglaise devient une romancière anglaise et compose des histoires sanguinaires en taillant ses rosiers. Ne dîtes jamais à un Gallois qu’il est Anglais, non plus qu’à un Ecossais ou à un Irlandais : d’une façon générale, les non-Anglais ne sont pas des Anglais. L’Angleterre n’est pas seulement une île, c’est aussi un bateau : il faut “l’arrimer à l’Europe”. Hélas, elle est tournée vers le large et préfère ses cousins d’Amérique (en dépit de la barrière de la langue).

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L’ENSAE EN 1968 ANALYSE HISTORIQUE

1968

UN PEU D’HISTOIRE L’histoire des récentes réformes de structure dans l’enseignement de l’Ecole est sans aucun doute indissociable de l’histoire des évènements survenus en Mai et Juin, à l’Ecole et ailleurs. Cependant il ne pouvait être question ici de raconter, voire même de résumer ces deux mois de 68 que tant de livres parus depuis n’ont pas suffi à décrire. Je pense que chacun de vous a suffisamment de souvenirs frais en mémoire pour replacer les faits qui suivent dans leur contexte. LA GREVE. Le 10 mai 1968, l’A.G. des élèves votait la grève sur les mots d’ordre de l’U.N.E.F. Cette grève, qui dura plusieurs semaines, devait bientôt délaisser les buts généraux du début pour se motiver essentiellement par des revendications propres à l’Ecole. Le problème de la solidarité ne se posa de nouveau que bien plus tard, quand ces revendications parurent satisfaites. Mais, nous y reviendrons. Dès le début, une partie des élèves sembla se désintéresser quelque peu de ce qui se passait à l’Ecole. Les autres, au contraire, débordèrent d’activité, cherchant à discuter, à mettre en place, à agir à tous les niveaux. Monsieur Croze à plusieurs reprises, Monsieur Malinvaud une fois, les assistants pratiquement sans arrêt, furent appelés à donner leur opinion, en Assemblée Générale et en réunions restreintes. L’Ecole ne s’est d’ailleurs pas isolée. Sous l’impulsion de Raulin (2ème A) la représentation de l’E.N.S.A.E. au CLIGE (Comité de liaison inter-grandes écoles) fut, compte tenu de l’effectif total de l’Ecole, des plus appréciables. De même, plusieurs dizaines d’élèves devaient assister à la Manifestation du 13 Mai entre autres.

LES DÉBUTS DU DIALOGUE Le 15 et le 18 Mai, une délégation composée de Bravo, président sortant, Fitoussi, Vignon et Marciniak allait discuter avec Mr Ripert et Mr Croze d’une modification possible apportée à certains articles du décret régissant l’E.N.S.A.E. En gros, étaient acceptées la participation de 4 élèves sur 20 membres au Conseil de Perfectionnement, de 2 sur 16 au Comité d’enseignement, et la présentation de revendications matérielles diverses. C’était un premier pas.

LA RÉUNION DU 24 ET SES CONSÉQUENCES Le 24 au matin, une réunion préparatoire à l’entrevue avec Monsieur Ripert réunissait entre autres MM.Croze, Matthys, Méraud, Henry, Milleron, et une vingtaine d’élèves autour d’une table ronde à l’Ecole. Après que Mr Croze ait fait le point sur la situation, la discussion s’engage. Nous en retiendrons 2 interventions, qui devaient à des titres divers , influencer profondément la suite des évènements. Mr Henry devait d’abord définir 3 principes d’action qui a son avis devaient inspirer une réorganisation de structure : - le sens des responsabilités des élèves appelés à participer aux diverses instances. - la nécessité d’un certain recul par rapport aux problèmes traités, en évitant cependant l’indifférence. - la continuité dans l’enseignement, qui nécessite entre autres la suppression de toute forme de verrou institutionnel.

L’ÉCOLE DES TECHNOCRATES

1968

Le qualificatif de technocrate ne saurait plus vous concerner que celui de bourgeois. C’est bien évident ! Pourtant un élève de cette école risque de devenir un tel bouc émissaire. Bien sûr la grandeur d’âme supporte toujours sereinement l’anathème apeuré de l’amour propre froissé, qui ne veut pas avouer son incompétence et se cantonne à des généralités teintées d’humanisme de bonne volonté, faute de pouvoir maîtriser des techniques austères et rigoureuses : attendons patiemment que l’idéologie arbitraire soit peu à peu investie et évacuée par la claire objectivité scientifique. Malheureusement si nous essayons de sonder cette attitude qui a l’ambition d’être objective et se nomme scientifique, force est de constater que, historiquement, elle s’inscrit dans le cadre d’une idéologie. L’attitude, la “conception du monde” du scientifique qui ne peut pas ne pas s’incarner à travers les mots, les intuitions ENSAE Alumni Annuaire 2019

et les croyances d’un moment donné, c’est-à-dire la “science constituante”, diffère de la “science constituée”, c’est-à-dire le potentiel opératoire, de la même manière que l’affection de l’artisan pour son outil n’a rien à voir avec l’efficacité de celui-ci. A l’appui de cette assertion, je citerai les recherches contemporaines en philosophie des sciences, qui depuis Bachelard (cf. Le nouvel esprit scientifique, entre autres) s’attachent à mettre en évidence les coupures épistémologiques qui accompagnent les révolutions scientifiques. Ce que Macheray traduit dans les séminaires de l’Ecole Normale en assignant désormais pour tâche à la philosophie de jalonner dans le champ du savoir les frontières entre l’idéologie et la science, afin de révéler la première à la seconde. Au risque de faire une esquisse inconsistante, je rappellerai l’opposition radicale entre la conception scientifique laplacienne d’un monde complètement mécanique, spectacle pour un observateur abstrait et transcendant et la conception quantique d’un couple interdépendant observateur-observé. Je pense donc pouvoir affirmer que toute attitude scientifique historiquement déterminée est sous tendue par une idéologie. Or la science qui nous est enseignée en classe préparatoire et même ailleurs est essentiellement la science constituée à la fin du XIXème. La théorie de la relativité, restreinte seulement, est présentée marginalement, et des incursions dans la science plus récente, quand elles existent, n’empêchent pas pour autant nos bonnes vieilles conceptions déterministes et mécaniques d’être le fond solide et rassurant de notre culture scientifique. Plus près de nous, les modèles économiques qui nous sont présentés trahissent toujours la nostalgie de cette mécanique où l’homme est souvent étranger : Monsieur Allais ne compare-t-il pas le système économique à un ensemble de vases communicants dont les niveaux varient ?

BILAN 68 SISYPHE

1968

Mai 1968. La forme évoluée du rocher est devenue pour quelques temps le pavé. C’est le principe du peuple ; tout est possible : demain. Il n’y aura plus de généraux, P.D.G., etc. Inutiles, ils seront supprimés. Provisoirement, chacun sera balayeur à temps partiel : il n’y aura plus de travailleurs condamnés ; l’Université est ouverte à tous : comprendre le monde, la vie. C’est la déclaration du droit au bonheur. Novembre 1968. La forme évoluée du rocher c’est le cartable. Des devoirs, des colles, des compositions, des notes, des classements. Des cours magistraux à sens unique obligatoire. Demain est comme hier la partici-passion sera bientôt un partici-passé. A l’école où Sisyphe est élève, il y a pourtant du neuf. Gentil garçon, supposé bon élève, sisyphe a été porté à la Présidence du Conseil d’Administration – non, pardon, du conseil des études.

BILAN 68-69 BUREAU POST MAI 1968

1968

Et, dans le désordre intelligent des idées contradictoires, on a vu apparaître peu à peu le point nouveau, essentiel : désormais les élèves voulaient être partie prenante dans toutes les décisions qui les touchaient. Tour à tour sont apparues des appellations diverses des structures voisines, des répartitions différentes. Et peu à peu, on est arrivé aux “Conseils des Etudes” que, dans l’enthousiasme, on a cherché à faire fonctionner. C’était en juin 1968. Aujourd’hui, nous possédons quelque expérience des possibilités, mais aussi des limites de ces structures de cogestion. Nous nous sommes rendu compte de l’importance du choix des hommes, et de la définition de leur mission et de leurs responsabilités. Avoir de multiples représentants, à attributions diverses, est une bonne chose : plus il y a de gens “dans le coup”, plus l’action est collective et démocratique. Mais sur le plan de l’efficacité, certains problèmes peuvent se poser. C’est pourquoi, il m’a semblé utile d’exposer mon point de vue sur les attributions respectives du Bureau et d’autres représentants des Elèves. 25



L’ENSAE ET LA CRISE DE 1988 ENTRETIEN AVEC JACQUES MISTRAL

1988

Le Corrélateur : Comment caractérisez-vous l’évolution de la science économique depuis un siècle ? J. Mistral : L’économie est la science sociale qui s’est le plus outillée : d’une part en raison de l’importance généralisée des données quantitatives, d’autre part pour répondre aux demandes sociales adressées aux professionnels. A ce double titre, l’œuvre de Keynes, adossée au traitement des données de comptabilité nationale et tournée vers l’étude des politiques économiques, est le chaînon théorique qui a fait sortir la science économique de débats plutôt spéculatifs. Le Corrélateur : L’économie mathématique est présentée à l’ENSAE comme le stade le plus achevé de l’analyse économique. Quelle place reste-t-il à l’économie littéraire ? Peut-on concevoir ces deux approches comme complémentaires et quelle peut-être alors leur articulation ? J. Mistral : je ne partage pas l’idée d’une opposition entre économie “mathématique” et “littéraire”. L’économie se développe aujourd’hui dans trois directions. D’une part, elle exploite toutes les possibilités qu’offre la formalisation parce qu’on gagne en clarté et en capacité de synthèse. D’autre part, elle progresse dans l’interprétation des données quantitatives ce qui exige que l’on enrichisse le dispositif d’observation et que l’on améliore les méthodes scientifiques ou informatiques qui permettent de traiter des données. Enfin, nous devons intégrer l’apport des autres sciences sociales à l’économie : nous avons besoin de mieux comprendre la façon dont les mécanismes économiques dépendent de caractéristiques globales de la société et en même temps les infléchissent. Le Corrélateur : La formation mathématique est-elle adéquate à son objet et a-telle une valeur heuristique ? J. Mistral : La vie sociale prise naïvement, c’est le chaos. La nécessité de mettre de l’ordre dans ce chaos est, pour partie, bien servie par les possibilités qu’offre la modélisation d’avoir une représentation synthétique. La modélisation présente deux autres avantages : du point de vue logique elle protège des contradictions internes ; du point de vue pratique, elle permet de réfléchir aux ordres de grandeur (par exemple sur les coefficients d’un modèle) ce qui aide beaucoup le raisonnement. Le Corrélateur : Dans quelle mesure, la modélisation permet-elle de prévoir l’avenir et non pas seulement de prolonger le passé ? J. Mistral : Les équations des modèles macroéconomiques appliqués sont fondées sur l’observation du passé. A ce titre, certaines d’entre elles incorporent des propriétés très fortes de l’économie qu’il est difficile de modifier ; l’élasticité d’importation du commerce extérieur, par exemple, présente une très grande stabilité. Si l’on s’intéresse à d’autres modes de régulation que ceux incorporés par un modèle testé sur le passé, on peut utiliser des maquettes grâce auxquelles on explore les conséquences d’évolutions qui ne sont pas enregistrées par les régularités antérieures : par exemple pour la formation des salaires. Le Corrélateur : Quels sont les apports de la micro économie à la macroéconomie ? Reste-t-il une approche proprement macro économique de la macroéconomie ? J. Mistral : La micro économie est un point de passage obligé parce qu’elle apporte une grande cohérence logique et parce qu’elle constitue une référence utile pour aborder l’étude des comportements. Toutefois, le passage entre la micro et la macroéconomie se révèle plein de pièges : faut-il parler de fracture entre les deux ? En réalité, la recherche des “fondements micro économiques de la macroéconomie” a permis de développer la théorie des équilibres non walrasiens qui constitue une ligne de résistance de l’analyse keynésienne face aux succès des thèses liées aux anticipations rationnelles. Les recherches sur le marché du travail s’interrogeant sur la “rigidité des salaires nominaux” sont un autre exemple d’enrichissement de nos connaissances, avec d’une part l’approche en terme de contrats implicites ou, surtout, de salaire d’efficience et d’autre part les travaux cherchant dans quel contexte historique et social se sont organisées les formes contemporaines de la négociation salariale. ENSAE Alumni Annuaire 2019

Le Corrélateur : Le concept de crise a-t-il une valeur scientifique ? J. Mistral : Le concept de crise est utile pour ceux qui s’intéressent à la très longue période. Il y a une thèse très répandue qui analyse les difficultés de la période contemporaine comme le résultat d’erreurs de politique économique et de chocs probabilistes (pétrole, dollar, dette…). En employant le mot crise, on veut dire qu’il y a des déséquilibres plus durables, plus profonds : on peut alors réfléchir aux propriétés qui caractérisent la période de croissance exceptionnelle de l’aprèsguerre en la comparant à celle qui la précède ou qui la suit, depuis 1974. Le concept de “crise” doit être manié avec audace et prudence : il est plus suggestif qu’explicatif, il est heuristique dans la mesure où il invite à prendre les choses dans leur globalité et à ne pas se perdre dans l’étude de propriétés locales. Ceci dit, une fois qu’on en a fait le tour, il reste à se demander s’il est approprié de parler de “crise” au singulier. Le Corrélateur : La coopération internationale est souvent présentée comme une panacée à la crise. Une nouvelle organisation du SMI est-elle souhaitable ? J. Mistral : Les économistes se partagent en deux camps. Certains pensent que c’est impossible et que réimposer des contraintes aux marchés financiers est une absurdité car ces marchés sont très efficients et offrent les meilleures réponses aux chocs. Une autre école soutient que les désordres financiers ont des conséquences négatives graves sur l’activité, que les fluctuations gigantesques de parité perturbent les relations commerciales internationales et les décisions d’investissement. Des propositions sont formulées qui visent à lier problèmes financiers et monétaires en termes de zone cible pour les parités. Il y a aussi une proposition, formulée initialement par Tobin, qui consiste à donner une plus grande viscosité aux mouvements de capitaux en introduisant des taxes qui décourageraient les flux purement spéculatifs et redonneraient une capacité d’intervention aux banques centrales. Le Corrélateur : Comment le Krach d’octobre a-t-il affecté la scène internationale ? J. Mistral : Le Krach d’octobre a une dimension proprement boursière (l’envol du cours des actions puis sa “correction”) et une dimension internationale : les marchés ont perçu le caractère artificiel d’une reprise américaine dopée par la permanence d’un déficit qu’aucune épargne intérieure ne peut financer. Force est de reconnaître que la solution des problèmes n’a guère progressé depuis novembre : le problème budgétaire américain est entier, la dévaluation supplémentaire du dollar en novembre et décembre 1987 va provoquer une nouvelle détérioration du solde extérieur dans les prochains mois, l’Allemagne résiste aux pressions de ses partenaires et refuse de jouer le rôle de locomotive, les efforts de relance du Japon restent timides et n’ont qu’un impact très minime sur l’économie mondiale. Bref, c’est le moment de relire l’analyse de Kindlerberger expliquant la gravité de la crise des années 30 par le fait que “la Grande Bretagne ne pouvait plus et que les États Unis ne voulaient pas exercer les responsabilités du leadership mondial”.

L’ANALYSE DE M. LEVY-LEBOYER : la crise de 1929 En introduction, je voudrais rappeler que toutes les récessions tendent à être attribuées à des dérèglements observés dans la sphère financière, car l’amplitude des mouvements de hausse et de baisse des instruments financiers dans le cycle est plus forte et plus visible que celle des autres variables. De plus, la guerre de 1914 et la reconstruction avaient entraîné une multiplication des signes monétaires et sensibilisé l’opinion aux dangers de l’inflation. Les dirigeants politiques avaient donc la volonté de “revenir à la normale” par l’orthodoxie monétaire. Soit, dans les pays anglo-saxons, en rétablissant l’étalon-or et par conséquent les automatismes de rééquilibrage extérieur, et sur le continent, en limitant le crédit pour éviter une nouvelle dépréciation des actifs patrimoniaux. En cas de crise, les banques avaient toutes chances d’avoir peu de liberté de manœuvre et d’être tenues pour responsables de toutes les erreurs commises. 27


L’ENSAE ET LA CRISE DE 1988 I. La crise de 1929 : pourquoi ? Cela, d’autant plus que la crise de 1929 ne paraît pas explicable, si on limite l’analyse aux seuls aspects économiques de la situation. Les Etats-Unis avaient connu, en effet, une croissance lente et régulière au cours des années 1920, avec des prix relativement stables et un léger chômage de 3 à 4%. Il n’y avait donc pas de tension particulière dans le cadre du pays qui aurait pu laisser prévoir une crise. Alors que la hausse des cours sur le marché de Wall Street s’était accélérée sans justification dans l’été de 1929, et qu’un réajustement à la baisse était en cours sur toutes les autres places. Intuitivement, on peut d’ailleurs mesurer l’écart qui existait entre le marché financier et l’économie réelle en rappelant (1) entre 1924 et 1929 les cours avaient triplé, face à une simple augmentation de 12% réservée aux salaires, (2) que les prêts aux brokers qui servaient à financer la spéculation représentaient le dixième de la capitalisation du marché, et (3), signe d’un emballement injustifié, la valeur des titres allait reculer de $90 à 64 milliards en vingt jours après le 23 octobre 1929, et rechuter à nouveau après une pause pour se stabiliser à $15 milliards fin 1932, soit une perte globale équivalente à 9 mois de revenu national. Automatiquement, la spéculation – l’achat à crédit d’actifs financiers en vue de réaliser une plus-value boursière et non en vue de financer des investissements réels – a été placée au centre de la crise, car les contemporains ont été sensibles aux conséquences immédiates du Krach : les amputations de patrimoine chez les détenteurs de titres ont provoqué une baisse de leur consommation ; celle des revenus et de l’épargne s’est répercutée sur l’investissement (de $16 milliards en 1929 ils ont reculé à 11 milliard en 1930 et à moins de 1 milliard en 1932 et 1933) ; et la coupure des crédits a entraîné une chute brutale des prix par déstockage et un recul de la production mensuelle d’automobiles (des trois quarts de mars à décembre), puisque les crédits ont été coupés. La responsabilité des banquiers dans une économie où le crédit jouait un rôle déterminant a paru engagée à chaque étape de la crise. Mais le Krach de Wall Street ne peut avoir été que la sanction de déséquilibres pré-existants. Les épargnants et les spéculateurs ont peut-être versé trop de capitaux sur le marché et fait monter les cours. Mais il y avait également en contrepartie des emprunteurs qui ont émis sur le marché et donc créé des titres parce qu’ils étaient en difficulté. Le vrai problème est de savoir pourquoi il y a eu un gonflement, donc une création excessive, de titres financiers dans la phase finale du cycle. On peut évoquer sur ce point, côté offre, le mouvement de désinflation qui s’est produit une fois la convertibilité des monnaies rétablie sur toutes les places. A Paris, par exemple, les obligations et les actions qui avaient perdu, en francs constants, 90% et 70% de leur valeur sur l’avant-guerre, se sont redressées ; elles se trouvaient en janvier 1929 à respectivement 83% et 13% des cours de 1913. Mais, côté demande, il y a certainement eu des déséquilibres internationaux que l’on a tendance à négliger parce qu’ils ont été masqués grâce au flux des capitaux américains qui se sont développés à partir du plan Dawes de 1924 : entre cette date et 1929, les investissements extérieurs des Etats-Unis ont été de $6,4 milliards (principalement vers l’Europe et le Canada), auxquels il y a lieu d’ajouter $3,3 milliards fournis par la Grande Bretagne (principalement aux pays jeunes). Ce sont donc près de $10 milliards qui ont été versés pour assurer le jeu des paiements extérieurs. Mais on ne doit pas oublier qu’il y a eu trois déséquilibres qui sont à l’origine de la crise : 1- Les vieux pays industriels qui avaient subi des destructions pendant la guerre, perdu le contact du progrès technique, et qui ont dû reprendre leur place sur les marchés extérieurs souvent sans avoir réajusté leurs prix et leurs salaires, ont dû recourir à des emprunts extérieurs pour couvrir leur déficit avec l’étranger : l’Allemagne s’est endettée à long terme principalement (de $7 milliards), l’Angleterre à court terme (de $3-3,4 milliards). 2- La surproduction mondiale en produits primaires a contraint les pays jeunes à s’endetter – pour stocker et ralentir la baisse du prix de leurs exportations, développer leurs infrastructures et bientôt financer le service de leurs dettes extérieures : l’Amérique latine en était arrivée à payer $660 millions par an, trois fois le chiffre de leurs importations de capitaux ; en fait le secteur agricole dans 28

tous les pays (neufs et anciens) se trouvait dans la même situation, les producteurs s’étant endettés pour développer leur production pendant la guerre ou pour reconstruire leur exploitation une fois la paix rétablie. 3- Les pays créanciers, à l’inverse, auraient pu exercer une influence stabilisatrice sur les marchés en utilisant leurs surplus pour développer leur économie et leurs importations. Mais ils ont ajouté aux difficultés internationales en pratiquant une politique de stérilisation de ces surplus : les Etats-Unis, parce que le Federal System cherchait à maintenir stable l’activité, en faisant varier les taux d’intérêt ; les pays européens, sur le continent, parce qu’ils voulaient reconstituer leurs réserves monétaires, une fois la convertibilité rétablie. La revalorisation du franc dans le 2ème semestre de 1926 a permis à la France, par exemple, d’accumuler des créances sur Londres et de les rapatrier sous forme d’or, cela jusqu’en mai 1927 (les conversions £/or ayant été interrompues alors à la demande de la Banque d’Angleterre). Une hausse majeure des taux d’intérêts à New York aurait interrompu cette accumulation de dettes et de créances. Mais la Grande Bretagne avait subi une grève générale en Mai-Novembre 1926, et les E.U. avaient connu, eux aussi, un ralentissement de leur activité dans l’hiver 1926-27. Les deux pays étaient prêts à prendre des mesures de relance. La Banque d’Angleterre a donc diminué son taux d’escompte (en avril 1927) et demandé aide à la Banque fédérale de New-York, aide qui lui a été accordée, après une réunion des gouverneurs des banques centrales (les 1-6 juillet 1927, cela, sous forme d’une baisse des taux d’escompte et d’achats en open market exécutés par la Banque fédérale entre juillet et novembre 1927. Un cycle a donc été déclenché, caractérisé par une progression du PIB américain de quelques 7% entre 1927 et 1929 ; une montée des taux monétaires, accompagnant le redressement de l’escompte et des émissions et parce que le marché new-yorkais était devenu plus attractif que les placements extérieurs, par un rapatriement des capitaux américains – évalué à $2 milliards – entre janvier 1927 et septembre 1929, le point de retournement se faisant en juin 1928, date du début véritable de la crise internationale : la clef de la situation a donc été le reflux des capitaux américains (et européens) sur Wall Street, entraînant une chute du prix des matières premières sur les marchés internationaux et un net ralentissement de l’activité allemande, accompagné d’une montée du chômage. Les éléments originaux à rappeler dans la crise ont été au nombre de trois : 1- Une situation déséquilibrée au plan international ; 2- Un cycle arrivé en fin de course dans les pays anglo-saxons ; 3- Le fait que les banques centrales n’ont pas joué leur rôle, la Banque fédérale de New-York se trouvant prise entre la Banque d’Angleterre qui perdait ses réserves (puisqu’elle jouait un rôle de clearing pour les pays de la périphérie) et demandait de l’aide, et les fermiers de l’Ouest qui, se trouvant endettés et subissant déjà des baisses de prix, souhaitant voir ajournée la hausse des taux d’intérêt. Celle-ci est donc intervenue avec retard et en deux temps : à NewYork le 14 février 1929, et sur le reste du territoire le 9 août 1929. Le krach a pris une ampleur exceptionnelle parce qu’il a été trop longtemps ajourné.

II. Pourquoi un tel impact dans la durée ? Une fois la panique dépassée, la déflation s’est installée sur tous les marchés. Aux E.U., elle a été marquée par un recul du PNB de $104 à 90 milliards entre 1929 et 1930, la différence de $14 milliards se répartissant à raison de 40%, 10% et 50%, entre les trois postes de l’investissement, de l’exportation et de la consommation, mais avec des effets inégaux (34%, 27% et 8%), puisque les trois postes n’avaient pas le même poids. Au plan international, l’effondrement des prix et des échanges a contraint les pays débiteurs à liquider leurs réserves pour rembourser leurs dettes. Ceci s’est traduit par des annulations de réserves détenues en devises et par des mouvements d’or, d’abord au profit des EU et de l’Angleterre, puis au profit de la France et des pays du bloc-or en 1931. Mais en se prolongeant, ce mouvement a eu pour effet de déprécier les actifs patrimoniaux que les débiteurs étaient forcés de vendre pour tenter de rembourser leurs créanciers. C’est le “debt deflation process” qui a affecté particulièrement les fermiers américains de l’Ouest, ainsi que ENSAE Alumni Annuaire 2019


L’ENSAE ET LA CRISE DE 1988 les régions agricoles de l’Europe de l’Est, et qui a déclenché l’effondrement du système bancaire européen (des paniques se produisant successivement à Vienne, Berlin et Londres dans l’été de 1931), et celui des E.U. dans le 2ème semestre de 1932 ; l’une des premières mesures prises par Roosevelt à son arrivée au pouvoir, en mars 1933, a été de fermer toutes les banques pour laisser les esprits se calmer et interrompre le processus de retrait des dépôts. Rétrospectivement, on a fait valoir que les banques centrales n’avaient pas fourni de crédit pour interrompre cette panique, alors que leur intervention dans une crise doit avoir pour objet d’arrêter la course à la liquidité. Ceci est vrai de la Reichsbank, qui a coupé les crédits le 22 juin 1931 (pour empêcher les firmes allemandes de faire escompter leurs créances et d’exporter leurs capitaux), et plus encore du Système Fédéral Américain, l’arrêt des opérations d’open market et d’aide aux banques à partir de l’été 1930 (la masse monétaire a baissé de 25% entre 1929 et 1932) ayant véritablement déclenché le mouvement de déflation international qui a donné un aspect irréversible à la crise. Ceci pose à nouveau le problème du rôle des facteurs financiers dans la crise ? Pourquoi les crédits ont-ils été donnés à contre-temps ? Pourquoi ne pas avoir arrêté l’expansion des crédits plus tôt avant la crise ? Et pourquoi ne pas avoir injecté des liquidités, principalement à Berlin dans l’été de 1931, lorsque le système bancaire s’est effondré ? 1- Avant la crise, le Système Fédéral a surestimé son pouvoir. La banque avait été formée en 1913, et n’avait eu comme seules expériences que les deux crises mineures de 1924 et 1927. Le gouverneur Strong (qui est décédé quelques mois plus tard et qui, étant une forte personnalité, aurait mieux maîtrisé la situation dans le premier semestre de 1929) a répété, par exemple le 3 août 1928, qu’il n’y avait pas lieu de craindre un arrêt du crédit, que la Banque Fédérale était

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prête à “inonder” Wall Street de fonds en cas de nécessité, et que le temps des peurs collectives (a mob panic) était révolu. 2- Après la crise, il n’y a pas eu de “international lender of last resort”. La Reichsbank s’est trouvée seule, sans appui extérieur, quand elle a cru devoir mettre un terme à la fuite des capitaux étrangers en relevant son taux d’escompte en Juin-Juillet 1931. En fait, cette présentation est excessive. Car $450 millions ont été injectés en 1930 dans le système ($300 millions de l’emprunt Young, $100 millions correspondants à la souscription du capital de la Banque des règlements internationaux, créée en mai 1930, et $50 millions sous forme de prêt de Kreuger-lee Higginson à la Banque des Règlements Internationaux Reichsbank). Des crédits ont été à nouveau ouverts en 1931 : outre le moratoire Hoover de juin 1931, $100 millions ont été donnés à la Reichsbank par la BRI et les trois autres banques centrales occidentales, et un prêt international de $0,5 à 1 milliard réservé à l’Allemagne a été envisagé en juillet 1931. Mais ce projet s’est heurté à l’opposition de Hoover, celui-ci estimant que les banques américaines s’étaient déjà trop exposées pour le seul profit des pays européens, et à celle des Britanniques, parce que ceux-ci étaient très attentifs à cette époque au problème des réparations et qu’ils pensaient que les fonds prêtés pourraient servir à les financer. Les conflits nés de la guerre interdisaient toute concertation véritable entre les autorités monétaires. Ce qui conduit à penser (1) que la crise a eu des antécédents économiques que l’on a trop tendance à négliger, parce que l’on veut tirer une leçon de morale de la crise et stigmatiser la spéculation à Wall Street, et (2) que l’injection de liquidités par des banques centrales jouant leur rôle de lender of last resort du fait de l’inexpérience des banquiers new-yorkais et manque de concertation internationale, les facteurs politiques ne devant pas être oubliés.

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LE VOYAGE EN URSS DE 1989 AVANT PROPOS

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Depuis l’arrivée au pouvoir de Mikhail Gorbatchev en 1985, l’URSS se trouve au cœur des débats politiques et économiques, comme en témoigne la couverture médiatique dont ce pays fait l’objet. Les réformes économiques engagées par le pouvoir soviétique sous le nom de “pérestroïka” annoncent un changement radical du système économique. A la fois pour les aspects théoriques et pour la vie quotidienne des Soviétiques, il est passionnant de voir si un tel système peut être réformé sans perdre de sa spécificité, sans rompre avec les principes idéologiques qui en constituent les fondements. Ces réformes marquent un tournant essentiel dans l’Histoire de l’URSS et peuvent avoir de multiples conséquences, pour les économies des pays de l’Est bien sûr, mais aussi pour l’Europe et plus généralement pour les relations Est-Ouest. Dans ce contexte d’ouverture politique et économique, l’URSS nous a semble présenter tous les atouts pour y effectuer un voyage d’études, d’autant plus qu’il s’agit d’un étage mal éclairé de la “maison commune” ! Ainsi durant une quinzaine de jours, du 1er au 15 avril 1989, 25 étudiants, presque tous élèves de l’ENSAE, se sont rendus dans les trois principales villes de l’URSS (Moscou, Léningrad et Kiev) pour apprécier sur place l’avancée des réformes engagées et pour recueillir l’opinion des Soviétiques quant aux évolutions politiques et économiques de leur pays. Au retour de ce voyage très enrichissant, il nous a paru utile de rassembler nos impressions dans cette plaquette afin de les faire partager à tous ceux que les changements en cours en Union Soviétique intéressent. Sans vouloir anticiper sur le contenu des articles de la plaquette. Il se dégage néanmoins le sentiment que si la “glasnot” gagne peu à peu l’ensemble de la société soviétique, en revanche, la perestroïka suscite un scepticisme certain tant de la part des soviétiques que des interlocuteurs français rencontrés. Ainsi à la liberté de ton manifeste par les représentants des institutions soviétiques que nous avons visitées, s’oppose la difficulté quotidienne vécue par les consommateurs pour s’approvisionner. …La transcription des propos enregistrés lors des rencontres organisées en Union Soviétique apporte une perception plus concrète de la situation. Le Directeur de la représentation de la BNP à Moscou ainsi que deux responsables français résidant en URSS formulent de sérieuses réserves concernant la politique de réformes. Celles-ci s’expriment de façon plus nuancée chez les Directeurs des instituts de sciences économiques de Léningrad mais aussi dans les propos tenus par le Directeur de le Coopération Internationale du Comité d’Etat de la Statistique, bien qu’ils aient tous fait preuve d’une très grande franchise sur les problèmes auxquels se heurte leur pays John Baude et Bruno DELEMOTTE

8904 VOYAGE ÉTUDES URSS DÉBAT

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Question : D’après l’exposé qui vient d’être fait, et d’ailleurs vous l’avez souligné à plusieurs reprises, le diagnostic qui a été fait par M.Gorbatchev lors de son arrivée au pouvoir, a été celui de l’inefficacité du système envisagé dans sa globalité et dont vous avez donné des exemples. A partir de ce diagnostic, il semble que les réformes qui ont été exposées, et qui sont en vigueur actuellement, consistent pratiquement toutes en un développement de mécanismes de marché dans une économie où ils n’existaient pas. Aussi : - Comment s’est opérée la réflexion qui a mené à ce diagnostic d’inefficacité et à l’idée que pour restaurer l’efficacité, il fallait nécessairement passer par la promotion des mécanismes de marché d’initiative privée ? - Dans quelle mesure la promotion du mécanisme de marché n’est pas en contradiction, à plus ou moins long terme, avec l’idée même d’une planification et du socialisme en tant qu’appropriation collective des biens de production ? 30

K.SOOS : Pour ce qui est de votre première question, il semble qu’il n’y ait pas de troisième voie. Si les difficultés sont les conséquences inévitables de la bureaucratisation, alors il n’y a qu’une voie, et c’est l’introduction du marché. J’ai parlé brièvement de la période de la NEP, qui est maintenant redécouverte en URSS et moins décriée qu’auparavant. Cette réaction se rencontre également dans d’autres pays socialistes. Une “planification démocratique” (sans rôle actif et fondamental du marché) est une idée inélaborée et pour moi, en tant qu’économiste, incompréhensible. La deuxième question (la planification est-elle compatible avec les mécanismes de marché ?) est vaste et très difficile. En Europe de l’Est le modèle suédois est de plus en plus populaire. Ce modèle est un système capitaliste avec un rôle important de l’Etat. D’autres idées interviennent mais évidemment le pouvoir de la planification sera limité par la réhabilitation du marché. M.CHAVANCE Effectivement, un des problèmes idéologiques se posant avec ce type de réforme vient de la définition traditionnelle du système économique socialiste. Celle-ci était fondée sur un renversement de la définition du capitalisme (perçu comme propriété privée et anarchie du marché). A contrario, le socialisme était défini par la propriété d’Etat ou publique et la planification. C’est en fait cette opposition qui est entrée en crise de manière irrémédiable. Et l’on observe plutôt une sorte d’accomodation idéologique pragmatique. L’idée qu’il faut davantage de marché, ou encore celle souvent avancée selon laquelle il fait diverses formes de propriété, commence à être discutée en URSS. Par contre en Chine, en Hongrie, c’est un débat qui est déjà ouvert. Pour certains, il n’est pas souhaitable d’avoir une hégémonie absolue des formes étatiques de propriété. On peut envisager des réformes par reprivatisation partielle de la propriété d’Etat. A partir du moment où ce genre de question se pose, l’idée réformatrice selon laquelle on cherche à élaborer un nouveau modèle de socialisme, est évidemment très difficile à définir théoriquement. C’est pour cela qu’on note une sorte de repli pragmatique. Le terme de socialisme en tant que système économique alternatif au capitalisme perd de plus en plus de son pouvoir. Question : Est-ce qu’il y a là un déficit de la question théorique ? M.CHAVANCE : Dans la perception ancienne, le marché est vu comme l’anarchie, le plan comme l’ordre, la maîtrise, le contrôle. A partir du moment où l’on admet le caractère illusoire de cette opposition (parce que la planification centralisée crée sa propre anarchie et que les économies de marché ne sont pas dépourvues de mécanismes macréconomiques de contrôle) on crée une sorte de vide idéologique et théorique qui suscite chez certains l’idée que finalement le modèle du marché va résoudre tous les problèmes parce qu’il constitue une panacée. C’est ce que j’appellerais le réformisme naïf, de la première phase, ou celui des libéraux actuels, puisqu’on compte aujourd’hui un certain nombre de libéraux dans les pays de l’Est. Mais il existe un réformisme plus mûr me semble-t-il, et qui raisonne en terme d’économie mixte, en forme de recherche d’un modèle à la fois viable économiquement et acceptable d’un point de vue éthique. Il s’agit d’un modèle capitaliste assurément mais différent du capitalisme étatique antérieur, une sorte de capitalisme mixte ! K.SOOS C’est le modèle suédois. M.CHAVANCE Peut-être quelque chose comme le modèle suédois. K.SOOS Chaque jour, le modèle suédois gagne de la popularité. Mais la question est la suivante : est-il réutilisable à l’Est ? « Le système économique soviétique de BREJNEV à GORBATCHEV » Bernard CHAVANCE (Ed. Hachette, 1989) ENSAE Alumni Annuaire 2019


LE VOYAGE EN URSS DE 1989 ÉCONOMIE PLANIFIÉE ET PÉNURIE

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Des magasins mal approvisionnés en biens d’alimentation ou une file d’attente pour acheter des oranges à un camelot dans la rue : une rapide promenade dans chacune des trois plus grandes villes d’URSS que sont Moscou, Léningrad et Kiev, permet de déceler les problèmes de pénurie auxquels est confrontée l’économie soviétique, problèmes qui frappent d’ailleurs d’autres secteurs que celui des biens de consommation. Il semble intéressant de dépasser ce simple constat et de s’interroger sur les mécanismes économiques qui engendrent la pénurie. L’économiste hongrois JANOS KORNAI, dans son ouvrage “Socialisme et économie de la pénurie”, apporte un certain nombre d’explications qu’il convient d’expliquer.

LES AJUSTEMENTS QUOTIDIENS DE LA PRODUCTION À LA PÉNURIE Alors que dans une économie capitaliste traditionnelle, les contraintes de demande sont presque toujours effectives et plus restrictives que les contraintes de ressources, c’est exactement la situation inverse dans une économie socialiste où les inputs se révèlent insuffisants pour la quantité d’output planifiée et pour la technologie originale précisée dans la plan. Apparaît alors un goulot d’étranglement qui donne naissance à la pénurie. Ce sont les goulots d’étranglement, et rarement les variations de la demande des clients ou les changements de prix relatifs des inputs et des outputs, qui guident l’ajustement instantané de la production. Dans une telle économie, cet ajustement pratiqué par le producteur peut intervenir sous différentes formes. Tout d’abord, s’il existe une complémentarité très rigide entre les inputs exigés par la technologie, alors c’est la ressource la plus rare qui détermine le niveau de production. Le chef d’entreprise se résigne à produire la quantité d’output fixée par le goulot d’étranglement, qui constitue une forme d’ajustement. Cet output, qui peut être un input dans le processus de production, sera à son tour insuffisant, si bien que la pénurie engendre la pénurie. Les stocks peuvent néanmoins arrêter cet engrenage. Cependant, dans une économie de pénurie, c’est la substitution forcée qui est la forme la plus fréquente et la plus importante de l’ajustement instantané de la production. Ainsi la pénurie, dont une conséquence est l’insuffisance de certaines ressources nécessaires à la production, conduit à une modification de la combinaison d’inputs qui s’éloigne donc de celle prévue initialement dans le plan. La substitution forcée se traduit, ou bien par un gaspillage en utilisant un produit de qualité supérieure à celle nécessaire, ou bien par une modification de la composition de l’output en économisant sur le coût des inputs, ce qui entraîne une détérioration de sa qualité. Ce dernier effet est sans doute un des éléments les plus nuisibles de la pénurie. Mikhail Gorbatchev, sensible à ce problème, a créé, peu après son arrivée au pouvoir, un corps d’inspecteur de la qualité. Mais une telle mesure ne semble pas pouvoir apporter une solution durable à un problème inhérent au système économique lui-même, de telle sorte que la pérestroïka vise plutôt à réformer l’ensemble du mode de fonctionnement de l’économie soviétique.

LE PLAN À L’ORIGINE DE LA PÉNURIE Si l’on comprend comment le producteur fait face à la pénurie et peut même l’aggraver éventuellement, il reste à expliquer quelle est l’origine de ce phénomène qui caractérise les économies socialistes. Outre les ajustements instantanés quotidiens, le producteur doit également effectuer un ajustement de court terme, qui résulte du plan valable pour les 3 à 12 mois à venir. Comment rétablir un plan avec une contrainte de ressources qui peut modifier à tout moment les prévisions ? Les rapports affirment toujours que les plans ont été exécutés. Pourtant, à priori, trois cas peuvent se présenter : 1) pas de contrainte de ressources, donc pas de substitution forcée. Le plan est “lâche”, 2) la contrainte de ressources est effective et le producteur a recours à une substitution forcée. Le plan est “tendu” mais réalisable. 3) En raison de la contrainte de ressources, le producteur effectue des ajustements ENSAE Alumni Annuaire 2019

qui ne lui permettent pas cependant des respecter les objectifs assignés dans le plan qui est alors “surtendu”. Dans le premier cas, le producteur ne rencontre aucune difficulté pour atteindre les objectifs du plan qui est trop lâche. Afin d’éviter que l’entreprise ne se contente alors de produire uniquement ce qui lui est demandé, le plan comporte une “limite inférieure de tolérance”, qui constitue le minimum de difficultés à imposer au producteur en termes de quantité d’output à produire, de technologie et d’inputs à utiliser pour satisfaire les objectifs du plan. De même, il existe une “limite supérieure de tolérance” qui indique le maximum de difficultés rencontrées par l’entreprise au delà duquel la production est complètement désorganisée et le plan surtendu. Ces limites, qui résultent de conventions et de pratiques sociales, sont fixées en général pour une dizaine d’années. Elles définissent une fourchette à l’intérieur de laquelle doit se situer la norme de production, d’inputs et de technologie que doit remplir le producteur. Cette norme comporte un certain nombre de contraintes de ressources pour l’entreprise afin que celle-ci ne cède pas à la facilité, mais des contraintes telles que les objectifs puissent être atteints. Il s’agit de déterminer une “tension normale et acceptable” du plan à partir d’un signal qui est la pénurie. Celle-ci apparaît en quelque sorte comme le critère d’efficacité du plan et donc comme un élément caractéristique du système économique, puisqu’elle est à la base de son fonctionnement, de la logique qui le sous-tend. La pénurie, critère d’efficacité : ce n’est pas le moindre des paradoxes.

INSTITUT DE FINANCE ET D’ÉCONOMIE DE LÉNINGRAD - FACULTÉ DE L’ADMINISTRATION ÉCONOMIQUE Entretien avec M.Anatoli Mikhailovitch LAIKHOV, Directeur de la Faculté La faculté de l’Administration Economique est une des plus importantes de l’Institut, elle compte environ 1000 étudiants. Deux types de spécialistes y sont formés : des dirigeants d’entreprises (“les managers soviétiques”) et des spécialistes en cybernétique économique. La réforme économique de 1965 dont le but était de simplifier le système de l’économie nationale s’est soldée par un échec. Elle a pourtant eu le mérite de mettre en évidence des lacunes au niveau de la direction de l’économie nationale : il y manquait des spécialistes capables de maîtriser les techniques modernes ainsi que les méthodes mathématiques. Aptitudes que possèdent maintenant les diplômés de la Faculté. De même, en Occident, les entreprises utilisent les services de sociétés de conseil, de telles sociétés n’existent pas en Union Soviétique, mais les spécialistes en cybernétique économique formés à la Faculté peuvent faire office de consultants. L’enseignement à la Faculté est divisé en trois grands blocs : Économie, Méthodes Mathématiques et Informatique. La scolarité est étalée sur cinq ans. L’admission à la Faculté a lieu après les études secondaires vers l’âge de 17 ans , elle comporte deux étapes successives : d’abord une sélection sur dossier (un dossier retenu pour trois postulants), puis un examen après lequel 70% des candidats (c’est à dire 150) sont finalement retenus. Des admissions parallèles sont possibles au cours du cycle d’études et l’accent est fortement porté sur la formation permanente et les cours du soir. La sélection en cours d’études est très faible puisque seuls 5% des élèves d’une promotion ne vont pas au bout des cinq ans. Le rôle des économistes en Union Soviétique a beaucoup changé depuis trois ans. Auparavant les économistes justifiaient les résultats de l’économie ex post, aujourd’hui on leur demande d’être des «économistes constructeurs». Les étudiants sont donc formés pour comprendre la situation économique et être capables d’intervenir. Selon une métaphore de LEONTIEFF, les économies occidentales sont des voiliers équipés de bonnes voiles mais qui ne vont pas dans la bonne direction, alors que l’économie de l’URSS va dans le bon sens, mais avec de mauvaises voiles. C’est la volonté de “changer les voiles” qui amène les réformes économiques que connaît aujourd’hui l’Union Soviétique. Les sociétés mixtes sont un bon exemple du pragmatisme en vigueur puisque le problème idéologique posé par l’exploitation de travailleurs 31


LE VOYAGE EN URSS DE 1989 soviétiques par le capital étranger sur le sol soviétique est dépassé par la remarque suivante : “il vaut mieux être exploité par le capital étranger et gagner beaucoup d’argent plutôt qu’être exploité par l’Etat et gagner peu.”

LE RÔLE DE LA MONNAIE La monnaie a un rôle plutôt passif dans le système soviétique. Si on fait abstraction de la multiplicité des échelons de la hiérarchie, on peut considérer le centre et deux entreprises. Comme en Occident, le produit va d’une entreprise à une autre, et la monnaie en sens inverse. Mais son rôle est passif au sens où cette livraison est ordonnée par le centre, la monnaie suit seulement le mouvement du produit. Ce n’est pas comme en France où l’entreprise fait la livraison parce qu’elle espère recevoir le prix du produit. En URSS, l’entreprise fait la livraison parce qu’on le lui a ordonné. Malgré cela, on ne peut pas dire que la monnaie soit superflue, pour deux raisons. D’abord, il faut comprendre que la monnaie joue un rôle d’agrégation. C’est important dans la planification, parce que souvent les produits des entreprises ne peuvent pas être agrégés qu’en prix. Les producteurs de charbon peuvent agréger en tonnes, les producteurs de voitures peuvent agréger conditionnellement au nombre de cylindres : mais il a des choses beaucoup plus compliquées. Et là, il faut utiliser la monnaie en tant que moyen d’agrégation. La deuxième raison est que la monnaie n’est pas totalement passive, puisque tous les matériaux ne sont pas rationnés centralement. Parfois, dans certaines périodes et dans certaines républiques, le rationnement peut toucher 90% des matériaux. Mais même alors, il reste 10% de matériaux avec lesquels on peut faire du commerce entre entreprises. Et enfin, la disponibilité de monnaie peut parfois limiter le mouvement même des matériaux rationnés que l’entreprise pourrait recevoir selon les ordres du centre. Cela pose la question de la limitation des dépenses car si la monnaie joue un rôle dans le système, la limitation des dépenses est nécessaire, sinon le système ne peut pas fonctionner. Bien sûr, en Occident, les entreprises ne dépensent que pour des choses rentables, c’est ce qui limite les dépenses. En Union Soviétique, elles sont limitées par le contrôle bureaucratique, par l’encadrement du crédit et par la planification centrale des profits. En système capitaliste, une entreprise a accès à un crédit à condition que la banque estime qu’elle est rentable. En Union Soviétique, par contre, c’est un contrôle bureaucratique par la “mono-banque”. Il faut encore mentionner une conséquence logique du système : les pénuries. Elles proviennent des ambiguïtés du système, entre autres choses celles autour du rôle de la monnaie. Dans le système capitaliste, les entreprises sont poussées à satisfaire la demande solvable. Le système socialiste est un peu orienté vers la satisfaction de cette demande, mais de façon ambiguë, parce que l’exécution des plans a la priorité. De ce fait, la demande solvable n’est que partiellement satisfaite. La planification centrale des livraisons ne résout pas le problème, elle le rend encore plus compliqué. Un système où il y a des pénuries massives rencontre d’énormes problèmes d’inefficacité. Le dernier problème à aborder est l’émancipation des subordonnés : il n’y a pas eu beaucoup de changements depuis l’impulsion de la planification stalinienne. David Grenick, un économiste américain, a étudié la “stabilité managériale” en URSS : dans la période stalinienne, les directeurs allaient travailler avec leur brosse à dents, craignant de dormir en prison le soir même. Dans les dernières années de période stalinienne, et plus tard, cela a beaucoup changé : la stabilité managériale est plus grande maintenant, plus grande même qu’aux États-Unis ! Non seulement les directeurs ne sont pas arrêtés ou fusillés, mais ils sont assez rarement démis de leur fonction. Les directeurs forment un groupe social avec une certaine autorité. Cela change la situation de subordination : on parle de consensualisme. Un système hiérarchique doit-il être fondé sur l’autorité absolue du centre ou sur ce consensualisme ? il est très facile de dire qu’une forte autorité permet un système meilleur, parce qu’on exécute tous les ordres dans la discipline. Le problème est que le centre ne sait pas exactement ce qu’il faut ordonner. Si l’on donne des ordres absolument idiots, ils seront exécutés. En Hongrie, dans la période stalinienne, on a fait les semailles sous un mètre de neige, parce qu’il fallait exécuter le plan en plein mois de Décembre. Donc, un système avec une forte autorité centrale est mauvais. Cependant, sous 32

Brejnev, alors qu’il n’y avait pas de forte autorité, ce système était également mauvais, parce qu’on était subordonné au supérieur sans l’être vraiment. Il y a un principe de fonctionnement du système qui est déficient et qui n’est remplacé par rien d’autre. On peut faire ses propres affaires, sans les contraintes de rentabilité que l’on rencontre en Occident. En conclusion, le système est très problématique et il n’est pas surprenant que ses inefficacités conduisent aux idées de réformes.

LES RÉFORMES GORBATCHEV Le premier diagnostic de M.Gorbatchev une fois arrivé au pouvoir en 1985 a été un constat sur l’inefficacité structurelle du système : contrairement aux courants réformateurs du passé, il y a vraiment chez lui une notion de crise du système. C’est l’ensemble du système qui est perçu comme problématique par les nouveaux dirigeants. Ils parlent d’un “mécanisme de freinage”, comme inhérent à ce système économique. Par conséquent, l’orientation n’est plus celle du perfectionnement d’un système jugé fondamentalement sain, ce qui avait été le cas des réformes antérieures, mais au contraire celle d’un changement profond. D’où la notion de perestroïka, de réforme radicale dans le domaine de l’économie. Les réformes du passé, surtout celles des années 1960, vont être critiquées par les nouveaux responsables comme ayant été tout à fait insuffisantes parce que partielles et parce que ne considérant pas le système dans sa totalité. La nouvelle réforme se veut globale dans un double sens : parce qu’elle va toucher à l’ensemble des mécanismes du système et aussi parce qu’elle va considérer que le changement du système économique n’est pas indépendant de transformations plus larges, plus profondes dans toute la société. C’est la réforme politique, le changement culturel, la transformation de la politique étrangère : toutes les dimensions mises en avant par Gorbatchev. Cette réforme économique ne s’est vraiment dessinée qu’un ou deux ans après l’arrivée de Gorbatchev au pouvoir. Il devient Premier Secrétaire du Parti en Mars 1985. 1985 et 1986 sont des années pendant lesquelles va émerger un discours réformistes, mais les mesures prises dans le domaine économique demeurent assez traditionnelles, voire autoritaires. On voit apparaître un contrôle de la qualité effectué par une nouvelle administration, la Gospriemka, chargée d’envoyer des inspecteurs dans les entreprises pour vérifier la qualité des produits. La campagne anti-alcoolique vise un contrôle social pour lutter contre un problème devenu gravissime tant sur le plan économique que sur le plan social. On assiste aussi au renouvellement des cadres qui va être important pendant la première période de Gorbatchev. Une série de chefs corrompus des régions, de cadres du parti à différents niveaux, changent. Enfin, on va opérer des réorganisations administratives : des ministères seront amalgamés de façon à devenir de “super-ministères”, notamment des l’agriculture, dans les constructions mécaniques. L’objectif est de simplifier la tâche du centre et de réduire le contrôle tatillon au jour le jour des administrations sur les unités de base. En fait, toutes ces mesures sont assez classiques, traditionnelles, et visent à utiliser un renforcement du contrôle central pour résoudre les problèmes d’inefficacité, de stagnation de la croissance, etc… Avant 1986-1987, les premiers observateurs des réformes étaient sceptiques et répétaient qu’en fait il s’agissait d’une perpétuation de ce qui avait déjà été fait précédemment. Sous Brejnev, il y avait eu des mini-réformes de ce genre, des tentatives répétées, qui évidemment ne changeaient rien au fond du problème. Par contre, au début de 1987, l’idée de réforme radicale est apparue, est-ce à la suite d’un apprentissage des gorbatcheviens, ou est-ce qu’il y avait une volonté de renforcer dans un premier temps les contrôles pour ensuite passer à la vraie réforme ? Le changement institutionnel, la vraie réforme, sont lancés à partir de 1987. Ainsi aujourd’hui, après deux à trois ans d’activité réformiste assez intense, des décrets, toute une série de lois ont été édictées. Ils visent un changement des institutions, et donc des comportements, avec l’objectif final de sortir le système de la crise structurelle, de retrouver une croissance perdue depuis presque une dizaine d’années. ENSAE Alumni Annuaire 2019



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