La ville comestible, un espoir en commun ?

AGROCAMPUS OUEST

Année universitaire : 2018-2019 Spécialité/Mention : Géographie

Mémoire de fin d’études

Spécialisation/Parcours : Paysage, Environnement, Participation et Société

La ville comestible, un espoir en commun ?

Par : Emile FERENCZI

Soutenu à Angers

le 19/09/2019

Devant le jury composé de : Président : Sebastien Caillault Maître de stage : Sébastien GOELZER Enseignant référent : Monique TOUBLANC

Les analyses et les conclusions de ce travail d'étudiant n'engagent que la responsabilité de son auteur et non celle d’AGROCAMPUS OUEST

Ce document est soumis aux conditions d’utilisation «Paternité-Pas d'Utilisation Commerciale-Pas de Modification 4.0 France» disponible en ligne http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/deed.fr

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

L’auteur du présent document vous autorise à le partager, reproduire, distribuer et communiquer selon les conditions suivantes :

Vous devez le citer en l’attribuant de la manière indiquée par l’auteur (mais pas d’une manière qui suggérerait qu’il approuve votre utilisation de l’œuvre).

Vous n’avez pas le droit d’utiliser ce document à des fins commerciales.

Vous n’avez pas le droit de le modifier, de le transformer ou de l’adapter.

Consulter la licence creative commons complète en français :

http://creativecommons.org/licences/by-nc-nd/2.0/fr/

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

2

REMERCIEMENTS Je tiens tout d’abord à remercier Monique Toublanc, enseignante en charge du suivi de mon mémoire, pour ses nombreux conseils qui m’ont permis de structurer ce travail, mais aussi pour les efforts, encouragements et attentions qu’elle m’a prodigués. Je souhaite aussi remercier du fond du coeur mes parents et mes amis pour leurs relectures critiques et constructives. Un remerciement tout particulier à l’équipe de Vergers Urbains, Alexia, Sabine, Gael, Maylis, Alana, Tiphaine, Renaud et j’en oublie. Ils m’ont appris depuis 6 mois une quantité infinie de choses, leur bonne humeur et leur joie de vivre m’ont convaincu que le travail dans une bonne ambiance est cent fois plus efficace. Merci à Sébastien Goelzer, mon tuteur de stage, mais aussi puit de savoir, sans qui il m’aurait été difficile de définir certains thèmes, à Juliette Crenn qui a su m’orienter vers des projets en lien avec mon sujet. Merci à Jérôme Woytasik pour son suivi et ses précieuses orientations de lecture. Je remercie aussi Véra Briole de m’avoir prouvé que les ateliers avec des enfants «c’est pas si terrible». Merci à Florence Ralaimongo pour tout le soutien administratif et son don pour donner le sourire. A Kevin Delaire et Hugo Jalet pour leur travail sur terrain qui m’a passionné.

Je souhaite aussi remercier l’ensemble de l’équipe de Toit-Vivant notamment Elodie, Clément et Jade pour leur coopération et leurs aide indispensables.

Enfin, merci aux nombreuses associations consultées dans le cadre de ce mémoire, d’avoir pris le temps de répondre à mes questions ou d’avoir accepté mes entretiens.

FERENCZI Emile FERENCZI Emile ville comestible, espoir commun La La ville comestible, un un espoir en en commun ? ?

3

TABLE DES MATIERES Introduction...................................................................................................1

I) Les Communs, définition..................................................................................2 1) Définition selon Elinor Orstrom..................................................................2 2) Gouvernance des Communs........................................................................3

II) Contextualisation de l’ «agriculture urbaine».......................................:......5

1) Une crise alimentaire planétaire..................................................................5 2) 50 ans d’agriculture pétrolière.....................................................................6 3) L’agriculture urbaine, un pas vers l’émancipation d’un système 4)

industriel.........................................................................................................7 Renforcer la résilience des villes face au changement climatique...........8

III) La «Ville Comestible»..................................................................................12 1) Définition du concept de «Ville comestible»..........................................12 2) «Ville comestible» et «Ville nourricière», deux concepts

étroitement lié mais bien différents.............................................................13 3) Semer la révolution..................................................................................14 4) Opposition à l’instrumentalisation politique - Réappropriation de l’espace public...........................................................................................15

IV) Utilisation du concept de «Communs» comme valeur

de la «Ville comestible»................................................................................18 2) Apprentissage et Méthodologie de mémoire........................................20

V) Exemple de projets d’agriculture urbaine lié à la notion de commun.......24 1) Saint-Bruno de Montarville :

Experience de «Ville nouricière» au Quebec...........................................24 2) Cuba : Agriculture urbaine d’embargo....................................................30 3) Todmorden : Les Incroyables Comestibles (Incredible Edible)..............36 4) Detroit : Mouvement «grassroots» et modèle privés...............................42 5) Parisculteurs : L’action publique Parisienne............................................48 6) Vergers Urbains : Vers la «Ville comestible»...........................................52 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

VI) Vergers Urbains - Organisation et fiches projets......................................56

1) Organisation - Une structure horizontale «floue»....................................57 2) Fonctionnement : Autogestion et décision collective.................................57 3) Projet : Jardin Louis Blanc...........................................................................60 4) Projet : Nouvel’R......................................................................................65 5) Projet : Projet : Végétalisons notre 18ème...............................................68 6) Projet : Micro ferme Jean Dame...............................................................71

Conclusion.........................................................................................................76 Sources et Bibliographie....................................................................................78

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

INTRODUCTION Les projets de végétalisation de la ville prennent actuellement un essor considérable.

L’agriculture urbaine et les jardins partagés portent de forts enjeux environnementaux, sociaux, économiques et politiques dans toutes les géographies et sous tous les régimes.

Ces projets sont portés par des initiatives privées, publiques, mixtes extrêmement variées, tous posent les questions (i) de l’implication des citadins-habitants eux-mêmes pour leur pérennité, (ii) des modalités de gestion de l’espace urbain commun et (iii) de la viabilité des modèles économiques.

La tragédie des communs est issue d’un article proposé en 1968 par Garett Hardin dans la revue Science. «La propriété commune non étatisée d’une ressource conduit nécessairement à sa ruine.» Cet article à conditionné les raisonnements économico-politiques de ces dernières décennies.

Le rationnel etait le suivant : si un pâturage est ouvert à tous, chaque éleveur aura intérêt à augmenter son troupeau se nourrissant dans ce pâturage, puisqu’il aura seul le bénéfice de la vente de l’animal supplémentaire, alors que l’épuisement possible du pâturage serait partagé par tous. Chacun va donc augmenter son troupeau et la conséquence inéluctable en est l’épuisement du pâturage.

La conclusion était simple : la propriété commune n’est pas durable, pour éviter la destruction d’une ressource il faut soit la diviser entre en parcelles individuelles soit la nationaliser.

Les seules solutions sont la propriété privée ou l’Etat. Avec l’effondrement des doctrines étatiques, ne reste plus que la propriété privée.

Une des biais de ce raisonnement vient de l’interprétation du terme de « commun » : selon qu’on l’identifie à un espace de complet libre accès que chacun peut (sur)exploiter à sa guise ou un espace géré par une communauté définie et limitée qui n’est pas nécessairement l’Etat, l’expérience et la conclusion sont radicalement différentes.

A la lumière de ces propositions, j’ai étudié des exemples aussi différents que Saint-Bruno (Canada), La Havane (Cuba), Detroit (Etats-Unis), Todmorden (Angleterre), et Paris, et cherché à caractériser pour plusieurs projets les communs et leur gouvernance. Plus particulièrement dans le cadre de mon stage au sein de l’association « Vergers Urbains », j’ai essayé de poser les questions suivantes : En quoi «les Communs» peuvent servir à repenser la question de l’agriculture urbaine et des jardins partagés, à travers la notion de « Ville comestible » ? Quels rôles ont ces espaces tant voulus par certains habitants ? Sont-ils utiles ou nécessaires dans une dynamique de transition vers une ville plus durable ?

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

1

I ) Les Communs, définition 1) Définition selon Elinor Orstrom Elinor Orstrom, grande théoricienne américaine, a initié toute une série de travaux sur le thème des « Communs » (« Commons » en anglais). Elle a montré l’importance de ces formes de propriété partagées à la fois pour des raisons écologiques, comme moyen de préserver les systèmes existants, et pour des raisons économiques. Ce modèle permettait des formes d’exploitation bien plus efficaces au total que les formes basées sur la propriété privée, mais aussi plus efficaces que la gestion par la puissance publique.

L’existence de Communs suppose les trois éléments suivants : - Une ressource, un accès partagé - Un ensemble d’acteurs, de communautés d’individus qui ont des droits sur ces ressources : Un droit d’accès, un droit de prélèvement, un droit d’usage, un droit de revente, etc...

L’idée du Commun c’est la fin de la propriété exclusive, c’est la propriété partagée.

- Une structure spécifique de gouvernance qui assure la préservation de la ressource à l’intérieur du Commun et sa qualité.

La combinaison de ces trois éléments définit un Commun.

Par opposition, les « biens communs » ne réunissent que deux de ces éléments : une ressource en accès partagé et des droits d’usage partagés. La ressource n’est pas gouvernée.

Parmi les cas typiques on trouve le climat, l’atmosphère, les océans etc..

Les raisons historiques de cette absence de gouvernance sont peut-être que ce type de ressources a été considéré comme infini ou inépuisable dans le passé.

Par ailleurs Elinor Orstrom associe aux Communs un « faisceau de droits » (droits d’accès, de gestion, exclusion, extraction, etc…) dont la mise en œuvre varie en fonction du bien mais aussi du contexte géographique ou social. Pour chaque Commun, la gouvernance devra être conçue de façon à respecter le faisceau de droits envisagé.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

2

2) Gouvernance des Communs Les biens communs peuvent être l’air, l’eau, les forêts, ou dans un domaine très différent la connaissance. Ce sont des biens qui ont une destination commune.

Si on considère par exemple un bâtiment municipal dans lequel on veut faire un centre de jeunesse, le faisceau de droit concernera les éléments de la communauté potentiellement intéressés par ce bâtiment, on trouvera les jeunes, la ville car elle est propriétaire du bâtiment, les gestionnaires qui vont construire et organiser le centre.

Tout ce qui touche la communauté sera envisagé sous l’angle du faisceau de droit. On prendra en compte l’ensemble des droits d’usages, et pas seulement les droits du propriétaire.

Elinor Orstrom propose les principes de gouvernance de Communs suivants : 1- Il faut que les limites de la ressource soient clairement définies (dans le cas d’un lac par exemple, on ne va pas forcement s’intéresser à toutes les rivières en amont) et que la communauté qui devra gérer cette ressource soit clairement identifiée.

2- Les règles d’appropriation doivent être cohérentes avec les conditions locales. On ne peut par exemple pas s’occuper d’un champ avec un type de technologie, si le pays ne la possède pas.

3- Il doit y avoir des dispositifs de choix collectif (votes, représentation, etc..), 4- Il faut une surveillance suffisante de la ressource pour décourager les tricheurs, 5- Il doit y avoir un système de sanctions graduelles qui soit choisi et appliqué par la communauté, 6- Il faut des mécanismes de résolution de conflits, 7- Une reconnaissance des droits d’organisation de la communauté est absolument nécessaire.

(Point particulièrement important car ce qui manque aujourd’hui autour de la notion de Commun c’est l’existence formelle et le respect de tels droits) Les règles de gouvernance doivent impérativement être déterminées par la communauté.

Ce n’est pas aux pouvoirs publics seuls mais bien à la communauté dans son ensemble de choisir ses propres règles pour la gestion de cette ressource.

Si cette notion de gouvernance revient au cœur du débat ces derniers temps, c’est peut-être parce qu’on se rend compte que nos ressources sont en danger et on se dit que cette notion de Commun pourrait être une solution à leur préservation.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

3

D’une certaine manière, les grandes négociations internationales telles que la COP21, ont pour objet de transformer des biens communs en Communs. Tant que les Communs sont de petite taille (un verger, une forêt..) on arrive à trouver une structure de gouvernance (domaines nationaux, communaux, copropriétés).Quand il s’agit de Communs mondiaux, comme l’atmosphère ou le climat c’est beaucoup plus compliqué car il faut articuler des instances et des réglementations mondiales, souvent en opposition avec les intérêts nationaux, locaux et privés, c’est rapidement une grande bataille.

Qu’en est-il de l’application du concept de Communs à l’espace urbain? Quels peuvent être les types de gouvernance adaptés aux différents projets d’agriculture urbaine ?

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

4

II) Contextualisation de l’ « agriculture urbaine » 1) Une crise alimentaire planétaire Le monde traverse une crise profonde. Pas seulement économique, mais écologique, culturelle, sociale et alimentaire. Non seulement en termes de qualité de nourriture mais aussi de quantité mal répartie. Beaucoup mangent trop et beaucoup d’autres ne mangent pas assez1. (ONU, PAM, 2018) La biodiversité végétale se restreint, les sols s’appauvrissent, l’urbanisation les zones de loisirs et les axes de transport prennent la place des meilleurs terrains agricoles les pâturages prennent la suite des cultures, la désertification est à l’œuvre dans de nombreuses géographies Dans le même temps dans les pays développés l’alimentation est désignée comme responsable de nouvelles maladies. Une alimentation trop riche en énergie, en graisses et en sucres libres, le « fast food », les « sodas » sont à l’origine de maladies chroniques telles que certains diabètes, les maladies cardiovasculaires et certains cancers, ainsi qu’au surpoids et à l’obésité qui en sont souvent les marqueurs précoces.

Par ailleurs, l’agriculture est dépendante des ressources en eau, dont la gestion est plus que préoccupante, et des ressources en énergie et en fertilisants, elles-mêmes largement dépendantes de la seule ressource pétrolière.

L’agriculture intensive est désignée comme responsable de nombreuses, voire de la majorité des pollutions : pollutions des eaux, de l’air et des sols, etc...

En parallèle les consommateurs, qui sont désormais majoritairement urbains, prennent conscience, ou sont sommés de prendre conscience, de leur responsabilité vis-à-vis de ce désastre. La plupart sont loin des processus de production, et l’émergence (ou la réapparition) de l’agriculture urbaine peut être vécue comme un moyen de reprise de contrôle d’une partie du processus, une opportunité historique d’expérimenter des modèles de production plus vertueux.

1 Selon un rapport conjoint de l’Union européenne, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies, environ 113 millions de personnes vivant dans 53 pays ont connu une situation d’insécurité alimentaire aigüe en 2018 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

5

2) 50 ans d’agriculture pétrolière Dans les pays les plus développés comme dans les pays en développement, la « révolution verte » à l’œuvre depuis les années 60 a consisté principalement à intensifier la production et utiliser des céréales à haut rendement. Cette agriculture industrialisée a fait massivement appel aux combustibles fossiles et au pétrole en particulier, pour soutenir la mécanisation (carburant pour les machines agricoles) et comme intrants dans les cultures (engrais, herbicides, pesticides).

L’idée maîtresse était la baisse des prix des produits par l’augmentation de la productivité, sa mise en œuvre ; la monoculture : d’immenses champs de la même chose. Les monocultures étant très vulnérables aux nuisibles, les pesticides en grandes quantités étaient nécessaires pour les défendre.

Des politiques nationales ou supra nationales ont été mises en place pour planifier ces monocultures et les rendre compétitives sur un plan international. On en est arrivés à une situation paradoxale où les monocultures sont subventionnées et non les cultures diversifiées, biaisant la compétitivité de ces dernières et accélérant de fait la consommation et la dépendance pétrolières. « On a récompensé les paysans pour planter des monocultures. Si vous faites pousser

du maïs, on vous donnera de l’argent pour faire pousser du soja et du maïs, mais si vous voulez planter des brocolis, ce terrain sera inéligible à toute subvention. Il est illégal de diversifier votre exploitation. »2 Autre conséquence des monocultures spécialisées, l’augmentation des besoins de transport et de conservation. En effet les marchés devenant mondiaux et de plus en plus éloignés des lieux de production, des proportions de plus en plus importantes des produits cultivés doivent être conservés et transportés générant encore davantage de besoins en énergie et notamment en pétrole…

2

Entretient avec un bénévole anonyme de la Guerilla Gardening France le 12/02/2019 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

6

3) L’agriculture urbaine, un pas vers l’émancipation d’un système industriel L’agriculture urbaine n’est pas une histoire récente, elle est aussi ancienne que l’histoire de la ville. Elle y a perduré jusqu’à l’époque moderne, auparavant les villes ont toujours mêlé habitations, artisanat et agriculture. Les formes de cette agriculture urbaine diffèrent selon les époques et les lieux, mais l’autonomie alimentaire (ou la quasi autonomie) des villes a longtemps constitué un objectif stratégique (résister aux sièges), mais aussi un choix économique lié au coût et aux risques du transport, ainsi qu’une nécessité sanitaire avant le développement des techniques de conservation.

C’est son absence qui est un phénomène récent. La délocalisation massive de l’agriculture a été favorisée par le développement des systèmes industriels depuis le 19ème siècle : mécanisation, extraction du charbon et du pétrole, développement de la chimie des engrais, des désherbants et des pesticides, construction des réseaux de transport. Le phénomène s’est intensifié avec la mondialisation des échanges et l’ouverture des marchés.

La constatation des dégâts causés par ces développements industriels et politiques amène aujourd’hui à tenter de repenser les processus agricoles.

L’agriculture urbaine apparaît comme une niche à priori moins contrainte par la concurrence mondiale que les autres secteurs agricoles. De plus la proximité effective de la production et de la consommation, la difficulté pratique à développer des processus intensifs, le fait que les pollutions sont directement subies par les habitantsconsommateurs, sont des caractéristiques permettant plus facilement l’émancipation vis-àvis des systèmes industriels.

Source : JLL Dully. Annexe.1

Système d’agriculture productiviste fortement polluant

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

7

4) Renforcer la résilience des villes face au changement climatique La majorité de la population mondiale habite désormais en zone urbaine et dépend pour sa subsistance d’une agriculture intensive éloignée du lieu de consommation et responsable d’une grande partie des émissions de gaz à effet de serre, que ce soit pour sa production, son transport, son conditionnement.

Un des points forts de l’agriculture urbaine c’est qu’elle contribue à lutter à la fois contre le réchauffement climatique global et contre le réchauffement local. En effet, la plantation d’espaces végétalisés dans la ville favorise la diminution des gaz à effets de serre et la réduction des ilots de chaleur urbains. On a donc un bon moyen d’allier l’amélioration de la qualité de vie avec l’amélioration de la qualité de notre air.

a) Lutte contre le réchauffement global L’agriculture urbaine n’existe que sans intrants chimiques, du moins dans l’idée, que ce soit pour des raisons de difficulté d’accès à ces produits (voir plus loin, l’exemple de Cuba) ou plus généralement parce que la proximité des habitants rend l’utilisation de tels produits et les risques sanitaires associés aujourd’hui inacceptables. Le « not in my backyard » est ici salvateur.

Par ailleurs, elle peut s’intégrer dans une stratégie circulaire en réemployant l’eau, les déchets en compostage et la chaleur de nos villes.

De plus, se nourrir de produits cultivés localement constitue un circuit ultra-court et ainsi évite à nos aliments de devoir parcourir plusieurs milliers de kilomètres avant d’arriver dans nos assiettes.

L’agriculture dans le monde représente près de 24% des émissions de gaz à effet de serre1, le développement de l’agriculture urbaine n’est pour l’instant pas considéré comme un des leviers principaux pour la réduction de ces émissions2, cependant il est évident que les circuits courts et l’intégration énergétique vont dans le bons sens.

Selon les meilleurs scénarios du GIEG, à la vue des futurs pics de chaleurs et des variations du climat, les perturbations auront certainement un impact plus que désastreux sur les conditions alimentaires dans les grandes villes.

1 Reporterre : l’agriculture est la source d’un quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre. 19 Fevrier 2015 2 Synthèse du rapport de l’étude réalisée par l’INRA pour le compte de l’ADEME, du MAAF et du MEDDE - Juillet 2013 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

8

Si on développe de façon plus poussée l’agriculture urbaine, nous offrons certainement la possibilité à nos villes de devenir plus résilientes face aux futures crises climatiques et économiques. C’est très important de s’y prendre des maintenant car ce changement ne se fera pas en un jour et au vu de l’augmentation significative de la population terrestre, nous serons en 2050 près de 9,6 milliards d’hommes sur terre dont 75% habiteront en ville.

b) Réduction des ilots de chaleur Rappel : les ilots de chaleur en ville sont dus à plusieurs facteurs : Matériaux et surfaces : Plus un matériau absorbe les rayons du soleil, plus il accumule et émet de chaleur (albédo1 faible). C’est le cas des surfaces composées de matières minérales.

Ainsi routes et parkings asphaltés, toits goudronnés, murs de briques etc. sont d’importants contributeurs à la formation des îlots de chaleur urbains.

Imperméabilisation et diminution du végétal : L’imperméabilisation du sol et la diminution des espaces végétalisés, entraînent la disparition de l’eau de surface en ville. Celle-ci ne peut donc plus jouer son rôle de rafraîchisseur de l’air par évaporation ou évapotranspiration.

Source : Conseil économique, social et environnemental Annexe.2

Schema illustrant les moyens les plus sain pour une ville durable

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

9

Chaleurs anthropiques : Les activités humaines sont également en cause. L’industrie, les transports ou encore la climatisation produisent énormément de chaleur qui vient s’additionner à la température ambiante.

Morphologie de l’aménagement : La dimension des bâtiments et l’espacement entre ceuxci (« canyons urbains ») ont des impacts sur la création d’ombre, la rétention de chaleur nocturne, les capacités de rafraîchissement des espaces urbains.

Un parc rafraîchit l’air de 1,5°C, et l’ombrage diminue de 10°C la température ressentie, une première solution peut consister à augmenter la proportion de surfaces ombragées dans la ville. Concrètement, cela passe par la plantation d’arbres, ayant accès à l’eau. Il est nécessaire simultanément de repenser le revêtement de manière à ce qu’il soit plus poreux, ou à aménager des tranchées pour qu’elles amènent l’eau à la végétation.

Comme toute végétalisation urbaine, l’agriculture diminue les effets d’ilots de chaleur avec deux conséquences positives : les canicules de plus en plus nombreuses seront plus supportables pour les citoyens, les besoins énergétiques de nos divers systèmes de refroidissement (air conditionnés, réfrigérateurs, ventilateurs, …) seront moindres.

Source : E6

Annexe.3

Classement d’aménagements du plus froid au plus chaud, Score ICU (Impact de Chaleur Urbain)

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

10

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

11

III) La ville Comestible 1) Définition du concept de « Ville comestible » Le concept de « Ville comestible » a été développé depuis plusieurs années par l’association Vergers Urbains, dans laquelle j’ai effectué mon stage. Cette association est intervenue dans plus de 70 projets dans l’espace public ou les espaces collectifs parisiens.

Le concept de Ville comestible vise précisément à mettre en application dans la mesure du possible le principe des Communs, tel que décrit plus haut, dans des projets très variés d’agriculture urbaine : « Cette agriculture des communs – ou ville comestible – permet de défendre une autre manière de « ménager » les territoires en faisant converger les questions alimentaires, environnementales, économiques ou sociales, jusqu’à « faire mouvement ». Un mouvement pour une ville comestible, faite pour et par ses habitants, qui laisse une plus large place à l’autogestion. Pour les citadins, il donne l’occasion de (re)gagner potentiellement une autonomie, un droit sur leur espace urbain, notamment sur l’espace public, et sur la manière de gérer les villes. Les jardins partagés ou collectifs, certaines micro-fermes, de nombreux porteurs de projets en agriculture urbaine… s’inscrivent dans cette logique, chacun à leur manière. »1 L’association fait l’analyse suivante : dans le passé une grande partie de l’espace privé était accessible à tous pour un usage commun (par exemple les « common lands »), l’industrialisation et le capitalisme ont interdit l’accès commun aux terres (mouvement des « enclosures »). Aujourd’hui on constate à la fois l’extension de la privatisation des terres, et l’apparition de nouveaux espaces, notamment des friches urbaines, suscitant chez les habitants des villes des initiatives de réappropriation, et permettant l’expérimentation de modèles communs. « Les communs urbains prennent souvent place au niveau de sites délaissés ou en période transitoire. Ce sont parfois sont des espaces de flou, parfois même sans propriétaire identifié. Cette situation singulière permet en général le développement d’usages nouveaux 1 La ville comestible : vers une nature cultivée au service des communs. Sebastien Goelzer.

8 Décembre 2017 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

12

ou alternatifs qui n’auraient pas facilement eu l’opportunité d’être développés ailleurs.

C’est souvent sur ces espaces que s’expérimente une « seconde nature », productrice de liens sociaux et d’aliments, où tous les bénéfices de l’agriculture urbaine sont exploités.

L’agriculture est ainsi un outil clé pour remettre au goût du jour le concept des communs, en tant qu’alternative aux systèmes dominants, manifestant un profond changement de paradigme. »2 La « Ville comestible » vise à rendre les habitants acteurs et parties prenantes de toutes les phases des projets d’agriculture urbaine, depuis la conception jusqu’à l’exploitation. Vergers Urbains questionne quotidiennement la place de l’agriculture en ville ainsi que l’importance et le rôle des citoyens dans la gouvernance de l’agriculture urbaine.

2) « Ville comestible » et « Ville nourricière », deux concepts étroitement liés mais bien différents. .

Le concept de « Ville nourricière » porte en lui l’idée de l’autonomie alimentaire des villes. « Une Ville nourricière est une ville qui agit sur les cinq axes du système alimentaire : la production, la transformation, la distribution, la consommation et la gestion des matières résiduelles afin d’assurer la durabilité de ce système essentiel à toute collectivité.3 » (UFA, 2018)

Source : Vivre en Ville Annexe.4

Représentation simplifiée du système alimentaire avec activités et exemples d’activités associées,

2 Sébastien Goelzer, « La ville comestible », Revue Sur-Mesure [En ligne], 2| 2017, mis en ligne le 19 mai 2017 3 Université francophone de l’autonomie alimentaire. 4 Mars 2018.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

13

L’émergence de nouvelles fermes urbaines et l’abandon de vastes territoires industriels à l’intérieur même de certaines villes (Roubaix, Detroit, Essen4, ..) a rendu envisageable l’autonomie alimentaire sous certaines conditions.

La pérennité de ce type de modèle est questionnée et les risques d’étalement urbain liés à cet objectif d’autonomie sont mis en évidence (l’urbanisation des villes citées plus haut et de Paris, par exemple sont très différents). On préfère souvent lui substituer un modèle où la ville et sa campagne environnante sont associées pour constituer un circuit économique un peu moins court que la Ville nourricière proprement dite, mais plus réaliste et abordable dans de nombreux cas. La Ville comestible fournira une partie seulement des ressources sans viser l’autonomie complète. Mais elle pose plus précision la question du modèle de gestion. Les deux approches sont complémentaires pour la pérennité du système alimentaire.

3) Semer la révolution Depuis les années 1970, l’agriculture urbaine est liée à des mouvements citoyens qui se sont développés en réponse à la crise économique engendrée par le premier choc pétrolier. A New York, Toronto ou Montréal, et de nombreuses villes, les habitants prennent en main des friches pour leur assurer leur propre subsistance et celle de leurs familles.

Plus récemment, l’agriculture urbaine s’est développée par défiance des citadins envers leur système d’approvisionnement alimentaire, par leur souhait de prendre le contrôle de la qualité des produits consommés et leur envie de retrouver des variétés satisfaisant leur goût.

On peut aussi voir dans ce développement une volonté de réappropriation par les citoyens des villes de leur territoire/terroir, au-delà de sa fonction de logement.

Face à la demande croissante des consommateurs, l’urgence écologique dans laquelle nous sommes et la nécessité de se réapproprier une nutrition saine, l’agriculture urbaine offre une nouvelle opportunité. Nombreux sont ceux qui se passionnent pour adapter les techniques de cultures rurales à la ville et tenter de renouer le lien entre producteur et consommateur

4

Voir exemples plus bas FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

14

Partout en France, des centaines d’associations, de start-ups et d’entreprises, portent des projets aussi ambitieux qu’originaux. La génération des agriculteurs urbains ne manque pas d’imagination quand il s’agit de produire ; high-tech (culture sous leds), low tech (culture sur paille), en sous-sol (champignonnière), sous serre, culture verticale (grimpante), sur les toits, dans des bacs, chez soi. « L’agriculture urbaine est un levier pour mettre en œuvre concrètement la transition écologique, indispensable à la résilience de nos sociétés face aux désordres environnementaux, sociaux et économiques à venir. Une transition qui se jouera en grande partie dans nos villes, mais qui nécessitera aussi de trouver une nouvelle symbiose entre le monde urbain et rural. »5

4) Opposition à l’instrumentalisation politique - Réappropriation de l’espace public.

Le développement de l’agriculture urbaine n’a échappé ni aux investisseurs privés ni aux institutions publiques. Des initiatives d’envergure telles que Parisculteurs, appel à projets public/privé lancé en 2016 par la Mairie de Paris et visant à promouvoir une agriculture intra-muros tournée vers les consommateurs locaux, prouvent la sensibilisation des pouvoirs publics au sujet.

Mais ce type d’initiatives est aussi vécu par certains acteurs comme une volonté de prise en main de l’agriculture urbaine par l’administration publique et/ou des acteurs privés, avec des risques de perte d’autonomie pour les citoyens. Les projets sélectionnés par Parisculteurs comportent en effet la mise à disposition de terrains ou surfaces aux lauréats des projets, et non à l’ensemble de la population.

De même le « permis de végétaliser » institué par la Ville de Paris à l’été 2015 autorise, après signature d’une charte, l’occupation à titre gratuit d’une partie du domaine public par les Parisiens afin de le végétaliser sous diverses formes, notamment fruitières et potagères.

5 L’agriculture urbaine doit rester un bien commun, pas une activité commerciale 7 janvier 2017.

Antoine Lagneau FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

15

Source : Ville de Paris

Annexe.5

Carte représentative de l’intégralité des permis de végétaliser réalisés jusqu’en 2019

Source : Vergers Urbains. Réalisation d’un bac de comestible pour un permis de végétaliser dans le 18iem arr.

Annexe.6

Le mouvement Guerilla Gardening s’oppose à cet encadrement politique de l’agriculture urbaine. Le collectif rejette « une nouvelle règlementation [faite] pour limiter l’appropriation spontanée, pour éviter que l’on puisse négocier le changement (…) [une réglementation] qui agit comme autant de freins à la participation, à l’action, à la créativité et à l’engagement réel de chaque individu ». (Guerilla Gerdening Avril 2019)

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

16

C’est la privatisation de facto des espaces urbains cultivables, à travers des contrats de location ou de mise à disposition « exclusive » par les pouvoirs publics qui est dénoncée.

En refusant cette exclusivité et défendant la notion de bien commun, Guerilla Gardening et d’autres mouvements similaires entendent défendre deux valeurs sociales applicables à l’agriculture urbaine : l’échange et le partage. « À travers l’opposition à la privatisation de l’espace public en général, c’est l’idée des communs qui est revisitée. Les communs font référence à ces paysans anglais qui, au XVIe siècle, se soulevèrent contre la politique des « enclosures » menée par de riches propriétaires fonciers, les privant de l’accès à des terres jusque-là gérées collectivement. En défendant l’espace public comme un bien commun à jardiner, il s’agit de renforcer une dimension essentielle de l’agriculture urbaine : l’échange et le partage. Deux notions qui se déclinent dans tous les compartiments de la vie quotidienne. »

Source : Guerilla Gardening. Schema démonstratif d’une nouvelle façon d’appréhender l’espace public Annexe.7

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

17

IV) Utilisation du concept de Communs comme valeur de la « ville comestible » On voit à travers des initiatives comme Parisculteurs ou les nombreuses autres initiatives recensées, que dans le domaine de l’agriculture urbaine, (et dans les démocraties), la puissance publique même locale, n’envisage presque jamais de gérer l’activité elle-même : aucun projet de fermes nationales ou municipales, exploitées par des fonctionnaires de l’état ou des collectivités locales n’a été identifié.

Les projets d’envergure sont tous, juridiquement, des contractualisations de location/mise à disposition d’une partie de l’espace public à un ou plusieurs acteurs privés. Donc des partenariats publics/privés qui présentent les risques liés à ce type de montage : la divergence d’intérêts entre les parties oblige à un contrat « parfait », précisant notamment précisément les objectifs, les conditions et la gouvernance du partenariat. Et permettant peut-être l’intervention de la communauté dans certaines décisions et surtout dans l’évolution du partenariat.

Il y aurait peut-être avantage à concevoir ces contrats en prenant en compte les principes de gouvernance des Communs listés au paragraphe A.2. A défaut « la répartition des risques entre partenaires » risque d’être « souvent inappropriée, incohérente et inefficace, cela au détriment du partenaire public »1 comme cela a été reproché à de nombreux PPP (autoroutes, aéroports, etc..).

D’autres risques sont liés à l’incertitude de la demande, de nombreux projets constatent que : « Les consommateurs sont à la recherche du prix le moins élevé et non du prix juste »2

Le Commun, ou du moins les valeurs qu’il véhicule, permet peut-être de dépasser certains clivages public/privé ou certaines fatalités du marché, et d’introduire ou du moins de mesurer dans ces projets les dimensions de : - Participation de la communauté - Education - Sensibilisation 1 2

Rapport 20 mars 2018 de la Cour des Comptes Européenne sur les PPP (Partenariats Publics Privés) Politique Ville nouricière 2017. Anik Fortin, urbaniste FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

18

- Entraide

Dans les descriptions de projets qui suivent, dont certains projets auxquels j’ai participé, je me suis donc attaché à identifier les points de gouvernance ou de valeurs communes, dans la mesure où ces informations sont disponibles.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

19

2) Apprentissage et méthodologie Ce stage m’a permis de nombreuses acquisitions, tant d’un point de vue professionnel que personnel. Il est en effet venu compléter ma formation avec des savoir-faire et des connaissances techniques mais aussi avec des savoir-être et une posture plus professionnelle.

1. Compétences professionnelles et savoir-faire • Dessin et conception de projets Une de mes principales missions était orientée sur l’invention et la conception de différents projets. Qu’ils soient en pied d’immeuble, sur l’espace public, dans des espaces privée comme des terrasses, ou même encore des parcs et jardins. L’idée ici était de réaliser des premières esquisses à la main pour le client ou les collectivités. Par la suite il fallait modeliser le projet par le biai de multiple logiciel tel que SketchUp, AutoCad, ArchiCad, Photoshop etc... Une fois la partie technique réalisée, il fallait monter une equipe dans l’association pour préparer et executer le chantier directement sur place. Ici j’avais tout ce dont j’ai toujours pu rêver. J’avais la possibilité de dessiner, mais aussi de pouvoir aller sur le terrain, mettre mes mains dans la terre pour réaliser le projet auquel j’avais pensé ces dernieres semaines. C’était formidable.

• Des compétences techniques Une partie des connaissances que j’ai pu acquérir sont des compétences techniques. Bien que parfois assez éloignées de l’urbanisme, il était important pour moi de participer à l’ensemble des actions de l’association. J’ai donc pu être présent lors de chantier de construction et de séances d’entretien de jardins et de vergers.

J’ai ainsi pu (re)découvrir des tech-

niques de jardinage (plantations, semis, boutures, traitements…) et acquérir quelques bases de permaculture, à la fois pour les arbres fruitiers et les plantes potagères. La démarche de la permaculture peut s’appliquer tant au moment de la conception d’un espace jardiné que de son entretien. J’ai également participé à des chantiers participatifs, qui étaient pour moi l’occasion de mobiliser de nouveaux publics mais aussi d’apprendre des techniques de construc-

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

20

tion en bois. Ainsi, j’ai pu voir l’ensemble du processus d’un projet et être plus à même de le retranscrire auprès des habitant-e-s lors des séances de mobilisation.

• Animation d’ateliers et participation à des réunions publiques Ces séances de mobilisation ont été un autre moment d’apprentissages pour moi. Cela m’a permis de réfléchir sur ma posture et ma manière de communiquer auprès des publics. J’ai notamment dû être vigilant à utiliser un vocabulaire adapté. Par exemple, le terme « végétalisation » n’était pas clair pour une majorité d’habitant-e-s, nous avons donc choisi de le remplacer par des termes plus quotidiens tels que « jardiner » ou « planter » que ce soit dans nos affiches ou dans notre discours. J’ai senti qu’au fur et à mesure de ces sessions de mobilisation, j’étais plus à l’aise et je réussissais d’ailleurs à faire adhérer plus de personnes au projet. Je pense que cela s’explique du fait que j’avais mieux intégré le fonctionnement de l’association ainsi que le projet en lui-même. Ma manière de communiquer et de m’exprimer pour présenter le projet s’est également améliorée progressivement.

J’ai aussi dû prendre

la parole lors de réunions inter-acteurs pour présenter les projets du budget participatif. Il fallait là aussi adapter le vocabulaire et le discours car tou-t-e-s les habitant-e-s n’avaient pas connaissance du cadre du projet ni du projet en lui-même.

Lors des réunions de co-construction auxquelles j’ai pu participé, j’ai aussi pu améliorer ce positionnement et être attentif à accorder suffisamment d’attention à chacun-e des habitant-e-s tout en entendant l’avis de tou-t-e-s. J’entends par là la nécessité de s’adapter à chaque personne, ainsi il faut parfois laisser une personne s’exprimer plus longtemps pour dérouler son opinion ou son besoin d’occuper un plus grand temps de parole. Face à ces personnes s’exprimant facilement en public, il faut veiller à ce que chacun-e puisse s’exprimer, y compris les personnes plus discrètes ou ayant l’impression que leur avis est moins intéressant que celui des autres. Pour cela, j’ai noté qu’il était plus satisfaisant d’être plusieurs membres de l’association afin de pouvoir prendre à part ces deux types de personnes et de pouvoir entendre les avis de tou-t-e-s. Amener ces personnes devant les panneaux d’expression ou devant les plans sur lesquels elles peuvent dessiner peut être un bon moyen d’enclencher la conversation sur le projet. J’ai appris lors de ces séances de co-conception et de mobilisation à être plus calme face à des avis négatifs et à des personnes parfois très réfractaires à notre projet. Je pense avoir en partie appris à répondre aux critiques face à un

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

21

projet que je porte de manière argumentée. L’objectif de ces discussions, parfois longues, avec des personnes fortement opposées aux projets, était non pas de les faire adhérer au projet mais simplement de s’assurer de leur compréhension et qu’il-elle-s ne feraient pas ensuite en sorte que le projet ne fonctionne pas.

• Gestion de projet Pour finir sur les apprentissages plutôt professionnels, j’ai appris à gérer plusieurs projets en même temps. Même si j’avais déjà eu à gérer des projets dans un cadre associatif, j’avais ici plus de responsabilités en étant dans un cadre professionnel. J’ai dû veiller à organiser mes plannings de façon à ce que la communication et la conception du projet soient réalisables et faire en sorte que cela soit gérable pour l’équipe (ne pas programmer plusieurs événements simultanément de façon à ce que l’équipe ne soit pas sur-mobilisée). J’ai également travaillé sur des budgets prévisionnels et ai pris conscience de la difficulté d’être rentable pour l’association tout en étant compétitif pour l’appel d’offre.

2. Compétences personnelles et savoir-être Au-delà de ces acquisitions professionnelles, j’ai aussi beaucoup appris sur le savoir-être et ai évolué personnellement. D’abord, j’ai travaillé à être plus flexible. J’ai dû apprendre à être disponible et patiente, notamment parce que l’organisation s’opérait de manière hebdomadaire, c’est-à-dire que la répartition de l’équipe se faisait le mardi midi pour la semaine et éventuellement pour deux semaines.

J’ai également dû être autonome en raison du mode

de gestion expliqué plus haut. Chaque membre de l’équipe s’organise en effet comme il le souhaite pour gérer son temps et ses missions. J’ai trouvé cela très intéressant car cela m’a permis de choisir les projets sur lesquels je voulais m’investir. Il m’est arrivé parfois d’être progressivement de moins en moins convaincu par les projets, notamment parce que j’ai pu voir les dégradations sur nos réalisations et les nuisances qu’elles entraînent pour certain-e-s habitant-e-s alors que les effets positifs se verront sur le long terme, ce qui demande d’être patient, une qualité qui me fait parfois default. Ce mode d’organisation m’a beaucoup appris sur l’importance du dialogue et sur les manières de communiquer au sein d’une équipe. En effet, comme la structure est présentée comme horizontale et non hiérarchique, on peut avoir l’impression que la parole est complètement libre alors qu’il semble encore plus important

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

22

d’être vigilant-e aux sensibilités de chacun-e. En dernier point, j’ai appris à me positionner dans une équipe aux rôles peu définis et ai eu pour cela la chance d’être très bien accompagnée par le chef de projet qui m’a fait confiance et m’a donné de plus en plus de missions et de responsabilités.

Pour la redaction de ce mémoire j’ai dû courir après un bon nombre d’informations et de témoignages. J’ai pu obtenir une grande majorité de ces derniers par mails (notamment ceux étant à l’exterieure de Paris et plus largement, de la France.). Certains des témoignages cités dans ce mémoire sont issus de personnes réclamant l’anonymat (Comme Incredible Edible, Incroyable Comestible). Durant ces entretients, il n’y avait pas de grille de questionnement fixe et répétitive à tous les contacts. J’ai, pour chacun d’entre eux écrit des questions et cherché à comprendre a quel point leur situation leur était propre. Comme la réappropriation de l’espace se veut spontanné, j’ai fais de même pour ma quête d’information A partir d’une trame commune basée sur les règles d’Elinor Orstrom, j’ai voulu, dans ce mémoire, decripter les différentes caracteristique de chaque projets. Qu’il soit situés à Paris dans le XVIIIe arrondissement, jusqu’à Cuba ou encore Détroit. L’idée était de définir si chacuns de ces projets respectaient les regles d’appartenance des « Communs », quels étaient les points communs, et jusqu’où la notion de commun pouvait aller.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

23

V) Exemples de projets d’agriculture urbaine – Communs ?

1) Saint-Bruno – Expérience de Ville nourricière au Québec a) Description du projet Au Québec, la ville de Saint-Bruno entame en 2015 une démarche de consultation publique pour créer une politique de « ville nourricière ». L’idée est de se doter d’une vision du développement de la ville pour les 20 prochaines années.

Source : Google Map.

Carte de contextualisation géographique de Saint-Bruno Annexe.8

Saint-Bruno comprend à la fois une zone agricole périurbaine importante et des industries de transformation alimentaires, mais les surfaces cultivées sont principalement dédiées aux cultures céréalières et les entreprises de transformation sont essentiellement des boulangeries industrielles. Les activités en « circuit court » sont marginales. La population agricole vieillit (les exploitants ont en moyenne 55,6 ans) et la relève est problématique en raison du prix des terres.

Un constat est fait par ailleurs que les habitants n’ont pas le sentiment d’appartenir à une communauté agricole, de leur côté les producteurs agricoles ne participent pas aux activités municipales. « Les mondes urbain et agricole évoluent et se transforment donc en vase clos » Les échanges de concertation ont montré l’existence d’un paradoxe entre l’importance du secteur agricole périurbain et une certaine difficulté pour s’approvisionner en fruits et légumes produit localement. « L’engagement de faire de Saint-Bruno une ville nourricière

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

24

permet d’intervenir sur l’ensemble des thématiques portées par la vision stratégique de la Mairie en favorisant un système alimentaire local plus durable. » 1

Source : Ville de Saint Bruno.

Carte des répartitions de secteurs constituant la ville de Saint Bruno Annexe.9

Quatre orientations sont proposées par la ville de Saint-Bruno : Le développement d’un système alimentaire local durable facilitant l’accès aux aliments sains et frais, Le soutien au développement de l’industrie agroalimentaire locale, de l’agriculture urbaine et de l’agrotourisme, La promotion d’une agriculture locale durable et des saines habitudes alimentaires à moindre impact environnemental et la protection La mise en valeur des terres agricoles en favorisant la diversité des productions et les pratiques respectueuses de l’environnement.

Le but est d’offrir des produits du terroir pour nourrir les citoyens de Saint-Bruno en concordance avec la politique de ville nourricière.

1

Comment devenir une ville nourricière, l’exemple de Saint-Bruno. Publié le 4 Mars 2018. L’autono-

mie Alimentaire des Villes.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

25

Source : Ville de Saint Bruno.

Carte de synthèse de la politique Ville Nourricière Annexe.10

La ville avait beaucoup d’atouts pour mettre en place cette politique de ville nourricière : 30% du territoire est en zone agricole, et les terres agricoles sont en périphérie du périmètre d’urbanisation La ville possède elle-même 70 hectares de terres agricoles On dénombre plusieurs producteurs maraîchers et des vignobles, ainsi que de nombreux arbres fruitiers.

L’IRDA (Institut de recherche et de développement en agroenvironnement) est implanté dans la région.

b) Caractéristiques de la gouvernance Dans la première année de sa politique, la ville s’est attachée à établir les structures et le cadre réglementaire permettant de mettre en place de nouvelles initiatives favorisant un système alimentaire durable. Un règlement autorisant les potagers en cour avant avait été adopté quelques années auparavant suite à des demandes des habitants. Une nouvelle classe d’usage « agriculture urbaine » a été définie et implémentée dans le nouveau règlement de zonage.

Cette classe inclut : la culture de céréales ou de plantes oléagineuses, de fruits, légumes et noix, les fermes pour la culture expérimentale, la floriculture ou l’horticulture ornementale, l’hydroponie, la pisciculture et l’aquaponie, l’apiculture et le microélevage de poules pondeuses. Cette classe peut constituer l’usage principal de toute zone industrielle ou parc

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

26

public, ou l’usage secondaire de certaines zones résidentielles.

Cet axe réglementaire constitue à la fois un moyen d’encadrer les nouvelles initiatives et de mobiliser certains habitants et associations.

La municipalité s’est également appuyée sur plusieurs initiatives préexistantes sur le territoire, dont un jardin communautaire, un marché public estival, des ateliers de jardinage.

La mairie est clairement à l’origine du projet et en assure aujourd’hui l’essentiel de la gouvernance, mais souhaiterait aujourd’hui s’appuyer davantage sur les acteurs locaux de l’agriculture, de l’élevage, sur les consommateurs et sur les initiatives citoyennes.

C’est sur le « marché public estival » que se concrétisent dès le début les actions mises en place avec la politique de «Ville nourricière».

Source : Ville de Saint Bruno.

Marché public, édition 2016, à la Place du Village Annexe.11

Pour démarrer cette démarche ce sont en premier lieu les producteurs locaux qui ont approvisionné le marché public, mais rapidement, les citoyens ont pris le relais. Dans la maison des jeunes, des parcelles ont été aménagées et un volet social et éducatif s’est développé. Au marché, les citadins qui avaient des surplus de légumes pouvaient échanger avec d’autres personnes ayant un surplus d’autres légumes ou fruits. A la manière d’un troc courtois. Des ruches ont été mises en place. Elles sont la propriété de la municipalité mais leur installation a été réalisée à l’initiative de la « tribune jeunesse » qui est un comité citoyen formé de jeunes. Les jeunes ont également contribué à l’installation d’élevages de poules sur le territoire. Ce projet s’inscrivait bien dans la politique mais ce sont eux qui ont initié le mouvement.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

27

Les initiatives en cours mettent en œuvre des partenariats et gouvernances variés. L’accent est mis par l’ensemble des acteurs sur l’évolution de la réglementation. Pour exemple, il aura fallu quatre ans d’efforts et de négociations à une entrepreneure en agriculture, Élizabeth Ménard, et son équipe pour trouver les partenaires intéressés et obtenir un droit d’exploitation d’un terrain de 43 hectares. Celui-ci appartenait à un promoteur immobilier qui a finalement accepté de le louer pendant 20 ans. L’objectif est de permettre à plusieurs jeunes de s’installer sur place pour assurer la plantation de fruits et légumes qui seront destinés à la vente. À ce jour, sept projets d’affaires ont été confirmés et devraient voir le jour dès que possible. Certains jeunes entrepreneurs bénéficient du programme d’aide à l’établissement de la Financière agricole, ce qui leur permettra de rester cinq ans sur le site.

Parmi eux, on retrouve des projets d’élevage d’espèces convenant à l’agriculture urbaine.

Ces projets ont été présentés au maire de Saint-Bruno qui doit les valider. Et il faudra attendre certaines autorisations avant d’entamer officiellement les activités. « La difficulté, ce sont les règlements. Il faut être patient et se donner le temps de bien faire les choses. Ça fait longtemps qu’il n’y a pas eu d’animaux à Saint-Bruno, mais on sent que la mairie est là pour nous aider », soutient Mme Ménard L’idée du projet de Ville nourricière tel qu’il a été mis en place est de renverser progressivement les cadres de l’action collective et faire que l’initiative soit portée par les citoyens.

«J’ai plusieurs conseils à donner aux municipalités qui veulent se doter d’une politique «Ville

Nourricière» ; le premier serait de travailler avec les citoyens, ce serait de bien répondre à leurs besoins et d’être en adéquation avec leurs souhaits. Le deuxième conseil que je peux leur donner, c’est de se doter d’un chargé de projet, il faut prendre le taureau par les cornes dès le départ, se doter d’une bonne vision avec la politique et ensuite avec les réglementations réfléchir à toutes les actions à faire.» 2

c) Résultats obtenus - enseignements Pour que le système alimentaire se transforme de façon pérenne, quatre aspects de transformations sont identifiés: la production, transformation / conservation, la distribution, la consommation. La ville a identifié ces enjeux et essaie d’impliquer les interlocuteurs privés ou publics locaux en charge de ces fonctions (agriculteurs, réseaux de distributions locaux, etc.).

A ce jour Saint-Bruno s’estime « en bonne posture pour mettre son projet de ville nourricière 2

Citation issue d’un mail avec Mme Isabelle Bérubé – Conseillère Municipale de St-Bruno FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

28

en œuvre ». Elle constate l’intérêt marqué de la population et la volonté politique de faire des questions alimentaires et agricoles une priorité.

Elle déplore cependant : « L’insuffisance des ressources humaines et financières consacrées au développement d’un système alimentaire durable; La perte des terres en culture présentes dans le périmètre d’urbanisation; Le manque d‘adhésion des acteurs du système alimentaire et de la population assurant la viabilité des initiatives; Le peu de marchands de produits frais et de proximité présents sur le marché public ; La faiblesse de l’offre de restauration de moyenne gamme offrant des choix santé et accessibles aux petits budgets ; Le peu de maillage entre les productions locales et les entreprises de transformation et de distribution présentes sur le territoire; Le manque de diffusion sur les initiatives de plantation de plantes comestibles dans l’espace municipal et l’invitation à la population d’en faire la récolte (arbre à noix); L‘absence de groupe d’achat présent sur le territoire : − L’offre de la popote roulante ne suffit pas à la demande; Les consommateurs sont à la recherche du prix le moins élevé et non du prix juste. »

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

29

2) Cuba – Agriculture urbaine d’embargo a) Description du projet Cuba est aujourd’hui un des grands acteurs de la production biologique.

Cuba était jusqu’à la révolution un producteur d’une monoculture, la canne à sucre. L’ile produisait de la nourriture pour 40 millions de personnes, mais uniquement sous forme de sucre. Avant la révolution, les Etats-Unis possédaient 67% des terres, les meilleures terres du pays. Il y avait 160 raffineries. Le sucre était exporté aux Etats Unis, et Cuba importait le riz, les fèves, et bien d’autres aliments : le maïs, le soja, le sorgho...

Source : FramePool Centre d’archive

Plantation de Canne à sucre à Cuba Annexe.12

Dans les années 60, au début de la révolution, il n’y avait pas d’autre alternative que de produire du sucre. Cuba a commencé à vendre du sucre sur les marchés de l’Europe de l’Est. Il y a même eu une croissance des raffineries de sucre. De l’Europe de l’Est arrivait du pétrole, de la graisse, du bois, des engrais etc.

Au tournant des années 1990, lors de l’effondrement du bloc soviétique, l’île de Cuba, déjà sous embargo de la part des États-Unis, s’est retrouvée sevrée des produits chimiques, sources d’énergie et matières premières qu’elle importait depuis trente ans de l’Union soviétique.

L’agriculture a dû faire face au manque de carburant, d’engrais chimiques et de pesticides.

Elle s’est alors massivement tournée vers la valorisation de ses ressources locales... et en

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

30

particulier vers l’agriculture biologique. Les habitants des villes de leur côté, face à des manques brutaux d’approvisionnement en nourriture, ont dû prendre leur survie en main.

Sur les balcons, les terrasses, les cours intérieures, les parkings ou les parcelles inoccupées, les citadins ont planté des haricots, des tomates, des bananes, tout ce qu’ils pouvaient, où ils pouvaient. En l’espace de deux ans sont apparus des fermes et des jardins dans tous les quartiers de La Havane.

Source : Colectivo Documetal Semilla

Un potager urbain personnel au coeur de la Havane Annexe.13

Le gouvernement a observé ce phénomène et plutôt que de réprimer ces efforts, a choisi de les faciliter / les encadrer. En 1994 le nouveau département d’état de l’agriculture urbaine a entrepris quelques actions clés :

(1) intégration du concept d’ « usufruit » dans la planification municipale, autorisant l’utilisation gratuite de terrains publics pour l’agriculture urbaine; (2) développement d’un réseau d’agents et de membres des communautés urbaines pour éduquer, encourager et évaluer les actions de jardinage dans leurs quartiers ; (3) création de “banques de graines” (magasins agricoles) pour fournir ressources et informations ; (4) développement d’une infrastructure de marchés producteurs dans le but de rendre les jardins financièrement viables.

C’est donc par nécessité, que la production de Cuba a été biologique et qu’elle a découvert

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

31

et appliqué les technologies alternatives. C’est par nécessité qu’elle a acquis l’expérience avec le temps. Non seulement elle a retrouvé son autonomie alimentaire en grande partie par cette conversion massive à l’agriculture biologique mais en outre elle a réinvesti des terrains urbains ou péri-urbains inutilisés. La possibilité de produire dans les villes, dans les zones urbaines a finalement été pour Cuba une alternative stratégique pour le développement de la production alimentaire.

Les potagers biologiques sont la base du programme d’agriculture urbaine de Cuba. Chaque « organoponico » se distingue selon la surface occupée mais la technologie qui s’applique a le même objectif partout : profiter au maximum des rendements naturels de la terre et mutualiser les différentes récoltes tout en s’épargnant les grandes dépenses en argent et en énergie.

L’objectif en cultivant, c’est de donner accès à la population, de la nourriture et de ne rien devoir acheter pour la maison. Le principal objectif de la production de ces petits potagers ou parcelles est avant tout l’autosuffisance. Ce qu’il y a en surplus est généralement vendu à un prix relativement bas, accessible à tous les gens qui vivent autour du potager. L’autre objectif, c’est que les légumes arrivent frais dans l’assiette. En effet, un produit aura tendance à perdre de sa qualité et pourrait être potentiellement sujet à des maladies s’il n’est pas consommé vite ou très bien protégé.

A l’orée de la ville, plusieurs petites entreprises locales, possèdent de plus larges terrains avec plusieurs collectifs de travailleurs avec un effectif variant entre 5 à 30 personnes. Toute la production est distribuée par des lieux de ventes disséminés un peu partout.

Source : Celine Porcheron. Annexe.14

Point de vente locale de fruits et légumes issu des entreprises locales d’agriculture urbaine

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

32

Par exemple le potager biologique de Playa est un collectif de 33 personnes. Le potager a une superficie de 2 hectares. Sur planche il y a 0.87 hectares, mais toutes les surfaces à l’extérieur des planches sont aussi utilisées pour limiter les pertes et ainsi augmenter les rendements et la production. Dans ce potager est produit une certaine quantité de légumes feuilles ainsi que des condiments et des bulbes. Ils obtiennent une production de 16 kg par mètre carré.

En 2016 plus de 135 tonnes de nourriture ont été produites contre 80 tonnes en 2012 et 65 tonnes en 2011. On peut observer une augmentation de la production au travers des années.

L’engrais est produit localement et le compost à base de résidus végétaux. Pour maintenir l’agriculture urbaine biologique et durable en bonne condition, il est indispensable d’avoir accès à des sources de matière organique. Dans le fond du potager a été planté du millet pour que les oiseaux aient de quoi se nourrir et ainsi laisser les cultures en bon état.

Source : Geoffrey Couanon

Annexe.15

Bande d’agriculture urbaine du collectif de Playa

b) Caractéristiques de la gouvernance Des citadins, devenus « parceleros », ont appris à produire leur nourriture, dans des petites exploitations agricoles et des milliers de petits jardins (« organoponicos ») au sein des villes, sur des terrains vagues, d’anciens parkings, des chantiers à l’abandon et parfois sur des espaces entre les routes. Ces terrains sont massivement des propriétés publiques cédées en usufruit (« usufructo ») gratuit ou non aux exploitants.

Le terme de l’usufruit, initialement de 10 ans selon le décret-loi 259, peut désormais être de 20 ans renouvelables pour les personnes physiques et indéterminé pour les personnes

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

33

morales à condition de « respecter les conditions convenues » En 2018, 2 millions d’hectares de terres sont exploitées sous ce régime. Le gouvernement et/ ou les autorités locales en assurent la supervision et fixent des objectifs.

«Il est important de noter que l’agriculture urbaine est un mouvement productif en expansion

à caractère populaire bien marqué. C’est à dire avec la participation de toute la population.

L’origine de ce mouvement a été la pratique régulière que toutes les communautés ont pratiquée depuis toujours pour produire des aliments proche de leur résidence. Et nous devons aussi nous rappeler des communautés primitives qui s’établissait toujours dans les lieux où ils pouvaient subvenir à leurs besoins alimentaire par la pêche, la chasse et postérieurement par l’agriculture. Ce qu’il y a de nouveau dans l’agriculture urbaine de Cuba c’est la forme de l’organisation que nous lui avons donné, les objectifs que nous lui avons donné et le niveau de participation de tous les acteurs, de tous les paliers du gouvernement et du parti et de tous les producteurs qui sont lié à ce mouvement. Nous avons réussi à lier autour de cet objectif de production alimentaire directement dans les villes et leur périphérie, tout ce qui a à voir avec la production, avec la transformation, avec la distribution des aliments de notre pays dans l’espace géographique des villes et de leur périphérie. La sensibilisation au niveau des habitudes alimentaires a presque été un prérequis afin de pouvoir produire un large choix de produits tout en assurant que la population puisse le consommer. Ce mouvement à créé du travail vacant ou non pour plus de 400 000 personnes.1» Il existe à Cuba plusieurs lieux éducatifs pour sensibiliser la population et les générations à venir au mouvement afin de ne pas perdre cet élan dans l’agriculture urbaine. En plus de la formation des producteurs et des différents voisins, les autorités travaillent avec les enfants.

Les écoles sont très impliquées, on y enseigne le travail en agriculture : ce qu’est une graine, quelle est son espèce, comment la reconnaitre, à quoi l’associer. Des ateliers semis sont organisés, un potager est à disposition pour que les enfants puissent voir le fruit. L’objectif est d’augmenter les productions avec des cultures propres, écologiques et ainsi assurer autant que possible l’alimentation du pays.

1 Citation issue d’un entretien par mail avec Nelson Companioni. Directeur de l’INIFAT (Instituto de Investigaciones Fundamentales en Agricultura Tropical) 11 Juin 2019.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

34

c) Résultats obtenus - enseignements En 1998 on comptait déjà plus de 8,000 exploitations officielles à La Havane – depuis les jardins individuels jusqu’aux grands établissements nationaux – tous biologiques (en l’absence d’importation ou de production locale de pesticides) et produisant environ 50% des légumes du pays. « Aujourd’hui, l’île compte près de 400 000 exploitations agricoles urbaines, qui couvrent quelque 70 000 hectares de terres jusqu’alors inutilisées et produisent plus de 1,5 millions de tonnes de légumes. La Havane est à même de fournir 50% de fruits et légumes bios à ses 2 200 000 habitants, le reste étant assuré par les coopératives de la périphérie. »2 Ces petites entreprises agricoles où un groupe de personnes produit des aliments sains pour les autres ont fait évoluer d’une certaine manière le mode vie urbain. « Si la vie en communauté a été touchée par l’instauration de l’agriculture urbaine, la culture a également connu des transformations. En effet, la ville est avant toute chose une production humaine. Ce sont donc bien les citadins, qui construisent et vivent la ville, qui impulsent sa gestion quotidienne. Dès lors que l’on évoque l’humain, l’identité et la culture affleurent rapidement. Et l’on ne peut que souligner que l’agriculture urbaine a un impact sur cette culture. Elle favorise effectivement les actions locales, et en conséquence permet une plus grande implication des populations dans des projets communs (Cruz, 2005), ce qui a pour effet de redynamiser la culture et l’identité régionales. L’investissement des populations signifie effectivement une (re)découverte du territoire, de l’architecture et de l’espace que l’on occupe collectivement, qui sont autant d’éléments clés de l’identité culturelle. » 3 Si les conditions à l’origine de l’exemple Cubain (terres initialement nationalisées, état communiste et situation d’embargo) sont difficilement transposables à d’autres systèmes ou d’autres géographies, l’amplitude de l’expérience permet au moins d’observer une réalité de l’agriculture urbaine en taille réelle et « à l’abri » de l’économie de marché.

2 Comment les Cubains ont converti leur île à l’agriculture biologique. Frédérique Basset (Kaizen) 22 Mai 2015 3 Janice Argaillot Université Grenoble Stendhal 3 - Émergence et impacts de l’agriculture urbaine à Cuba. Mémoire Master 2 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

35

3) Todmorden - Les Incroyables Comestibles (Incredible Edible) a) Description du projet Todmorden se situe à 27 km au Nord-Est de Manchester, au carrefour de trois vallées de la chaîne des Pennine et fait partie de l’ancienne frontière entre le Yorshire et le Lancashire.

Source : Google Map

Annexe.16

Contexte géographique de la ville de Tomorden en Angleterre

La population était en autosuffisance alimentaire par l’apport de l’agriculture locale des collines alentours depuis des siècles, avant que l’industrie ne s’établisse à Todmorden. La révolution industrielle est arrivée puis l’industrie est repartie et Todmorden a connu les conséquences de cette désindustrialisation. En 2008, une poignée de citoyens ont décidé de faire un retour aux sources. « Nous avons décidé d’expérimenter quelque chose de nouveau qui pourrait, peut-être,

offrir un meilleur avenir à notre ville, et rendre les gens plus conscients de l’importance de l’environnement en parlant de l’alimentation locale puisque chacun d’entre nous doit manger et que ce message semblait simple et pourrait nous unir. »1 Les premières actions ont consisté à planter des blettes et des poireaux en bordure des trottoirs du centre-ville, sans autorisation. Et puis, ont suivi des herbes aromatiques, des fruits et des légumes, dans des parcs ou dans des bacs, et, un peu plus tard, des vergers. Le nombre de 1 2019

Citation issue d’un entretien par mail avec Pam Warhurst, fondatrice des Incredible Edible 18 Juillet

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

36

personnes (toutes bénévoles) impliquées dans le projet a augmenté, notamment grâce au slogan « if you eat, you’re in ». Les différents organismes publics ont rapidement collaboré à ces initiatives : cantines des écoles ravitaillées par les potagers, cours de jardinage pour les enfants,… Enfin, plus progressivement, des institutions publiques ont mis à disposition une partie de leur patrimoine foncier. C’est notamment le cas de la gare, de la caserne des pompiers ou du commissariat local.

Les principales actions ou projets réalisés à ce jour à Todmorden sont les suivantes : - Jardins collectifs d’herbes aromatiques - Jardin de plantes médicinales - Cultures de légumes sur l’espace public à travers la ville - Plantation d’arbres fruitiers et vergers - Production d’œufs - Projet d’un centre de développement et d’apprentissage à Walsden - Construction d’habitat pour les abeilles (projet Bee Spoke) - Livre de recettes - Campagnes de sensibilisation et d’éducation

12 34

Source : Incredible Edible Annexe.17

1 ) Bac dans la rue de nourriture à partager (Paris 18iem) 2) Bacs de nourriture à partager devant le commissariat à Todmorden 3) Bacs de nourriture à partager sur la place de l’hotel de ville à Paris 4) Parcelle en pleine terre de nourriture à partager dans la campagne de Manchester FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

37

Incredible Edible organise par ailleurs chaque année 3 évènements d’autopromotion. Deux festivals, l’un au printemps (Spring Festival), l’autre en automne (Harvest Festival), et un cycle de conférences.

Le succès de ces actions de communication a été fulgurant : en moins de 5 ans le mouvement a retenu l’attention des médias et du public et la démarche a essaimé dans plusieurs parties du monde. On compte aujourd’hui plus de 1000 groupes sur 5 continents. On trouve ainsi des initiatives en Afrique, au Canada, en Australie, en Chine.

Source : Incredible Edible Network. Annexe.18

Charte d’etapes à suivre pour médiatiser et propager le mouvement

Les projets s’appuient sur 3 principes : La participation citoyenne : l’idée est de recréer du lien social mais aussi de responsabiliser chacun sur son empreinte environnementale, les actions ne sont réalisées que par des bénévoles.

L’éducation environnementale : le mouvement prétend enseigner une démarche de production écologique, mais également une démarche diététique, à l’école ou à la maison.

Le soutien à l’économie locale : cet aspect est parfois questionné dans la mesure où la mise à disposition gratuite de denrées alimentaires peut constituer une concurrence déloyale à des productions privées locales ; en revanche le mouvement a incontestablement créé, du moins

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

38

à Todmorden une nouvelle activité : le « Vegetable Tourism ». « La démarche vise à créer un nouvel art de vivre en redynamisant les échanges locaux par le partage de fruits et légumes bio cultivés par les habitants et offerts librement à tous. Les habitants sont invités à faire des plantations nourricières partout là où c’est possible, en se réappropriant l’espace public. Un petit panneau indique : « Nourriture à partager : servezvous librement, c’est gratuit ! ». De proche en proche, l’initiative permet de reconnecter les gens entre eux et à la terre nourricière. Les plantations partagées ont vocation à attirer l’attention sur l’enjeu du manger sain et local, et visent à mettre les territoires en marche vers l’autosuffisance alimentaire. » 2 b) Caractéristiques de la gouvernance L’association Incredible Edible Network est une association de droit anglais sans but lucratif, qui gère le label et la marque « Incredible Edible ». Sa mission est d’ « enrôler et d’inspirer » des « groupes Incredible Edible » indépendants, dans le monde entier. Chacun de ces groupes, correspondant plus ou moins à une communauté urbaine disposant de sa propre gouvernance et gérant un ou plusieurs projets. « Ce qui appartient à tout le monde, n’appartient à personne » 3

Source : Incredible Edible Network

2 3

Annexe.19

Charte fondamentale des incroyables comestibles

Page d’accueil déscriptive du site des Incredible Edible Charte fondamentale des Incredible Edible FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

39

Il n’y a pas de lien juridique entre les groupes.

L’association donne peu de prescriptions de gouvernance concernant le montage de chacun des projets, l’idée très générale néanmoins est l’occupation libre par tous et pour tous de l’espace public. Les projets de construction, la plantation, la maintenance et l’exploitation des terrains ne sont assurés que par des bénévoles. Le faisceau de droits n’est pas détaillé, les systèmes de choix, surveillance, sanctions, résolution de conflits ne sont pas décrits : « Les plantations comestibles sont directement implantées sur l’espace public ouvert à tous : chacun peut venir participer aux opérations de plantation, chacun peut participer à l’entretien de nos plantations, et chacun peut venir récolter … et ce ne sont pas forcément les mêmes personnes. Les Incroyables Comestibles ne plantent pas pour eux, mais pour la communauté humaine. » Une charte est éditée par l’association4. Cette charte est davantage une liste de convictions et de valeurs à partager qu’une description de gouvernance. c) Résultats obtenus - enseignements Si les Incroyables Comestibles ont incontestablement une qualité de communication supérieure à tous les autres mouvements équivalents, l’approche de la ville nourricière par l’initiative citoyenne (« bottom up ») semble correspondre à une demande de nombre de citadins, mais également rassurer nombre de collectivités. « Je pense que nous pourrions avoir une révolution entre nos mains. Nous voulons vraiment

que les gens attrapent le virus. C’est un mouvement populaire. Vous n’avez besoin d’aucune qualification particulière. Vous avez juste besoin de vous soucier de demain, de trouver votre propre petite pièce de puzzle et de la poser»5 Cependant le strict modèle du bénévolat risque de poser problème pour atteindre un objectif d’indépendance alimentaire des villes : il signifierait le retrait de l’agriculture du secteur marchand.

Le nombre d’initiatives portant la marque Incredible Edible est désormais tel qu’il est indispensable de suivre cette massification et d’observer comment ce mouvement a priori purement local pourra gérer sa « mondialisation »6.

5 6 2019

Charte fondamentale des Incredible Edible Citation issue d’un entretien par mail avec Mary Clear, fondatrice des Incredible Edible. 18 Juillet

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

40

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

41

4) Detroit - Mouvements « grassroots » et modèles privés

a) Contexte Là où le système économique et industriel s’est déjà effondré, comme à Detroit aux Etats-Unis ou à Todmorden en Angleterre, c’est grâce à la nourriture que les habitants ont commencé à écrire une nouvelle histoire à la fois pour vivre mieux mais aussi pour survivre à ces types de chocs.

Jusqu’aux années 1960, Detroit était le symbole d’une sorte de « monoculture industrielle », elle était le siège et le centre de production des plus grandes industries de l’époque : les industries automobiles. Faillites et délocalisations ont provoqué la fermeture des usines.

Quand les usines ont fermé, tous les emplois se sont envolés et une bonne partie des habitants avec. Des quartiers entiers ont été abandonnés, les centres commerciaux, bâtiments publics, services du centre-ville ont été désertés.

Source : Veronique Servat

Annexe.20

Vue aérienne prise en drone d’un quartier nord abandonné

A la suite de la crise immobilière de 2008, les immeubles et habitations ont perdu de leur valeur, la fuite et la paupérisation des habitants se sont aggravées et les ressources financières de la ville se sont effondrées. Le 18 juillet 2013, la ville de Détroit se déclare en faillite, sa dette atteint 18,5 milliards de dollars

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

42

Entre 1960 et aujourd’hui, Detroit est passé de 2 millions à moins de 700.000 habitants.

Detroit n’est pas seulement un désert en terme d’emplois (taux actuel de chômage est de 29% dans le centre-ville mais peut atteindre 50% dans certains quartiers), c’est aussi un désert en matière de transports en commun car c’est une ville qui a été pensé par l’automobile et pour l’automobile.

Une grande partie de la population a fui la ville. Dans les années 1990, non seulement les bâtiments ont été abandonnés mais il est devenu presque impossible de trouver des produits frais.

Source : Wikipedia.

Annexe.21

Ancienne usine automobile ravagée par la désindustrialisation

Alors les habitants qui n’avaient pas quitté Detroit, essentiellement les plus pauvres, et en très large majorité afro-américains, essaient de freiner la chute, et ont pris l’initiative de faire pousser eux même leur nourriture. De nombreux mouvements autonomes ou autogérés (mouvements «grassroots»7) se sont approprié des terrains désertés pour des projets d’agriculture urbaine. La Ville a également concédé de vastes terrains à des entreprises privées pour les verdir ou les exploiter.

Detroit s’étend sur 350 km2, soit à peu près 3 fois la taille de Paris intra-muros. Aujourd’hui il y a 150 km2 de jachère ou friches Les initiatives liées à l’agriculture urbaine prennent une multitude de formes et d’actions : développement d’une agriculture de proximité, création de circuits courts, marchés, ouverture 7 Le mouvement « grassroot » se base sur l’action collective locale pour générer des changements économiques ou politiques locaux ou plus vastes. Les organisations « grassroot » sont souvent associées à des mécanismes de décisions par la base (« bottom-up ») plutôt que par le sommet (« top-down ») et sont souvent considérées comme plus spontanées que les structures de pouvoir traditionnelles.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

43

de centres qui servent de la nourriture issue de l’agriculture urbaine à des centaines de familles dans le besoins.

Parmi les mouvements « grassroots » on peut citer Earthworks, organisation emblématique du mouvement d’agriculture urbaine à Detroit, fondée en 1997, qui exploite de nombreuses parcelles cultivées et propose des programmes éducatifs, est l’une des fermes urbaines les plus importantes de la ville et attire milliers de bénévoles. On peut citer parmis celle ci, Capushin South Kitchen qui est un centre servant la soupe populaire depuis plusieurs années ou encore MUFI (The Michigan Urban Farming Initiative’s).

Source : MUFI

Photographie de la ferme urbaine «The Michigan» en plein coeur urbain Annexe.22

Côté privé, le projet « Hantz Woodlands », conçu en 2009 comme un projet d’agriculture urbaine, a pour objet d’entretenir 1 500 parcelles représentant 0,6 km2 et d’y replanter des arbres.

L’organisation Greening of Detroit s’est spécialisée dans le fait de planter des arbres dans Detroit, sur les trottoirs mais aussi sur les espaces vacants. Faisant appel à la participation «communautaire» et massivement au bénévolat, elle organise régulièrement des séances de plantation d’arbres puis d’entretien des arbres.

b) Caractéristiques de la gouvernance En ce qui concerne les organisations « grassroots » tel Earthworks, les initiatives sont le plus souvent caractérisées par : - L’occupation illégale de biens sans maîtres (juridiquement ou dans l’usage) ou d’espaces

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

44

vacants, - La mise en culture ou l’exploitation par les organisations communautaires ou groupes informels d’habitants, avec participation de la « community », l’usage collectif par la présence simultanée des habitants et le travail en commun.

En ce qui concerne les biens privés, tels que le projet « Hantz Woodland » les modalités sont les suivantes : - L’occupation légale (propriété privée, location, autorisation d’occupation), - Les opérations de mise en culture ou de valorisation par des entités privées ou des organisations à but non lucratif - L’usage collectif par le libre accès aux habitants

Source : Stephen Wayne Kasica.

Modélisation en 3 dimensions du projet «Hantz Woodland» Annexe.23

On observe par ailleurs une coopération régulière entre les associations. Ainsi, la collaboration entre les fermes urbaines, la soupe populaire Capuchin Soup Kitchen et la banque alimentaire Gleaners, ainsi que la tenue par Earthworks ou Rising Pheasant Farms de stands alimentaires devant les parcelles ou au marché d’Eastern Market, préfigurent peutêtre un système alimentaire « circuit court » complet.

Pour de nombreuses organisations, l’acquisition « légale » de parcelles vacantes, outre son coût, présente de nombreuses difficultés. En effet identifier les propriétaires privés, les faire exproprier en pour raisons fiscales et négocier avec les pouvoirs publics est un processus long, compliqué et incertain. La plupart des organisations finissent par occuper illégalement les parcelles plutôt que de les acheter. La réappropriation n’est pas sécurisés, puisqu’un tiers

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

45

peut acquérir la parcelle.

L’acquisition de milliers de parcelles vacantes par l’entreprise agricole Hantz, originaire de Detroit, – autorisée officiellement par le Conseil municipal depuis décembre 2012 – a rencontré l’opposition farouche la communauté grassroots d’agriculture urbaine, redoutant l’accaparement des terres alors même que l’accès au foncier est problématique, mais critiquant également le modèle d’agriculture (« megafarm »). La Ville a du établir un certain nombre de conditions dans le contrat de vente avec Hantz et notamment que tout propriétaire souhaitant acquérir une parcelle vacante adjacente bénéficiait d’un tarif préférentiel de 200 dollars, contre 300 dollars pour Hantz. Suite à l’enquête menée auprès des habitants, le projet « Hantz Farms », a été renommé « Hantz Woodlands », le projet de megafarm a été remplacé par une plantation de 60 hectares répartie entre 1 500 parcelles Selon l’urbaniste Larissa Larsen, à Detroit, « Detroit n’est pas le bon endroit pour étudier la bonne gouvernance mais plutôt les efforts grassroots. »8

c) Quelques enseignements L’agriculture urbaine à Detroit compte aujourd’hui environ 1600 fermes et jardins bio et mobilise 20.000 Volontaires. 2400 hectares de friches peuvent encore être cultivés. Tous ces lieux ont un but commun ; créer une communauté résiliente aux événements extérieurs, imperméable, une volonté d’autonomie.

Detroit voit s’affronter de multiples modèles d’appropriation dans un contexte de perte de contrôle par la puissance publique. « Le modèle de squat d’espaces vacants pour le jardinage ou l’agriculture urbaine à Detroit

est particulièrement intéressant. Il témoigne des formes les plus radicales de réappropriation du territoire : elles seules semblent guidées par la quête d’un commun, au sens d’un principe qui oriente les mouvements de contestation et de dépassement du capitalisme. Ce qui est alors créé ne relève plus simplement du « lieu », mais de normes morales qui règlent les actions d’habitants et de militants à la recherche d’alternatives politiques. »9

8 Larissa Larsen – Entretien 2012 9 Flaminia Paddeu. De la crise urbaine à la réappropriation du territoire. Mobilisations civiques pour la justice environnementale et alimentaire dans les quartiers défavorisés de Detroit et du Bronx à New York.. Géographie. Université Paris 4 Sorbonne, 2015. Français. fftel-01283583 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

46

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

47

5) Parisculteurs – L’action publique Parisienne a) Description du projet C’est en 2014 que la Ville de Paris se donne une mission d’agriculture urbaine et crée le programme « Parisculteurs » avec pour objectif la production de fruits, légumes, fleurs, aromates, miel intra-muros.

Source : Emile Ferenczi

Carte géographique des 33 lauréats de la saison 3 des Paris-Culteurs Annexe.24

« Le retour de l’agriculture dans nos villes répond à nombre de nos défis : lutter contre l’érosion de la biodiversité et créer des trames vertes au cœur des villes denses, limiter les émissions des gaz à effet de serre en développant des circuits courts de proximité, créer des emplois. C’est surtout faire la ville ensemble et dynamiser les liens sociaux. Cultiver la ville participe donc pleinement à la résilience de notre capitale. » Cent hectares sont prévus par Paris pour végétaliser la ville, dont un tiers alloué à l’agriculture urbaine soit 33 hectares d’agriculture pour nourrir Paris.

Organisé sous forme d’appels à projets, le programme a pour ambition de développer des initiatives d’agriculture urbaine et de végétalisation sur les toits, les façades et les murs. Pour chaque projet lauréat, un terrain propriété de la Ville est mis à disposition d’un « occupant ».

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

48

Les Parisculteurs veulent aussi renforcer la synergie inter-territoires grâce à de nombreux partenariats avec les banlieues parisiennes.

Les appels à projets n’offrent pas simplement de nouvelles surfaces de culture, ils accompagnent aussi les projets au cours de leur développement en tenant à disposition des porteurs des conseils et des suggestions.

C’est ainsi que la ville de Paris a créé une fiche synthétisant les points d’attention; elle mentionne les référentiels détaillés auxquels se référer et, le cas échéant, les interlocuteurs experts vers qui se tourner. Créée lors de la première saison des Parisculteurs, une « boîte à idée » doit voir son contenu alimenté et modifié au fil du temps en fonction des pratiques, des échecs et des succès du mouvement. « Cette boîte à outils a été élaborée par la Direction des Espaces Verts et de l’Environnement de la Ville de Paris, en collaboration avec plusieurs corps d’experts, dont les relectures, remarques et suggestions ont été précieuses : l’Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture (APCA), les Directions du Patrimoine et de l’Architecture, de la Propreté et de l’Eau et de l’Urbanisme de la Ville de Paris, l’ITAVI, les chercheuses du programme REFUGE d’AgroParisTech, ainsi que Structure & Réhabilitation. »1 Outre le programme Parisculteurs, la mairie de Paris propose d’autres approches pour végétaliser la ville comme le « Permis de végétaliser ». Si un citoyen souhaite végétaliser un pied d’arbre, il peut le faire de manière officielle et faire une demande de permis de végétaliser auprès de la mairie.

b) Caractéristiques de la Gouvernance Dans le cas des sites municipaux, le contrat de mise à disposition du terrain est une convention d’occupation du domaine public (CODP) ou une convention dont la nature juridique est adaptée au domaine privé de la Ville de Paris en fonction de l’objet du projet. Une redevance est fixée pour la durée de la convention selon le barème fixé par le Conseil de Paris L’occupant peut présenter des sous-occupants afin de leur permettre d’occuper une partie du site pour l’exercice d’activités compatibles avec la destination du site.

Dans le cas des autres bailleurs sociaux des conventions de location du même type sont proposées entre le bailleur et l’occupant.

On est donc assez loin d’une gouvernance de type « Communs ».

1

Boîte à outils – Parisculteurs. Mise à jour février 2019 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

49

c) Résultats obtenus - enseignements Les deux premières « saisons » de Parisculteurs ont suscité de nombreuses candidatures et la Ville de Paris a publié de nouveaux appels à projets. 29 sites ont été proposés pour la saison 1, 40 sites pour la saison 2, 21 pour la saison 3.

1

2

4

3

5

6

Source : Parisculteur saison 3

1) Projet de la Résidence Montempoivre (12e arr). Porteur : Urbanescence 2) Projet Crèche Max Jacob (13e arr). Porteur : Whole 3) Hôtel logistique de Vitry-sur-Seine (94400). Porteur : Cultures en ville, Prédici, La mine.

4)Projet des Fermiers Genereux (18e arr.). Porteur : Vergers Urbains 5) Projet de la Voie BP17 (17e arr.). Porteur : Association Les Hauts de Malesherbes 6) Tronçon Rungis (17e arr.). Porteur : Urbanescence, Maison 13 Solidaire, Sylki Annexe.25

Les projets sont nombreux mais pas toujours fructueux car les obstacles à l’installation sont multiples. L’accessibilité, le lien avec le propriétaire du site, si c’est une toiture, un bailleur social, une entreprise privé etc.. Il y a des cas où les sites sont en construction et d’autres cas où ce sont des sites à vocation constructible ou éphémère. « C’est compliqué car on invente. Ça n’existait pas l’agriculture urbaine il y a 4 ans, du moins pas telle qu’on la connait aujourd’hui. Il faut faire face à différentes problématiques: comment on dépose un permis de construire, comment on négocie avec les pompiers, comment on négocie avec les architectes de sécurité, faut-il créer des escaliers extérieurs,

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

50

comment on gère l’étanchéité, ... » 2 Aujourd’hui en 2019, à la troisième saison on remarque davantage de projets sur les toits que les années précédentes. Pour cette édition, les bailleurs sociaux engagés sont plus nombreux: Logirep, Elogie-Siemp, France Habitation, la RIVP, Paris Habitat mais aussi la Sogaris, Universcience et la SNCF. Sont également accueillis de nouveaux partenaires comme les jardineries Truffaut, l’association chemins d’espérance, le Ministère de l’Économie et des Finances de Bercy et le Syctom.

La saison 3 des Parisculteurs renforce également les synergies entre territoires. Grâce au partenariat noué avec le Conseil départemental de la Seine Saint-Denis et aux propositions d’autres partenaires de la métropole du Grand Paris, ce sont de nouveaux territoires qui participent à l’aventure. Ainsi, ce sont aussi 9 sites proposés dans 8 communes (Aubervilliers, La Courneuve, Montreuil, Pantin, Saint-Denis, Vitry-sur-Seine, Ivry-sur-Seine, Fresnes), qui s’ajoutent aux sites de Pantin et Saint-Denis, déjà proposés lors de la Saison 2.

Mais le programme ne concerne pas seulement les bailleurs, il doit concerner avant tout les territoires et leurs habitants. Le but est de les relier entre eux, les connecter pour qu’ils opèrent ensemble dans le développement de projet visant le retour de l’abondance végétale en ville. Il y a notamment des partenariats avec la Chambre d’agriculture d’Ile de France et les acteurs du monde agricole francilien. Il est important de garder toujours à l’esprit que l’agriculture urbaine ne se développera pas en opposition mais bien en complémentarité avec toutes les agricultures notamment les agricultures périurbaines.

2

Citation d’Anne Hidalgo – Maire de Paris - Fevrier 2018 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

51

6) Vergers Urbains – vers la ville comestible a) Description du projet Vergers Urbain est une association à but non lucratif créée en 2013 dans le quartier de la Chapelle à Paris, qui s’est étendue depuis au-delà du 18ème arrondissement. Elle intervient dans les espaces communs de la ville et compte aujourd’hui plus de 70 projets à son actif.

C’est dans cette structure que j’ai effectué un stage de master 2 de six mois.

L’association Vergers Urbains porte l’ambition de rendre la ville comestible partout où c’est possible et toujours en incluant les habitants. Les objectifs sont à la fois écologiques et sociaux : cela permet d’investir davantage des espaces verts existants, de créer de nouveaux espaces végétalisés et de favoriser l’appropriation d’espaces urbains collectifs. Ces objectifs peuvent être développés dans l’ensemble de la ville. L’association propose alors des actions de végétalisation dans toutes les strates urbaines, depuis les toits et jusque dans les rues : L’association s’est formée en 2012 dans le quartier La Chapelle. Son local et le centre névralgique de ses projets se trouvent donc dans le 18ème. Un projet de jardin partagé (Comm’Un Jardin) et un projet de jardinières de rue (Le Jardin Mobile) sont alors portés par l’association, autour de la Halle Pajol. De nombreuses initiatives de végétalisation encadrées par l’association fleurissent également un peu partout dans cet arrondissement.

Source : Emile Ferenczi

Annexe.26

Photographie de la place Pajol et du jardin mobile

L’association s’est progressivement développée et les projets sont désormais multiples. On peut distinguer trois grands types principaux :

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

52

- L’accompagnement de projets de végétalisation portés par des habitants. Il peut alors s’agir de jardins partagés en pied d’immeuble en partenariat avec des bailleurs sociaux et des habitants de ces résidences. Vergers Urbains peut également aider des habitants à végétaliser leur rue au travers de démarches telles que les « permis de végétaliser », les appels à projets « végétalisons notre 18ème » et « végétalisons le 14ème » ou de toute autre initiative d’habitants.

- Des projets de végétalisation portés par l’association. C’est le cas du jardin partagé «Comm’Un Jardin» et des jardinières de rue du «Jardin Mobile» situés de chaque côté de la Halle Pajol ou encore du verger partagé dans le square Emmanuel Fleury dans le 20e.

Source : Emile Ferenczi, Franck Beau

Photographie de Comm’un Jardin à la Halle Pajol Annexe.27

C’est aussi le cas des projets ParisCulteurs (voir chapitre spécifique). Dans ces quelques projets, l’équipe de Vergers Urbains est à l’initiative de la création des espaces, les entretient et les anime. Outre des ateliers de sensibilisation ouverts au public, cela permet à l’association d’expérimenter des techniques de permaculture, de se former elle et ses bénévoles, de mettre en pratique le concept de forêt fruitière et de cultiver des fruitiers dans des pépinières afin de les planter dans d’autres projets.

- Des missions de sensibilisation. L’équipe de Vergers Urbains intervient également lors d’évènements, de fêtes de quartier ou dans des écoles afin de sensibiliser à l’écologie et de former au jardinage.

Des exemples détaillés de projets sont donnés en annexe.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

53

b) Caractéristiques de la gouvernance La gouvernance de chacun des projets dépend du contexte et de l’encadrement réglementaire (il peut s’agir de projets «Parisculteurs » ou directement pilotés par des habitants).

Dans le mesure du possible, l’association tente de promouvoir une vision de communs autogérés : « La ville comestible fait face à d’immenses défis en tant qu’agriculture en mouvement : celui de réparer les maux de la ville, de réconcilier l’homme avec la nature et avec ses semblables, de ramener les citadins dans l’espace public pour qu’ils en redeviennent acteurs, de ralentir les rythmes de vie pour donner du temps à d’autres initiatives, de vivre aux rythmes des saisons.

Source : Sebastien Goelzer

Chantiers en réalisation avec l’implication importante des habitants Annexe.28

Ces défis ne pourront être relevés que par une lutte contre les nouvelles enclosures physiques

ou mentales, et par un retour aux communs pour les gérer de manière inclusive. À travers la ville comestible, c’est une remise en cause du fonctionnement individualiste de la société actuelle et une réinvention des pratiques collectives qui se joue »1

1 Sébastien Goelzer, « La ville comestible », Revue Sur-Mesure [En ligne], 2| 2017, mis en ligne le 19 mai 2017, FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

54

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

55

VI) Vergers Urbains – Organisation et fiches projets 1) Organisation – une structure horizontale « floue » L’équipe de Vergers Urbains est actuellement composée de 5 salariés autour desquels gravitent beaucoup de contrats courts et de bénévoles. A titre d’exemple, pendant ma période de stage, 15 stagiaires, volontaires en service civique et apprentis sont arrivés, et parfois repartis. Tous, ayant des formations, des parcours différents.

L’équipe « permanente » comprend : Un président qui assure la cohérence et le développement de l’association. Il se charge de trouver de nouveaux appels d’offre afin que l’équipe ait toujours du travail et tout le matériel nécessaire. Il a une vision d’ensemble de l’association et s’investit dans certains projets en tant que paysagiste ou constructeur.

Une médiatrice locale qui gère les projets dans le 18e : le jardin partagé Comm’Un Jardin, des interventions dans des écoles, l’accompagnement de projets en pied d’immeubles...

Une chargée de projet et de coordination d’équipe : elle suit tous les projets en pieds d’immeuble (en-dehors du 18e) ainsi que quelques jardins ou vergers partagés dans lesquels l’association intervient ponctuellement (une fois par mois dans le cas du Verger Fleury par exemple). Elle gère également une partie de la coordination de l’équipe (en partie l’accueil de stagiaires, la répartition de l’équipe sur les divers chantiers et événements, la gestion du matériel pendant les évènements…). Ce rôle de coordinatrice s’est imposé progressivement dans son travail mais n’était pas son domaine de compétence initial. Cette position lui a été donnée au fur et à mesure de son investissement et du développement de l’association, qui nécessitait une plus grande organisation. Elle s’occupe aussi parfois d’animer des ateliers de sensibilisation et de mobilisation des habitant-e-s.

Un ou des constructeurs (suivant la période) : c’est principalement un membre de l’association qui est en charge de la construction. Il s’occupe de préparer le bois dans un autre local de l’association, le CUBE. Il gère également les commandes, la conception de constructions et encadre les chantiers participatifs et certains ateliers de plantations.

Une responsable administratif. Elle va s’occuper de toute la partie de gestion. Elle peut aussi bien s’occuper de la partie finance de l’association (Factures, bon de commande etc..), que de l’intégration des services civiques ou des stagiaires.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

56

Les stagiaires, apprentis et volontaires en service civique peuvent avoir des missions très variées. Elle-il-s ont des tâches de bureau et de terrain.

Des « électrons libres », souvent membres fondateurs de l’association, viennent aider ponctuellement à la fois dans la gestion de l’association et lors de missions de terrain, selon leurs compétences et leurs disponibilités.

2) Fonctionnement : autogestion et décision collective Je pense qu’il est important de préciser le fonctionnement de l’association. La plupart des membres la présentent en effet comme « horizontale » et tentent d’appliquer des modes de décision par holacratie ou sociocratie. Il y a là une volonté de faire fonctionner la structure sans pouvoir centralisé, chacun doit s’autogérer et la prise de décision doit être collective.

Globalement, pour s’organiser, l’association opère de cette manière : Une réunion mensuelle où sont conviés les membres de l’équipe (salariés, freelances, stagiaires, apprentis et services civiques), les bénévoles et membres du conseil d’administration. Cela permet de faire un point sur l’avancement des projets en cours.

Une réunion hebdomadaire entre les membres de l’équipe pour répartir les membres et le matériel en fonction des évènements prévus.

Bien qu’extrêmement intéressant du point de vue de l’autonomie et de la liberté des salariés, j’ai pu constater que ce mode d’organisation, tout du moins au sein de Vergers Urbains, posait quelques problèmes et entraînait des frustrations.

Il n’y a pas réellement de chef, chacun est amené à donner son avis sur les projets et à autogérer son temps de travail. En raison de ce mode d’organisation un peu particulier et du turn-over très important et, il est difficile de décrire le fonctionnement et la structure avec précision, ou de comprendre les missions de chacun, ce qui peut poser problème aux partenaires de projets, et aux potentiels bénévoles.

En ce qui me concerne, à mon arrivée, l’ensemble des activités de l’association m’a été présenté et on m’a demandé sur quelles missions j’avais envie de m’investir. Il n’y avait pas de fiche de poste prédéfinie, c’était à moi de créer mon propre poste. Cela est très intéressant car ça m’a permis dans un premier temps de découvrir toutes les activités de l’association pour progressivement me recentrer sur le projet qui correspondait le plus à ma formation d’architecte paysagiste et à mes envies.

Je pense que cela peut toutefois poser certains problèmes : d’une part parce que certaines

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

57

missions ne sont pas pourvues, l’association ayant une mauvaise connaissance de ses besoins et d’autre part parce qu’il peut être déroutant pour certain(es) stagiaires de ne pas avoir de tâches bien circonscrites.

J’ai pour ma part choisi en priorité les tâches de terrain plutôt que les tâches de conception que j’avais davantage l’habitude de faire. Un de mes apprentissages durant ce stage a été de me positionner dans une équipe, d’essayer de devenir à la fois plus polyvalent et plus autonome.

Ensuite, pour appliquer un mode de décision sociocratique ou holacratique, il faudrait que toutes les décisions soient prises lors de réunions d’équipe et cela demanderait un temps qu’il n’est pas possible de consacrer à des réunions pour rester dans une optique de projets.

Par exemple, pour décider des appels à projet auxquels nous répondons ou non, il faudrait en discuter en amont, or cela retarderait le délai de réponse à l’appel à projet et c’est donc rarement fait. De manière générale ce sont les personnes qui vont préparer l’appel qui en seront les référents, ce qui peut poser problème quand il s’agit de personnes temporaires dans l’association. La reprise d’un projet sans avoir toutes les informations ou connaître les opérations déjà effectuées peut créer des frustrations au sein de l’équipe : pour les gestionnaires de projet il faut s’en imprégner parfois un peu tard et récupérer des contraintes prédéfinies ; pour les constructeurs il est parfois difficile de comprendre tout le cheminement du projet ; et pour les personnes venant en renfort lors du chantier sans présentation du contexte global du projet il peut y avoir une sensation de manque de sens dans son travail.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

58

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

59

Fiche synthétique du projet du «Jardin Louis Blanc»

Annexe. 29

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

60

Le projet est issu d’un appel à projets lancé par Paris Habitat (contenu de l’appel à projet), « jardin d’Alice » est invité par Paris Habitat à encadrer les habitants dans la création d’un jardin partagé, « jardin d’alice » et sollicite Vergers Urbains pour la conception/construction.

Les actions suivantes ont été menées par le collectif d’artistes «le jardin d’Alice» : Pour initier le projet, il était nécessaire de savoir très exactement quels étaient les besoins des habitants du quartier. La première étape était donc de diffuser largement l’invitation à la première réunion de lancement du processus de participation.

Cette communication était ouverte à tous les habitants du quartier, mais appuyée sur : - les habitants de l’immeuble de 91 logements du 4 rue Louis Blanc. Les rapports de vue entre la parcelle du jardin et l’immeuble nécessitent de veiller à leur implication dans le projet.

- les enfants des écoles et leurs professeurs prêts à nous suivre dans l’accompagnement pédagogique proposé, - les groupes sociaux constitués pas encore informés du projet : associations, centre sociaux, résidences sociales mais aussi l’ensemble des lieux de vie du quartier, - les personnes communément absentes de ce genre de démarche : jeunes, populations précarisées, personnes issues de l’immigration, actifs disposant de peu de temps.

Les moyens utilisés étaient : - l’utilisation des fichiers existant du conseil de quartier - la distribution de l’invitation dans les boîtes aux lettres du secteur - la pose d’affiche dans les commerces avoisinants - la diffusion par les groupes sociaux constitués et les lieux de vie du quartier : écoles, associations, centre sociaux, résidences sociales.

- la diffusion de l’invitation aux sites internet et différents réseaux sociaux des groupes sociaux présents sur le territoire.

- une présentation de projets de jardins partagés et agriculture urbaine existants (2 ateliers) Pour permettre de susciter envie et vocation parmi les habitants, les Jardins d’Alice leur ont fait prendre connaissance d’un panel de projets existants de jardins partagés et agriculture urbaine en utilisant différents supports : - diaporama, reportage - intervention d’animateur de projet

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

61

- visite de jardin partagé en privilégiant des exemples proches et dans des contextes similaires

a) Méthodologie de projet Co-élaboration du cahier des charges avec les habitants (2 ateliers) Ces rencontres étaient organisées sous la forme d’une alternance : - de séances plénières d’introduction et de restitution - d’ateliers de travail en petit groupe par thème Les thèmes traités dans les ateliers pouvaient être : - valorisation de la biodiversité - gestion des ressources (eau, déchets, matériaux, semences...)

- organisation du jardin et types de plantations - constructions (abri, serre, etc.)

- animations Ces séances permettent de relever les souhaits et désirs des habitants. Toutes les formes d’expression devaient être possibles, prise de paroles, représentations graphiques, dessins, photos, enregistrement audio afin d’entendre les besoins les plus pragmatiques comme les représentations plus imaginaires. Ces observations étaient récoltées de différentes manières, sur un grand tableau, sur des post-it placés sur un mur et classées par thèmes. Une boîte à idées était installée (sous forme de création artistique réalisée par le Jardin d’Alice pour une parfaite visibilité) sur le lieu du futur jardin partagé.

Source : Jardin d’Alice Annexe.30

Fresque réalisée par le collectif du Jardin d’Alice pour collecter des idées des habitants sur le futur aménagement.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

62

Un site internet ou boîte à idées en ligne était accessible aux personnes impliquées dans le projet, aux enseignants, etc.

La même démarche était proposée aux personnels éducatifs pour intégration dans les projets pédagogiques des écoles avoisinantes. Les enfants répondaient sous forme de dessin ou éventuellement selon la motivation du corps enseignant par la réalisation d’une fresque sur le terrain lors des ateliers de l’étape 2. L’implication des écoles pouvait faire l’objet de l’intervention d’un animateur du Jardin d’Alice ou de Verger Urbains.

A partir de cette matière vivante, nous avons commencé à envisager les possibilités qu’offre la parcelle au regard des contraintes du cahier des charges : - possibilités en termes de jardinage et de petites constructions - contraintes en termes de servitudes, stockage, état du sol Le terrain Louis Blanc avec ses 800 m2 présentait une surface suffisamment importante pour envisager un projet d’agriculture urbaine répondant à plusieurs fonctions essentielles : environnementale, pédagogique, sociale, culturelle, artistique.

b) Gouvernance Pendant la phase projet, le suivi était assuré par un comité de pilotage associant conjointement le maitre d’œuvre (Vergers Urbains), le maitre d’ouvrage propriétaire du terrain (Paris Habitat), l’assistant à maitrise d’ouvrage (Jardins d’Alice), les représentants des habitants et usagers et les partenaires institutionnels. Le comité de pilotage se réunissait à la fin de chaque étape (4 réunions).

Source : Jardin d’Alice

Réunion exterieure d’habitants et du comité de pilotage post chantier Annexe. 31 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

63

Une structure associative dédiée à la gestion du jardin à l’issue de la phase projet a été mise en place, les habitants prêts à s’impliquer dans cette association ont été identifiés pendant la phase projet.

Il s’agit d’un exemple de bien commun, propriété d’un bailleur social souhaitant une intégration correcte dans le quartier pour un maximum d’acceptation, et géré par une association d’habitants. Grâce à l’agriculture urbaine, les habitants valorisent leur quartier, les plantations sont visibles par tous, au cœur de la ville. Ces réalisations sont repérées par les médias et sont en ligne avec les courants de pensées actuels. «C’est très gratifiant à long terme pour la valeurs des logements et le confort des habitants.»1

c) Analyse de la gouvernance selon les critères « Orstrom » - Limites du Commun : Les limites du Jardin Louis blanc sont clairement définies par des grilles limitant son accès.

- Règles d’appropriation : L’intervention du maître d’œuvre (Vergers Urbains) spécialiste de la culture en milieu urbain garantit un système agro-écologique fiable.

- Dispositifs de choix collectif : Durant la phase projet les choix collectifs sont assurés par un comité de pilotage comprenant maitre d’ouvrage, assistant à maitrise d’ouvrage, maitre d’œuvre et utilisateurs-habitants, décidant à l’unanimité par vote à main levée.

Durant la phase de vie, les choix sont assurés par l’association habitante, dans la limite de la réglementation et des droits du bailleur.

- Surveillance du Commun : Le site fermé à clef et grillagé à hauteur de 3m.

- Système de sanctions : Il n’y a pas de système de sanctions spécifique.

- Mécanismes de résolution de conflit : Les conflits entre habitants sont réglés lors des réunions associatives.

- Droits d’organisation de la communauté : Les droits respectifs de l’association et du bailleur social sont inscrits dans les statuts de l’association. Une charte règle les droits des adhérents à l’association.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

64

Fiche synthétique du projet du «Nouvel’R»

Annexe. 32 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

65

a) Description du projet L’intervention de Toits Vivants sur le cœur d’îlot sera concomitante à l’activité d’animation sur le toit, elle visera un entretien régulier et complémentaire, notamment : tonte, taille et désherbage. L’association s’inscrira dans une démarche de gestion naturelle et responsable, sans utilisation de produits phytosanitaires, avec une dimension pédagogique et sociale visà-vis des résidents. Des techniques (triporteur et biporteur, utilitaire électrique...).

L’association saura adapter ses pratiques aux attentes des résidents, tout en portant attention au développement de la biodiversité et être force de proposition pour faire évoluer les pratiques de gestion.

Ateliers jardinage hebdomadaires, pour favoriser la prise en main du jardin partagé et du poulailler. Les permanences permettent de partager des savoirs, une expérience, fédérer et structurer le groupe de jardinier. Son service permet de garantir la bonne marche du jardin du poulailler et du rucher Le contenu des ateliers dépend des habitants, des savoirs déjà acquis.

Chaque atelier consiste à accompagner globalement l’aménagement, l’entretien et le suivi du jardin. Chaque atelier a cependant une thématique, qui dépendra des saisons.

L’association propose par ailleurs d’en faire un espace d’expérimentation, en culture hydroponique, notamment en cultures verticales et de tester un modèle économique pour valoriser au mieux la serre, conformément à l’ambition initiale du projet.

b) Analyse de la gouvernance selon les critères « Orstrom » - Limites du Commun : Les limites se situent au niveau parcellaire du bâtiment en question et plus précisément sur le toit de ce dernier. Bien que ce soit Axone Promotion qui finance ce projet, ce sont les copropriétaires qui le gèrent et Toit-Vivant (Co-affilié à Vergers Urbains) qui l’animent.

- Règles d’appropriation : Seuls les copropriétaires de cet immeuble ont la possibilité d’accéder aux parcelles agricoles et de récupérer les denrées alimentaire. Les locataires ainsi que les autres ailes du bâtiment n’ont en aucun cas la possibilité d’être intégrés à ce projet.

- Dispositifs de choix collectif :

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

66

C’est par le biais de Toit-Vivant que les choix s’opèrent au début et progressivement par le biai de l’assemblé général des copropriétaires.

Surveillance Le bâtiment est privatisé par un badge, un digicode ainsi que de nombreuses caméras de surveillance. Il est donc difficilement accessible par les « tricheurs ».

Système de sanctions En cas d’intrusion pour des raisons non justifié et sans autorisation légal, la police peut être appelée.

Mécanismes de résolution de conflit, L’ensemble des conflits et leur résolution se font durant les différentes assemblées générales.

Ce sont pendant ces dernières que les copropriétaires prennent leurs décisions.

Droits d’organisation de la communauté Les droits d’organisations sont sous réserve de l’AG et de promoteur Axone-Promotion.

c) Résultats obtenus - enseignements Ce type de projet est très récent donc il est difficile de dire s’il est fonctionnel ou non.

Actuellement les habitants copropriétaires sont très présents, l’effet éducatif pour les enfants est très efficace et il n’y a pas eu de problèmes à signaler. Le point reprochable à mon sens et la sphère très privé de ce milieu communautaire empêchant toute intrusion de la part des locataires de l’immeuble par exemple.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

67

Fiche synthétique du projet du «Veg-18»

Annexe. 33 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

68

a) Description du projet Ce projet fait suite à une demande de riverains d’aménagement d’un morceau de trottoir de la rue Jean Cottin avec des modules de jardinage sur le modèle du jardin mobile. Cet espace était la cible de nombreux dépôts d’ordure.

Après plusieurs réunions avec Vergers Urbains et l’EDL, ce collectif d’habitants s’est constitué en association sous l’appellation « Les Gens de Cottin » et a mobilisé de nombreux habitants de la rue et de la résidence Boucry (habitat social géré par Astria).

Le chantier a démarré le 12 janvier 2015, avec 12 jeunes en apprentissage du français via le Cefil,et a été inauguré le 16 janvier. Il a été complété depuis par l’intégration d’une réserve d’eau, et d’une jardinière sous la pergola. Les gens de Cottin se réunissent tous les dimanches à 11h pour l’entretien ou tout simplement se retrouver.

Source : Sebastien Goelzer Annexe. 34

Intérêt et implication des habitants de la rue Jean Cottin pour le projet de végétalisation

Le collectif a gagné en autonomie, mais Vergers Urbains continue de suivre le projet et a accompagné le collectif dans l’organisation de fêtes de quartier, avec diverses animations, fournissant à chaque fois l’occasion de sensibiliser sur cette initiative. Notamment : Fête des voisins le 29 mai 2015 avec un dîner partagé sur l’espace public (rue privatisée pour cet événement qui a rassemblé un grand nombre de riverains) Fête du printemps le 22 mars 2015 avec un après-midi d’ateliers: initiation au compostage, plantations d’aromatiques et de jeunes plans, fabrication de mangeoires à oiseaux, coloriages et jeux autour de la nature en ville pour les enfants, buffet partagé.

Le 04 octobre 2015 Jours Art et Découverte organisés par l’espace Canopy dans le quartier :

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

69

il s’agissait de faire découvrir aux promeneurs divers lieux, qui allaient des ateliers d’artistes aux jardinières des « Gens de Cottin » ainsi qu’au « Circul’livres » du Le projet est dorénavant pris en exemple par d’autres collectifs, pour faciliter et encourager leur démarche de végétalisation (c’est le cas du projet Simplon et d’autres projets du quartier La Chapelle).

b) Analyse de la gouvernance selon les critères « Orstrom » - Limites du Commun : Les limites sont assez floues dans le cas présent. En effet, les limites géographiques se situent au niveau parcellaire du 18ème arrondissement de Paris. Cependant l’ensemble n’est pas investi. Ce projet s’étend sur le 18ème et se scinde en une multitude de petits projets disséminés dans l’arrondissement.

- Règles d’appropriation : Chacun de ces petits projets sont portés par des habitants différents. C’est en règle générale une poignée d’habitants qui vont demander un « Permis de végétaliser » pour cultiver leurs pieds d’immeubles ou encore une place de quartier.

- Dispositifs de choix collectif : Les choix sont collectifs seulement si les porteurs de projets sont plusieurs à s’investir dans le même projet. En fait, il y a surtout peu de choix dans ce type de projets car ils investissent la rue qui, elle, est commune à tous et les développements de bacs de végétation sont plutôt rares.

- Surveillance : Il n’y a pas de surveillance hormis la police car ces projets sont en pleine rue.

- Système de sanctions : Ni la communauté ni le porteur de projet ne peut appliquer de sanction.

- Mécanismes de résolution de conflit : Le mieux pour résoudre les conflits dans ce type de projet est d’employer une communication forte et une sensibilisation.

- Droits d’organisation de la communauté : Quant à la question des droits sur ces projets il ne sont détenus que par le porteur de projet qui peut choisir de les laisser, les supprimer, les modifier (Uniquement sur accord du permis de végétaliser).

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

70

c) Résultats obtenus - enseignements Ces projets ont tendance à plutôt bien se passer et à être durables. On peut, peut être mettre ça sur le fait que les porteurs et les utilisateurs directs de l’aménagement sont peu nombreux.

Le problème le plus fréquent est la dégradation des bacs, ils sont parfois utilisés comme assise, ou encore les plantes sont déracinées. Mais avec une bonne communication et une sensibilisation en amont pour les habitants du quartier, très souvent chacun se met à prendre soin ces aménagements.

Fiche synthétique du projet du «Jardin Louis Blanc»

Annexe. 35

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

71

a) Description du projet Le jardin sur le toit du Centre sportif Jean Dame, espace géré par l’association « Toits Vivants », dans le cadre d’une convention Parisculteurs signée avec la ville de Paris est partagé en trois parties : - des « bandes » cultivées par les responsables de l’association avec l’aide des adhérents ; - des espaces collectifs, cogérés par les adhérents et l’équipe Toits Vivants, dont les produits sont destinés à la vente, tout comme ceux des planches cultivées; - un jardin partagé composé d’espaces de jardinage attribués aux adhérents, qui ont la charge de les entretenir. Ces espaces prennent place au sein de bacs et ou carrés potagés répartis sur le toit.

Source : Sebastien Goelzer

Annexe 36

Aménagement du toit Jean Dame avant et après

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

72

D’un point de vue économique, ce projet aura pour but de favoriser et de promouvoir les circuits dit « courts », autrement dit à l’échelle du quartier et de l’arrondissement dans un premier temps, puis pourquoi certains quartiers adjacents d’autres arrondissements.

De plus, le site serait également voué à devenir un lieu de sensibilisation à l’agriculture urbaine pour les habitants du quartier, des ateliers à thème (semis, repiquage, plantation, entretien / Taille,..) pourraient être mis en place une fois passée la phase de mise en route de la ferme.

L’objectif serait donc aussi de créer un espace participatif ouvert à tous ceux désireux de jardiner en plein Paris. Cela pourrait donner lieu à un système d’adhésion. Le nombre de personnes présentes sur le site seraient par contre limitées pour des raisons de sécurité.

b) Analyse de la gouvernance selon les critères « Orstrom » - Limites du Commun : Les limites se situent au niveau parcellaire du bâtiment en question et plus précisément sur le toit d’un gymnase public.

- Règles d’appropriation : Son appropriation n’est en aucun cas réservée aux utilisateurs du gymnase mais bien à toutes personnes inscrites et ayant signé la charte d’adhésion. Actuellement il y a plus de d’une trentaine d’inscrits et une liste d’attente conséquente.

- Dispositifs de choix collectif : Pour tout ce qui à rapport avec les choix collectif et les choix du lieu, c’est pendant les « Réunion de Jardin » constituée de l’association Toit-Vivant ainsi que des adhérents que les décisions sont prises.

- Surveillance : Bien qu’aujourd’hui il n’y ait jamais eu d’infraction la surveillance est assez complète car il y a un service de gardiennage dans le gymnase. L’accès est compliqué car il n’y a qu’un seul jeu de clé conservé par l’accueil du gymnase et confié uniquement aux adhérents ou à Toit-Vivant. Lorsque le jeu de clé est pris il y a un tableau qui confirme le don et la réception de ce dernier pour un suivi total.

Le toit est accessible aux seuls adhérents et aux horaires décidés par les responsables de Toits Vivants. Des impératifs de sécurité limitent l’accès du toit à 19 personnes à la fois. L’accès à d’autres horaires est possible en présence des responsables de l’association (équipe de

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

73

l’association Toits Vivants, membres du comité associatif et membres référents du jardin).

- Système de sanctions : Toit-Vivant à pris la décision de mettre en place un système d’avertissements et d’explusions.

Par exemple, si une parcelle n’est plus utilisé, abimée, ou ne respecte pas la charte, un avertissement est donné à l’adhérent avant l’expulsion.

- Mécanismes de résolution de conflit : Pour gérer et résoudre les conflits, c’est à Toit-Vivant ainsi que le comité d’adhérents qui règlent les problèmes lors des « Réunion de Jardin ».

- Organisation de la communauté : L’adhérent s’engage à respecter et à partager les valeurs du projet et à participer au projet collectif.

L’adhérent fait vivre les espaces dont il est référent, laisse les lieux et outils propres et rangés.

Il respecte les horaires de la saison communiqués par les responsables de l’association.

Chacun respecte les différents espaces attribués.

Les adhérents n’interviennent pas dans l’espace de production sans conseils ou instruction des responsables de l’association, exceptés pour les « tâches du quotidien ». Les récoltes provenant de l’espace de production et des espaces collectifs sont destinés à la vente. Chaque produit vendu est pesé et référencé dans le carnet de récolte.

Les enfants accédant sur le toit restent sous la responsabilité de leurs parents.

Le toit est aussi un espace technique avec des ventilations et divers édicules dont il ne faut pas gêner le fonctionnement. Chaque adhérent veille à ne pas endommager l’étanchéité du toit par ses activités, ainsi que tout autre dispositif (longrines métalliques, platelage bois etc.). Il a eu connaissance des contraintes de portance qui s’imposent au lieu à travers le plan technique affiché.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

74

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

75

CONCLUSION Depuis les débuts de la sédentarité, l’homme s’est installé sur les terres les plus propices, à la fois pour les cultiver, les habiter et faire société. Ville et agriculture n’ont donc longtemps fait qu’une. Aujourd’hui avec nos cités artificialisées et déconnectées du vivant, «agriculture urbaine» sonne comme un paradoxe. Pourtant une part significative de l’alimentation est produite en ville ou à proximité dans de nombreux endroits du monde.

En France, l’agriculture urbaine connait un regain d’intérêt et une forte croissance. Il y a cependant plusieurs formes d’agriculture urbaine : marchande, non marchande et servicielle.

L’agriculture urbaine peut offrir de nombreux services aux villes en transition. Reconnexion des urbains avec l’agriculture et la nature, climatisation des villes, solidarité et cohésion sociale, prévention et gestion des déchets, économie locale et vertueuse, santé publique, biodiversité en ville, pédagogie, désartificialisation des sols et préservation de l’eau, citoyenneté et démocratie. Certains projets répondent mieux que d’autres à ces critères d’intérêt général. Déployer un contexte favorable aux projets en phase avec les enjeux de ce siècle permettra d’offrir une agriculture urbaine au service des villes résilientes.

La première contribution de l’agriculture urbaine est sa capacité à re-naturaliser de manière individuelle, collective et productive les espaces urbains. Elle est aussi vectrice de sens pour les nouveaux entrepreneurs qui la pratiquent. C’est pour cela qu’il est très important de la valoriser dans son évolution et notamment par les collectivités.

Entre réappropriation politique, effet de mode, ou green washing, l’agriculture urbaine s’auto-détruira elle-même si elle ne se structure pas correctement. Cependant les solutions sont en elle. D’une origine pleine d’humanité, sa stabilité dépend aujourd’hui de nouvelles combinaisons de modèles économiques générateurs d’emplois, associés à une souplesse d’adaptation au contexte urbain.

Les jardins partagés dans la ville visent, selon les endroits où ils sont implantés, à réinvestir et se réapproprier des espaces délaissé par des événements tragiques, ou encore abandonnés à la délinquance ou au trafic, à proposer de manger mieux et plus local, à supporter un apprentissage et une éducation écologique. Ils répondent à quatre principes fondamentaux; une démarche participative, la création du lien social, le respect de l’environnement et FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

76

l’ouverture au public.

Ils sont en général issus d’une démarche très active d’habitants d’un quartier, avec le support d’une ou plusieurs associations engagée dans la vie sociale et culturelle ou la défense d’intérêt locaux face aux projets d’urbanisme. Le plus souvent ils ont conservé une dimension militante et un objectif bien affirmé. Ces jardins, parfois situé sur l’espace public peuvent devenir des lieux de réappropriation de l’espace dans lesquels de nouvelles réglementations et de un principe de partage s’établit. C’est une ressource qui devient commune à ses utilisateurs. À travers l’opposition à la privatisation de l’espace public en général, c’est l’idée des communs qui est revisitée. L’apport d’une démarche théorique comme celle d’Elinor Ostrom est de poser les principales questions juridiques et organisationnelles liées à l’appropriation et l’usage de ces communs. Cette démarche permet certainement, même si elle n’est que partiellement implémentée, d’éviter certains écueils liés à une vision trop traditionnelle de la propriété.

La vision de l’espace urbain cultivable comme bien commun, et l’inventaire des droits d’accès et d’usage de ces communs, permettent de défendre deux valeurs de l’agriculture urbaine : l’échange et le partage. Deux valeurs essentielles qui rendent possibles une reconnexion de l’ensemble de la population urbaine, jeunes et vieux de toutes catégories sociales avec la nature. L’éthique naturelle qui en dérive et qui doit orienter la gouvernance des communs est de prendre soin de la terre et des hommes et de partager plus équitablement les ressources.

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

77

SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE «Enclosure». In Wikipédia, 11 mai 2019. https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Enclosure&oldid=159189346.

Allemand, Audrey. « Jardiner la ville: les jardins partagés: des espaces du commun », s. d., 127. Consulté le 08 Juin 2019 « Bien commun ». In Wikipédia, 3 février 2019. https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Bien_commun&oldid=156434876.

Bognon Sabine et Cormier Laure, « Agriculture urbaine et urbanisme : la terre et le faire, ce que cultiver la ville produit dans les espaces urbains », Urbanités, n°10, avril 2018, en ligne Consulté le 12 Mai 2019 URL : http://www.revue-urbanites.fr/10-bognon-cormier/ Bourg Dominique, « Les maux et les mots de l’environnement », Communication, 2015, en ligne Consulté le 21 Mai 2019 http://www.persee.fr/doc/comm_0588-8018_2015_num_96_1_2765?q=transition+%C3%A9cologique Bourdeau-Lepage Lise et Vidal Roland, « Nature urbaine en débat : à quelle demande sociale répond la nature en ville ? », Club Démeter, 2008, en ligne Consulté le 7 Mai 2019 URL : https://hal-univ-lyon3.archives-ouvertes.fr/hal-00950697 Boissonade Lea pour le Commissariat Général au Développement Durable, « La Transition.

Analyse d’un concept », Théma, Essentiel, juin 2017, en ligne Consulté le 02 Mai 2019 URL : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Th%C3%A9ma%20%20 Transition%20-%20Analyse%20d%27un%20concept.pdf Boîte à outils – Parisculteurs. Mise à jour février 2019 Consulté le 25 Avril 2019http:// www.parisculteurs.paris/data/terrains_0917a/categorie/10/boite_a_outils_v3_-_19-022019_8d089.pdf Brundtland Gro Harlem, Notre Avenir commun, 1987, en ligne Consulté le 05 Juillet 2019 URL : http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/sites/odyssee-developpementdurable/files/5/rapport_brundtland.pdf « Capuchin Soup Kitchen - ». https://www.cskdetroit.org/. Consulté le 11 Juillet 2019 « Comment devenir une ville nourricière, l’exemple de Saint-Bruno ». Université Francophone de l’Autonomie Alimentaire (blog), 4 mars 2018. Consulté le 09 Juillet 2019 http://www.autonomiealimentaire.info/devenir-ville-nourriciere-lexemple-de-saint-bruno/. « Comment les Cubains ont converti leur île à l’agriculture biologique ». Basta ! Consulté le 10 Aout 2019. https://www.bastamag.net/Comment-les-cubains-ont-converti-leur-ile-au-bio.

Corbet, Alice, Pierre Duquesne, Jacqueline Plaisir, et Jean Merckaert. « Quel développement sans État ? Le cas d’Haïti ». Revue Projet N° 339, no 2 (25 avril 2014): 70 78. Consulté le

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

78

20 Juillet 2019 « Crise des subprimes ». In Wikipédia. https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Crise_des_subprimes&oldid=161529033.

Christophe Jean Claude, Les jardins familiaux, Territorial Edition, Coll. L’essentiel sur, 2009 Consulté le 28 Juillet 2019 Crosnier, Hervé LE. « Une introduction aux communs de la connaissance ». Tic & société, no Vol. 12, N° 1 (31 mai 2018): 13 41. Consulté le 16 Mai 2019 https://doi.org/10.4000/ticetsociete.2481.

Flaminia Paddeu. De la crise urbaine à la réappropriation du territoire. Mobilisations civiques pour la justice environnementale et alimentaire dans les quartiers défavorisés de Detroit et du Bronx à New York.. Géographie. Université Paris 4 Sorbonne, 2015. Français. fftel-01283583 Consulté le 12Avril 2019 https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01283583/document « Focus: Agriculture urbaine ». http://www.fao.org/ag/fr/magazine/9901sp2.htm.

Consulté le 22 Mai 2019 « Guérilla gardening France | Des manifestes ! ». http://guerilla-gardening-france.fr/wordpress/guerilla/des-manifestes/. Consulté le 28 Avril 2019 Hardin, Garrett. « The Tragedy of the Commons ». Science 162, no 3859 (13 décembre 1968): 1243 48. Consulté le 20 Avril 2019 https://doi.org/10.1126/science.162.3859.1243.

IMT Mines Albi Officiel. Conférence sur les Communs de la Connaissance de Lionel MAUREL, 2019. Consulté le 17 Avril 2019 https://www.youtube.com/watch?v=8XwtrRfJ4Dk&fbclid=IwAR0YvTwKMdEzMt9xtuxT0hHzbxBy-rXNJs2sxN9rhn3mG5dArOF7wo7GAOQ. Kalinowski, Wojtek. « Elinor Ostrom sur la gestion des ressources naturelles - Initiative internationale pour repenser l’économie ». Fiche de lecture. Consulté le 15 Aout 2019 http://www.i-r-e.org/fiche-lecture-7_fr.html.

La ville comestible : vers une nature cultivée au service des communs. Sebastien Goelzer.

8 Décembre 2017 Consulté le 12 Mai 2019 http://vergersurbains.org/la-ville-comestible-vers-une-nature-cultivee-au-service-des-communs/#more-2797 Lagneau Antoine, « Agriculture urbaine : fonction alimentaire, sociale, écologique… Qu’attendonsnous de l’agriculture urbaine ? », Les Notes de la Fondation de l’Ecologie Politique, n°10, octobre 2016, en ligne Consulté le 15 Aout 2019 URL : http://www.fondationecolo.org/activites/publications/Les-Notes-de-la-FEP-10-Agricultureurbaine « Les chiffres de l’agriculture urbaine ». Maison de l’Agriculture Urbaine (blog), 31 mai FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

79

2016. Consulté le 15 Aout 2019 https://maisonagricultureurbaine.com/l-agriculture-urbaine/les-chiffres-de-lagriculture-urbaine/. « Les Incroyables Comestibles ». In Wikipédia, 14 novembre 2018. Consulté le 21 Aout 2019 https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Les_Incroyables_Comestibles&oldid=153960152.

Loggings Donald, Liz Chrity Community Garden (site web officiel), 2007 Consulté le 15 Juin Machan, T. « The commons: its tragedies and other follies. » Stanford: Hoover institution press., 2001. Consulté le 25 Juin 2019 Mairie de Paris, Programme des Jardins Partagés « Main Verte » - Modèle de convention d’occupation et d’usages, 2003 Consulté le 19 Mai 2019 Minustah. « L’agriculture Urbaine : Une Alternative Pour Les Habitants Du Cap-Haïtien ? Haiti ». ReliefWeb. Consulté le 20 Juin 2019 https://reliefweb.int/report/haiti/lagriculture-urbaine-une-alternative-pour-les-habitants-du-cap-ha%C3%AFtien. « Nouveau Projet - Idées, récits et modes d’emploi pour le 21e siècle ». Consulté le 21 Juin 2019 https://edition.atelier10.ca/nouveau-projet/magazine/nouveau-projet-02/agriculture-urbaine-et-paysages-ruraux-contrastes-et-lecons-du-japon. « Observatoire de l’agriculture urbaine et de la biodiversité ». Consulté le 25 Mai 2019 http://agricultureurbaine-idf.fr/. « Olivier De Schutter ». In Wikipédia, 29 avril 2019. https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Olivier_De_Schutter&oldid=158849121.

Orsi, Fabienne. « Elinor Ostrom et les faisceaux de droits : l’ouverture d’un nouvel espace pour penser la propriété commune ». Revue de la régulation, no 14 (12 décembre 2013).

Consulté le 15 Mai 2019 https://doi.org/10.4000/regulation.10471.

Politique Ville nouricière 2017. Anik Fortin, urbaniste Consulté le 25 Mai 2019 http://www.autonomiealimentaire.info/wp-content/uploads/2018/03/00_saint-bruno_de_ montarville_ville_nourriciere_autonomie_alimentaire.pdf PREVOT ANNE-CAROLINE & FLEURY CYNTHIA, Le Souci de la nature. Apprendre, inventer, gouverner, CNRS Editions, 2017 Consulté le 08 Avril 2019 SENAT, Proposition de loi relative aux jardins familiaux et aux jardins d’insertion, Session extraordinaire de 2001-2002, Annexe au Procès-verbal de la séance du 24 juillet 2002, n°368, 2002 Consulté le 12 Avril 2019

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

80

Synthèse du rapport de l’étude réalisée par l’INRA pour le compte de l’ADEME, du MAAF et du MEDDE - Juillet 2013 Consulté le 18 Mai 2019 https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/88555_etude-agriculture-francaise-reduction-gaz-effet-serre.pdf

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

81

Source : JLL Dully.

Système d’agriculture productiviste fortement polluant

Annexe 1; Pages 7

Source : Conseil économique, social et environnemental Annexe 2; Pages 9

Schema illustrant les moyens les plus sain pour une ville durable

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

82

Source : E6

Classement d’aménagements du plus froid au plus chaud, Score ICU

Annexe 3; Pages 10

Source : Vivre en Ville

Représentation simplifiée du système alimentaire avec activités et exemples d’activités associées,

Annexe 4; Pages 13

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

83

Source : Ville de Paris

Carte représentative de l’intégralité des permis de végétaliser réalisés jusqu’en 2019

Annexe 5; Pages 16

Source : Vergers Urbains. Réalisation d’un bac de comestible pour un permis de végétaliser dans le 18iem arr.

Annexe 6; Pages 16

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

84

Source : Guerilla Gardening. Schema démonstratif d’une nouvelle façon d’appréhender l’espace public Annexe 7; Pages 17

Source : Google Map.

Carte de contextualisation géographique de Saint-Bruno

Annexe 8; Pages 24

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

85

Source : Ville de Saint Bruno.

Carte des répartitions de secteurs constituant la ville de Saint Bruno

Annexe 9; Pages 25

Source : Ville de Saint Bruno.

Carte de synthèse de la politique Ville Nourricière

Annexe 10; Pages 26 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

86

Source : Ville de Saint Bruno.

Marché public, édition 2016, à la Place du Village

Annexe 11; Pages 27

Source : FramePool.

Plantation de Canne à sucre à Cuba

Annexe 12; Pages 30

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

87

Source : Colectivo Documetal Semilla

Un potager urbain personnel au coeur de la Havane

Annexe 13; Pages 31

Source : Celine Porcheron.

Point de vente locale de fruits et lÊgumes issu des entreprises locales d’agriculture urbaine

Annexe 14; Pages 32

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

88

Source : Geoffrey Couanon

Bande d’agriculture urbaine du collectif de Playa

Annexe 15; Pages 33

Source : Google Map

Contexte géographique de la ville de Tomorden en Angleterre

Annexe 16; Pages 36

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

89

Source : Incredible Edible

1 ) Bac dans la rue de nourriture à partager (Paris 18iem) 2) Bacs de nourriture à partager devant le commissariat à Todmorden 3) Bacs de nourriture à partager sur la place de l’hotel de ville à Paris 4) Parcelle en pleine terre de nourriture à partager dans la campagne de Manchester

Annexe 17; Pages 37

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

90

Source : Incredible Edible Network.

Charte d’etapes à suivre pour médiatiser et propager le mouvement

Annexe 18; Pages 38

Source : Incredible Edible Network

Charte fondamentale des incroyables comestibles

Annexe 19; Pages 39 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

91

Source : Veronique Servat

Vue aérienne prise en drone d’un quartier nord abandonné

Annexe 20; Pages 42

Source : Wikipedia.

Ancienne usine automobile ravagée par la désindustrialisation

Annexe 21; Pages 43

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

92

Source : MUFI

Photographie de la ferme urbaine «The Michigan» en plein coeur urbain

Annexe 22; Pages 44

Source : Stephen Wayne Kasica.

Modélisation en 3 dimensions du projet «Hantz Woodland»

Annexe 23; Pages 45

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

93

Source : Emile Ferenczi

Carte géographique des 33 lauréats de la saison 3 des Paris-Culteurs

Annexe 24; Pages 49

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

94

Source : Parisculteur saison 3

1) Projet de la Résidence Montempoivre (12e arr). Porteur : Urbanescence 2) Projet Crèche Max Jacob (13e arr). Porteur : Whole 3) Hôtel logistique de Vitry-sur-Seine (94400). Porteur : Cultures en ville, Prédici, La mine.

4)Projet des Fermiers Genereux (18e arr.). Porteur : Vergers Urbains 5) Projet de la Voie BP17 (17e arr.). Porteur : Association Les Hauts de Malesherbes 6) Tronçon Rungis (17e arr.). Porteur : Urbanescence, Maison 13 Solidaire, Sylki

Annexe 25; Pages 50

Source : Emile Ferenczi

Photographie de la place Pajol et du jardin mobile

Annexe 26; Pages 52

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

95

Source : Sebastien Goelzer

Chantiers en réalisation avec l’implication importante des habitants

Annexe 27; Pages 53

Source : Sebastien Goelzer

Chantiers en réalisation avec l’implication importante des habitants

Annexe 28; Pages 54 FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

96

Fiche synthétique du projet du «Jardin Louis Blanc» Annexe 29; Pages 60

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

97

Source : Jardin d’Alice

Fresque réalisée par le collectif du Jardin d’Alice pour collecter des idées des habitants sur le futur aménagement.

Annexe 30; Pages 62

Source : Jardin d’Alice

Réunion exterieure d’habitants et du comité de pilotage post chantier

Annexe 31; Pages 63

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

98

Fiche synthétique du projet du «Nouvel’R» Annexe 32; Pages 65

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

99

Fiche synthétique du projet du «Veg - 18» Annexe 33; Pages 68

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

100

Source : Sebastien Goelzer

Intérêt et implication des habitants de la rue Jean Cottin pour le projet de végétalisation

Annexe 34; Pages 69

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

101

Fiche synthétique du projet du «Micro-ferme Jean Dame» Annexe 35; Pages 71

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

102

Source : Sebastien Goelzer

Aménagement du toit Jean Dame avant et après

Annexe 36; Pages 72

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

103

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

104

Diplôme : Memoire de fin d'étude Geographie Spécialité : Géographie, aménagement, environnement et développement Spécialisation / option :PEPS Enseignant référent : Monique Toublanc Auteur(s) : FERENCZI EMILE

Organisme d'accueil : Vergers Urbains Adresse : 2 rue buzelin 75018 Paris

Date de naissance* : 13/02/1995 Nb pages :

78

Annexe(s) : Maître de stage : Sébastien Goelzer

Année de soutenance : 2019

Titre français : La ville comestible, un espoir en commun ?

Titre anglais : The edible city, a hope in common ?

Résumé :Alors que nous sortons d’un siècle industriel, l’agriculture a quitté massivement les villes et a largement adopté un modèle de monocultures intensives, qui a fortement impacté notre planète et nos modes de vie.

De plus en plus d’habitants se questionnent sur ces problématiques et se réapproprient les espaces publics urbains et parfois même les espaces privés pour créer de nouvelles exploitations agricoles intégrant de nouvelles dimensions sociales, pédagogiques, nourricières et économiques pour une ville en commun.

L’agriculture urbaine aspire être une solution complète et durable. Elle cherche à proposer des solutions pour permettre la réappropriation par les habitants de plus saines habitudes alimentaires, pour améliorer la résilience de nos ville face au changement climatique. Sa pérennité dépend de sa capacité à inventer de nouveaux modèles économiques et sociaux, adaptés au contexte urbain.

Plusieurs théoriciens ont proposé le concept de « Communs » pour désigner des ressources destinées à être partagées par le plus grand nombre. L’objet de ce mémoire est d’utiliser ce concept pour questionner différents types d’agriculture urbaine. En quoi les « Communs» peuvent-ils servir à repenser la question de l’agriculture urbaine et des jardins partagés, à travers la notion de « Ville comestible » ? Quels rôles ont ces espaces tant voulus par certains habitants ? Quels sont les différents types de de gouvernance mis en œuvre dans les projets d’agriculture urbaine ?

La vision de l’espace urbain cultivable comme bien commun, et l’inventaire des droits d’accès et d’usage de ces communs, permettent de défendre deux valeurs de l’agriculture urbaine : l’échange et le partage. L’éthique naturelle qui en dérive et qui doit orienter la gouvernance les communs est de prendre soin de la terre et des hommes et de partager équitablement les ressources.

Abstract :As we emerge from an industrial century, agriculture has massively left the cities and has widely adopted a model based on intensive monocultures that has dramatically impacted our planet and our lifestyles.

An increasing number of citizens are trying to address these issues by regaining control of urban public spaces, and sometimes even private spaces, to create new farming structures integrating new social, educational, nutrition and economic dimensions for a common city.

Urban agriculture aims at being a complete and sustainable solution. It seeks to propose solutions allowing citizens to reclaim healthier food, to improve resilience of our cities to climate change. Its durability depends on its capacity to invent new economic and social models adapted to the urban context.

Several theorists have proposed the concept of "Commons" to designate resources intended to be shared by many. The purpose of this work is to use this concept to question different types of urban agriculture. How can "Commons" be used to revisit questions linked to urban agriculture and shared gardens, through the concept of "edible city"? What are the roles of these spaces, so desired by some inhabitants? What different types of governance are implemented in urban agriculture projects? Through opposition to privatization of public space in general, the idea of "Commons" is revisited.

A vision of cultivable urban space as a “Common”, combined with the inventory of access and usage rights of rights of access and usage rights of these Commons, may help to maintain two values of urban agriculture: exchange and sharing. Natural ethics deriving from these values and providing guidance for the governance of Commons consist in taking care of land and men and sharing fairly natural resources.

Gouvernance, Mots-clés : Agriculture, Commun, Urbain, Ville Comestible, Detroit, « Incroyable Comestible », Gouvernance, Urbains », », Transition, Transition, Parisculteurs, Parisculteurs, Jardin Jardin partagé partagé Havane, « Ville Nouricière », « Vergers Urbains Havana, Key Words : Agriculture, Common, Urban, Edible City, Detroit, « Incredible Edible », Governance, Havana, Transition, Pariscultores, Pariscultores, Shared Shared Garden Garden « Feeding Town », « Vergers Urbains », Transition, * Elément qui permet d’enregistrer les notices auteurs dans le catalogue des des bibliothèques bibliothèques universitaires universitaires

FERENCZI Emile La ville comestible, un espoir en commun ?

105