Musiciennes de légende. Marina Chiche / France Musique - First

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Culture

Dimanche 12 Décembre 2021 www.laprovence.com

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Marina Chiche féminise le Panthéon des interprètes

ZOOM SUR Claude Lelouch

Dans un livre passionnant, la violoniste marseillaise revient sur des vies vouéesàla pratiquedela musique,cellesdefemmesd’exception

E

lle a l’art du récit et un regard curieux qui rend les parcours de femmes qu’elle nous raconte, vie et carrière mêlées, passionnants à découvrir ou à retrouver. Musicienne, violoniste que les plus grandes scènes accueillent, Marina Chiche cultive aussi la mémoire, la rendant vibrante sur les ondes et, avec une infinie bienveillance, travaille, avec le livre Musiciennes de légende, à hisser des femmes exceptionnelles au même niveau de postérité que leurs homologues masculins. Une mission d’intérêt public qui a démarré sur France Musique. "J’avais commencé par faire des séries radiophoniques et quand je dis que "tout commence avec Ginette", c’est vraiment ça ! Quand, en 2019, est arrivé le centième anniversaire de sa naissance, j’ai commencé à enquêter sur Ginette Neveu. La question des femmes et du violon s’est posée à ce moment-là de manière très naïve, je n’avais

"J'avais envie de rendre hommage à ces musiciennes, de les célébrer, de leur rendre justice". pas conscience que c’était un sujet brûlant. En réfléchissant, je me suis dit que Ginette Neveu avait été mon seul support d’identification parmi les grandes violonistes historiques. Dans les grandes figures, c’était la seule parmi Yehudi Menuhin, Jascha Heifetz, David Oïstrakh… Finalement, Ginette Neveu était une exception". ❚ Comment avez-vous tiré le fil de ces vies de musiciennes ? Comment avez-vous eu l’idée de travailler sur ces figures féminines ? J’ai eu la chance de rencontrer Ida Haendel dont j’ai suivi les master class, ça a été une grande rencontre. Elle était tellement charismatique. En commençant à travailler, je pensais trouver une poignée de pionnières, j’ai découvert des violonistes plus exceptionnelles les unes que les autres. Des dizaines dans le monde entier, qui avaient rencontré beaucoup d’obstacles et qui, pourtant, avaient marqué leur temps. Pourquoi ne m’avait-on pas raconté ces histoires ? Ça a donné lieu à une deuxième saison de l’émission Mon cœur est un violon. Puis, Musiciennes de

"L’amour c’est mieux que la vie" à Aix et Marseille. Le jeudi

16 décembre, Claude Lelouch fera un crochet par le cinéma aixois Le Cezanne, où sera projeté son 50e film en avant-première à 19h30, suivi d’un débat avec le réalisateur et le comédien Xavier Inbona. Ce même jeudi 16, à Marseille cette fois, au cinéma Les 3 Palmes, la projection publique en avant-première aura également lieu à 19h30, précédée d’une présentation de L’amour c’est mieux que la vie. Il y est question d’amitié entre trois hommes mais aussi d’amour et d’argent. Réservations sur les sites des cinémas : www.lescinemasaixois.com et www.les3palmes.com / PHOTO C. HIELY

La violoniste née à Marseille Marina Chiche a une autre passion que la musique : la radio, où elle parle de... musique. Notamment sur France Inter, chez "Par Jupiter" tous les quinze jours. / PHOTO ASTRID DI CROLLALANZA

légende est en quelque sorte la saison 3 de cette démarche, élargie à tous les instruments. ❚ Qu’ont-elles en commun, toutes ces femmes musiciennes ? La force de conviction et l’engagement dans leur manière de se consacrer à la musique. Envers et contre tout, chacune pour des raisons différentes et en même temps pour cette raison assez systémique, parce que ce sont des femmes, elles donnent tout pour leur musique, avec le feu sacré qu’elles portent. Elles sont toutes dans leur talent, dans leur vocation et elles se consacrent à leur art. C’est d’autant plus bouleversant quand on met ça en perspective avec les obstacles qu’elles ont rencontrés. Cet empêchement lié à leur condition féminine, certaines le formulent. Je pense à la violoniste américaine Maud Powell qui prend la parole en 1893 dans cette conférence à Chicago et qui interroge : pourquoi les femmes n’ont-elles pas le droit d’entrer dans les orchestres et de gagner leur vie ? Il y a toujours cet enjeu d’ éman cipat ion et de conquête économique qui est

aussi parfois le nerf de la guerre. Certaines ont conscience que leur condition rend les choses difficiles, d’autres pas. Mais toutes subliment tout ça et persévèrent, s’expriment et marquent leur temps. ❚ Quel était votre objectif en racontant ces vies ? J’avais envie de rendre hommage à ces musiciennes, de les célébrer, de leur rendre justice, car je les trouve toutes plus inspirantes les unes que les autres. ❚ Visiblement, le monde de la musique se mobilise pour que le talent des femmes ne soit pas oublié. On pense à la chef Debora Waldman, à Avignon, qui a publié un livre sur la compositrice Charlotte Sohy, ou à la violoncelliste Héloïse Luzzati qui s’engage, avec son association Elles Creative Women, à redonner plus de visibilité aux œuvres des compositrices. Dans mon choix, il y a des compositrices, je pense à Rebecca Clarke, l’altiste, à Clara Schumann. Souvent ce sont des compositrices-interprètes. Certaines, parce qu’elles avaient un statut d’interprète très re-

connu, ont pu s’exposer comme compositrices. Inversement, on parle de quelques-unes plutôt comme compositrices alors qu’elles ont été de grandes interprètes… Je trouve remarquable ce travail fait sur les compositrices, mais je porte très fort cette cause des interprètes. Elles ont fait des carrières incroyables et elles ont marqué leur temps. La question "Pourquoi ne sont-elles pas passées à la postérité ? me semble encore plus problématique. Pour certaines, on a des documents sonores exceptionnels, elles ont marqué les gens qui les ont entendues mais dans l’arbitrage, quand on énumère les grands interprètes, ce sont souvent les grands hommes que l’on cite. Je veux enfin faire entrer ces femmes dans ce Panthéon de la musique. Notamment parce qu’une enquête de l’association française des orchestres dit qu’actuellement en France, il n’y a que 28% de solistes féminines programmées avec les orchestres français. Alors qu’on est par exemple largement à parité au Conservatoire supérieur de Paris. Olga BIBILONI

"MUSICIENNES DE LÉGENDE"

Pionnières, étoiles filantes, prodigieuses et divines Tous les chapitres du livre de Marina Chiche Musiciennes de légende (First éditions France Musique, 21,95 euros) réservent de grands plaisirs de lecture. D’abord parce qu’elle observe de près le parcours de ces femmes dont la vie a été consacrée à la musique, ensuite parce qu’elle le contextualise. Ainsi (re)découvre-t-on, parmi les pionnières, les étoiles filantes, les ambassadrices, les prodigieuses, les divines, les flamboyantes, des personnalités magnétiques. On s’arrête avec intérêt sur Antonia Brico (1902-1989) qui mettra son talent musical au service de la direction d’orchestre même si y arriver fut difficile. On pense au travail formidable que fait aujourd’hui Claire Gibault avec La Maestra, premier concours international de cheffes d’orchestre réservé aux femmes, car ce n’est pour elles toujours pas aisé d’accéder à ces fonctions. Parmi les étoiles filantes, brille particulièrement l’Anglaise Jacqueline du Pré (1945-1987). La sclérose en plaque impose l’arrêt du violoncelle à cette musicienne exceptionnelle à l’âge

de 28 ans. Celle dont Rostropovitch disait qu’elle était la plus prometteuse de sa génération, disparaît à 42 ans. Du couple qu’elle formait avec le pianiste Daniel Barenboim (pour qui elle s’est convertie au judaïsme) au statut de star internationale vers lequel son talent l’a propulsée, en passant par la relation de rivalité avec sa sœur, tout est passionnant dans cette courte et merveilleuse existence. Comment combiner carrière internationale et vie de famille ? Peu d’hommes ont à se poser cette question. Camilla Wicks (1928-2020), elle, se l’est posée. La violoniste américaine, qui jouait de tête à quatre ans le Concerto en la mineur de Vivaldi, qui a remporté de multiples prix, est devenue une star à 25 ans. Mais après avoir eu cinq enfants en dix ans et alors que l’éloignement d’eux la faisait souffrir, elle a renoncé à la scène. Un divorce plus tard, Camilla Wicks reprendra courageusement sa carrière. Un exemple. O.B.

ANNULATION M Pokora renonce à ses "Grandes ambitions"

En raison des incertitudes grandissantes sur les mesures de restriction qui pourraient être prises prochainement, la production du spectacle Les grandes ambitions, dans lequel M Pokora fait ses premiers pas au théâtre, a préféré renoncer à la tournée prévue en France, en Belgique et en Suisse. Elle ne sera pas non plus reportée. En ce sens, la représentation du 13 janvier 2022 au Dôme de Marseille est annulée. Le spectacle, actuellement joué au théâtre de la Madeleine à Paris, sera donné une dernière fois le 19 décembre. Les billets sont remboursables auprès des opérateurs où ils ont été achetés. / PHOTO DAVID ROSSI

REPORT "Born in 90" au Dôme de Marseille en 2023

Piloté par le producteur des tournées RFM Party 80, Génération Dance Machine, Stars 80, The Voice Tour, Danse avec les Stars, des comédies musicales Flashdance et Priscilla Folle du Désert, le spectacle Born in 90 devait célébrer les années 1990, avec les artistes marquants de la décennie, des danseurs, des musiciens en live, des images et des effets spéciaux, le 10 décembre 2020, puis le 3 décembre 2021… Mais en raison de la crise sanitaire, il avait dû une nouvelle fois être annulé… Que les fans de ces rendez-vous nostalgiques se rassurent, la production vient de trouver une nouvelle date. Ce sera le samedi 18 février 2023 au Dôme de Marseille. Les billets restent valables mais il est possible de se faire rembourser dans les points de vente jusqu’au 7 février 2022.

DANSE Ouverture studio au Pavillon Noir

Le Pavillon Noir, à Aix, accueille en résidence le collectif cubain Malasangre, qui présentera sa création Qué Boléro… les 3 et 4 mai. On pourra découvrir une étape de leur travail lors d’une ouverture studio le jeudi 16 décembre. Entre danse et performance, le collectif choisit pour terrain de jeu le Boléro de Ravel. La performance d’une heure sera suivie d’une discussion avec les artistes. ➔ Jeudi 16 décembre à 18h30 au Pavillon Noir, Aix. Gratuit sur réservation preljocaj.org

PRIMED Les 11 prix du palmarès dévoilés

Lors du Primed 2021, qui s’est tenu à Marseille, 23 films provenant de 13 pays étaient sélectionnés en compétition (sur 345 documentaires reçus de 34 pays). Avec 12 films inédits en France, le festival offrait 30 heures de projections publiques et gratuites, avec 24 séances en présence des réalisateurs. Le grand prix "Enjeux méditerranéens", parrainé par France Télévisions, est allé à L’école de l’espoir de Mohamed El Aboudi. Le prix "Mémoire de la Méditerranée", parrainé par l’INA, a distingué There is still someone in the woods de Erol Ileri Llordella et Teresa Turiera. Le prix "Première œuvre", parrainé par la RAI (Radio Télévision Italienne), a salué Best unkept secret de Ilan Mizrahi. Le prix "Art, patrimoine et cultures de la Méditerranée" est allé à Amori de Stefano Ceccarelli et Gabriele Anastasio. Le prix des "Jeunes de la Méditerranée" a couronné Au nom de la mer de Jérôme et Caroline Espla. Tandis que le prix "Court méditerranéen" (prix du public) a récompensé La Napoli di mio padre de Alessia Bottone. Mention spéciale Asbu pour Made in France-Au service de la guerre de Sophie Nivelle-Cardinale et Alice Odiot. Ont obtenu une distinction dans le cadre du prix "Moi, citoyen méditerranéen", Derrière le brouillard de Samer Abou Elenein (École française de Mansourah, Égypte, qui a reçu la mention Sud Méditerranée parrainée par Canal France International) et Les premiers pas vers l’engagement de Lola Cottier (Lycée Notre Dame de Sion à Marseille, qui s’est vue attribuer la mention Nord Méditerranée). Le prix à la diffusion de France 3 Corse ViaStella est allé à L’école de l’espoir de Mohamed El Aboudi, celui de la RAI (Italie) à A black Jesus de Luca Lucchesi.


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