Ophélie SOULAS-Conservation-Restauration Portrait de Madame Courcieras et sa fille-Marcel Caud,1930

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Ophélie Soulas - Promotion 2017 Conservation et restauration de peintures de chevalet

TITRE DE RESTAURATEUR-CONSERVATEUR DU PATRIMOINE

MÉMOIRE DE FIN D’ÉTUDES CONSERVATION - RESTAURATION PORTRAIT DE MADAME COURCIÉRAS ET SA FILLE MARCEL CAUD, 1930 Sujet technico-scientifique : étude comparative de l’électricité statique des différents vernis de restauration en vue de mettre au point un vernis antistatique Mots clés : Portrait -Peinture figurative - Paris 1930- Moisissures - Mise en extension par la face - Rentoilage - Allègement de vernis chanci - Régalrez®1094 - Paraloïd B72 - Electricité statique- Vernis - Antistatique

Ophélie Soulas Spécialité Peinture de chevalet - Promotion 2017

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«Le travail, c’est de l’amour rendu visible» Khalil Gibran

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REMERCIEMENTS Ma première pensée est pour Bernadette Poinson, une femme d’une extrême patience qui est mon modèle en tout point. C’est elle qui m’a fait découvrir la restauration, il y a huit ans, en me transmettant avec douceur son amour et sa passion pour la restauration. Je remercie sincèrement tout le corps professoral et administratif de l’école, pour leur patience, leur disponibilité mais surtout pour la richesse de l’apprentissage au travers des cours, des workshop, des chantiers et des stages proposés. Mes pensées vont plus particulièrement à mes tuteurs de mémoire, Marguerite Szyc, Olivier Nouaille, Claude Pepe et Philippe Ollier, qui m’ont guidée dans mes réflexions et ont répondu à mes interrogations. Ma considération va également aux membre du jury pour leur œil critique ainsi qu’à l’importance qu’ils portent à nos travaux. Mes attentions se portent à tous mes maîtres de stage, qui dès mon entrée à l’école ont su m’offrir leurs connaissances et qui m’ont permis d’améliorer mes techniques. Je tiens également à remercier profondément Wilfrid de Fonvielle, ainsi que ses proches pour m’avoir tant renseignée sur la vie de leur ancêtre, Marcel Caud. Leur intérêt porté à mon travail et leur disponibilité m’ont beaucoup touchée et m’ont aidée dans sa réalisation. Mes remerciements se portent à présent vers la personne de Philippe Truffault, qui m’a livré les secrets de ses ancêtres, Louise et Mariette Courciéras. Je le remercie de sa confiance et de sa sincérité. J’adresse également de sincères remerciements à l’entreprise Boussey-Control, et surtout Eric Feyder pour le temps précieux qu’il m’a consacrée en répondant à mes questions au sujet de l’électricité statique, et pour l’envoi d’échantillons d’antistatiques utilisés dans le cadre de mon étude technico-scientifique. Je tiens à remercier l’entreprise Charpente et Menuiserie Debraine, et particulièrement Denis Debraine pour son investissement et ses conseils autour de la restauration du cadre du tableau.

Je remercie mes camarades de promotions, ainsi que des classes supérieures et inférieures pour leur bonne humeur constante et pour nos échanges, je pense particulièrement à Leslie, Claire, Anaëlle, Aude, Charlotte, Laura, Marion, Charlène, Margaux et Agathe. Mes pensées vont également à mes amis à l’extérieur de l’école, Sophie, Camille, Aliénor, Pauline, Isaure, Valentin, Yahya, qui partagent mes bonheurs comme mes peines et m’ont toujours soutenue. Ainsi que Coralie pour ses précieux conseils en anglais. Enfin, je remercie ma famille, d’avoir toujours cru en moi et d’avoir su me donner la force de réaliser mon rêve alors que je n’avais pas la confiance de me destiner à de longues études. Je ne pourrais jamais les remercier assez de la chance qu’ils m’ont offerte en me permettant de suivre les cours de l’École de Condé.

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RÉSUMÉ INTRODUCTIF Ce mémoire représente l’aboutissement de cinq années d’études passionnantes, rythmées par les découvertes, l’apprentissage, le perfectionnement et la prise de maturité. Ce travail tourne autour d’une huile sur toile figurative de dimension 100 x 81 cm, datée de 1930. Elle a été réalisée par Marcel Caud et représente le Portrait de Madame Courciéras et sa fille. Cette toile appartient à un collectionneur particulier. En premier lieu, l’étude historique a permis de répondre à la problématique qui est de savoir dans quelle mesure cette œuvre s’inscrit dans le contexte artistique de l’entre-deux guerres. Pour commencer, l’attribution ainsi que la datation de l’œuvre, ont pu être justifiées, en replaçant la carrière de l’artiste dans le contexte historique de l’époque. Dans un second temps, l’analyse iconographique et plastique du portrait ont rendu possible l’identification des modèles, ainsi que de connaitre l’histoire de l’œuvre, de sa création jusqu’à nos jours. Tous ces éléments ont participé à la mise en évidence de la valeur artistique de ce tableau, témoin de l’art figuratif parisien des années 1930. L’étude technologique de l’œuvre relate tout le processus de recherche autour de sa matérialité et de ses altérations en vue d’aboutir à un traitement de restauration, pour rendre à cette peinture son éclat originel. Le Portrait de Madame Courciéras et sa fille présente une stratigraphie traditionnelle et est vierge de toute restauration. La majorité de ses altérations découlent d’une mauvaise conservation et principalement d’un grave dégât des eaux. Les choix de conservation ont été réalisés dans une optique de pérennité et de stabilité, dans le respect de l’intégrité de l’œuvre. Pour cela, la restauration du support a été réalisée de manière traditionnelle, tandis que des procédés plus contemporains ont aiguillé les choix de restauration de la couche picturale. Enfin, le sujet technico-scientifique est né de l’expérience dans divers ateliers, où le décrassage est l’opération la plus fréquemment réalisée. Il est question dans cette étude de comparer l’électricité statique produite par les différents vernis utilisés en restauration. En effet, l’électricité a un rôle dans le phénomène d’encrassement des surfaces peintes. En parallèle, un antistatique sera ajouté aux vernis pour tenter de réduire le phénomène d’électricité statique, afin de limiter l’encrassement.

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ABSTRACT This master thesis is the conclusion of five rich years of studying. Passion, discovery, learning were always means to gain in maturity. The project is about the restoration of the Portrait of Madame Courcieras and her daughter, an artwork created by the french painter Marcel Caud in 1930. This oil on canvas, measuring 39,37 x 31,88 inches belongs to a private collector. An historic research allowed to respond to the following problematic : in which way this piece of art takes place in the artistic context of the inter-war period ? To achieve this, the attribution as well as the datation were justified by contextualizing the painter career into the parisian art of the early twentieth century. Then, the iconography and plastic analyse of the portrait enable to identify the models and to know about their history as well as the material life of the painting. To conclude, these research permisses to highlight the artistic value of this artwork, witness of the figurative parisian art of 1930. The conservation restoration part relates all the research about the materiality of the painting through the constitutive elements and their alterations. This analyse result in the choice of the restoration process in order to restore the original beauty of this painting. The most of the degradations arise from an improper conservation, mainly a water damage. Conservation process had been choosed in order to favorise stability, respecting the materiality of the painting which had never been restored before. In the aim of sustainability, the restoration had been managed with natural traditional technics while the paint layer restoration had been carried out with contemporary materials. Finally, the scientific project arise from the experiences in restoration laboratory. The cleaning of paint layers is the most current operation. This technico-scientific study compares the static electicity produced by the various restoration varnishs. Indeed, static electricity has a role in the fouling of painted surfaces. In parallel, an antistatic will be added to the varnishes in order to try to reduce the dust attraction.

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FICHE D’IDENTIFICATION

Auteur -

Marcel Caud

Date -

1930

Titre -

Portrait de Madame Courciéras et sa fille

Lieu de création Technique Dimensions Encadrement -

Paris, France

Peinture à l’huile sur toile, tendue sur châssis de bois 100 x 81 cm Cadre d’origine en chêne ciré

Propriétaire du tableau -

Collectionneur privé

Lieu de conservation futur- Habitation particulière Date d’entrée dans l’atelier - 25 septembre 2015 Date supposée de sortie de l’atelier - 30 octobre 2017 Altérations principales - Déchirures, moisissures, enfoncements, pertes de matière, soulèvements en toit, vernis chanci et oxydé

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Figure 1 : Ĺ’uvre avant restauration

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Figure 2 : Œuvre après restauration

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TABLE DES MATIÈRES RemeRciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Résumé intRoductif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 abstRact

........................................................ 7

fiche d’identification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 avant pRopos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16 intRoduction généRale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 etude histoRique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 I. La passion artistique de Marcel Caud. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 A. Authentification de la signature de l’artiste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 B. Les origines de la vocation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 C. L’apprentissage classique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 D. Un homme à l’existence modeste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 E. De très diverses représentations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

II. L’activité de Marcel Caud au cœur la scène artistique parisienne . . . . . . . . . . . . . 34 A. Le contexte artistique de l’entre deux-guerre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34 B. Marcel Caud et la création parisienne d’après guerre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

III. Analyse du Portrait de Madame Courciéras et sa fille. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 A. La genèse de l’œuvre et son parcours dans le temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 B. Une iconographie exprimant la tendresse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43 C. Les moyens plastiques mis en œuvre au service de l’expressivité . . . . . . . . . . . . . . . . 50 D. L’inscription de l’œuvre dans l’art figuratif parisien de l’entre-deux guerres . . . . . . . . . 54

etude technologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59 examen de l’œuvRe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61 I. Étude des éléments constitutifs. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61 12


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A. Le support . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62 B. La couche picturale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65

II. État de conservation de l’œuvre. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76 A. Le support . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76 B. La couche picturale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79

III. Diagnostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84 A. Causes intrinsèques aux matériaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84 B. Causes de dégradations environnementales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86

IV.Histoire matérielle de l’œuvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92 V. Pronostic . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93 A. Évolutions à court terme. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93 B. Évolutions à long terme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93

pRotocole de RestauRation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94 I. Nécessités d’intervention . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94 A. Stabiliser l’ensemble . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94 B. Permettre une meilleure lisibilité du sujet. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94 C. Assurer la pérennité de l’œuvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94

II. Cahier des charges . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95 A. Les exigences dues à la future conservation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95 B. Les exigences provenant des matériaux constitutifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95 C. Les exigences découlant des altérations de l’œuvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96 D. Les exigences résultant de l’histoire matérielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96

III. Proposition de traitement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 IV. Rapport de restauration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104 A. Traitements urgents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104 B. Traitement de la cohésion et de l’adhésion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106 C. Reprise de la continuité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110 13


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D. Consolidation du support . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 E. Interventions sur la couche picturale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116 F. Opérations de finalisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123

paRtie scientifique

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127

I. Présentation de l’étude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129 A. Problématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129 B. Les objectifs de l’étude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133 C. Notions théoriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134

II. Le protocole expérimental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136 A. Choix des matériaux. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136 B. Fabrication des échantillons . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141 C. Validation du protocole expérimental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143

III. Mise en pratique de l’expérience et résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143 A. Mesure de l’électricité statique des vernis purs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144 B. Mesure de l’électricité statique des vernis avec un antistatique dans la résine . . . . . . 145 C. Mesure de l’électricité statique des vernis avec l’antistatique à la surface . . . . . . . . . 146

IV. Interprétation des résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147 A. Comparaison et interprétation des résultats. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147 B. Les erreurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148 C. Les limites de l’étude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150 D. Approfondissement permettant de d’affirmer ou d’infirmer la compatibilité des vernis antistatiques avec les peintures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151

conclusion généRale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154 annexes histoiRe de l’aRt . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155 Annexe 1 : Échanges avec un des descendants de l’artiste confirmant l’attribution de l’œuvre156 Annexe 2 : Échanges avec un des descendants des modèles représentés confirmant l’identité des modèles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158 14


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Annexe 3: Extraits du carnet Liste de mes portraits, répertoriant les portraits réalisés par Marcel Caud . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159 Annexe 4: Extraits du catalogue du Salon de la société des Artistes Français de 1928 . . . . . 162

annexes RestauRation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165 Annexe 1 : Protocole d’allègement de vernis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166 Annexe 2: Protocole de comblement de lacune, de réintégration colorée et de vernissage. . 173 Annexe 3: choix de la fixation pour le montage de la toile au châssis . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179 Annexe 4 : fiches techniques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182

annexes scientifiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195 Annexe 1 : fiches techniques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 196 Annexe 2 : Détail des calculs réalisés pour l’étude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 202

bibliogRaphie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205 table des illustRations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215

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AVANT PROPOS Le choix de l’œuvre de mémoire est un acte très personnel. Nous souhaitions à l’origine travailler sur une œuvre de la fin du XIXème siècle; préraphaélite, symboliste, ou bien du début du XXème siècle, appartenant à l’Art Nouveau, à l’Art Déco. Après de longues et infructueuses recherches, la découverte de ce tableau fût une révélation. Les regards profonds et touchants des personnages furent pour nous comme un appel à l’aide, un véritable lien s’est créé entre les deux protagonistes et nous-même. Voir une peinture de si belle facture dans un tel état a été le point déterminant pour la choisir comme œuvre de mémoire. La quantité d’altérations était une bonne réponse au défi que nous voulions nous imposer pour conclure ces cinq riches années d’études. De plus l’opportunité de travailler sur un tableau daté et signé pouvait permettre une analyse historique précise, et passionnante. Il s’est avéré au cours de nos recherches que travailler sur une œuvre de moins d’un siècle était une véritable chance car nous avons pu échanger, tant avec la famille de l’artiste qu’avec celle des personnes représentées, ce qui nous a réellement fait voyager dans le Paris de 1930. C’est donc avec passion et respect pour cette œuvre et pour l’artiste Marcel Caud que toutes les opérations de restaurations ont été réfléchies et réalisées. L’envie de redonner à cette œuvre l’éclat que lui avait prodigué l’artiste a toujours été liée à la plus grande réflexion déontologique.

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INTRODUCTION GÉNÉRALE Le portrait de Madame Courciéras et sa fille, tableau peint en 1930 par Marcel Caud est le sujet central de ce mémoire. Il sera étudié d’un point de vue historique puis sa matérialité sera appréhendée dans une étude technologique. Enfin, un sujet scientifique sera abordé en lien avec les questionnements issu des pratiques de restauration. La première partie de l’étude tentera de contextualiser l’œuvre dans son époque de création. La carrière de l’artiste sera analysée puis replacée dans la si riche vie artistique parisienne du début du XXème siècle. Ensuite, les circonstances de création de l’œuvre seront présentées. Enfin, les analyses plastique et iconographique du tableau seront agrémentées de comparaisons avec des œuvres qui lui sont proches. La partie de conservation et restauration sera constituée de plusieurs parties. En premier lieu, l’étude technologique permettra au lecteur de comprendre la matérialité de l’œuvre, ainsi que les dégradations qui l’altèrent. De ces observations découleront le diagnostic, qui présente les causes des altérations et qui permettra d’émettre une hypothèse sur l’histoire matérielle de l’œuvre dans le temps. L’étude technologique sera conclue par un pronostic, qui envisage les futures dégradations du tableau si aucune restauration n’est entreprise. Dans un second temps, le protocole de restauration sera établi et commencera par une explication sur la nécessite d’intervention. Un cahier des charges précis sera mis en place dans l’objectif de faire une proposition de traitement. Enfin, le rapport d’intervention décrira avec précision les opérations réalisées. Ce rapport sera agrémenté de nos remarques en lien avec les observations réalisées lors des divers traitements. L’étude technico-scientifique a pour objectif de démontrer les différences d’électricité électrostatique de plusieurs vernis utilisés en restauration. Cette expérimentation vise à d’aider les restaurateurs dans le choix du vernis final appliqué sur les œuvres qu’ils restaurent. En même temps, l’ajout d’antistatique aux vernis sera mené. Ce test purement expérimental n’est pas encore applicable à la restauration des œuvres d’art car de nombreux tests de compatibilité et de réversibilité doivent encore être réalisés, mais il pourrait ouvrir des possibilité sur un vernis limitant l’empoussièrement.

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ETUDE HISTORIQUE «Dans la contemplation d’un tableau, dans l’extase muette devant un paysage, c’est une certaine expérience de la jouissance libre qui s’accomplit» Henri Pena-Ruiz, Bonheur, 2004

Figure 3 : : Louise et Mariette Courciéras au jardin du Luxembourg,

vers 1930 19


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IntroductIon Une œuvre d’art peut être observée de différentes manières. Le caractère, la profession ou encore le vécu d’une personne influencent son regard1. Ainsi, il est compréhensible que les interprétations diffèrent. Les attributs, la composition ou l’iconographie permettent à l’observateur de comprendre les intentions de l’artiste. A ces sources d’informations s’ajoutent les ouvrages historiques. Ceux-ci permettent de replacer l’œuvre dans son contexte de création. Sans avoir la prétention d’égaler le travail d’un historien de l’art, cette étude va tenter de lier notre interprétation personnelle à nos connaissances en histoire de l’art. Ainsi espérons nous que le lecteur trouvera les informations nécessaires à la contextualisation et à l’interprétation du Portrait de Madame Courciéras et sa fille. L’œuvre, mesurant 100 x 80 cm provient d’une collection particulière. Elle a été achetée auprès d’un antiquaire en mars 2015. Ce dernier ne possédait aucune information sur le tableau, si ce n’est que l’artiste est mentionné dans le Bénézit2, et qu’il l’avait obtenu dans le sud de la France. Faire le choix de travailler sur une œuvre signée et datée est un acte résolu. Ces informations pouvaient potentiellement permettre d’approfondir le travail. Effectivement, la contextualisation étant simple, des recherches plus abouties sont possibles. De plus, l’analyse d’une peinture âgée de moins d’un siècle laisse entrevoir la possibilité d’entrer en contact avec les familles de l’artiste et des modèles. Réussir à échanger avec les descendants de Marcel Caud, fût une grande source d’informations, grâce à leur implication pour la mémoire de leur ancêtre. Mais la rigueur de leur aïeul dans le recensement de ses œuvres, de ses clients ainsi que dans la sauvegarde de diverses sources d’informations au sujet de son travail est à louer également. L’identification des modèles, grâce aux documents laissés par le peintre et par la mémoire de ses enfants, fût relativement aisée. L’exactitude de ces informations a pu être vérifiée par la prise de contact avec les descendants des femmes représentées. La problématique qui semble découler du tableau est de comprendre dans quelles mesures ce portrait figuratif s’inscrit-il dans l’art de l’entre-deux guerres ? Pour répondre à cette interrogation, l’étude se portera d’abord sur la personnalité de l’artiste et son travail, qui sera ensuite replacé dans le contexte artistique de l’époque. Puis le Portrait de madame Courciéras et sa fille sera analysé iconographiquement et plastiquement. Les légendes des œuvres de Marcel Caud n’ont pas toujours pu être complétées avec toutes les informations nécessaires à la description des œuvres. En effet, provenant de collections particulières, nous n’avons pas été en mesure de les appréhender réellement. De plus, la date n’a pas toujours été inscrite par l’artiste sur ses peintures. 1. Dans son mémoire de fin d’étude, Soazig Malliet compare les regards portés sur une œuvre par différentes catégories de personnes : les restaurateurs et les experts. En effet, en fonction de la profession ou du milieu social, une personne ne porte pas le même regard à un objet ou une œuvre. Soazig MALLIET, Comparaison de la perception visuelle entre restaurateurs de peintures et experts en tableaux. Mémoire de fin d’études, Ecole de Condé, 2016. 2. BENEZIT Emmanuel-Charles, Dictionnaire critique et documentaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs de tous les temps et de tous les pays par un groupe d’écrivains spécialistes français et étrangers. Gründ, 1999. Volume 3, p.369 20


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I. La passion artistique de Marcel Caud. A. Authentification de la signature de l’artiste L’iconographie très simple et classique de l’œuvre de mémoire ne permet pas à première vue d’identifier les modèles. En revanche, la signature et la datation sont des atouts pour l’attribution du portrait. Les premières recherches à propos de cette œuvre ont donc été réalisées dans le but de confirmer ou d’infirmer l’authentification de la signature de l’artiste3. Après avoir eu la confirmation de la part des descendants du peintre que le tableau était bien de la main de Marcel Caud, une comparaison de la typographie de plusieurs de ses signatures a été réalisée. La signature la plus courante est «CAUD» en lettres capitales, très régulièrement suivie de l’année de réalisation de l’œuvre. Parfois, le peintre inscrit son prénom, avant son nom, en lettres minuscules.

Figure 4 : Signature de l’artiste sur le portrait de Geneviève en 1930

Figure 5 : Signature présente sur l’œuvre de mémoire

Figure 6: Signature de l’artiste sur le portrait de Geneviève en 1958

Après la comparaison entre la signature de l’œuvre de mémoire, une signature de la même année et un paraphe plus tardif, il est possible de dire que les signatures sont bien de la même main. Si sur toutes les œuvres de l’artiste qui ont été comparées pour cette étude, aucune ne porte le nom Caud en lettres minuscules comme sur l’œuvre de mémoire, les calligraphies des dates sont très similaires. De plus, le «M» de la signature de 1958 est réalisé de la même manière que celui de l’œuvre de mémoire. Bien qu’il serait intéressant d’approfondir l’étude en comparant des signatures antérieures à 1930 (ce dont nous ne disposons pas pour l’instant), il est possible d’affirmer que la signature présente sur le Portrait de Madame Courciéras et sa fille est bien de la main de Marcel Caud. D’ailleurs, peu de doutes existaient sur la véracité de l’attribution car il n’est pas courant qu’un peintre modeste soit imité dans le but de faire un faux. Marcel Caud est répertorié dans différents dictionnaire d’artistes. Sa côte, référencée dans l’Akoun4, est en baisse. En effet, en 2005 celle-ci s’élevait à 5700€. Dans l’édition 2015-2016, Marcel Caud est côté 3700€, tandis que dans l’édition 2017 cette dernière n’est plus que de 3300€. La côte des peintres est très variable et dépend des dernières ventes qui ont eu lieu. Il semblerait que l’artiste est moins populaire en cette période, ou que tout simplement aucun tableau intéressant n’ait été vendu récemment. 3. «Annexe 1 : Échanges avec un des descendants de l’artiste confirmant l’attribution de l’œuvre», page 156 4. Cet ouvrage, qui parait chaque année recense les cotes des artistes. AKOUN, La cote des peintres. Isandra. 21


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B. Les origines de la vocation 1. Un enfant qui n’était pas destiné à l’art Marcel Henri Léonce Caud naît le 10 mai 1883 dans le sixième arrondissement de Paris. Fils de Jules Théodore Caud et de Marie Lucie Jannelle, il grandit à Vitry-le-françois dans la Marne. Destiné à reprendre l’hôtel l’Etoile qu’y tenait ses grands-parents, Marcel s’adonne pourtant à l’art. Préférant vivre modestement de sa passion plutôt que suivre le chemin tracé par ses parents, le jeune peintre décide d’aller vivre à Paris. Son père, inquiet de cette destinée hasardeuse lui coupe les vivres pour que Marcel Caud revienne sur sa décision. Étudier l’art dans la capitale française est le rêve de nombreux artistes et le jeune homme est bien décidé à être peintre. En effet, Paris était reconnue comme une des villes pionnière dans l’art moderne du début du XXème siècle. La ville a attiré une profusion d’artistes étrangers venus tant pour étudier que pour connaitre l’émulation5.

Figure 7: Photographie de Marcel Caud en juin 1924

2. La volonté de vivre de sa passion C’est vers l’âge de 16 ans que Marcel Caud arrive à Paris. Face à la nécessité de gagner sa vie par ses propres moyens, il entre comme peintre décorateur dans un théâtre. Cet emploi lui permet d’apprendre des techniques, de pratiquer la peinture, de vivre à la capitale et de financer ses futures études.

C. L’apprentissage classique Le jeune artiste a conscience que pour obtenir une bonne clientèle, il lui manque des connaissances académiques. En effet, la maitrise du métier de peintre passe par l’apprentissage du dessin, du travail de la couleur et par la copie des maîtres. Il entreprend donc une formation classique. L’artiste peint beaucoup à l’huile. Il produit une petite quantité d’œuvres à l’encre de chine ou au pastel. Il apprit avec plusieurs professeurs, tous artistes classiques. En premier lieu il fût l’élève de Jean-Paul Laurens, de Jules Adler6.

1. L’académie Julian L’académie Julian est fondée en 1868 par Rodolphe Julian (1839-1907) au 31 rue du Dragon dans le VIème arrondissement de Paris. Cette école privée de peinture et de sculpture est célèbre par le nombre d’artistes reconnus qui s’y sont succédés, tels William Bouguereau ou Benjamin Constant et plus tard André Derain et Fernand Léger. L’objectif de l’académie était de préparer les élèves à se présenter au Prix de Rome, d’entrer à l’école des Beaux-Arts ou encore de présenter des œuvres aux Salons. L’apprentissage y est de tradition académique, mais beaucoup des élèves de l’Académie Julian participèrent à la montée des mouvements d’avant-garde7. 5. WILSON Sarah, Paris, capitale des arts 1900-1968. Hazan, 2002. p. 40 6. BENEZIT, Op. Cit. Volume 3, p. 369 7. Informations provenant du site de l’académie Julian : https://sites.google.com/site/academiejulian/ Consulté le 29 Juin 2017 22


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En 1906 Marcel Caud est étudiant de Charles Lévy et de Jean-Paul Laurens.8 Laurens suivra longtemps le jeune artiste, jusqu’en 1912. Il travaillera durant ces mêmes années aux cotés de Marcel Rieder et de Jules Adler également.

2. Ses professeurs et leurs arts Jules Adler9 (1865-1952) est un peintre de scènes de genre, portraits et paysages. Il montre un intérêt pour les sujets humbles, son dessin est vigoureux tandis que sa palette est tendre. Élève à l’école des Beaux-Arts de Paris, il eut entre autres Bouguererau comme professeur et reçut de nombreuses médailles. Il participa régulièrement au Salon des Artistes Français et en devint même membre du jury. Peintre réaliste, sa vision psychologique des personnages est particulièrement touchante10. Jean-Paul Laurens11 (1838-1921) est un peintre d’histoire, d’art religieux, de portraits, de paysages. Il réalisa également des cartons de tapisserie, des aquarelles, des sculptures et des illustrations. Si son style peut être perçu comme simple et froid, Laurens est l’un des derniers peintres d’histoire qui s’épanouit dans ce genre délaissé à l’époque. Son entrée dans le monde artistique fut difficile, car le jeune homme provenait d’un milieu très modeste. Toutefois, après avoir suivi les cours de l’école des Beaux-Arts de Toulouse, il parvint à Paris. Il prit une place considérable dans le milieu artistique de l’époque, tant par sa présence aux salons que son enseignement à l’académie Julian.

Figure 8 : Jules Adler, Sans titre, 1903. Collection particulière

Marcel Caud a étudié auprès de plusieurs artistes classiques réalistes. Il a hérité de ses maîtres le goût du dessin juste et du réalisme. Sa facture rapide est assez proche de celle d’Adler. Il partage également avec ses enseignants la représentation des sujets de la vie quotidienne. Il côtoiera d’ailleurs les mêmes salons.

D. Un homme à l’existence modeste 1. Une vie animée Marcel Caud, en plus d’être peintre, est mélomane. Il fréquente beaucoup les musiciens et joue lui-même du violon et du piano. Il n’hésite pas à se joindre à ses amis pour les accompagner d’un instrument. 8. LOBSTEIN Dominique, SANCHEZ Pierre. Le Salon de l’école Française, répertoire des exposants et liste de leurs œuvres (1904-1950). L’échelle de Jacob, Dijon, 2011 p. 133 9. BENEZIT, Op. Cit. Volume 1 p. 77 10. SOULIER Gustave, dir, L’art décoratif, revue mensuelle d’art contemporain. 1er semestre 1906. Paris. p. 41 11.BENEZIT, Op. Cit. Volume 8 p. 332 23


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En 1905, le peintre se marie avec Julie Mouillot, alors âgée de 31 ans et professeur de chant. Leur fils unique, André meurt à l’âge de six ans de la grippe espagnole. Cette union, sera dissoute en 1912. L’artiste se remarie en 1924 avec Gabrielle Rose Romary, de dix ans sa cadette, elle aussi chanteuse. Le couple a quatre enfants : Geneviève, née en 1922 ; Philippe, né en 1924 ; Cécile née en 1928 et enfin Pierre né en 1935. L’artiste peintre et la chanteuse sauront inculquer à leurs enfants un goût certain pour l’art. Musiciens, poètes, dessinateurs, ils mènent une vie de bohème12. La famille est très soudée et les enfants éprouvent de l’admiration envers leur père. Pourtant aucun ne suivra sa voie, probablement à cause de la difficulté de vivre d’une telle profession au XXème siècle. Marcel Caud apprécie de prendre pour modèle les membres de sa famille, et ce, tout au long de sa carrière. Peindre ses proches lui permet d’améliorer sa technique, toutefois il considère cette pratique davantage comme un moyen d’immortaliser les instants de bonheur familial.

Figure 9 : Marcel Caud, Geneviève peignant. Huile sur toile, vers 1930. Collection particulière

Figure 10 : Marcel Caud, Portrait de Geneviève. Huile sur toile 1944. Collection particulière

Figure 11 : Marcel Caud, Portrait de Geneviève. Huile sur toile. 1958. Collection particulière

Caud vit modestement mais il est généreux. L’artiste est bon vivant et il apprécie particulièrement recevoir de la visite. Son atelier est un lieu de rencontre où se côtoient tant ses proches que des artistes ou des médecins. L’artiste entretenait parfois des relations amicales avec ses clients. Les docteurs représentent une part importante de la clientèle du peintre. En effet, les personnes choisissant de se faire portraiturer par un peintre plutôt que se faire photographier appartiennent à une certaine élite. Le portrait peint est plus prestigieux qu’un tirage photographique toutefois le prix n’est pas comparable. Il est donc explicable que ce soit les classes aisées de la population qui passent des commandes aux peintres. A ce jour, des listes précises des œuvres réalisées par Marcel Caud sont connues. Toutefois, aucune indication portant sur les tarifs auxquels le peintre a vendu ses œuvres n’est répertoriée. Connaissant le mode de vie modeste de la famille Caud, il est possible d’émettre l’hypothèse que l’artiste réglait parfois ses dus en offrant un tableau aux personnes lui ayant rendu service. 12. «Bohème : Ensemble des écrivains, artistes qui vivent au jour le jour en marge des règles sociales.» Larousse [En ligne].(Page consultée le 3 avril 2017) 24


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2. Quelques périodes troublées Bien que la famille Caud vive dans l’harmonie, quelques époques difficiles ont rythmées son quotidien. La condition d’artiste de Marcel Caud ne permet pas au ménage d’avoir une situation stable. La famille a déménagé plusieurs fois. Jusqu’en 1932, ils habitent rue Cambronne à Paris, dans le XVème arrondissement, d’où ils furent expropriés. Ils s’installent en banlieue parisienne, à Montrouge mais déménagent trois ans plus tard, pour se rendre dans un logement moins coûteux, toujours à Montrouge. Cette petite maison possédait une pièce dans laquelle l’artiste établit son atelier, où il aimait tant recevoir ses amis. Durant la Seconde Guerre mondiale, la famille s’exile en Bretagne, où vit la sœur de Gabrielle Rose, la femme de l’artiste. Bien que cette région de la France soit occupée par les allemands, la vie y était sans doute plus calme et moins dangereuse qu’à Paris. A la fin de la guerre, Marcel Caud regagne sa maison de Montrouge. La vie est plus dure, les tableaux se vendent moins. Il continue néanmoins de recevoir quelques commandes de portraits. Il produit des vues de Paris, qui se vendent assez bien, de même que les natures mortes. C’est en 1966 que Marcel Caud s’éteindra, dans sa maison de Montrouge, à l’âge de 83 ans.

E. De très diverses représentations Marcel Caud a un art varié. Cela lui permet de s’ouvrir à une plus grande clientèle. Cette pluridisciplinarité est assez courante chez les artistes modestes, s’ils veulent vivre de leur art. Au début de sa carrière, l’artiste réalise en majorité des peintures sur commande. Ainsi, les portraits et les œuvres religieuses, auxquels s’accordent bien son style classique, représentent l’essentiel de son œuvre. De plus, son apprentissage en tant que décorateur de théâtre lui permet d’exécuter des décorations d’appartements ou de restaurants. Après la Seconde Guerre mondiale, la carrière de l’artiste devient moins fructueuse. Les commandes de portrait et d’art religieux se raréfient, en contrepartie il vend davantage de paysages. Malgré l’ambivalence de Marcel Caud, très peu de scènes de genre ont été répertoriées dans sa carrière et aucune peinture d’histoire n’a été trouvée. Cela peut s’expliquer par le fait que ce genre artistique était plutôt réservé aux peintres officiels de l’académie.

1. Les copies Marcel Caud a certainement dû copier les artistes classiques lorsqu’il était étudiant à l’académie Julian. Toutefois aucune de ces toiles n’a pour l’instant été répertoriée. Il réalise quelques copies, qu’il peint généralement sur un format proche de l’original. Nous n’avons pas d’information sur la technique employée. Il est assez probable que Caud n’ait pas cherché à copier avec exactitude la technique du peintre, tant dans l’emploi des matériaux que dans la plastique. De plus, il appose sa signature et la date de réalisation sur ses toiles. La touche personnelle de l’artiste est bien visible si l’on compare l’Apothéose de Vénus avec l’original de Fragonard13, intitulé Les Baigneuses. Premièrement, le titre a été modifié, ce qui montre une appropriation du sujet. Si la composition et les proportions des éléments principaux ont été 13. Jean-Honoré Fragonard, 1732-1806. Peintre d’histoire et de paysages. BENEZIT, Op. Cit. Volume 5 p. 626 25


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parfaitement respectées, en revanche, le copiste a pris des libertés en ce qui concerne les éléments végétaux et le ciel. Ceux-ci sont traités avec moins de fidélité par rapport à l’original. Malgré la pauvre qualité des photographies auxquelles nous devons nous référer, il semblerait que Caud ait travaillé davantage avec la peinture tonale pour les ombres des corps que Fragonard. Par ailleurs, toujours en comparaison avec l’original, les contrastes sont plus marqués sur les personnages tandis qu’ils le sont moins dans la végétation et le ciel. La composition originale est mieux unifiée par la lumière, qui est plutôt dirigée sur les deux femmes centrales dans la copie. La touche de Fragonard est plus légère et vibrante; celle de Caud plus généreuse et floue. Les couleurs employées par le copiste sont plus vives et saturées que les couleurs en demi-teinte de Fragonard.

Figure 13 : Jean-Honoré Fragonard, Les baigneuses. Huile sur toile, 64 x 80 cm, 1772-1775. Musée du Louvre, Paris

Figure 12 : Marcel Caud, Apothéose de Vénus. D’après Fragonard. Huile sur toile, 65 x 81 cm. 1913. Collection particulière.

2. La nature morte La nature morte est un genre qui se vend assez bien. Caud l’a donc fréquemment visité. Ces «natures silencieuses»14 voient leur apogée aux XVIIème et XVIIIème siècle toutefois, elles font l’objet de recherches de la part de nombreux artistes durant les siècles suivants. Certains peintres possèdent des objets auxquels il tiennent particulièrement et qu’ils représentent régulièrement dans leurs compositions. C’est le cas de Marcel Caud. On perçoit dans ses œuvres un goût pour l’accumulation d’objets sur plusieurs plans très rapprochés. Cela est assez représentatif du goût Flamand durant l’époque baroque.15 La disposition d’éléments aux textures différentes (métal, verre, céramique, fruits, fruits de mer) permet au peintre de présenter sa capacité à réaliser les différentes surfaces. De Nature morte au plat d’huître, œuvre réalisée durant l’apprentissage de l’artiste à l’académie Julian, émane un respect des traditions classiques néerlandaises, où la préoccupation morale est liée à la représentation concrète des choses. La perspective plongeante permet de présenter de nombreux objets dont le dessin est appuyé, le coloris vif et les contrastes puissants. Plus tard, Caud développe son style propre en produisant des œuvres dans lesquelles la touche vaporeuse côtoie les couleurs insaturées, moyens hérités des Impressionnistes. Ses natures mortes perdent la contenance moralisatrice des vanités classiques pour revêtir un aspect plus décoratif. L’artiste 14. Dictionnaire de la Connaissance de la peinture, Op. Cit Page 335 15. Ibidem. Page 337 26


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laisse entrevoir son attachement aux recherches impressionnistes à travers la peinture tonale. Bien que le style de Marcel Caud suive toujours son enseignement classique, principalement à travers l’exactitude du dessin et le goût pour la composition, le peintre prend des libertés grâce à une touche à la fois légère et empâtée mais également en usant de demi-teintes.

Figure 14 : Marcel Caud, Nature morte au plat d’huître. Huile sur toile, 1907. Collection particulière.

Figure 15 : Marcel Caud. Sans titre. Huile sur toile. Collection particulière.

Figure 17: Paul Cézanne, Nature morte au rideau. Huile sur toile, 55 x 74 cm. Entre 1899 et 1905. Saint-Pétersbourg, musée de l’Ermitage

Figure 16 : Jan Davidsz de Heem. Petit déjeuner avec un verre de champagne et une pipe. Huile sur toile. 1642 Residenzgalerie, Autriche

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3. Le paysage Après le genre du portrait, celui du paysage est probablement le plus usité par Marcel Caud. Les départs en vacances sont un motif pour représenter les lieux qu’il visite. Le sud de la France, l’Auvergne mais surtout la Bretagne ont été des lieux de prédilection pour la création de nouvelles toiles. Ces périodes de vacances sont très favorables à la famille puisque l’artiste vend beaucoup de toiles dans les région où il séjourne. En effet, les habitants locaux mais principalement les touristes, achètent les représentations des places qu’ils apprécient au cours de leurs séjours. Marcel Caud a également peint la Bretagne durant son exil lors de la Seconde Guerre mondiale.

Les paysages de Caud sont peints avec une touche rapide et une pâte semi-épaisse. On y perçoit l’instantanéité du geste qui cherche à capturer la fugacité des instants. Ce traitement découle des pratiques impressionnistes16, résultant elles-même des recherches des peintres de l’école de Barbizon. Une cinquantaine d’année sont passées entre les premières peintures impressionnistes et le début de la carrière de Marcel Caud. Les mouvements tels que le néo-impressionnisme, le symbolisme, le fauvisme, les nabis, ont œuvré à la suite de l’Impressionnisme dans la recherche de nouvelles représentations. Les artistes de ces courants d’avant garde s’éloignent de la peinture académique car cette dernière ne leur semble plus convenir à l’expression du quotidien du début du XXème siècle. La création doit à présent se fonder sur la perception. Ainsi, la couleur est mise en avant pour l’expression plastique17. Tant les artistes que les scientifiques s’intéressent à la couleur. Ainsi, la théorie de Chevreul à propos des contrastes simultanés corrobore le fait que la perception d’une couleur dépend des teintes qui l’avoisinent18. L’expressivité d’une peinture peut donc entièrement découler d’une harmonie colorée. Cézanne appuie par ailleurs que «Quand la couleur est à sa richesse, la forme est à sa plénitude»19.

Marcel Caud a une formation classique et ne s’en détache pas autant que les artistes des mouvements cités précédemment. En effet, Monet, Degas, Moreau, Sérusier ou encore Matisse sont des peintres en constante recherche, et dont le renom permet petit à petit de devenir plus importants. Pourtant, surtout dans le genre du paysage, Caud se permet d’utiliser les innovations de ses prédécesseurs. Juxtaposition de touches colorées, impressions lumineuses, aplats de couleur, association de couleurs complémentaires font partie du registre de l’artiste.

16. Le mouvement impressionniste, qui a été particulièrement actif entre 1855 et 1875, regroupe des artistes qui remettent en question les règles de la peinture classique. En traitant leurs œuvres par la juxtaposition de touches colorées, les peintres impressionnistes représentent la réalité telle qu’ils la perçoivent. Ils peignent généralement sur le motif et cherchent à faire transparaître les multiples aspects d’un paysage. LOILIER Hervé. Histoire de L’art Occidental. Ellipses, 2003, Paris. pp 354-361 17. Ibidem pp 367-373 18. CHEVREUL Michel-Eugène, De la loi du contraste simultané des couleurs et de l’assortiment des objets colorés considérés d’après cette loi dans ses rapports avec la peinture, les tapisseries... Pitois-Levrault, 1839, Paris. p.7 . (Consulté sur Gallica le 6 avril 2017) 19. Dictionnaire de la Connaissance de la peinture, Op. Cit Page 342 28


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Figure 18 : Marcel Caud, Paysage Breton. Peinture à l’huile. Collection particulière.

Figure 19 : Marcel Caud, Paysage de montagne. Huile sur toile. Collection particulière

Figure 20 : Albert Marquet, Le Pyla. Huile sur toile. 1935. Bordeaux, Musée des Beaux-Arts.

Figure 21 : Paul Cézanne, La Montagne Sainte-Victoire. 1885-1887, huile sur toile. Londres, Courtauld Institute of Art

Paysage Breton, dont la date de création nous est inconnue, peut être rapproché de la toile représentant Le Pyla d’Albert Marquet, datant de 1935. Les compositions, ainsi que les teintes assez similaires, figurent des front de mer en pleine journée . La représentation des embarcations et des personnages, suggérés par de simples traits, ajoutent à la simplicité et à l’expressivité des œuvres. Toutefois, la peinture de Marquet est davantage portée vers la bidimentionnalité car les ombres sont moins marquées et les touches plus espacées. Paysage de Montagne laisse entrevoir une influence de l’art de Cézanne, dont les touches sont plus généreuses. Cézanne travaille par la juxtaposition de plans colorés et cette peinture tonale apporte à la fois une structure et une vibration à la représentation. Le sujet est ici pour les deux peintres un simple prétexte à leur expression et leur recherche artistique. 29


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4. Les scènes religieuses Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, Caud accomplit régulièrement des commandes d’ordre religieux. Celles-ci se caractérisent généralement par des chemins de croix. La tradition de la représentation de la passion du Christ est développée de plusieurs manière durant l’Ancien Régime. Toutefois la pratique telle qu’on la connait aujourd’hui s’est concrétisée durant la période de la Restauration, lorsque l’Église cherche à répandre de nouveau la piété auprès d’un peuple déchristianisé après les bouleversements de la Révolution20. A la fin du XIXème et au début du XXème siècle, il y a donc beaucoup de demande pour ce genre de représentation. Le style académique de l’artiste s’accorde parfaitement aux sujets de dévotion classiques. La manière de peindre académique de Marcel Caud est un atout pour l’obtention des commandes d’art religieux. Pour réaliser tant d’œuvres dévotes on peut penser que Marcel Caud avait des convictions certaines, cette supposition peut être étayée par son style de vie centré sur l’amour pour ses proches et pour l’art qu’il fait partager. A la fin de sa vie, l’artiste avouera qu’il «a fait son chemin de croix»21, ce qui dénote l’importante quantité d’œuvres religieuses qu’il a produites. L’artiste obtint la réalisation d’importants cycles de décoration, comme la décoration de la chapelle des morts de la cathédrale de Noyon22. Toutefois, le plus gros projet de décoration obtenu par l’artiste est certainement l’ornementation d’une chapelle privée à Boulogne-Billancourt. Madame Demaizière et les Dames de Saint-Maur fondent en 1904 l’école Dupanloup. L’institution s’est établie en 1921 à Boulogne, dans l’ancien palais du Grand Duc Paul23. La chapelle, construite en 1921 n’était pas érigée avec des matériaux pérennes car elle était considérée comme provisoire. La décoration de la chapelle par Caud a eu lieu après 1928. L’artiste peint l’ensemble de la voûte du lieu de culte, ainsi qu’un peu plus tard le fond de celui-ci. Les fresques24 de l’artiste étaient peintes avec des tonalités assez claires. Sur l’ensemble de la voûte étaient représentés la Vierge, des anges ainsi que de nombreux saints. La peinture du mur quant à elle représentait l’agneau mystique entouré d’anges. L’ensemble comportait soixante-quinze personnages, plus grands que nature. L’artiste a représenté les portraits des membres de sa famille et de ses amis pour ces figures25. L’édifice fût détruit en 1969, car il se dégradait rapidement. Son insalubrité devenait dangereuse et le rendait irréparable. 20. BOULEY Bénédicte, Le chemin de croix, dans l’histoire. [Article mis en ligne le 2 avril 2015] sur http://www.liturgiecatholique.fr. [consulté le 11 avril 2017] 21. Citation provenant de l’entretien avec l’arrière-petit-fils de l’artiste, ayant eu lieu le 28 novembre 2015. 22. Dictionnaire biographique des artistes contemporains, 1910-1930. Tome 1, p. 253 23. ASSOUAD Patrice, Dupanloup - une histoire 1904-2004. Edité par Patrice Assouad et l’Association du centenaire de Dupanloup, Boulogne-Billancourt, 2005 24. Les différentes sources d’informations indiquent que les peintures de Marcel Caud étaient des fresques. Nous émettons un doute sur le fait que l’artiste ait utilisé une technique si particulière et dont aucune autre trace ne figure dans son Œuvre. Il est possible que l’auteur Patrice Assouad et les descendants de l’artiste ne possèdent pas les connaissances théoriques sur les techniques de peinture leur permettant de différencier la technique de la fresque de la peinture murale. 25. Voir les pages du carnet de l’artiste, «Annexe 3: Extraits du carnet répertoriant les portraits réalisés par Marcel Caud», page 118 30


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Figure 22 : Vue de la Chapelle de l’école Dupanloup ornée des peintures de Marcel Caud, après 1928.

5. Le portrait Marcel Caud réalise un grand nombre de portraits, qu’il peint généralement sur commande. Il arrive également que le peintre représente les membres de sa famille. En dernier lieu, il advient que l’artiste accomplisse le portrait de personnes lui ayant rendu service, en guise de remerciement. Dans le recueil du peintre, intitulé Liste de mes Portraits26, ce dernier comptabilise deux cent soixante sept représentations. Y sont inclus les soixante quinze portraits qu’il a peint sous les traits de saints et d’anges dans la chapelle de l’école Dupanloup. Il semblerait qu’à la fin de sa vie, ses portraits, peut-être jugés trop classiques, se vendaient moins qu’à ses débuts. Les portraits peints par Marcel Caud ont des caractéristiques plastiques similaires. Une dizaine d’entre eux ont pu être comparés pour l’accomplissement de cette étude. Il est intéressant de comparer les datations des tableaux avec les styles vestimentaires et capillaires adoptés par les modèles. Une réelle évolution des tendances est perceptible durant la carrière de l’artiste. Si celui-ci s’attelle à représenter fidèlement les variations de la mode, il ne modifie pour autant pas sa manière de représenter les personnages.

26.Quelques pages de ce carnet sont présentées dans l’Annexe 3: «Extraits du carnet répertoriant les portraits réalisés par Marcel Caud», page 118 31


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Figure 23 : Marcel Caud, Portrait de Geneviève, 1947. Collection particulière

Figure 24 : Marcel Caud, Autoportrait, vers 1940. Collection particulière.

Figure 25 : Marcel Caud, Titre et date inconnus. Collection particulière.

De manière générale, les portraits de Marcel Caud sont identifiables par les caractéristiques qui vont être exposées à présent. Les cadrages prédominants sont la représentation en buste et en grand buste, ces derniers pouvant également être grandeur nature27. Dans le cadrage grand buste, toute la partie haute du corps est représentée et les mains sont visibles. Dans ce cas, le modèle est généralement assis. Le peintre positionne de manière quasi systématique ses sujets frontalement. Dans la plupart des cas, le modèle a le corps et le visage orientés vers le côté senestre du tableau. Un léger décalage des épaules permet de creuser un peu la profondeur de la toile de manière à casser la tendance à la bidimentionnalité. Celle-ci étant apportée par le fond uni, de couleur sobre et par l’absence d’objet pour marquer la profondeur par la succession des plans. L’artiste représente ses modèles dans une attitude paisible et statique. L’expressivité émane des regards tandis que les figures sont relativement neutres. Les visages sont dessinés avec précision et naturalisme. Le désir du peintre de s’approcher de l’apparence réelle de ses modèles est manifeste. Toutefois, il prend plus de liberté dans la représentation des vêtements, du reste du corps et du fond. La grande majorité de ses fonds sont sans profondeur. Ils sont de tonalité verte, plus ou moins chauds et réalisés par la superposition d’une multitude de tons, donnant une impression flochetée et vibrante. Les couleurs employées sur les personnages sont vives et multiples. L’artiste joue avec les contrastes simultanés, comme il le fait dans ses paysages et natures mortes. Ainsi, il se plaît à utiliser la peinture tonale dans les carnations et à multiplier les nuances sur les vêtements. Une lumière naturelle et diffuse, venant exclusivement de l’angle supérieur dextre unifie les différentes compositions. Il est assez fréquent dans les tableaux classiques que la lumière provienne de la droite des personnages. Dans les peintures de notre connaissance, seul son autoportrait daté autour de 1940 a une plastique différente de celle qui vient d’être décrite. En effet, dans cette toile, l’arrière plan représente une rue et la lumière provient de l’angle supérieur senestre.

27. Ces dénominations particulières ont été recueillies dans la carnet Liste de mes Portraits que l’artiste a tenu tout au long de sa carrière ««Annexe 2 : Échanges avec un des descendants des modèles représentés confirmant l’identité des modèles», page 158. 32


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conclusIon Marcel Caud s’est adonné à beaucoup de genres artistiques. Le peintre possède une certaine variété de styles, qui varient notamment en fonction du sujet représenté. Ainsi, il ne traite pas un paysage de la même manière qu’une nature morte ou qu’un portrait. Son apprentissage classique est principalement perceptible dans son goût pour la composition qui est très présent dans ses natures mortes. Le dessin précis et les poses rigides qui caractérisent ses portraits sont aussi hérités de ses cours à l’académie Julian. En revanche, les influences de ses contemporains s’expriment par la liberté de touches, l’épaisseur de la matière, l’utilisation de la peinture tonale et des lois de complémentarité. Ces caractéristiques se retrouvent principalement dans le paysage mais également par détail dans les autres genres auxquels l’artiste se consacre. Marcel Caud pratiquait avec beaucoup de liberté l’art du paysage, ainsi que les représentations de ses enfants dans des moments d’intimité. En effet, ces sujets lui permettaient de s’exprimer avec davantage de spontanéité et de subjectivité. Néanmoins, le peintre a produit de nombreuses œuvres d’après des commandes. La production d’art religieux, de copies ou de portrait permettait à ce peintre sans grande renommée de vivre de son art. Le contexte artistique du début du XXème siècle a connu de grands bouleversements. Le peintre a côtoyé des quartiers de Paris très fréquentés par les artistes français et étrangers. Il est probable que Marcel Caud ait échangé avec les artistes d’avant-garde. Pourtant, l’artiste a cherché à s’inscrire dans l’art parisien classique pour asseoir sa réputation. Pour cela, il a participé régulièrement à différents salons. Il affirme ainsi son appartenance au courant naturaliste.

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II. L’activité de Marcel Caud au cœur la scène artistique parisienne Le début du XXème siècle, surtout après les bouleversements de la Première Guerre mondiale, est une période durant laquelle les recherches artistiques sont nombreuses. Ce chapitre permettra de comprendre à quel mouvement peut être rattaché Marcel Caud, et tentera de montrer en quoi le peintre s’inscrit dans la tradition classique.

A. Le contexte artistique de l’entre deux-guerre 1. La reprise de la vie après la guerre et l’opposition entre les Anciens et les Modernes. Si le pays sort vainqueur de la Première Guerre mondiale, les blessures tant physiques que morales marquent la société. La France se lance dans des chantiers de reconstruction. Les années 1920, parfois qualifiées d’années folles sont le symbole de la libération des mœurs. La société cherche à oublier les douleurs de la guerre. En art comme dans la vie quotidienne, le goût est à l’expérimentation et à la liberté individuelle28. Les années 1920 voient la véritable scission entre les Anciens et les Modernes29. Les mouvements d’avant gardes sont de plus en plus présents, en réaction contre la société qui a engendré la guerre. Face à eux, les artistes figuratifs traditionnels cherchent «la construction de l’avenir par leurs efforts de poursuite et de reconquêtes esthétiques et iconographiques»30. Si la création est importante, elle se renouvelle peu et les salons classiques et modernes ont tendance à se ressembler31. En effet, l’école Française, représentée tant par les artistes traditionnels que modernes, a tenté de renaître par le classicisme32 La profession de peintre, qui est de plus en plus accessible depuis le XVIIIème siècle, est en plein essor, par conséquent, vivre de son art est de plus en plus difficile33 car il y a toujours davantage d’artistes et moins de commanditaires. Cette surabondance d’œuvre représente les prémices du système capitaliste, avec la commercialisation à grande échelle. Ce schéma est représentatif du marché de l’art et donc de la création du XXème siècle. Etre présent lors des grandes manifestations est par conséquent très recherché par les artistes, pour asseoir leur notoriété.

28. CLAIR Jean, dir , Musée des Beaux arts de Montréal. Les années 20, l’âge des métropoles. Montréal, Gallimard 1991 29. Ce parallèle à l’art de la fin du XVIIème a été fait par René HUIGHE en 1968. MAIGNON Claire, L’âge critique des salons, 1914-1925 : l’école française, la tradition et l’art moderne. Presses universitaires de Rouen et du Havre. 2014, p. 25 30. WINTER Jay Murray, Entre deuil et mémoire : la Grande Guerre dans l’histoire culturelle de l’Europe, Paris, Armand Colin, 2008.p. 26 31. Ibidem pp 42-45 32.Ibidem p. 289 33. SAINT-GERAND, Jacques-Philippe . Agnès GRACEFFA, dir., Vivre de son art. Histoire du statut de l’artiste XVe-XXIe siècles. Questions de communication, n 23, 1, 2014-02-01 p.419 34


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a. Les suiveurs de la tradition classique

A la sortie de la guerre, beaucoup attendent de l’art qu’il fasse renaître les traditions, qui sont des repères rassurants. En effet, «les courants figuratifs traditionnels ont majoritairement participé à la construction de l’avenir par leurs efforts de poursuite et de reconquêtes esthétiques et iconographiques»34. De plus, le devoir de commémoration des soldats morts pour la France nécessite une représentation réaliste, glorifiante et idéalisante. Les représentations traditionnelles sont donc très demandées après la guerre, tant pour la glorification du sacrifice des soldats que pour retrouver un art français rayonnant, une certaine identité nationale. Le naturalisme prend également une part importante, dans la représentation des conditions de vie comme on peut le voir au travers du tableau Dans les tranchées de Lalauze. Ce courant traditionaliste est également nationaliste, ainsi, à l’approche de la montée des extrêmes en Europe, il prendra encore de l’importance.

Figure 27 : Alphonse Lalauze, Dans les tranchées,1915. Huile sur toile, 66x55 cm. Collection particulière

Figure 26 : Romaine Brooks, La France croisée. 1914. Huile sur toile, 116.2 x 85.0 cm Washington, Smithsonian American art museum

La production de monuments funéraires rend la création artistique presque industrielle35, sans originalité, ce qui sera fortement déprécié par les critiques d’art36. On peut supposer que c’est cette production outrancière d’art figuratif de qualité moyenne qui tendra à ternir l’image de l’art tradition34. MAIGNON Claire, Op. Cit 35. DUPONTEL Albert (réalisateur), Au revoir là-haut (1h57), 2017. D’après un roman de Pierre Lemaitre. 36.Ibidem . p. 214 35


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nel figuratif au profit des mouvements modernes. En effet, l’art naturaliste de cette période, bien qu’abondant, est rarement mentionné dans les ouvrages d’histoire de l’art. b. Les artistes modernes, à la recherche de nouvelles représentations

Paris est connue pour avoir été un des plus grand foyers de création artistique durant le premier tiers du XXème siècle. Les Batignolles, Montmartre, et surtout Montparnasse sont les centres de la vie artistique parisienne37. La communauté artistique, composée de beaucoup d’immigrés est moderne, indépendante, optimiste. Le quartier de Montparnasse symbolise depuis la fin de la guerre la liberté. Les artistes qui s’y retrouvent s’écartent de l’art académique de l’Ecole des beaux-arts et préfèrent fréquenter les académies libre, comme par exemple l’académie Julian38.

Figure 28 : Jacques Chapiro Derrière la grille de la Ruche, le café de Dantzig. Huile sur toile non datée. Collection particulière

2. Les salons, au cœur de la vie artistique française Dans la lignée des salons de l’Académie Royale au Palais-Royal, mis en place par Colbert pour Louis XIV en 166739 , la Société des Artistes Français expose les œuvres académiques. Le Salon des Artistes Français perpétue, depuis le XIXème siècle, la tradition de l’art officiel républicain40. Tous les grands noms de l’art français s’y sont succédés en établissant la postérité de ce salon qui fait rayonner l’image de la France à l’international. La présence d’artistes d’origine étrangère est d’ailleurs jugée positive, puisqu’elle dénote l’importance de l’art académique français dans le monde. Depuis l’inauguration du Grand-Palais en 1900, s’y tiennent les Expositions de la Société des Artistes Français, ainsi que d’autres expositions sans lien avec l’académisme41. Durant la première guerre mondiale, les salons cessèrent. Dès 1918, le besoin de reconstruction du pays a incité à la remise en place de tels évènements. Le salon des Indépendants et le Salon d’Automne deviennent des institutions nationales, aux côtés du Salon des Artistes Français. Ces évènements sont des

37. CLAIR Jean, dir. Op. Cit 38. BOUVET Vincent, DUROZOI Gérard, Paris 1919-1939, Art et Culture. Hazan, 2009 pp217218 39. Informations provenant du site officiel du Salon des Artistes Français [Consulté le 17 avril 2017] http://www.artistes-francais.com 40. MAIGNON Claire,Op. Cit, pp.44-45 41.“En donnant à nos expositions tout l’éclat possible, en encourageant tous les talents, sans esprit d’école, dans quelque voie qu’ils se manifestent, en assurant l’impartialité dans la mesure de l’humaine justice, nous sommes certains de servir les véritables intérêts de l’art français ». Tony ROBERT-FLEURY. Provenant du site officiel de la Société des Artistes Français : http://www.artistes-francais.com. Consulté le 17 avril 2017 36


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lieux de débats, ce qui favorise l’émulation artistique du XXème siècle42. .

Figure 29 : Photographie du Salon des Artistes français de 1920, section sculpture, au Grand-Palais

Figure 30 : Carte postale représentant le Grand Palais lors de son ouverture en 1900

B. Marcel Caud et la création parisienne d’après guerre 1 . Un peintre, au cœur d’un quartier riche en échanges artistiques Marcel Caud a vécu plusieurs années dans le quartier de Montparnasse. Bien que son art soit très classique, il est difficile de penser qu’il n’ait jamais cherché à rencontrer les artistes des avant gardes. Une inscription, présente sur le fond de bois fermant l’encadrement de l’œuvre laisse fortement penser que l’artiste se rendait à la Ruche43, passage Dantzig, dans le XVème arrondissement. Les inscriptions «Renaudin» et «météreau 3 passage Dantzig» ainsi que des calculs (de découpe par exemple) ont pu être lus grâce à une caméra infra-rouge. Ces inscriptions, certainement de la main de l’encadreur, relatent le fait que l’œuvre a été encadrée à quelques pas de la Ruche. On peut affirmer que l’artiste s’est rendu lui-même dans cet atelier d’encadrement car la mention «Gardez moi la chute de ce panneau SVP . Caud», invisible à l’œil nu car elle a été effacée est distinctement lisible aux infra-rouges. Il est presque impensable que le peintre soit passé à quelques pas de la Ruche sans s’y être 42. Informations provenant du site officiel du salon d’Automne [Consulté le 17 avril 2017] http:// www.salon-automne.com. 43. La Ruche était une cité d’artistes disposant de salles d’exposition, d‘ateliers et d’un théâtre, ainsi que de logements très peu coûteux, ce qui fit de la Ruche un centre d’art important. Des grands noms comme Brancusi, Chagall, Léger, Rivera et bien d’autres y séjournèrent. La cité a été créée par Alfred Boucher en 1900 . Musée du Montparnasse, La Ruche, le centenaire d’une cité d’artiste. Atlantica, 2002. pp-14-28 37


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arrêté. Toutefois, les descendants de l’artiste n’ont pas de souvenir d’échanges entre Caud et des artistes des avant gardes. Dans les documents du peintre, aucune mention n’a pour l’instant été trouvée. Pourtant, les échanges avec des artistes (peintres, sculpteurs, dessinateurs) au style classique sont confirmés, car Caud a répertorié les noms et les professions des personnes dont il peignait le portrait. On peut par exemple citer Darley (sculpteur), Grassey (peintre)44.

Figure 31 : Inscription de la main de l’artiste, au revers du panneau qui fermait l’encadrement

Figure 32 : Retranscription des écritures présentes à l’arrière du panneau, indiquant probablement le nom et l’adresse de l’encadreur

Durant cette période artistique les peintres modernes et les peintres classiques se querellaient. Il semble possible que Marcel Caud n’ait eu aucune affinité avec les artistes des avant gardes. Pourtant, la vie de bohème, décrite par ses descendants pourrait paraître en accord avec la vie des artistes d’avant garde. L’attrait pour la rigueur et les sujets moraux sur le thème de la famille, avec un dessin construit inscrit définitivement l’artiste dans le courant classique et naturaliste du XXème siècle. Si Marcel Caud se permet d’utiliser une touche épaisse et rapide ainsi que la peinture tonale, c’est que ces techniques des artistes impressionnistes, qui existaient déjà depuis plusieurs décennies n’étaient plus perçues comme des aberrations en face de l’art classique.

2. Un artiste présent aux salons Dans ce contexte du début du XXème siècle en France, où l’art occupe une place prédominante, exposer dans un salon officiel est l’ambition de nombreux peintres. L’intérêt d’être présent à de telles manifestations est de se faire connaître, dans l’espoir de trouver des mécènes ou des acheteurs . La convoitise ultime étant d’être acheté par l’état pour être exposé au Musée du Luxembourg, 44. CAUD Marcel, Liste de mes portraits, Op. Cit pp.1-6. 38


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musée d’art contemporain de l’époque45. Jean-Paul Laurens fût président en 1900 de la Société des Artistes Français. Quelques années plus tard, il sera professeur de Caud à l’académie Julian. La présence de Marcel Caud au Salon a pu être vérifiée en 192846, mais il est probable qu’il y ait exposé à plusieurs reprises. Les professeurs de Caud, Jules Adler et Jean-Paul Laurens exposèrent la même année , lors de la 141ème Exposition Officielle des Beaux-Arts47. Le peintre participe à d’autres salons de plus ou moins grande envergure tels que le Salon de l’École Française48, le Salon d’Hiver ou les expositions de la mairie de Montrouge49. Les représentations naturalistes, dans la veine classique de Caud correspondent à l’attente des organisateurs de la Société des Artistes Français. L’artiste suit les même voies que ses maîtres, qui s’intéressaient particulièrement aux classes sociales défavorisées, à travers le Réalisme. Les contes de Perrault50 , tableau exposé en 1928 au Salon des Artistes Français, ne se démarque pas plastiquement. Il est simple, les personnages idéalisés, la représentation sereine, le temps est comme suspendu. Les vêtements et les coupes de cheveux sont représentatifs de la mode contemporaine. Le sujet est également une réponse aux préoccupations sociétales, puisque l’éducation des enfants a pris une place très importante dans la société dès la fin du XIXème siècle51. Le tableau est une allégorie de l’éducation et de la famille. Ce thème important de la culture française montre également l’intérêt que porte l’artiste aux enfants. .

Figure 33 : Marcel Caud, Les contes de Perrault, localisation et dimensions inconnues. 1928

45.LOBSTEIN Dominique, SANCHEZ Pierre.Op. Cit. pp 9-27 46. Informations provenant des archives personnelles de l’artiste. Voir «Annexe 4: Extraits du catalogue du Salon de la société des Artistes Français de 1928», page 162 47.Ibidem 48. Ce salon était réservé aux artistes de nationalité française. Certains artistes français se sentaient noyés dans l’importante présence des artistes étrangers aux salons parisiens. C’est dans le but de présenter la création uniquement française que Plument créa en 1904 le Salon de l’École Française. Cette organisation qui prône les valeurs traditionnelles et catholiques est relativement proche des idées du mouvement des Croix-de-Feu, parti dont la devise est «Travail-Famille-Patrie». LOBSTEIN Dominique, SANCHEZ Pierre. Op. Cit pp 133-134 49. Informations provenant de l’entretien avec l’arrière-petit-fils de l’artiste, ayant eu lieu en date du 28 novembre 2015. 50. Dans le carnet répertoriant les portraits réalisés par l’artiste, celui-ci indique que Les contes de Perrault prend pour modèle sa femme et ses enfants. Toutefois, les enfants du couple étant nés en 1922, 1924, 1928 et 1935, il faut supposer qu’un des enfant représentés dans Les Contes de Perrault n’est pas l’enfant de l’artiste. «Annexe 4: Extraits du catalogue du Salon de la société des Artistes Français de 1928», page 145 51. LEBRUN François, La place de l’enfant dans la société française depuis le XVIe siècle. Communications , 1986,Volume 44, N°1, p256. 39


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Ces expositions, auprès de peintres de plus ou moins grande notoriété affirment la place de Marcel Caud dans le monde artistique des années 1930. L’artiste s’enrichit des observations qu’il réalise auprès de ses contemporains. Si ses compositions et ses iconographies restent très classiques, les moyens plastique qu’il emploie sont représentatifs du goût de l’époque pour l’expressivité. La participation de Caud à des salons était relativement importante, toutefois Le Portrait de madame Courciéras et sa fille n’a jamais été exposé dans un salon officiel.

3. La transmission du savoir, une tradition Caud a suivi durant de longues années des cours auprès de plusieurs professeurs. L’idée qu’un peintre dont la carrière est lancée forme des élèves est une vision très classique de l’apprentissage artistique. En effet, l’instruction en atelier est une tradition déjà pratiquée à la Renaissance52, même si le statut de l’élève a ensuite évolué durant des siècles. Cet exercice de divulgation des techniques peut être à la fois vu comme la transmission d’un héritage, mais également comme la perpétuation des pratiques d’un artiste. Le peintre, qui commence à avoir une certaine notoriété dispense des cours de peinture et dessin. De nombreux élèves se succèdent dans son atelier et certains y demeurent relativement longtemps. Au moins un de ses élèves est devenu un peintre accompli. Cette activité qui l’aide à vivre plus à son aise est également un plaisir car l’artiste aime partager son savoir. Ce goût du partage et de l’enseignement représente bien le personnage de Marcel Caud. Son héritage classique veut que les artistes accomplis enseignent durant plusieurs années à des jeunes voulant devenir artistes à leur tour. De plus, le peintre est très attaché à l’idée de la famille et de l’éducation. On comprend ainsi la place centrale qu’il a accordé à Mariette Courciéras sur le Portrait de Madame Courciéras et sa fille. conclusIon

L’appartenance de Marcel Caud au courant classique de l’art français et parisien est indéniable. L’artiste a suivi une longue formation auprès de plusieurs artistes, dans une académie de renom. Grâce à sa pratique de la peinture, et à l’observation des maîtres qui travaillaient près de lui, Caud a acquis une bonne maitrise de son art. Bien qu’il soit un artiste relativement modeste, sa présence dans de nombreux salons lui a conféré un petit rayonnement. On peut également juger que l’exposition de ses œuvres dans des évènements officiels nationaux est signe de la qualité de son travail. Sa position dans différents salons d’art officiel et figuratif permet d’inscrire son Œuvre dans un style académique, hérité des artistes pompiers de la deuxième moitié du XIXème siècle. Bien que cet art réaliste ait été très productif, les courants académiques du XXème siècle sont sources de très peu d’études. Il est vrai que face à l’explosion des avant-gardes, un art traditionnel et déjà bien usité dans le passé peut passer inaperçu, surtout quand ce dernier ne fait pas preuves de renouvellement iconographique ou esthétique.

52. Par exemple, le maître Fra Filippo Lippi a enseigné à Sandro Botticelli, qui fût lui même le professeur de Filippino Lippi, fils de son professeur. KÖNIG Eberhard, Les Grands Peintres italiens de la renaissance. Ullmann 2008 p. 457 et 548 40


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III. Analyse du Portrait de Madame Courciéras et sa fille La compréhension d’une œuvre passe par l’interprétation de son iconographie et la mise en relation avec les moyens plastiques utilisés pour réaliser le tableau. Le but de cette analyse est d’identifier les modèles, ce qui n’est pas aisé lorsqu’un portrait a quitté la famille des commanditaires et qu’il a été peint quatre-vingt cinq ans auparavant. La confirmation de la signature de l’artiste fût un des éléments clé menant à l’aboutissement de cette recherche.

A. La genèse de l’œuvre et son parcours dans le temps 1. La famille Courciéras53 Joseph Clément Courciéras, né en 1880 à Condat dans le Puy de Dôme est docteur. Médecin militaire, il est envoyé dans les tranchées lors de la Grande Guerre. Il décide ensuite de s’installer à Paris. Il y rencontre Louise Huet, née à Paris en 1889 et dont un des arrières grand-pères est guadeloupéen. Elle travaille quelques temps comme infirmière. Joseph et Louise se marient le 18 Novembre 1921 dans le XVème arrondissement de Paris. Ils emménagent au 133 Boulevard de Grenelle, dans l’appartement qu’occupait déjà Joseph et où il tenait son cabinet médical. Le 27 Juin 1926 leur fille unique Mariette voit le jour. Enfant tardive du couple, les liens entre elle et sa mère ont toujours été forts. Le docteur Courciéras est un homme dévoué à ses patient. Il se rend régulièrement chez eux pour des consultations à domicile et est très sollicité dans son quartier. Il fait d’ailleurs installer une sonnette à l’entrée de son immeuble pour les visites nocturnes. Grâce à sa simplicité et à sa proximité avec les habitants du quartier il crée des liens avec les familles qu’il visite. Joseph éprouvait de l’empathie pour ses malades. Parfois il ne faisait pas payer ses consultations. Toutefois, il était récurrent que le médecin se fasse payer en nature.

Figure 34: Marcel Caud, Portrait de Joseph-Clément Courciéras. Huile sur toile, 1930

2. Les circonstances de création du portrait. En 1930, Marcel Caud était père de trois enfants. La famille habitait rue Cambronne, dans le XVème arrondissement. La famille Caud comptait parmi les patients du docteur Courciéras. D’après les dires des descendants des deux hommes, les familles étaient assez liées. L’atelier de l’artiste, qui était un endroit toujours très fréquenté, était un lieu chaleureux où les deux familles aimaient certainement se retrouver. Les enfants de Marcel se souviennent avoir joué avec Mariette et longtemps après la réalisation du portrait, les familles se côtoyaient toujours.

53. Voir «Annexe 2 : Échanges avec un des descendants des modèles représentés confirmant l’identité des modèles», page 158 41


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La profession d’artiste peintre n’assurait pas toujours un revenu constant. Élever trois enfants, a un certain coût et il arrivait que le peintre paye son dû en offrant un tableau. Le tableau de Madame Courciéras et sa fille a très certainement été réalisé en remerciement des loyaux services du docteur. D’autant plus qu’il existe un pendant au tableau de notre étude. Il s’agit du portrait de Joseph-Clément Courciéras. La composition est un peu différente mais il est difficile de comparer les effets plastiques. En effet, la seule photographie parvenue jusque là est celle présentée «Figure 34: Marcel Caud, Portrait de Joseph-Clément Courciéras. Huile sur toile, 1930», page 41, sur laquelle l’œuvre n’est pas mise en valeur. Sur la photographie du tableau du docteur, on peut distinguer une inscription, au même endroit que sur le portrait féminin mais il n’a été possible de distinguer clairement les lettres. Il s’agit sans aucun doute de la signature de l’artiste et de la date. Le portrait du docteur a un cadrage plus serré que celui de son épouse et sa fille. Le format parait également plus petit. Monsieur Courciéras est représenté en buste, de manière frontale. Seul les épaules, légèrement orientées vers le côté senestre apportent un peu de profondeur. Il pose dans la même attitude que sa femme, avec une expression neutre mais chaleureuse. Joseph-Clément est placé devant un fond sans profondeur et brossé rapidement dont la tonalité est similaire à son pendant. Le visage parait plus travaillé que le vêtement, qui l’est plus que le fond. Ces effets plastiques se retrouvent sur le portrait de Louise et Mariette, ils ont pour intérêt d’attirer le regard sur les visages plutôt que sur le reste de la composition. Le cadre en bois est identique à celui de l’œuvre de mémoire, bien que la teinte soit plus claire. Il est évident que l’artiste a réalisé ces deux œuvres avec une manière similaire pour qu’il existe une cohérence entre les deux. On pourrait se demander pourquoi il n’a pas réalisé un portrait de la famille. Peut-être a-t-il réalisé un des deux pendants et, ce dernier ayant plu à la famille, Marcel Caud a réalisé le deuxième.

3. Histoire matérielle du tableau Le tableau a été peint en 1930 par Marcel Caud pour la famille Courciéras. Il semblerait que l’artiste a peint le Portrait de Madame Courciéras et sa fille et son pendant, le Portrait du docteur Courciéras, en contrepartie de visites médicales. L’artiste qui travaillait depuis quelques années au 28, rue Cambronne à Paris (XVème) 54 est allé faire encadrer sa toile au 3, passage Dantzig à Paris (XVème)55. L’œuvre a ensuite été livrée pour être accrochée au 133 Boulevard de Grenelle à Paris (XVème) dans l’appartement de la famille Courciéras qui faisait également office de cabinet médical. Une vingtaine d’années après, le mari de Mariette reprit le cabinet médical, le tableau fût décroché pour être remplacé par une télévision, ce qui était d’une grande modernité à l’époque. La peinture fût donnée à des cousins et partit pour Cannes, où elle fût exposée avec certitude jusque vers 1975 ou 1980. Toute trace du portrait est perdue jusqu’à sa réapparition chez un marchand de la Foire de Chatou, en 2015. Le tableau appartient à présent à un collectionneur privé.

54. LOBSTEIN Dominique, SANCHEZ Pierre. Op. Cit pp 133-134 55. Voir ««Figure 32 : Retranscription des écritures présentes à l’arrière du panneau, indiquant probablement le nom et l’adresse de l’encadreur», page 38 42


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B. Une iconographie exprimant la tendresse Dans l’art du portrait, aucun détail n’est futile. Les analyses iconographiques permettent d’identifier les modèles représentés. Parfois, les symboles sont connus de tous et facilement identifiables, c’est le cas par exemple dans les représentations mythologiques ou de famille royales. D’autres fois, les détails sont plus subtils et moins compréhensibles de tous. Dans le cas du tableau de cette étude, les détails iconographiques tels que les bijoux et les vêtements ne peuvent être identifiés que par des personnes ayant connu les modèles, car ce sont des objets personnels sans signification allégorique.

1 . Description de la représentation Marcel Caud a représenté une mère et sa fille, dans une attitude de tendre affection. La fillette, alors âgée de quatre ans, est assise sur les genoux de sa mère, qui elle, a quarante et un ans au moment de la représentation. La main droite de l’enfant est posée sur la main droite de l’adulte. Dans son bras gauche, la petite enserre une poupée représentant un arlequin56. La femme est représentée de trois quart, le corps tourné vers le côté senestre du tableau, et le visage dirigé vers l’observateur. La fille quant à elle est représentée frontalement, elle regarde elle aussi vers nous. Leurs poses sont statiques, le temps est comme suspendu. La mère est assise sur une chaise ou un fauteuil que l’on devine par la couleur rouge dans l’angle inférieur dextre. Un fond brun-vert uni clos l’espace de la représentation.

Figure 35: Marcel Caud, Portrait de Madame Courciéras et sa fille après restauration

Figure 36: Photographie de Louise et Mariette Courciéras, vers 1930

Mariette Courciéras est une enfant bien portante, au visage rond, dont les joues roses sont rebondies. Elle a un regard vif. Ses yeux bleu clair, soulignés par de longs cils, laissent transparaître sa curiosité naturelle. Ses sourcils arqués confèrent à son visage une certaine maturité. Son nez est droit et fin, ses lèvres charnues sont d’un rouge vermillon clair. Le visage de la fillette exprime un sentiment indéfinissable, entre la tendresse et la malice. Ses cheveux châtains clairs, aux reflets blonds sont coupés en carré très court, agrémenté d’une frange assez épaisse. Cette coupe est 56. Ce jouet était un des favoris de Mariette. Il est d’ailleurs visible sur plusieurs photographies de l’enfant. Cette information provient de l’entretien avec le descendant de la famille Courciéras, le 31 mars 2017 43


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tout à fait représentative de la mode de l’époque. Les cheveux se portent cours depuis le début des années 1920. Ses bras et ses mains potelés sont la marque de son jeune âge. La petite est habillée d’une robe légère probablement blanche, mais qui, par la technique de l’artiste, oscille entre le bleu clair et le jaune pâle sur le tableau. La coupe est assez large, de manière à laisser l’enfant libre de ses mouvement pour s’adonner à ses activités quotidiennes57. La robe devient plus ample au niveau du thorax où une couture dessine de multiples plis. Cette démarcation est soulignée par la présence d’un délicat petit bouquet réalisé probablement avec des boutons de rose. La longueur de la robe est impossible à déterminer puisque le cadrage s’arrête au niveau des genoux de l’enfant. Toutefois, les nombreuses fronces ou dentelles visibles dans la partie inférieure semblent indiquer que le vêtement s’arrête au niveau des genoux. Ceci est d’ailleurs typique des vêtements pour enfant à la fin des années 192058. La petite arbore une médaille qui doit probablement être une médaille de baptême, le bracelet pourrait être assimilé à une gourmette, cadeau traditionnel de naissance. Les deux bijoux semblent être en or, ou sont, du moins, en métal doré.

Figure 37 : Une robe d’enfant par Mignapouf. Revue La femme chic, 1926. Les pantins sont à la mode.

Figure 38: coiffures d’enfant en 1921

Louise Courciéras est une femme d’âge moyen, au visage ovale et lisse, dont les pommettes sont délicatement saillantes. Le teint, clair et rosé de son visage devient toutefois quelque peu cireux au niveau de son cou et de ses épaules. Ses paupières, un peu tombantes, adoucissent encore ses prunelles d’un brun chaleureux dont la profondeur est accentuée par ses sourcils épais. Son nez légèrement retroussé et empâté est certainement hérité de son ancêtre guadeloupéen. Ses lèvres, bien dessinées, esquissent un léger sourire qui intensifie le sentiment de bonté que l’on perçoit en la regardant. Son oreille droite, dont le lobe quelque peu allongé exhibe une perle nacrée, apparaît sous sa chevelure. Cette dernière est dense et bouclée aux multiples nuances allant du brun chaud au gris violacé. Ses cheveux, dont les ondulations encadrent le visage, doivent être maintenus en chignon à l’arrière de son crâne. Un collier sobre et un bracelet d’apparence tressée soulignent respectivement son cou et son poignet droit. Comme les bijoux de sa fille, ils ont l’air d’être en or. Sa main gauche n’est pas visible, aucune alliance59 n’est donc présentée, ce qui écarte totalement la présence du père de la représentation. 57. FIELL Charlotte, DIRIX Emmanuelle, La mode des années 20 en images. Eyrolles, 2011. 58. Ibidem ( vérifier page) 59. Le port de l’alliance par Louise Courciéras est attesté sur une des photos transmise par ses descendant. Voir «Figure 36 : Photographie de Louise et Mariette, vers 1930», page 43 44


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La tenue de la mère, sombre et lourde contraste avec celle de sa fille. Cela met d’ailleurs en avant la présence de l’enfant. La tenue de la femme est difficilement descriptible car les tons foncés empêchent de distinguer clairement les différents habits. Le vêtement semble constitué d’un chemisier dont les tons bleu clair et vert olive du col paraissent recouverts par un voile violacé au niveau du bras. Une robe noire et probablement longue vient couvrir ce vêtement clair. Une parure de violette vient orner, de la même manière que pour l’enfant, l’encolure de la robe de la mère. Cette pratique d’accrocher un petit assemblage de fleurs, généralement en tissu, apparait dès les années 1920 et se poursuit durant les années 1930. Sur de nombreuses revues de mode sont présenté ces fleurs de soie, velours et ruban60. Pour finir, une large fourrure61 noire est posée sur ses bras. Cette tenue chaude, comparée à celle de sa fille très légère met en évidence que les vêtements de la mère, et surtout la fourrure sont portés dans le but de mettre en valeur son statut social.

Figure 39: Quatre robes d’après -midi. La Coquette, 1933. La robe en couleur est assez similaire à celle de Madame Courciéras

Figure 40: Ira Richards portant un ensemble de jour noir, 1927. Similaire à la tenue de Louise Courciéras («Figure 36: Photographie de Louise et Mariette Courciéras, vers 1930», page 43)

Figure 41 : Présence des bouquets de fleurs sur les poitrines. La Coquette, 1938

Les deux protagonistes sont vêtues sobrement, mais avec élégance. De par la profession de médecin du père, la famille appartient à une classe sociale relativement élevée. Ils vécurent toutefois assez modestement et les atours présentés sur l’œuvre faisaient certainement partie de leurs biens les plus précieux. La mère et sa fille ont des attitudes affectueuses et naturelles. Bien que les expressions de leurs visages soient neutres, leurs regards sont intenses et un sentiment de bienveillance les entourent. La fillette a une place prédominante dans la composition, tant par sa position que son habillement. Cette iconographie, tout à fait classique, répond à des canons mis en 60. FIELL Charlotte, DIRIX Emmanuelle. Op. Cit. 61. Louise Courciéras possédait une fourrure qu’elle portait très régulièrement et qu’elle appelait «son renard». Cette information provient de l’entretien avec le descendant de la famille Courciéras, le 31 mars 2017 45


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place dès le XVIIIème siècle.

2. Une iconographie héritée de la tradition classique Un portrait peut être considéré selon trois points de vue : historique, sociologique ou esthétique62. Chaque époque a vu se développer différents types de portraits, tant par les sujets représentés que par les moyens plastiques utilisés pour y parvenir. Le portrait est un genre artistique qui s’est développé dès l’Antiquité. Destiné à l’origine aux personnes dont le rang était élevé, il se démocratise peu à peu en s’ouvrant à la noblesse puis à la bourgeoisie, durant le XVIème siècle en Europe du Nord. Enfin dès le XVIIème siècle les portraits des gens du peuple apparaissent entre autre grâce à l’audace de Rembrandt63. Au XIXème siècle, cet art est divisé entre le portrait néoclassique et le portrait romantique, tous les deux dérivant de l’idéalisation du modèle. Le premier, dont le dessin strict est soutenu par des couleurs acides est utilisé dans les portraits officiels d’Ingres ou David par exemple. Le statut social de la personne représentée est mis en évidence. Le portrait romantique, de Friedrich à Delacroix, s’attache quant à lui à reproduire l’état d’âme du modèle par l’évocation d’un environnement mouvementé ou d’une attitude rêveuse et isolée64. L’apparition de la photographie et le développement de l’impressionnisme constituent évidement une crise pour l’art du portrait, dès le milieu du XIXème siècle. Bien que quelques peintres réalistes s’appliquent à restituer le naturel, le portrait après 1890 sera régulièrement utilisé par les peintres pour leurs recherches plastiques plus que pour la représentation de la physionomie du modèle65. Après la Grande Guerre, la demande de retour au classicisme, tant par la belle manière que par le choix des sujets est initié par les artistes en quête de rupture avec l’art des avant-gardes très présents avant la guerre. Toutefois, le retour à la stabilité était aussi prôné par des intellectuels modernes et les conservateurs de l’époque66. Ce retour à l’ordre peut être vu comme une volonté de renaissance d’une grande puissance qui a pâti de la guerre. Durant les années 1930, le Réalisme classique reprend de l’importance grâce entre-autre à la montée des mouvements socialistes populistes. Marcel Caud se positionne dans une veine où le classicisme côtoie le naturalisme. Les compostions strictes de ses tableaux ainsi que l’attitude neutre de ses modèles est hérité de l’art académique de la fin du XIXème siècle dans la lignée de David. Son apprentissage à l’académie Julian auprès du peintre réaliste Jules Adler et du peintre d’histoire Jean-Paul Laurens est très visible dans l’exactitude de son dessin. L’héritage davidien se retrouve notamment dans les fonds flochetés de couleur neutre, peints par Caud, ainsi que dans son amour du dessin et de la composition. Toutefois, l’iconographie antiquisante du néoclassicisme n’est pas reprise dans la peinture du XXème siècle, dont la mode avait changé. L’œuvre de mémoire peut être aisément mise en relation avec des portraits néoclassiques de mère et leurs filles. Par exemple, les œuvres peintes par Elisabeth Vigée-Lebrun et David, présen62. Dictionnaire de la Connaissance de la peinture Op. Cit. Page 476 63. Ibidem. Page 484 64. Ibidem. Page 485 65. Ibidem. Page 487 66. MAIGNON Claire, Op. Cit, p.241 46


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tées en «Figure 42: Elisabeth Vigée-Lebrun. Autoportrait avec sa fille Julie. 1786, huile sur bois, 105x84 cm. Musée du Louvre, Paris», page 47» et «Figure 43:Jacques-Louis David, Portrait de la Comtesse Vilain XIIII et sa fille. 1816 , huile sur toile 95x76 cm. National Gallery, Londres», page 47 ont des caractéristiques similaires au tableau de mémoire . Les positions de trois quart des mères, avec le buste orienté vers le côté senestre de la représentation et le visage tourné vers le spectateur, les attitudes tendres, les regards doux des femmes et vifs des fillettes sont retrouvés sur le portrait de Madame Courciéras et sa fille. Dans l’art du portrait, les modèles sont généralement représentés de trois quart. Le regard établit ainsi une liaison avec le spectateur, et fait de lui le «destinataire explicite d’un acte de communication»67. Les vêtements riches, lourds et assez sombres des femmes contrastent avec les robes fluides, légères et blanches des enfants. Le fait que Mariette Courciéras soit assise sur les genoux de sa mère rapproche l’œuvre de mémoire de l’autoportrait de Vigée-Lebrun. De plus, la dimension des deux tableaux est presque identique (105x84 cm pour le portrait de Vigée-Lebrun contre 100x81 cm pour la représentation de Caud). Cependant, le visage neutre de la femme, l’étole qui drape les épaules de la mère, la représentation frontale de la fillette et les mains jointes de la mère et la fille sont des éléments iconographiques qui inscrivent directement l’œuvre de Marcel Caud dans la lignée de celle de David. Sur les trois tableaux, la mère est assise sur un fauteuil, rouge pour les représentations de David et de Caud. La représentation du modèle au repos permet, grâce à l’inaction, de se concentrer sur l’activité psychique du modèle. De plus, la pose immobile garantit l’authenticité de la représentation.68 Pour finir, dans les trois œuvres, le fond est uni, dans des teintes brunes à vertes et légèrement flocheté. Les compostions sont unifiées par une lumière venant du côté dextre.

Figure 43:Jacques-Louis David, Portrait de la Comtesse Vilain XIIII et sa fille. 1816 , huile sur toile 95x76 cm. National Gallery, Londres

Figure 42: Elisabeth Vigée-Lebrun. Autoportrait avec sa fille Julie. 1786, huile sur bois, 105x84 cm. Musée du Louvre, Paris

67. GIGANTE Elisabetta, L’art du portrait : histoire, évolution et technique. Hazan, Paris, 2012. p.202 68. Ibidem. p.214 47


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Le portrait de madame Courciéras et sa fille correspond aux règles du portrait et plus précisément aux représentations de mères avec leurs filles, développé à la fin du XVIIIème et durant le XIXème siècle. Les attitudes, la composition et les types de vêtements sont respectés. La place de l’enfant dans les compositions est prédominante et est représentative de l’intérêt porté aux jeunes descendants de la famille à partir du XVIIIème siècle.

3. Le portrait de l’enfant au centre de la représentation. Hormis l’Enfant Dieu, la présence des enfants dans l’histoire de l’art n’apparaît que tardivement69. En effet, durant le moyen-âge, l’enfant était vu comme un «être humain non encore développé qui provoque malaise et méfiance»70 . La très forte mortalité des enfants en bas âge coïncide avec le peu d’intérêt qu’on leur porte. Au XVIème siècle, les premiers portraits d’enfants sont ceux des princes royaux, qui représentent la continuité de la dynastie ainsi que la stabilité politique71. Ils ne sont toutefois pas représentés en bas âge. Jusqu’au XVIème siècle, les enfants ne commencent à être considérés que vers l’âge de sept ans. C’est au même siècle, en parallèle de la très forte dévotion à l’enfant Jésus, que dans les classes supérieures de la société, le nourrisson prend de l’importance.72 Le portrait des jeunes enfants royaux se répand dans toutes les cours d’Europe. Les portraits de famille s’étendent à l’aristocratie puis à la haute bourgeoisie73. Le XVIIIème siècle marque un tournant pour la place de l’enfant dans la société. La médecine connait de grands progrès, la mortalité infantile baisse. Les parents s’autorisent à aimer leurs nouveaux-nés et leur éducation devient primordiale74. Le XIXème siècle verra cet amour de «l’enfant-roi»75, alors plutôt réservé à la noblesse et à la bourgeoisie, s’étendre aux classes populaires. Des mesures sociales sont prises pour améliorer la qualité de vie des enfants et ainsi faire croître la puissance de la future France. L’éducation laïque obligatoire, instaurée par Jules Ferry en 1882 en est d’ailleurs un bon exemple. De fait, l’industrie du jouet est en essor dans la seconde moitié du XIXème siècle76. Cet engouement pour le monde de l’enfance fût la source de nombreuses représentations dès le XVIIIème siècle. On voit se multiplier les études sur les nourrissons, les enfants sont représentés dans des attitudes naturelles. Le jouet prend une place importante dans les compositions. A la fois moyen d’occuper l’enfant modèle, le jouet peut encore être vu comme un élément représentant le monde intérieur du petit77. Jean-Baptiste Chardin dans L’enfant au toton représente un enfant dans une scène intime. Ce 69. Exposition L’art et l’enfant, Musée Marmottant Monet, du 10 mars au 3 juillet 2016 70. LEBRUN François,Op. Cit. p247. 71. AUFFRET Jérôme-Cécil, L’art et l’enfant, Arte France, 2015. 72. Ibidem p.254 73. Exposition L’art et l’enfant ,Op. cit 74. LEBRUN François, Op. cit. p.255 75. Ibidem. p255. 76. BREON Emmanuel, Les enfants modèles, de Claude Renoir à Pierre Arditi. RMN , 2009, Paris. p.29 77. Ibidem. p.29 48


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jeune homme, apprêté comme un adulte doit avoir déjà des obligations. On aperçoit un instant volé, où l’enfant semble absorbé dans ses rêveries en voyant tourner son jouet. Ici le toton permet de faire ressortir la psychologie du modèle et en même temps la condition sociale des enfants qui ne profitent guère de leur jeunesse. En 1881, Berthe Morisot peint sa fille Julie, jouant avec son père. Le statut de l’enfant a beaucoup changé. Ici, le confort de Julie est primordial, tout s’organise autour d’elle pour que l’épanouissement de l’enfant se fasse en douceur, au sein d’une famille très présente. La fillette est représentée plongée dans son jeu. .

Figure 45: Berthe Morisot, Eugène Manet et sa fille dans le jardin à Bougival 1881. 73 x 92 cm. Huile sur toile. Musée Marmottant Monet, Paris

Figure 44: J.B.S Chardin, L’enfant au toton. 1738. Huile sur toile 67x76 cm. Musée du Louvre, Paris

La condition sociale de Mariette Courciéras, représentée sur le Portrait de Madame Courciéras et sa fille nécessite une certaine rigueur de la part de l’enfant qui est ici présentée comme la descendante unique de la famille. La présence de l’arlequin dans la composition permet toutefois de montrer l’enfant de manière naturelle, avec les objets qui la représentent. Le jouet a certainement permis également de canaliser la fillette lors des séances de pause.

Il est attesté que Mariette Courciéras était très attachée à son Arlequin car ce jouet est présent sur plusieurs photographies de la fillette au même âge que sur le portrait. La fille unique du couple, future héritière, est mise en valeur dans ce portrait. La présence du jouet dans ce tableau met en évidence les soins attentifs de ses parents envers leur enfant. Le choix de représenter la petite avec son jouet favori est aussi une preuve de l’attachement du peintre au bien-être de son jeune modèle. La présence de l’arlequin dans la composition est donc un détail important pour l’interprétation de l’iconographie et de l’histoire du portrait. L’enfant est choyée; représentée de manière naturelle, son monde intérieur est mis en avant, elle est aimée.

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Figure 46: Mariette et son Arlequin, vers 1930


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Le peintre et la famille Courciéras jouissaient d’une certaine complicité. Cette sympathie entre les deux familles est également visible dans le traitement pictural de l’artiste. En effet, après avoir comparé plusieurs œuvres du peintre, il est possible d’affirmer que le Portrait de Madame Courciéras et sa fille est particulièrement soigné et réussi78.

C. Les moyens plastiques mis en œuvre au service de l’expressivité Les matériaux utilisé par le peintre ainsi que sa manière de peindre sont des éléments permettant d’aider la datation. Les moyens plastiques vont être présentés pour mieux appréhender la technique de l’artiste et affirmer l’intérêt historique d’une telle représentation, témoin d’un type de représentation dans l’art de l’entre-deux guerres

1. La matérialité de l’œuvre Le support de l’œuvre est une toile de lin tendue sur un châssis estampillé «40F». Cette marque ainsi que la présence de préparation sur les bords et l’arrêt net de cette dernière à une dizaine de centimètres du bord de la lisière de toile permettent d’affirmer que la toile a été apprêtée et tendue industriellement. La stratigraphie est tout à fait classique, composée d’une toile encollée avec une colle collagénique, surmontée d’une préparation grasse et blanche. L’artiste a superposé les couleurs à la peinture à l’huile. Par rapport à la datation de l’œuvre, il y a de grandes certitudes sur le fait que l’artiste ait utilisé des peintures en tube, préparées industriellement. Enfin, Marcel Caud a appliqué un vernis naturel sur sa représentation. La matérialité de l’œuvre est tout à fait représentative des œuvres du début du XXème siècle, jusqu’à nos jours, lorsque les procédés industriels ont permis le développement de l’activité de peintre79.

2 . Composition et dessin Les personnages sont représentés grandeur nature, dans un cadrage assez large qui s’arrête au niveau des genoux. Un fond sans profondeur, vert-brun, uni, vibrant grâce à la superposition de fines couches de couleur, clôt la représentation sans pour autant paraître lourd. Le peintre a réduit sa représentation au minimum en ne faisant entrer aucun élément futile. Les fonds bouchés sont une pratiques très rependue depuis l’apparition des premiers portraits, permettant de concentrer l’attention sur les personnages. La mère est assise de trois quart, le visage tourné vers nous, tandis que l’enfant est présentée frontalement, ce qui rend sa présence primordiale. La composition est triangulaire. Le regard croise d’abord celui de l’enfant, grâce à la couleur bleu 78. Dans sa nouvelle fantastique Le portrait ovale, Edgar Allan Poe décrit intensément l’attachement de l’artiste à son modèle, qui cherche à le représenter le mieux possible pour déclarer à la fin de son ouvrage « En vérité, c’est la Vie elle-même !» POE Edgar Allan, Le portrait ovale, dans Nouvelles histoires extraordinaires.A. Quantin, 1884. pp. 277 79. LOILIER Hervé, Op. Cit p. 348 50


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vif des yeux et au contraste entre le vêtement noir de la mère et la peau claire de la petite. Ensuite, l’observateur se dirige vers le visage de Louise Courciéras. Le spectateur est ensuite attiré par l’union des mains de la mère et son enfant, encore une fois la peau claire contraste avec le fond sombre. Enfin, c’est l’arlequin qui est source de curiosité. Les diagonales du tableau se croisent au niveau du cœur de la mère, sur l’épaule de l’enfant. Cela laisse transparaître une fois de plus l’importance des sentiments et de l’union des deux femmes dans cette représentation.

Figure 47 : Les diagonales se croisent au niveau de cœur de la mère

Figure 48 : Quatre lignes de force rythment de manière régulière le tableau

Figure 49 : Sens du regard du spectateur

Le dessin est sûr et droit, sans extravagance. Les visages sont idéalisés, notamment celui de la petite Mariette, qui a une apparence de poupée avec son teint rose, ses lèvres vives et ses yeux intenses. Cette idéalisation finit de rattacher Marcel Caud au classicisme dont le retour important, dans les années 1930 s’est fait observer par une simplification du trait et des poses assez statiques comme par exemple sur le Portrait de Renato Gualino de Felice Casorati. Le dessin définit clairement les visages mais les autres éléments de la composition sont moins dessinés, de manière à mettre en valeur les visages. Les détails des bijoux et vêtements sont réalisés par un travail rapide de coups de brosse. Les vêtements sont élégants sans être imposants ni détaillés. Les positions strictes apportent au portrait la bienséance qui est nécessaire pour les représentations classiques80. Figure 50 : Felice Casorati, Portrait de Renato Gualino, 1923-1924. Huile sur contreplaqué. 97 x 74,5 cm. Viareggio, Instituo Matteucci

80. DE VINCI Léonard, Traité de la peinture. Deterville, Paris, 1796 p. 203 51


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3. Couleur et lumière La couleur du fond, oscillant entre vert et le brun chaud est une teinte qui se retrouve régulièrement dans les portraits académiques car elle permet de mettre en valeur les carnations par un système de complémentarité81. De plus, le vert est une couleur apaisante qui permet de conforter la sensation de douceur qui émane de l’œuvre. Les couleurs sont chaudes, assez neutres, égayées par quelques touches de couleurs, au niveau des bouquets aux poitrines, des yeux et des lèvres des deux femmes ainsi que sur le jouet de l’enfant. La palette chaude est renforcée par le léger voile de vernis naturel qui a été préservé lors de la restauration. Le plus fort contraste chromatique est présent au centre du tableau, une fois de plus au niveau du cœur de Madame Courciéras, à l’intersection entre le cou et l’épaule de la fillette et la poitrine de sa mère. Ce contraste82 tend à mettre en avant la présence lumineuse de Mariette, il permet également d’affirmer l’élégance, sombre, de sa mère. Marcel Caud utilise la peinture tonale, par juxtaposition de couleurs complémentaires83 pour rendre le modelé plutôt que par l’ajout de terres qui auraient tendance à ternir la représentation.

Figure 51 : Gamme de couleur utilisée par l’artiste

La scène est unifiée par une lumière homogène, paraissant naturelle, qui vient de la droite des personnages. Elle est assez diffuse et l’ombre portée des protagonistes sur le mur n’est que très légère. En revanche, les ombres sur les visages sont puissantes et accentuent le réalisme des portraits84. Cette lumière permet de modeler avec douceur les corps, tandis que le peintre profite de la couleur claire du vêtement de l’enfant pour réaliser des jeux de lumière et de volume. Par contraste, la lumière réalisée sur la fourrure de la mère est presque imperceptible car nuancée par des tonalités de bruns.

81 «Le champ qui entoure les figures de toutes les choses peintes, doit être plus brun que la partie éclairée, et plus clair que la partie qui est dans l’ombre» . DE VINCI Léonard,Op. Cit p. 127 82. Ibidem p. 84 83. «La teinte de l’ombre de quelque couleur que ce soit participe toujours à la couleur de son objet» Ibidem p. 86 84. Ibidem, p. 25 52


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Figure 53 : Exemple de peinture tonale sur les mains et le visage. Vincent Van Gogh, Agostina Segatori in the Café du Tambourin 1887, Huile sur toile, 56 x 47 cm Rijksmuseum Amsterdam

Figure 52 : Détail de la peinture tonale sur le visage de Mariette Courciéras

4. Traitement de la matière Marcel Caud travaille avec une peinture à l’huile assez épaisse, de manière à pouvoir créer des jeux d’empâtement qui vont rendre la composition plus vivante. Il ne se focalise pas sur les détails mais au contraire, la liberté de sa touche rend les volumes des objets de manière assez naturelle. On peut par exemple comparer sa touche au niveau du bouquet de violette à celle de Manet. Ces deux tableaux sont rythmés par des touches de lumière contrastées avec des ombres vives. Ces couleurs sont appliquées par le peintre avec une touche épaisse, où la matière est sensible, ce qui laisse ressentir l’héritage des peintres impressionnistes. Les artistes classiques du XXème siècle ont adopté les techniques des peintres qui étaient autrefois en opposition contre le classicisme, tels les Impressionnistes.

Figure 54 : Marcel Caud, détail du bouquet de violettes sur le tableau de mémoire, après réintégration

Figure 55: Edouard Manet, Bouquet de violettes, 1872. Huile sur toile, 22 x 77 cm. Collection particulière

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D. L’inscription de l’œuvre dans l’art figuratif parisien de l’entre-deux guerres Si les mouvement d’avant garde tiennent une place prédominante sur la scène artistique du début du XXème siècle en France, l’art figuratif naturaliste n’a pas cessé de se développer. Toutefois, après la guerre, on peut observer un retour à l’ordre général, en réaction contre les horreurs de la guerre et dans l’espoir de retrouver la stabilité et la sécurité des valeurs classiques. Les quatres tableaux présentés ci-après, de Derain, Lempicka, Beltrán Massés et Brooks sont assez représentatifs du style classique des années 1920 à 1930. Sur ces quatre œuvres, les femmes sont parées de luxueux vêtements, ont des attitudes gracieuses et portent les cheveux courts ou attachés. Le tableau le plus naturaliste est le portrait de Nathalie Barney. Dans cette œuvre, c’est surtout la psychologie du modèle qui ressort. Le portrait de May Fleishhacker se situe au juste milieu entre la représentation de la réalité, par les émotions provenant de la gamme chromatique, les contrastes et l’idéalisation, par la ligne. La ligne ingresque, tirée du néo-classicisme est parfaitement visible sur les tableaux de Beltrán Massés et de Derain. Ce dernier s’approprie cette ligne en simplifiant son dessin, ce qui l’éloigne du réalisme des artistes du XIXème siècle. Tamara de Lempicka s’approprie encore davantage l’idéalisation de ses figures, en simplifiant les lignes et en appliquant des aplats de couleurs marqués. Cette artiste s’approche ainsi du cubisme, mouvement très actif durant les premières années du XXème siècle.

Figure 57 : Tamara de Lempicka, Portrait de Madame Boucard, 1931. Huile sur toile, collection particulière

Figure 56 : André Derain, Portrait de Mme Paul Guillaume huile sur toile 92 x 73 cm. 1928. Paris, Musée de l’orangerie

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. Le tableau de mémoire s’inscrit parfaitement au milieu de ces œuvres, toutefois il est possible de dire que Marcel Caud s’approche davantage des peintures de Brooks et de Beltrán Massés, de par sa recherche du naturalisme et de la transcription de la psychologie des modèles. Le fond uni, le vêtement riche orné d’une fleur, la coiffure ainsi que l’expressivité du regard rapprochent beaucoup le Portrait de May Fleishhacker du Portrait de Madame Courciéras et sa fille. La plupart de ces peintres sont d’origine étrangère, et sont venus faire carrière à Paris, ce qui les rapproche également de Marcel Caud, qui a quitté la province pour vivre de son art. Ceci appuie le fait que Paris était bel et bien la capitale des arts et attirait non seulement les avant-gardistes, comme la plupart des publications nous l’apprennent, mais aussi les artistes plus classiques, parfois restés dans l’ombre.

«N’oublions jamais qu’un peintre ne peint pas ce qu’il voit : il peint ce qu’il a décidé de voir avec les moyens qu’il a choisi d’adopter» André Chastel, Dictionnaire de la connaissance de la peinture

Figure 58 : Federico Armando Beltrán Massés, A portrait of May Fleishhacker, 1925. huile sur toile, 113 x 107,3 cm. Collection particulière

Figure 59 : Romaine Brooks, L’Amazone (portrait de Natalie Barney), 1920. Huile sur toile, 86,5 x 65,5. Paris, Musée Carnavalet

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conclusIon Même si la France est sortie victorieuse de la Première Guerre mondiale, le pays est anéanti, tant physiquement que psychologiquement. «Au cours des vingt années qui suivirent, la France passa de l’euphorie d’après-guerre à l’angoisse d’avant-guerre, d’une paix incertaine à un cataclysme sans précédent».85 La vie artistique à Paris, très fertile au début du siècle notamment avec l’art total que représente l’art nouveau puis par la montée des mouvements avant-gardistes, se voit divisée entre les anciens et les modernes après la guerre. Les artistes modernes revendiquent leurs idées par une création effervescente en se rassemblant comme à Montparnasse ou à la Ruche. De nombreux immigrés participent à cette création, d’ailleurs, l’École de Paris est composée d’une grande partie d’artistes de nationalité étrangère. Ces courants modernes ont à présent droit à des expositions nationales officielles, bien que l’État favorise davantage la création classique. Au cours des années 1920 et 1930, la montée des extrêmes en Europe tendra a accentuer la demande de la part des états d’un art figuratif nationalise. Marcel Caud est un peintre d’héritage classique ayant produit des œuvres depuis la première décénie du XXème siècle, jusqu’au milieu des années 1960. Le Portrait de Madame Courciéras et sa fille se situe donc presque au milieu de la carrière de l’artiste. Le peintre possède des valeurs assez traditionnelles, en lien avec son attachement à la religion catholique. Sa vie de bohème s’accorde volontiers à cette religion, par le partage du bonheur et la simplicité. Ces valeurs se retrouvent dans ses tableaux, dont les couleurs vives et le dessin précis magnifient les portraits. Le style du peintre n’a d’ailleurs pas montré d’évolution durant sa carrière. Le Portrait de Madame Courciéras et sa fille, s’inscrit totalement dans l’Œuvre de l’artiste, dont le dessin et la plastique sont parfaitement reconnaissables. De plus, l’œuvre est représentative de sa période de création, par la mode que suivent les protagonistes. La valeur historique de ce tableau est importante en tant que témoin d’une époque dont l’art académique, pourtant bien ancré dans la société est délaissé par la majorité des historiens. En ce qui concerne la plastique, la peinture est empâtée, les coups de brosse sont rapides. On perçoit que l’art classique du XIXème siècle a évolué avec les courants romantiques puis impressionnistes. Le peintre allie art classique, par ses notions du dessin et de la composition et nouveautés picturales, par ses jeux de matière. Sa représentation est simple et les moyens plastique tels que les contrastes colorés et la facture permettent de hiérarchiser la composition. Si l’artiste fait délibérément partie des peintres académiques, il n’en est pour autant pas un peintre pompier et aime à travailler la matière, ce qui rend la représentation vivante. Le Portrait de Madame Courciéras et sa fille fait office de synthèse entre l’art purement académique, lisse et extrêmement idéalisé et les arts qui rejettent cette perfection irréaliste. L’œuvre peut se ranger dans la lignée du réalisme, mouvement auquel appartenaient les maîtres de l’artiste. Cette peinture figurative est tout à fait représentative de l’art de l’entre deux-guerres, témoin des recherches des peintres figuratifs qui évoluent dans la période très créative des Avant-Gardes.

85. WILSON Sahah, Paris, capitale des arts 1900-1968. Hazan, 2002. p.117 56


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ETUDE TECHNOLOGIQUE «Ne t’accommode pas de ce qui est facile» Vincent Van Gogh à Théo, 1874

Figure 60 : Détail de l’œuvre avant restauration, mise en évidence des soulèvements en toit 59


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IntroductIon Le travail de restauration nécessite une grande connaissance de l’œuvre, ainsi que de l’habileté et de la discrétion de la part du restaurateur86. Celle-ci s’acquiert par l’observation, la réflexion et l’étude scientifique du tableau. Le temps imparti à l’étude de cette œuvre a permis de l’appréhender dans son intégralité de manière à réaliser la restauration dans des conditions optimales. Le rapport de restauration sera constitué en premier lieu d’une description précise des éléments constitutifs de l’œuvre, puis d’un constat de leur état de dégradation. Celui-ci permettra d’effectuer un diagnostic et un pronostic, dont découleront un cahier des charges. Par la suite une proposition de traitement sera mise en place et les étapes de la restauration seront présentées.

Figure 61 : Œuvre de mémoire avant restauration 86. HORSIN DEON Simon, De la conservation et de la restauration des tableaux. Bossange, Paris, 1851 . p. 47 60


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EXAMEN DE L’ŒUVRE I. Étude des éléments constitutifs. Ce tableau du premier tiers du XXème siècle a une constitution traditionnelle. De ce fait il s’agit d’une toile encollée et préparée, tendue sur un châssis puis peinte et enfin encadrée. De nombreux outils sont à notre disposition pour l’analyse du tableau. Dans un premier temps, l’observation est réalisée à l’œil nu grâce à la lumière directe, puis en lumière rasante et enfin par lumière transmise. Ensuite, des outils tels que le compte fil, la loupe binoculaire ainsi que le microscope sont utilisés pour approfondir l’analyse. Une observation aux lumières ultra-violette et infra-rouge permettent de déceler des détails de composition. Pour terminer, des tests chimiques ou mécaniques sont pratiqués. L’examen des matériaux est organisé par ordre stratigraphique, et dans la mesure du possible en fonction de leur apparition chronologique dans cette stratigraphie. Avant de détailler chaque strate, un schéma stratigraphique de la constitution du tableau permettra au lecteur d’appréhender l’œuvre dans son ensemble. L’œuvre était encadrée, et ce montage permet de comprendre certaines altérations.

Figure 62 : Coupe stratigraphique du système d’encadrement de l’œuvre

61


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Une stratigraphie traditionnelle d’une peinture de chevalet est composée d’une toile, généralement de lin, tendue sur un châssis. Cette toile est encollée avec un adhésif collagénique. Ensuite vient une préparation constituée d’une charge et d’un liant, en général huileux ou collagénique. Puis est appliquée la couche picturale, le plus souvent à l’huile et enfin un vernis, naturel jusqu’au milieu du XXème siècle. L’œuvre de Marcel Caud correspond à ce schéma.

Figure 63 : Schéma stratigraphique traditionnel d’une peinture sur toile. (PEREGO François, Dictionnaire des matériaux du peintre. Belin, 2005, p. 861)

A. Le support 1. Le châssis Le châssis est constitué dans un bois résineux. Cet usage est fréquent pour la fabrication des supports de tension. Les essences résineuses sont reconnues pour leur légèreté et leur simplicité de mise en œuvre. En effet, le montage d’une toile est facilité si le bois du châssis est tendre. C’est encore pour la facilité d’exécution que les bois sont découpés dans le sens des fibres. Le châssis est constitué de quatre montants et de deux traverses en croix. Le châssis est fixe, les montants sont assemblés à mi-bois87 et sont maintenus par quatre clous sur chaque angle. Un chanfrein de 0,5 cm a été réalisé sur les montants, ayant une épaisseur de 1,7 cm sur leur rive extérieure et 1,2 cm sur leur rive intérieure. Quant aux traverses, elles ont une épaisseur de 1,2 cm. Ces dernières sont assemblées aux montants grâce à un assemblage à tenons et mortaises. Une vis centrale les maintient entre elles dans leur assemblage à mi-bois. Les mesures 100 x 81 cm correspondent au format industriel 40F88. Cette observation est confirmée par la présence de cette même marque au centre du montant supérieur du châssis. 87. LABREUCHE Pascal, Paris, capitale de la toile à peindre XVIIIème et XIXème siècle. CTHS, 2011.p.43 88. Table des formats standards des châssis consultée sur le site de Marin beaux-arts le 3 mai 2017. http://www.marinbeauxarts.com/ 62


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2.La toile La toile est tissée avec des fils de lin. Cette fibre est reconnaissable de par son apparence grisâtre ainsi qu’à sa résistance et sa souplesse. Une observation au microscope (grossissements x4, x10 et x40) a montré des fibres régulières, présentant toutefois quelques plis de flexion89, typiques des fibres de lin. Enfin, des tests chimiques ont permis de confirmer cette observation90. La torsion des fils est en forme de «Z» sur l’œuvre de mémoire. La torsion, a pour intérêt d’associer plusieurs fibres en hélice. Elle confère également au fil une souplesse et une solidité qui peuvent être variées en fonction de la force déployée lors de la torsion.91 Le lin, de par sa torsion naturelle, aura généralement tendance à être filé en Z92.L’angle de torsion des fibres est important, le fil est peu torsadé, ce qui explique l’importante réactivité de la toile. En présence d’une hygrométrie élevée, les fils auront fortement tendance à s’épaissir. Les fils ont été tissés de manière mécanique en armure toile, qui est l’armure la plus courante. Le sens chaîne est placé dans le sens de la largeur et le sens trame dans la hauteur de la représentation. Cet argument est confirmé par la présence de la lisière93 dans le sens horizontal, dans la partie inférieure de la toile. Cette lisière se matérialise par une bande de toile libre, d’une dizaine de centimètre, à l’arrière du châssis dans la partie inférieure du tableau. La toile n’est pas très épaisse. Le tissage est moyennement serré et l’embuvage94 modérément important. La toile a une contexture de douze fils par centimètre dans le sens trame et quinze fils par centimètre dans le sens chaîne. Le titrage95 du fil n’est pas régulier, un fil moyen fait environ un demi millimètre mais certains en font un quart, tandis que d’autres atteignent presque un millimètre et demi.

Figure 64 : Vue des fibres de lin au microscope (grossissement x10)

Figure 65 : Schéma des torsion «Z» et «S» des fils

89. BROSSARD Isabelle, Technologie des textiles, Dunod, 1997, Paris. p.35 90. Voir «Annexe 4 : tests sur la nature des matériaux constitutifs», page 164 91. Ibidem, p.151 92. Information dispensée par M.Olivier Nouaille dans son cours théorique sur la restauration du support de peinture. 93. « Les lisières : fils de chaîne placés à chaque extrémité : ces fils sont souvent plus gros ou plus rapprochés afin de consolider le tissu pendant les différentes manipulations» BROSSARD Isabelle,, Op. cit, p. 188 94. BROSSARD Isabelle, Op. Cit « L’embuvage est le raccourcissement des fils de trame après le tissage» p. 302 95. Ibidem «Le titrage d’un fil consiste à lui donner un numéro qui indique sa grosseur» p. 161 63


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Dans la partie suivante, la préparation industrielle de la toile est prouvée. Cela laisse supposer que la toile a subi un décatissage96. Cette opération peut être confirmée par la présence de guirlandes de tension sur la lisière de la toile qui n’ont pas de rapport avec le montage de la toile au châssis. Toutefois, si elle a été décatie, la toile de l’œuvre de mémoire ne l’a pas été plus d’une fois car elle reste très réactive aux variations hygrométriques. La toile est maintenue au châssis par des semences plantées de manière assez régulière, environ tous les 5 cm.

Figure 66 : Vue des bords de tension préparés. On devine le tissage en armure toile. Les contraintes de la toile autour des semences mettent en évidence sa réactivité. Un trou de piton ayant servi à l’encadrement est visible.

3. L’encollage L’encollage des supports de peinture était traditionnellement réalisé avec des colles collagéniques. La souplesse ainsi que la finesse de la colle de peau de lapin étaient particulièrement appréciées97. Cette couche est primordiale, elle permet d’imprégner la toile pour la rendre moins perméable aux couches supérieures. Cet adhésif protège également la toile des acides gras présents dans la peinture à l’huile. Le support a été encollé. La couche d’encollage est aisément visible à l’œil nu, entre les fils de toile. Une observation au microscope, alliée à un test à la goutte ont permis d’en confirmer la présence ainsi que d’en distinguer la nature collagénique, très certainement de la colle de peau de lapin.

Figure 67 : Vue de l’encollage dans une lacune de couche picturale

96. Le décatissage est une opération qui consiste à imprégner la toile d’eau bouillante, la contraignant ainsi à se contracter fortement. Ceci permet de laver les toiles de leurs apprêts (amidon par exemple), mais cette opération vise principalement à rendre les toiles moins réactives aux fluctuations hygrométriques. 97. PEREGO François, Dictionnaire des matériaux du peintre, Belin, 2005. p. 214 64


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B. La couche picturale 1. La préparation La préparation est blanche, relativement fine et laisse fortement transparaître la trame de la toile sous-jacente. Les tests98 réalisés sur cette préparation ont permis de mettre en avant sa nature lipidique et la présence de carbonate de calcium. Une analyse scientifique99 au microscope électronique à balayage a permis de confirmer la présence de carbonate de calcium, de formule chimique CaCO3100 mais également de blanc de zinc (élément Zn) et de blanc de plomb (élément Pb). Les nombreux éléments présents en petite quantité dans la courbe laissent supposer que ce n’est pas du carbonate de calcium pur qui a été utilisé, mais une charge moins pure comme du blanc de Meudon ou de la craie de Champagne par exemple. L’hypothèse de l’utilisation du blanc de Meudon peut être appuyée par la présence de zinc et de plomb, pigments blancs qui auraient pu être utilisés pour éclaircir la couleur jaunâtre du blanc de Meudon. Le plomb laisse également suggérer que la préparation contient une part de céruse

Figure 68: Coupe stratigraphique au MEB présentant la préparation ( x 610 )

Figure 69 : Courbe générée par la préparation au MEB

L’utilisation de préparations grasses avec une charge est une tradition ancienne, apparue quelques temps après la généralisation de l’utilisation de la peinture à l’huile sur toile, au XVIème siècle101. Les préparations blanches, très appréciées à la renaissances puis abandonnées aux XVIIème et XVIIIème siècle sont de nouveau utilisées abondamment à partir du XIXème siècle. Elles permettent de donner aux couleurs un

Figure 70 : Vue de la préparation au dos d’une écaille retournée

98. Voir «Annexe 4 : tests sur la nature des matériaux constitutifs», page 164 99. Analyses effectuées au laboratoire Lanboz à Cracovie, sur le microscope électronique à balayage Phenom Pro. Analyses réalisées par Aude Richard. 100. EASTAUGH Nicholas, WALSH Valentine, CHAPLIN Tracey, SIDDALL Ruth, Pigment compendium, a dictionary and optical microscopy of a historical pigments. Elsevier, 2008. p. 425 101. PEREGO François, Op. Cit, pp.613-617 65


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véritable éclat102. La préparation est moins poreuse que l’encollage, lui même moins poreux que la toile. La superposition de ces couches de moins en moins perméable est établie en vue de la réalisation de l’œuvre peinte à l’huile, très peu poreuse. Dans la plupart des cas, cette peinture est protégée d’un vernis, presque imperméable. L’élaboration d’une stratigraphie de moins en moins poreuse vise à une conservation optimale des peintures. En effet le respect de la loi de Jurin103 à propos de la capillarité permet que les fluctuations hygrométriques ne mettent pas en danger l’intégrité physique de l’œuvre, en favorisant l’élimination de la vapeur d’eau. Les bords de tension de l’œuvre sont préparés, ce qui laisse supposer que la toile a été apprêtée industriellement. L’arrêt en ligne droite de la préparation une dizaine de centimètres avant la bande de lisière, ainsi que l’absence de feston sur la couche picturale confirment cette hypothèse. Aussi, des guirlandes de tension ne correspondant pas aux semences fixant la toile au châssis sont visibles sur la lisière. Tous ces éléments démontrent un travail préalable au montage de la toile sur son châssis. La toile a par conséquent été encollée, préparée et montée à son châssis industriellement. L’importante impression de toile n’est donc pas issue du souhait de l’artiste mais simplement due à l’état de la toile lorsqu’il l’a achetée.

2. La couche colorée L’artiste a œuvré avec de la peinture à l’huile. Il a très certainement utilisé de la peinture en tube, qui était commercialisée depuis une centaine d’année104 déjà à l’époque de la création du tableau. Marcel Caud a beaucoup travaillé la matière picturale de ce portrait. La peinture est posée en couche fine, avec assez peu de médium de manière à rendre le motif de la toile. Une multitude de teintes se superposent dans le fond de manière à créer une vibration légère. D’autres parties sont plus empâtées, principalement sur les vêtements et sur les visages pour donner plus de caractère à ces zones principales. Le travail mieux aboutit sur ces éléments permet d’attirer davantage le regard du spectateur. Les détails y sont plus nombreux, l’expressivité mise en avant. La gamme chromatique est plutôt chaude et sombre, équilibrée par les carnations lumineuse et la robe bleutée de la fillette. La palette, composée de tons bruns, noirs, chair est rehaussée de quelques touches plus vives avec du rouge, du vert, du violet, du jaune d’or et du bleu. Le vêtement clair de l’enfant illumine l’ensemble de la composition. Il ne faut pas omettre que l’oxydation naturelle de l’huile a généré un léger jaunissement des tons qui patinent les teintes choisies par l’artiste.

102. DE VINCI Léonard, Op. Cit, p. 85 103 . Cette loi indique, par la relation : h = 2A.cos(θ) / r.g.ρ, la hauteur de la remontée capillaire des liquides dans des matériaux poreux. Plus le capillaire sera fin, plus la remontée de liquide est importante. http://ressources.univ-lemans.fr/ 104. PEREGO François, Op. Cit, p. 249 66


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PAlEttE

Déterminer avec certitude les pigments employés sur le Portrait de Madame Courciéras et sa fille est relativement difficile. En effet, dans le courant du XIXème siècle, une multitude de pigments ont été synthétisés, grâce aux procédés industriels. Marcel Caud utilisait des peintures en tube, les fabricants de couleurs devaient très certainement arranger les mélanges en fonction de leurs propres recettes, et certainement mélanger plusieurs pigments entre eux. Les analyses au microscope électronique à balayage ont permis d’émettre certaines hypothèses sur les pigments contenus dans la couche picturale. Ce moyen d’analyse est une méthode destructive. Dans le cas de cette œuvre, de nombreuses écailles déplacées, impossible à refixer sur l’œuvre, ont pu être utilisées pour les analyses. Dans la plupart des points analysés, les éléments présents sont les même, l’identification de tous les éléments n’est donc pas certaine. En premier lieu, le carbone, présent dans les matériaux organiques est l’élément le plus visible. Si le peintre a mélangé du vernis naturel à son huile, alors la présence de carbone est tout à fait justifiable. Aussi, le carbone est un élément majeur des couleurs noires, ou des couleurs d’origine organique. Enfin, le carbone est présent dans le carbonate de calcium (CaCO3), dont la présence est justifiée par l’importante teneur en calcium de la couche picturale. Le carbonate de calcium est présent dans la préparation, c’est également l’un des composant de certains pigments blancs. L’oxygène est très présent aussi sur les résultats des analyses, car il entre dans la composition de nombreux pigments et principalement les oxydes. BlAncs

Sur l’œuvre de mémoire, les pigments blancs sont utilisés notamment dans les carnations, également dans le vêtement de l’enfant et moindrement de la mère. Il est probable que le peintre ait ajouté un peu de blanc à ses autres couleurs car des traces de zinc de plomb et de titane sont apparues dans la plupart des écailles au MEB. Ces trois blancs sont très stables. BlAnc dE zInc

L’élément zinc est très présent dans les couleurs claires, ce qui relève de l’importante utilisation du carbonate de zinc (ZnCO3) ou d’oxyde de zinc (ZnO)105. Ces blancs sont connus depuis longtemps cependant, ce n’est qu’à la fin du XVIIIème siècle que sa production s’intensifie, en réponse à l’urgence sanitaire de la toxicité du blanc de plomb106. Ce pigment inorganique de synthèse, au pouvoir couvrant inférieur au plomb et au titane, est privilégié pour les glacis. C’est certainement le blanc qui a été le plus utilisé par Marcel Caud, car c’était le pigment blanc le plus courant au début du XXème siècle, entre la disparition du blanc de plomb et l’apparition du blanc de titane. BlAnc dE PlomB

Selon les analyses au MEB, le plomb est assez présent dans la couche picturale, le carbonate de plomb (PbCO3)107, plus communément appelé blanc de plomb peut aussi être qualifié de céruse, 105. EASTAUGH Nicholas, WALSH Valentine, CHAPLIN Tracey, SIDDALL Ruth, Op. Cit p.409 et 412 106. PEREGO François, Op. Cit, p. 104 107. EASTAUGH Nicholas, WALSH Valentine, CHAPLIN Tracey, SIDDALL Ruth, Op. Cit p 228 67


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lorsqu’on lui ajoute une charge. Ce pigment inorganique de synthèse est largement utilisé jusqu’au XIXème siècle, jusqu’à ce qu’il soit supplanté par le blanc de zinc, beaucoup moins toxique. Toutefois, dans les années 1920, ce pigment est presque totalement abandonné. La présence de plomb dans la couche picturale provient peut-être d’oxydes de plombs par exemple, qui sont de couleurs rouges à jaune108.

BlAnc dE tItAnE

Dioxyde de titane (TiO2). Bien que le titane soit abondant dans la nature, cet élément n’a été connu qu’à partir de la fin du XVIIIème siècle. Pourtant, ce n’est que durant le XXème siècle que le pigment a été synthétisé et utilisé largement dans le domaine artistique. C’est après la Première Guerre mondiale que ce pigment inorganique de synthèse est largement diffusé. Néanmoins, en France, les artistes restent réticents jusque vers les années 1925 à 1930. La présence de blanc de titane dans la matière picturale du peintre est donc relativement novatrice pour l’époque109, ce qui explique sa très faible quantité. Ce pigment blanc est très couvrant, mais son aspect légèrement jaunâtre mène parfois à lui ajouter des additifs tels que le blanc de zinc ou de plomb110.

Figure 71 : Détail des couleurs blanches sur l’œuvre

noIrs noIr d’IvoIrE

Les pigments noirs sont très généralement issus de la carbonisation ou de la combustion, de graisses, de résines naturelles et bois résineux ou d’hydrocarbures111. Ces pigments sont certainement les plus anciennement fabriqués par l’homme. Il est difficile dire si le noir présent sur l’œuvre est du noir d’ivoire112, pigment artificiel d’origine animale ou du noir de carbone qui est un pigment artificiel, toutefois, la forte présence de CaCO3 peut laisser supposer l’utilisation du noir d’ivoire. L’utilisation de noir de mars sur cette œuvre est réfutée car aucune trace de fer n’est apparue lors de l’analyse au MEB.

Figure 72 : Détail des couleurs noires sur l’œuvre

108. Ibidem p. 234 109. EASTAUGH Nicholas, WALSH Valentine, CHAPLIN Tracey, SIDDALL Ruth, Op. Cit p. 371 110. PEREGO François, Op. Cit, p. 101 111. Ibidem, p. 493 112. Ce pigment contient seulement 10 à 20% de carbone, c’est plutôt un pigment inorganique, composé surtout de carbonate de calcium. PEREGO François, Op. Cit, p. 499 68


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BlEus BlEu dE cérulEum

La teinte froide, tirant vers le vert, du bleu utilisé par l’artiste laisse penser à l’utilisation du bleu de céruléum. Ce pigment d’oxydes mixtes a pour formule chimique CoOnSnO2, c’est un pigment inorganique de synthèse. Toutefois, le remplacement du cobalt par du magnésium est parfois pratiqué, ce qui modifie légèrement sa coloration. La présence de la silice et de l’aluminium est observée dans certains cas113, ces composants sont également visibles sur les analyses au MEB. Le bleu de céruléum a été commercialisé à partir des années 1860. Il est particulièrement apprécié car il est très stable à la lumière et la chaleur, il a un pouvoir couvrant moyen. Enfin, sa coloration ne change pas entre un éclairage naturel et un éclairage artificiel

Figure 73 : Détail des couleurs bleues sur l’œuvre

BlEu outrEmEr

La présence de bleu outremer est assez probable, principalement dans les ombres des carnations ainsi que dans les nuances du fond vert. Ce pigment inorganique de synthèse, de formule Na7AlSi6O24S3 fût créé en 1826, comme substitut du lapis-lazuli, extrêmement coûteux. L’outremer est 6 très transparent dans les huiles. De plus, ce pigment est bien stable à la lumière et à la chaleur.

Figure 74 : Courbe générée au MEB pour une écaille de couleur bleu clair

113. PEREGO François, Op. Cit,p. 108 69


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vIolEts

La nature du pigment violet utilisé pour le bouquet de violette sur la poitrine de Madame Courciéras est difficile à déterminer. La couleur chaude et profonde, l’éloigne du violet de cobalt. Il s’agit potentiellement d’un violet permanent114, qui est un phosphate de manganèse, commercialisé à la fin du XIXème siècle. Ce pigment pourrait aussi être issu d’un mélange de bleu outremer et d’alizarine. Il est également possible que l’artiste ait mélangé des couleurs afin d’obtenir ce violet.

Figure 75 : Détail des couleurs violettes sur l’œuvre

rougEs rougE cAdmIum

Le rouge utilisé dans les carnations est très probablement du cadmium. En effet, cet élément chimique est apparu dans certaines courbes. Les sélénio-sulfures de cadmium varient d’un ton orangé à marron rouge en fonction de leurs compositions115. Le rouge de cadmium est connu depuis la fin du XVIIIème siècle mais n’est commercialisé qu’aux alentours de 1910116, ce pigment inorganique de synthèse se rapproche beaucoup du vermillon, tout en étant plus orangé. Les rouges de cadmium sont très utilisés par les artistes.

Figure 76 : Courbe générée au MEB pour une écaille de couleur rouge

mInIum, ou rougE dE PlomB

Le peintre a préféré utiliser des tons chauds que placer directement du rouge dans sa composition. 114. EASTAUGH Nicholas, WALSH Valentine, CHAPLIN Tracey, SIDDALL Ruth, Op. Cit p.302 115. PEREGO François, Op. Cit, p. 642 116. EASTAUGH Nicholas, WALSH Valentine, CHAPLIN Tracey, SIDDALL Ruth, Op. Cit p. 76 70 71


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Toutefois, l’angle inférieur dextre présente un rouge profond, qui pourrait s’apparenter à un rouge carmin. Le plomb apparait clairement sur plusieurs courbes, ainsi que le barium. Les oxydes de plomb donnent des couleurs rouges, orangées à jaunes sont l’oxyde de plomb, plus connu sous le nom de litharge (PbO)117. La présence de barium dans la courbe générée au MEB par l’écaille rouge peut laisser supposer l’utilisation du chromate de barium118, qui a une couleur jaune, pour obtenir un ton chaud. Le rouge utilisé est probablement du rouge de plomb, ou minium de formule chimique PbO4119, qui est un pigment inorganique de synthèse.

orAngE

La couleur orange présente sur le jouet de la fillette est probablement un orange de cadmium, qui se situe entre le rouge de cadmium et le jaune de cadmium JAunEs JAunE dE cAdmIum

Le jaune vif est très peu présent sur la composition, on le retrouve uniquement pour les touches de lumière sur les bijoux. Il s’agit probablement d’un jaune de cadmium, pigment inorganique de synthèse. Le jaune de cadmium de formule CdS, est souvent composé d’impuretés, comme des oxydes de zinc ou de cadmium. Leur prix élevé à l’époque de création du portrait est peut être la raison de l’utilisation par touches120. JAunE dE nAPlEs

Cette couleur est particulièrement utilisée pour les carnations. L’oxyde de plomb antimoniate121 a été interdit à cause de sa toxicité à partir de la deuxième moitié du XIXème siècle. La couleur employée par Marcel Caud était donc probablement un substitut122 du jaune de Naples, comme par exemple l’oxyde de cadmium ou de l’ocre jaune avec des pigments blancs123.

Figure 78 : Détail des couleurs jaunes sur l’œuvre

117. Ibidem p. 437 118. Ibidem p. 42 119. PEREGO François, Op. Cit, p. 476 120. Ibidem p. 411 121. EASTAUGH Nicholas, WALSH Valentine, CHAPLIN Tracey, SIDDALL Ruth, Op. Cit p. 279 122.PEREGO François, Op. Cit, p. 421 123. EASTAUGH Nicholas, WALSH Valentine, CHAPLIN Tracey, SIDDALL Ruth, Op. Cit p. 279 70 71


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vErts

La couleur verte n’a pas pu être analysée au microscope électronique à balayage. Le fond a été travaillé avec beaucoup de subtilité de nuances. Il semblerait que deux verts différents aient été utilisés, et mélangés avec des ocres ou du bleu pour obtenir les multitudes de nuances. Il est d’autant plus difficile de s’avancer sur la nature des verts car ce sont des couleurs qui ont depuis toujours préparées par mélange124 vErt dE chromE125 :

C’est le pigment vert le plus employé au début du XXème siècle, toutefois, son instabilité est bien connue. Ce pigment inorganique de synthèse est issu du mélange de jaune de chrome et de bleu de Prusse. Des charges sont souvent ajoutées au mélange. C’est une couleur très vive et saturée. vErt émErAudE :

Cette couleur fût découverte en 1838. Elle se «marie parfaitement avec les bruns et donne des verts d’un ton très puissant»126. Toutefois, ce n’est qu’en 1849 que ce pigment inorganique de synthèse est introduit dans les peintures à l’huile et à la fin du XIXème siècle, il était considéré comme un des seul verts stable. C’est un oxyde de chrome dihydraté de formule Cr2O32H2O. Il est semi transparent et son pouvoir colorant est bon, de plus sa teinte est très profonde dans les liants huileux.127

Figure 79 : Détail des couleurs vertes sur l’œuvre

tErrEs128

Les terres sont des pigments minéraux, provenant de roches. Les ocres peuvent aussi rentrer dans la dénomination terres. Leurs compositions sont complexes, car elle varient en fonction des gisements. On peut toutefois les classer selon trois dénominations. Les terres ferrugineuses sont composées principalement de fer, d’oxyde de manganèse et de charges. Ce sont les terres les plus courantes. Les terres bitumineuses sont constituées de matières organiques. Enfin, les terres vertes sont des silicates complexes. Ces pigments sont généralement opaques, et stables. Dans les analyses réalisées au microscope électronique à balayage, aucune trace de fer n’a été 124. .PEREGO François, Op. Cit, p. 764 125. Ibidem, p. 760-761 126. ARSENNE Louis Charles, Manuel du peintre et du sculpteur, LVDV inter-livre, 1986. Tome 2 p. 248 127. PEREGO François, Op. Cit p. 768-769 128. Ibidem, p. 717 72


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observée. L’écaille brune qui a été examinée n’était peut-être pas composée d’oxyde de fer, mais il est difficile d’imaginer que l’artiste n’ait pas utilisé de terres, notamment pour son fond et pour les rehauts colorés dans la fourrure de la mère. tErrEs dE sIEnnE nAturEllE Et BrûléE129

Ces terres, provenant à l’origine d’Italie sont de tonalité chaude, s’apparentant aux ocres, jaune pour la terre de Sienne naturelle, rouge pour la terre de Sienne brûlée. Actuellement, la majorité de ces terres ne proviennent plus des carrières italiennes, ce qui leur fait perdre de leur qualité. Elles sont composées d’oxyde de fer et d’oxyde de manganèse. La terre de Sienne naturelle contient 40 à 50% d’oxyde de fer, sa calcination lui fait perdre 10 à 30% de cet oxyde. La teinte brune est donnée par l’oxyde de manganèse. La stabilité de ces couleurs à la lumière est très bonne. Ces pigments sont semi-transparents dans les liants réfringents, comme l’huile. La prise d’huile est élevée130. tErrE d’omBrE nAturEllE Et BrûléE131

Ces terres ferrugineuses sont fortement concentrées en oxyde de manganèse (jusque 20%), ce qui rend leur siccativité importante. La terre d’ombre naturelle a une teinte olivâtre, tandis que la terre d’ombre brûlée a une teinte rougeâtre. Ces pigments sont assez opaques. Leur prise d’huile est très élevée. Leur tenue à la lumière est parfaite.

Figure 80 : Détail des terres sur l’œuvre

3. Le vernis L’idée de vernir une œuvre ou un objet découle d’un désir de protection et de recherche esthétique. Le vernissage, apparu dès l’antiquité dans le but de protéger les surfaces sensibles à l’eau, fût sujet à de nombreuses évolutions, tant pour son utilité que pour sa mise en œuvre. C’est ainsi qu’aujourd’hui nous possédons de nombreux types de vernis, grâce notamment aux évolutions technologiques du XXème siècle ayant permis le développement de résines synthétiques. Toutefois, dans le domaine des arts les résines synthétiques ne sont utilisées qu’à partir des années 1950132. Un vernis est obtenu par la dissolution d’une résine dans un solvant ou «essence»133, dans cer129. Ibidem p. 724-725 130. Les terres sont réputées pour leur prise d’huile importante, ce qui nécessite d’ajouter particulièrement du liant lors de la formulation des couleurs. Cela les rend également plus sensibles à la lixiviation lors de l’allègement de vernis. 131 PEREGO François, Op. Cit p. 723-724 132.Ibidem p. 751 133. Ibidem p.751 73


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tains cas on peut ajouter une huile cuite à une résine naturelle, ce qui donne un vernis gras. Les gommes végétales, exsudats résineux d’arbres sont traditionnellement dissoutes dans l’essence de térébenthine. Ces résines naturelles s’oxydent fortement dans le temps et l’ajout de térébenthine accélère ce processus. Le vernis est bien visible par sa forte oxydation. Il a été appliqué de manière épaisse, et a comblé les creux de la couche picturale. Le vernis présente une surface assez irrégulière, il comporte des zones de matités et de brillances. Il s’agit très certainement du vernis d’origine, néanmoins il est étonnant de constater qu’un artiste qui a si bien soigné sa peinture s’applique si peu à la pose du vernis, sensé le magnifier. Il est possible qu’un deuxième vernis ait été appliqué postérieurement, afin de redonner de la vigueur au portrait, par une personne non professionnelle.

Figure 81 : Vue du vernis au microscope USB grossissement x50

Figure 82 : Photographie de l’œuvre de mémoire sous lumière ultra-violette

L’aspect très oxydé, la solubilité à l’éthanol et la fluorescence verdâtre à la lumière ultra-violette134 confirment la nature triterpénique du vernis. Une analyse au microscope électronique à balayage a permis de démontrer la présence majoritaire de carbone135 et d’oxygène136 dans la couche de ver134. DE LA RIE René, Fluorescence of Paint and Varnish Layers (Part II) , Studies in Conservation, Vol. 27, No. 2 (May, 1982),.p.67, Figure 5 135. «Dammar and mastic are classed as triterpenoid resins since they are composed mostly of organics compounds consisting of a multicyclic skeleton containing 30 carbon atoms» STONER, Joyce Hill, RUSHFIELD Rebeca, Conservation of Easel Paintings, London, New-York, Routledge, 2013, p 528 136. «L’oxydation des vernis naturels se caractérise par l’apparition de molécules d’oxygène tandis que les molécules d’hydrogènes sont éliminées» DIETMANN Patrick, The aging of triterpenoid Resins and Varnishes. Swiss Federal Institute of technilogy, Zurich, 2003. p.55 74


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nis. Ce sont des éléments caractéristiques des résines naturelles. Bien qu’il soit très difficile de différencier un vernis dammar d’un vernis mastic, il est plus probable que le vernis utilisé sur le Portrait de Madame Courciéras et sa fille soit une résine mastic. En effet, les altérations: l’aspect très friable et chanci; ainsi que les tests d’allègement de vernis137 sont davantage caractéristiques de la résine mastic que de la résine dammar. Le choix du mastic pourrait être justifié par son indice de réfraction légèrement moins élevé que le dammar, lorsque la résine vient d’être appliquée138. De plus, le poids moléculaire du mastic un peu plus élevé que celui du dammar le rend légèrement plus visqueux. Ainsi, la surface peinte est davantage nivelée 139.

Figure 83 : Vue de la couche de vernis lacunaire au MEB. Grossissement x2200

Figure 84 : Courbe générée par le vernis au MEB

conclusIon L’œuvre a été conçue de manière traditionnelle. Dans le cas de ce tableau, le processus créatif de l’artiste se limite à l’application de la couche colorée et du vernis. En effet, l’artiste n’a pas préparé son support mais a préféré acheter une toile apprêtée industriellement. Les matériaux utilisés sont compatibles et relativement stables (hormis le vernis naturel). Les nombreuses altérations qui seront développées dans la partie suivante sont donc majoritairement dues aux conditions de conservation, plus qu’à l’instabilité de la stratigraphie de l’œuvre.

I. 137. HORIE Charles Velson, Materials for Conservation: Organic Consolidants, Adhesives and Coatings, Routledge, 2010 , 258 138. DE LA RIE René, The Influence of Varnishes on the Appearance of Paintings. Studies in Conservation, Vol. 32, No. 1 (Feb., 1987). p.3 139.Ibidem p.4 75


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II. État de conservation de l’œuvre L’état général de conservation est critique. La prise en charge de la restauration de ce tableau relève plus du sauvetage urgent que de la conservation. En effet la couche picturale, en plus d’être peu lisible à cause de la forte oxydation du vernis, est en soulèvement généralisé, ce qui l’a rendue très lacunaire. La toile, quant à elle, est attaquée par les moisissures et présente d’importantes déchirures.

A. Le support Le support a souffert d’altérations physiques et biologiques qui le fragilisent grandement.

1. Le châssis Le châssis est peu altéré, son rôle de support tenseur est encore correct. De nombreux nœuds de bois sont visibles, mais un seul semble affaiblir de châssis. L’aspect du bois est très irrégulier, de nombreuses échardes émergent de son fil. Les mouvements du bois ont induit la déformation de ce châssis fin ainsi une des traverses n’est plus parfaitement assemblée avec le montant supérieur. L’empoussièrement est très léger, grâce à l’encadrement clos par une planche de contreplaqué. Les semences ont faiblement oxydé le bois, la moisissure présente sur la toile n’a pas attaqué le châssis.

Figure 85 : La découpe est grossière, les mouvements du bois ont provoqué des déformations.

Figure 86 : Un nœud provoque une déformation du châssis

2. La toile La toile a conservé une souplesse appréciable et paraît résistante. La tension manque un peu de vigueur, mais cela n’a engendré ni pli, ni déformation. En revanche, cette toile a souffert de nombreux accidents qui l’ont lourdement endommagée. lEs AltérAtIons mécAnIquEs AccIdEntEllEs :

Des enfoncements sont visibles, un dans la partie supérieure senestre du tableau et également un petit, sur le visage de la fillette. Ces déformations sont présentes car le seuil d’élasticité de la toile a été dépassé140. La toile n’a pu retrouver son état d’origine après avoir été contrainte141. 140. BERGEAUD Claire, HULOT Jean-François, ROCHE Alain, La dégradation des peintures sur toile. Ecole nationale du patrimoine, 1997. p33 141.Ibidem. p104 76


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Deux importantes déchirures lacèrent le tableau. La première, le long du bord inférieur mesure 23,5 cm de longueur est située à 18,5 cm du bord dextre et à 8 mm du bord de tension. Elle semble avoir été provoquée par la trop forte rétractation de la toile lors d’un apport d’humidité, en effet, elle est relativement droite et la peinture autour reste assez adhésive. La seconde, plus impressionnante, est due à un choc violent. On peut louer dans ce cas la présence du fond de bois qui a maintenu le tableau dans sa chute. Cela a permis d’éviter l’empalement complet et dramatique de l’œuvre. La déchirure en T se trouve sur le torse de l’enfant et le choc a provoqué une très large perte de matière. Celle-ci mesure 13,8 cm et la ramification mesure 2,6 cm. Cette déchirure se situe à 21 cm du bord senestre de la toile et à 42 cm du bord inférieur. Le déchirement de la toile amène à un rééquilibrage de ses tensions142, ce qui provoque généralement des retraits de toile ou des déformations. Ici, les bords des déchirures ne sont plus jointifs. Quelques petites déchirures et perforations jalonnent l‘angle inférieur senestre. L’observation de la couche picturale à cet endroit laisse supposer qu’il y a eu un dangereux apport d’eau. Ceci expliquerait la plus grande fragilité du support à cet endroit et donc les multiples perforations.

Figure 87: Vue des déformations de la toile

Figure 88 : Vue de la déchirure au niveau du buste de l’enfant. La toile est déformée

Figure 89 : Détail de la déchirure au niveau du bord de tension. La toile s’est rétractée

lEs AltérAtIons BIologIquEs :

Une infestation de moisissures a colonisé la toile dans sa partie inférieure. La mise en culture a permis de dénombrer deux souches différentes, qui n’ont malheureusement pas pu être identifiées143. La toile est très affaiblie et cassante dans cette zone. En effet, les moisissures sécrètent des enzymes qui dénaturent la cellulose et les protéines, ici les fibres de toile et l’encollage, de manière à pouvoir s’en nourrir144. Le développement de micro-organismes est favorisé par une hygrométrie élevée ainsi qu’un environnement sombre et confiné. Dans le cas de l’œuvre de mémoire, cette atmosphère est due à la présence du panneau de contreplaqué au dos de l’œuvre. 142. KAPUSCIAK Maxime, Le traitement des déchirures d’œuvre peintes sur support toile. Ecole Nationale supérieure des Arts Visuels de la Cambre. 2007 p.33 143. Les comparaisons ont été réalisées à l’aide de la base de données du centre de recherche sur la conservation des collections sur le site internet Mycota : http://mycota-crcc.mnhn.fr, consulté le 15 décembre 2015 144. BERTALAN Sarah , WOOD LEE Mary, OLCOTT PRICE Lois , Mold, Fungi. The Book and Paper Group of the American Institute for the Conservation of Historic and Artistic Works. 9ème édition 1994. p.3 77


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En plus de l’affaiblir, les champignons colorent le substrat sur lequel ils évoluent. Ces auréoles peuvent être dues soit au processus de dégradation du support, soit à la digestion des micro-organismes, soit à la pigmentation même de ces derniers145. Les micro-organismes sont encore actifs sur l’œuvre de mémoire et sont donc très dangereux. Tant que les opérations de restauration n’ont pas débutées, l’œuvre est conservée de manière à l’isoler des autres tableaux de l’atelier afin de limiter la propagation des spores.

Figure 91 : Détail des moisissures gris clair

Figure 90 : Vue de l’infestation de moisissure au dos de la toile

Figure 92 : Détail des moisissures jaunes orangées.

Le montage de la toile au châssis est resté correct. Toutes les semences sont présentes et la toile n’est que peu oxydée autour de ces dernières. Bien que quelques tensions soient visibles autour des semences, aucune rupture de toile n’a eu lieu. La bonne conservation des bords de tension est très certainement due à l’encadrement qui les a protégé depuis la création de l’œuvre. En revanche, un très fort empoussièrement est présent entre le cadre et les bords de toile. Des toiles d’araignée ainsi que des cadavres d’insectes et des déjections ont été retrouvés lors du désencadrage.

Figure 93 : Vue des bords de l’œuvre lors du désencadrage tu tableau

145. BERTALAN Sarah , WOOD LEE Mary, OLCOTT PRICE Lois. Op.Cit. p.6 78


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3. L’encollage L’encollage est encore très cohésif sur la majeure partie du tableau. La présence d’un film continu et souple est bien visible dans les interstices de toile. En revanche, au niveau des zones exposées à l’eau et aux moisissures, le film ayant été dégradé a totalement disparu. La toile est désormais nue et fragilisée.

Figure 94 : L’encollage est visible dans les lacunes de couche picturale

Figure 95 : L’encollage a disparu dans la partie inférieure de la toile

B. La couche picturale La couche picturale présente de très nombreuses altérations, dues principalement à des causes physico-chimiques. Les altérations du support, comme les déchirures, se répercutent aussi sur la couche picturale. Le feuil de couche picturale est la partie de l’œuvre la plus endommagée. Cette strate est en complet soulèvement et l’intervention de refixage s’avère très urgente.

AltérAtIons dE lA cohésIon

La préparation, en vieillissant a perdu sa souplesse. Peut-être estce la peinture, composée d’acides gras, qui a participé à son oxydation. Toutefois, une hygrométrie élevée semble être la cause majeure de la dégradation. L’enduit d’apprêt est devenu cassant et présente un réseau de craquelure fin généralisé, plutôt important pour le jeune âge de la peinture. En effet, le tableau a 87 ans. Le temps de siccativité moyenne d’une peinture à l’huile est réputé être d’environ 80 ans. La polymérisation de l’huile aboutit à la formation d’un film continu de liaisons tridimensionnelles146 et ainsi perd sa souplesse d’origine. Le film d’huile étant encore relativement jeune, les craquelures d’âge ne devraient pas être si nombreuses. Il est plutôt probable que ce soit la préparation qui ait eu du mal à supporter les mouvements de la toile, en effet, les préparations grasses se caractérisent par un aspect cassant147.

Figure 96 : Vue du réseau de craquelures d’âge

146. BERGEAUD Claire, HULOT Jean-François, ROCHE Alain. Op.Cit p.31 147. Ibidem p.24 79


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On observe également des dédoublements au sein des strates. Au niveau du feuil de couche picturale, ce dédoublement est visible uniquement dans une zone limitée, au niveau du bas de la robe de la fillette. Une sous couche rouge est visible sous la peinture bleue. Cette altération rend compte du manque de compatibilité entre les deux couches. Toutefois, l’altération n’étant présente qu’au niveau d’un seul croisement de craquelures n’est donc pas significative d’un manque de compatibilité totale entre les différentes strates, mais est probablement due à une faiblesse mécanique localisée. Le vernis est lui aussi peu cohésif. Il est pulvérulent et se déplaque de la peinture. Cette altération est typique des vernis naturels et principalement de la résine mastic. La résine perd ses qualités de souplesse en s’oxydant.

Figure 98 : Déplacage du vernis

Figure 97 : Dédoublement de la couche picturale

. AltérAtIons dE l’AdhérEncE

Les altérations de l’adhérence découlent généralement des altérations de la cohésion. Cette dégradation se matérialise par une rupture à l’interface entre deux strates148. Plusieurs écailles sont retournées tandis que la couche picturale présente de grandes pertes de matière picturale149. Il y a un fort clivage entre la toile encollée et la préparation. Cela se perçoit sur presque toute la surface du tableau. Les mouvements de la toile, couplés à cette défaillance d’accroche à l’interface entre l’encollage et la préparation ont provoqué les nombreuses pertes de matière, qui se transforment petit à petit en déplacage, principalement sur la moitié dextre de l’œuvre.

Les écaillages en tuile induisent que l’accroche entre les écailles et le support est de plus en plus faible, car celles-ci se soulèvent sur leur périphérie. Cette altération, précédée par le soulèvement en toit, est typique d’un rétrécissement du support, suivi par le réalignement des forces au sein 148. BERGEAUD Claire, HULOT Jean-François, ROCHE Alain. Op.Cit. p. 65 149. Après observation, il semblerait que les pertes de matières représentent entre 15% et 18% de la surface totale de l’œuvre 80


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même du feuil150. Quelques écailles se chevauchent, à la suite de la contraction du support.

Figure 100 : Détail des soulèvements en toit et du chevauchement des écailles Figure 99 : Mise en évidence de l’écaillage en tuile avec la lumière rasante.

AltérAtIons oPtIquEs

Les altérations optiques diminuent fortement la lisibilité de l’œuvre sans porter atteinte à son intégrité. Elles sont généralement dues à des processus physico-chimiques151 . La couche picturale est très peu encrassée, hormis sur le bord inférieur qui était sous le cadre où des agrégats de crasse sont présents. La moisissure présente à l’arrière de la toile remonte elle aussi dans la feuillure du cadre. Les altérations visuelles majeures concernent le vernis, dont la couleur jaune montre la très importante oxydation. En plus de ce changement de coloration qui gène l’appréciation des couleurs, des inhomogénéités de brillance et de matité troublent la vision de l’observateur. En plusieurs endroits, le vernis est craquelé et se déplaque aux abords de ces fissures. Dans ces zones, le vernis ne possède plus sa transparence originelle. Les fissurations semblent avoir été provoquées par des coups. Généralement, les coups portés aux peintures génèrent des craquelures en escargot. Dans le cas de cette œuvre il est probable que la peinture, étant encore jeune et souple, ait accusé le choc sans se craqueler. Le vernis appliqué parfois en couche un peu épaisse étant, lui, plus dur et donc cassant que la couche de peinture et sa préparation, s’est fissuré.

150. BERGEAUD Claire, HULOT Jean-François, ROCHE Alain. Op.Cit pp.69-70 151. Ibidem .p.81 81


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Figure 178 : Les déplaquages de vernis mettent en évidence son oxydation par contraste avec la couleur de la peinture

Figure 177 : Détail de l’empoussièrement et des moisissures sous la feuillure du cadre

L’altération la plus spectaculaire du vernis est l’important chanci dans l’angle inférieur senestre sur une surface d’environ 1500 cm2 ce qui correspond à 20% de la surface du tableau. Un chanci est une microfissuration152 du vernis qui induit le changement de l’indice de réfraction de la surface. Cette altération est donc perçue visuellement comme une opacification ou un blanchiment du vernis. Elle est davantage susceptible d’apparaître lorsque le vernis est appliqué en couche épaisse153. Sur l’œuvre, ce chanci se caractérise par une couche laiteuse jaunâtre très visible dans les reliefs de la couche picturale. A ce stade de l’analyse de l’œuvre, il est impossible de déterminer si le chanci est restreint au vernis ou si il a atteint la couche picturale. Dans ce cas, il s’agirait d’un chanci profond154. Il est courant que les peintres ajoutent un liant résineux à leur peinture à l’huile, soit pour en améliorer le séchage, soit pour la réalisation de divers effets plastiques. On comprend ainsi pourquoi l’altération du vernis final peut engendrer l’altération de la matière picturale. On passe d’une altération impressionnante mais sans gravité (chanci de vernis) à une altération tout aussi marquante et qui plus est, met l’œuvre en péril (chanci profond). En effet, les chancis de couleur sont très délicats à traiter car la fraction résineuse présente dans la peinture a certainement des liaisons chimiques avec les autres composants de la couche picturale.

Figure 101 : Détail de la fissuration du vernis. x60

Figure 102 : Détail du blanchiment du vernis dans les reliefs de le couche picturale noire. x60

152. Des analyses au MEB semblent montrer qu’il ne s’agit pas d’une microfissuration mais plutôt d’une microporosité du vernis. Information recueillie lors du colloque JERI en novembre 2015. Allocution de la doctorante Anaïs GENTY-VINCENT«Les chancis de couches picturale des peintures de chevalet : contribution à la connaissance des mécanismes de formation, à la caractérisation physico-chimique et aux traitements de conservation-restauration». 153.NICOLAUS Knut, The restoration of paintings, Könemann, 1999. p 330 154. STEDMAN Véronique, Les chancis de vernis, Institut National du Patrimoine, 1985-86 82


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Figure 103 : Relevé des altérations

I

83


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III. Diagnostic Les altérations présentes sur le portrait ont été étudiées pour permettre le diagnostic. Ce dernier nous permettra de comprendre les causes de dégradation, leur mécanisme d’apparition et ainsi proposer un traitement tenant compte des faiblesses de l’œuvre. Il est bien sûr délicat de classer les altérations, qui généralement découlent de plusieurs facteurs en même temps. Toutefois, le classement sera réalisé, dans la limite des possibilités qu’offre une mise en page claire, dans l’ordre chronologique le plus probable d’apparition des altérations.

A. Causes intrinsèques aux matériaux Divers types d’altérations surviennent sur les tableaux au cours du temps. Certaines adviennent naturellement de par la constitution des matériaux et leurs réactions non homogènes qui créent des tensions entre les diverses strates défAIllAncEs dE mIsE En œuvrE

Les premières altérations qui dépendent de la nature du tableau découlent d’une mauvaise mise en œuvre. Elles proviennent d’un manque d’intérêt ou de connaissance vis à vis des matériaux employés par l’artiste ou les différentes personnes qui ont apprêté le support. Le manque de stabilité d’une œuvre peinte sur toile, résultant des natures hygroscopiques ou stables des matériaux, non compatibles, peut être accentué par une utilisation peu consciencieuse de ces médiums de création. PErtE dE cohésIon

La perte de cohésion est un problème structurel. Il correspond généralement à une rupture des chaînes macromoléculaires formées lors de la réticulation des films ou bien tout simplement dû à un manque de liant lors de l’application de la peinture. Cette altération peut découler d’une formulation hasardeuse de la matière, d’une contrainte chimique ou mécanique155, comme l’affaiblissement du liant par apport d’eau ou encore par l’attaque de micro-organismes156. Dans l’œuvre de Marcel Caud, le manque de cohésion, allié au manque d’adhésion se matérialise par les pertes de matières très importantes. Ces défaillances ont été accentuées par un apport d’humidité considérable. PErtE d’AdhésIon

La perte d’adhésion est une altération semblable à la perte de cohésion. Cette fois-ci, les ruptures de liens se font entre deux strates de nature différentes. Dans le tableau, la perte d’adhésion se fait à l’interface de l’encollage et de la préparation. Cette altération n’est pas étonnante. En effet, ces deux couches sont celles qui présentent le moins de compatibilité au sein de la stratigraphie générale. C’est à cette interface que les matériaux hygroscopiques rencontrent les matériaux huileux et stables. Les variations hygrométriques157 auront affaibli l’adhérence entre les strates, déjà sensiblement faibles. 155.NICOLAUS Knut, Op. Cit p. 192 156. Ibidem p.204 157. Ibidem p.194 84


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Ces deux altérations sont le fruit d’un problème structurel d’origine, d’autant plus qu’il a été couplé a un apport d’eau beaucoup plus important que ce que le substrat ne pouvait supporter. Les défaillances minimes et supportables dans des conditions de préservations stables ont été aggravées jusqu’à un état critique à cause d’accidents de conservation.

1 . Vieillissement naturel des matériaux Les matériaux vieillissent naturellement, ce qui leur donne un aspect d’authenticité ou, selon Cesare Brandi158, leur confère une patine, signe du passage du temps. Lorsque l’évolution des matériaux a lieu dans des conditions de conservation correctes, elle produit un tout indissociable. Les matériaux évoluent ensemble durant de longues années et s’accommodent les uns aux autres. Ainsi, le réseau de craquelure est le même sur l’ensemble de la stratigraphie. Des changements optiques, comme la transparence accrue, altèrent l’image laissée par l’artiste mais sont un signe de l’histoire matérielle de l’œuvre. Il est donc très important de respecter ces évolutions en proposant des traitements respectueux de la matérialité de la peinture. crAquElurEs d’âgE

Figure 104 : Si l’humidité diffère entre l’avant et l’arrière de la peinture, le climat tendra à s’équilibrer, en migrant au travers de l’œuvre. (NICOLAUS p.197)

Le craquèlement d’une couche picturale apposée sur un matériau hygroscopique est tout à fait naturel. Cette altération résulte des contraintes mécaniques entre un support hygroscopique subissant régulièrement des variations dimensionnelles et une couche picturale stable et moins souple. Il est reconnu qu’une peinture à l’huile a terminé sa siccativité en environ 80 ans. C’est à ce moment que les craquelures d’âge commencent à être perçues, bien que quelques unes aient pu se former avant, dépendant notamment des conditions de conservation. La préparation, quant à elle, est assez dure et cassante. Ceci résulte d’un manque de plastifiants et se matérialise par une perte d’élasticité159. Elle a donc peu résisté aux mouvements de toile. Les peintures sur toile sont en permanence soumises à des fluctuations hygrométriques entre l’arrière et l’avant du tableau. En effet, la loi de Jurin sur la capillarité s’applique particulièrement aux œuvres sur support toile. Le réseau de craquelures d’âge est donc induit par la récurrence de ces changement climatiques160. Dans le cas du Portrait de Madame Courciéras et sa fille, le réseau de craquelures est très inhomogène. Le tableau est âgé de 85 ans, ce qui signifie que la peinture est encore jeune. Il est donc compréhensible que le réseau de craquelures observé sur les parties en bon état soit très fin et presque imperceptible à l’œil nu.

158. BRANDI Cesare, Théorie de la restauration. Éditions Allia, Paris, 2011 159. BERGEAUD Claire, HULOT Jean-François, ROCHE Alain. Op.Cit p. 24 160 NICOLAUS Knut, Op. Cit p 194 85


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oxydAtIon du vErnIs

Les vernis s’oxydent rapidement dans le temps, plus principalement les résines naturelles dont les liaisons internes sont plus sensibles aux réactions d’oxydation161. Cette oxydation a pu être provoquée par la formation de radicaux libres, principalement de la famille des cétones162 lorsque les chaines moléculaires de la résine se sont rompues. Cette altération découle de la dégradation photochimique de la résine naturelle. Cette détérioration du vernis est le vieillissement naturel d’un des composants de l’œuvre qui est le plus perceptible lorsque l’on regarde le tableau. Bien qu’ici le vernis soit un élément d’origine, son état actuel nuit à la perception correcte de la couche colorée. Il ne joue plus son rôle de protecteur conséquemment à sa perte de cohésion. De plus son épaisseur et sa dureté accentuent certainement le phénomène de soulèvement de la couche picturale163. Enfin, son jaunissement et son encrassement altèrent ses qualités originelles et primordiales de transparence et de saturation de la couleur. ImPrEssIon dE toIlE

La texture de toile visible à la surface de la couche picturale est assez marquée. Cette structure est probablement un effet recherché par l’artiste pour réaliser des jeux de matière accrochant la lumière et faisant vibrer la représentation. Toutefois, il est possible que ce relief se soit accentué avec le temps. Ce vieillissement de la couche picturale ne représente en aucun cas une altération dommageable pour la peinture. Tout simplement le travail du peintre n’est plus perceptible avec la même véracité, mais ceci fait partie de l’unité de l’œuvre en lui ajoutant une valeur historique.

Les matériaux constitutifs sont en grande partie eux-même sources de leur dégradations, de par leur nature, le vieillissement de leurs composants ou leur sensibilité particulière à une caractéristique environnementale. Ces dernières sont nombreuses et ont des interactions plus ou moins nocives pour la conservation de l’œuvre.

B. Causes de dégradations environnementales Les dégradations dues à l’atmosphère ambiant dépendant des mesures de conservation de l’œuvre sont nombreuses et variées. Aucune conservation ne peut être optimale pour un tableau car tout environnement est constitué de facteurs provoquant sa dégradation.

1. Sensibilité des matériaux face à l’humidité La composition des peintures sur toile est très complexe et les réactions variant d’une œuvre à l’autre sont difficiles à appréhender. Effectivement, composées de matériaux stables face à l’humidité et d’autres hygroscopiques, les peintures de chevalet présentent une stratigraphie éminemment instable. Le manque de cohérence dans le comportement des différentes strates est souvent un facteur de développement d’altérations. 161. DIETMANN Patrick, Op. Cit p.24 162. Ibidem, p. 55 163. BERGEAUD Claire, HULOT Jean-François, ROCHE Alain. Op.Cit.p.81 86


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hygroscoPIcIté dE lA toIlE

La toile, de par sa nature cellulosique, est fortement sensible à l’humidité. Une fibre de lin a un caractère hygroscopique anisotrope, qui se matérialise sur un fil, composé de plusieurs fibres assemblées par torsion, en un grossissement et un allongement lorsque ce fil est plongé dans l’eau. Au séchage, ce fil se rétracte en conservant un faible pourcentage d’allongement. Ce comportement dans une structure de toile provoque des mécanismes plus complexes qui induisent la rétraction et le relâchement de cette dernière. Au terme de plusieurs apports d’humidité importants, la toile aura de moins en moins tendance à réagir. Les premiers apports d’eau sont donc généralement les plus néfastes. Nous ne disposons pas de moyen pour savoir si la toile a été décatie avant de devenir une toile à peindre. Toutefois, les nombreuses altérations nous laissent suggérer que le support a été très réactif une fois l’œuvre réalisée. Le temps ainsi que les conditions de conservation l’ont rendu un peu moins réactif à l’humidité aujourd’hui qu’à son origine. déPlAcAgE Et chAncIs dE vErnIs

La résine naturelle appliquée à la surface de la couche colorée présente une certaine sensibilité à l’eau. C’est une caractéristique typique des vernis triterpéniques. L’oxydation naturelle a été amplifiée par cet apport d’humidité important. Ainsi ont commencé à se produire les craquèlements du film de vernis. Dans certaines zones où le tableau avait subi des chocs, des réseaux de craquelures étaient déjà présents. L’humidité s’y est infiltrée de manière plus importante que sur le reste de la surface de l’œuvre. Peu après sont apparus les soulèvements et déplaquages de vernis, de manière localisée aux abords de craquelures. Dans ce cas, il est certain que l’air a remplacé l’eau car les soulèvements de vernis ont permis son évaporation. Ce phénomène provoquant une certaine opacification, résulte d’un principe optique. Effectivement, un espace entre la couche colorée et le vernis ne permet plus la même diffusion des rayons lumineux que lorsque le vernis était récent. L’altération du vernis la plus impressionnante est l’importante proportion de chanci qui l’altère. Cette lourde opacification est visible dans toute la partie inférieure de la représentation. Cette répartition laisse présumer que la toile a subi un important dégât des eaux, et que le montant inférieur aurait stagné dans l’eau, qui, par capillarité, serait remontée dans le tableau et causé de nombreux troubles dans l’ensemble de la stratigraphie. Dans le cas du vernis, cet apport d’eau a provoqué une micro-porosité, par disparition d’éléments constituants le film. Cette perte de matière a induit, comme la perte de cohésion du vernis citée plus tôt, une modification de l’indice de réfraction du vernis, résultant de l’apparition des vides au sein de la matière. La différence est que dans ces zones, le vernis ne se déplaque pas, et le blanchiment est très important. La forme du chanci correspond exactement à la forme de l’attaque de moisissure à l’arrière de la toile. Il y a plusieurs explications à ce phénomène. En premier lieu, il est possible que l’humidité soit remontée par capillarité dans la toile dans cette zone là, favorisant le développement des moisissures et provoquant le chanci. Dans un second temps, on pourrait supposer que l’opacification du vernis est due à une remontée de filaments de moisissure à travers l’œuvre, mais ce cas est peu courant car les micro-organismes se nourrissent essentiellement des composants du support. La troisième hypothèse est que la présence de moisissures au dos de l’œuvre génère un micro-climat et une humidité. Comme nous l’avons expliqué plus haut, l’humidité relative au dos de l’œuvre (ici accumulée dans l’encadrement clôt) cherche à s’équilibrer avec celle de l’environnement dans lequel se trouve le tableau. Si les moisissures génèrent une humidité, alors celle-ci s’ex87


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traira du dos de l’œuvre en traversant la couche picturale. Un tel apport d’humidité, long et constant pourrait être à l’origine du chanci. Dans un tel cas, le film d’huile serait également très appauvri. Si la cause du chanci est l’humidité, le processus exact de l’apparition est impossible à deviner. Il est probable que les trois hypothèses citées plus haut soient justes. Aussi, un autre phénomène nous a peut-être échappé.

Figure 105 : Schéma d’un chancis de vernis. NICOLAUS Knut, Op. Cit p.203

2. Causes physico-chimiques Les propriétés de la matière et ses interactions avec les éléments environnants sont des facteurs déterminant les types d’altération présentes sur les œuvres. Les réactions physico-chimiques résultent d’échanges de particules, de mouvements de substance ou de liaisons qui se créent entre le substrat et des corps étrangers. EmPoussIèrEmEnt

Toute atmosphère contient des particules dites polluantes. Elles peuvent se présenter sous forme de micro-particules invisibles à l’œil nu, comme les gaz émis par la circulation ou les industries. Les fumées domestiques, de cigarette ou de cheminée, sont elles aussi sources de polluants. D’autres éléments sont présents dans l’atmosphère, que l’on appelle communément poussières164. L’atmosphère est constituée de tous types de contaminants minéraux ou organiques, plus ou moins agressifs pour l’œuvre de par leur caractère gras, acide ou encore leur propension à créer un micro-climat favorisant le développement de micro-organismes. En outre, la poussière a des propriétés abrasives peu appréciables pour une surface peinte. Pour finir, la salissure d’un objet peut provenir du contact humain. Il n’est pas rare en effet de retrouver des projections ou des traces dues à l’activité humaine. Le tableau étudié présente un encrassement certain, apparu naturellement. Le ternissement des couleurs, déjà initié par l’oxydation du vernis, est appuyé par un voile léger et homogène de poussière. L’arrière de la toile est très peu sale, car protégée par le fond de bois placé lors de l’encadrement. Des concrétions de poussières sont visibles sur le bord inférieur de l’œuvre. C’est à ce même endroit que se sont généreusement développées les moisissures. On peut supposer qu’ici aussi, l’humidité a servi de souche à la crasse, en la fixant sur le tableau. 164. «La poussière est un mélange pulvérulent de corpuscules assez ténus pour pouvoir se maintenir en suspension dans l’air». Vade-mecum de la conservation préventive, Centre de Recherche et de restauration des Musées de France, Juillet 2006. p.18 88


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AuréolEs

Des auréoles sont visibles à l’arrière de la toile. Elles sont apparues lors de la remontée d’eau par capillarité dans les fibres du support. Ce mouvement d’eau a entraîné le déplacement des particules de crasse, présentes sur le tableau ou dans son environnement. La toile souillée a été affaiblie par le contact trop important avec l’eau. Elle a perdu ses qualités de résistance mécanique et est ainsi devenue un substrat favorable au développement de micro-organismes

3. Causes biologiques Les infestations liées au développement de bactéries ou de micro-organismes nécessitent un climat favorable. Leur croissance est optimale quand l’humidité relative est supérieure à 60% et que la température avoisine les 30°C. Une atmosphère sombre et confinée convient particulièrement à leur développement165. Ces organismes se nourrissent des matériaux cellulosiques. Ils prolifèrent aisément sur la toile et l’encollage, en les dégradant. Plusieurs traces d’infestation sont visibles. D’une part, les déjections ainsi que des cadavres et des toiles d’araignées prouvent que des insectes ont apprécié l’obscurité que proposait le système d’encadrement. Ils ont largement infesté l’œuvre, mais ne semblent pas source de dégradation très importantes. D’autre part, le tableau souffre d’une impressionnante attaque de moisissures qui sont encore actives. Ces informations laissent supposer que l’œuvre a été conservée dans un endroit relativement sombre et humide, certainement rarement inspecté ou nettoyé.

4. Causes mécaniques La majorité des causes mécaniques ont un facteur humain, elles sont généralement accidentelles. Toutefois, certaines découlent des mouvements naturels des matériaux hygroscopiques au sein de l’œuvre. La gravité des altérations n’est pas identique et elles peuvent être classées par ordre d’importance. La légère perte de tension de l’œuvre est due aux mouvements de la toile, qui s’est relâchée avec le temps. Les chocs sont perceptibles par les réseaux de craquelure circulaires. Ils sont visibles notamment au niveau du vernis qui, déjà fragile, a perdu davantage son adhérence. Ils ont causé des pertes de liaison à l’intérieur de l’ensemble de la stratigraphie. Les éraflures ont été causées par des contacts inopportuns avec des éléments environnant l’œuvre. Il est assez difficile de déterminer comment ces altérations se sont produites. Probablement à cause d’une manipulation ou d’un stockage peu consciencieux lors duquel la couche picturale aura été en contact avec des objets abrasifs. Heureusement, c’est la couche de vernis, déjà altérée, qui a souffert de ces usures.

165. Vade-mecum de la conservation préventive, Op. Cit p. 19 89


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Les enfoncements sont des déformations du support. L’élasticité de la toile a été éprouvée, sans que celle-ci n’ait atteint son point de rupture. La contrainte a produit une déformation. Les altérations sont certainement le résultat d’une pression d’un objet contre la face de la peinture, puisque les enfoncement sont concaves. Les perforations sont de petites brèches de la toile, occasionnées par le contact avec un objet coupant ou par une tension sur un endroit limité. Elles sont situées dans la partie inférieure du tableau, auparavant affaiblie par l’apport d’humidité. Enfin, les déchirures sont les altérations mécaniques les plus perceptibles car elles sont très étendues. L’une d’elle découle d’un grave accident. Le propriétaire a fait savoir que le tableau a chuté sur l’angle d’un meuble, alors qu’il était déjà dans un très mauvais état de conservation. Cette mésaventure a certainement entraîné la perte de nombreuses écailles déjà en soulèvement sur le reste du tableau. Evidemment, l’altération principale causée par cette chute a été la déchirure en T et la totale perte de matière autour de celle-ci. L’autre déchirure, le long du montant inférieur du tableau suit très nettement les fils de chaîne. La localisation de cette altération est tout à fait explicable par le fait que cette partie du tableau ait été grandement éprouvée par l’humidité. La toile, en réagissant, s’est violemment contractée. Le support s’est rompu exactement à la limite de l’encadrement. Ceci correspond à une fragilité initiée par des frottements de la feuillure du cadre. Les contraintes mécaniques sont à l’origine d’altérations très diverses. Tant le support que la couche picturale sont sujets à ces dégradations. Il serait possible de dire que les altérations liées à la réactivité des matériaux face à l’humidité ont aussi un lien avec la mécanique car les soulèvements et écaillages sont liés aux mouvements du support. L’environnement est source de la majorité des dégradations. Toute atmosphère est potentiellement destructrice pour une œuvre, c’est pour cela qu’il est nécessaire de contrôler sérieusement l’espace dans lequel sont conservées des œuvres d’art. Le tableau n’a pas été conservé dans des conditions acceptables et a grandement souffert de l’apport d’humidité, tant au niveau du support qu’à l’intérieur de la stratigraphie ou encore sur le vernis. Il est très facile d’affirmer que l’œuvre a subi un important dégât des eaux. Il est possible de supposer que l’eau a coulé notamment sur la figure maternelle. La perte de matière se fait en effet de manière sensiblement rectiligne. De plus, les importants chancis sur l’ensemble de la surface, et notamment dans la partie inférieure sénestre, laissent entrevoir que le tableau a stagné dans l’eau. Celle-ci serait remontée par capillarité, provoquant de fortes modifications chimiques puis optiques. En plus de cet apport d’eau, le tableau a été entreposé dans un lieu relativement poussiéreux et favorable au développement des micro-organismes. Pour terminer, l’œuvre a subi des dégradations anthropiques, lors de ses déplacements ou tout simplement durant son conditionnement.

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Figure 106 : Schéma présentant les différentes altérations dues à l’apport d’eau

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IV.Histoire matérielle de l’œuvre Le Portrait de Madame Courciéras et sa fille a très certainement été peint par Marcel Caud en contrepartie des consultations données par le docteur Courciéras à la famille Caud. L’artiste a acheté une toile préparée industriellement de format 40F de manière à pouvoir y représenter ses modèles en grandeur nature. Il a peint à l’huile, avec des couleurs en tube puis a verni sa représentation avec un vernis naturel, utilisé très communément à cette l’époque. Une fois le tableau terminé, l’artiste l’a fait encadrer, par l’encadreur Renaudin, passage Dantzig, à Paris 166. En 1930, le portrait fut accroché dans l’appartement de la famille Courciéras, boulevard de Grenelle à Paris. Cette habitation possédait une pièce qui tenait lieu de cabinet médical à Monsieur Courciéras. Les conditions de conservation devaient donc être convenables et assez stables. En 1953 Mariette s’est mariée et son époux reprend le cabinet médical de Joseph Courciéras. Le nouveau médecin modifie l’aménagement de l’appartement, le tableau est décroché de son emplacement dans le salon. Le portrait est confié par Mariette à des cousins, vivant dans le sud de la France. Le tableau est exposé dans une résidence secondaire, à Cannes. Les conditions climatiques changent, de plus le climat est moins stable dans ce nouveau lieu de conservation car il ne s’agit pas d’une habitation principale. La présence de la peinture est attestée dans cet appartement jusque dans les années 1975 ou 1980167, époque à laquelle la famille des cousins de Mariette Corciéras déménage. Ensuite le lieu et les conditions de conservation sont totalement inconnus. C’est à ce moment que la majeure partie des dégradations ont dues se produire, un dégât des eaux étant la cause principale. En 2015, le tableau est acheté par un collectionneur privé à un antiquaire sur la foire de Chatou, en région parisienne. Le tableau était déjà grandement altéré. Quelques temps après l’acquisition, un accident violent s’est produit, entraînant la déchirure et la grande perte de matière au niveau du buste de l’enfant. A la suite de ces nombreuses et inquiétantes altérations, le propriétaire du tableau nous l’a confié pour en réaliser la restauration. L’œuvre entre à l’école le 25 septembre 2015.

166. Voir dans la partie historique «B. Marcel Caud et la création parisienne d’après guerre», page 37 167. Toutes ces informations proviennent de l’entretien avec le fils de Mariette Courciéras, qui a eu lieu le 31 mars 2017. Sa dernière visite à ses cousins dans cet appartement de Cannes date de 1975, et il n’a plus de nouvelles d’eux depuis de nombreuses années. 92


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V. Pronostic Maintenant que les altérations de l’œuvre ainsi que leurs causes sont comprises, l’avenir du tableau peut être imaginé. Le pronostic envisage l’évolution de la peinture dans le temps, sur le court et le long terme. Cet examen permet de justifier la nécessite d’intervention.

A. Évolutions à court terme Il est aisé de dire que les pertes de matières s’accentueront à très court terme. La stratigraphie réagit encore de manière inhomogène à l’humidité. Maintenant qu’elle est extrêmement affaiblie, la résistance de l’œuvre est moindre et d’infimes variations peuvent être source de grands dégâts. Les moisissures, si elles ne sont pas traitées, risquent de continuer à se développer. Bien que le tableau soit conservé dans des conditions peu propices à leurs croissance, elles peuvent survivre sans croître et reprendre leur évolution si des conditions plus favorables se présentent. Leur présence plus ou moins active endommage continuellement le support, puisque les micro-organismes se nourrissent de ce substrat. De plus elles constituent une pollution atmosphérique non négligeable, et retiennent un climat humide à l’arrière de l’œuvre. Les déchirures ainsi que leurs abords déformés sont des zones fragilisées. Il est possible que ces ruptures de continuité du support s’agrandissent avec le temps. Les déformations s’accentueront, au risque de devenir de plus en plus difficile à ramener dans le plan du tableau. Il est possible que les chancis qui altèrent gravement le vernis pénètrent plus en profondeur, jusqu’à la couche picturale. Le film de peinture présenterait un blanchiment, par appauvrissement en liant. Cette altération serait beaucoup plus difficile à traiter qu’un chanci de vernis uniquement.

B. Évolutions à long terme Avec le temps, les matériaux vieillissent naturellement. Le vernis s’oxydera davantage jusqu’à prendre une teinte brunâtre. La couche colorée sera de moins en moins visible. La perte d’adhérence du vernis avec la couche picturale aura tendance à s’accentuer dans les zones déjà concernées, tandis que dans les parties où la résine est bien adhésive, cette dernière risque de devenir de moins en moins soluble dans les solvants peu polaires168. De plus, son durcissement risque de contraindre la couche picturale. La perte de tension très peu visible actuellement risque de s’amplifier et de créer des déformations. Selon l’affaissement du support, les montants et la traverse du châssis seraient en moyen de marquer la toile. Tout environnement étant naturellement constitué de poussières, le tableau s’encrassera plus ou moins rapidement en fonction de l’atmosphère qui l’entoure.

168. NICOLAUS Knut. Op. Cit, p315 93


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PROTOCOLE DE RESTAURATION I. Nécessités d’intervention La restauration d’une œuvre a une grande conséquence sur celle-ci, tant pour son histoire matérielle que pour l’image qu’elle renvoie. Le choix des opération de restauration ne peut donc pas être pris légèrement. En effet, depuis l’imprégnation de l’œuvre par divers consolidants jusqu’au retrait de matériaux d’origine qui ne remplissent plus leurs rôles, les choix du restaurateur remettent en question l’unité matérielle de l’œuvre. Il faut toutefois préciser que dans le cas de cette restauration l’intervention relève davantage du sauvetage et ne pourra pas être une opération légère. Dans ce cas, une intervention minimaliste serait compromettante pour la pérennité du traitement. Toutefois, certaines interventions sont nécessaires plus prestement. Elles peuvent être classées selon leur degrés d’interventionnisme.

A. Stabiliser l’ensemble Etant donné l’état de conservation alarmant de l’œuvre, il est indispensable d’agir rapidement sur sa stabilisation pour éviter qu’elle ne perde davantage son intégrité. En premier lieu, les écailles doivent être maintenues dans le plan de l’œuvre pour éviter de nouvelles pertes de matière. De plus, le tableau doit pouvoir être manipulable de manière à traiter les moisissures. Il est impératif de stopper immédiatement cette contamination qui risque de s’accroître et ne cesse de dégrader les matières organiques constituant l’œuvre. Le refixage de la couche picturale ainsi que sa consolidation pourront ensuite être réalisés. Pour terminer les opérations d’urgence, il est indispensable de rétablir la planéité de la toile afin d’éviter que les déformations ne s’accentuent.

B. Permettre une meilleure lisibilité du sujet Le travail de restauration doit permettre de rétablir une continuité entre les strates, dans le but de valoriser le travail de l’artiste. L’œuvre doit retrouver une certaine cohérence pour que la représentation soit de nouveau appréciable. Ces procédures peuvent-être poussées à différents degrés d’interventionnisme en veillant à toujours respecter l’histoire de l’œuvre ainsi que les choix du créateur. Le feuil doit être nettoyé et allégé de son vernis, qui dérange la perception du travail de l’artiste. Une telle oxydation du vernis ne peut pas être un choix du peintre. Il est ensuite nécessaire de combler les lacunes de couche picturale pour réintégrer la continuité de cette dernière.

C. Assurer la pérennité de l’œuvre La pérennité du travail de restauration, et à travers lui celle de l’œuvre restaurée, dans le temps est essentielle. Elle sera cautionnée par des choix d’intervention réfléchis et sérieux. En effet, la stabilité de la restauration dépendra des matériaux introduits dans la stratigraphie. Un vernis final viendra saturer les couleurs et surtout protéger l’ensemble de la couche picturale des sources de dégradations extérieures. 94


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II. Cahier des charges Le rôle du cahier des charges est de limiter le champ d’intervention du restaurateur en déterminant les matériaux permettant de se rapprocher de la restauration idéale, bien que l’intervention parfaite n’existe pas. Selon le code de déontologie des conservateurs-restaurateurs, le restaurateur doit aspirer à rétablir l’unité physique et esthétique d’un bien culturel en intervenant directement sur celui-ci si ce dernier n’est pas dans un état de conservation permettant sa bonne perception et sa transmission. Le professionnel doit avoir à cœur de respecter l’intégrité esthétique, historique et physique de l’œuvre traitée. Dans cette optique, l’intervention sera effectuée avec des matériaux réversibles, stables et compatibles avec l’œuvre et présentant une innocuité avec les matériaux constitutifs de celle-ci.169

A. Les exigences dues à la future conservation Le tableau sera conservé dans une habitation privée, où le climat sera relativement tempéré. Bien que l’environnement ne soit pas exactement contrôlé, les propriétaires de l’œuvre seront informés des gestes de conservation et des observations qu’ils pourront effectuer périodiquement pour s’assurer de la pérennité de leur bien. Il faut toutefois garder à l’esprit que la vie d’un tableau est longue et que la transmission entre génération n’est pas toujours favorable à la conservation de celui-ci. Il n’est pas impossible qu’un jour le portrait de cette mère et sa fille soit de nouveau sujet à des conditions climatiques néfastes parce qu’il ne suscitera plus l’intérêt de ses propriétaires. Il faut ainsi éviter d’employer des matériaux présentant une extrême sensibilité aux variations climatiques ou aux infestations, dans l’optique d’une conservation durable.

B. Les exigences provenant des matériaux constitutifs D’après les tests effectués ainsi que les observations émises lors du constat de conservation des matériaux, certaines déductions sur la réactivité de ces derniers on pu être faites. lA couchE PIcturAlE

La couche picturale est résistante aux principales familles de solvants utilisés en restauration, qui sont les alcools, les hydrocarbures aromatiques, les hydrocarbures aliphatiques, les cétones et pour finir l’eau. Le feuil est relativement imperméable et les couleurs présentant régulièrement des dégorgements sont ici insensibles a cette action de l’eau. Cette caractéristique permet d’envisager tous les traitements aqueux pour le nettoyage, le dévernissage ou encore la pose de protection, et la consolidation. La pose de vernis peut engendrer la solubilisation de composants de la peinture, pour cela, il faudra que le solvant véhiculant la résine soit le moins polaire possible 170. 169. Confédération européenne des organisations de conservateur-restaurateur. Règles professionnelles de l’E.C.C.O(I) - La profession. 2003 170. DIETMANN Patrick, Op. Cit p.18 95


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lA PréPArAtIon

La préparation étant grasse, elle ne présente pas de réactivité directe face à l’humidité. Toutefois, cette dernière, déjà fragile, devient plus cassante lors de l’apport combiné de chaleur, d’humidité et de pression. Il faudra ainsi être particulièrement vigilant lors des opérations de remise dans le plan du support et éviter de coupler ces trois paramètres tant que la préparation n’a pas été consolidée. De plus, les écailles de préparation surmontées de couche picturale sont fragile mécaniquement. Par conséquent, une grande vigilance lors des interventions devra être observée pour ne pas casser les écailles de couche picturale. lA toIlE EncolléE

La toile encollée d’un adhésif collagénique est sensible à l’humidité, de plus, le support est encore assez réactif à l’humidité. Il est d’ailleurs possible d’affirmer que ce couple toile de lin et encollage protéinique a été très réactif lors du dégât des eaux subi par l’œuvre ce qui a provoqué l’importante perte d’adhérence à l’interface entre l’encollage et la préparation. Il faudra donc être particulièrement vigilant aux mouvements de la toile si un apport d’eau important doit y être fait.

C. Les exigences découlant des altérations de l’œuvre lA nécEssIté d’un fort mAIntIEnt du suPPort

La toile ayant été très altérée par les apports d’humidité suivi de l’infestation de moisissures et par les deux grandes déchirures nécessite un fort maintient. En effet, ce support présentant encore de bonnes qualités mécaniques dans le zones du tableau indemnes, montre de nombreux signes de faiblesse dans la partie inférieure de la toile. Le support ne remplit absolument plus son rôle de maintient de la couche picturale. L’ampleur des altérations requière un maintient solide et fort mécaniquement.

dEs AltérAtIons PouvAnt réAgIr Aux APPorts d’humIdIté

Le tableau ayant souffert de l’humidité, il est très compréhensible que la majeure partie des altérations en découlent. Il ne faut donc pas négliger le traumatisme subi par la stratigraphie et la réactivité potentielle de ces altérations face à leur cause d’apparition. Il est tout à fait probable que les moisissures croissent à nouveau et que les blanchiments du vernis s’étendent à la surface du tableau, et plus dramatiquement en profondeur dans les strates.

D. Les exigences résultant de l’histoire matérielle un tABlEAu EncorE vIErgE dE toutE rEstAurAtIon

Il est très fréquent d’agir sur une œuvre ayant déjà subi des restaurations, plus ou moins réussies, qui dans certains cas extrêmes mettent en péril l’intégrité de la peinture. Le tableau a eu la chance de conserver sa constitution originelle, il serait donc bon d’insérer le moins possible de matériaux de nature différente à sa constitution d’origine, dans le but d’une restauration peu intrusive et respectueuse de la nature de l’œuvre. 96


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lE rEndu fIdèlE dE l’ImAgE créE PAr lE PEIntrE

Il sera intéressant dans ce travail de s’approcher au plus près du travail originel du peintre, en conservant parallèlement la trace du temps. De ce fait, le solvant choisi pour l’allègement de vernis permettra de régénérer le vernis chanci sans devoir enlever la totalité de la résine d’origine. L’intérêt de ce type d’œuvre est de transmettre l’image de personnages à travers l’histoire, il est nécessaire de rétablir de manière illusionniste, les attitudes et expression, dans le but de valoriser le travail de l’artiste qui a pris le parti d’être fidèle à la nature. Cependant, dans cette optique de fidélité et d’humilité du restaurateur envers l’artiste, il est indispensable de concevoir dans les parties trop lacunaires un traitement non-illusionniste pour la retouche.

conclusIon Bien que la nature des matériaux constitutifs ne soit pas une contrainte pour les traitements aqueux, leurs altérations, elles, nécessitent une vigilance toute particulière car elles risquent de croître sous l’action de l’eau. Un traitement à base de produits synthétiques serait éventuellement à prévoir. En revanche, la présence prépondérante d’écailles en cuvette et les très grandes faiblesses du support toile tendraient à nécessiter un rentoilage traditionnel à la colle de pâte. L’épaisseur du vernis laisse à penser que la couche picturale sera correctement protégée lors d’un éventuel rentoilage. Le blanchiment des vernis au rentoilage est courant. Même si cette altération est impressionnante, elle n’est pas dangereuse pour une couche picturale riche en liant. Le Portrait de Madame Courciéras et sa fille n’a jamais été restauré, la couche picturale n’est donc pas lixiviée. Le vernis d’origine est déjà chanci, il nécessitera une régénération suivie d’un allègement. La couche picturale ne présente finalement pas de véritable contre-indication au traitement naturel de l’œuvre. La préparation n’est pas sensible à l’eau, il n’y a donc aucun risque de transposition. La réactivité de la toile est importante, mais si l’ensemble est maintenu sous cartonnage, les pertes de matières et les déformations ne sont plus à craindre. Le traitement naturel est également un choix respectant la stratigraphie de l’œuvre.

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III. Proposition de traitement 1. désEncAdrAgE dE l’œuvrE

Le tableau et son cadre doivent être désassemblés avant toute opération car l’encadrement ne permet pas d’avoir accès au revers de l’œuvre ni à ses bords de tension. Pour cela, les pitons vont être dévissés, les bandes de toile et les pointes maintenant le fond de bois au cadre vont être enlevés. 2. rEPosItIonnEmEnt dEs écAIllEs

Les écailles retournées ou récupérées par le propriétaire seront replacées à l’aide de petits instruments à leur emplacement d’origine si il est possible de le retrouver. Elles seront maintenues à leur place par une goutte de colle de poisson à 4%, mais sans apport de chaleur. En effet, les écailles sont trop fragiles et petites pour supporter un refixage par combinaison d’humidité, de chaleur et de pression, si elles ne sont pas protégées par un papier de protection généralisé. 3. PosE du PAPIEr dE ProtEctIon générAlIsé

Avant de réaliser le collage, des cales de la hauteur du châssis seront placées sous les déchirures de manière à les maintenir dans le plan. Les grandes dimensions du tableau ainsi que la fragilité et l’irrégularité de la surface nécessitent que le papier soit posé en plusieurs laies, pour en optimiser le collage. Le sens des fibres sera orienté parallèlement aux sens des déchirures. Cela permettra, lors de la contraction du papier au séchage, de rapprocher de manière optimale les bords de déchirure et d’en améliorer la planéité. Le papier choisi est un papier Bolloré® fin171. Le choix de ce grammage est justifié par le fait que la finesse du papier lui permettra d’épouser au mieux la forme des écailles. Le papier japonais est exclus car lors de son délitage, il risquerait de laisser beaucoup plus de fibres au niveau des arrêtes des écailles. La protection est collée à la colle de pâte diluée172. Cet adhésif est choisi car il a un bon pouvoir collant et sa contraction est modérée. 4. démontAgE dE l’œuvrE

L’œuvre sera démontée de son châssis, les bords sur lesquels la moisissure ne prolifère pas seront aplanis à l’aide d’une spatule chauffante et d’un linge humide. Le tableau est maintenu sur un fond de bois par des agrafes à travers des cartonettes. Ce maintient est provisoire. Il permet de ne pas laisser l’œuvre libre pendant le traitement des moisissures. Il est inconcevable de cartonner une œuvre dont les moisissures sont actives. 5. trAItEmEnt dEs moIsIssurEs Et nEttoyAgE dE lA toIlE

Les micro-organismes sont d’abord éliminés par un brossage de la toile et une aspiration simultanée avec un aspirateur muni de filtres Hepa®. La toile non infestée par les moisissures est ensuite brossée en aspiration elle aussi. Le nettoyage pourra être terminé si nécessaire par un gommage à la gomme wishab®. Le traitement des moisissures est poursuivi par plusieurs imprégnations de la toile avec de l’éconacide alcoolique à 0,2% dans de l’éthanol. 171. De grammage 12 g/m2 172. La colle de pâte réalisée est faite à partir de la recette de Monsieur Olivier Nouaille, qui est composée de six parts de farine de froment, additionnée d’une part de colle de peau de lapin en grain, 0,75 part de miel, 0,25 part de fluorure de sodium et neuf parts d’eau. Au cours de la cuisson, beaucoup d’eau est rajoutée pour obtenir la consistance désirée. 98


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6. consolIdAtIon ProvIsoIrE dEs déchIrurEs

Des pontages à l’Origam® seront posés avec du Plextol® B500 épaissi au xylène. Ils devront être positionnés tous les deux à trois millimètres de manière à bien supporter les mouvements de la toile. Il permettront de maintenir les bords des déchirures lors de la mise en extension de l’œuvre. 7. mIsE En ExtEnsIon

Des bandes de tension provisoires seront posées à l’arrière de la toile. Elles permettront la mise en extension du tableau sur un bâti Staro®. Le choix de l’intissé moyen173 permet que les bandes ne soient pas trop contraignantes pour le support fragilisé, mais suffisamment solides pour supporter la mise en extension d’une toile de ce format. Elles seront collées à la toile par du Plextol® B500 épaissi au xylène. Pour faciliter leur retrait, des bandes d’intervention en papier bolloré épais seront collées en intermédiaire entre la toile et les bandes de tension. Les bandes d’intervention et les bandes de tension seront collées par réactivation à la chaleur et non dans le frais. Cela permet d’éviter d’imprégner trop profondément la toile d’origine d’adhésif synthétique. Une fois les bandes de tension collées, l’œuvre est tendue sur un bâti de travail à l’aide d’agrafes. 8.mIsE En chAmBrE humIdE

L’humidification de la toile maintenue en tension permettra d’ajuster la tension du support afin d’éviter le chevauchement des écailles. 9. rEfIxAgE PAr lA fAcE sur tABlE chAuffAntE BAssE PrEssIon

Le refixage par la face permet à la fois de maintenir les écailles sur la toile mais également de consolider la couche picturale. L’apport d’un adhésif peu visqueux est donc préférable. La surface de l’œuvre est mieux perceptible lors d’un refixage par la face. La remise dans le plan des écailles est plus facile à contrôler. Un premier refixage sera donc réalisé par la face de l’œuvre, sur basse pression chauffée à 40°C. L’aspiration sera couplée au passage d’un fer soupesé à une température inférieure à 60°C. Le maintient de l’œuvre en aspiration permet de palier les éventuels mouvements de la toile lors de l’application de la colle de poisson à 3%. 10. cArtonnAgE dE l’œuvrE En vuE d’unE mIsE En tEnsIon sur BâtI

Pour avoir accès à la totalité de la toile, il faut retirer les bandes de tension provisoires. Néanmoins, pour la suite des opérations, l’œuvre devra être maintenue sur un bâti de travail. Le cartonnage du tableau pourra être utilisé comme des bandes de tension sur la face. Pour cela, il faut réaliser un cartonnage dont les bords dépassent de beaucoup ceux du tableau. Sur une largeur d’environ vingt centimètre tout autour de l’œuvre, le fond de bois sera isolé par du ruban adhésif large sur la périphérie de l’œuvre. Ainsi, le papier de cartonnage n’adhérera que plus loin sur le fond, et lors de l’enlèvement du cartonnage, les bords de celui-ci seront aisés à décoller. Le choix du papier de cartonnage se tourne donc vers un intissé moyen, qui aura de bonnes propriétés lors de la mise en tension de l’œuvre sur bâti. L’intissé sera collé avec de la colle de pâte diluée, de manière à rester en cohérence avec le premier papier posé sur la couche picturale. Une fois le cartonnage sec, l’intissé sera découpé à la longueur voulue pour les bandes de tension. Le tableau pourra être monté sur un bâti Staro®, de manière à réguler aisément la tension.

173. De grammage 35g/m2 99


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11. rEfIxAgE PAr lA fAcE sur tABlE chAuffAntE BAssE PrEssIon

Un refixage généralisé par l’arrière de l’œuvre permettra de perfectionner le premier refixage. Les strates seront imprégnées de manière plus homogènes. Un refixage sur table basse pression permettra une fois de plus de prévenir les mouvements de la toile face à l’humidité. La toile sera imprégnée d’une colle de peau de lapin à 7%. La pénétration sera faite par l’aspiration ainsi que par le passage d’un fer peu appuyé et à une température inférieure à 60°C. La chaleur de la table sera réglée autour de 40°C. L’aspiration sera maintenue jusqu’au séchage complet de l’œuvre. 12.contInuIté ProvIsoIrE dEs déchIrurEs

Les pontages provisoires seront enlevés et un mastic sera déposé dans les déchirures de manière à maintenir la continuité du support lors des opérations suivantes. De nouveaux pontages en fil de lin collés au Plextol® B500 permettront de renforcer encore l’ensemble. 13. décArtonnAgE PArtIEl dE l’œuvrE

Une fenêtre sera ouverte dans le papier de protection sur toute la surface de l’œuvre. En effet, les intissés ne peuvent pas être délités totalement car il feront encore office de bande de tension. Un nettoyage de la couche picturale à l’eau déminéralisée tiédie permettra d’ôter les résidus de colle de pâte.

14.rEntoIlAgE trAdItIonnEl

L’utilisation de la colle de pâte, mélange de colle animale et de farine de céréales, avec de l’eau, du miel et un antifongique est une des colles les plus anciennement utilisées. Décrit dès le XVème siècle, cet adhésif est fabriqué en premier lieu pour la création174 mais également pour la restauration. Son vieillissement ainsi que sa compatibilité avec les matériaux de création sont donc parfaitement connus et appréciés. La procédure décrite par Emile Rostain175 sera respectée. L’opération se fait en plusieurs étapes: - Pose de mastics provisoires : Il est nécessaire de rétablir la continuité de la couche picturale en prévision du rentoilage. En effet, principalement dans les grandes lacunes, la toile risque de se déformer en se mettant au niveau de la couche picturale. Le comblement des lacunes permet également d’éviter que la colle de rentoilage ne vienne obstruer les manques de couche picturale. Un mastic naturel au blanc de Meudon et à la colle de peau de lapin sera donc posé et ragréé dans l’ensemble des lacunes. Le choix du mastic traditionnel à la colle de peau permet de limiter l’apport de matériaux au sein de la stratigraphie, puisque la colle de peau de lapin est l’élément principal des colles de refixage et de rentoilage. - Cartonnage de l’œuvre : en vue du rentoilage, un cartonnage doit être réalisé. Un premier cartonnage léger au papier bolloré fin sera posé à la colle de pâte diluée. Quand celui ci sera sec, un cartonnage épais pourra être réalisé avec un papier Canson® de grammage 125 g/m2., posé à la colle de pâte également. Le cartonnage peut ensuite être retourné pour avoir accès au revers de l’œuvre.

174. CENNINI Cennino, Traité de la peinture, Jules Renouard, Paris, 1858. p. 103 175. ROSTAIN Emile, Rentoilage et transposition des tableaux. Erec, Puteaux 1987 pp 45-77 100


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- Incrustations: les lacunes de toiles seront débarrassées de leurs mastics provisoires de manière à pouvoir les incruster de toile de lin. Les toiles d’incrustation seront choisies de contexture et d’épaisseur similaires à la toile d’origine. Une fois taillées, elles seront collées à la colle de pâte. Des mastics seront déposés dans les trous de semences de manière à obtenir une surface bien plane qui permettra un meilleur alignement des forces des gazes et de la toile de rentoilage - Pose des couches intermédiaires du rentoilage : deux gazes seront successivement collées à la colle de pâte au revers de la toile. Ces couches d’interventions sont posées pour faciliter une éventuelle future dérestauration. Elles jouent également le rôle de tampon entre la toile d’origine et la toile de rentoilage, en cas de réactivité de l’une ou de l’autre. Pour finir, les gazes sont un renfort supplémentaire pour la toile et participent au maintient des déchirures. - Préparation de la toile de rentoilage : une toile de lin tendue droit fil sur un bâti Rigamonti®. sera décatie, foulée et retendue deux fois de manière à la rendre moins réactive aux variations hygrométriques. Au moment du rentoilage, de la colle de pâte y sera appliquée. - Rentoilage : La toile d’origine puis la toile de rentoilage seront successivement encollées de colle de pâte. La toile d’origine sera déposée sur la toile neuve et des bandes de kraft viendront maintenir le scellage. - Premier repassage : il sera réalisé douze à vingt quatre heures après le collage des deux toiles. Il permet de parfaire le scellage en réactivant la colle, ce qui permet une meilleure répartition que lors de l’application à la brosse. La chauffe permet également d’évacuer le surplus d’humidité pour accélérer le séchage. Le repassage sera fini quand toute la surface de l’œuvre aura atteint une chaleur suffisante. Après une quinzaine de minutes un deuxième repassage doit généralement avoir lieu. Si l’humidité de l’œuvre est encore importante, un troisième repassage pourra être envisagé. -Décartonnage et pose du papier sulfurisé : quelques heures après le repassage, les deux papiers de cartonnage seront délités tour à tour. L’aspect de la couche picturale sera vérifié. Les résidus de colle sur l’œuvre seront enlevés à l’aide d’une éponge humidifiée. Un papier sulfurisé sera posé à la colle de pâte sur l’œuvre et sur une vingtaine de centimètres de la toile de rentoilage. La transparence du papier sulfurisé permet de travailler en fonction des zones qui nécessitent davantage d’attention. De plus, sa forte contraction au séchage permet de maintenir fortement l’œuvre contre la toile de rentoilage pour faciliter l’adhérence des deux supports en attendant le séchage complet de la colle. -Deuxième repassage: douze heures après de la pose du sulfurisé, un repassage du papier sera réalisé de la même manière que les précédents. Il a pour but de parfaire les repassages réalisés sur le papier de cartonnage. -Délitage du papier sulfurisé : l’enlèvement du papier sulfurisé sera réalisé de la même manière que pour les papiers de cartonnage. Le papier doit être tiré en bandes fines parallèlement à la surface de l’œuvre. La couche picturale pourra être lavée des résidus de colle de pâte à l’eau tiède.

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15. montAgE du tABlEAu sur un nouvEAu châssIs Un nouveau châssis aux montants plus épais que ceux d’un châssis ordinaire sera commandé pour supporter la tension de l’œuvre rentoilée. Il sera chanfreiné, pourvu de clés et présentera des traverses en croix. Ses arrêtes seront rabotées, le bois poncé pour éliminer les éventuelles échardes. Le châssis sera teinté au brou de noix dilué, de manière à obtenir une teinte proche de celle du châssis d’origine. Enfin, le bois sera ciré, en vue de le protéger et de lui donner un aspect satiné élégant. La toile de rentoilage pourra ensuite être découpée, les angles seront cassés de manière à faciliter la mise en tension. Une fois l’œuvre centrée sur le châssis,elle est tendue à l’aide d’une pince à tendre et de semences en cuivre176 de quatorze millimètres.

16. AllègEmEnt du vErnIs Le vernis d’origine est trop altéré pour pouvoir être allégé légèrement. L’allègement sera assez poussé car la résine d’origine est bien trop abîmée et affaiblie pour pouvoir être beaucoup conservée. Une fine couche de vernis d’origine sera laissée à la surface de l’œuvre, car son oxydation a un intérêt pour la patine de l’œuvre177. De plus, la surface de l’œuvre risque moins d’être lixiviée ou épidermée lors d’un allègement de vernis que lors d’un dévernissage178. Après une vaste série de tests179, il a été décidé que l’allègement sera réalisé avec un solvant constitué de 57% de cyclohexane, 38% d’isopropanol et 5% d’alcool benzylique.

17. vErnIssAgE IntErmédIAIrE180 A ce stade de la restauration, un vernissage a pour intérêt de venir nourrir de nouveau la couche picturale. De plus, il va la protéger lors du masticage des lacunes. Pour respecter les choix de l’artiste ainsi que la nature des matériaux constitutifs, un vernis dammar à 20% solubilisé dans du white-spirit non désaromatisé sera appliqué au spalter à la surface de l’œuvre. Ce vernis sera appliqué au moins une semaine après l’allègement de vernis, de manière à ce que les solvants utilisés soient complètement évaporés, d’autant plus que l’alcool benzylique a une forte rétention.

18. rEPrIsE dEs mAstIcs ProvIsoIrEs Les mastics posés avant le rentoilage vont pouvoir être structurés de manière à reproduire l’apparence de la couche picturale. Ceci est indispensable pour que la retouche soit discrète. Un mastic naturel à la colle de peau de lapin et au blanc de Meudon181, identique au mastic provisoire sera ajouté dans les lacunes dans lesquelles il manquera de la matière. Ensuite, des empreintes de toiles vont être réalisées grâce à des moules en silicone. Les empâtements seront reproduits à l’aide de pinceaux, brosses ou petits outils. Les pourtours des lacunes seront soigneusement nettoyées avec de bâtonnets ouatés ou des éponges synthétiques super absorbante182

176. Voir les test de vieillissement des semences «Annexe 3: choix de la fixation pour le montage de la toile au châssis», page 179 177. BERGEON Ségolène, «Science et patience» ou la restauration des peintures. Réunion des Musées Nationaux, 1990 p. 118 178. Ibidem p. 120 179. Voir «Annexe 1 : Protocole d’allègement de vernis», page 166 180.Voir «Annexe 2: Protocole de comblement de lacune, de réintégration et de vernissage», page 173 181. ROSTAIN Emile Op. Cit. p. 134 182. Ces éponges aux pores très fins sont commercialisées par CTS. Elles permettent d’apporter une très petite quantité de liquide sur la couche picturale. On peut les tailler à notre convenance. 102


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19. vErnIssAgE IntErmédIAIrE

Cette couche de vernis permet de saturer les mastics en prévision de la retouche. Cela permet que le liant de retouche ne soit pas absorbé par l’enduit de bouchage, ce qui empêcherait une bonne saturation des couleurs. Un dammar à 20% dans du white-spirit aromatisé sera posé au tampon. Ce film de vernis protecteur nourrira également la couche picturale. En effet, l’application d’un vernis de la même nature que le premier vernis posé aura tendance à réactiver la première couche. 20. rEtouchE183

La retouche est l’opération finale qui a pour but de réintégrer visuellement les lacunes de couche picturale. Sur ce portrait du début du vingtième siècle, appartenant à un particulier, c’est la méthode de retouche illusionniste qui a été choisie. Toutefois, dans les zones les plus lacunaires, un pointillisme très fin sera réalisé. Le liant de retouche utilisé sera le Paraloïd® B72 à 20% dans de l’éther monométhylique de propylène glycol184. Ce liant de retouche a été choisi pour sa grande stabilité dans le temps et sa réversibilité dans les solvants peu polaires. Le diluant sera le Dowanol®PM également. Enfin, le gel de Paraloïd®B72 pourra éventuellement être utilisé dans les zones où le mastic se montrerait défaillant. Ce gel est également composé de Paraloïd® B72 dissout dans du Dowanol®PM. L’agent épaississant est la fumée de silice185. 21. PosE du PAPIEr dE BordAgE

Le papier de bordage sert à parfaire la tension de l’œuvre. Il a également pour intérêt de protéger les bords de tension et les angles du tableau qui sont particulièrement sujet aux frottements. Un papier Kraft® gommé sera coupé en quatre laies. Une à une, elles seront humidifiées pour réactiver la gomme arabique, puis de la colle de pâte froide sera appliquée sur le papier avant de le positionner sur les pourtours de l’œuvre. Ce dernier pourra faire un retour d’un à deux millimètres sur la couche picturale. 22. vErnIssAgE fInAl

Un vernis final sera appliqué sur le tableau. Il permettra de protéger les retouches, ainsi que le vernis dammar. Le choix s’est porté sur le Régalrez® 1094 stabilisé face aux U.V. par du Tinuvin® 292 . L’ajout de Kraton G-1650186 permettra de rendre le film de vernis plus souple, mais également moins brillant et son apparence sera plus proche des résines naturelles187. Le Régalrez® 1094 est choisi pour sa brillance modérée qui convient parfaitement à la représentation et surtout pour sa très bonne réversibilité dans les hydrocarbures aliphatiques. Cette résine sera vaporisée en une ou plusieurs couches, en fonction de la brillance recherchée.

183. Voir «Annexe 2: Protocole de comblement de lacune, de réintégration et de vernissage», page 173 184. La formule chimique de ce solvant est 1-methoxy-2-propanol et son nom commercial est Dowanol®PM, c’est cette dénimination qui sera utilisé dans la suite de ce mémoire. Informations provenant du site http://www.artcare.org, consulté le 22 juin 2017 185. Ibidem 186. STONER, Joyce Hill, RUSHFIELD Rebeca , Op. Cit p. 643 187. Ibidem 103


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IV. Rapport de restauration La proposition de traitement qui vient d’être détaillée a été suivie le plus fidèlement possible. Toutefois, lors des opérations certains traitements ont dû être adaptés. Malgré l’étude la plus approfondie possible d’une œuvre, sa restauration nous en apprend davantage et les choix envisagés doivent pouvoir être remis en question. La proposition de traitement a donc légèrement varié au moment du travail sur la couche picturale. Nous avons tenté de calculer le temps passé sur chaque étape de restauration. Pour les opérations durant plusieurs semaines, le temps donné est plutôt un ordre d’idée car le calcul exact est fastidieux.

A. Traitements urgents 1. Repositionnement des écailles libres (8h15)

Les écailles qui étaient retournées ou déplacées ont pu être replacées et collées aisément. Elles ont été manipulées avec une petite pince et fixées avec une goutte de colle de poisson. La remise en place des écailles fournies par le propriétaire a été beaucoup plus fastidieuse. Seulement les plus grandes ont pu être replacées correctement. Quand un doute existait sur l’emplacement d’une écaille, elle n’a pas été collée.

2. Protection de la surface (30 minutes) Le papier de protection a été posé en cinq lés, se chevauchant de quelques milimètres. Les dimensions des bandes ainsi que leur ordre de collage ont été déterminés en fonction de l’emplacement des déchirures et de la difficulté due à l’aspect de surface. De plus, les joints de papier n’ont pas été placés sur des parties importantes de la représentation. Le sens des fibres a été mis parallèlement aux déchirures pour tenter de les rapprocher. Les bandes dépassent d’environ un centimètre sur les bords de tension. Sur le bord inférieur, le papier de protection dépasse largement de manière à maintenir correctement la déchirure. Le papier Bolloré® fin, de grammage12g/ m2 a été encollé à la colle de pâte diluée, dans le sens des fibres, à l’aide d’un spalter.

Figure 107 : Schéma de l’ordre de pose du papier de protection 104


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3. Nettoyage du revers de l’œuvre (4 heures) Pour accéder au revers de l’œuvre, elle a été démontée de son châssis. Les soixante dix sept semences ont été enlevées à l’aide d’un ôte agrafes. Quelques unes se sont cassées car elles étaient rouillées mais elles se sont dans l’ensemble bien enlevées. Les bords ont été aplanis par une utilisation de chaleur couplée à de l’humidité. Les moisissures sont brossées et aspirées, puis l’ensemble de la toile est nettoyée de même. Enfin, un gommage à la gomme Wishab® termine de nettoyer la toile de ses crasses. La gomme utilisée était un petit bout qui a été jeté par la suite pour éviter de contaminer d’autres œuvres. Le nitrate d’éconazole® ne pouvait en effet pas être appliqué sur d’épaisses moisissures, car l’opération aurait risqué de véhiculer des résidus de moisissures sur l’ensemble de la toile.

4.Traitement des micro-organismes (20 minutes) Les moisissures étaient encore actives au moment de la prise en charge. Un traitement rapide a donc eu lieu. Trois application au spalter d’éconacide alcoolique ont été réalisées sur la zone infectée. Un dernier passage par vaporisation a été fait sur l’ensemble de la toile de manière préventive. Une application généralisée au spalter risquait affaiblir, par l’action de l’éthanol, l’huile et les fractions résineuses qui composent une peinture. Après le traitement, des auréoles laissées par la solution alcoolique sont visibles autour de la zone infestée. De plus, les moisissures ont dégradé la toile. Elle est plus cassante et des traces de pigmentation sont présentes.

Figure 108 : Détail des pigmentations jaunes et roses laissées par les moisissures.

Figure 109 : Vue générale de la toile après traitement des moisissures

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B. Traitement de la cohésion et de l’adhésion 1. Mise en extension de l’œuvre et remise dans le plan (20 heures) En séchant, le papier a retendu l’œuvre, remis dans le plan les bords de déchirure et rapproché les bords de toile. Le papier qui était entre les deux bords forme donc un bourrelet. De manière à rapprocher davantage les bords de déchirures, le papier en surplus dans les lacunes de toile est découpé et un nouveau facing localisé est appliqué. En séchant, il se tend et les bords se rapprochent. Cette opération a été répétée deux fois sur la déchirure centrale et trois fois sur la déchirure du bas. Avant de mettre en extension l’œuvre, il faut nettoyer les bords de déchirure pour permettre la bonne remise dans le plan. Les fils détissés sont coupés au ras de la toile. Des pontages provisoires à l’origam® ont pu être collés avec du Plextol® B500 épaissi au xylène tous les deux à trois milimètres, le long des déchirures. Les petites déchirures et perforations dans l’angle inférieur dextre ont été maintenues de la même manière. Le rôle de ces pontage est d’éviter l’écartement des déchirures lors de la mise en extension en chambre humide. Avec du recul, nous avons constaté que des pontages avec des fils de toile auraient été certainement plus appropriés. En effet, le collage de l’Origam® est plus long et fastidieux que celui de fils de plus gros diamètre. De plus, le principal intérêt des monofilaments de polyester est d’être très discret. Dans le cas d’une opération provisoire comme celle-ci, la discrétion n’est pas utile. Toutefois, les refixages de la toile ont certainement été meilleurs avec des fils d’Origam® qu’avec des fils naturels car les fibres synthétiques sont très fines et n’absorbent pas la colle, contrairement aux fils de toile.

Figure 110 : Détail d’une déchirure nettoyée et pontée à l’Origam®

Des bandes intervention sont découpées dans du papier Bolloré® épais. Leur largeur varie car aucun des bords de tension ne sont de même dimension. Il en est de même pour les bandes de tension, découpées dans de l’intissé épais. Il a été décidé de coller les bandes de tension et leurs couches intermédiaires par réactivation et non dans le frais. Cela permet de faciliter le retrait car l’adhésif imprègne moins la toile d’origine. Le papier Bolloré® a été encollé par quatre couches de Plextol® B500. Les bandes de tension l’ont été également, sur une largeur un peu plus faible que les bandes d’intervention. L’adhésif a été réactivé par apport de xylène et scellées par la chaleur et la pression, au dos de l’œuvre. Le lendemain, après séchage complet de l’adhésif, le tableau a pu être tendu sur un bâti. L’œuvre a été mise en chambre humide. Le bâti posé sur des cales, pour que l’humidité circule autour du tableau. La toile est tournée vers le haut, d’où arrive la vapeur. L’humidité relative a été montée jusque 80%, l’œuvre, qui s’était relâchée a été retendue. Le tableau est laissé dans son enceinte jusqu’à ce que l’humidité relative atteigne 85%, la tension est de nouveau réglée. Malheureusement les bandes de tension se sont décollées par endroit. L’œuvre a été immédiatement sortie de la chambre humide et maintenue sur un fond pour éviter de nouveaux mouvements. Il a été déduit que la couche d’adhésif n’était pas assez importante. Lors de sa réactivation , le film de 106


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Plextol® B500 n’a pas épousé correctement les reliefs de la toile. Les bandes de tension sont décollées et de nouvelles sont préparées, avec huit couches épaisses de Plextol®B500. Les bandes d’intervention et de tension sont scellées par le même procédé que les premières. Quelques pontages qui s’étaient décollés ont été repris. Après le séchage de l’adhésif, l’œuvre est mise en tension, puis replacée en chambre humide. L’humidité relative est montée progressivement jusque 85%. L’œuvre, positionnée avec la toile vers les buses d’émission de vapeur, est laissée dans cette atmosphère durant une demi heure de manière à ce que la toile se relâche correctement. Le bâti tenseur est écarté, mais pas trop pour éviter un étirement trop violent de la toile. Le tableau est ensuite mis en aspiration à 100mb, la toile contre la table aspirante et couvert par une bâche. Une fenêtre de la dimension du tableau avait préalablement été réalisée sur la table basse pression à l’aide de Mélinex®188 et la surface de cette fenêtre couverte de deux intissés d’épaisseur moyenne, de manière à faire tampon entre la surface de la table et l’œuvre. Après trente minutes de mise sous pression, la bâche est enlevée, l’aspiration réglée au maximum, dans le but d’accélérer le séchage de l’œuvre. Cette mise sous pression et en aspiration permet d’éviter que la toile ne se déforme au séchage. La déformation de certaines écailles est déjà un peu résorbée, elles sont assouplies au toucher.

Figure 111 : Schéma de l’humidification

2. Refixage généralisé par la face (30 minutes + 1h30 de séchage) Un refixage généralisé par la face de l’œuvre permet une bonne consolidation de la couche picturale. La colle collagénique, à un faible pourcentage assouplit la matière189. Le refixage sur table aspirante permet de prévenir les mouvements de toile, d’améliorer la pénétration et d’accélérer le séchage pour éviter la rétention d’eau dans le substrat. La chaleur de la table aspirante permettra également que l’adhésif reste bien fluide tout au long du refixage, ce qui favorise une répartition homogène. La table aspirante est couverte d’un papier Bolloré® épais et deux intissés moyens, qui protègent la table des possibles infiltrations de colle. Une couche de Tergal® permet de limiter l’adhérence de la toile à la table. Une fenêtre de Melinex® permet de concentrer l’aspiration sur la surface de l’œuvre. Le bâti est posé sur la table, couche picturale vers le haut. La température de la table est réglée à 40°C, l’aspiration est au maximum. Une colle de poisson à 3% chaude est appliquée au spalter sur le papier de protection de l’œuvre. Le travail est réalisé par bandes de vingt à trente centimètre. Les zones qui ne sont pas travaillées sont protégées par un Mélinex®, de manière à concentrer l’aspiration à l’endroit de l’application de

188. Le mélinex ® est un film de polyester monosiliconé permettant d’éviter le collage de l’œuvre sur la table de travail. 189. ROSTAIN Emile, Op.Cit. .pp.40-41 107


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l’adhésif. Une fois que l’imprégnation est terminée, le Mélinex® est repositionné et un fer à 40°C est passé, de manière légère, sur la surface qui vient de recevoir de la colle. La température de l’œuvre est constamment vérifiée à la main. L’aspect de surface est également vérifié par le toucher. Une fois qu’une zone est terminée, une nouvelle fenêtre de Mélinex® est ouverte pour étendre le travail à l’ensemble du tableau. Quand le passage de colle est terminé, le Mélinex® est ôté de la surface pour ne pas emprisonner l’humidité sur le tableau qui y est relativement sensible.

.

Figure 112 : Schéma stratigraphique du refixage naturel sur table aspirante chauffante

3. Cartonnage de l’œuvre en vue de sa mise en extension par la face (3 heures) Un cartonnage à l’intissé est réalisé. Cette opération permet de maintenir davantage la planéité de l’œuvre et de prévenir les mouvements de toile. C’est également une alternative au collage de bandes de tension qui risqueraient de se décoller. Le protocole décrit dans la proposition de traitement a été suivi. Le tableau a ensuite été mis en extension sur un bâti Staro®, avec la couche picturale vers l’extérieur du bâti.

Figure 113 : Coupe stratigraphique du cartonnage à l’intissé

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4. Refixage généralisé par l’arrière (30 minutes + 1h30 de séchage) Le procédé est presque identique au premier refixage par la face, l’organisation de la table basse pression, ainsi que le matériel sont les mêmes. Cependant, le fer est chauffé légèrement plus (entre 50°C et 60°C) que lors du passage par la face. L’apport d’adhésif est généreux car il est nécessaire pour le bon maintient des écailles. Le travail étant moins délicat (les écailles étaient déjà revenues dans le plan), toute la surface de la toile a été encollée, puis le repassage s’est fait sur l’ensemble du support, avec une feuille de Mélinex® en intermédiaire. Cinq minutes après avoir terminé le repassage, le Mélinex® a été enlevé. Le tableau a été laissé en aspiration, à 190mb tandis que la chaleur de la table a été coupée. Quelques zones présentaient une surbrillance, où la colle a été moins absorbée. Le surplus d’adhésif a été éliminé avec une éponge légèrement humide avant le séchage complet de l’œuvre. La partie infestée par les moisissures a absorbé la colle de manière beaucoup plus importante que le reste de la toile. Cela s’explique par le fait que les micro-organismes avaient détruit l’encollage et appauvri la toile. L’apport d’eau a également dû solubiliser une partie de l’encollage. Enfin, il est possible aussi que le traitement à l’éconacide alcoolique ait asséché la toile.

Figure 114 : Repassage de la toile imprégnée de colle de peau sur table chauffante aspirante

5. Consolidation provisoire des déchirures (3h40) Les pontages en Origam® sont enlevés, certains s’étaient déjà détachés lors du refixage. Un mastic naturel est posé au pinceau dans les déchirures pour créer une continuité dans la toile. Une fois sec, il est mis à niveau. Des pontages en fils de toile sont collés le long des déchirures, en renfort du mastic. Cette opération est nécessaire puisque les papiers qui maintenait les bords des déchirures vont être enlevés.

Figure 115 : Les déchirures sont mastiquées et consolidées par des pontages 109


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6. Décartonnage (5h20) Le tableau est retourné dans le bâti, de manière à pouvoir travailler sur la couche picturale avec la toile contre la table. L’intissé moyen est délité puis c’est au tour du papier Bolloré® fin. Pour cela, la surface des papiers est humidifiée, le papier est tiré petit à petit, parallèlement à la couche picturale. Le délitage est arrêté au niveau des bords de tension, ainsi, le tableau est maintenu en extension par les bords du cartonnage à l’intissé. Quelques écailles se décollent sur la périphérie de l’œuvre. Un dernier refixage serait à envisager. Comme cela était prévisible, le vernis a chanci au cours des opérations de refixage. Ce n’est en aucun cas dommageable pour l’œuvre. Le fait étonnant est que le chanci visible dans l’angle inférieur senestre a presque totalement disparu. Peut-être que le traitement des moisissures par une solution alcoolique a régénéré voire solubilisé une partie de la résine. Il est possible également que le vernis, très affaibli, a continué d’être dégradé par les apports d’humidité et de chaleur lors des refixages. La surface, dont la continuité et la planéité sont complètement rétablies, est rincée des résidus de colle de pâte avec de l’eau déminéralisée tiède. Cette opération fait également office de décrassage de la couche picturale. En effet, la peinture n’était pas très encrassée et le pouvoir tensioactif de la colle de peau suffit à enlever les impuretés présentes à la surface de l’œuvre.

Figure 116 : Après le délitage du cartonnage, le vernis a blanchi mais le chanci dans l’angle inférieur senestre a presque disparu

C. Reprise de la continuité 1. Comblement des lacunes (34 heures) Les lacunes de couche picturale sont mastiquées. Cette opération est importante notamment pour éviter la déformation de la toile dans les grandes lacunes. Un mastic au blanc de Meudon et à la colle de peau de lapin à 7% est déposé, assez liquide, à l’aide d’un pinceau fin dans les petites lacunes et à la spatule au niveau des pertes de matières plus importantes. Quand le mastic est sec, il est ragréé au niveau de la couche picturale. Le travail en lumière rasante permet de vérifier la mise à niveau des comblements. 110

Figure 117 : Détail des différentes étapes du masticage : comblement et ragréage.


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2. Cartonnage (2h45) Pour procéder aux incrustations de toile et au rentoilage, il faut que l’œuvre soit maintenue solidement. Pour cela, un cartonnage est réalisé. Le tableau est démonté du bâti, les restes de l’ancien cartonnage faisant office de bande de tension ont été décollés. Un cartonnage léger de l’œuvre est réalisé avec un papier bolloré fin, de grammage 12g/m2, sous tirant sur un fond en bois. Ce premier papier permet d’épouser les aspérités de la couche picturale et de la tendre légèrement. Ce papier fin est encollé directement à la colle de pâte sur la surface de l’œuvre. Une fois le papier sec, il est très légèrement humidifié puis découpé au ras du tableau. Le fond est nettoyé de ses résidus de papier. De nouveaux tirants sont placés sous l’œuvre, dans le but de parfaire la tension lors du séchage du cartonnage au papier Canson®. Ce papier épais doit être détendu par une humidification importante, sur ses deux faces. Les bulles et les plis doivent être chassés avant de procéder à l’encollage avec de la colle de pâte assez fluide, appliquée avec une brosse de rentoilage. Une fois la colle bien répartie et lissée, le papier est appliqué sur l’œuvre, la fixant ainsi au fond de bois. Le lendemain, le cartonnage est humidifié puis découpé à la limite entre les tirants de papier journal et le fond. Le tableau cartonné est retourné et fixé au fond avec de la colle de pâte froide.

Figure 118 : Le cartonnage léger est découpé et positionné sur de nouveaux tirants avant le cartonnage fort

Figure 119 : Collage du papier Canson® qui vient d’être encollé

Quelques dégorgements des couleur rouge ont été observés sur le papier Canson®. Les tests réalisés durant une seconde campagne de tests, après les refixages, en prévision du rentoilage, avaient prédit ce comportement. Toutefois, le cartonnage de l’œuvre était indispensable. Un vernis appliqué au préalable aurait peut-être permis de limiter les dégorgement de couleur. Cependant, l’accroche du papier à un vernis neuf aurait été beaucoup moins bonne que sur une couche picturale ancienne, ce qui aurait exposé l’œuvre à des risques. De plus, les dégorgement sont très limités et peuvent être jugés acceptables, en comparaison de l’ampleur des altérations à restaurer.

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3. Incrustations (12 heures) Maintenant que le tableau est parfaitement remis dans le plan, stabilisé et que les bords de déchirures ont pris leur position définitive, les lacunes de toile peuvent être reprises. Les mastics posés provisoirement sont retirés, en faisant attention à ne pas endommager les papiers de cartonnage. Une toile de lin, de contexture proche à celle de la toile originale est tendue sur un châssis, elle est décatie deux fois, encollé à la colle de peau de lapin à 7%, légèrement poncée et une préparation à base de blanc de Meudon et de colle de peau est appliquée en plusieurs couches fines, poncées entre chaque application. La forme des lacunes à combler est consciencieusement suivie, sur un film plastique à l’aide d’un feutre fin. Cette forme est reportée sur la toile d’incrustation, qui est découpée avec un scalpel à lame fine. Les sens chaine et trame des incrustations sont les même que ceux de la toile. L’incrustation est placée dans la lacune, et ajustée si nécessaire. De la colle de pâte est appliquée sur les bords des incrustations qui sont déposées au sein de l’œuvre. Avec un intermédiaire de Mélinex®, la spatule chauffante est passée quelques instants sur l’incrustation de manière à terminer le scellage. La pression exercée sur l’incrustation lors de la chauffe permet de mettre les bords de cette dernière au même niveau que les bords de la toile. Les bords de déchirures, sont nettoyés par grattage des résidus de Plextol®B500 ayant servi aux pontages provisoire. Les trous de semence, qui n’ont pas besoin d’être incrustés, sont comblés avec un mastic naturel. Il en est de même pour les déchirures au niveau de la lisière. Ces comblements permettent que la surface au revers de la toile soit parfaitement plane.

Figure 120 : Ajustement d’une incrustation au scalpel

Figure 121 : Vue tangentielle d’une incrustation après son collage

D. Consolidation du support 1. Refixage préventif (30 minutes) Dans la proposition de traitement, un troisième refixage n’avait pas été prévu. Toutefois, l’observation de l’œuvre après le retrait du cartonnage précédent a permis de constater que malgré les résultats spectaculaires des refixages, la couche picturale présentait encore des faiblesses. De plus, refixer l’œuvre ainsi que ses incrustation permet d’homogénéiser davantage les matériaux de restauration et les constituants d’origine. Pour terminer, le refixage par l’arrière des œuvres cartonnées 112


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en prévision du rentoilage est quasi systématique190. Cette opération permet d’homogénéiser les refixages précédents et de renforcer la couche picturale qui aurait pu être contrainte par le cartonnage. Comme lors du refixage par l’arrière sur table aspirante, la toile est imprégnée de colle, avec un peu plus d’insistance sur la partie affaiblie par les micro-organismes qui avait absorbé beaucoup plus la colle lors du refixage précédent. Le fer est ensuite passé, avec un intermédiaire de Mélinex® à une température avoisinant les 60°C. Le contrôle de la chaleur par la main est systématique.

2. Pose de gazes intermédiaires en vue du rentoilage (1h30) Deux gazes doivent être posées au dos de la toile. Pour cela, une colle de pâte assez épaisse est appliquée, chaude, à l’aide de la brosse de rentoilage au revers de l’œuvre. Le geste doit être souple, et peu appuyé pour ne pas engendrer de décollement des incrustations. La gaze, plus large que la toile d’une dizaine de centimètres sur chaque côté est posée droit fil sur le revers de l’œuvre. Un passage à la main du centre vers les extrémités permet un collage uniforme. Une couche de colle de pâte est de nouveau appliquée, à la brosse. Cette fois-ci, le mouvement doit être très léger pour ne pas risquer de déformer la trame de la gaze. Après le séchage de cette couche, des auréoles jaunâtres sont apparues dans les zones qui avaient subies une infestation de moisissure. Cette coloration se situe entre la toile d’origine et la gaze. Une légère sur-épaisseur est sentie au toucher. Ces agglomérats sont très certainement des remontées de résidus de toile dégradée. Une observation à la loupe binoculaire a permis de vérifier cette hypothèse. De plus, le traitement antifongique ainsi que la présence d’un fongicide dans la colle de pâte permettent d’affirmer que les moisissures ne peuvent pas refaire surface à cette étape du traitement. L’œuvre a été laissée quelques jours pour vérifier que les moisissures ne se développaient pas à nouveau. L’absence de changement d’état a permis de continuer les interventions. La deuxième gaze est posée, en suivant exactement la même procédure que pour la première. Toutefois, les sens trame et chaine des gazes ont été inversés, dans le but de restreindre au maximum les potentiels mouvements au sein de la stratigraphie.

Figure 123 : Encollage de la deuxième gaze qui vient d’être posée

Figure 122 : Encollage de la toile d’origine en cours

190. ROSTAIN Emile, Op. Cit p.65 113


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3. Rentoilage (9h) Une toile de lin de contexture similaire à la toile d’origine a été tendue sur un bâti Rigamonti®. Cette toile a été décatie, brossée puis foulée deux fois. Entre chaque décatissage elle a été retendue. Une dernière tension a lieu avant l’encollage. Le papier de cartonnage du tableau est découpé à environ cinq millimètres du bord de l’œuvre. Les angles sont maintenus par des poids pour éviter leur recourbement. La surface des gazes est encollée à la colle de pâte assez épaisse. Le tableau étant de grande dimension, l’encollage se fait par tiers, en suivant une forme de «8» . La colle est ensuite lissée sur l’ensemble de la surface. La toile neuve est encollée de la même manière, dans le périmètre qui avait été préalablement tracé. Le travail doit être rapide, pour éviter que la colle ne fige avant que les deux toiles soient jointes. La toile d’origine est déposée dans le tracé, préalablement réalisé au centre de la toile de rentoilage. Avec un chiffon, les bulles d’air sont chassées, par pression à la surface du cartonnage, du milieu vers les bords. Un peu de colle est déposée avec la brosse le long des bords du tableau, sans soulever la toile. Des bandes de Kraft® gommé sont humidifiées et encollées à colle de pâte avec la brosse de rentoilage, puis elles sont déposées à cheval sur l’œuvre et sur la toile de rentoilage. L’excédent de colle est chassé avec une raclette en caoutchouc et les papiers sont nettoyés des débordements de colle à l’aide d’une éponge humide. Le tableau est laissé à sécher pendant une douzaine d’heures.

Figure 125 : Repassage de l’œuvre après douze heures se séchage

Figure 124 : Le tableau va être appliqué sur la toile de rentoilage après leurs encollages

La surface du tableau est perceptible sous le cartonnage. Les mastics présentent de légers retraits. Deux repassages ont eu lieu, le premier était très long car la colle du tableau était encore fort humide. Dans l’heure qui a suivi le second repassage, des bulles à l’interface entre le papier de cartonnage et l’œuvre se sont produites. Elles ne sont pas dangereuses mais empêchent un troisième repassage. Le cartonnage épais puis le cartonnage fin sont donc délités. La peinture est rincée des résidus de colle avec une éponge humide.

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Quand la surface ne présente plus aucun résidu de papier, le papier sulfurisé peut être posé. L’humidification de ce papier est très importante pour le dilater au miximum et ainsi éviter les plis lors de l’application. Le papier est donc largement humidifié et retourné quatre fois. A chaque passage, les plis et bulles sont chassés. Pour finir, la surface est encollée avec de la colle de pâte relativement diluée. La colle est lissée et le papier est posé sur l’œuvre. La brosse légèrement encollée permet de faire épouser le papier parfaitement aux reliefs de la couche picturale. Pour terminer, une éponge humide permet d’enlever les résidus de colle à la surface du papier, car leur présence provoquerait des tensions inhomogènes. Deux jours plus tard, le papier sulfurisé est repassé lui aussi. Cet apport de chaleur permet une dernière fois de réactiver partiellement la colle pour parfaire le scellage. La contraction du papier sulfurisé est très importante, notamment lorsqu’il est chauffé. Ce papier est laissé au total cinq jours sur l’œuvre. La pression qu’il créé sur le tableau et simultanément sur la toile permet que le séchage de la colle, assez lent, se fasse de manière optimale et homogène. Lorsque le papier sulfurisé est délité, la couche picturale est nettoyé une dernière fois avec une éponge humide pour supprimer les éventuels résidus de colle de pâte.

Figure 126 : Découverte de l’œuvre lors du retrait du papier sulfurisé

Le rentoilage s’est parfaitement déroulé. Les écailles de la couche picturale sont revenues entièrement dans leur plan, elles ne se chevauchent pas. Les déchirures sont planes, les incrustations de toile sont à niveau, ce qui facilitera la conservation ainsi que les opérations suivantes.

4. Remontage de l’œuvre sur son châssis (18 heures) Cette opération a eu lieu après l’allègement de vernis, en effet, l’évaporation des solvants est plus homogène lorsque l’œuvre est sur un bâti posé sur des tréteaux. Toutefois cette intervention est décrite ici car elle découle davantage du traitement du support que de la couche picturale. Un nouveau châssis a été commandé. Il est muni de deux traverses horizontales et une verticale. L’ouverture des angles peut-être régulée par des clefs. Celles-ci ont été percées, de manière à pouvoir les maintenir par un fil de nylon au châssis. Leurs angles saillant vers la toile ont été rabotés et poncés. Le bois du châssis a été poncé et les arrêtes rabotées elles aussi, pour rendre la préhension plus agréable. Le châssis, ainsi que les clefs ont été teintés à l’aide de brou de noix dilué, dans un ton proche de celui du châssis d’origine. Le bois du châssis a ensuite été ciré avec une cire teintée de la marque 115


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Lubéron® de couleur «merisier foncé». Cette cire a permis d’apporter une teinte chaude que possédait le châssis d’origine. Une fois la toile de rentoilage découpée, celle ci est légèrement incisée, au niveau des angles , pour faciliter la mise en tension. Une première tension de la toile est réalisée à l’aide d’agrafes, de manière à tendre fortement la toile et à la positionner correctement. De plus, l’opération de masticage pourra potentiellement détendre la toile. Après le comblement des lacunes, la toile est retendue avec des semences en cuivre dont l’oxydation est moins rapide et moins dommageable pour l’œuvre que les semences en acier bleui191. Toutefois la tension est un peu plus délicate qu’avec des semences en acier, car le cuivre ne s’aimante pas au ramponneau. Les semences ont été plantées tous les quatre centimètres. Les bords de toile dépassant à l’arrière du châssis ont été maintenus par des agrafes en acier inoxydable. La lisière de la toile d’origine a été pliée en deux de manière à pouvoir être protégée par un papier de bordage.

Figure 127 : Comparaison du châssis neuf, avec l’œuvre montée et bordée par rapport au châssis d’origine.

Figure 128 : Vue des bords de tension de l’œuvre après montage

E. Interventions sur la couche picturale 1. Allègement de vernis (28 heures) Le protocole d’allègement de vernis mis au point avant la réalisation des opérations du support s’est avéré peu adapté à l’œuvre une fois celle-ci rentoilée. Des changements étaient prévisibles, de par les apports d’humidité et de chaleur successifs. Toutefois nous avions pensé que la dégradation du vernis par l’accentuation de sa fissuration et de son déplaquage allaient faciliter son retrait. Il semblerait plutôt que l’apport de chaleur ait accentué le phénomène naturel de réticulation de la résine. La procédure d’allègement a donc due être revue192. Le travail d’allègement de vernis s’est fait sous protection. Le port du masque et de gants en nytrile permettent de limiter l’absorption des substances toxiques par le corps. Toute cette étape a été réalisée sous hotte aspirante de manière à limiter la dispersion des vapeurs de solvants dans 191. Voir tests de vieillissement des semences «Annexe 3: choix de la fixation pour le montage de la toile au châssis», page 179 192. «Annexe 1 : Protocole d’allègement de vernis», page 166 116


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l’atelier. La résine est très sensible aux alcools et aux hydrocarbures aromatiques193. Un mélange azéotrope194 de ces deux famille de solvants a été préparé, avec 86% d’éthanol et 14% de xylène. Le travail avec un mélange azéotrope permet une évaporation rapide et simultanée des deux solvants. En effet, la rétention du xylène dans l’œuvre pourrait participer au ramollissement de la peinture. L’évaporation rapide de l’éthanol est importante également car la forte polarité de ce solvant risque de lixivier la couche picturale. Le fait d’appliquer un mélange de solvant puissant sur le vernis permet de le régénérer rapidement, ce qui facilitera son retrait, avec des solvants plus respectueux des couches sous-jacentes. De plus l’action mécanique sur la surface est réduite car le vernis régénéré s’allège facilement.

Figure 129 : Détail des différentes étapes de l’allègement. Vernis avant allègement (gauche), réactivé (en haut) et allégé (en bas)

Figure 130 : Le travail a été effectué sous protections contre les risques chimiques

Une fois la résine régénérée, un mélange de cyclohexane et d’éthanol est utilisé pour que l’allègement de vernis soit contrôlé et ne se transforme pas en dévernissage. En effet, le cyclohexane est un solvant peu polaire qui permet de véhiculer l’alcool et de ralentir son action. Des gel de cyclohexane/éthanol (70% / 30%) ou (30% / 70%)195 sont appliqués avec une brosse douce à la surface de l’œuvre. Les deux concentrations de gel sont variées en fonction de la sensibilité des zones de travail. Le gel permet un allègement de vernis plus homogène car il facilite l’accès dans le creux des empâtements. Toutefois il doit être enlevé rapidement pour contrôler l’aspect 193. Cette réactivité est typique des vernis triterpéniques. NICOLAUS Knut. Op. Cit, p315 194. «Un mélange azéotrope est l’association de deux ou plusieurs solvants qui conservent les même proportions à l’état de vapeur qu’à l’état liquide.» STAVROUDIS Chris, Azeotropes from A to Z . WAAC Newsletter Volume 28 Number 2 May 2006 p. 14 195. Les solvants sont mis en gel avec la méthode de Richard WOLBERS, avec de l’Ethomeen® C12 ou C25, en fonction de la polarité du mélange, et avec du Carbopol® 934. L’utilisation de deux solvants de polarité différente limite le travail. En effet, il ne faut pas dépasser une concentration 70/30 si l’on veut que le gel prenne. Pour le mélange cyclohexane (70) / éthanol (30), c’est l’Ethomeen® C12 qui a été utilisé. En revanche, pour le gel Cyclohexane (30)/ Ethanol (70), c’est l’Ethomeen® C25 qui a permis la création du gel. L’utilisation de l’un ou l’autre varie en fonction de la sensibilité de la zone de travail ou de la dureté de la résine à alléger. 117


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de la couche picturale. Un deuxième passage peut être réalisé en cas de besoin. Les deux gels sont rincés au mélange cyclohexane/éthanol (90% / 10%). Si la surface est encore inhomogène, un passage rapide au cyclohexane/éthanol (70% / 30%) est réalisé, principalement dans les parties claires où les résidus de vernis dans les empâtement sont dérangeants. Les résultats obtenus sur les couleurs claires et dans le fond sont très satisfaisant. En revanche, les parties fortement chancies sont beaucoup plus difficiles à alléger, le vernis est moins soluble. En contrepartie, ces zones sont également les plus sensibles aux solvants. Le noir du manteau de la mère et le rouge dans l’angle inférieur dextre sont très fragiles et de la couleur est présente sur les cotons. Un travail au gel est donc à proscrire, car l’action est difficilement contrôlable.

Figure 131 : Allègement du vernis sur la moitié du visage de l’enfant

Figure 132 : Allègement du vernis sur la moitié du visage de la mère

Les zones très sensibles aux solvants sont également particulièrement chancies. Un apport de solvants forts est nécessaire pour rétablir la lisibilité de l’œuvre. En effet, les mélanges utilisés précédemment ne sont pas suffisamment puissants pour régénérer le vernis chanci. L’action mécanique doit être réduite à son maximum. Un mélange toluène/diméthylformamide (75% / 25%) permet de régénérer profondément le vernis, le coton est à peine roulé sur la surface pour enlever une épaisseur de vernis. Une demi heure après cet apport de solvant, un mélange cyclohexane/ éthanol (90%/10%) est utilisé pour homogénéiser la surface, dont des surbrillances gênent la lecture. Ce solvant très peu polaire permet d’éviter les dégorgement de couleur. Le mélange de toluène et de diméthylformamide est à utiliser avec grande précaution. En effet, il est préconisé pour l’élimination de surpeints huileux196. Ici, l’huile est jeune et sensible. Des solvants si forts appliqués en grande quantité pourrait participer à sa dégradation. Pour terminer, les résidus incrustés dans les empâtements ont été retirés de manière mécanique, avec un scalpel fin.

196 MASSCHELEIN-KLEINER Lilian, Les solvants. Institut National du Patrimoine Artistique. Bruxelles, 1981. p.121 118


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Figure 133 : Fenêtre d’allègement de vernis vue en lumière U.V. La résine d’origine est préservée

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Figure 134 : Détail de la régénération du chanci au mélange toluène / DMF (75% / 25%)

2. Vernissage (10 minutes)

Au vu de la difficulté d’alléger le vernis de ce tableau, les choix réalisés lors de la proposition de traitement ont évolués. En effet, poser une résine triterpénique, dont le vieillissement est plus rapide qu’une résine synthétique, et qui est réversible dans des solvants de plus en plus polaires est un manque de respect pour l’œuvre qui a déjà souffert de ce premier allègement de vernis, pourtant précautionneux. De plus, vernir avec une résine semblable à la résine originelle rend impossible la distinction entre matériaux d’origine et matériaux de restauration, puisque les deux vernis vont vieillir de manière similaire. Le choix s’est porté sur le vernis Régalrez®1094197. Cette résine est stable dans le temps et est le seul vernis à notre disposition qui reste soluble, après vieillissement, dans des solvants hydrocarbures aliphatiques. Cette gamme de solvant est inoffensive pour le tableau. De plus, cette résine n’a pas besoin d’être solubilisée dans un aromatique, ce qui rend son application beaucoup moins nocive pour l’œuvre et pour la santé du restaurateur. Le premier vernis a été posé au tampon, avec un geste concentrique. Cette technique permet d’appliquer un film fin et régulier. Il est également possible d’insister un peu plus sur certaines zones qui ont besoin d’être davantage nourries. C’est le cas pour l’angle inférieur senestre, particulièrement pauvre en liant. Le Régalrez® 1094 a une concentration de 20%, dans le Shellsol® D40, avec 3% Kraton® G-1650 et 2% de Tinuvin® 292198. Une très petite quantité de Xylène est ajouté au mélange car le Kraton®G-1650 nécessite une part d’aromatique pour être correctement dissout dans le vernis199 197. WHITTEN Jill, Regalrez 1094: Properties and Uses. Waac, Volume 17, Number 1, Jan 1995, p.10. Consulté sur http://cool.conservation-us.org le 30 mai 2017 198. BALCAR Nathalie, Les Vernis : Usages et propositions issues de recherches récentes, Op. Cit. p.8 199. Ibidem 119


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3. Masticage (110 heures) Les imprégnations d’adhésifs ont rendus les mastics provisoires moins poreux et plus durs que des mastics frais, ce qui complique leur structuration. De plus, l’allègement de vernis a participé à déposer un fin film de vernis oxydé à leur surface. Le vernissage réalisé avant la reprise du mastic a lui aussi contribué à rendre le mastic moins perméable. Cela compromet l’adhérence entre le mastic provisoire et le mastic définitif. Les mastics posés en prévision du rentoilage ont donc dû être grattés, là où une nouvelle couche de mastic doit être posée. Enfin, il est parfois nécessaire d’avoir une certaine épaisseur de mastic frais pour pouvoir réaliser une empreinte. Comme les mastics provisoires avaient été ragréés au niveau de la couche picturale, leur épaisseur doit être réduite pour ne pas créer de sur-épaisseur avec le nouveau mastic posé. Un mastic traditionnel200 et naturel à la colle de peau et au blanc de Meudon a été réalisé. De l’alun a été ajouté à ce mélange de manière à faciliter la prise d’empreinte201. Ces dernières ont été réalisées grâce à des pâtes de silicones de la marque Patamould®, qui ont été appliquées sur une toile de lin de contexture proche de la toile d’origine de manière à reproduire l’impression de toile de la couche picturale. Ensuite, les empâtements de la peinture à l’huile ont été réalisés au pinceau.

Figure 135 : Masticage en cours au niveau de la grande lacune sur la poitrine de l’enfant

4. Vernissage intermédiaire (10 minutes) Un vernis Régalrez®1094, dans lequel ont été ajoutés du Tinivin®292 et du Kraton® G-1650 a été appliqué au spalter sur l’ensemble de la surface. Le passage au spalter permet de nourrir profondément la couche picturale et de travailler davantage sur les zones plus pauvres en liant. En 200. HORSIN DEON Simon, Op. Cit1 . p.20 201. Cet additif a été conseillé par Olivier Nouaille, dans un cours de 2015 120


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premier lieu, peu de vernis est déposé. Celui-ci est tiré de manière énergique dans le sens de la hauteur puis dans le sens de la largeur, de manière à obtenir une épaisseur fine et régulière. Un peu de vernis est ajouté dans les zones qui l’ont davantage absorbé lors du premier passage. La couche picturale a été bien saturée. Les parties mastiquées ont absorbé davantage le vernis que la couche de peinture. Cela doit permettre que le liant de retouche ne migre pas trop dans les mastics, ce qui induirait des problèmes de matités et de brillance. Les lacunes étant nombreuses et parfois étendues, le vernis a été absorbé en quantité importante et par capillarité, a imprégné la toile. De multiples auréoles de vernis sont visibles, dans les zones correspondant aux pertes de couche picturale, à l’arrière de la toile.

5. Retouche (175 heures) La retouche est réalisée sur les mastics qui viennent d’être saturés par le vernis. La réintégration colorée a été faite à l’aide de pigments libres liés dans du Paraloïd®B72 solubilisé à 20% dans du Dowanol®PM. En premier lieu, des tons de fond sont appliqués sur l’ensemble des zones mastiquées. Cette couche est réalisée un ton plus clair et plus froid que la couche picturale d’origine. Dans les cas ou une teinte sous-jacente est visible, elle a été reproduite (par exemple, un ton rouge sous une couleur verte). Le Paraloïd®B72 donne une première couche très mâte. Les couches supérieures, plus riches en liant, permettent d’ajuster la brillance. Pour les tons de fond, les couleurs utilisées pour les mélanges ont été limitées au bleu de céruléum, au jaune de cadmium et au rouge cadmium clair. Le blanc de titane, dont la couvrance est intéressante et le noir de mars, choisi pour son aspect chaud ont pu être utilisés également. C’est seulement pour les couches supérieures que les couleurs complémentaires telles que le orange de cadmium, le violet de cobalt et le vert émeraude ont été utilisés. Pour les carnations, le rouge vermillon était plus adapté que le rouge cadmium clair. Les terres et les ocres ont également été introduites aux mélanges à ce moment. Enfin, le blanc de zinc a été utilisé pour la réalisation de glacis.

Figure 136: Détail vert avec tons de fonds

Figure 137 : Détail vert à la fin de la retouche

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Au niveau des zones trop lacunaires, la réintégration a été réalisée avec la technique du pointillisme. Le pointillisme en trivariance202 a été éloigné, car cette méthode de retouche est éloignée de la retouche illusionniste, qui est utilisée pour le reste de l’œuvre. De plus, le travail avec des points de couleurs déjà présentes dans le reste de la couche picturale permet de fondre les grandes zones lacunaires dans l’ensemble de la composition. Enfin, la touche de l’artiste présentant de nombreuses variation de couleur, le pointillisme se fond relativement bien dans l’ensemble de la composition. Pour finir, quelques repiquages ont été réalisés sans les zones usées, principalement dans le fond vert.

Figure 138: Détail de l’œuvre après la réalisation des tons de fond

Figure 139 : Détail de l’œuvre à la fin de la réintégration

202. Technique mise au point et employée par Sylvaine Brans à l’Institut d’art Conservation et Couleurs www.iacc.fr. Consulté en ligne le 2 juillet 2017 122


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F. Opérations de finalisation 1. Atténuation des auréoles de vernis à l’arrière de la toile (40 minutes) Le vernissage de Régalrez®1094 au spalter était nécessaire pour nourrir en profondeur la couche picturale, toutefois, cette application plus généreuse qu’au tampon a été source d’auréoles au revers de la toile. Cette altération visuelle de l’aspect de la toile neuve n’influe pas sur la conservation. Toutefois, elle gêne l’œil. En raison de la quantité de lacunes, ces marques étaient prévisibles, et presque inévitables. La protection de la couche picturale a été favorisée, en dépit de l’aspect de la toile. Les auréoles de vernis ont toutefois pu être atténuées à l’aide de crayons pastel, de couleurs jaune de Naples et gris clair. Le crayon a été appliqué légèrement, en traits parallèles, de manière à ne pas couvrir trop la toile. Les traits ont été adoucis avec une brosse en poils de chèvre, pour répartir le pigment.

Figure 141 : Arrière de l’œuvre après atténuation des auréoles

Figure 140 : Arrière de l’œuvre avant atténuation des auréoles

2. Pose du papier de bordage (1 heure) Cette opération est réalisée après la retouche. Le bordage d’une œuvre aide à parfaire sa tension. Dans le cas de ce tableau, le bordage a été effectué en deux temps. En effet, les bords de tension étant larges, et la lisière très importante, il vaut mieux qu’un premier papier soit posé sur les bords de toile à l’arrière du châssis, puis un deuxième permet de protéger les semences et les arrêtes de la couche picturale. Le papier de bordage est une bande de Kraft® gommé, encollé à la colle de pâte froide. Quatre bandes sont appliquées de manière à se chevaucher au milieu des montants et non pas dans les angles. Le premier bordage effectue une tension optimale, puisque l’œuvre, posée couche picturale contre la table, n’exerce pas de contrainte de tension sur les bords. Le second papier est moins 123


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important pour la tension, en revanche, il protégera les angles du tableau et l’arrête de la couche picturale. Il participera au maintient des semences, et plus important encore pour des semences en cuivre, il limitera le contact avec l’oxygène, qui engendre l’oxydation naturelle du cuivre en vert-degris. Le papier Kraft® est protégé lors de l’application du vernis final par un ruban adhésif Tesa® dont l’adhérence est au préalable réduite pour éviter d’arracher le papier lors du retrait du Tesa®

3.Vernissage final Le vernissage final est réalisé au Régalrez® 1094 à 18% dans du Shelsoll®D40, appliqué au pulvérisateur. Plusieurs passages sont nécessaires pour obtenir un voile homogène et uni. La résine contient du Tinivin® 292 pour la rendre plus stable à la lumière et du Kraton® G1650 pour améliorer sa souplesse.

conclusIon : Le nombre d’heures passées sur ce tableau, qui s’élèvent environ à quatre cent cinquante, sont très importantes. Dans le monde du travail, un tableau comme celui-ci, bien que de bonne qualité, n’aurait probablement pas pu recevoir un tel traitement. Il faut ajouter à ce compte toutes les heures de préparation, des colles, des vernis, les séries de tests. Les opérations avec apport d’adhésif aqueux, mais avec un support maintenu en extension et sous pression a permis de diminuer la réactivité de la toile face à l’humidité, car plus une toile est en présence d’humidité, moins elle y sera sensible. Une toile de cette époque n’est généralement pas rentoilée mais doublée, car les supports sont très réactifs et les couches picturales fragiles. Il s’est avéré que ce traitement donne le résultat escompté, tant pour la consolidation de la toile déchirée et moisie que pour la remise en plan des écailles et leur maintient important

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Figure 142 : Photographie de l’œuvre après intervention.

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PARTIE SCIENTIFIQUE AnAlysE comPArAtIvE dE l’élEctrIcIté stAtIquE dEs dIfférEnts vErnIs utIlIsés En rEstAurAtIon, En vuE dE mEttrE Au PoInt un vErnIs AntIstAtIquE.

« Il serait curieux de faire un traité de toutes les faussetés qui peuvent composer le vrai» Eugène Delacroix, Journal, 18 juillet 1850.

Figure 143 : Raoul Dufy, La fée électricité, 1937. Musée d’art moderne de la ville de Paris

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IntroductIon La problématique choisie pour cette étude est de comparer l’électricité statique de différents vernis utilisés en restauration dans l’objectif de mettre au point un vernis antistatique. Plusieurs réflexions sont à la sources de ce projet. En premier lieu, l’expérience dans différents ateliers de restauration a permis de constater qu’une des opérations incontournables lors d’une restauration est le décrassage de la couche picturale (qui est très généralement vernie). En échangeant avec des professionnels, il semblerait que certains vernis attirent davantage la poussière que d’autres203. Dans un second temps, les industries de mise au point des peintures pour bâtiment ou décoratives ajoutent dans certains cas des agents de traitement de surface, tels que des photocatalyseurs204 ou créent des surfaces avec des nanorugosité205 permettant de limiter l’encrassement de leur surface. Il existe donc des systèmes qui réduisent l’attraction de la poussière et autres polluants par les matériaux filmogènes. D’autre part, les industriels, fabricants d’objets ou de revêtements de surface (peinture de carrosserie, peintures pour bâtiment) ont créé des peintures antistatiques206. Les traitements antistatiques sont notamment utilisés dans les lieux où l’électricité électrostatique est importante et dangereuse, comme dans les usines ou l’industrie aéronautique par exemple. Enfin, l’électricité statique a été quelque peu prise en compte dans le domaine de la conservation, mais très peu de publication sont parues sur cette question207. L’étude qui suit a pour objectif d’approfondir ce sujet qui pourrait ouvrir à ne nouveaux procédés de conservation restauration.

203. Entretien avec Hélène de Ségogne le 10 mai 2017. La restauratrice a remarqué que le vernis dammar et Paraloïd® B72 attirent particulièrement la poussière 204. www. sudlac.com/batiment.html. Consulté le 16 août 2016 205.http://lanaturearchitectedenotrefutur.wordpress.com/2-des-surfaces-autonettoyantes. Consulté le 16 août 2016 206. par exemple, la société Ink Antistatique. Consulté le 7 juin 2017 sur :http://www.ink-antistatique.com/peintures-antistatiques 207. ABBOTT Jamie, SMITH Gregory, The role of static charge in dirt accumulation on painted surfaces, Présentation réalisée au 37ème meeting annuel de l’American Institute of Conservation, Los-Angeles 2009 128


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I. Présentation de l’étude A. Problématique 1. Qu’est-ce qu’un vernis a. Les vernis synthétiques, en réponse à l’instabilité des résines naturelles

Le vernis est l’ultime couche appliquée sur la majorité des peintures de chevalet. En plus de son rôle de protecteur, la résine permet la bonne saturation les couleurs. Historiquement, les vernis étaient des résines dures ou tendres (appelées également gommes), dissoutes dans des huiles, des essences ou encore par la chaleur208. Depuis le milieu du XXème siècle, des vernis synthétiques ont été mis au point avec l’objectif de supporter mieux le passage du temps que les vernis naturels. En effet, les résines naturelles triterpéniques s’oxydent très fortement quand elles sont soumises aux radiations ultra-violettes. Ce phénomène se caractérise par le jaunissement, le durcissement209 du feuil, et aboutit généralement à un effritement. Le vernis perd son éclat, sa transparence, il ne sature plus les couleurs enfin, il ne joue plus correctement son rôle de protecteur de la couche picturale. Les vernis synthétiques ont donc été mis au point pour tenter de supporter davantage les facteurs environnementaux, ainsi, leur solubilisation après vieillissement doit se faire dans des solvants peu polaires. Le poids moléculaire de ces résines est généralement assez faible (entre 530 et 630 g/ mol), bien que des résines de haut poids moléculaire aient été élaborées (entre 11400 et 50 000 g/ mol)210. L’indice de réfraction des résines synthétiques est proche des vernis naturels (entre 1,46 et 1,53)211 . Tous les essais de vernis ne furent pas satisfaisant, c’est la cas par exemple pour les résines cétoniques qui se sont révélées très instables212.

b. Les additifs

Si chaque vernis a ses propriétés, l’ajout d’additifs peut faire varier son apparence ou son comportement au vieillissement. En effet, l’ajout de stabilisant à la lumière, le Tinivin® 292 ou d’un plastifiant, le Kraton® G-1650 est très courant. Les adjonctions se font à de faibles pourcentages. D’autres additifs ont des intérêts purement esthétiques, c’est le cas entre autre de la cire mi-

208. De LANGLAIS Xavier, La technique de la peinture à l’huile. Flammarion, 2011 p. 354-255 209. Les vernis naturels, en vieillissant, perdent leur réversibilité et nécessitent des solvants de plus en plus polaire pour être allégés de la couche picturale. NICOLAUS Knut, The restoration of paintings, Könemann, 1999, p. 312 210. BALCAR Nathalie, Les Vernis : Usages et propositions issues de recherches récentes. C2RMF, Paris, 2005. p.3 211. Ibidem p. 3 212. Ibidem p. 320 129


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cro-cristalline ou de la fumée de silice213 qui ont pour but de rendre le vernis plus mat. Il n’est donc pas exclus d’ajouter des substances dans les résines pour favoriser leur conservation ou améliorer leurs caractéristiques. Il faut toutefois que les additifs soient compatibles avec les vernis, et miscibles dans les mêmes solvants que les résines sèches. La réversibilité doit rester bonne. Enfin, il faut s’assurer que le produit ajouté n’engendre pas d’altération à l’œuvre qui sera vernie, en fonction de son pH ou de sa dureté par exemple.

c. Cahier des charges d’un vernis idéal

Après les réflexions sur les différents vernis, il est possible de dresser un cahier des charges du vernis idéal. PrIncIPEs EsthétIquEs

- Etre transparent et incolore - Régler les inhomogénéités de matité et les brillance de la couche picturale - Saturer les couleurs - Ne pas blanchir

PrIncIPEs dE consErvAtIon

- Protéger la couche picturale des impuretés de l’air - Etre stable - Etre réversible dans les solvants peu polaires Un vernis doit répondre à des exigences assez strictes. Son rôle est à la fois de protéger mais également de magnifier. On comprend aisément comment la présence de poussières et de crasses à la surface de ce vernis peut être dommageable.

2. Les différentes sources des polluants retrouvés sur les vernis214 a. Généralité sur les polluants

L’encrassement d’un objet découle de l’environnement dans lequel il évolue. L’environnement idéal n’existe pas, toutefois, une bonne conservation préventive limite les dégradations. Certains foyers d’émission de particules sont principalement en cause dans le phénomène d’encrassement.

213. STONER, Joyce Hill, RUSHFIELD Rebeca, Conservation of Easel Paintings, London, NewYork, Routledge, 2013, p 6 214. Vade-mecum de la conservation préventive, Centre de Recherche et de restauration des Musées de France, Juillet 2006. p. 17 130


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lEs foyErs dE comBustIon

La combustion provient notamment des usines et des moyens de transport, mais également des foyers domestiques. Les principaux polluants rejetés sont le dioxyde de souffre, émis lors de la combustion des énergies fossiles215, qui participe à l’acidification des surfaces, les particules fines216 qui se déposent sur les objets en les salissant et en entraînant leur corrosion, l’ozone et l’azote, eux, ont davantage d’effet sur la santé et l’environnement que sur les biens patrimoniaux. lEs mIlIEux nAturEls

La mer, la forêt, les volcans émettent des particules, telles que du pollen, des gaz ou des sels qui en se déposant sur l’œuvre peuvent réagir avec ses composants. lEs mAtérIAux quI EntourEnt lEs œuvrEs

Pour finir, l’environnement proche des objets d’art peut être une source de polluants, par exemple le tissu, le bois, le plâtre qui produisent de la poussière lors qu’ils se dégradent.

b. La poussière217

La poussière est un mélange de particules assez fines pour se maintenir en suspension dans l’air. Sa composition varie selon les milieux géographiques, toutefois les contaminants organiques et minéraux entrant principalement dans sa composition sont le pollen, les micro-organismes, les spores de moisissures, les bactéries et les œufs d’insectes, les poussières d’argile et de ciment, de charbon, de carbone et enfin, des particules métalliques. En se déposant sur les surfaces, elle crée un micro-climat légèrement humide et propice au développement de micro-organismes. A la surface des peintures, l’encrassement provoque le ternissement des couleurs et la perte de lisibilité du dessin.

3. Le phénomène d’électricité statique218 L’électricité statique est générée par le mouvement, les déplacements, les frictions. Plus le mouvement est rapide, plus l’électricité générée est importante. Certains matériaux sont plus statiques que d’autres, c’est à dire qu’ils ont une aptitude à se charger plus rapidement mais aucun n’a de charge statique prédéfinie. Le climat a également une influence sur l’électrostaticité puisque plus l’hygrométrie est basse, plus le statisme sera important. De plus, en temps orageux, l’électricité 215. Commission Economique Européenne des Nations Unies, Impacts de la pollution atmosphérique sur la santé humaine, les écosystèmes et les monuments historiques. Consulté en ligne http://www.unece.org, consulté le 4 Juillet 2017 216. Ces particules sont constituées principalement de sulfates, de nitrates, de métaux lourds et des sels et de dérivés du carbone. Informations provenant du site http://www.irceline.be, consulté le le 4 Juillet 2017 217 Vade-mecum de la conservation préventive, Centre de Recherche et de restauration des Musées de France, Juillet 2006. p. 18 218. La plupart des informations citées dans ce paragraphe proviennent de l’entretien téléphonique avec Monsieur Eric Feyder de l’entreprise Boussey-Control, en date du 24 novembre 2016 131


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statique est plus importante également. Il y a deux sortes de statisme, qui dépendent de la charge naturelle des matériaux. Par exemple, le silicone, le téflon ou le polypropylène auront une charge positive car ils possèdent un excès de protons. Au contraire, le verre ou l’aluminium présenterons un statisme négatif car ils possèdent davantage de neutrons. Les matériaux, une fois chargés, vont tenter de s’équilibrer avec l’environnement dans lequel évoluent. Ainsi, les matériaux chargés positivement attireront particulièrement les poussières chargées négativement et de manière similaire, les matériaux chargés négativement auront tendance à attirer les poussières chargées positivement. L’électricité statique est un phénomène de surface. Plus une couche est profonde dans la stratigraphie d’une peinture, moins elle aura d’incidence sur les forces électrostatiques.

4. L’intérêt d’un vernis antistatique en restauration. Les vernis et les couches picturales sont semi-conducteurs219. Cela induit que ces matériaux peuvent être chargés, au moyen de la friction ou par temps sec, sans toutefois que leur charge n’atteigne une intensité très élevée. Certes, l’électricité statique n’est généralement pas la cause principale de l’empoussièrement d’un vernis, mais y participe toutefois. Ce phénomène d’attraction s’amplifie lors du conditionnement des œuvres, de leur manutention, lorsque le lieu de conservation est sec ou sujet aux mouvements d’air (par la fréquentation par exemple) ou enfin lorsque des frictions sont faites lors d’un éventuel dépoussiérage. Il est admis que la température de transition vitreuse220 d’un vernis est un facteur important pour l’encrassement des tableaux. En effet, la résine, en devenant insensiblement poisseuse parce que la température ambiante a augmenté, piège les aérosols en son sein. L’adjonction d’un antistatique au vernis pourrait éventuellement permettre de limiter l’attraction des poussières dans un tel cas, notamment si en plus d’être chaud, le temps est sec. La conservation préventive est un domaine de plus en plus élaboré. Cette discipline consiste à prévenir les dégradations des œuvres en mettant en place des systèmes qui limitent les facteurs d’altération. Le choix d’un vernis moins sujet à l’électricité électrostatique, ou encore l’utilisation d’un antistatique pour protéger la surface des peintures doivent être vus comme des gestes de prévention plus que de restauration.

219. NICOLAUS Knut, The restoration of paintings, Könemann, 1999 p. 337 220. «La température de transition vitreuse est la température à laquelle, les résines naturelles ou synthétiques changent d’un état fluide ou visqueux à un pliable ou solide». Ibidem p. 386 132


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B. Les objectifs de l’étude 1. Quel sont les comportements des vernis face à l’électricité électrostatique ? En premier lieu, cette étude a été mise au point dans le but de quantifier avec exactitude l’importance du phénomène de l’électricité statique sur les couches picturales. Si ce phénomène est admis, en revanche, son importance nous est inconnue. L’objectif de cette étude est de savoir si l’électricité statique varie en fonction des résines utilisées, et si l’électricité produite est assez importante pour ne pas être qualifiée de négligeable. Ces premières observations permettront de savoir si certains vernis sont à privilégier ou à proscrire pour la restauration.

2. Hypothèse De par l’observation dans la vie quotidienne de l’attraction des poussières par les matériaux, ou bien du «coup de jus» que l’on ressent selon la matière que l’on touche, l’hypothèse qui peut être émise est que les résines synthétiques auront une électricité électrostatique plus importante que les résines naturelles.

3. Peut-on ajouter un antistatique qui permettrait de limiter l’encrassement ? Dans un second temps, pour tenter d’annuler le phénomène d’électricité statique des vernis, même si il est très faible, nous voudrions tenter d’ajouter un antistatique aux résines testées. Les antistatiques sont couramment utilisés pour le traitement des surfaces industrielles, exposées aux fortes charges électrostatiques. Il n’existe pas sur le marché d’antistatique adapté aux très petites charges. De plus ces matériaux sont généralement peu stables dans le temps car ils sont utilisés principalement pour limiter la création d’électricité statique lors de la fabrication industrielle. Travailler avec un produit capable d’isoler un matériau soumis à de fortes charges électriques devrait permettre d’en incorporer très peu aux résines pour obtenir une isolation satisfaisante des vernis tout en limitant de dénaturer leurs qualités.

4. Hypothèse Les antistatiques étant notamment utilisés avec des polymères synthétiques, il se pourrait que les additifs ne soient pas compatibles avec le vernis naturel. Les antistatiques, ajoutés en inclusion dans les plastiques y sont mélangés grâce à la fonte. Il est donc possible que les antistatiques soient insolubles dans les solvants utilisés pour réaliser les solutions de vernis, il est probable qu’il faille chauffer les vernis pour incorporer les antistatique. De plus, ces traitement à relativement court terme ne sont peut-être pas adaptés au principe de stabilité des matériaux de restauration.

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C. Notions théoriques 1. Le courant électrique et son unité de mesure La matière est constituée d’atomes. Ces derniers sont formés d’un noyau composé de protons (de charge positive) et de neutrons (sans charge électrique) autour duquel gravite un nuage d’électrons (de charge négative). Tous les matériaux sont donc dits diélectriques, c’est à dire qu’ils sont composés de charges négatives et positives à la fois, en charge égale221. Ce sont les électrons qui sont sujet à la migration d’un atome à un autre, car ils sont situés dans les couches périphériques. Ces charges positives et négatives sont la source de l’ensemble des phénomènes électriques. En effet, les deux électricités, l’électricité positive et la négative interagissent entre elles. Deux électricités semblables se repoussent tandis que deux électricités différentes s’attirent222. A l’état naturel, un atome est neutre, car les charges négatives et positives sont équilibrées. La perte ou le gain d’un ou plusieurs électrons transforme l’atome en un ion, de charge positive ou négative, en fonction de la perte ou du gain. Le courant électrique est un déplacement d’électrons dans un matériau. Il se traduit donc par un transfert de charges, créées par un générateur de courant223, qui induit un déséquilibre dans la matière en attirant ou repoussant les électrons. C’est ce que l’on appelle la tension électrique. L’unité de mesure de la tension électrique est le Volt. Le volt traduit la force électromotrice et la différence de potentiel entre deux points d’un circuit224. Elle se mesure généralement en Volt par mètre

2. Caractéristiques des matériaux isolants et conducteurs

La résistivité (e, exprimée en Ω.m) dépend de la forme, de la longueur et de la nature d’un matériau. Elle caractérise la capacité du matériau à s’opposer au passage des porteurs de charge. La conductivité électrique (σ, exprimé en seconde/mètre), au contraire, est un paramètre qui caractérise l’aptitude des matériaux à faciliter le passage des charges. Ces deux notions s’entrecoupent par la relation σ=1/ρ .225 a. Les isolants

Un isolant est un corps dont la résistivité est très grande226. Cela veut dire que les électrons sont fortement liés au noyau de l’atome et ne peuvent pas s’en dissocier, même sous l’action de forces 221. GALLOT LAVALLEE Olivier, Matériaux diélectriques et électrostatique. Lavoisier, Paris, 2013. p. 13 222. SAINT-JEAN Michel, Electromagnétisme : électrostatique et magnétostatique. Diderot, éditeur art et sciences, 1997, paris 223. Le courant peut être généré par un frottement ou une impulsion 224. Informations provenant du site https://www.edf.fr, consulté le 5 juillet 2017 225. INRS, Electricité statique , 2004, p. 10 226. GALLOT LAVALLEE Olivier, Op. Cit. p. 11 134


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extérieures. Les matières plastiques telles que le téflon, le polyéthylène et le polychlorure de vinyle sont de très bons isolants227. Les matériaux isolants sont polarisables228 b. Les conducteurs

A l’inverse, plus la résistivité est faible, plus la conductivité sera grande et plus le matériau sera un bon conducteur229. C’est à dire qu’un réseau d’ions positifs rigidement liés entre eux évoluent dans un nuage d’électrons délocalisés (n’appartenant pas en propre à un atome précis).Ces électrons sont attachés aux ions positifs mais peuvent se déplacer au sein du matériau. Les exemples de conducteurs sont les métaux.230 Les matériaux semi conducteurs, eux, laissent plus ou moins passer le courant, ces qualités peuvent varier en fonction de la température

3. Champ électrostatique et potentiel électrostatique La formule donnant la force à laquelle deux charges électrostatiques s’attirent est donnée par la loi de Coulomb :

Avec: - F est la force de Coulomb exprimée en newton (N). - q et q’ les deux charges qui entrent en jeu, exprimées en Coulomb, - ε0 (= 8,85.10-12 F/m ), la permittivité électrique du vide exprimée en farad par mètre (F/m), - d la distance séparant les deux charges en mètre(m) Cette relation insinue que les deux charges se repoussent ou s’attirent mutuellement, ce qui crée un champ électromagnétique231. La différence de potentiel électrostatique entre deux matériaux va engendrer un transfert d’électricité statique.

227. INRS, Electricité statique , Op. Cit p. 10 228. «Lorsque les tensions trop importantes sont appliquées sur un matériau isolant, alors la molécule se transforme en un système de deux charges égales positives et négative à une petite distance l’une de l’autre, c’est ce que l’on appelle doublet ou dipôle. L’apparition des dipôles constitue la polarisation du diélectrique» GALLOT LAVALLEE Olivier, Op. Cit p. 13 229. Informations provenant de l’encyclopédie Universalis http://www.universalis.fr consultée en ligne le 5 juillet 2017 230. INRS, Electricité statique , Op. Cit p. 10 231. INRS, Electricité statique , Op. Cit p. 12 135


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4. Phénomènes d’apparition, d’accumulation et de dissipation des charges Les charges apparaissent dans la matière et y sont stockées. L’accumulation n’est possible que si le taux de génération d’un condensateur est supérieur à celui de disparition. De plus, l’accumulation ne survient que dans le cas ou au moins une des surfaces en frottement est isolante. L’apparition des charges dans un matériau provient d’un échange d’électrons ou d’ions lors du simple contact avec un autre matériau. Le frottement de deux matériaux l’un contre l’autre n’est donc pas la source de l’électrisation, mais l’amplifie seulement. L’électrisation est complexe à aborder et découle de nombreux paramètres. Toutefois, il est possible de dire, sans rentrer trop dans les détails, que l’électrisation peut être produite par le frottement, par le transfert de charges d’un corps à un autre, par influence d’un corps sur l’autre sans qu’il n’y ait de contact, par effet de couronne ou enfin par écoulement d’un liquide. On peut noter qu’une atmosphère dans laquelle l’humidité relative avoisine les 70% empêche généralement l’apparition des charges électrostatiques232. Tout matériau chargé, si il n’est pas continuellement alimenté se déchargera par dissipation des charges, notamment si ces objets sont reliés à la terre233. Néanmoins, dans certains cas, lorsque la différence de potentiel est très importante entre les deux matériaux, un claquage se produit en générant une étincelle. Mais ce phénomène est bien trop éloigné de l’électricité statique qui entre en jeu par rapport à l’attraction des poussières sur une couche picturale.

II. Le protocole expérimental A. Choix des matériaux L’étude se cantonnera à étudier le phénomène d’électrostaticité des vernis, et non celle des couches picturales pour deux raison. En premier lieu, le phénomène d’électrostaticité se limite à la surface des polymères. Comme généralement les peintures sont vernies, il est plus intéressant d’évaluer leurs caractéristiques que celles des peintures. Ensuite, le temps impartit pour cette étude ne permet pas de faire varier une quantité importante de paramètres.

1. L’appareil de mesure234 L’appareil de mesure permettant de mesurer l’électricité statique des matériaux est un mesureur électrostatique, ou mesureur de champ électrique. Différents modèles existent, en fonction de la charge à mesurer. En effet, dans les industries les charges électrostatiques sont beaucoup plus importantes que dans le cas que nous étudions. 232. Ibidem, p. 61 233. Ibidem pp. 21-23 234. Pour des questions financière, l’appareil n’a pu être loué qu’une seule fois. Les mesures après vieillissement n’ont donc pas pu être réalisées comme il était prévu, bien que les échantillons aient tous été artificiellement vieillis à la chaleur. 136


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Se procurer ce genre d’appareil n’est pas aisé car peu d’entreprises le commercialisent et l’utilisent. Le modèle qui permis de réaliser cette étude est le Static Control235 de la marque Haug®. La mesure est prise à une distance de trois centimètres de l’objet, sans prélever de charge. L’unité de mesure est le kV/m et le résultat est précis à ±20%. Le manque de précision de cet appareil n’est pas parfaitement adapté à une étude telle que celle-ci, puisque les charges électrostatiques des vernis sont faibles. Ce facteur devra être prise en compte dans les sources d’erreur liées au système, de plus, bien que les résultats donnent un ordre d’idée, l’utilisation d’un appareil de mesures plus précis rendrait l’étude plus fiable.

2. Les vernis Le choix des vernis s’est porté vers les résines les plus souvent utilisées en restauration. En effet, comme le phénomène d’électricité statique des vernis n’est probablement pas le même en fonction de la nature de celui-ci, il est intéressant de tester plusieurs molécules différentes. Chaque vernis sera dissout à 20% dans le solvant habituel de mise en œuvre. Ce pourcentage a été choisi car c’est une concentration courante pour un vernis de restauration.

a Dammar Le dammar est un vernis naturel triterpénique. Issu des exsudats de sève des arbres de la famille des Diptérocarapacées236 il est composé de résène, d’acides résiniques, d’eau, d’essence volatile et de cendres. Sa masse moléculaire varie entre 410 et 470, en fonction de la provenance de la résine. Il est reconnu en restauration de peintures pour sa capacité à saturer les couleurs et à nourrir les couches picturales. Sa teinte légèrement chaude lors de l’application est appréciée. Toutefois, en vieillissant son oxydation est importante, il jaunit, devient cassant et de moins en moins soluble dans les solvants peu polaires237.

b. Laropal ®A81

Le Laropal® A81 est une résine urée-aldéyde. Ses principales caractéristiques sont sa basse viscosité, qui lui confère un très bon pouvoir nivelant, et une certaine brillance, une haute résistance à l’oxydation, une faible polarité, même après vieillissement et une température de transition vitreuse élevée pour un vernis (49°C)238

c. Régalrez® 1094

Le Régalrez® 1094 une résine aliphatique résultant de l’hydrogénation des oligoméres obtenus par le vinyl-toluène et l’alpha-méthyl-styrène. Est un des vernis considérés comme les plus stables, et dont l’apparence est la plus proche des vernis naturels, car leur indice de réfraction est proche. 235. La fiche technique de cet appareil est présentée «Annexe 1 : fiches techniques», page 196 236. PEREGO François, Dictionnaire des matériaux du peintre, Belin, 2005. p. 254 237. NICOLAUS Knut, The restoration of paintings, Könemann, 1999 p. 315 238. Informations provenant de la fiche technique du Laropal® A81 fournie par CTS, voir «Annexe 1 : fiches techniques», page 196 137


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Sa température de transition vitreuse est de 33°C. Le faible poids moléculaire de cette résine permet un très bon nivelage de la couche picturale. Il est particulièrement apprécié pour sa bonne réversibilité dans les solvants aliphatiques, même après vieillissement.

d. Paraloïd® B72

Le Paraloïd® B72 est une résine acrylique composée de méthylacrylate et éthylmétacrylate est soluble dans les solvants aromatiques, les cétones et les alcools. Ce vernis est certainement celui qui présente le moins de jaunissement dans le temps, et qui reste très souple. Toutefois, son indice de réfraction est un peu moins élevé que celui des résines naturelles. Cette résine est utilisée tant comme consolidant que comme liant de retouche ou comme vernis. Etant donné que l’étude est portée sur l’éventuelle l’adjonction d’un additif antistatique, les stabilisants Tinuvin®292 et le Kraton G-1650 ne sont pas ajoutés aux solutions de vernis préparées.

3. Les solvants Pour une bonne répétabilité de l’expérience, il serait bon d’utiliser un seul et même solvant pour solubiliser l’ensemble des vernis. Malheureusement, toutes les résines ne se dissolvent pas dans les même solvants. De plus, il a été privilégié pour cette étude d’utiliser les solvants dans lesquels les vernis sont généralement préparés, pour se situer au plus proche de la réalité. Ainsi, le dammar et le Laropal® A81 se solubilisent dans du white spirit non désaromatisé, ou dans du white sipirit D40 auquel on ajoute un pourcentage de solvant aromatique, comme le xylène. Le Paraloïd® B72 est solubilisé dans un mélange de 50% d’éthanol et 50% d’acétone, car la solubilisation dans les solvants aromatique pures a été jugé trop toxique. Enfin, le Régalrez® 1094 qui se dissout entièrement dans les solvants aliphatiques est préparé dans le white-spirit D40.

4. Les supports Bien que l’électricité soit surtout un phénomène de surface, l’idéal aurait été qu’il n’y ait pas de support. La couche de vernis est si fine que le support a forcément une influence sur l’électricité statique produite par les vernis. Toutefois, de nombreux tests239 réalisés dans le but de mouler des échantillons de vernis pouvant ensuite être utilisés sans support se sont révélés peu concluant. Il a donc été choisi d’appliquer les vernis sur des supports rigides, qui faciliteraient d’autant plus la manipulation. 239. En premier lieu, trois sortes de moules en silicone différents ont été utilisés, mais d’après nos observations, le silicone réagit aux solvants aromatiques (ou au white spirit non désaromatisé) en se déformant. Ensuite, des films de vernis ont été coulés sur du polyester mono-siliconé de type Mélinex®. Mais les films étaient irréguliers et cassants (hormis pour le Paraloïd®B72 qui possède une grande souplesse). Pour finir, du vernis a été coulé dans des coupelles plates en céramique. L’intérêt de ce moule était de pouvoir faire des épaisseurs relativement épaisses, comme c’était le cas avec les moules en silicone. Dans ce cas, les vernis n’ont jamais séché, même après quatre mois. Un durcissement au four était impossible car cela risquait de dénaturer les produits antistatiques insérés dans les résines. 138


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a. Verre

Le verre est le matériau utilisé par excellence dans les laboratoires de chimie. Inerte, résistant aux hautes températures, aux acides et aux bases, aux divers solvants, il permet la manipulation de nombreux corps chimiques. Le verre est un isolant naturel240. Cela signifie que dans le cas d’un travail sur l’électricité, ce matériau sera polarisable. Un support d’éprouvettes en verre est particulièrement utile lors des vieillissement à la chaleur ou encore lors des tests de réversibilité aux solvants. b. Plexiglas®

Le plexiglas® est du polyméthacrylate de méthyle (PMMA), matière plastique acrylique241. C’est une résine synthétique ayant la transparence du verre et une bonne inertie chimique et est mis en forme par injection, par extrusion ou par moulage242. Le PMMA, très conducteur, génère beaucoup d’électricité statique243. Voici donc deux matériaux dont les propriétés physiques face à l’électricité sont très différentes. L’un est très isolant, le second très conducteur. Le Plexiglas® a été sélectionné pour commencer cette étude. En effet, il a été jugé que son pouvoir conducteur aurait tendance à mettre en exergue les résultats des mesures prises avec le mesureur électrostatique. En effet, l’appareil de mesure n’étant pas très précis, associé au fait que les vernis n’émettent que peu de charges électrostatiques, risquent d’être des freins à la bonne mise en œuvre de l’expérience.

5. Les antistatique

«Matériau ou traitement qui permet une migration facile des charges électriques (de telle manière que, lorsqu’il est relié à la terre, le matériau n’accumule pas de charges électrostatiques) ou qui ne se charge pas facilement par contact»244

Certains isolants, tels que le papier, le caoutchouc, les textiles, les matières plastiques et les liquides peuvent être modifiés pas ajout d’antistatiques dans leur masse ou superficiellement de manière à être rendus plus conducteurs245. Pour cela, on insère des substances à conduction ionique, qui agissent sur la conductibilité du matériau traité. Ces additifs sont généralement des dérivés organiques soufrés (sulfonates) ou azotés (amines), les amides, certains polyols, des sels d’ammo240. ZANONE Agathe, Mémoire de fin d’études, Etude statistique de la variation de l’épaisseur de la couche picturale par effet capacitif. 2016. p. 159 241. Information provenant du site https://www.plexiglass.fr, consulté le 6 juillet 2017 242. Larousse en ligne, consulté le 6 juillet 2017 243. Information provenant du site http://www.boussey-control.com, entreprise d’où proviennent les échantillons d’antistatique testés dans cette étude. 244. INRS, Electricité statique ,Op. Cit p. 91 245. Ibidem, p. 61 139


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nium quaternaire246. Ces produits ont généralement une durée de vie limitée car ils sont nécessaires principalement au moment de la fabrication des objets. Comme la compatibilité entre les vernis et les antistatiques est inconnue, il serait bon de tester deux méthodes d’application différentes. De plus, l’efficacité des deux types d’additifs pourra être comparée. Pour cela un antistatique sera appliqué au dessus du film sec, tandis que le même antistatique, sous une autre forme, sera introduit dans la résine avant que les échantillons ne soient vernis. a. Nature des antistatiques testés

L’antistatique utilisé est le Staticontrol AS.90 247. Il est composé à 93% de sel de sodium d’un alcane sulfonate secondaire. C’est une matière première utilisée pour la mise au point de détergeant. Ce tensioactif entre dans la composition d’émulsions, c’est également un agent glissant248. Deux formes du produits sont utilisées pour cette étude : - L’ AS.90 se présente sous forme de granulés de couleur ivoire, et dont la texture peut faire penser à celle de la paraffine. Ce produit est à incorporer directement dans les matériaux avant leur mise en forme définitive. Fondant à une température inférieure à 100°C, le mélange avec les polymères se fait généralement par incorporation au mélange fondu, avant extrusion. Ces billes d’antistatique peuvent également être dissoutes dans l’eau. L’entreprise qui les produit n’a toutefois aucune connaissance de la solubilité de ces tensioactifs dans d’autres solvants que l’eau. - L’AS.90.E10 est le résultat de la dissolution de AS.90 dans l’eau. L’antistatique est dilué à 10% dans cette solution qui est destinée à être appliqué à la surface des matériaux à traiter. Ces antistatiques ont la particularité d’avoir un temps d’action d’environ 6 mois à un an. L’antistatique en solution aqueuse est d’autant plus éphémère qu’il disparaît lors des contact et des frictions répétées. Les antistatiques sont aussi relativement sensible aux rayonnements ultra-violets et à la température 249.

b. Méthodes d’incorporation des antistatiques aux vernis

Des tests ont été menés pour connaître la solubilité des billes d’alcane sulfonate dans les différents solvants entrant dans la composition des vernis. Pour cela, quatre solvants ont été choisis, issus des quatre grandes familles de solvants utilisés en restauration : les alcools, les cétones, les hydrocarbures aliphatiques et les hydrocarbures aromatiques. En plus de cela, l’eau est testée 246. Ibidem, p.61 247. Dont des échantillons ont été fournis par l’entreprise Boussey Control. 248. Informations provenant de la fiche technique du produit, «Annexe 1 : fiches techniques», page 196 249. Informtations recueillies lors de l’entretien téléphonique avec Eric Feyer, de la société Static Control le 7 juin 2017 140


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comme un témoin car son caractère solubilisant de l’antistatique est déjà connu. Une bille d’antistatique est déposée dans un récipient en verre, et recouvert de la même quantité de solvant, soit 10mL. Aucun mouvement n’est fait, seul la fonte est observée. Toutes les dix minutes, les billes sont étudiées. Dans l’eau, l’antistatique fond doucement, et régulièrement. Après une heure la bille dans le récipient d’eau est totalement dissoute, le liquide est transparent et incolore. En revanche, dans les solvants organiques la fonte ne se fait pas correctement. Si l’apparence des billes dans les quatre solvants est différente, le résultat est le même : les antistatiques ne se dissolvent pas naturellement dans les solvants organiques. Il a donc été décidé de coupler l’influence de la chaleur et de l’agitation, par l’utilisation d’un mélangeur magnétique chauffant. Chaque solution a été placée sur l’agitateur magnétique, avec une rotation autour de 300 tours par minute et une température de 60°C. En une heure, les antistatiques sont dissout dans tous les solvants. Les solvants sont un peu troubles.

Figure 144 : Situation de test de solubilisation de l’AS90 dans les solvants utilisés pour la préparation des vernis

B. Fabrication des échantillons Il a été décidé de réaliser trois types d’échantillons; des échantillons de vernis purs, des échantillons de vernis dans lesquels des antistatiques seront ajoutés avant que le vernis ne soit appliqué sur le support et des échantillons de vernis sur lesquels une couche d’antistatique en solution aqueuse sera appliquée une fois le film de vernis sec. Tous les échantillons sont réalisés de la même manière : une couche de vernis est appliquée au pinceau, en veillant à toujours appliquer une couche semblable, sans créer de bulle. Etant donné que cette technique ne permet pas une parfaite répétabilité, quinze échantillons sont réalisés pour chaque nature de film testé.

1. Les échantillons de vernis pur Ces échantillons permettront de connaitre la réaction de chaque vernis sans aucun additif face à l’électricité statique. Ces mesures pourront être mises en parallèle avec l’étude de Jamie Abbott et

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de Gregory Smith250 sur le rôle des charges statiques pour l’empoussièrement des surfaces peintes. De plus, l’étude présentée ici se tourne davantage sur les vernis utilisés en restauration, car l’étude citée précédemment ne prend pas en compte les vernis tels que le Laropal® A81 ni le Paraloïd® B72, qui sont également des liants de retouche.

2. Les échantillons avec l’antistatique dans la résine avant son application Les grains d’antistatique seront dissout dans les solutions de vernis grâce à l’action de la chaleur couplée à une agitation251. La quantité ajoutée d’antistatique est de 2% de la masse sèche de la résine. Cette faible concentration a été choisie car la plupart des additifs incorporés dans les vernis sont ajoutés entre 0,5% et 3% de la masse sèche de la résine, de manière à ne pas dénaturer les qualités propres au vernis. Insérer des antistatiques dans la résine avant son application semble le choix le plus pérenne pour l’efficacité du traitement. En effet, cette méthode d’application doit permettre de conserver les qualités antistatiques plus longtemps car le tensioactif ajouté est protégé par le vernis. La prise de mesure permettra de confirmer ou d’infirmer la compatibilité entre les antistatiques et les vernis, et si l’antistatique rend toute la surface du vernis antistatique de manière homogène.

3. Les échantillons avec l’antistatique à la surface du film sec Un film de vernis sera déposé sur le support en PMMA et quelques jours plus tard, après évaporation totale des solvants, un film d’antistatique sera déposé à la surface des échantillons. L’antistatique est appliqué à la concentration de 10% tel qu’il nous est parvenu. Ce choix a été fait en connaissance de la faible compatibilité entre l’eau et les vernis neufs252. Les antistatiques étant des tensioactifs, c’est leur présence dans la solution qui permet sa bonne répartition sur le film de vernis. Cette dernière méthode sera étudiée dans le but de proposer une deuxième possibilité d’ajout d’antistatique. En effet, si les qualités antistatiques se dégradent rapidement, il n’est peut-être pas judicieux de les incorporer aux vernis, car il faudrait pratiquer des allègement de vernis très réguliers pour épurer l’œuvre des résidus d’antistatiques inactifs et pour renouveler la qualité de répulsion de la poussière. D’ailleurs, comme les phénomènes d’électricité statique se produisent principalement lors des déplacement, des conditionnements, il serait peut-être suffisant d’appliquer un antistatique de manière provisoire, juste durant le temps de manutention sur l’œuvre. Cette application est beaucoup moins pérenne que lorsque l’antistatique est au sein de la résine car le film en surface est très fragile aux frottements et à la lumière.

250. ABBOTT Jamie, SMITH Gregory, The role of static charge in dirt accumulation on painted surfaces, Présentation réalisée au 37ème meeting annuel de l’American Institute of Conservation, Los-Angeles 2009 251. Voir la partie «b. Méthodes d’incorporation des antistatiques aux vernis», page 140 252. Des pré tests sur le pourcentage minimum d’antistatique à appliquer pour obtenir un résultat satisfaisant lors de la mesure avec le mesureur électrostatique n’ont pas pu être fait, en raison de la courte disponibilité de l’appareil de mesure 142


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C. Validation du protocole expérimental Etant donné la courte durée de la location de l’appareil, la réalisation de pré-tests validant le protocole expérimental n’a pas été possible. Les premiers résultats obtenus semblant corrects, tous les échantillons ont été mesurés. Les importants taux d’erreur obtenus sont à mettre en lien avec le manque de précision de l’appareil de mesure.

III. Mise en pratique de l’expérience et résultats Tous les échantillons préparés étaient rangés dans une boîte de rangement pour les lames de microscope, en plastique mais avec un fond en liège isolant. Après plusieurs jours sans avoir été manipulés (de manière à ce que les échantillons ne se soient pas chargés par leurs mouvements dans la boîte), les supports de Plexiglas® recouverts des différents vernis sont sortis un a un de leur rangement. Ils sont posés sur une planche en bois isolante, pour que la mesure ne soit pas faussée par le support. De plus, les mesures ont toutes été réalisées dans la même journée de manière à éviter les changements de condition climatique qui jouent beaucoup sur l’électricité statique. L’appareil, branché à la terre à l’aide d’une petite pince crocodile, est allumé puis calibré contre une surface reliée à la terre, ici un mur. Quand l’appareil indique 0, il est placé, verticalement, sur les échantillons. Les deux broches d’espacement, qui permettent de tenir le capteur de l’appareil régulièrement à trois centimètre de l’échantillon, sont posées sur ce dernier. Au bout de quelques secondes, la valeur se bloque, elle est lue et reportée dans un tableau. L’unité de mesure est le Volt/m. Il a été décidé de ne pas prendre la mesure des échantillons après qu’ils aient été frottés. En effet, si cette pratique permet de voir quel vernis est vraiment soumis aux forces électrostatiques, elle n’est pas représentative de la réalité car les tableaux ne sont jamais frottés énergiquement.

Figure 146 : Le mesureur électrostatique est placé sur l’échantillon et effectue sa mesure

Figure 145 : Appareil de mesure en cours de calibrage

Les tableaux des mesures et des calculs complets sont présentés en «Annexe 2 : Détail des calculs réalisés pour l’étude», page 202. Les erreurs étant importantes, l’étude n’est pas très précise. Il a donc été décidé d’utiliser sur les graphiques les erreurs à 68% et non à 95% qui ne sont pas adaptés à cette étude.

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A. Mesure de l’électricité statique des vernis purs Dans un premier temps, l’électricité statique des vernis purs est testée. Il s’avère que, contre toute attente, le vernis naturel dammar est très nettement plus électrostatique que les trois vernis synthétiques. Sans frottement préalable, l’électricité statique moyenne émise par les échantillons de dammar est de 214,2 V/m. Le Laropal® A81, généralement qualifié de vernis le plus proche optiquement des qualités du dammar, est le plus électrostatique des trois synthétiques, avec une moyenne de 30 V/m. Enfin, le Paraloïd® B72 et de Régalrez® 1094 sont assez proches l’un de l’autre, avec respectivement 5,7 et 4 V/m pour moyenne d’émission d’électricité électrostatique. Ces premières mesures permettent de connaitre les qualités des résines pures. Le phénomène, d’électrostaticité des vernis, jugé généralement négligeable, prend toutefois une importance à travers ces premiers résultats. En effet, entre +2 et -2 V/m, le phénomène d’électricité statique peut être jugé inexistant. Ici, les vernis Régalrez® 1094 et Paraloïd® B72 émettent si peu d’intensité électrique qu’ils peuvent être utilisés sans crainte que l’empoussièrement soit favorisé par ce phénomène. Si le Laropal ® A81 est lui aussi assez peu électrostatique, son pouvoir d’attraction de la poussière est tout de même 7,5 fois plus important que celui du Régalrez® 1094. Enfin, le vernis dammar peut être qualifié de véritablement électrostatique car il l’est 53 fois plus que le vernis Régalrez® 1094. La suite de l’étude, l’ajout d’antistatique aux vernis, peut être justifiée notamment pour les résines dammar et Laropal ® A81. Tous les vernis vont toutefois être testés pour pouvoir comparer leurs réactions aux antistatiques.

Figure 147 : Comparaison des résultats de mesure électrostatique des vernis purs

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B. Mesure de l’électricité statique des vernis avec un antistatique dans la résine L’antistatique en grain a été ajouté à la hauteur de 2% aux même vernis que ceux préparés pour le test précédent. L’électricité statique de chaque vernis a été réduite, mais le phénomène est bien sur davantage visible sur les vernis dammar et Laropal® A81 qui étaient plus électrostatiques au premier abord. La tendance générale est toujours la même, le Régalrez® 1094 et le Paraloïd® B72 présentent une très faible électricité statique, qui a été légèrement abaissée par l’adjonction d’antistatique. Leurs pouvoirs d’attraction qui ont été jugés très faible lors de la première série de mesures peuventêtre, notamment pour le Régalrez® 1094, qualifiés d’insignifiants grâce à l’ajout d’antistatique en grains Le dammar, présente un taux d’électricité statique plus faible que le Laropal® A81. La réduction de l’émission d’énergie par la résine naturelle est spectaculaire. L’électricité statique du Laropal® A81 a considérablement baissé également. Même si les erreurs sont importantes car elle sont comprises entre 20% et 43%, avec un intervalle de confiance de 68% les tendances entre le dammar et le Laropal® A81 sont assez surs. En revanche, les résultats du Paraloïd®B72 et du Régalrez®1094 se recoupent. L’ajout d’antistatique dans la résine est parfaitement concluant, même avec un pourcentage de 2%, notamment pour les vernis qui présentait un taux d’électricité statique élevé.

Figure 148 : Comparaison des résultats de mesure électrostatique des vernis avec l’ajout d’antistatique dans la résine 145


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C. Mesure de l’électricité statique des vernis avec l’antistatique à la surface La dernière prise de mesures se fait sur des échantillons de vernis purs, sur lesquels de l’antistatique liquide, en solution aqueuse a été appliqué au pinceau. Comme pour l’antistatique en grains, les résultats sont intéressants car la baisse de l’intensité électrique est importante. La baisse d’électricité électrostatique du Dammar est encore plus flagrante avec l’antistatique de surface qu’avec l’antistatique en grain. Pour la résine Paraloïd®B72, la tendance est la même, toutefois la perte est moins importante car la résine acrylique est naturellement beaucoup moins électrostatique que le dammar. Pour le Laropal® A81, bien que l’électricité générée par la résine ait conséquemment baissée, l’antistatique de surface est moins efficace que l’antistatique inclus dans le vernis. Enfin, le Régalrez®1094 montre un résultat particulièrement étonnant puisque l’électricité statique des échantillons a augmenté de moitié. Ce résultat est difficilement explicable. Il semble que ce phénomène soit bien existant, car la moyenne des quinze mesures augmente sensiblement, même quand les erreurs sont prises en compte. Les résultats de ces trois séries de mesures donnent une tendance de l’effet de l’électricité statique sur les vernis, toutefois leur inhomogéite appuie sur le fait que de nouvelles mesures, réalisées avec un appareil plus précis, permettraient d’obtenir des résultats plus représentatifs de la réalité.

Figure 149 : Comparaison des résultats de mesure électrostatique des vernis avec l’ajout d’antistatique à la surface la résine

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IV. Interprétation des résultats A. Comparaison et interprétation des résultats Le vernis dammar est source de surprises, contrairement aux hypothèses émises précédemment, il est davantage conducteur que les vernis synthétiques. De ce fait, il se charge beaucoup plus rapidement, au moindre mouvement. De plus, les antistatiques sont parfaitement compatibles avec cette résine puisque c’est elle qui présente les meilleurs résultats après adjonction d’antistatiques, au sein de la résine ou à sa surface . Le Laropal® A81 n’est pas un vernis très touché par les phénomènes d’électricité statique. L’ajout d’antistatique réduit sa conductivité, toutefois, ce phénomène est beaucoup moins spectaculaire que pour la résine dammar. Peut-être que la molécule de l’antistatique est moins compatible avec celle du Laropal® A81 qu’avec le dammar. Le Paraloïd®B72 est un vernis très peu électrostatique, qui réagit tout de même très bien à l’ajout d’antistatique, que ce dernier soit seulement en surface ou dans la masse. Toutefois, sa nature peu conductrice fait du Paraloïd®B72 un vernis qui ne nécessite pas l’ajout d’antistatique. Enfin, le Régalrez®1094 est un vernis qui est très peu conducteur. Son pouvoir d’attraction des poussières peut être considéré comme nul et l’ajout d’antistatique superflu. D’autant plus au vu de sa réaction étonnante avec l’antistatique de surface.

Figure 150 : Mesures comparatives des variations entre les différents vernis avant et après ajout d’antistatique 147


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.

Figure 151 : Tableau présentant le pourcentage de perte d’électricité électrostatique pour chaque vernis.

Figure 152: Graphique présentant le pourcentage de perte d’électricité électrostatique des différents vernis

Les pertes de conductivité sont très importantes pour le vernis dammar, mais les deux antistatiques ont un rôle vraiment similaire, compte tenu des erreurs dues à l’appareil de mesure. Ces courbes permettent de voir que l’antistatique à la surface n’est plus efficace que dans le cas de la résine dammar, tandis que pour le Laropal® A81, il l’est un peu moins, encore moins pour le Paraloïd®B72, mais avec le Régalrez®1094 l’antistatique de surface est véritablement contre-productif.

B. Les erreurs Malgré le soin apporté à la réflexion des matériaux et des procédés pour mener à bien cette étude, de nombreux essais253 furent des échecs. La réalisation de quinze éprouvettes pour chaque vernis était un moyen de limiter les erreurs en appréhendant un échantillon plus vaste. L’application de vernis sur les supports a été fait avec précaution. C’est pourquoi la plus grande partie des incertitudes proviennent de l’imprécision de l’appareil de mesure. 253. Notamment concernant la réalisation de films de vernis d’épaisseur égale et sans support 148


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Obtenir 54% d’incertitude254 est inacceptable et une expérience ne peut pas être jugée viable dans de telles conditions. Toutefois, quatre mesures, qui présentent une erreur relative inférieure ou égale à 20% permettent de comprendre pourquoi les incertitudes correspondant aux autres mesures sont beaucoup plus importantes. En effet, plus les résultats des mesures sont grands, plus l’erreur diminue. Cela corrobore l’hypothèse du mauvais choix de l’appareil de mesure, qui n’est pas du tout précis dans le cas des petites valeurs. On peut donc supposer que certaines des conclusions tirées sont en partie fausses.

1. Erreurs dues au système expérimental PoussIèrEs Et ImPurEtés sur ou dAns lE fIlm dE vErnIs

La durée de séchage d’un film de vernis induit que des particules viennent se déposer à sa surface. De plus, il est possible que le pinceau utilisé pour répartir le vernis sur les support contenait des impuretés, ou encore que la résine contenait des particules dès sa fabrication. Les impuretés ont une influence qu’il ne faut pas négliger, notamment dans le cas d’un film fin comme c’est la cas dans cette étude255. EnvIronnEmEnt dE l’ExPérImEntAtIon

Les variations de température mais surtout d’hygrométrie sont difficiles à contrôler, et il arrive que durant la série de mesures les conditions climatiques se modifient. L’électricité statique peut être produite pas des objets environnants256. Peut-être que certains objets placés autour du plan de travail ont influencé les mesures, mais comme toutes les mesures ont été faites en même temps, les erreurs possibles sont systématiques. mAnquE dE PrécIsIon dE l’APPArEIl dE mEsurE

La précision de la mesure, indiquée en KV/m, et précise à ±20% n’est pas adéquate avec l’étude mise en place ici, mais se procurer un appareil de mesure précis à 1V/m s’est avéré impossible.

2. Les erreurs dues à l’opérateur l’APPlIcAtIon du vErnIs Au PIncEAu

Une application au pinceau est toujours plus ou moins régulière, en fonction de la manière de prendre le vernis, ou de l’appliquer

254. «Annexe 2 : Détail des calculs réalisés pour l’étude», page 202 255. MENGUY Claude, Mesure des caractéristiques des matériaux isolants solides, 10 août 1997 256. «il serait imprudent de prétendre détecter une charge accumulée sur une surface isolante sans préciser l’em- placement de cette surface par rapport à tous les corps conducteurs voisins.» INRS, Electricité statique ,Op. Cit p.13 149


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lEs suPPorts ImPArfAIts

Les lames de plexiglas® peuvent être mal nettoyées ou encore rayées, dans les interstices, davantage de résine s’est logé, si des impuretés étaient sur le support, dans ce cas il y a moins de vernis localement, ce qui provoque des différences de potentiel électrique lA mAnIPulAtIon dEs échAntIllons

Le déplacement des échantillons, ainsi que la façon de les extraire de la boîte peuvent induire des différences de charges électrostatiques. En effet, chaque mouvement est une potentielle source de gain ou de perte d’électron par les échantillons. dIffIculté dE lA constAncE lors dE lA PrIsE dE mEsurE

Le calibrage, ainsi que la prise de mesure sont des opérations, qui, répétées près de deux-cent fois sont longues et peuvent être réalisées avec plus ou moins de constance par l’opérateur.

C. Les limites de l’étude 1. Les antistatiques étudiés sont ils vraiment compatibles avec les couches picturales ? Travailler sur la problématique de l’encrassement des couches picturales par les systèmes d’électricité statique est novateur et il est intéressant de pouvoir quantifier un phénomène juste observé auparavant. En revanche, l’ajout d’antistatique mériterait de plus amples approfondissements. En effet, l’efficacité des antistatiques dans le temps ainsi que la réversibilité du vernis vieillis seraient à confirmer dans une analyse plus avancée. De plus, le fait d’appliquer pour une longue durée un agent détergent sur la couche picturale n’est peut-être pas très respectueux de l’œuvre. Si le fabricant des antistatiques affirme qu’il n’y a pas de perméation dans le cas des substances solides sèches et que de plus les antistatiques ont un pH proche de 7257, des vérifications sur l’innocuité du traitement seraient nécessaires. Pour répondre à cette interrogation, on pourrait appliquer un tel vernis sur une couche picturale, le faire vieillir puis observer les effets du vernis sur le feuil de peinture par une observation au microscope électronique à balayage par exemple, pour voir les réactions de la matière. Peut-être que d’autres natures d’antistatiques pourraient être testées, mais ces produits sont généralement assez éloignés des critères de conservation et restauration. En réponse à ces remarques, on peut imaginer appliquer un film de vernis additionné d’antistatiques en couche finale, sur un tableau qui a déjà plusieurs couches de vernis, pour éviter au maximum les interactions avec l’œuvre.

257. Informations provenant de la Fiche technique Staticontrol AS.90.E10, p. 4 150


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2. Une étude menée avec peu de moyens Pour produire une analyse vraiment complète du comportement des peintures face à l’électricité statique, il serait intéressant de comparer la réaction des différents types de liant. En effet, depuis le milieu du XIXème siècle, de plus en plus de peintures sont non vernies; c’est le cas par exemple des peintures impressionnistes ou de certaines peintures contemporaines. D’ailleurs, il est probable que la matière de la peinture sous-jacente a un effet sur l’électricité statique de vernis. En effet, la couche de résine est tellement fine que la couche inférieure a forcément un rôle, comme cela l’a été observé lors des pré-tests comparant les supports en verre ou en Plexiglas®. Est-ce que, l’acrylique en dispersion, liant de peinture a le même comportement que l’acrylique en solution, présent dans l’étude à travers le vernis Paraloïd®B72 ? L’ajout de stabilisants tels que le Tinuvin® 292 ou le Kraton ®G-1650 ou d’agents matants tels que la cire micro cristalline ou la fumée de silice a-t-il aussi une influence sur l’électricité électrostatique des vernis ? Il serait intéressant également d’aborder la notion d’épaisseur du film, ou la concentration du vernis utilisé. Il est probable également que la nature des pigments utilisés aient une influence que la conductivité d’une œuvre. Comment un pigment métallique pourrait émettre la même électricité électrostatique qu’un pigment d’origine végétale258? Toutefois, quelques-unes de ces questions sortent du cadre pratique de la restauration et se dirigent davantage vers l’expérimentation plus théorique. Assurément, il faudrait beaucoup plus de temps pour aborder tous les effets de l’électricité statique dans le domaine de la peinture artistique.

D. Approfondissement permettant de d’affirmer ou d’infirmer la compatibilité des vernis antistatiques avec les peintures Si toutes les interrogations évoquées plus haut ne peuvent pas être traitées, L’analyse comparative de l’électricité statique des différents vernis utilisés en restauration en vue de mettre au point un vernis antistatique nécessiterait de réels approfondissement. En effet, le sujet étant novateur, aucune connaissance n’existe sur la stabilité et la réversibilité des vernis antistatiques, ainsi que leur compatibilité avec les couches picturales. Ces paramètres seraient à connaitre avant de pouvoir prétendre généraliser l’utilisation des antistatiques à la restauration. modIfIcAtIon dE l’AsPEct EsthétIquE dEs vErnIs

L’aspect des vernis était visuellement différent en fonction des antistatiques ajoutés. Aucune des résine n’a réagi de la même manière à l’adjonction d’antistatique, certains ont gardé leurs qualités de transparence, d’autres sont devenus légèrement mate, d’autres encore ont révélé des traces

258. Le rôle des pigment a déjà été étudié dans : ABBOTT Jamie, SMITH Gregory, The role of static charge in dirt accumulation on painted surfaces, Présentation réalisée au 37ème meeting annuel de l’American Institute of Conservation, Los-Angeles 2009 151


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blanchâtres inacceptables pour un vernis. Une mesure comparative avec un brillancemètre259 permettrait de quantifier ce phénomène, et ainsi de savoir quels vernis peuvent recevoir des antistatiques ou non. stABIlIté Au vIEIllIssEmEnt

Il serait intéressant de savoir si la conductivité des vernis, sans et avec antistatique, est la même lorsqu’ils sont jeunes ou vieillis. Des échantillons sur verre260 ont déjà été vieillis, au four durant cinquante heure à la température de transition vitreuse de chaque nature de vernis. Ces vieillissement accélérés avaient été réalisés dans l’objectif de se procurer une nouvelle fois le mesureur électrostatique, mais au vu du manque de compatibilité entre les besoins de cette étude et les capacités de l’appareil, il a été décidé de remettre à plus tard ces mesures. tEsts dE révErsIBIlIté

Toute opération de restauration doit être réversible, notamment l’application de vernis, voué à s’oxyder. Une des dernières études à mener pour appréhender la compatibilité des vernis antistatiques avec les œuvres d’art est la solubilité de ces résines dans des solvants peu polaires. Une erreur de température lors des vieillissement accéléré a permis de faire un constat visuel : les échantillons de Régalrez®1094 qui avaient reçu de l’antistatique dans la résine se sont montrés plus résistant à la chaleur. En effet, la température de transition vitreuse avait été malencontreusement dépassée, et les échantillons de vernis normaux présentaient de nombreuses bulles, tandis que les échantillons de vernis additionné d’antistatique présentaient encore une surface lisse. Cela montre que nombreux paramètres sont encore à étudier dans ce vaste sujet.

259. A l’heure actuelle, nous sommes en contact avec une personne prête à nous louer l’appareil. 260. Les échantillons sur plexiglas® avaient été introduits au four, mais sous l’effet la température de transition vitreuse élevée du Laropal®A81 les supports se sont déformés. Le plexiglas® a été jugé inadapté pour les tests de vieillissement de la résine et ceux de réversibilité, car ce plastique est sensible aux solvants. 152


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conclusIon Réaliser cette étude, fût une grande source de découvertes mais aussi de questionnements, et surtout de surprises. L’analyse comparative de la conductivité des différents vernis utilisés en restauration a permis de mettre en exergue que l’électricité statique des vernis est un phénomène qui existe bien et qu’il est dommage de laisser de côté. Ces recherches ont permis d’aboutir à des premières conclusions au sujet de l’électricité statique des vernis de restauration. Finalement, le vernis dammar peut être considéré comme assez électrostatique tandis que le Laropal®A81 l’est beaucoup moins et que les vernis Régalrez®1094 et Paraloïd®B72 ne le sont pratiquement pas. Si la justesse du moyen de mesure ne permet pas de tirer des conclusions franches, les tendances données sont tout de même vérifiées par une étude préalablement réalisée261, le protocole est viable. L’ajout d’antistatique est un sujet beaucoup plus expérimental, qui nécessite de multiples tests supplémentaires avant de pouvoir être généralisé. Toutefois, l’étude ouvre une possibilité de recherche, qui se veut passionnante. En effet, les antistatiques se sont montrés tout à fait miscibles aux vernis de restauration et de plus ont présenté des résultats plutôt satisfaisants. C’est avec beaucoup d’humilité que les résultats sont présentés, alors que certaines erreurs sont trop importantes pour être acceptables. Ce sujet a été traité avec beaucoup d’engagement et de remise en question, mais les quelques résultats jugés intéressants nous ont convaincue a vouloir présenter cette étude, si novatrice en certains points qu’elle n’en reste qu’à ses balbutiements.

261. ABBOTT Jamie, SMITH Gregory, Op. Cit 153


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CONCLUSION GÉNÉRALE C’est avec beaucoup d’émotions que nous concluons ces deux années de travail intense autour du Portrait de Madame Courciéras et sa fille. Si le travail a demandé toujours plus d’engagements et de concessions, c’est avec passion et curiosité que nous l’avons réalisé. Toutes les étapes, de l’élaboration à la finition de ce projet, nous ont apporté de nombreuses connaissances, mais aussi de la maturité et de la confiance. La recherche historique autour de la provenance et de l’histoire de l’œuvre fût palpitante. En effet, réussir à trouver les clés, petit à petit, pour comprendre l’histoire de cette œuvre, mais surtout la faire revivre en retraçant dans ce mémoire la relation entre le peintre et les modèles fût un véritable honneur. De plus, ce travail nous a permis de nous plonger dans le contexte artistique parisien, si foisonnant, des années 1930. L’état critique du tableau à son entrée dans l’atelier était un véritable défi personnel, puisque les nombreuses altérations permettaient de réaliser une restauration très complète. Les choix de conservation et de restauration ont toujours été étudiés avec la plus grande déontologie et beaucoup de remise en question personnelle. Travailler sur une œuvre jamais restaurée demandait d’autant plus de précautions, pour préserver le plus possible son intégrité, et sa patine. La stabilité du traitement a également été un critère particulièrement important dans la mise en place du protocole de restauration. Enfin, la partie technico-scientifique a permis de développer une recherche, qui nous tenait véritablement à cœur. Cinq années auparavant, l’idée de mener à bien une telle expérimentation nous aurait paru insurmontable. Toutefois, la maturité acquise lors de ces cinq années d’étude ainsi que notre curiosité naturelle nous ont menée à nous questionner sans cesse sur les phénomènes qui nous entourent. Plus particulièrement quand ceux ci peuvent aboutir à améliorer nos connaissances en conservation restauration. De nouveaux questionnements soulevés lors de cette recherche nous laissent entrevoir la possibilité de l’approfondir. Conclure ce travail nous permet d’imaginer avec bonheur la vie passionnante à laquelle nous nous destinons.

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ANNEXES HISTOIRE DE L’ART

Figure 153 : Palette de l’artiste, Collection particulière

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Annexe 1 : Échanges avec un des descendants de l’artiste confirmant l’attribution de l’œuvre Les avancées technologiques des dernières décennies sont rapides. Il faut savoir et surtout oser se servir de tous les moyens qui sont à notre disposition, même si cela peut de prime abord paraître peu conventionnel. Un des arrière petits-fils de Marcel Caud a créé une page publique au sujet de son aïeul sur le réseau social Facebook. Une recherche sur internet nous a permis de trouver cette page et nous avons contacté le gérant de celle-ci, en lui demandant de confirmer ou d’infirmer la signature de son ancêtre. C’est ainsi que sont nés les multiples échanges entre les descendants de Marcel Caud et nous-même. Ici sont présentés les premiers messages sur lesquels se sont fondés l’étude du Portrait d’une mère et sa fille qui est devenu, au fil de nos recherches, le Portrait de madame Courciéras et sa fille.

15/03/2015 « Bonjour, Je travaille un tableau signé «Marcel Caud, 1930» représentant une mère et sa fille. Serait-il possible que nous parlions du même peintre ? Je vous remercie d’avance, Ophélie Soulas» «Bonjour Ophélie. Je peux vous répondre effectivement que le tableau que vous avez acheté est bien du même Marcel Caud. Ce peintre est coté. Il signait aussi parfois «Caud» tout simplement. Pour ma part, je suis son arrière petit-fils et auteur de cette page que j’ai créée pour essayer de mettre en contact des personnes qui sont attachées à la palette de ce peintre qui pour moi est un grand peintre. Bravo pour votre acquisition.»

09/08/2015 «Bonjour, Je vous ai contacté il y a quelques mois déjà. Comme vous le savez j’étudie un tableau de votre arrière grand-père. Je suis étudiante en conservation et restauration de peintures, et j’ai choisi ce tableau dans le but d’en faire mon œuvre de mémoire de fin d’études. Cela consiste à rédiger environ 200 pages, que l’on peut séparer en trois parties : historique, scientifique et pratique de la restauration. Je viens donc à vous pour savoir si vous aviez des documents qui pourraient m’aider dans ma recherche historique (histoire du peintre, inventaire des tableaux réalisés, clientèle (j’aimerais identifier les personnages qui figurent sur le portrait), photographies...), ou si vous pouviez me diriger vers des livres, archives publiques, des personnes qui ont déjà travaillé sur le sujet ou seraient intéressés par mon travail. L’aboutissement de cette recherche visera à une meilleure compréhension de l’œuvre, et à faire une synthèse sur le travail de votre ancêtre. Dans l’espoir de réponses positives, Je vous souhaite une bonne fin d’été. Ophélie» 156


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04/10/2015 «Bonjour, J’ai lu attentivement votre message. Alors, nous n’avons malheureusement pas de documentation sur Marcel Caud, pas de livres non plus. Je suis en contact permanent avec ses fils, mais ils n’ont rien de ce que vous recherchez à mon avis. Pour identifier les personnages sur les œuvres, cela reste possible, encore faudrait il pouvoir avoir des photos. En somme la tâche est ardue, mais si vous réalisez ce mémoire, il est évident que nous serions intéressés.»

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Annexe 2 : Échanges avec un des descendants 262des modèles représentés confirmant l’identité des modèles

Re: Travail historique à propos d'une peinture signée Marcel Caud

De : Philippe Truffault <p-truffault@artefrance.fr> Objet : Re: Travail historique à propos d'une peinture signée Marcel Caud

ven., 21 oct. 2016 17:52 1 pièce jointe

À : ophelie soulas <ophelie.soulas@laposte.net> Bonjour, je me souviens très bien de ce tableau. Mais je vous répondrai plus précisément ultérieurement, le temps de collecter quelques souvenirs (et aussi ceux de mon frère et ma soeur). En revanche, ne vous étonnez pas si cette réponse annoncée n’arrive pas tout de suite, mais elle arrivera ! Bonne fin de journée et bin week-end…

De : "ophelie.soulas@laposte.net" <ophelie.soulas@laposte.net> Date : vendredi 21 octobre 2016 17:15 À : Philippe Truffault <p-truffault@artefrance.fr> Objet : Travail historique à propos d'une peinture signée Marcel Caud Renvoyer - De : <p-truffault@artefrance.fr> Bonjour monsieur, Je vous remercie d’avoir accepté de me donner votre contact et espère ne pas vous importuner. Je suis étudiante en conservation et restauration de peinture à l’école de Condé. Actuellement en cinquième année, je prépare un mémoire sur la restauration d’un tableau. Mon travail se compose d’une partie technique de restauration, ainsi qu’une partie scientifique et pour finir une étude historique sur l’œuvre que je traite. En mai 2015 j’ai fait l’acquisition, dans le but d’un faire mon tableau de diplôme, d’un portrait d’une mère et sa fille, daté de 1930 et signé Marcel Caud. Je vous transmet des photographies de ce tableau en pièce jointe. Pour mon travail historique, il m’est nécessaire de retracer la vie de cette peinture : pourquoi elle a été commandée, par qui, quel est le lien entre les sujets représentés et le peintre, quelle est l’histoire des commanditaires, où l’œuvre était exposée… Tous ces éléments constituent la valeur historique du tableau, tandis que la qualité picturale en fait la valeur esthétique. Au travers de mes recherches, j’ai pu retrouver les descendants de l’artiste, qui m’ont apporté beaucoup d’informations sur leur aïeul. Un des fils de l’artiste a cru identifier l’enfant, Mariette, fille du docteur Courciéras, proche de la famille Caud. Quelques temps plus tard, un autre descendant du peintre a retrouvé un carnet dans lequel l’artiste listait ses tableaux. On peut y lire « Mme Courciéras et sa fille ». Vous devez comprendre ce qui m’amène à vous. Au travers de mes recherches, en archives, sur internet, j’ai lu entre autre l’avis de décès de votre mère. Je vous présente mes plus sincères condoléances, monsieur. Par la suite, j’ai demandé à la mairie d’Enghien-les-Bains de me transmettre une copie de l’acte de décès, c’est ainsi que me sont parvenus votre nom et votre profession. Je vous ai envoyé un courrier à l’adresse indiquée sur le document que m’avais fourni la mairie mais, ma lettre m’est revenue. Voilà pourquoi je vous contacte aujourd’hui, par le biais d’Arte. Je vous prie d’excuser mon intrusion dans votre milieu professionnel, cependant je n’ai pas trouvé d’autre moyen pour vous aborder. En entrant en contact avec vous, j’ai l’espoir que vous puissiez confirmer, ou infirmer, l’identité des personnes peintes sur mon tableau. Dans la liste des portraits réalisés par Marcel Caud, il est écrit qu’un portrait représentant Monsieur Courciéras a également été peint, sauriez vous par hasard ce qu’il est devenu ? Des dizaines d’autres questions me viennent à l’esprit, mais je ne voudrais pas être trop intrusive dans votre histoire familiale. Je reste toutefois à votre entière disposition, si mon travail vous intéresse. Dans l’espérance de vous lire prochainement, veuillez recevoir, monsieur, mes sentiments respectueux. Ophélie Soulas

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262. L’adresse e-mail ainsi que le nom de ce correspondant ont été masqués car ce dernier souhaite garder l’anonymat. 158


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Annexe 3: Extraits du carnet Liste de mes portraits, répertoriant les portraits réalisés par Marcel Caud Le carnet comporte six pages. Il permet à l’artiste de recenser ses œuvres et de se souvenir de certains détails les concernant. Comme par exemple le format, la profession de la personne représentée ou l’attitude adoptée par le modèle. Les inscriptions précédées d’une croix désignent les tableaux que l’artiste préfère. Il a donc considéré donc les deux portraits de la famille Courciéras comme plutôt réussi.

.

Figure 154 : Les contes de Perrault, représentant la femme de l’artiste et leurs enfants. Ce tableau a été exposé en 1928 au Grand-Palais lors du 141ème salon de la Société des Artistes Français. Page 2 du carnet

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Figure 155 : Le portrait de Madame Courciéras et sa fille ainsi que son pendant, le portrait du Docteur Courciéras sont répertoriés à la page 3

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Figure 156 :

L’artiste réalise soixante quinze figures dans la chapelle de

Boulogne. Page 4

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Annexe 4: Extraits du catalogue du Salon de la société des Artistes Français de 1928 Marcel Caud a exposé lors du Salon de la société des Artistes Français de 1928, qui était la 141ème exposition officielle des Beaux-Arts, au Grand-Palais. Trois pages du catalogue du salon sont présentées ici. Ce sont celles où les œuvres de Caud, Adler et Laurens, deux de ses enseignants, sont évoquées. Le parallèle entre les œuvres de ces trois artistes permet de voir que Caud se place bien entre ses deux maîtres, avec sa toile figurant une mère lisant à ses trois enfants, dans un environnement très sobre. En effet, le tableau d’Adler présente un vieillard modeste dans un style réaliste, tandis que Laurens représente une fillette idéalisée.

Figure 157 : Page du catalogue Salon des Artistes Français mentionnant Marcel Caud

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Figure 158 : Page du catalogue du Salon des Artistes Français mentionnant

Figure 159 : Page du catalogue du Salon des Artistes Français mentionnant

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ANNEXES RESTAURATION

Figure 160 : Au cœur de la matière, vue en coupe d’une écaille de couche picturale au microscope électronique à balayage

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Annexe 1 : Protocole d’allègement de vernis L’allègement de vernis est une étape très difficile de la restauration. Obtenir une épaisseur de vernis similaire sur l’ensemble de la couche picturale nécessite une attention particulière et des connaissances techniques. Cette opération peut être très rapidement poussée trop loin. En revanche, c’est un des traitements ou le résultat après restauration est le plus spectaculaire, dans la cas d’un tableau dont le vernis est largement oxydé. Le protocole de dévernissage est établi après quelques tests fondamentaux, permettant d’identifier la nature du vernis sur le tableau ou au moins les solvants auquel il réagit. Très généralement, cette opération se fait par combinaison d’un solvant actif, capable de solubiliser correctement le vernis, et d’un solvant dit passif, qui a le rôle de véhicule du solvant actif. Le solvant passif permet le contrôle de l’action du solvant actif en minimisant son effet. La pénétration capillaire, ainsi que la tension superficielle et la rétention du solvant sont des paramètres à prendre en compte avant de procéder au choix définitif du solvant. En effet, le solvant idéal ne migre pas trop en profondeur dans la couche picturale, sa vitesse d’évaporation doit être modérée. Si l’évaporation est trop lente, le solvant séjourne de manière dangereuse dans le feuil, risquant de solubiliser des éléments essentiels à la peinture263. Si l’évaporation est trop rapide, la couche picturale ou le film de vernis restant peuvent développer un blanchiment, dû à l’énergie prise par le solvant, à la surface du substrat, pour permettre sa vaporisation. La toxicité du solvant sera également un critère de choix important.

1. Les tests au solvant pur Chaque couleur du tableau a fait l’objet de tests, pour vérifier l’innocuité des solvants sur ces dernières. De plus, en répétant les expérimentations, la compréhension globale de la réaction des matériaux constitutifs du tableau est plus complète. Un test empirique mais permettant de déterminer rapidement l’action des différentes familles de solvant sur la couche picturale est le test au solvant pur. Il est le premier à être réalisé. Un fin bâtonnet ouaté, imbibé de solvant est déroulé sur une petite zone de test. La réaction du vernis ou de la couche colorée est observée, pour voir les possibles dégorgements de couleur, les gonflements ou les appauvrissement de matière. L’intérêt est de donner une direction pour le futur choix des solvants d’allègement de vernis. Chaque grande famille de solvants utilisés en restauration est représentée par un solvant fréquemment utilisé. Dans ce travail, le solvant testé en premier lieu est l’eau. Cela permet d’envisager ou proscrire un traitement aqueux pour l’allègement de vernis ou le rinçage d’un probable gel. La famille des alcools est représentée par l’alcool éthylique. Les hydrocarbures aliphatiques sont évoqués par le white-spirit. Le xylène est utilisé pour la famille des hydrocarbures aromatiques. Enfin, l’acétone met en évidence les caractéristiques des cétones. Les réactions de ce test ne sont pas homogènes sur l’ensemble des surfaces sur lesquelles ont eu lieu les expérimentations. Ces résultats variés proviennent peut être de l’épaisseur irrégulière du vernis ou de son encrassement non uniforme. Néanmoins, des tendances ont pu être relevées.

263. SUTHERLAND Ken, Solvent-Extractable Components of Linseed Oil Paint Films. Studies in Conservation, Vol. 48, No. 2 (2003), p 111 166


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l’EAu

L’évaporation de la goutte d’eau est lente, entre 5 et 10 minutes selon les zones. La mouillabilité de la surface est faible, la goutte reste très ronde. Une fois sec, l’emplacement testé ne présente aucune marque.

lEs AromAtIquEs

Pour le cas du xylène, dans les zones où le solvant a le mieux agit, au toucher, juste après application, le vernis est poisseux. Le solvant fuse rapidement dans les parties chancies tandis qu’il s’évapore en moins d’une minute sur les zones saines. Après évaporation du solvant, la surface semble plus lisse bien que parfois on ressente une petite granulosité. L’observation visuelle permet de voir que les couleurs sont saturées de nouveau, le film est plus brillant. La fonte de la résine à l’emplacement de la goutte est dans la plupart des cas nettement visible.

lEs Alcools

Pour ce qui est de la réactivité à l’éthanol, l’évaporation est inférieure à quarante-cinq secondes. Il arrive que des résidus blanchâtres soient perceptibles sur la zone testée, pour d’autres cas, toute la zone présente un blanchiment. Un autre type de réaction qui a été observé est le gonflement de la résine, qui est poisseuse durant environ cinq minutes. Tant que la résine est réactivée, la surface est brillante. Ensuite, une auréole blanche se forme. La dernière réaction est la dispersion instantanée du solvant dans la résine, dont les craquelures sont résorbées. La trace reste brillante, les couleurs y sont saturées. La résine est régénérée. Parfois, la surface est un peu plus rugueuse.

lEs AlIPhAtIquEs

L’absorption du white-spirit est rapide. Les observations courantes sont la légère matité de la surface où le solvant s’est évaporé, ou son blanchiment, parfois sous forme de petites tâches semblables à des efflorescences.

lEs cétonEs

Pour finir, l’acétone s’évapore extrêmement vite de la couche picturale. Généralement, aucune observation n’a été faite. Dans certains cas, la résine présente une très légère solubilisation, la trace est un peu granuleuse, les couleurs légèrement saturées.

Les solvants les plus actifs sont le xylène et l’éthanol, légèrement l’acétone (le manque d’efficacité est probablement dû au fait que ce solvant est extrêmement volatil). De plus, il est connu que les vernis triterpéniques sont solubles dans les alcools et dans les aromatiques264. Le xylène est un solvant très toxique, le vernis étant soluble dans d’autres solvants, il est envisa264. HORIE Velson, Materials for conservation. Organic consolidants, adhesives and coatings. New-York, Bitterworth-Heinemann, 2010.p.257 167


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geable d’écarter les aromatiques de cette étude. Toutefois il faut prendre en considération le fait que plus les solvants sont polaires, plus ils sont dommageables pour les couches picturales. En effet, les aromatiques extraient moins de composant solubles de la couche picturale que les cétones et les alcools265. Le désavantage des aromatiques est leur importante rétention dans les couches picturales, ce qui peut engendrer des phénomènes comme la lixiviation.

2. Le protocole réalisé avant les intervention de support Les tests réalisés avant les intervention de support se sont montrés inadaptés à l’œuvre après le début des opérations de restauration. Les refixages aqueux ainsi que le rentoilage ont rendu le vernis moins soluble dans les solvants peu polaires. Le premier protocole est détaillé ici et celui qui a été finalement adopté est exposé plus loin.

a. Les solvants de Crémonesi

En premier lieu, quelques solvants de la liste de Crémonési266 sont testés. Ce restaurateur propose d’utiliser des mélanges simples, dans lesquels peu de solvants entrent en jeu; l’éthanol, l’acétone et le cyclohexane à des pourcentages variés pour dévernir les tableaux. Le mélange qui semble intéressant pour dans le cas de ce tableau est le «CE», mélange de cyclohexane et d’éthanol. Le solvant actif est ici l’éthanol et le véhicule, le cyclohexane. Les proportions les plus efficaces ici sont dans le CE5 (50% cyclohexane / 50% éthanol).

Figure 161 : Test au CE1

Figure 162 : Test au CE5

Figure 163 : Test au CE9

b. Les solvants de Masschelein-Kleiner267

Pour confirmer le choix de solvant, certains mélanges de la liste de Masschelein-Kleiner sont expérimentés. Ils sont sélectionnés en fonction de la nature de ce qu’ils doivent solubiliser. Les solvants de la liste de Masschelein-Kleiner ont été testés à titre indicatifs. Ces mélanges sont lourds donc peu favorables à un traitement respectueux de l’œuvre. Ils sont également toxiques pour le restaurateur. Le travail de Masschelein-Kleiner est relativement ancien, mais l’utilisation de ces solvants pour des tests permet d’appuyer les hypothèses déjà ouvertes par les tests précédents. Le 265. SUTHERLAND Ken, The Extraction of Soluble Components from an Oil Paint Film by a Varnish Solution, Studies in Conservation, Vol. 45, No. 1 (2000), p 57 266. CREMONESI Paolo, L’uso dei solventi organici nella pulitura di opere policrome, Padova, Il Prato, 2004 p X 267. MASSCHELEIN KLEINER Lilian, Les Solvants, Bruxelles, Institut Royal du Patrimoine Artistique, 1994.PX 168


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restaurateur peut adapter des mélanges selon ses observations Dans le cas présent, seul quatre mélanges sont sélectionnés. Le mélange MK6, composé de 50% d’isooctane et 50% d’isopropanol est assez similaire au mélange CE5 puisqu’il est composé d’un alcool et d’un solvant aliphatique. Le MK7, composé de 50% de toluène et de 50% d’isopropanol, devrait, d’après les observations liées aux tests à la goutte, avoir une efficacité très bonne pour la suppression du vernis. Il faut tout de même être vigilant car ce sont deux solvants très actifs sur le vernis. Le mélange est effectivement très efficace. Le MK8, dont la composition est 70% d’isooctane,10% d’éther et 20% d’éthanol, présente également de très bons résultats. Pour terminer cette série, le MK9 est testé. Il est composé de 55% d’isooctane, 15% d’éther et 30% d’éthanol. Le mélange est efficace, mais les résultats sont moins concluants qu’avec le MK8. Les résultats des solvants numéro 7 , 8 et 9 sont les plus satisfaisants.

Figure 164 :Test au MK6

Figure 165 : Test au MK7

Figure 166:Test au MK8

Figure 167 : Test au MK9

c. Mise au point d’un protocole

Toutes ces constatations ont permis de confirmer que le vernis appliqué sur le tableau est bien une résine triterpénique et de déterminer avec beaucoup de certitude qu’il s’agit d’un vernis mastic. L’oxydation d’un vernis mastic produits des résidus polaires. Avec le temps, l’oxydation de la résine fait augmenter sa polarité. Cela signifie que des solvants plus polaires sont nécessaires pour réaliser l’allègement d’un film vieilli par rapport à un film récent 268. Grâce au diagramme de solubilité du vernis mastic, et au triangle de Teas, un mélange de solvant a été mis au point de manière à toucher au plus près la zone de solubilité du vernis mastic en évitant les zones dans lesquelles l’huile pourrait être endommagée. Après plusieurs calcul à l’aide du triangle de Teas, la solution qui semblait la plus adaptée avant le début des interventions était composée de 57% de cyclohexane, 38% d’isopropanol et 5% d’alcool benzylique (pour ralentir l’évaporation). Les paramètres se solubilité de ce solvant sont 71,72 en force de dispersion, 7,88 en force de polarité et 20,4 en force hydrogène. Toutefois, le vernis s’est montré quasiment insoluble dans ce mélange après les premières interventions.

268. MILLS John, WHITE Raymond, The organic chemistry of museum objects, Second edition. New-York, Rutledge, 2011. Page 105 169


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3. Protocole revu après les interventions de support

Le vernis est devenu beaucoup plus résistant aux solvants peu polaires. De plus, le rentoilage ayant été réalisé, il est impossible d’utiliser des solvants basiques ou de l’alcool benzilique qui dénaturent les protéines. a. Régénération du vernis

Parfois, travailler avec un solvant puissant de manière très rapide dans l’objectif de régénérer la résine et ensuite pouvoir l’alléger délicatement avec un solvant plus doux est préférable à l’utilisation d’un solvant moyennement fort pendant un temps prolongé. Il a donc été décidé d’utiliser un mélange azéotrope, car l’utilisation d’un tel mélange de solvant permet une évaporation rapide et simultanée des deux entités. Cela permet d’éviter qu’un solvant à rétention longue ne reste en profondeur dans les couches picturales. Le vernis à alléger a montré une sensibilité aux solvants aromatiques et aux alcools. Le mélange de xylène à l’éthanol permet une évaporation beaucoup plus rapide du xylène que lorsque les deux solvants sont utilisés à des proportions différentes269. L’utilisation du mélange azéotrope composé précisément de 86,1% d’éthanol et de 13,9% de xylène constituera en un seul passage rapide, permettant la régénération du vernis. Cette technique est acceptable car le vernis est épais et que le feuil de peinture est protégé.

b. Utilisation de gels

L’utilisation de gels de solvant permet de limiter la pénétration de solvant dans la couche picturale. De plus, atteindre le creux des empâtements est plus aisé qu’avec un bâtonnet ouaté car on peut utiliser une brosse douce qui respecte davantage les reliefs de la peinture. Les gels de solvant sont réalisé grâce à de l’Ethomeen C12 et du Carbopol 934 pour les gels composés de plus de 70% de solvants aromatiques ou de solvants aliphatiques. Pour mettre en gel les solvants plus polaires tels que les alcools ou les cétones, c’est l’Ethomeen C35 et le Carbopol 934 qui sont utilisés270. Le gel composé de 70% de cyclohexane et de 30% d’éthanol sera privilégié, car il est moins agressif pour la couche colorée. Toutefois, dans les zones où le vernis est plus épais ou plus difficile à enlever, le travail devra se faire avec un gel composé de 30% de cyclohexane et de 70% d’éthanol. Le gel est essuyé juste quelques secondes après avoir été posé et rincé avec un mélange de cyclohexane et d’éthanol. Encore une fois, les proportions de solvant varient en fonction de la zone travaillée. Si la couleur est sensible, ou si le vernis, plus fin, s’est allégé facilement, la couche picturale est rincée avec un mélange de 90% de cyclohexane et 10% d’éthanol. C’est par exemple le cas du fond vert. La plupart des autres zones ont été rincées au mélange de 70% de cyclohexane et 269. STAVROUDIS Chris, Azeotropes from A to Z . WAAC Newsletter Volume 28 Number 2 May 2006 p. 17 270. Informations provenant d’un cours de Marguerite Szyc intitulé Les différentes méthodes des tests de solvants, document de travail, dispensé en 2015 170


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30% d’éthanol. En revanche, certaines zones sur lesquelles le vernis était très oxydé ont été rincée à l’aide du mélange de 30% de cyclohexane et 70% d’éthanol.

c. Retrait mécanique

Dans les empâtement les plus profonds, le retrait mécanique des résidus de vernis est la solution la plus adaptée, elle permet d’éviter un apport trop important sur la couche picturale déjà allégée. L’application localisée d’un mélange de 70% de cyclohexane et 30% d’éthanol permet de ramollir localement la résine qui est ensuite ôtée au scalpel.

d. Le retrait des chancis

Les chancis sont une altération importante sur l’œuvre. Leur retrait est primordial. La réactivation au mélange azéotrope ne suffit pas à régénérer correctement le vernis, qui en plus d’être chanci est fortement oxydé. Heureusement les parties touchées par le blanchiment sont des zones plutôt sombres, ce qui permet de pousser moins loin l’allègement de vernis. En revanche, les pigments noirs, bruns et rouges qui composent cette partie de l’œuvre sont particulièrement sensibles aux solvants, même relativement doux. Le travail dans cette région du tableau est très délicat et nécessite d’emploi d’un solvant fort pour alléger très rapidement le vernis sans que le solvant n’ait migré dans la couche picturale. Généralement, la régénération des chancis se fait avec des solvants à évaporation lente, qui permettent de régénérer doucement la résine. Un solvant, souvent employé pour la régénération des chancis de vernis est le mélange de 75% de toluène et 25% de dyméthyformamide. Ces deux solvants étant très toxiques pour le restaurateur, une alternative a été cherchée. Les paramètres de solubilité ont pu être fortement approchés par un mélange de 30% de lactate d’éthyle et 70% de xylène. Toutefois, l’effet sur les chancis n’était pas du tout le même. Le travail a donc été réalisé localement, et avec beaucoup de prudence et très rapidement avec le mélange de la liste de Masschelein-Kleiner, Toluène/DMF (75/25). La couche picturale étant très sensible, un passage avec 90% de cyclohexane et 10% d’éthanol est utilisé, au moins une heure après la régénération sinon des dégorgements apparaissaient, pour homogénéiser la surface qui présentait des matités et des brillance.

171


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.

Figure 168 : Diagramme de solubilité de la résine mastic, issue de HORIE Charles Velson, Op. Cit,

p. 412. Les différents solvants utilisés pour l’allègement ont été replacés sur le diagramme

172


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Annexe 2: Protocole de comblement de lacune, de réintégration colorée et de vernissage Le tableau a été allégé de son vernis principalement à l’aide d’éthanol, de cyclohexane, de xylène et de dyméthyformamide très localement. En fonction des zones du tableau, la couche picturale ne réagissait pas de manière homogène. Cela s’explique par les différents pigments utilisés. Les couleurs brunes, rouges et vertes sont connues pour leur tendance à dégorger. En revanche, les couleurs claires, souvent additionnées de blanc de plomb ou de titane sont très stables. De plus, la relative jeunesse271 de la couche picturale ne permet pas de certifier que l’huile est totalement polymérisée. Cela explique la difficulté du dévernissage. Malgré les grandes précautions mises en œuvre, quelques traces de pigment étaient présentes sur les cotons. Il était malheureusement impossible de laisser une épaisseur si importante de vernis chanci et oxydé. Dans les zones sensibles, l’allègement a été très peu poussé et s’approche plus d’une régénération du film que d’un dévernissage. La peinture a donc été fragilisée par les opérations de restaurations, qui étaient tout de fois nécessaires. Les futures interventions devront êtres accomplies en prenant compte des faiblesses de la couche picturale. Après l’allègement du vernis, l’aspect de la couche d’huile est légèrement brillant, comme une peinture fraiche, la matière n’est pas lixiviée ni épidermée. La peinture est toutefois mâte dans la zone présentant l’important chanci. Il est certain que cette zone a été grandement fragilisée et elle présente probablement un début de lixiviation. Dans de petites zones, où la couche de peinture était très fine (notamment au niveau du fond vert), quelques usures sont visibles. Les remontées pigmentaires observées lors de l’allègement de vernis n’ont donc pas de conséquence directe sur l’apparence de la couche picturale, car la zone noire, principalement concernée, a une apparence tout à fait correcte. Le travail de coloriste du peintre est révélé, ainsi que son traitement de la matière en demi-pâte.

lE vErnIssAgE

Le vernis a un rôle protecteur très important pour la peinture272. C’est également un matériau dont le vieillissement est assez rapide et dont la dérestauration doit se faire correctement. Il doit rétablir les inhomogéneités dues à l’allègement de vernis qui n’a pas été avancé au même degrés sur l’ensemble de la surface. Certaines zones sont un peu plus brillantes, cela est parfois dû à la quantité de liant présent dans la peinture, mais aussi à la surface plus ou moins empâtée. La partie qui avait été chancie semble pauvre en liant. La couche picturale pourrait être nourrie avec une résine proche de la nature du vernis original, 271. Le tableau a quatre vingt six ans au moment de sa restauration. On admet généralement qu’une huile a terminé sa polymérisation au bout de quatre vingt ans 272. «Un vernis idéal doit être transparent, incolore et avec un indice de réfraction compatible avec le film de peinture qu’il protège. Il doit être dur et résister à l’humidité et aux polluants. Il doit également être facilement réversible dans des solvants doux. Le plus important est qu’il conserve ces propriétés aussi longtemps qu’il reste sur la peinture.» THOMPSON John M. A. , Manual of Curatorship: A Guide to Museum Practice, Oxford ; London ; Boston [etc.] : Butterworth-Heinemann, 1994, cop. 1992. p.282-283 173


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de manière à respecter au maximum la stratigraphie crée par l’artiste. Le peintre a travaillé en ajoutant du vernis à son huile, resaturer les couleurs avec une résine naturelle273 est donc préférable. En effet, vernir une œuvre «permet de contrecarrer les embus, homogénéisant ainsi les brillances et la saturation des couleurs»274 Deux possibilités paraissent envisageables pour le vernissage. Un vernis dammar posé en première couche permettrait d’être en lien avec la fine couche de vernis original restant après l’allègement. Les solvants de mise en œuvre du vernis de restauration vont régénérer le film de résine d’origine. Véhiculer une résine triterpénique sur une résine identique plus ancienne favorise la cohésion des couches entre elles. Le film de vernis nourrissant la couche picturale sera homogénéisé. Il retrouvera des propriétés proches d’un vernis neuf, tout en respectant le vieillissement naturel des matériaux. Travailler avec un vernis naturel, qui tend à jaunir par l’oxydation peut être discuté. D’un côté, le vieillissement naturel des matériaux est un phénomène qui respecte l’histoire matérielle de l’œuvre, et qui apporte des informations aux observateurs quant à l’âge de la peinture. L’essentiel étant que le vieillissement soit homogène entre tous les matériaux constitutifs du tableau. D’un autre côté, appliquer un vernis qui, en s’oxydant, nécessitera des solvants de plus en plus polaires275 pour être ôté, est peu déontologique. Notamment parce que la majorité des teintes du tableau sont assez sensibles aux solvants, bien qu’il soit possible de dire que le temps nécessaire au vernis pour être dégradé aura permis à la peinture de terminer sa siccativation. Cependant, la distinction entre vernis original et vernis de restauration ne sera plus possible, ce qui rend difficile l’étude du travail de l’artiste. Le portrait peint par Marcel Caud n’avait jamais subi de restauration. Il est donc dans un état d’authenticité rare, qu’il est impératif de préserver. Il est admis qu’une peinture doive subir plusieurs fois dans sa vie des allègement de vernis. Chaque intervention est une source de risques. Lixiviation, abrasion, épidermage, sont des altérations dues régulièrement à la restauration. Repousser, ne serais-ce que de quelques années, la nécessité d’alléger le vernis d’une œuvre permet de retarder les éventuelles altérations. Le vernis qui sera appliqué sera donc un vernis synthétique. Le vernis le plus adapté aux critères cités précédemment est le Regalrez® 1094. En effet, ce vernis est une résine hydrocarbure hydrogénée. Elle est solubilisée dans des solvants hydrocarbures aliphatiques, famille de solvant très peu nocive pour les couches picturales. Les autres vernis qui sont à notre disposition doivent être

273. Les vernis synthétiques existaient déjà, mais n’étaient pas encore utilisés lors de la création de l’œuvre 274. Grazia Nicosia, « Le vernis des apparences », CeROArt [En ligne], p.5. mis en ligne le 14 avril 2010, consulté le 25 janvier 2017. URL : http://ceroart.revues.org/1483 275. STONER, Joyce Hill, RUSHFIELD Rebeca, Conservation of Easel Paintings, London, NewYork, Routledge, 2013,p. 530 174


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solubilisés par une certaine part de solvant aromatique276. D’ailleurs, ce vernis reste soluble dans les solvants aliphatiques, même après vieillissement et il est considéré comme le vernis de faible poids moléculaire le plus stable277. Le Regalrez® 1094 sera appliqué sur l’ensemble du tableau au tampon. Cette technique permet d’apporter une quantité régulière de vernis, en saturant correctement la couche picturale. Cette technique permet d’apporter moins de résine qu’au spalter, ce qui pourrait engendrer des auréoles à l’arrière de la toile. Une fois que les mastics seront posés, la couche picturale sera de nouveau saturée par apport de vernis. Le passage se fera au tampon ou au spalter, en fonction de la surface de l’œuvre à cette étape de la restauration. Durant la retouche, et après celle-ci, la brillance du tableau et la saturation des retouches sera ajustée par le vernissage à la bombe. Ce moyen de vernir permettra également d’obtenir une surface relativement satinée. Ce sera toujours du Regalrez®1094, solubilisé dans du Shelsoll® D40 qui sera appliqué sur l’œuvre. En effet, sa compatibilité avec la couche picturale et sa grande stabilité privilégient son utilisation pour toute la restauration. La solution de vernis sera stabilisée par l’ajout de Tinuvin® 292278 et de Kraton® G1657279.

lE mAstIcAgE :

Pour éviter d’insérer de trop nombreux matériaux dans la stratigraphie, les mastics seront réalisés de manière traditionnelle, à l’aide de blanc de Meudon et de colle de peau. En effet, le carbonate de calcium est déjà présent dans la préparation. Le Blanc de Meudon est favorisé pour la réalisation de mastic. Il est composé de carbonate de calcium, et contient d’autres minéraux. Les grains sont plus irréguliers ce qui permet une meilleure cohésion. De plus, il est moins blanc que le carbonate de calcium pur. La colle de peau, elle, a été utilisée pour l’encollage de la toile. De plus, elle est insérée dans la stratigraphie lors des opérations de refixage et de rentoilage. Le masticage doit rétablir l’unité de la surface. Pour cela, les mastics seront structurés. Les 276. BALCAR Nathalie, Les Vernis : Usages et propositions issues de recherches récentes. C2RMF, Paris, 2005. p.15 277. STONER, Joyce Hill, RUSHFIELD Rebeca,Op Cit,p. 644 278. Le Tinuvin®292 est un HALS «hindered amine light stabilizer», qui a un rôle d’antioxydant. A un pourcentage de 2% de la masse de résine dans les vernis synthétiques, il permet d’en ralentir l’oxydation. STONER, Joyce Hill, RUSHFIELD Rebeca. Op. Cit. p. 642 279. Le Kraton® G1657 est un styrène-ethylenebutylene-styrene. Il a pour intérêt de rendre plus souple et moins friables les vernis. De plus, ajouté au Regalrez 1094, il imite les fractions polymériques trouvées dans les vernis naturels. De plus, il permet de réduire légèrement la brillance. Le désavantage de cet additif est qu’il nécessite une part de solvant aromatique pour être dissout. Il est ajouté à 3% de la masse de résine sèche. Ibidem p. 643- 644 175


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empreintes seront réalisées avec du silicone280 qui aura été appliqué sur des toiles de contexture proche à celle d’origine. Ainsi, les matrices en silicone pourront être utilisées pour marquer le mastic frais. Deux silicone ont été testés; le Silical® 120281, et les pâtes Patamould®282 de la marque Cléopâtre. C’est le silicone patamould qui a été préféré. En effet, son temps de séchage est beaucoup plus rapide (dix minutes contre douze heures pour le Silical® 120. De plus, sa mise en œuvre est plus facile, car la pâte est plus consistante, tandis qu’il faut réaliser un moule avec de la plastiline pour y verser le Silical® 120. Enfin, la plus importante rigidité du Patamould® rend son application sur le mastic plus facile.

Les pourtours des lacunes seront nettoyés à l’aide d’eau déminéralisée, pour enlever tous les résidus de mastic. Une fois cette opération terminée, l’œuvre sera vernie. Cela permettra que le liant de retouche ne soit pas absorbé par les comblements afin d’éviter d’obtenir des différence de brillance entre la couche picturale et les retouches.

lA rEtouchE :

La couche picturale de l’œuvre est très lacunaire, puisqu’il y a entre 15 et 18% de pertes. Le choix du liant de retouche est très important. Il doit permettre de travailler rapidement, mais sa principale qualité soit être sa stabilité. En effet, une modification optique des couleurs nécessiterait une nouvelle longue restauration. Le solvant contenu dans le vernis de retouche ne doit pas permettre de solubiliser le vernis Régalrez®1094 posé préalablement283. Le liant de retouche réputé comme étant le plus stable, et surtout dont l’utilisation depuis les années 1950 a permis de confirmer son bon vieillissement est la résine acrylique Paraloïd® B72284. Ce copolymère de méthyl acrylate et méthyl méthacrylate reste très bien réversible dans les solvants peu polaire, tels que les aromatiques, ce qui est très avantageux par rapport à la sensibilité de la couche picturale du Portrait de Madame Courciéras et sa fille. En comparaison des différents médiums acryliques à notre disposition, le Paraloïd®B72 est un de ceux qui offre les résultats les plus satisfaisants, tant pour sa souplesse et son faible jaunissement que pour la stabilité de son pH, et le fait qu’il émet peu de substances volatiles285. 280. STONER, Joyce Hill, RUSHFIELD Rebeca, Op. Cit p. 602 281. Le Silical 120 est vendu par CTS, dans le but précis de réaliser des empreintes de surface 282. Le silicone Patamould® est vendu dans les magasins de beaux-arts, mais n’est pas destiné exclusivement à la restauration. 283. STONER, Joyce Hill, RUSHFIELD Rebeca, Op. Cit. p. 613 284. NICOLAUS Knut, Op. Cit p. 281 285. DOWN Jane L., MACDONALD Maureen A., TETREAULT Jean, WILLIAMS R. Scott. Adhésive testing at the Canadian Conservation Institute - An evaluation of selected poly(vinylacetate) and acrylic adhésives. Studies in conservation N°41. 1996. p. 39 176


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Sa température de transition vitreuse de 40°C lui permet de ne pas accrocher la poussière dans des conditions de conservations raisonnables286. Ce liant de retouche est assez mate, ce qui permet la superposition de couches fines, pour obtenir de la profondeur dans la retouche et une saturation correcte. Dilué dans de Dowanol® PM, dont le nom chimique est 1-méthoxy-2-propanol, qui est un glycol, de la famille des alcools supérieurs, le Paraloïd® B72 a une évaporation faible, ce qui lui permet un temps de travail assez long. Le Dowanol®PM remplace les solvants aromatiques, autrefois utilisés pour solubiliser le Paraloïd® B72. Ce solvant, beaucoup moins toxique que les aromatiques reste toutefois dix fois plus toxique que l’éthanol287. Enfin, dans le cas des structures complexe, le Paraloïd®B72 a été développé en gel. Ce liant de retouche a été épaissi avec de la fumée de silice et plusieurs consistances existent, de manière à pouvoir réaliser tout type d’empâtement. Un HALS288 permet de ralentir l’oxydation de la résine.289 Le solvant est l’éther de propylène glycol, de la marque Dowanol®. En raison de l’aspect de notre couche picturale assez empâtée, c’est le Fast-Hard 25 SI qui sera employé sur le tableau de mémoire.

Glazing

Painting

Underpainting

Textures

Impasto

Palette Knife

Recommended uses of B72 Retouching Gels

Fast - Hard 25 Si Fast - Heavy 20 Fast - Light 10 Si Fast - Light 10 Fast - Very Light 7.5 Slow - Heavy 20 Slow - Light 10 Very Slow - Light 10

Figure 169 : Guide d’utilisation des gels de paraloïd®B72. www. artcare.org

286. LOWRY Kate, Retouching with Paraloïd B72, dans ELLISON Rebecca, SMITHEN Patricia, TURNBULL Rachel, Mixing & Matching, approaches to retouching paintings. Archetype Publications, 2010 287. COVE Sarah, Retouching with a PVA resin medium, dans ELLISON Rebecca, SMITHEN Patricia, TURNBULL Rachel, Op. Cit 288. High amine light stabilizer, ce nom regroupe plusieurs stabilisants optiques, comme le Tinuvin 292 289. KONECZNY Peter, An introduction to B72 retouching gels, dans ELLISON Rebecca, SMITHEN Patricia, TURNBULL Rachel, Op. Cit 177


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vErnIssAgE fInAl :

Le vernis final utilisé sera encore le Régalrez®1094 à 18% dans du Shelsoll® D40 et stabilisé avec du Kraton ®G1650 et du Tinuvin ®292. En effet, ses excellentes propriétés en font un très bon vernis final. De plus, son solvant de mise en œuvre est inoffensif pour les retouches réalisées au Paraloïd®B72. Il pourra de plus être allégé lors d’une probable restauration avec un solvant aliphatique, qui ne solubilisera pas les retouches, si le restaurateur souhaite les conserver. Enfin, son aspect satiné convient parfaitement au Portrait de Madame Courciéras et sa fille.

178


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Annexe 3: choix de la fixation pour le montage de la toile au châssis Une toile rentoilée est rigide et épaisse. Des fixations profondes et larges sont nécessaires pour un bon maintient. Pour cela, les agrafes ont été écartées car il a été jugé qu’elles n’avaient pas une surface de pression et un maintient si fort que les semences. Très régulièrement, les restaurateurs sont confrontés à l’oxydation des semences en acier ou en fer qui rouillent au contact de l’air et surtout en présence d’humidité. Si l’oxydation permet que les semences aient une certaine accroche dans le bois du châssis, la rouille présente beaucoup d’inconvénients. En premier lieu, la rouille tâche de manière irréversible les toiles et les oxyde. Le textile est généralement plus fragile et cassant lorsqu’il a été en contact avec les semences rouillées, ce qui provoque dans certains cas la désolidarisation de la toile et du châssis. Ensuite, plus les semences sont oxydées, plus elles sont cassantes. Il n’est pas rare que la tête de la semence se sépare de la pointe, notamment lors du démontage des œuvres. La récupération de la pointe est délicate et engendre souvent des altérations du châssis, ce qui est problématique lorsque celui-ci est sain. Ces réflexions ont amené à trouver une alternative à la semence en acier. La rouille est un phénomène d’oxydation du fer (et donc de l’acier) qui le détruit petit à petit et en profondeur. Un traitement de l’acier permet de le rendre inoxydable, mais c’est un procédé assez coûteux. Il existes des agrafes en inox mais pas des semences. L’oxydation du cuivre, appelée vert-de-gris290 peut être considérée comme une patine plus que comme un élément destructeur. En effet, le vert-de-gris peut être vu comme une couche de protection plus qu’un altération, puisque une fois toute la surface oxydée, la corrosion s’arrête et n’attaque pas en profondeur le métal291. Le vert de gris est de plus utilisé en tant que pigment, ce qui met en exergue sa compatibilité avec les composants des œuvres d’art L’avantage des semences en acier est leur caractère aimanté, qui permet un montage facile grâce au ramponneau aimanté lui aussi. De plus, elles sont relativement bon marché, les semences en cuivre, elles, ont un coût plus élevé. La souplesse du cuivre peut être un désavantage lors du montage, puisque la tête des semences peut se voiler si le geste n’est pas sûr. Des tests de vieillissement archaïques des semences ont été mis en place afin de comparer les réactions des deux métaux face à l’humidité. Pour commencer, une semence en cuivre et une en acier ont été plongées dans de l’eau. Au bout d’une heure, une auréole orangée était présente autour de la semence en acier tandis que la semence en cuivre ne présentait aucune modification. Cela peut s’expliquer par le fait que le cuivre s’oxyde surtout au contact de l’air. Plusieurs tests ont été réalisés, les résultats sont donnés dans le tableau récapitulatif à la page suivante. Nous avons voulu comparer l’oxydation des semences plantées dans du bois et dans une stratigraphie qui se rapproche d’une œuvre, c’est à dire toile et bois. En premier lieu, les semences ont juste été plantées dans les deux stratigraphies différentes. 290. PEREGO François, Op. Cit. p. 767 291. «l’oxyde cuivrique se forme par l’oxydation de l’oxyde cuivreux et jamais par oxydation du métal» BENARD Jacques, L’oxydation des métaux. Gauthier Villars, 1962. Tome 2 p. 669 179


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Ensuite, le même agencement a été réalisé mais les semences ont été vieillies artificiellement par la pose de compresses d’eau de manière régulière sur leur tête. Dans un autre test, les semences ont été enduites de Paraloïd® B44, qui est généralement utilisé pour protéger les métaux de l’oxydation. Ces semences protégées ont été plantées dans les supports également et une partie de ces semences ont été elles aussi mises en contact avec des compresses d’eau. Pour finir, une simulation de papier de bordage a été réalisée, pour voir l’influence de la colle de pâte sur l’oxydation des semences.

Figure 170 : Tableau récapitulatif sur les tests comparatif entre les semences en acier bleui et les semences en cuivre

Figure 171 : Vue de la mise en œuvre de l’expérimentation

Figure 173 : Détail des échantillons après retrait des semences

Figure 172 : Détail des échantillons après retrait des semences 180


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Annexe 4 : fiches techniques

Base de données FICHES TOXICOLOGIQUES

Éthanol Fiche toxicologique n°48 Généralités 2011

Edition Formule :

Substance(s) Formule Chimique

C2H6O

Détails

Nom

Éthanol

Numéro CAS

64-17-5

Numéro CE

200-578-6

Numéro index

603-002-00-5

Synonymes

Alcool éthylique

ÉTHANOL Danger H225 - Liquide et vapeurs très inflammables Les conseils de prudence P sont sélectionnés selon les critères de l'annexe 1 du réglement CE n° 1272/2008. 202-578-6

Selon l’annexe VI du règlement CLP

Caractéristiques [1 à 4, 6] Solvant utilisé dans l’industrie des peintures, vernis, encres, matières plastiques, adhésifs, explosifs, parfums, cosmétiques, l’industrie pharmaceutique... Matière première pour la production de nombreux composés : acide acétique, acry​late d’éthyle, acétate d’éthyle, éthers de glycol, éthylamine, éthylène, éthersoxydes notamment l’ETBE (éthyl- tert -butyl-éther)... Constituant de carburants : le « bioéthanol », éthanol obtenu à partir de matières premières végétales, peut être utilisé seul ou avec de l’essence ; les mélanges essence-éthanol renferment 5 à 95 % de bioéthanol selon les pays. En France, la réglementation fixe à 5,75 % le taux d’incorporation de bioéthanol dans l’essence en 2008 pour attein​d re 10 % en 2010 ; toutefois la commercialisation d’un carburant renfermant 85 % de bioéthanol et 15 % d’essence sans plomb autorisée fin 2007, se généralise dans les sta​tions service (E85). Désinfectant, biocide. Composant de boissons alcoolisées.

Propriétés physiques [1 à 8] L’éthanol est un liquide mobile, incolore, volatil, d’odeur plutôt agréable, décelable dès 84 ppm. L’éthanol est miscible à l’eau, le mélange se faisant avec dégagement de chaleur et contraction du liquide : 1 vol. d’éthanol + 1 vol. d’eau donnent 1,92 vol. de mélange. Par contre il y a expansion du liquide lorsque l’éthanol est mélangé à de l’essence.

Base de données FICHES TOXICOLOGIQUES, sur le site web de l'INRS : www.inrs.fr/fichetox

182

03/2016

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Base de données FICHES TOXICOLOGIQUES

Cyclohexane Fiche toxicologique n°17 Généralités Mise à jour 2010

Edition Formule :

Substance(s) Formule Chimique

C 6 H 12

Détails

Nom

Cyclohexane

Numéro CAS

110-82-7

Numéro CE

203-806-2

Numéro index

601-017-00-1

CYCLOHEXANE Danger H225 - Liquide et vapeurs très inflammables H304 - Peut être mortel en cas d'ingestion et de pénétration dans les voies respiratoires H315 - Provoque une irritation cutanée H336 - Peut provoquer somnolence ou vertiges H410 - Très toxique pour les organismes aquatiques, entraîne des effets néfastes à long terme Les conseils de prudence P sont sélectionnés selon les critères de l'annexe 1 du réglement CE n° 1272/2008. 203-806-2

Selon l’annexe VI du règlement CLP.

Caractéristiques [1, 2] Le cyclohexane est utilisé principalement comme matière première dans l'industrie chimique : c'est un intermédiaire de synthèse de l'acide adipique, du caprolactame, du 1,6-hexaméthylènediamine, matériaux de base pour la fabrication du nylon. Il est utilisé dans la formulation de colles notamment colles polychloroprènes qui en renferment 10 à 30 %, dans les peintures et encres d'imprimerie. C'est également un solvant de résines, huiles, graisses, bitumes, un solvant d'extraction des huiles essentielles, utilisé en chimie fine, dans l'industrie pharmaceutique.

Propriétés physiques [1, 3] Le cyclohexane est un liquide incolore et mobile, d'odeur âcre, pratiquement insoluble dans l'eau (58 mg/L à 25 °C), miscible à de nombreux solvants organiques.

Base de données FICHES TOXICOLOGIQUES, sur le site web de l'INRS : www.inrs.fr/fichetox

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02/2016

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Base de données FICHES TOXICOLOGIQUES

Toluène Fiche toxicologique n°74 Généralités Édition 2012

Edition Formule :

Substance(s) Formule Chimique

C7H8

Détails

Nom

Toluène

Numéro CAS

108-88-3

Numéro CE

203-625-9

Numéro index

601-021-00-3

Synonymes

Méthylbenzène

Etiquette

TOLUÈNE Danger H225 - Liquide et vapeurs très inflammables H361d - Susceptible de nuire au fœtus H304 - Peut être mortel en cas d'ingestion et de pénétration dans les voies respiratoires H373 - Risque présumé d'effets graves pour les organes à la suite d'expositions répétées ou d'une exposition prolongée H315 - Provoque une irritation cutanée H336 - Peut provoquer somnolence ou vertiges Les conseils de prudence P sont sélectionnés selon les critères de l'annexe 1 du réglement CE n° 1272/2008. 203-625-9

Selon l’annexe VI du règlement CLP. ATTENTION : pour les mentions de danger H361 et H373, se reporter à la section "Réglementation".

www.inrs.fr/fichetox

Toluène - Edition : Édition 2012

184

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Base de données FICHES TOXICOLOGIQUES

Xylènes Fiche toxicologique synthétique n°77 Pour plus d'information se référer à la fiche toxicologique complète.

Substance(s) Nom

Numéro CAS

Numéro CE

Numéro index

Synonymes

o-Xylènes

95-47-6

202-422-2

601-022-00-9

1,2-Diméthylbenzène

m-Xylène

108-38-3

203-576-3

601-022-00-9

1,3-Diméthylbenzène

p-Xylène

106-42-3

203-396-5

601-022-00-9

1,4-Diméthylbenzène

Xylène (mélange d'isomères)

1330-20-7

215-535-7

601-022-00-9

Diméthylbenzène

XYLÈNES Attention H226 - Liquide et vapeurs inflammables H332 - Nocif par inhalation H312 - Nocif par contact cutané H315 - Provoque une irritation cutanée Les conseils de prudence P sont sélectionnés selon les critères de l'annexe 1 du réglement CE n° 1272/2008. 215-535-7

Nom Substance

N° CAS

Point de fusion

Point d'ébulition

Pression de vapeur

Point d'éclair

o-Xylène

95-47-6

- 25 °C

144,4 °C

0,133 kPa à - 3,8 °C 1,33 kPa à 31,2 °C 13,33 kPa à 81,3 °C

27 °C

m-Xylène

108-38-3

- 47,7 °C

139,1 °C

0,133 kPa à - 6,9 °C 1,33 kPa à 28,3 °C 13,33 kPa à 76,8 °C

29 °C

p-Xylène

106-42-3

13,4 °C

138,4 °C

0,133 kPa à - 8,1 °C 1,33 kPa à 27,3 °C 13,33 kPa à 75,9 °C

27 °C

Méthodes de détection et de détermination dans l'air Prélèvement par pompage de l’atmosphère au travers d’un tube rempli de charbon actif. Dosage par chromato​graphie en phase gazeuse avec détection par ionisation de flamme après désorption au sulfure de carbone seul ou en mélange avec du méthanol et du dichlorométhane. Prélèvement passif par diffusion sur un badge rempli de charbon actif ou d’Anasorb ® 747. Dosage par chroma​tographie en phase gazeuse avec détection par ionisation de flamme après désorption au sulfure de carbone seul .

Prélèvement au travers d’un tube à désorption thermique rempli d’adsorbant solide Chromosorb ou Tenax TA. Dosage par chromatographie en phase gazeuse avec

Base de données FICHES TOXICOLOGIQUES, sur le site web de l'INRS : www.inrs.fr/fichetox

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03/2016

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Diméthylformamide (68-12-2) - Solvant - INRS

07/07/2017 02:20

Santé et sécurité au travail Accueil > Publications et outils > Bases de données > Solvant

Diméthylformamide Nomenclature Date de la dernière mise à jour 16/12/2024 Synonyme(s) Diméthylformamide / DMF / N,N- Diméthylméthanamide Formule brute C3H7NO Famille chimique Solvants particuliers Numéro(s) CAS 68-12-2 Numéro(s) CE 200-679-5 Numéro(s) INDEX 616-001-00-X

Etiquetage CLP

Etiquetage préexistant

Danger H360D (***) Peut nuire au foe​tus H332 Nocif par inhalation H312 Nocif par contact cutané H319 Provoque une sévère irritation des yeux

R61 Risque pendant la grossesse d'effets néfastes pour l'enfant. R36 Irritant pour les yeux. R20/21 Nocif par inhalation et par contact avec la peau.

Remarque : Les conseils de prudence P sont sélectionnés selon les critères de l'annexe I du règlement CLP S45 En cas d'accident ou de malaise consulter immédiatement un médecin (si http://www.inrs.fr/publications/bdd/doc/solvant.html?refINRS=SOLVANT_68-12-2

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FICHE DE DONNÉES DE SÉCURITÉ conformément au Règlement (CE)

No. 1907/2006 WHITE SPIRIT D40 Exo TIPP Version 3.0

Date d'impression 14.01.2014

Date de révision 18.09.2012

Seuil olfactif

:

donnée non disponible

pH

:

non applicable

Point d'écoulement

:

< -20 °C

Point/intervalle d'ébullition

:

130 - 210 °C

Point d'éclair Taux d'évaporation

: :

> 36 °C 0,14 (Acétate de butyle = 1)

Inflammabilité (solide, gaz)

:

Inflammable.

Limite d'explosivité, supérieure

:

env. 7 %(V)

Limite d'explosivité, inférieure

:

env. 0,6 %(V)

Pression de vapeur

:

30 hPa (20 °C)

Densité de vapeur relative

:

>1 (Air = 1.0)

Densité

:

0,740 - 0,850 g/cm3 (15 °C) 0,74 - 0,85 g/cm3 (env. 15 °C)

Hydrosolubilité

:

négligeable

Coefficient de partage: noctanol/eau Température d'inflammation

:

donnée non disponible

:

> 200 °C

Décomposition thermique

:

donnée non disponible

Viscosité, dynamique

:

donnée non disponible

Viscosité, cinématique

:

0,8 mm2/s (20 °C)

Explosibilité

:

Le produit n'est pas explosif

Propriétés comburantes

:

No oxydant

R49519

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FR


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Fiche de données de sécurité Selon le Règlement (CE) Num. 1907/2006

Revision n. 3 Date révision 26/04/2013 Page n. 1 / 13

SECTION 1: IDENTIFICATION DE LA SUBSTANCE OU DU MELANGE ET DE LA SOCIETE/ENTREPRISE 1.1 Identificateur du produit

ETHOMEEN® C12

Nom commercial

:

Numéro d’enregistrement REACH

: 01-2119957489-17-0000

1.2 Usages pertinents identifiés de la substance ou mélange et utilisations déconseillées Dénomination/Utilisation

: Amine Polyethoxylate avec propriétés tensioactives

1.3 Informations sur le fournisseur de la fiche de sécurité Societé

Téléphone Téléfax Adresse e-mail

: C.T.S. S.r.l. Via Piave n. 20/22 36077 Altavilla Vicentina (VI) - Italia : +39 0444 349088 : +39 0444 349039 : cts.italia@ctseurope.com

1.4 Téléhone d’urgence N° téléphone d’ urgence

: +39 0444 349088 (heures de bureau)

SECTION 2: IDENTIFICATION DES DANGERS 2.1 Classification de la substance ou du mélange Classification (REGLEMENT (CE) N. 1272/2008) Toxcité aigüe, 4, H302 Corrosion cutanée, 1C, H314 Toxicité aigüe pour le milieu aquatique, 1, H400 Toxicité chronique pour le milieu aquatique, 1, H410 Pour le texte complet des indications de dangers (H) citées dans cette section, se reporter à la section 16. Classification (67/548/CEE, 1999/45/CE) Nocif, Xn, R22 Corrosif, C, R34 Dangereux pour l’environnement , N, R50 Pour le texte complet des phrases R citées dans cette section, se reporter à la section 16.

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Révision n. 2 Date révision 08/03/2012

Fiche de données de sécurité

Page n. 1 / 10

Selon le Règlement (CE) Num. 1907/2006 SECTION 1: IDENTIFICATION DE LA SUBSTANCE OU DU MELANGE ET DE LA SOCIETE/ENTREPRISE 1.1 Identificateur du produit Nom commercial

:

ETHOMEEN® C25

1.2 Usages pertinents identifiés de la substance ou mélange et utilisations déconseillées Utilisation de la : Amine Polyéthoxylate avec propriétés tensioactives substance/du mélange 1.3 Informations sur le fournisseur de la fiche de sécurité Societé

: C.T.S. S.r.l. Via Piave n. 20/22 36077 Altavilla Vicentina (VI) - Italia : +39 0444 349088 : +39 0444 349039 : cts.italia@ctseurope.com

Téléphone Téléfax Adresse e-mail 1.4 1.4 Téléhone Téléhone d’urgence d’urgence

1.4 Téléhone d’urgence

Numéro Numéro téléphone téléphone d’ d’ urgence urgence

1.4 Téléhone d’urgence

: +39 : +39 0444 Numéro 0444 349088 téléphone 349088 (heures (heures d’ de bureau) de bureau) Numéro : +39 téléphone 0444 349088 d’ (heures de: bureau) +39 0444 349088 (he urgence urgence

SECTION 2: IDENTIFICATION DES DANGERS 2.1 Classification de la substance ou du mélange Classification (REGLEMENT (CE) N. 1272/2008) Toxcité aigüe, 4, H302 Lésions oculaires graves, 1, H318

Pour le t”exte complet des indications de dangers (H) citées dans cette section, se reporter à la section 16 Classification (67/548/CEE, 1999/45/CE) Nocif, Xn, R22 Irritant Xi, R41 Pour le texte complet des phrases R citées dans cette section, se reporter à la section 16.

2.2 Eléments d’étiquetage Etiquetage (REGLEMENT (CE) N. 1272/2008) Symbole(i)

:

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FICHE DE DONNEES DE SECURITE

1. IDENTIFICATION DU PRODUIT ET DE LA SOCIETE PARALOID(TM) B-72 100% Utilisation du produit

Produit d'enduction Date de révision:

01/15/2009

Rohm and Haas Canada LP 2 Manse Road West Hill, Ont. M1E 3T9 Canada

Fournisseur

Fabricant

Rohm and Haas Company 100 Independence Mall West Philadelphia, PA 19106-2399 Etats-Unis Préparé par: EHS - Services produits ( 416-287-4475 ) Date de préparation:: 01/15/2009 Renseignements généraux: 416-284-4711 Numéro de téléphone d'appel d'urgence 215-592-3000 Deversement Urgence 215-592-3000 Tel. D'Urgence Chemtrec 800-424-9300

2. IDENTIFICATION DES DANGERS Informations générales en cas d'urgence

Aspect Forme

Granulés

Couleur

clair

Odeur

Odeur acrylique

Résumé des dangers

ATTENTION! L'INHALATION DES POUSSIÈRES PEUT AVOIR LES EFFETS SUIVANTS : IRRITATION DES VOIES RESPIRATOIRES MAL DE TÊTE NAUSÉE PEUT IRRITER LES YEUX ET LA PEAU.

Effets potentiel sur la santéé Voies d'exposition principales:

Inhalation Contact avec les yeux Contact avec la peau

Yeux:Les vapeurs de monomère dégagées par le produit chauffé peuvent causer les effets suivants: irritation légère Peau:Un contact prolongé ou répété avec la peau peut causer les effets suivants : irritation légère Inhalation:L'inhalation des poussières peut avoir les effets suivants : irritation des voies respiratoires L'inhalation de monomères volatils dégagés sous l'effet de la température peut entraîner : Peut provoquer une irritation du nez, de la gorge et des poumons. mal de tête nausée Toluène

ACGIH

Non classé comme cancérigène pour l'homme.

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ANNEXES SCIENTIFIQUES

Figure 174 : Photographie de l’appareil de mesure Static Control

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Annexe 1 : fiches techniques

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BOUSSEY CONTROL www.boussey-control.com OFFICE BELGIUM Meersbloem-Melden 46 B-9700 OUDENAARDE BELGIUM ℡ +32 (0)55 61 21 13 +32 (0)55 61 21 01

e-mail : info@boussey-control.eu

AGENT ANTISTATIQUE STATICONTROL AS.90.E10 FICHE TECHNIQUE Le STATICONTROL AS.90.E10 est un agent antistatique de surface. Cet agent est agréé pour le traitement antistatique des emballages pour denrées alimentaires (dose maximale d’utilisation de l’AS.90.E10 : 100 mg/dm2). Le STATICONTROL AS-90-E10 est biodégradable à plus de 99 %. LE STATICONTROL AS-90-E10 est également un agent glissant. CARACTERISTIQUES : Type .....................................................................................................................

anionique

Aspect à 20° C ......................................................................................................

liquide jaune pâle

Masse volumique à 20° C .....................................................................................

1

Point d’écoulement .............................................................................................

0° C

Solubilité : eau, (ou mélange eau / butanol) PH : 7 UTILISATION : La stabilité thermique du principe actif AS.90.E10 est excellente jusqu’à 240° C. Appliquer le STATICONTROL AS.90.E10 sur la surface du matériau à traiter par pulvérisation, trempage ou foulardage. En cas de traces grasses gênantes (en fonction du support traité) diluer l’AS.90.E10 avec 1 ou 2 volumes de solvant (eau ou eau + butanol en fonction du temps de séchage désiré). Pour PMMA, PC utiliser uniquement de l’eau. Nous conseillons d’effectuer des tests en cas d’impression (peut également augmenter l’effet glissant). FICHE D’ESSAI:

Les informations ci-dessus, bien que formulées avec exactitude, ne sont cependant fournies qu’à titre indicatif. Nous conseillons toujours aux utilisateurs d’effectuer des essais préalables.

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LAROPAL A 81 Les Laropal A sont une famille de résines urée-aldéydes présentant certaines caractéristiques qui les rendent proches des Regalrez : - basse viscosité, qui leur apporte un excellent pouvoir nivelant, et donc une grande brillance - haute résistance au jaunissement - faible polarité, soit initiale, soit après vieillissement accéléré, ce qui permet leur dissolution en hydrocarbures non aromatiques (ligroïne ou white spirit désaromatisé) Il est utile de rappeler que ces résines sont légèrement plus polaires au départ par rapport aux résines hydrocarbures déjà citées, car elles contiennent déjà des atomes d’oxygène et d’azote. Elles trouvent leur meilleure application comme liants de pigments, en raison de leur pouvoir mouillant supérieur, mais elles ont aussi été utilisées comme vernis. Parmi ces résines, le Laropal A 81 s’est montré particulièrement résistant, et de récentes études ont démontré l’efficacité du Tinuvin 292 dans sa stabilisation. Appliqué en films fins et soumis au vieillissement accéléré (3000 heures en simulant la lumière du jour qui passe à travers la vitre d’une fenêtre, UV inclus), le Laropal A 81 conserve la capacité de se dissoudre dans un mélange fait de 90 % de cyclohexane et de 10 % d’aromatiques (correspondant au mélange n° 2 dans l’échelle de test de Feller, qui, rappelons-le, va d’une polarité minimum pour le cyclohexane à une polarité maximum pour l’acétone). Pour évaluer en parallèle un produit déjà utilisé comme liant pour les pigments et comme vernis, la résine cétonique Laropal K80 après un vieillissement analogue, s’est avérée réversible uniquement avec un mélange de 70 % d’acétone et 30 % de toluène (entre les mélanges n° 10 et n° 11 du test de Feller). En plus de ces caractéristiques positives, il faut considérer une température de transition vitreuse élevée (Tg = 49°C) et une température de ramollissement élevée (80-95°C) La solubilité avec des solvants aliphatiques peut être limitée au-dessous des 15°C. Dans le cas où on prévoirait d’utiliser le Laropal A 81 dans des milieux froids, on conseille d’ajouter 2 à 5 % d’aromatiques (xylène ou toluène). La résine est soluble dans presque tous les solvants polaires, comme : acétone, acétate de butyle, alcool éthylique, isopropanol, Solvanol et n’est pas soluble dans l’eau. CONDITIONNEMENTS : Laropal A 81

1 kg

BIBLIOGRAPHIE - de la Rie E.R. ; Shedrinsky A.M. ; « The chemistry of chetone resins and the synthesis of a derivative with increased stability and flexibility” – Studies in Conservation 34 (1989), 919 - de la Rie E.R. ; Quillen Lomax S. ; Palmer M. ; Maines C.A. « An investigation of the photochemical stability of films of the urea-aldéhyde resins Laropal A81 an Laropal A 101” ICOM Committee for Conservation (2002), Vol. II 881-887

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1. IDENTIFICATION DU PRODUIT ET DE LA SOCIETE PARALOID(TM) B-72 100% Utilisation du produit

Produit d'enduction Date de révision:

01/15/2009

Rohm and Haas Canada LP 2 Manse Road West Hill, Ont. M1E 3T9 Canada

Fournisseur

Fabricant

Rohm and Haas Company 100 Independence Mall West Philadelphia, PA 19106-2399 Etats-Unis Préparé par: EHS - Services produits ( 416-287-4475 ) Date de préparation:: 01/15/2009 Renseignements généraux: 416-284-4711 Numéro de téléphone d'appel d'urgence 215-592-3000 Deversement Urgence 215-592-3000 Tel. D'Urgence Chemtrec 800-424-9300

2. IDENTIFICATION DES DANGERS Informations générales en cas d'urgence

Aspect Forme

Granulés

Couleur

clair

Odeur

Odeur acrylique

Résumé des dangers

ATTENTION! L'INHALATION DES POUSSIÈRES PEUT AVOIR LES EFFETS SUIVANTS : IRRITATION DES VOIES RESPIRATOIRES MAL DE TÊTE NAUSÉE PEUT IRRITER LES YEUX ET LA PEAU.

Effets potentiel sur la santéé Voies d'exposition principales:

Inhalation Contact avec les yeux Contact avec la peau

Yeux:Les vapeurs de monomère dégagées par le produit chauffé peuvent causer les effets suivants: irritation légère Peau:Un contact prolongé ou répété avec la peau peut causer les effets suivants : irritation légère Inhalation:L'inhalation des poussières peut avoir les effets suivants : irritation des voies respiratoires L'inhalation de monomères volatils dégagés sous l'effet de la température peut entraîner : Peut provoquer une irritation du nez, de la gorge et des poumons. mal de tête nausée Toluène

ACGIH

Non classé comme cancérigène pour l'homme.

file://C:\Documents and Settings\Utilisateur.UTILISAT-D8B773\Bureau\dow-msds-C... 25/05/2011

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Annexe 2 : Mesures d’électricité statique des échantillons

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Annexe 3 : Détail des calculs réalisés pour l’étude

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BIBLIOGRAPHIE PArtIE hIstorIquE Encyclopédies et dictionnaires AKOUN, La côte des peintres. Isandra, Editions de 2005, 2015-2016 et 2017. BENEZIT Emmanuel-Charles, Dictionnaire critique et documentaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs de tous les temps et de tous les pays par un groupe d’écrivains spécialistes français et étrangers. Gründ, 1999. 14 volumes, 13300 p. EDOUARD-JOSEPH René, Dictionnaire biographique des artistes contemporains, 1910-1930. Art & édition, 1930. 3 tomes. Dictionnaire de la Connaissance de la peinture. Larousse in extenso. 2012, Villatuerta. 630 pages

Livres ASSOUAD Patrice, Dupanloup - une histoire 1904-2004. Edité par Patrice Assouad et Association du centenaire de Dupanloup, Boulogne-Billancourt, 2005. 154 pages BONNILLA Laure-Emmanuelle, 100 ans de coiffure, Prat , 2009. 173 pages. BREON Emmanuel, Les enfants modèles, de Claude Renoir à Pierre Arditi. RMN, Paris, 2009. 296 pages CHEVREUL Michel-Eugène, De la loi du contraste simultané des couleurs et de l’assortiment des objets colorés, Pitois-Levrault, 1839, Paris. 735 pages. [en ligne, Gallica] Dernière mise à jour le 21 novembre 2006; consulté le 6 avril 2017. URL : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5606385f DE VINCI Léonard, Traité de la peinture. Deterville, Paris, 1796. 333 p FIELL Charlotte, DIRIX Emmanuelle, La mode des années 20 en images. Eyrolles, 2011. 576 pages FIELL Charlotte, DIRIX Emmanuelle, La mode des années 30 en images. Eyrolles, 2012. 575 pages GIGANTE Elisabetta, L’art du portrait : histoire, évolution et technique. Hazan, 2012 Paris. 336 pages KÖNIG Eberhard, Les Grands Peintres italiens de la renaissance. Ullmann 2008 2 tomes de 678 et 622 p. LOBSTEIN Dominique, SANCHEZ Pierre. Le Salon de l’école Française, répertoire des exposants et liste de leurs œuvres (1904-1950). L’échelle de Jacob, Dijon, 2011. 598 pages 205


Ophélie Soulas - Promotion 2017 Conservation et restauration de peintures de chevalet

LOILIER Hervé. Histoire de L’art Occidental. Ellipses, 2003, Paris. 479 pages MAIGNON Claire, L’âge critique des salons, 1914-1925 : l’école française, la tradition et l’art moderne. Presses universitaires de Rouen et du Havre. 2014. p. 25 PAULVE Dominique, La Ruche, un siècle d’art à Paris, Gründ 2002. 160p. POE Edgar Allan, Le portrait ovale, dans Nouvelles histoires extraordinaires. A. Quantin, 1884. pp. 273-277 WILSON Sarah, Paris, capitale des arts 1900-1968. Hazan, 2002. 447p WINTER Jay Murray, Entre deuil et mémoire : la Grande Guerre dans l’histoire culturelle de l’Europe, Paris, Armand Colin, 2008. 309p

Articles BOULEY Bénédicte, Le chemin de croix, dans l’histoire. [en ligne] mis en ligne le 2 avril 2015, consulté le 11 avril 2017. URL : http://www.liturgiecatholique.fr. BOUVET Vincent, DUROZOI Gérard, Paris 1919-1939, Art et Culture. Hazan, 2009 . 415p`

CLAIR Jean, dir , Musée des Beaux arts de Montréal. Les années 20, l’âge des métropoles. Montréal, Gallimard 1991. 638p LEBRUN François, La place de l’enfant dans la société française depuis le XVIe siècle. Communications , 1986,Volume 44, N°1, pp.247-257 LOBSTEIN Dominique, SANCHEZ Pierre. Le Salon de l’école Française, répertoire des exposants et liste de leurs œuvres (1904-1950). L’échelle de Jacob, Dijon, 2011. 598p. Musée du Montparnasse, La Ruche, le centenaire d’une cité d’artiste. Atlantica, 2002. 95 p [en ligne, Persée] consulté le 1/05/2017. URL: http://www.persee.fr/doc/comm_0588-801_1986_ num_44_1_1661

SAINT-GERAND, Jacques-Philippe . Agnès GRACEFFA, dir., Vivre de son art. Histoire du statut de l’artiste XVe-XXIe siècles. Questions de communication, n 23, 1, 2014-02-01, pp.419-420 SOULIER Gustave, dir, L’art décoratif, revue mensuelle d’art contemporain. 1er semestre 1906. Paris. p. 41

Mémoires MALLIET Soazig, Mémoire de fin d’études, Ecoles de Condé, 2016.

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Ressources internet : Dictionnaire Larousse en ligne : http://www.larousse.fr Site officiel de la Société des Artistes Français : http://www.artistes-francais.com. Consulté le 17 avril 2017

Site officiel du salon d’Automne : http://www.salon-automne.com. Consulté le 17 avril 2017 Site de l’académie Julian : https://sites.google.com/site/academiejulian/ Consulté le 29 Juin 2017

Documentaires Jérôme-Cécil Auffret, L’art et l’enfant, Arte France, 2015

Entretiens Le 28 novembre 2015 avec M.Wilfrid de Fonvielle : Descendant de l’artiste. Cet échange a permis de confirmer la signature de l’artiste, ainsi que d’en apprendre plus sur la vie du peintre. De nombreux échanges par e-mail ont suivi cette entrevue.

Le 5 février 2016 avec Mme. Catherine Corbet : Descendante de l’artiste, elle possède une certaine collection d’œuvre de Marcel Caud. Cet entretien permis la comparaison de plusieurs œuvres du peintre.

Le 31 mars 2017 avec M. Philippe Truffault : Descendant de la famille Courciéras. Ce rendez-vous permis de confirmer l’identification des modèles ainsi que d’en apprendre plus sur l’histoire matérielle de l’œuvre et des deux protagonistes.

Recueils CAUD Marcel, Liste de mes Portraits. Manuscrit, collection particulière.

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PArtIE tEchnologIquE Livres ARSENNE Louis Charles, Manuel du peintre et du sculpteur, LVDV inter-livre, 1986. 2 tomes BALCAR Nathalie, Les Vernis : Usages et propositions issues de recherches récentes. C2RMF, Paris, 2005. 160p

BENARD Jacques, L’oxydation des métaux. Gauthier Villars, 1962. 2 tomes, de 465 et 517 p BERGEAUD Claire, HULOT Jean-François, ROCHE Alain, La dégradation des peintures sur toile. École nationale du patrimoine, 1997. 126p BERGEON Ségolène, «Science et patience» ou la restauration des peintures. Réunion des Musées Nationaux, 1990. 269 p. BRANDI Cesare, Théorie de la restauration. Éditions Allia, Paris, 2011. 144p BROSSARD Isabelle, Technologie des textiles, Dunod 1997. 301p CENNINI Cennino, Traité de la peinture, Jules Renouard, Paris, 1858.160 p CREMONESI Paolo, L’uso dei solventi organici nella pulitura di opere policrome, Padova, Il Prato, 2004. 166p. DE VINCI Léonard, Traité de la peinture. Deterville, Paris, 1796. 333 p EASTAUGH Nicholas, WALSH Valentine, CHAPLIN Tracey, SIDDALL Ruth, Pigment compendium, a dictionary and optical microscopy of a historical pigments. Elsevier, 2008. 960 p HORIE Charles Velson, Materials for Conservation: Organic Consolidants, Adhesives and Coatings, Routledge, 2010 , 489 p HORSIN DEON Simon, De la conservation et de la restauration des tableaux. Gutenberg reprint, Paris, 1981 . 235p

LABREUCHE Pascal, Paris, capitale de la toile à peindre XVIIIème et XIXème siècle. CTHS, 2011. 367p MASSCHELEIN KLEINER Lilian, Les Solvants, Bruxelles, Institut Royal du Patrimoine Artistique, 1994. 131p MILLS John, WHITE Raymond, The organic chemistry of museum objects, Second edition. NewYork, Rutledge, 2011. 206 p NICOLAUS Knut, The restoration of paintings, Könemann, 1999. 428p

PEREGO François, Dictionnaire des matériaux du peintre, Belin, 2005. 895p 208


Ophélie Soulas - Promotion 2017 Conservation et restauration de peintures de chevalet

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Entretien Le 25 novembre 2016 et le 7 juin 2017 avec M. Eric Feyder : Ces entretiens avec un membre de la société Static Control ont permis de mieux appréhender le phénomène de l’électricité statique ainsi que de demander l’envoi des échantillons d’antistatique.

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TABLE DES ILLUSTRATIONS Figure 1 : Œuvre avant restauration (source: Ophélie Soulas©). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 Figure 2 : Œuvre après restauration (source: Ophélie Soulas©) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

PArtIE hIstorIquE Figure 3 : : Louise et Mariette Courciéras au jardin du Luxembourg, vers 1930 (source : photographie de la famille Courciéras)

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .19

Figure 4 : Signature de l’artiste sur le portrait de Geneviève en 1930 (source: retranscription personnelle) 21 Figure 5 : Signature présente sur l’œuvre de mémoire (source: retranscription personnelle). . . . . . . . . . . 21 Figure 6: Signature de l’artiste sur le portrait de Geneviève en 1958 (source: retranscription personnelle) 21 Figure 7: Photographie de Marcel Caud en juin 1924 (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . 22 Figure 8 : Jules Adler, Sans titre, 1903. Collection particulière (Source : Bernadette Poinson©) . . . . . . . . 23 Figure 9 : Marcel Caud, Geneviève peignant. Huile sur toile, vers 1930. Collection particulière (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Figure 10 : Marcel Caud, Portrait de Geneviève. Huile sur toile 1944. Collection particulière (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Figure 11 : Marcel Caud, Portrait de Geneviève. Huile sur toile. 1958. Collection particulière (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Figure 12 : Marcel Caud, Apothéose de Vénus. D’après Fragonard. Huile sur toile, 65 x 81 cm. 1913. Collection particulière (source : artprice.com).. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 Figure 13 : Jean-Honoré Fragonard, Les baigneuses. Huile sur toile, 64 x 80 cm, 1772-1775. Musée du Louvre, Paris (source : Web Gallery of Art www.wga.hu) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 Figure 14 : Marcel Caud, Nature morte au plat d’huître. Huile sur toile, 1907. Collection particulière (source : artprice.com). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Figure 16 : Jan Davidsz de Heem. Petit déjeuner avec un verre de champagne et une pipe. Huile sur toile. 1642 Residenzgalerie, Autriche (source : https://fr.wikipedia.org) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Figure 15 : Marcel Caud. Sans titre. Huile sur toile. Collection particulière (source: photographie de la famille de Caud). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Figure 17: Paul Cézanne, Nature morte au rideau. Huile sur toile, 55 x 74 cm. Entre 1899 et 1905. Saint-Pétersbourg, musée de l’Ermitage (source : Web Gallery of Art www.wga.hu) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Figure 18 : Marcel Caud, Paysage Breton. Peinture à l’huile. Collection particulière. (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 215


Ophélie Soulas - Promotion 2017 Conservation et restauration de peintures de chevalet Figure 20 : Albert Marquet, Le Pyla. Huile sur toile. 1935. Bordeaux, Musée des Beaux-Arts. (source : http:// images.telerama.fr) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 Figure 19 : Marcel Caud, Paysage de montagne. Huile sur toile. Collection particulière (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 Figure 21 : Paul Cézanne, La Montagne Sainte-Victoire. 1885-1887, huile sur toile. Londres, Courtauld Institute of Art (source : https://fr.wikipedia.org) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 Figure 22 : Vue de la Chapelle de l’école Dupanloup ornée des peintures de Marcel Caud, après 1928 (source : http://www.dupanloup.net). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 Figure 23 : Marcel Caud, Portrait de Geneviève, 1947. Collection particulière (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 Figure 24 : Marcel Caud, Autoportrait, vers 1940. Collection particulière. (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 Figure 25 : Marcel Caud, Titre et date inconnus. Collection particulière. (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 Figure 26 : Romaine Brooks, La France croisée. 1914. Huile sur toile, 116.2 x 85.0 cm Washington, Smithsonian American art museum (source : http://americanart.si.edu) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 Figure 27 : Alphonse Lalauze, Dans les tranchées,1915. Huile sur toile, 66x55 cm. Collection particulière (source : http://centenaire.org/) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 Figure 28 : Jacques Chapiro Derrière la grille de la Ruche, le café de Dantzig. Huile sur toile non datée. Collection particulière (source : PAULVE Dominique, Un siècle d’art à Paris, Gründ) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 Figure 29 : Photographie du Salon des Artistes français de 1920, section sculpture, au Grand-Palais (source : PAULVE Dominique, Un siècle d’art à Paris, Gründ) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 Figure 30 : Carte postale représentant le Grand Palais lors de son ouverture en 1900 (source : http://www. expositions-universelles.fr) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37 Figure 31 : Inscription de la main de l’artiste, au revers du panneau qui fermait l’encadrement (source: retranscription personnelle) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 Figure 32 : Retranscription des écritures présentes à l’arrière du panneau, indiquant probablement le nom et l’adresse de l’encadreur (source: retranscription personnelle) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38 Figure 33 : Marcel Caud, Les contes de Perrault, localisation et dimensions inconnues. 1928 (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39 Figure 34: Marcel Caud, Portrait de Joseph-Clément Courciéras. Huile sur toile, 1930 (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 Figure 35: Marcel Caud, Portrait de Madame Courciéras et sa fille après restauration (source: Ophélie Soulas©) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43 Figure 36: Photographie de Louise et Mariette Courciéras, vers 1930 (source : photographie de la famille Courciéras) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

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Ophélie Soulas - Promotion 2017 Conservation et restauration de peintures de chevalet Figure 37 : Une robe d’enfant par Mignapouf. Revue La femme chic, 1926. Arlequin est un jouet à la mode (source : FIELL Charlotte, DIRIX Emmanuelle, La mode des années 20 en images). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44 Figure 38: coiffures d’enfant en 1921 (source: BONNILLA Laure-Emmanuelle, 100 ans de coiffure, Prat, 2009)44 Figure 39: Quatre robes d’après -midi. La Coquette, 1933. La robe en couleur est assez similaire à celle de Madame Courciéras (source : FIELL Charlotte, DIRIX Emmanuelle, La mode des années 30 en images) . . . . 45 Figure 40: Ira Richards portant un ensemble de jour noir, 1927. Similaire à la tenue de Louise Courciéras (source : FIELL Charlotte, DIRIX Emmanuelle, La mode des années 30 en images) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45 Figure 41 : Présence des bouquets de fleurs sur les poitrines. La Coquette, 1938 (source : FIELL Charlotte, DIRIX Emmanuelle, La mode des années 30 en images) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45 Figure 42: Elisabeth Vigée-Lebrun. Autoportrait avec sa fille Julie. 1786, huile sur bois, 105x84 cm. Musée du Louvre, Paris (source : Web Gallery of Art www.wga.hu) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 Figure 43:Jacques-Louis David, Portrait de la Comtesse Vilain XIIII et sa fille. 1816 , huile sur toile 95x76 cm. National Gallery, Londres (source : Web Gallery of Art www.wga.hu) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 Figure 44: J.B.S Chardin, L’enfant au toton. 1738. Huile sur toile 67x76 cm. Musée du Louvre, Paris (source : Web Gallery of Art www.wga.hu) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 Figure 45: Berthe Morisot, Eugène Manet et sa fille dans le jardin à Bougival 1881. 73 x 92 cm. Huile sur toile. Musée Marmottant Monet, Paris ( source : http://www.marmottan.fr ) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49 Figure 46: Mariette et son Arlequin, vers 1930 (source : photographie de la famille Courciéras) . . . . . . . . . 49 Figure 47 : Les diagonales se croisent au niveau de cœur de la mère (source: schéma personnel) . . . . . 51 Figure 48 : Quatre lignes de force rythment de manière régulière le tableau (source: schéma personnel) 51 Figure 49 : Sens du regard du spectateur (source: schéma personnel) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51 Figure 50 : Felice Casorati, Portrait de Renato Gualino, 1923-1924. Huile sur contreplaqué. 97 x 74,5 cm. Viareggio, Instituo Matteucci (source : exposition Dolce Vita, Musée d’Orsay avril à septembre 2015) . . . . . . 51 Figure 51 : Gamme de couleur utilisée par l’artiste (source: schéma personnel) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52 Figure 54 : Marcel Caud, détail du bouquet de violettes sur le tableau de mémoire, après réintégration (source: Ophélie Soulas©) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53 Figure 52 : Détail de la peinture tonale sur le visage de Mariette Courciéras (source: Ophélie Soulas©) . 53 Figure 53 : Exemple de peinture tonale sur les mains et le visage. Vincent Van Gogh, Agostina Segatori in the Café du Tambourin 1887, Huile sur toile, 56 x 47 cm Rijksmuseum Amsterdam (source : Web Gallery of Art www.wga.hu) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53 Figure 55: Edouard Manet, Bouquet de violettes, 1872. Huile sur toile, 22 x 77 cm. Collection particulière (source : Web Gallery of Art www.wga.hu) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53 Figure 56 : André Derain, Portrait de Mme Paul Guillaume huile sur toile 92 x 73 cm. 1928. Paris, Musée de l’orangerie (source : musée de l’orangerie) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54 Figure 57 : Tamara de Lempicka, portrait de Madame Boucard, 1931. Huile sur toile, collection particulière ( 217


Ophélie Soulas - Promotion 2017 Conservation et restauration de peintures de chevalet source : Pinterest) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

Figure 58 : Federico Armando Beltrán Massés, A portrait of May Fleishhacker, 1925. huile sur toile, 113 x 107,3 cm. Collection particulière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55 Figure 59 : Romaine Brooks, L’Amazone (portrait de Natalie Barney), 1920. Huile sur toile, 86,5 x 65,5. Paris, Musée Carnavalet (WILSON Sarah, Paris, capitale des arts 1900-1968). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

PArtIE tEchnologIquE Hormis lorsqu’une source est spécifiée, toutes les images sont personnelles Ophélie Soulas© Figure 60 : Détail de l’œuvre avant restauration, mise en évidence des soulèvements en toit . . . . . . . 59 Figure 61 : Œuvre de mémoire avant restauration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60 Figure 62 : Coupe stratigraphique du système d’encadrement de l’œuvre. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61 Figure 63 : Schéma stratigraphique traditionnel d’une peinture sur toile. (PEREGO François, Dictionnaire des matériaux du peintre. Belin, 2005, p. 861). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62 Figure 64 : Vue des fibres de lin au microscope (grossissement x10) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 Figure 65 : Schéma des torsion «Z» et «S» des fils (BROSSARD Isabelle, Technologie des textiles, Dunod)63 Figure 66 : Vue des bords de tension préparés. On devine le tissage en armure toile. Les contraintes de la toile autour des semences mettent en évidence sa réactivité. Un trou de piton ayant servi à l’encadrement est visible. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64 Figure 67 : Vue de l’encollage dans une lacune de couche picturale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64 Figure 68: Coupe stratigraphique au MEB présentant la préparation ( x 610 ) (Aude Richard®) . . . . . . 65 Figure 69 : Courbe générée par la préparation au MEB (Aude Richard®) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65 Figure 70 : Vue de la préparation au dos d’une écaille retournée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65 Figure 71 : Détail des couleurs blanches sur l’œuvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68 Figure 72 : Détail des couleurs noires sur l’œuvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68 Figure 73 : Détail des couleurs bleues sur l’œuvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69 Figure 74 : Courbe générée au MEB pour une écaille de couleur bleu clair (Aude Richard®) . . . . . . . . 69 Figure 75 : Détail des couleurs violettes sur l’œuvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70 Figure 76 : Courbe générée au MEB pour une écaille de couleur rouge (Aude Richard®) . . . . . . . . . . 70 Figure 77 : Détail des couleurs rouges sur l’œuvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71 Figure 78 : Détail des couleurs jaunes sur l’œuvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71 Figure 79 : Détail des couleurs vertes sur l’œuvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72 Figure 80 : Détail des terres sur l’œuvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73 218


Ophélie Soulas - Promotion 2017 Conservation et restauration de peintures de chevalet Figure 81 : Vue du vernis au microscope USB grossissement x50 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74 Figure 82 : Photographie de l’œuvre de mémoire sous lumière ultra-violette . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74 Figure 83 : Vue de la couche de vernis lacunaire au MEB. Grossissement x2200 (Aude Richard®) . . . 75 Figure 84 : Courbe générée par le vernis au MEB (Aude Richard®) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 Figure 85 : La découpe est grossière, les mouvements du bois ont provoqué des déformations. . . . . . 76 Figure 86 : Un nœud provoque une déformation du châssis fin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76 Figure 87: Vue des déformations de la toile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77 Figure 88 : Vue de la déchirure au niveau du buste de l’enfant. La toile est déformée. . . . . . . . . . . . . . 77 Figure 89 : Détail de la déchirure au niveau du bord de tension. La toile s’est rétractée . . . . . . . . . . . . 77 Figure 90 : Vue de l’infestation de moisissure au dos de la toile. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 Figure 93 : Vue des bords de l’œuvre lors du désencadrage tu tableau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 Figure 91 : Détail des moisissures gris clair . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 Figure 92 : Détail des moisissures jaunes orangées. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78 Figure 94 : L’encollage est visible dans les lacunes de couche picturale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 Figure 95 : L’encollage a disparu dans la partie inférieure de la toile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 Figure 96 : Vue du réseau de craquelures d’âge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 Figure 97 : Dédoublement de la couche picturale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80 Figure 98 : Déplaquage du vernis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80 Figure 99 : Mise en évidence de l’écaillage en tuile avec la lumière rasante. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81 Figure 100 : détail des soulèvements en toit et du chevauchement des écailles . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81 Figure 176 : Détail de l’empoussièrement et des moisissures sous la feuillure du cadre . . . . . . . . . . . . 82 Figure 101 : détail de la fissuration du vernis. x60 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82 Figure 177 : Les déplaquages de vernis mettent en évidence son oxydation par contraste avec la couleur de la peinture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82 Figure 102 : Détail du blanchiment du vernis dans les reliefs de le couche picturale noire. x60 . . . . . . 82 Figure 103 : Relevé des altérations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83 Figure 104 : Si l’humidité diffère entre l’avant et l’arrière de la peinture, l’humidité tendra à s’équilibrer, en migrant au travers de l’œuvre. (NICOLAUS p.197) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85 Figure 105 : Schéma d’un chancis de vernis. ( NICOLAUS Knut p.203). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88 Figure 106 : Schéma présentant les différentes altérations dues à l’apport d’eau . . . . . . . . . . . . . . . . . 91 Figure 107 : Schéma de l’ordre de pose du papier de protection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104 219


Ophélie Soulas - Promotion 2017 Conservation et restauration de peintures de chevalet Figure 108 : Détail des pigmentations jaunes et roses laissées par les moisissures.. . . . . . . . . . . . . . 105 Figure 109 : Vue générale de la toile après traitement des moisissures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105 Figure 110 : détail d’une déchirure nettoyée et pontée à l’Origam® . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106 Figure 111 : schéma de l’humidifiaction. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 Figure 112 : schéma stratigraphique du refixage naturel sur table aspirante chauffante . . . . . . . . . . . 108 Figure 113 : Coupe stratigraphique du cartonnage à l’intissé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108 Figure 115 : Les déchirures sont mastiquées et consolidées par des pontages . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 Figure 114 : Repassage de la toile imprégnée de colle de peau sur table chauffante aspirante . . . . . 109 Figure 116 : Après le délitage du cartonnage, le vernis a blanchi mais le chanci dans l’angle inférieur senestre a presque disparu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110 Figure 117 : Détail des différentes étapes du masticage : comblement et ragréage. . . . . . . . . . . . . . . 110 Figure 118 : Le cartonnage léger est découpé et positionné sur de nouveaux tirants avant le cartonnage fort 111 Figure 119 : Collage du papier Canson® qui vient d’être encollé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111 Figure 120 : Ajustement d’une incrustation au scalpel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 Figure 121 : Vue tangentielle d’une incrustation après son collage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 Figure 122 : Encollage de la toile d’origine en cours. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113 Figure 123 : Encollage de la deuxième gaze qui vient d’être posée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113 Figure 124 : Le tableau va être appliqué sur la toile de rentoilage après leurs encollages. . . . . . . . . . 114 Figure 125 : Repassage de l’œuvre après douze heure se séchage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114 Figure 126 : Découverte de l’œuvre lors du retrait du papier sulfurisé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115 Figure 127 : Comparaison du châssis neuf, avec l’œuvre montée et bordée par rapport au châssis d’origine. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116 Figure 128 : Vue des bords de tension de l’œuvre après montage. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116 Figure 129 : Détail des différentes étapes de l’allègement. Vernis avant allègement (gauche), réactivé (en haut) et allégé (en bas) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117 Figure 130 : Le travail a été effectué sous protections contre les risques chimiques . . . . . . . . . . . . . . 117 Figure 131 : Allègement du vernis sur la moitié du visage de l’enfant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118 Figure 132 : Allègement du vernis sur la moitié du visage de la mère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118 Figure 133 : Fenêtre d’allègement de vernis vue en lumière U.V. La résine d’origine est préservée

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Figure 134 : Détail de la régénération du chanci au mélange toluène DMF (75% / 25%) . . . . . . . . . . 119 Figure 135 : Masticage en cours au niveau de la grande lacune sur la poitrine de l’enfant . . . . . . . . . 120 220


Ophélie Soulas - Promotion 2017 Conservation et restauration de peintures de chevalet Figure 136: Détail vert avec tons de fonds . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121 Figure 137 : Détail vert à la fin de la retouche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121 Figure 138: Détail de l’œuvre après la réalisation des tons de fond . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122 Figure 139 : Détail de l’œuvre à la fin de la réintégration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122 Figure 140 : Arrière de l’œuvre avant atténuation des auréoles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 Figure 141 : Arrière de l’œuvre après atténuation des auréoles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 Figure 142 : Photographie de l’œuvre après intervention. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125

PArtIE tEchnIco-scIEntIfIquE Hormis lorsqu’une source est spécifiée, toutes les images sont personnelles Ophélie Soulas©

Figure 143 : Raoul Dufy, La fée électricité, 1937. Musée d’art moderne de la ville de Paris . . . . . . . . 127 Figure 144 : Situation de test de solubilisation de l’AS90 dans les solvants utilisés pour la préparation des vernis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141 Figure 145 : Appareil de mesure en cours de calibrage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143 Figure 146 : Le mesureur électrostatique est placé sur l’échantillon et effectue sa mesure . . . . . . . . . 143 Figure 147 : Comparaison des résultats de la mesure électrostatique des vernis sans ajout d’antistatique 144 Figure 148 : Comparaison des résultats de mesure électrostatique des vernis avec l’ajout d’antistatique dans la résine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145 Figure 149 : Comparaison des résultats de mesure électrostatique des vernis avec l’ajout d’antistatique à la surface la résine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146 Figure 150 : Mesures comparatives des variations entre les différents vernis avant et après ajout d’antistatique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147 Figure 152: Graphique présentant le pourcentage de perte d’électricité électrostatique des différents vernis 148 Figure 151 : Tableau présentant le pourcentage de perte d’électricité électrostatique pour chaque vernis. 148

AnnExEs Figure 153 : Palette de l’artiste, Collection particulière (source: photographie de la famille de Caud) . . . . 155 Figure 154 : Les contes de Perrault, représentant la femme de l’artiste et leurs enfants. Ce tableau a été ex221


Ophélie Soulas - Promotion 2017 Conservation et restauration de peintures de chevalet posé en 1928 au Grand-Palais lors du 141ème salon de la Société des Artistes Français. Page 2 du carnet 1 (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59 Figure 155 : Le portrait de Madame Courciéras et sa fille ainsi que son pendant, le portrait du Docteur Courciéras sont répertoriés à la page 3 (source: photographie de la famille de Caud). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160 Figure 156 : L’artiste réalise soixante quinze figures dans la chapelle de Boulogne. Page 4 (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161

Figure 157 : Page du catalogue Salon des Artistes Français mentionnant Marcel Caud (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162 Figure 158 : Page du catalogue du Salon des Artistes Français mentionnant Jules Adler (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163 Figure 159 : Page du catalogue du Salon des Artistes Français mentionnant Jean-Paul Laurens (source: photographie de la famille de Caud) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163 Figure 160 : Au cœur de la matière, vue en coupe d’une écaille de couche picturale au microscope électronique à balayage (Aude Richard®) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165 Figure 161 : Test au CE1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168 Figure 162 : Test au CE5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168 Figure 163 : Test au CE9 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168 Figure 164 :Test au MK6 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169 Figure 165 : Test au MK7 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169 Figure 166:Test au MK8 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169 Figure 167 : Test au MK9 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169 Figure 168 : Diagramme de solubilité de la résine mastic, Les différents solvants utilisés pour l’allègement ont été replacés sur le diagramme (HORIE Charles Velson, p. 412.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172 Figure 169 : Guide d’utilisation des gels de paraloïd®B72. (www.artcare.org) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177 Figure 170 : Tableau récapitulatif sur les tests comparatif entre les semences en acier bleui et les semences en cuivre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180 Figure 171 : Vue de la mise en œuvre de l’expérimentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180 Figure 172 : Détail des échantillons après retrait des semences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180 Figure 173 : Détail des échantillons après retrait des semences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180

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OphĂŠlie Soulas - Promotion 2017 Conservation et restauration de peintures de chevalet

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