Bruxelles Cuture 15 septembre 2018

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BRUXELLES CULTURE 15 septembre 2018 Brussels Diffusion asbl Contact et abonnement : pressculture4@gmail.com

RENCONTRE : SABIHA EL YOUSSFI


RENCONTRE : SABIHA EL YOUSSFI Enseignante à Saint-Josse, Sabiha El Youssfi vit actuellement un conte de fées, en voyant sa pièce « Dixit Algorizmi » tourner un peu partout. Un projet conçu à la base comme une réponse aux questions de ses élèves et qui, très vite, s’est emballée sur la route du savoir pour être acclamée par le monde des professeurs, les familles et les autorités publiques. Rencontre. En quelles circonstances avez-vous été amenée à écrire « Dixit Algorizmi » ? J’ai écrit cette pièce en 2014. En tant que coordinatrice de projets, je mène chaque année, avec mon collègue Raphaël Beugnies, un développement autour d’un thème particulier. Durant l’année scolaire 2014-2015, nous avions décidé de nous intéresser aux sciences. Pour l’anecdote, lors d’un exercice dans le cadre du cours de français, un de mes élèves, qui avait commis une erreur, avait tenu les propos suivants : « Mais, madame, c’est normal que je me sois trompé. Nous, les Arabes, nous ne savons pas grandchose … ». J’ai été terriblement interpellée par cette justification et je lui ai donc rappelé ce que les savants, qui ont vécu dans le monde arabo-musulman au Moyen Âge, ont apporté aux sciences mondiales. Je lui ai cité les noms des grandes figures scientifiques arabes ou persanes, mais cet élève et ses camarades n’en avaient jamais entendu parler. La plupart ont déploré le fait que les médias n’évoquent le monde arabe qu’en utilisant les termes « terrorisme », « islamisme » ou « extrémisme ». C’est à ce moment-là que l’idée de rédiger une pièce de théâtre autour de l’âge d’or des sciences arabes est née. Je souhaitais offrir aux jeunes, à tous les jeunes quelle que soit leur culture, une leçon d’histoire et de sciences sur scène. J’ai décidé de transposer au théâtre cet échange très constructif que j‘avais eu en classe. Mes collègues et moi avons donc proposé à la direction du Lycée Guy Cudell le projet « Mille et Une Lumières d’Orient », en collaboration avec l’Université libre de Bruxelles. Celui-ci comportait trois volets : une exposition itinérante intitulée « À la découverte de l’âge d’or des sciences arabes » produite par l’ULB, une conférence sur le même thème animée par des professeurs émérites : Ahmed Djebbar de l’Université de Lille, Pierre Marage de l’Université libre de Bruxelles, Ahmed Medhoune d’ULB Culture, et enfin la pièce de théâtre « Dixit Algorizmi ». Ce projet était évidemment destiné aux étudiants de notre école, mais également aux classes de sixième des écoles primaires avoisinantes et aux associations de la commune de Saint-Josse et d’ailleurs. Que signifie ce titre et quel est le sujet de la pièce ? Algorizmi est le nom latin du grand mathématicien persan « al-Khawarizmi », pionnier de l’algèbre et transmetteur de connaissances au IXe siècle. Le titre « Dixit Algorizmi » s’est imposé pour plusieurs raisons : il évoque la volonté constante de latiniser les noms des savants arabes du Moyen Âge et révèle également une certaine reconnaissance des savoirs « arabes », puisque l’œuvre la plus connue d’al-Khawarizmi a été traduite en latin sous le titre de « Algoritmi de numero Indorum ». Cet ouvrage est aujourd’hui conservé à l’Université de Cambridge et sa première page commence par « Dixit Algorizmi », que l’on peut traduire par « Algorizmi a dit… ». Il est une autre explication au choix de ce titre, mais il vous faut la découvrir en regardant la pièce ! Quels thèmes particuliers y développez-vous ? « Dixit Algorizmi » relate les pérégrinations du jeune Momo, étudiant désinvolte et peu friand de sciences, qui remonte le temps pour se retrouver au Moyen Âge en plein cœur du monde arabo-musulman. Guidé par un mystérieux inconnu, il croise différents savants au cours d’un voyage qui le mènera à Bagdad, à Palerme et, enfin, en Andalousie. Sa rencontre avec des


mathématiciens, des astronomes, des ingénieurs, des physiciens, des médecins, des géographes, des poètes et des philosophes lui permet de découvrir ce que ces êtres, qui ont évolué au sein d’une société arabomusulmane ouverte et assoiffée de connaissances, ont apporté au patrimoine scientifique mondial. Ce périple lui permet également de remettre en question ses préjugés et certaines de ses convictions : son auto-dévalorisation culturelle, l’intolérance religieuse, une conception non pacifique du djihad, le manque de liberté d’expression, la discrimination à l’égard de la femme, etc. Tous ces thèmes, qui font l’objet d’une couverture médiatique considérable et dont on affuble très souvent le monde arabo-musulman actuel, sont abordés avec drôlerie et douceur afin d’en dédramatiser la portée. Où, comment et avec qui s’est déroulée la première représentation ? La première représentation a eu lieu à l’ULB le 30 mai 2015 à 14 heures pour les étudiants de l’université et les élèves du Lycée Guy Cudell. Une seconde représentation a eu lieu le soir pour le public. Quel accueil la pièce a-t-elle reçue ? Toutes les réactions ont été immédiates et cela a été un grand soulagement. Les spectateurs, jeunes et plus âgés, ont été positivement surpris par le contenu de la pièce et le jeu des jeunes comédiens (élèves du Lycée Guy Cudell à l’époque). L’émotion était palpable et certaines personnes ont même pleuré à l’issue du spectacle. C’est une expérience que je ne peux pas oublier ! Comment ce spectacle s’est-il ensuite retrouvé à l’Espace Magh ? Avant de monter la pièce avec mes élèves, j’avais envoyé le texte à Rachid Hirchi, coordinateur général à l’Espace Magh, qui m’a assuré qu’elle pouvait atteindre ses objectifs et recueillir un certain succès. Il m’a donc mise en contact avec Maroine Amimi, metteur en scène et comédien de talent, qui a lu le texte à son tour. Maroine a été également conquis et a accepté de se charger de la mise en scène. L’Espace Magh est devenu ainsi coproducteur de « Dixit Algorizmi ». Une représentation y a ainsi été programmée le 4 mars 2016 pour le grand public et ensuite les 28 et 29 avril 2017. Financer un spectacle, relève du challenge. Quelles aides avez-vous obtenues ? Trouver des fonds a été un réel défi ! Lors de la première représentation à l’ULB, la commune de Saint-Josse a financé le projet. Ensuite, l’ULB a introduit une demande de subsides auprès de la Cocof. Le bourgmestre de Saint-Josse a également offert trois représentations au Passage 44. Deux en 2016 et une en 2017. Nous avons donc bénéficié de l’aide de la Cocof et de la commune de SaintJosse. En 2016, les Diwan Awards se sont intéressé à ce spectacle et vous ont attribué un premier prix. De quelle manière, les événements se sont-ils enchaînés ? En novembre 2016, j’ai appris que j’avais été sélectionnée dans la catégorie « arts et culture » pour les Diwan Awards. On m’a ensuite informée de ma nomination et le 24 mars 2017, lors de la cérémonie officielle, j’ai remporté le Diwan de la personnalité de l’année pour ma pièce « Dixit Algorizmi » dans la section « arts et culture ». Le prix obtenu vous a-t-il servi de tremplin ?


Cette victoire a effectivement propulsé la pièce sur le devant de la scène. Les représentations, qui ont eu lieu après les Diwan Awards, ont attiré un très grand public et les réactions ont été très positives. Nous avons d’ailleurs une forte demande de la part d’enseignants ou d’associations qui veulent offrir ce spectacle aux jeunes. Certains spectateurs ont même émis le souhait de voir la pièce obtenir le label « spectacle d’utilité publique ». Pourquoi pas ? La pièce a été montée en mai 2018 au Maroc. Quel accueil y a-t-elle reçu ? Nous avons été invités par le Département du Service des Relations internationales de Saint-Josse à nous produire à Oujda, dans le cadre du Festival international de Théâtre le 12 mai 2018. Il s’agit d’une belle reconnaissance du travail accompli par les jeunes et une réelle opportunité de se faire connaitre à l’étranger. Nous avons été agréablement surpris par la réaction du public marocain, qui a fait preuve d’une curiosité particulière. Les spectateurs ont réagi positivement durant tout le spectacle et ont saisi certaines subtilités, alors que nous pensions qu’ils n’y prêteraient guère attention. Entre la première et la dernière représentation, certains aménagements ont été opérés. En quoi consistent-ils ? Les dialogues n’ont pas été modifiés. J’ai simplement ajouté un nouvel acte, avec de nouveaux personnages, et qui se déroule à Palerme. Lors de la première représentation, plusieurs personnes m’ont confié qu’elles auraient aimé que le voyage à travers les arabesques du savoir se prolonge, afin de faire durer leur plaisir. J’ai donc enrichi le texte pour répondre à cette requête, tout en étant moimême convaincue de la nécessité d’allonger la pièce. De nombreuses écoles ont découvert « Dixit Algorizmi » en salle. Quelle fonction peut-elle jouer auprès de la jeunesse actuelle ? La pièce « Dixit Algorizmi » est un véritable outil pédagogique qui permet, je pense, de lutter contre la désaffection des filières scientifiques dans l’enseignement supérieur en posant un regard original sur les sciences et de déconstruire les stéréotypes. Cette initiative vise effectivement à lever le voile sur la richesse intellectuelle d’une civilisation trop souvent et injustement vilipendée, en ouvrant la réflexion chez toutes celles ou tous ceux que l’actualité du monde arabo-musulman interpelle, et, d’autre part, à sensibiliser les jeunes élèves tentés par le repli identitaire en leur rappelant ce que leurs ingénieux prédécesseurs ont légué à la postérité sous l’égide d’un islam ouvert et tolérant. En définitive, ce projet considère la lutte contre la radicalisation « djihadiste » mais également contre l’islamophobie sous un nouvel angle : celui de la valorisation des sciences qui ont offert à la civilisation arabo-musulmane une indéniable splendeur, un « âge d’or » qui a permis d’éclipser l’obscurantisme par la quête du savoir, par l’expérimentation et la rationalisation et ce grâce à une ouverture d’esprit qui, dans nos sociétés actuelles, fait cruellement défaut. Avez-vous l’une ou l’autre anecdote à formuler ? J’ai plusieurs anecdotes à raconter, mais je retiendrai celles-ci : les larmes versées par certains spectateurs qui n’étaient pas forcément de culture arabo-musulmane, l’ancien directeur de la RTBF qui m’a confié, à l’issue de la représentation au Passage 44 le 22 octobre 2017, qu’il avait effectué une centaine de kilomètres pour voir la pièce mais qu’il était prêt à en parcourir des milliers s’il le fallait, les nombreux jeunes qui m’envoient des messages via les réseaux sociaux pour me demander s’il n’y aurait pas un rôle pour eux, les spectateurs fidèles qui ont vu plusieurs fois le spectacle sans jamais se lasser ou la version néerlandaise qui a été jouée le 13 mai dernier à Vilvoorde. Ce sont en réalité plus que de simples anecdotes. Il s’agit d’une très belle reconnaissance de la part d’un public varié, venu de tous les horizons.


Aujourd’hui, on parle de Bruxelles société multiculturelle. Quel regard posez-vous sur son évolution depuis une trentaine d’années ? Voyez-vous l’une ou l’autre chose à améliorer ou l’un ou l’autre changement nécessaire ? La société bruxelloise est multiculturelle, qu’on le veuille ou non. Ne pas reconnaître l’implication réelle des Belges d’origine étrangère dans la société et accepter ceux-ci tout en leur rappelant systématiquement qu’ils demeureront ces « Autres » venus d’ailleurs ne fait que creuser davantage le fossé. La diversité doit être considérée comme une richesse, une force et non comme un frein. Je porte donc un regard assez critique sur l’évolution de la société bruxelloise, mais je reste optimiste malgré tout. On ne peut pas faire abstraction des difficultés rencontrées aujourd’hui plus que jamais par ces jeunes belgo-marocains, belgo-congolais ou belgo-turcs dans le monde du travail : la discrimination à l’embauche a encore de très beaux jours devant elle, hélas. En tant que Belge d’origine étrangère, vous devez prouver deux fois plus que vos camarades ou que vos collègues vos compétences, c’est un fait. Mais il est évident que l’effort doit être fourni de part et d’autre, afin de construire ensemble un avenir commun autour de valeurs universelles et de vivre harmonieusement dans le respect des spécificités des uns et des autres. Utopique me direz-vous ! La culture joue un rôle vital dans la société, il faut donc offrir davantage de moyens à ceux qui veulent œuvrer par ce biais et tenter de changer les mentalités. Il faut démocratiser la culture, la rendre accessible pour tous et éviter qu’elle ne soit le monopole de certains. Dans quel quartier aurions-nous la chance de pouvoir vous croiser ? Je suis Anderlechtoise et je fréquente depuis mon enfance la bibliothèque du centre Maurice Carême, à proximité de l’Église Saint-Guidon. J’adore cet établissement parce que j’en garde de très bons souvenirs d’enfance et que j’y laisse souvent voguer mon imagination. J’aime la simplicité et la solitude. Il m’arrive très souvent de déambuler seule dans les rues de Bruxelles sans jamais m’ennuyer. Quels sont vos projets ? Deux grands projets sont nés suite à l’aventure « Dixit Algorizmi ». Celui sur le partage des cultures entre Juifs et musulmans en collaboration avec le Musée Juif de Belgique et celui autour de l’histoire de la colonisation de l’Afrique et celle du Congo en particulier. Nous avons construit avec nos élèves du Lycée Guy Cudell une belle exposition intitulée « Noirs desseins pour blanches aspirations ? Une Histoire belgo-congolaise », qui deviendra itinérante cette année. Nous espérons ainsi toucher de nombreuses écoles car il est, aujourd’hui, vital d’aborder sereinement et sérieusement certaines pages sombres du passé de notre pays. L’an prochain, une nouvelle pièce de théâtre sera d’ailleurs présentée dans le cadre de ce projet. Propos recueillis par Daniel Bastié


SPECTACLE POUR ENFANTS : PIGNOLO FAIT SON SHOW ! Formé par un vétéran d’un cirque mondialement réputé, le clown Pignolo fait partie de ces artistes précieux qui sévissent dans la capitale. Le samedi 29 septembre, sa tournée s’arrêtera à 14 heures au Centre d’Art fantastique de Bruxelles (annexe du Musée d’Art fantastique), un véritable écrin pour tous les amateurs d’étrange et de curiosités qui accueille sculpteurs et dessinateurs renommés. Aussi une manière de concilier le monde des cimaises et l’univers burlesque du café-théâtre et du cirque durant cinquante minutes de ravissement, de rires et d’étonnement ! Seul sur les planches, l’artiste jongle avec les mots, pratique quelques tours de magie qui s’inscrivent dans une histoire menée au cordeau et entraîne le public (constitué d’enfants de moins de douze ans) sur les pistes de mondes étranges concoctés spécialement à leur intention. Puisqu’on se trouve au sein de la dépendance du Musée d’Art Fantastique, chacun de ses spectacles a été nourri d’une touche d’ésotérisme, avec une sorcière qu’on ne voit jamais, mais dont la malédiction est suggérée par quelques anecdotes, des formules incantatoires et la présence d’un vieux chaudron, d’un grimoire ou de quelques crânes maléfiques. Que les mamans se rassurent. Au programme : rien d’effrayant ni de déstabilisant ! Pignolo connaît trop le monde des petits pour ne pas les angoisser ni leur raconter de quoi les empêcher de dormir. D’ailleurs, le conservateur du Musée veille personnellement à ce que tout se déroule dans une ambiance familiale et sympathique. Exceptionnellement (quartier Ma campagne en fête !), l’accès au spectacle est entièrement gratuit ! Réservations toutefois souhaitées au 0475 41 29 18 (Michel Dircken) Rue de la glacière 18 à 1060 Bruxelles André Metzinger

LOISIRS : GOLF TERROR Installé au Centre d’Art Fantastique, le « golf terror » est un golf miniature de dix-huit trous, qui reste unique en Europe. Le joueur évolue au sein d’un décorum à thématique horrifique, passant par le cimetière aux poupées, un château hanté à l’allure antédiluvienne et le refuge inquiétant des sorcières de Tharkham. Cette animation, logée dans un ancien grand frigo des glacières de Bruxelles, est idéale pour débuter l’année scolaire en pleine forme et se remettre d’un été caniculaire. Brouillard, bruits suspects et projections agrémentent un parcours semé d’embûches, où spécialistes adroits dans le maniement du putter, nabots, nains, amateurs néophytes et enfants de tous âges s’amusent de concert. Cette animation temporaire est accessible plusieurs fois durant l’année et se dévoile parfois en version nocturne. L’occasion de faire intervenir l’un ou l’autre monstre crépusculaire. A la demande générale, elle est de retour au Centre d’Art Fantastique de Bruxelles jusquà la fin du mois de septembre 2018. Voyez l’ensemble des informations pratiques sur le site www.fantastic-museum.be Rue de la glacière 18 à 1060 – Bruxelles André Metzinger


MORT D’UN CINÉMA DE QUARTIER : L’ACTOR’S STUDIO Clap de fin pour l’Actor’s Studio qui a baissé définitivement le rideau cet été. Créé voici 30 ans, ce petit cinéma indépendant était apprécié des cinéphiles, qui venaient y voir des films d’auteur ou des films d’art et d’essai toujours projetés en version originale sous-titrée. Ses trois salles, accessibles dans une galerie, étaient situées dans une petite rue perpendiculaire à la rue des Bouchers, à deux pas de la Grand-Place. Nous avons suivi, la mort dans l’âme, la dernière séance de ce cinéma pas comme les autres.

L’Actor’s Studio a donc refermé ses portes au cœur de l’été, le mardi 31 juillet. Il s’en est allé dans l’indifférence générale, sous le regard compassé et un peu dédaigneux de la présentatrice de la RTBF qui annonçait sa disparition. Ce petit cinéma de trois salles, comptant 218 sièges, a baissé le rideau sur Razzia, un film d’auteur dû à Nabil Ayouch qui interroge la société marocaine à l’agonie, partagée entre l’islam grandissant et le monde contemporain replié à Casablanca, dans l’attente de jours meilleurs. Une société écartelée entre la religion conservatrice reprenant sa tutelle, et la tolérance d’esprit qui a toujours caractérisé les milieux cultivés. Avec Maryam Touzani, la compagne du réalisateur, qui joue le rôle d’une femme émancipée à l’écran. Comme dans ce film qui nous fait vivre les dernières heures de liberté sur la plage de la ville, l’Actor’s Studio a vécu la fin de son aventure commencée voici 30 ans avec son directeur Claude Diouri, lui aussi d’origine marocaine et défenseur d’un cinéma indépendant. Les cheveux au vent sous sa légendaire moustache à la gauloise, il s’est expliqué sur la fin anticipée du cinéma, qui aurait dû fermer ses portes en décembre prochain. « Je ne suis pas triste, nous a-t-il confié, mais c’est malheureusement ainsi. Les contingences économiques, institutionnelles, techniques, et l’évolution du centre-ville à Bruxelles nous contraignent à la fermeture de l’Actor’s Studio. » Evolution des habitudes pour regarder un film plutôt sur tablette que sur grand écran, baisse de la fréquentation des salles, passée de 56 000 spectateurs à 32 000 ces trois dernières années, matériel vieillissant, subsides insuffisants, travaux autour du piétonnier rendu inaccessible pour les véhicules, tout s’est ligué contre ce petit cinéma de quartier voué aux films d’auteur et aux films d’art et d’essai. Y compris, au mois de juillet, la Coupe du Monde et la chaleur suffocante qui ont porté le coup de grâce aux trois salles. « Les difficultés, ajoute Claude Diouri, se sont encore aggravées depuis le mois de mai avec ces chaleurs étouffantes qui se sont abattues sur la ville. Les gens ne vont plus au cinéma quand il fait aussi chaud. J’ai tenu le Studio pendant 30 ans, avec beaucoup d’énergie. Mais en définitive, aujourd’hui, tous les facteurs étaient réunis contre nous. Tant que je pouvais payer mon personnel, j’étais content. Mais je n’y arrive plus. Il faut fermer boutique. »


Ecrivain, peintre, photographe et cinéaste Passionné par les films d’auteur qu’il nous a révélés, Claude Diouri avait ouvert l’Actor’s Studio en 1990, après avoir dirigé le Styx à Ixelles pendant une vingtaine d’années, d’abord rue du Prince Royal puis rue de l’Arbre Bénit, où le cinéma attend toujours un repreneur. Il fut critique de films dans Trépied, une revue qu’il avait fondée en 1968 pour soutenir le cinéma de résistance au lendemain de Mai 68. Il fut aussi l’auteur d’un livre émouvant et autobiographique, Maintenant tu sais, où il nous raconte son enfance à Fez, son séjour à Paris où il a fréquenté ponctuellement l’Idhec, l’Institut des hautes études cinématographiques, et ses tribulations de gérant de salles dans notre capitale. L’ouvrage est paru en trois tomes, le premier en 2012. Cet homme de cinéma a été marqué par Le Septième Sceau d’Ingmar Bergman, qui nous conte la lutte entre la vie et la mort dans une partie d’échecs qui se joue lors de la guerre des Croisades. C’est lui aussi qui a signé avec d’autres cinéphiles la pétition pour la survie du Nova, dont nous vous parlions dans une précédente édition. Il était persuadé qu’il restait au moins à Bruxelles cent personnes désireuses de voir ou de revoir chacun des films qu’il proposait dans son Studio, en version originale sous-titrée dans nos deux langues. C’est pour ces personnes qu’il défendait âprement les trois salles. L’une d’elles est intitulée Sélim Sasson, du nom du célèbre critique de cinéma de la RTBF qui enchantait notre rêverie sur le petit écran. Les trois salles du Studio furent refaites en 2007, et elles proposaient une petite collation pour les mamies et les enfants après les films qui leur étaient destinés. Claude Diouri reste fier de ces moments partagés avec les enfants. Aux raisons évoquées par le directeur, il faut ajouter enfin qu’avec l’ouverture du Pathé Palace le partage des films d’auteurs a été réparti entre différentes salles de cinéma au détriment de l’Actor’s. Il y a aussi la concurrence de Netflix qui a débarqué sur les tablettes et sur le petit écran. « Heureusement que la direction de l’hôtel qui abrite l’Actor’s Studio a permis à toute l’équipe d’atterrir en douceur », nous confie Claude. Même si l’hôtel compte récupérer les lieux pour s’agrandir, comme le précise Georges Jetter, l’administrateur des trois salles. Tout ceci explique donc la fin prématurée du cinéma cet été. A la tristesse des cinéphiles venus assister à la dernière séance, Claude Diouri a répondu par une boutade dont il a le secret : « A la prochaine, pour d’autres itinérances. Car nous sommes tous d’éternels voyageurs, comme dans Razzia », a soupiré l’homme de 78 ans. Espérons qu’il y ait un autre port d’attache pour tous ces films merveilleux qu’il nous a permis, pendant 30 ans, de voir et de revoir. Plus d’informations sur www.actorstudio.be. Michel Lequeux


EXPOSITION : GYSLAINE PACHETMICHENEAU Née en 1960 à Saint Jean D’Angely, un petit village des Charente-Maritime, Gyslaine PachetMicheneau s’est d’abord passionnée pour le dessin, avant de s’intéresser à l’aquarelle, puis de trouver son épanouissement avec la peinture à l’huile exécutée au couteau. Essentiellement paysagiste, elle arpente sa belle région pour observer la nature qui fluctue au fil des saisons et ramener des images subjectives de fleurs, de cours d’eaux et de champs qui caractérisent la campagne. Loin de toute abstraction, elle peint des sujets liés à son quotidien et refuse toute étiquette. Ses proches affirment que ses toiles correspondent à son tempérament, à la fois doux et patient. Peindre le réel ne consiste néanmoins pas à réaliser des copiés-collés. Avec une acuité toute personnelle, l’artiste capte les mille reflets qui naissent sous le poudroiement de la lumière, retravaille chaque croquis pour qu’il corresponde à son goût et n’hésite jamais à ôter ou à ajouter plusieurs éléments afin qu’ils contribuent à rendre chaque œuvre belle et harmonieuse. La prise de conscience du temps qui passe sur les choses est exprimée par des touches de couleur où dominent les jaunes et les rouges. La nature a éternellement été un thème de prédilection pour les peintres qui, toujours, se sont évertués à la rendre poétique et à exprimer une impression de sérénité face à elle. Mais parler d’introspection revient naturellement à exagérer. Il suffit de se placer en face des œuvres de cette artiste venue du Sud-Ouest de la France pour comprendre la petitesse de chaque être humain devant la magnificence de la création et, disons-le tout de go, d’une certaine solitude. Pourtant, point de tragédie ni de sentiments en berne ! Gyslaine Pachet-Micheneau représente avant tout la joie de vivre, le bonheur de s’exprimer sans contraintes ni entraves et le fait d’être libre face à son chevalet. De cette heureuse alchimie née du geste de créer, on assiste à la naissance de toiles qui deviennent le miroir de la personnalité de l’exécutante. Ceux qui connaissent les lieux représentés peuvent témoigner que, à chaque fois, le point de vue est respecté et qu’il n’existe aucune trahison, même si la transposition demeure subjective. En ce sens, cette plasticienne appartient à la longue lignée de ceux qui peignent la réalité et qui se veulent autant coloristes que graphistes. D’emblée, il émerge de ses tableaux une dialectique ressentie de l’environnement qu’elle suggère, de sorte que le visiteur se sente immergé dans un univers qui lui est a priori étranger et avec lequel il se familiarise peu à peu. Autant qu’une plongée dans une région qui ne ressemble en rien au bitume et aux gros pavés de Bruxelles, chaque peinture se veut une invitation au voyage et à l’évasion. Cette exposition est à découvrir jusqu’au 30 septembre 2018 à Espace Art Gallery. Plus de détails sur le site www.espaceartgallery.eu

Rue de Laeken, 83 à 1000 Bruxelles Daniel Bastié CONCERT : CŒUR DE PIRATE On aime ou on déteste Béatrice Martin (alias Cœur de Pirate), néanmoins elle ne laisse personne indifférent. Après avoir bourlingué un peu partout et s’être exposée comme membre du jury de « La Nouvelle Star », elle est de retour avec un nouvel album qui privilégie la formule intimiste piano/voix. A nouveau, la mélodie prime, sans jamais flirter avec la facilité ni la vulgarité. Sur scène, la belle aux nombreux tatouages déploie une énergie contagieuse et s’offre sans retenue pour communier avec les spectateurs qui se sont déplacés afin de l’applaudir. Pour le plaisir de se produire sur les planches, la blonde Canadienne sera à L’Ancienne Belgique le 8 octobre 2018 à 20 heures. Plus de détails sur le site www.abconcerts.be Boulevard Anspach 110 à 1000 Bruxelles


UN KET DE BRUSSELLES : TU ES BELGE, UNE FOIS ? Le Français moyen (ce qui est un pléonasme, newo, un bon Brusseleir sait ça, y a pas plus moyen qu’un Parisien) un Français moyen, donc, s’il apprend que tu es Belge, va te bombarder de « une fois » à la fin de chaque phrase pour te montrer son éclectisme et sa compassion pour les sousdéveloppés de sa langue maternelle qu’il nous croit. Lui qui te cause en franglais comme monsieur Jourdain faisait de la prose, potverdekke ! Juste un petit rappel : les Français ont pris le nom de leurs envahisseurs (les Francs) alors que nous, on est restés Belges (Horum omnium fortissimi sunt Belgae, dixit Iulius Caesar) de la Gaule Belgique. Au sud de la Somme, ils ont abandonné le titre de Gaulois pour celui de Francs : des Germains venus de l’Est, ça rappelle de bons souvenirs pas si éloignés. Malgré tout, quand il s’agit de parler de résistance, ils retrouvent leur atavisme avec Astérix !!! Qui c’est alors, les bâtards, une fois? Messire Boileau (à ta santé, mais pas pour moi) disait « qu’il n’est de bon bec que de Paris ». Awel merci ! Ils ont du vin qu’ils savent plus quoi en faire et messire boit de l’eau ! Et monsieur Beau De L’air prétendait que le faro « c’est une bière bue deux fois » sous-entendu que c’est de la pisse ! Évidemment s’il ne buvait que de l’eau ce Charel, il ne savait pas ce qui est bon, ara ! À Paris ils ont la Foire du Trône (quel trône, dis ? ils n’ont plus de roi !) c’est très joli. Mais va unefois (nè tiens, là il est bien mis) boire un godet à la Foire de Bruxelles, fieu ! Un moules et frites comme ça dans ton plastron avec une demi-gueuze pour arroser et tes pieds sur la chaise d’en face, occupé à regarder Jules L’Amour exhiber ses muscles et proposer un défi à qui veut, à la lutte gréco-romaine (encore une fois le Iulius). Et toutes ces mokkes habillées au plus court qui passent en-dessous de ton nez… Bien sûr, il y en a à Paris aussi, mais des qui sont nourries au pistolet fourré au kip-kap, à la gozette aux pommes et cornet de frites avec des pickels, avec des joues comme deux verres de kriek, ça tu ne trouves pas là-bas. Ils disent comme ça qu’on a un accent. Eux, ils ont bien une cédille, c’est pas mieux ! Un peï de la Canebière il a pas d’accent, peut-être ? Et un de Strasbourg ? Ou un de Toulouse ? Chez nous on a aussi des prononciations un peu djoum-djoum c’est d’accord. Tu prends un Liégeois et tu le fais causer à un Tournaisien. Ouille ouille fieu quelle cata ! Entre « look on pon » et « ravise mi cha » il y a juste 200km ! Et tu mets un Brusseleir avec et ça fait la tour de Babel : « Zie ma dat is af » ! Tout ça pour dire : « regarde un peu ». Qu’est-ce que tu sais dire en bas de ça ? Le Français se moque de notre langage : il dit qu’on cause mal. Son approche est fausse : il imite un Flamand qui essaie de parler français. Tous les francophones de Belgique causent un français acceptable, et si un Flamand a l’amabilité de parler la langue du pays voisin, il ne faut pas rigoler sur son dos. Tu as déjà entendu un Parisien parler Anglais ? Le bon bec de Paris n’est pas formé pour les prononciations étrangères, alors il se complaît dans l’ostracisme (« Ostracisem ? Ostracisem ? » disait monsieur Beulemans). Mais il faut arrêter de zieverer sur les Français. Des braves gens comme ça… D’abord un Charles nous a sauvés des Arabes en 732, puis son petit-fils nous a donné l’école (d’après France Gall), après ça un Louis l’État nous a procuré une belle Grand Place, et même un Corse nous a offert Waterloo. J’oubliais le grand Charles qui nous a légué le siège de l’OTAN ! Que du bonheur et picaillons, newo ? Quand tu as Manneken Pis et la belle Tomiome entre tes blaftures (volets, extension :oreilles), c’est pas un vieux tas de ferrailles comme la Tour Eiffel qui va te faire peur, si ? Un pavé de Bruxelles dans la vitrine de chez Fauchon, ça mettrait leur Brie de Meaux au prix de l’Ettekeis (fromage de Bruxelles). Ou bien le contraire. Eh bien malgré qu’on cause pas tout à fait la même langue, on les aime quand même, nos amis les petits Français. Juste qu’on leur en veut un peu en 2018. Tu vois pourquoi ? C’est pas que je suis foutbaliste dans l’âme comme Victor et Lange Jojo, mais ça pince quand même. Allez, encore cette année, on a été les plus braves, nè tiens, une fois ! Georges Roland (Retrouvez les romans bruxellois de Georges Roland


CONCERT : CHARLES AZNAVOUR Charles Aznavour est né à Paris (1924), de parents arméniens fuyant le génocide perpétré par les Turcs. Le père chanteur ouvre un restaurant. La débrouille, pas la misère mais une enfance où, avec sa sœur et chers parents unis, il participe à neuf ans à l’ambiance pour égayer la clientèle. Peu ou prou d’éducation scolaire. On vivote durant la Deuxième Guerre cachant, protégeant quelques Juifs. 1941 : il rencontre l’intelligent pianiste Pierre Roche. Désœuvrés, la passion pour le swing les rapproche. Débuts de compositeur. Il chante le « café frappé avec des pailles ». « Pour faire une jam » connaît un certain succès. Huit années de duo puis séparation car Roche tombe amoureux de la chanteuse Aglaé. En 1946, Charles rencontre Edith Piaf. « La môme Piaf » le soutient. Le nez d’Aznavour est trop long ? Piaf, altruiste, lui paie une chirurgie esthétique aux Etats-Unis. Il lui sert en fait « d’homme à tout faire ». La critique affirme qu’il n’a pas de voix, qu’il ne peut pas chanter les chansons d’amour. Orgueilleux comme pas deux, il répond : « J’ai plus de trois octaves ! » Pour Piaf, à qui il doit beaucoup, il offre « Le Bleu de tes yeux ». Charles ne désire pas suivre André Claveau ni le style de Dario Moreno ! Années 1950-60 : montent au créneau Gilbert Bécaud, Georges Brassens, Jacques Brel. Hors normes Léo Ferré, Juliette Gréco, Catherine Sauvage, Cora Vaucaire, Patachou. Et viendra Jean Ferrat ! 1960 : Aznavour veut abandonner la chanson. Il compose pourtant pour Vartan et Hallyday. En fait, il se lance avec succès dans une carrière d’acteur où Truffaut, toujours Truffaut, lui met le pied à l’étrier en 1960 : « Tirez sur le pianiste » demeure l’un de ses meilleurs rôles ! « Découvert par Barclay ? » Sans doute. Hiver 1961, il cartonne à « L’Ancienne Belgique » avec « Je m’voyais déjà » et « Tu T’laisses aller ». Il sort du music-hall en manteau de fourrure -acheté rue d’Arenberg - et s’engouffre dans une Rolls-Royce noire. Riche et célèbre il en achètera quatre ! Au haut de l’affiche, il festoie, flambeur et tombeur de femmes. Le succès le grise. Il va se montrer un redoutable homme d’affaire, oublie ses épouses et enfants, sauf la troisième ! Charles s’assagit et devient une idole incontournable semant partout la bonne parole. Bien entendu, il suivra la mode, s’habillera de vestes bling-bling, oubliera vite les petits boulots et les minables cachets, jamais semblet-il le fait que les parents de sa mère venaient de la bourgeoisie cossue et perdirent tout sauf l’honneur. Aznavour est aussi écrivain (égocentrique). Défenseur de la cause arménienne. Autodidacte, il peut parler de tout et est devenu une idole ! Aujourd’hui, il reprend un tour de chant et devrait venir à Bruxelles (Forest National) le 26 octobre prochain … si sa santé le permet ! Plus de détails sur le site www.forest-national.be Avenue Victor Rousseau 208 à 1190 Bruxelles Jean-Louis Cornellie


TOONE : LUCRÈCE BORGIA Ça en est un drôle de bazar que ce stûût avec une jolie mokke qui a fait bibberer sur leurs rotules tous les mâles de son époque ! Tu sais certainement de qui je parle. Allons, t’as sûrement vu les films dans lesquels elle fait un tour de piste, poussée par son frère César, un scheile qui se veut plus riche que tout le monde et plus puissant que Dieu lui-même. T’as peut-être aussi suivi dans la petite lucarne la série « Les Borgia ». Ah, cette fois, je vois que ta petite lanterne est allumée. Ara! Mais tu dois pas me prendre pour un zieverer. Il n’est pas question de te conseiller d’aller chez Toone pour revoir ce que t’as découvert dans le rectangle de ton poste de télévision, avec une bière sur le plateau de la table gigogne sur laquelle tu poses aussi les pieds et un paquet de chips sur les genoux. Cette fois, l’histoire est pas scribouillée par un faiseur d’Hollywood, plutôt inspirée des vers de Victor Hugo, un peï qui était une véritable star de son temps et qui a eu droit, comme Johnny, à des funérailles nationales. Un castard qui savait raconter comme pas deux et qui avait acquis de la galette en écrivant jour et nuit. Le drame, car il s’agit d’homicides, de malversations et d’amours en stoemelings, se passe dans un cadre médiéval vaticanobruxello-belge (caractéristique du théâtre de Toone !) où rien ne se déroule comme prévu par rapport au script original d’Hugo. Lors du règne de l’antipape Alexandre VI, amateur d’un lambic mieux connu à l’époque sous le nom d’élixir de « Hop-la-la ! », lequel redonnerait selon la rumeur une belle vigueur aux plus extrêmes des ascètes, le népotisme faisait rage et il était courant que l’on devienne papeke de père en fils … un peu comme aujourd’hui nos politiciens placent sur les listes électorales leur fifille et leur fifils pour que, à leur tour et à peine pubères, ils se transforment en bourgmestre ou en ministre avec plein d’oseille à la clé. Pour garder les rênes du pouvoir, ce stouffer n’hésite pas à déplier le grand nuancier des magouilles les moins reluisantes et manipule autant son gamin César, cardinal malgré lui, que sa fille Lucrèce, une beauté dont tous les hommes sont paf et qui n’hésite jamais à mettre en avant son tettegaraach pour les faire tomber de leur sus. C’est naturellement Woltje qui fait les frais des avances de cette jolie mademoiselle qui traîne toute la journée en zhabits vaporeux. Sans perdre un temps précieux, elle sème aussi la bisbrouille dans la cervelle du chevalier de Radijzegang. Chez nous, on connaît le dicton : « Tous les chemins de Rome mènent à la Piazza di Jo di Balli » (Place du Jeu de Balle), où se déroule un des principaux chapitres de la tragédie. Bien sûr, on ne monte pas une pareille pièce comme on aménage son appartement pour une partie de poker entre zattekuls. On met les petits plats dans les grands et on peut être fier des décors créés par Raymond Renard, un manneke qui n’a pas deux mains gauches et qui doit être le fils caché de Magritte ou de Dali. Alors que l’action se met en place, le mercure monte dans les thermomètres et l’ambiance devient olé-olé, pas au point d’interdire l’accès aux moins de dix-huit ans, mais en insistant pour que les parents ne viennent pas avec des snotneus (qui d’abord ne comprendront rien à l’intrigue, mais qui risquent ensuite d’être choqués par ce qui leur sera proposé sur scène). Attention, ce n’est pas non plus un énième épisode de la franchise « Série rose » ou un extrait du « Collaro Show » avec sa pin-up de dix-huit heures trente. Tout est dans la suggestion, la force des dialogues et les sous-entendus en brusseleir. L’occasion de constater que les pouchenels ne sont pas toujours de bois. Pour ne rien changer d’un iota, Nicolas Géal prête sa voix à tous les personnages et fait du mimétisme sur-mesure pour que le régal soit parfait. « Lucrèce Borgia » (mi-Géal mi-Hugo) est à applaudir chez Toone jusqu’au 29 septembre 2018 inclus. De quoi te faite oublier tous les emmerbêtements de la vie et t’instruire pour ne pas passer pour un snul auprès de ta famille et tes collègues ! Enfin pour vivre une chouette soirée avant d’aller t’enfiler une Kriek ou un paquet de frites bien grasses. Vois tous les détails pratiques sur le site www.toone.be Impasse Sainte Pétronille – Rue du Marché-aux-Herbes 66 à 1000 Bruxelles Daniel Bastié


LA REVUE NOUVELLES DE FLANDRE… ET D’AILLEURS Une revue existe pour les quelque 350 000 francophones qui habitent la Flandre, en ce compris la périphérie de Bruxelles et l’entité des Fourons. Elle s’intitule Nouvelles de Flandre et s’adresse à nos compatriotes qui s’intéressent à la langue française et à sa culture. Ce trimestriel, qui dispose d’un site internet publié en français, néerlandais, allemand et anglais, souhaite créer des liens entre les francophones et les francophiles pour les réunir chez nous et par-delà nos frontières. C’est la seule revue de Flandre qui subsiste à côté d’une presse francophone qui s’est réduite à l’hebdomadaire La Semaine d’Anvers, depuis la disparition du Courrier du littoral en 2008 et du Nouveau Courrier en 2000, qui avait succédé au Courrier de Gand en mars 1994. Le but de l’association qui préside la revue est de défendre les intérêts de la minorité francophone de la Région flamande, du fait que ni l’Etat fédéral belge ni aucune de nos entités fédérées n’ont ratifié à ce jour la convention européenne sur la protection des minorités en 2007. La Belgique a d’ailleurs émis des réserves sur la signature du traité. On connaît le poids des nationalistes flamands, comme la NVA, qui y font obstacle. Le magazine, édité par l’Association pour la promotion des Francophones de Flandre (APFF), contient des articles culturels, un agenda des activités en français, un carnet d’adresses et des liens vers d’autres sites. Régulièrement, sous la plume avisée d’Anne-Françoise Counet, la revue publie des dossiers bien faits sur l’état du français dans le monde. Le dernier numéro de juillet-septembre était consacré à l’Algérie, où la langue de Voltaire garde une place particulière. Statut du français en Algérie On sait que le français fut la langue des colons qui occupèrent l’Algérie de 1830 à 1962. Cent trente ans de colonisation qui ont marqué profondément le peuple algérien. Dans sa chair et dans sa mémoire. Qu’allait donc devenir le français au terme de la guerre d’indépendance (1954-1962) qui libéra l’Algérie de la France ? Mort ou vif, le français en Algérie ? Tantôt combattu âprement par l’arabisation comme langue de l’ex-colonisation, tantôt senti comme la langue de la modernité ouvrant le pays sur l’Europe, il continue, aujourd’hui encore, d’être utilisé par les intellectuels, les écoles supérieures et les universités dans les filières scientifiques. Les sections de sciences sociales et humaines, elles, sont largement arabisées, comme l’enseignement primaire et secondaire. Le français est présent aussi dans la presse : six quotidiens francophones paraissent encore à Alger, tandis que de nombreux auteurs, souvent bilingues comme Amina Mekahli, continuent de publier en français. Le français garde donc une place privilégiée dans la société algérienne. Il joue un rôle important dans la littérature et dans la presse écrite, voire orale, mais il est aussi présent au niveau de l’administration, des secteurs économiques et des banques. Vous découvrirez dans ce numéro consacré à l’Algérie l’histoire récente du pays, dominée par son indépendance, par l’arabisation et par la « décennie noire » qui a causé la mort de près de 150 000 Algériens dans les années 90, suite au refus du gouvernement de reconnaître la victoire aux urnes du Front islamique du Salut (FIS). Vous visiterez aussi l’Algérie en couleurs et en coups de cœur, dans ce pays où il y a tant de belles choses à voir, à commencer par les trois grandes villes, Alger, Oran et Constantine, la ville d’Enrico Macias. Sans oublier Tipaza et les ruines romaines qui ont ému Camus. Si vous voulez vous faire membre de la revue : Spreeuwenlaan, 12 à 8420 De Haan. Adresse du site : www.francophonie.be/ndf Michel Lequeux


THÉÂTRE : L’HEUREUX ÉLU Le Théâtre royal des Galeries ouvre sa saison en fanfare avec la dernière pièce aux deux Molière d’Eric Assous. Auteur prolifique et réputé, celui-ci signe avec « L’heureux élu » une nouvelle variation qui met à mal l’amitié et les relations humaines. Après « Les belles-sœurs », « Nos femmes », « Les hommes préfèrent mentir », etc., il nous plonge au cœur d’une soirée au cours de laquelle la jolie Charline présente celui avec lequel elle envisage de se marier. Un homme trop beau, trop riche et trop bien éduqué pour le clan de vieux beaux qui se revendiquent de gauche. Très vite, la belle déchante en se confrontant aux réflexions de ceux sur lesquels elle croyait pouvoir s’appuyer. Eric Assous livre une pépite où le verbe fuse, où les répliques se révèlent d’une vibrante acuité et où les caractères s’emballent. Il nous parle également des liens indéfectibles (ou qui devraient l’être !) qui unissent des connaissances de toujours et qui voient leur sphère perturbée par l’irruption d’un intrus, étranger aux codes et aux modes de fonctionnement du groupe. Que faire ? Taire les ressentis, feindre le silence ou prononcer un avis qui, forcément, risque de heurter ? L’amitié implique-t-elle de clamer haut et fort ce qu’on a sur le cœur, de se livrer sans limites ou, plutôt, de veiller à ménager celles et ceux qu’on apprécie ? Puis, un avis relève-t-il toujours de la pertinence et de l’objectivité ? Enfin, aimer réellement un proche n’implique-t-il pas de respecter ses choix ? Comme on se situe sur le monde des planches, les tempéraments s’exacerbent, les répliques fusent et la situation emprunte une piste savonneuse pour le plus grand bonheur du public venu assister à un jeu de massacre jubilatoire. Ce qui pourrait tourner à la seule joute orale se double d’une véritable épaisseur sociale. Lorsque les masques tombent, chacun se révèle dans toute sa petitesse, avec son esprit étriqué et son égocentrisme. Au lieu de se réjouir du bonheur de Blandine, les copains se renfrognent et adoptent un réflexe grégaire, qui fait la force et pose les limites de la meute. L’occasion de darder quelques poignards bien acérés et d’exhumer d’anciennes rancunes. « L’heureux élu » se situe au niveau d’une comédie bien troussée et non du drame. Durant une heure trente, les spectateurs naviguent en eaux troubles et découvrent jusqu’où chacun est capable de s’enfoncer. Du coup, ils deviennent témoins d’un feu d’artifices de mauvaise foi, d’arguments acidulés et d’échanges qui, fatalement, tournent au pugilat. A mesure que le venin se distille, l’auteur abat ses cartes avec méthode et nous réserve moult retournements de situations. A nouveau, il nous parle de quarantenaires engoncés dans leurs principes, incapables de se projeter en avant et convaincus d’être dans le vrai. Avec humour, il balaie les certitudes et montre chacun sous son vrai visage, au demeurant peu reluisant. Martine Willequet propose une mise en scène pleine de rythme et de couleur et se sert merveilleusement du mimétisme de Christel Pedrinelli, Nicole Oliver, Frédéric Nyssen, David Leclercq et Nicolas Buysse pour décrire les lâchetés ordinaires et l’exubérance de protagonistes qui n’ont de leçons à donner à personne. Un miroir de notre quotidien ? « L’heureux élu » est à voir au Théâtre des Galeries jusqu’au 7 octobre 2018. Plus de détails sur le site www.trg.be Galerie des Princes, 6 à 1000 Bruxelles Daniel Bastié


CINÉ-DIMANCHE : LE SENS DE LA FÊTE Traiteur depuis trois décennies, Max (Jean-Pierre Bacri) est, par la force des choses, impliqué dans divers événements familiaux. Avec les années, il sent poindre la lassitude. Pire, il a perdu le feu sacré qui l’a si souvent animé, ainsi que le goût des festivités. Aujourd’hui, il est amené à offrir ses services à un mariage bling-bling dans un château classé. Il s’agit de célébrer les noces d’Héléna (Judith Chemla) et Pierre (Benjamin Lavehrne), aussi jeunes que beaux. Avec un réel professionnalisme, il a tout réglé comme un coucou suisse. Serveurs, cuisiniers et plongeurs ont été recrutés avec soin pour que tout soit millimétré. Il a même conseillé un photographe, réservé l'orchestre et arrangé la décoration florale pour transformer cette journée en un moment inoubliable. Mais les imbroglios vont se multiplier pour chahuter le planning et créer des tensions. Le duo Eric Toledano-Olivier Nakache (« Intouchables », « Samba ») se retrouve aux commandes de ce long métrage qui combine humour et tendresse et qui se déroule sur vingt-quatre heures. Emportés par la tornade Jean-Pierre Bacri et son air bougon, les seconds rôles ont été travaillés sur mesure (Jean-Paul Rouve, Gilles Lellouche) et brossent une galerie de portraits attachants. L’humour repose sur des dialogues ciselés et sur la complicité des comédiens. Bien entendu, les metteurs en scène s’amusent à égratigner la société et peaufinent les caractères. L’occasion de s’amuser en compagnie d’un beau-frère dépressif, d’une régisseuse hystérique, d’un marié imbu de sa personne et d’une mariée qui ne vaut pas tellement mieux. Sans nous gratifier d’un film révolutionnaire, ils nous permettent d’assister à de jolies salves de langage pour nous réjouir pleinement. « Le sens de la fête » est à revoir le dimanche 23 septembre 2018 à 10 heures 15 au Centre culturel d’Uccle. Plus de détails sur le site www.ccu.be Rue Rouge 47 à 1180 Bruxelles Daniel Bastié

THÉÂTRE : SOUS LA ROBE Faut-il rappeler le succès de « Sous la robe », pièce écrite et interprétée par Nathalie Penning et mise en scène par Nathalie Uffner ? Après les représentations sold oud des années précédentes, personne ne pouvait demeurer sourd face à la demande de revoir cette pépite d’humour. La bonne nouvelle est que le Centre culturel d’Uccle a décidé d’offrir une séance de récupération pour toutes celles et à tous ceux qui avaient raté les représentations précédentes et permettre aux autres de revivre un agréable moment en compagnie d’une véritable avocate qui n’a pas la langue en poche, qui possède un sens inouï de la formule et qui a eu le don de réconcilier les Belges avec la justice. Avec un zeste de causticité, des situations pittoresques et des personnages burlesques, Nathalie Penning décrit les rouages d’un métier qu’elle exerce depuis de nombreuses années et qu’elle connaît évidemment sur le bout des ongles. Tout sonne donc vrai et les anecdotes proviennent de situations vécues. Par le biais du rire, l’artiste parvient surtout à humaniser une profession mal ou peu connue du citoyen et dévoile quelques ficelles qui aident à saisir le milieu dans lequel elle évolue. La caricature est parfois féroce, mais jamais méchante. Au-delà de ce simple constat, l’originalité tient enfin dans la singularité de l’interprète qui accueille le public avec la même robe qu’elle enfile au moment de plaider. Une prouesse à applaudir le vendredi 29 septembre 2018 à 20 heures 15 au centre culturel d’Uccle. Plus de détails sur le site www.ccu.be Rue Rouge 47 à 1180 Bruxelles Daniel Bastié


THEATRE : LE GRAND MEAULNES SUR LES PLANCHES C’est une histoire d’amour qui a fait rêver plus d’une génération. Chaque fois qu’on la relit, on y découvre autre chose. Un autre charme, une autre saveur. Cela s’appelle un chef-d’œuvre de la littérature. L’unique roman d’Alain-Fournier est porté actuellement sur les planches de la Comédie Volter. Pour le plus grand bonheur des amoureux de la romance, qui sentiront leur cœur palpiter en suivant les aventures du « Grand Meaulnes ». Relisons le premier chapitre de ce beau récit poétique. Quelques semaines après la rentrée scolaire, François Sorel, un adolescent de seize ans, voit arriver dans la classe Augustin Meaulnes, un nouvel élève qui, comme lui, souhaite obtenir le brevet d’instituteur dans ce petit village perdu de Sologne. Garçon étrange et secret, Augustin fascine autant qu’il étonne ses camarades. Lorsqu’il disparaît pendant trois jours, personne ne sait où il est allé ni ce qu’il a fait. Que s’est-il passé durant sa fugue ? A son retour, François tente de percer le mystère qui entoure son ami. Celui-ci est obsédé par le souvenir d’un château perdu dans la forêt, où une fête étrange a eu lieu. Augustin y a rencontré la fille du châtelain, Yvonne de Galais, dont il s’est épris. Malheureusement, il ne se souvient plus du chemin qui mène au château de sa bien-aimée. Comment retrouver celle-ci ? Unique roman d’Alain-Fournier (qui s’appelait en réalité Henri-Alban Fournier), Le Grand Meaulnes fut publié en 1913, après une aventure amoureuse vécue à Paris par le jeune auteur. Il y raconte comme dans un rêve le premier amour de sa vie. Un amour sans espoir, qu’il n’oubliera jamais et qui lui fera écrire ce récit plein de nostalgie, où se dessinent les premiers élans du cœur et de la sensualité. Après avoir tenté la marine sans succès, Alain-Fournier entre dans le monde de la presse en devenant le secrétaire de Claude Casimir-Perrier. La guerre éclate un an plus tard et notre auteur est mobilisé, comme tant d’autres jeunes gens alors. Il rejoint le 288e régiment d’infanterie avec le grade de lieutenant. Il disparaîtra à l’âge de 27 ans dans les premiers affrontements qui se déroulent à Verdun, sans qu’on puisse identifier le lieu de cette disparition. Il fut officiellement déclaré mort en 1920, son corps n’ayant pas été retrouvé. C’est en 1991 que ce corps sera exhumé à l’orée d’un bois et identifié, sur les lieux mêmes où les affrontements firent rage entre les deux armées. Alain-Fournier avait été enterré dans une fosse commune creusée par les Allemands à Saint-Rémy-la-Calonne (Meuse), avec vingt autres soldats français qu’il commandait et qui furent pris dans une embuscade. La pièce, présentée en plein air en août dernier au domaine du Château des Goffes de Pailhe, dit « Le Domaine des Roses », est reprise ici à la Comédie Volter, dans une adaptation scénique de Danielle Fire. Elle est jouée par une brochette de comédiens qui nous entraînent à leur suite avec toute une gamme d’émotions qu’ils font partager. Citons Catherine Conet, Margaux Laborde, Isabelle Roelandt, Jonas Claessens, Franck Dacquin, Laurent Renard, Abel Tesch, Serge Zanforlin et Maximilien Delmelle. Ils prennent ainsi la relève de deux longs métrages déjà consacrés au Grand Meaulnes : celui de Jean-Gabriel Albicocco avec Brigitte Fossey dans le rôle d’Yvonne de Galais (1967) et celui de Jean-Daniel Verhaegen avec Nicolas Duvauchelle interprétant Augustin Meaulnes (2006). Ils nous emmènent tous, ici sur les planches, dans la même féerie romantique. Un événement à applaudir jusqu’au 30 septembre à la Comédie Volter. Plus d’informations sur le site www.comedievolter.be Avenue des Frères Legrain 98 à 1150 Bruxelles Michel Lequeux


EXPOSITION : GET UP, STAND UP En cette période de revendications généralisées et avec les élections qui se rapprochent insidieusement, il est parfois bon de regarder dans le rétroviseur et d’analyser l’Histoire en se remémorant les grands mouvements contestataires des années 1968 à 1973 : Mai 68, le Vietnam, la lutte des minorités pour davantage d’égalité, … L’ancien site Belle-Vue propose une exposition qui regroupe un peu moins de cinq cents documents (affiches, posters, objets hétéroclites) ayant un lien avec les poings qui se sont dressés et les pavés qui ont été lancés un peu partout dans le monde. La plupart des pièces proviennent de collections privées émanant d’une trentaine de pays, même si la grande majorité provient du fonds détenu par Michael Lellouche, véritable passionné et chineur invétéré. Afin de dynamiser l’événement, des montages vidéo ont été conçus, tant pour plonger les visiteurs dans le contexte de chaque période que pour rappeler aux jeunes des dates précises. Les enfants n’ont pas été oubliés avec des ateliers ludiques conçus à leur seule attention, tandis qu’un espace défouloir rappelle aux aînés qu’il est parfois bon d’exprimer sa rancœur et ses refoulements en frappant un punching-ball plutôt que d’aller fracasser le crâne des élus. A cet effet, le musée permet de retrouver les punching-balls créés en 1969 par Julio Le Par et qui invitent à frapper un militaire, un prêtre, un enseignant, un médecin, un notaire, etc. Au demeurant, l’expo « Get Up Stand Up » se targue de nous rafraîchir la mémoire et nous rappelle l’urgence de ne pas oublier nos responsabilités citoyennes. Alors que la société européenne s’enfonce de plus en plus dans les inégalités et que la peste brune renaît de ses cendres, il est bon de rappeler à quel point chacun doit faire face à ses prises de conscience et défendre son libre-arbitre. Une exposition à découvrir du mercredi au dimanche de 10 à 18 heures au Mima et ce jusqu’au 30 septembre 2018. Plus de détails sur le site www.mimamuseum.eu Quai du Hainaut 39-41 à 1080 Bruxelles Sam Mas

LES JEUNES ENTRENT DÉSORMAIS GRATUITEMENT AUX MUSÉES ROYAUX D’ART ET D’HISTOIRE ! Permettre aux jeunes d’entrer en contact avec l’art, la culture et la science est primordial pour le développement de citoyens responsables. En même temps, il est parfois financièrement inabordable pour les écoles d’organiser une sortie culturelle pour leurs élèves. C’est la raison pour laquelle les Musées royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles, avec le soutien de leur commission de gestion et de la secrétaire d’état en charge de la Politique scientifique Zuhal Demir, ont décidé d’accorder, et ce à partir de ce mardi 5 septembre 2017, la gratuité d’accès à ses collections permanentes à toutes les personnes âgées de moins de dix-neuf ans, en visite individuelle ou en groupe. Ceci concerne donc également les groupes scolaires. La gratuité est aussi octroyée à tous les visiteurs souffrant d’un handicap (sur présentation d’une carte), ainsi qu’à leur accompagnateur éventuel. Par ailleurs, le prix d’entrée pour les collections permanentes des musées a été aligné sur les standards internationaux, plus conformes au marché (10 € au lieu de 8 pour un visiteur adulte pour le Musée du Cinquantenaire ou le Musée des Instruments de Musique, 7 € au lieu de 5 pour la Porte de Hal). Les tarifs pour réserver une visite guidée ont eux aussi été légèrement augmentés. Les Musées royaux d’Art et d’Histoire ambitionnent en permanence d’offrir les meilleurs services possibles à leurs visiteurs. Pour découvrir dans le détail tous les changements de tarifs, visitez www.mrah.be


THÉÂTRE : REINES DE PIQUE Le spectacle « Reines de Pique » nous relate le voyage de deux femmes qui se rendent à Douvres, là où le Roi Lear avait échoué. Sur les traces de Shakespeare et du roi Lear, personnage qui depuis des siècles arpente la condition humaine, la maîtresse et la bonne effectuent un cheminement qui se veut autant physique qu’introspectif. Marie, la servante, est humble et à l’écoute, tandis qu’Elisabeth, la patronne, femme de théâtre et veuve sur le déclin, est aussi folle que le roi de la célèbre tragédie l’était. Elle parle sans cesse de son métier et évoque avec nostalgie sa prestation de Juliette, la fameuse amoureuse du tout autant célèbre Roméo. Durant le trajet, elles affichent une fameuse complicité et n’arrêtent pas de jouer leur identité à pile ou face. Auparavant, jamais elles n’avaient parlé de la sorte. Elles sont à la fois en conflit et en osmose totale. « Quand je suis moi, je suis toi. Quand le temps est à la pluie, il m’arrive de nous voir comme deux reines de cœur, mille fois rebattues dans une partie de poker par une main invisible. » Pour Elisabeth, se rendre à Douvres revient à s’offrir un pèlerinage et retrouver un personnage phare de l’œuvre de Shakespeare, plutôt que d’admirer la ville d’aujourd’hui. Au cours d’une randonnée sur les falaises, alors que gronde une féroce tempête, elle imagine le Roi Lear en délire : « Hurlez Vents, crachez ! » A travers les cris du personnage né sous la plume du célèbre auteur dont nous célébrons le cinq-centième anniversaire, elle peut exprimer toute sa souffrance de comédienne et de femme, qui a été soumise à un mari tyrannique. Les roses qui tapissent la scène revêtent une allure symbolique car, si ces fleurs sont belles, elles opposent leurs épines à qui souhaite s’en emparer. Elisabeth n’a jamais été une cigale et a toujours préféré chanter tout l’été. Comme le Roi Lear, elle a été meurtrie, mais elle tient farouchement à sa fierté et garde la tête haute. Cette fable philosophique est à la fois drôle et touchante et constitue un grand moment de théâtre qui repose sur l’égalité des chances, surtout lorsqu’elles se disent : « J’aime cet absolu de toi ! » Là, chaque protagoniste enlève sa carapace pour s’exposer dans sa fragilité et toute son humanité. L’auteur, Jean-Marie Piemme, qui s’est inspiré de Shakespeare, a écrit cette pièce sur mesure pour mettre en valeur deux merveilleuses actrices. Mais, ont-elles encore besoin de prouver quelque chose ? Pour ma part, j’aurais aimé plus de bouffonnerie pour faire passer un message nourrissant. Ceci dit, je vous conseille d’aller voir cette pièce, magnifiquement défendue par Jacqueline Bir et Janine Godinas, toutes deux exceptionnelles. Vous avez jusqu’au 23 septembre 2018 pour admirer au Théâtre des Martyrs leur performance sous la direction de Philippe Sireuil, assisté de Michel Jurowicz. La scénographie est de Vincent Lemaire, les costumes de Catherine Somers, le maquillage et les coiffures de Zoza Urteza da Fonseca et Céline Yetter. Plus de détails sur www.theatre-martyrs.be Place des martyrs, 22 à 1000 Bruxelles Maurice Chabot


CINÉ-CONCERT : JAWS – LES DENTS DE LA MER Voilà un film de légende qui a inscrit John Williams au panthéon du cinéma et lui a valu son premier Oscar (récompense suprême !). En 1975, dans toutes les salles de cinéma du monde, « Jaws » a fait trembler et hurler les spectateurs, notamment grâce à une bande originale à vous glacer le sang. Adaptée du roman à succès de Peter Benchley et réalisée par le jeune Steven Spielberg, cette histoire vous plonge dans les aventures sanglantes d’une petite ville côtière où un grand requin blanc répand la terreur. Le week-end du 4 juillet, alors que les familles américaines célèbrent joyeusement la fête nationale, l’animal aux dents acérées sème la panique. Heureusement, trois héros locaux sont là pour déclarer la guerre au tueur des mers et nous offrir un happy end ! En dépit des énormes défis techniques et des conditions de tournage très difficiles, « Jaws » a été un des plus grands triomphes de tous les temps. Steven Spielberg a estimé devoir une grande partie de son succès à la partition composée par John Williams, complice qu’il n’a plus jamais lâché. Voici donc une occasion unique de revoir ce long métrage, sublimé par l’extraordinaire puissance du Brussels Philharmonic, qui jouera en live ce score mythique, basé sur quelques notes atonales de cordes en train de progresser en crescendo pour représenter la menace du requin. Un concert à vivre le vendredi 21 septembre à 20 heures 15 et le dimanche 23 septembre 2018 à 15 heures. Plus de détails sur le site www.flagey.be Place Sainte-Croix à 1050 Bruxelles Sam Mas

THÉÂTRE : L’HOMME QUI MANGEA LE MONDE Un homme de trente-cinq ans, dents longues, belle bagnole et beau costume, doit subitement s’occuper de son père qui perd la tête. Et, peu à peu, tout lui échappe : travail, femme, enfants, amis, etc. Pour quelqu’un qui a l’habitude de tout contrôler, son monde devient flou, notamment la frontière entre sa propre responsabilité et les injustices qu’il subit ou croit subir. Il est à deux doigts du burn out. Comment prendre du recul et ne plus se sentir envahi par ses craintes ? Tout est trop. Il lui faudrait s’arrêter quelques jours, plusieurs semaines. Un mois, peut-être ? Prendre de la distance avec une existence qui l’agresse de toutes parts et ne lui laisse aucun répit pour profiter d’elle, s’offrir trois ou quatre plaisirs bien égoïstes pour sentir vibrer en lui des plaisirs quasiment oubliés. Se défaire de toute cette merdre existentielle afin d’endiguer la chute fatale. Nis-Momme Stockmann dépeint une génération touchée par une profonde crise de sens et dont l’identité se fissure de toutes parts. Il questionne nos vies et la quête du bonheur dans une société où il faut abattre l’autre et « manger le monde » sous peine de disparaître. Il livre ici un texte fort, qui met en scène des naufragés du quotidien et dans lesquels nous pourrions bien nous reconnaitre. Le Théâtre de Poche renoue ici avec la veine sociétale de Georges Lini, un artiste entier et enflammé. Sur les planches, Itsik Elbaz, Vincent Lecuyer et Luc Van Grunderbeeck sont à applaudir du 25 septembre au 13 octobre 2018. Plus de détails sur le site www.poche.be Chemin du Gymnase 1A à 1050 Bruxelles


QUATRE JOURS DE CINÉMA À CINQ EUROS CINQUANTE ! Du dimanche 23 au mercredi 26 septembre 2018, les « BNP Paribas Fortis Film Days » sont de retour ! Pendant quatre jours, tous les tickets seront vendus à 5,5 € l’unité et … pour tout le monde ! Une aubaine pour les cinéphiles et ceux qui souhaitent découvrir les nouveautés sur grand écran. Pour les dévorer avidement et (pourquoi pas ?) enchaîner les séances, rien de plus facile. L’occasion également de profiter d’une brochette d'avant-premières croustillantes. Il y en aura pour les goûts de chacun ! A ce tarif-là, pourquoi se priver ? Dès maintenant, vous pouvez découvrir la liste complète des cinémas participants (dont Kinépolis er UGC De Brouckère) et prendre connaissance des longs métrages proposés en première vision via www.filmdays.be Willy Smedt

EXPOSITION : LOL La Cambre Mode(s) conteste et manifeste en s’installant au Musée. Par essence, l’école observe, analyse, questionne, détourne et déplace les codes du vêtement. Cela fait partie de son ADN. Au-delà des enjeux socio-politiques, l’impact et l’influence sociale de Mai 68 avaient aussi ouvert une voie publique à la question du corps et de la sexualité. Par un étrange retour de manivelle, nous nous trouvons aujourd'hui face à tant de contrastes entre, d’une part, ce qui est (enfin) admis et, d’autre part, le retour d'une pudeur aux allures de pruderie. Parcours dans une garde-robe singulière qui questionne tout autant le corps, la nudité, le sexe, et le vêtement. L’acronyme « lol » (Laughing out loud) est utilisée dans le jargon internaute, notamment dans le contexte de la messagerie instantanée, des forums de discussion et du courrier électronique afin d'accélérer l'écriture et ponctuer un propos. Elle permet de signifier rapidement qu'un message lu, ou une situation, est trouvé drôle. En français, le terme « lol » est également utilisé dans le but de souligner une remarque, exprimer une surprise, sans que celle-ci soit nécessairement drôle. Il peut même parfois arriver que le terme soit au contraire sarcastique, voire ironique, et vise à souligner l'absence totale d'hilarité chez celui qui l’emploie. Ces usages s'éloignent de son origine anglaise qui se réfère plutôt à une réelle hilarité. L’exposition-événement baptisé « Lol » est à découvrir au Musée de la Mode et de la Dentelle jusqu’au 30 septembre 2018. Voyez toutes les informations pratiques sur le site www.fashionandlacemuseum.brussel Rue de la Violette 12 à 1000 Bruxelles Sam Mas


FÊTE DE LA BD 2018 Comme chaque année, ne ratez pas le rendez-vous festif organisé dans la capitale. Depuis 2010, avec sa programmation diversifiée, la Fête de la BD a été lancée pour promouvoir l’art des romans graphiques et faire découvrir gratuitement au public l'une des plus belles vitrines du savoirfaire créatif belge et bruxellois. A l’instar des éditions précédentes, les petits plats ont été mis dans les grands pour que tout soit parfait. A nouveau tout s’articulera à partir du Parc de Bruxelles, avec une multitude d’activités et d’animations, un rallye de voitures anciennes et la désormais attendue Balloon’s Day Parade à l’américaine qui parcourra les boulevards du centre. Cette édition 2018 se voudra aussi celle des hommages. Les connaisseurs savent que nous célébrons les 60 ans de la création des Schtroumpfs, les 70 ans d’Alix et les 80 ans de Spirou. Avis aux nostalgiques ! Dans le cadre de sa neuvième édition, la Fête de la BD remettra pour la seconde fois les Prix Atomium de la Bande Dessinée, avec pas moins de neuf récompenses pour un montant global de 115.000 euros, afin de permettre aux créateurs de financer leur travail et leurs efforts. Le parrain de la cérémonie de trophées sera le scénariste français Fabien Vehlmann, auteur de la série « Seuls » et de « Spirou et Fantasio ». La Fête de la BD propose également un programme de conférences thématiques varié en présence d’auteurs, d’historiens, de chercheurs, de spécialistes thématiques, de coloristes, de journalistes … qui se réuniront pour évoquer les sujets brûlants qui animent le 9e Art. A cela, les auteurs qui ont vu leur personnage prendre vie au cinéma (comme Zep pour « Titeuf » ou Bastien Vivès pour « Polina ») auront l’occasion de présenter les films qui les mettent en scène. Certains de ces longs métrages seront diffusés en avant-première grâce à la collaboration de la Cinematek. Enfin, la sortie d’un numéro spécial des magazines « Spirou » et « Fluide Glacial » deviendra l’occasion pour les créateurs de ces deux géants de la BD de s’affronter dans un match d’Impro complètement déjanté. Qui en sortira vainqueur et vont-ils s’entredéchirer ? Réponse à Bozar ! Un événement à vivre du 14 au 16 septembre 2018. Plus de détails sur le site www.visit.brussels/fr/sites/comicfestival

Paul Huet EXPOSITION : SARAH LOUNICI Tout le monde connaît le MIM ou Musée des Instruments de Musique, logé à un jet de pierre du Coudenberg et à l’ombre de la statue de Godefroid de Bouillon carré sur un magnifique destrier. En plein cœur de la capitale, dans une architecture complexe, composée d’une partie néo-classique et d’un bâtiment Art nouveau, ce musée pas comme les autres vous invite à découvrir un millier d’instruments plus extraordinaires les uns que les autres, venus du monde entier et ayant appartenu à des collections publiques ou privées avant d’être répartis sur quatre étages d’exposition, afin d’être admirés par un public de connaisseurs et permettre aux autres de se familiariser avec l’univers de la musique, grâce à des panneaux didactiques, un système de sonorisation idoine et un parcours ludique. Depuis son ouverture, le MIM dispose également d’une salle de concert, d’une boutique, d’un restaurant offrant un panorama sur le centre historique de Bruxelles et une bibliothèque rassemblant des ouvrages spécialisés et, parfois, extrêmement rares. On le sait beaucoup moins, ce musée organise régulièrement des expositions temporaires consacrées aux travaux méritants de jeunes artistes ou d’étudiants portant bien entendu sur l’univers des notes et des portées. Sarah Lounici, âgée de dix-huit ans, élève à l’Athénée royal de Ganshoren et résidant à Laeken, a été retenue pour exposer son travail de fin d’études intitulé « L’architecture du son » jusqu’au 30 septembre 2018. L’occasion d’admirer seize photographies couleur prises dans le musée et retravaillées ultérieurement. L’opportunité surtout d’encourager une jeune fille bien dans sa peau et de se laisser éblouir par son regard sur des instruments qui, tout d’un coup, nous apparaissent sous un angle nouveau. Une manière d’aborder la valeur esthétique de chacun d’eux, en se laissant séduire par les courbes, les angles et les contrastes de lumière. Rue Montagne de la Cour 2 à 1000 Bruxelles Daniel Bastié


THÉÂTRE MUSICAL : SYLVIA « Je gagne ma liberté en rognant sur mes heures de sommeil ». Cette citation de Sylvia Plath résume bien la pensée et le conflit intérieur de cette poétesse américaine des années 50 et 60. Figure de proue d’un féminisme plus poétique qu’engagé, elle s’est débattue toute sa vie entre le désir de correspondre au rêve américain (épouse et mère parfaite) et le besoin irrépressible d’écrire. Une contradiction profonde qui l’a menée à la tombe. Une vie complexe est consignée dans un journal intime, qui permet de découvrir son existence de jeune femme et une première tentative de suicide à l’âge de vingt ans. De cette période, elle a tiré un roman « The Bell Jar – La cloche de détresse » en 1963. La réalité n’a pas tardé à rattraper la fiction, puisque la même année, l’écrivaine s’est donné la mort, un peu comme si la mise en scène de sa dépression l’avait poussée à commettre l’acte ultime. Afin de se pencher sur cette voix féminine (qui n’est pas sans rappeler Virginia Woolf), Fabrice Murgia a conçu un opéra pop original pour une chanteuse et quinze femmes, mis en musique par la pianiste et auteure-compositrice belge An Pierlé, accompagnée de son Quartet. Sur scène, un plateau de tournage révèle à la fois un film en cours de réalisation et ses coulisses. Une création à la lisière du théâtre et du cinéma avec, notamment, Valérie Bauchau, Clara Bonnet, Solène Cizeron, Vanessa Compagnucci, Vinora Epp, Léone François, Magali Pinglaut, Ariane Rousseau et Scarlet Tummers à découvrir du 29 septembre au 12 octobre 2018 au Théâtre national. Plus de détails sur le site www.theatrenational.be Boulevard Emile Jacqmain, 11-115 à 1000 Bruxelles Sam M as

THÉÂTRE : DANS LA PEAU DE CYRANO Enorme succès à Avignon, où il a été joué en juillet dernier pour la sixième année consécutive, « Dans la peau de Cyrano » nous présente Colin, un adolescent qui arrive dans un nouveau collège. Pas facile de passer du monde de l’enfance à celui des grands, surtout quand on est différent. La route est semée d’embûches. Mais une rencontre déterminante avec son professeur de théâtre, figure paternelle et bienveillante, guidera ses pas vers un nouvel essor, comme une nouvelle naissance. Cette pièce se veut un formidable hommage au théâtre, à l'œuvre d'Edmond Rostand, à l'amitié, à l'acceptation de la différence, mais aussi au rôle primordial que peut jouer un pédagogue dans le parcours d'un élève. Avec légèreté et efficacité, Nicolas Devort passe d’un personnage à l’autre. Avec aisance et facilité, il les incarne, crédibles, bien construits, tous ensemble au service de l’histoire. Voici un seul en scène d’une virtuosité époustouflante, qui émeut, ravit et apporte plusieurs réponses sur le désarroi de certains adolescents. « Dans la peau de Cyrano » est à applaudir le mercredi 26 septembre 2018 à 20h30 au Centre Culturel d’Auderghem. Plus de détails sur le site www.ccauderghem.be Boulevard du Souverain 183 à 1160 Bruxelles Willy Smedt


COMEDIE MUSICALE : L’HOMME DE LA MANCHA Il y a un demi-siècle, le 4 octobre 1968, la comédie musicale américaine « M a n o f L a M a n ch a » était créée à la Monnaie dans la version de Jacques Brel. Dix ans plus tard, le 9 octobre 1978, le célèbre chanteur s’éteignait. Aujourd’hui, le KVS et la Monnaie s’associent pour proposer une nouvelle mise en scène de cette œuvre mythique, en guise d’hommage tant à Brel qu’au temps où Bruxelles brusselait, mais avec le regard tourné vers la ville d’aujourd’hui et de demain. Michael De Cock, directeur artistique du KVS, met en scène cette comédie musicale emblématique dans laquelle Cervantès, le manuscrit de son roman « D o n Q u i c h o t t e » sous le bras, se retrouve dans les geôles de l’Inquisition et interprète l’histoire du chevalier sans armure pour ses codétenus. « Rêver un impossible rêve… Suivre l’étoile… ». Il a été raconté que, lors d’un séjour à Madrid, Dale Wasserman (le futur auteur de « Vol au-dessus d’un nid de coucou ») a découvert le personnage de Don Quichotte et, de retour aux States, a proposé au compositeur Mitch Leigh de s’affairer à la partition d’un futur musical et a sollicité Joe Darion pour les lyrics. Montée à Broadway, l’œuvre a remporté un vif succès. De passage aux Etats-Unis, Jacques Brel a été enthousiasmé par la beauté des mélodies et l’impact du sujet. Il s’est appliqué à la rédaction de paroles françaises et a forcé la porte des producteurs pour imposer son adaptation. En passant de l’anglais à la langue de Molière, la pièce n’a rien perdu de ses caractéristiques. Fondamentalement, il s’agit de proposer au public un divertissement lyrique, jamais naïf, et qui contient tous les ingrédients du drame : héros décalé, sensible à de grands principes, rempli de bons sentiments, habité par des manières surannées, obnubilé par un amour inaccessible et touchant par sa naïveté. A cela, le livret évite la facilité et se charge de références réalistes, notamment à l’Inquisition. Grâce à l’orchestration, des couleurs exotiques et ensoleillées font entrer l’Espagne dans la salle de spectacle. Dans les rôles principaux, Filip Jordens, Ana Naqe, Gwendoline Blondeel, Pierre Derhet, Bertrand Duby, Raphaële Green sont à applaudir jusqu’au 27 septembre 2018 au KVS. Plus de détails sur le site w w w . l a mo n n a i e . be Rue de Laeken, 146 à 1000 Bruxelles Paul Huet

« GIRL » EN AVANT-PREMIÈRE AU FESTIVAL DE GAND Après avoir remporté le Prix d’Interprétation « Un Certain Regard » lors du dernier Festival de Cannes, le Prix Fipresci, la Queer Palm et la Caméra d’Or, le film « Girl » du jeune cinéaste belge Lukas Dhont sera présenté en première belge lors de l’ouverture du « Festival du film de Gand » le 9 octobre prochain, avant sa sortie en salles le 17 octobre 2018. « Girl » raconte l’histoire de Lara, quinze ans, qui rêve de devenir danseuse étoile. Avec le soutien de son père, elle se lance à corps perdu dans cette quête d’absolu. Mais ce corps ne se plie pas si facilement à la discipline imposée, car Lara est née garçon. Beaucoup de sensibilité au menu de ce long métrage, qui traite d’un sujet extrêmement rare au cinéma et qui vaut par une pudeur à mentionner, refusant le scabreux et le voyeurisme. Le jeu de Victor Polster est pour beaucoup dans cette réussite qui prouve que les talents sont nombreux dans notre royaume qui ne craint jamais le surréalisme. Sam Mas


CONCERT : JULIEN CLERC Julien Clerc, né Paul-Alain Leclerc, fait partie des icônes de la chanson française. Depuis ses débuts au cours des années 60, il a su imposer un style et des mélodies devenues incontournables au fil des décennies, sans s’astreindre aux modes et en conservant une liberté d’écriture qui lui est personnelle. D’une rare discrétion, il est toujours parvenu à s’entourer des meilleurs paroliers du moment, façonnant des tubes qui ont apporté de la joie à des millions de fans. Alors que plusieurs confrères ne sont plus, décédés ou partis à la retraite, il poursuit son bonhomme de chemin avec une honnêteté qui mérite d’être saluée. Un demi-siècle après ses premiers pas comme interprète, il nous revient en grande forme avec un concert fédérateur à Forest national. L’occasion d’assurer le service après-vente de son dernier bébé, mais surtout de sacrifier au bonheur de régaler le public avec ses hits intemporels : « Ma préférence », « Femmes, je vous aime », « Ce n’est rien » et « Mélissa ». Une tournée des cinquante ans qui n’est pas un au revoir, mais la promesse de futures belles rencontres. Un grand moment d’émotion et d’exception en perspective à découvrir le samedi 13 octobre 2018 à 20 heures. Plus de détails sur le site www.forest-national.be Avenue Victor Rousseau, 208 à 1190 Bruxelles Willy Smedt

THÉÂTRE JEUNESSE : LA PRINCESSE AU PETIT POIS De quelle manière dézinguer les contes classiques ? Avec une dose de dérision, de la bonne humeur contagieuse et un zeste de folie, il est possible de rire de choses sérieuses et de démystifier certains récits. Même si le spectacle débute par « Il était une fois », la suite n’a plus rien à voir avec tout ce qui a été vu ailleurs. Que se passe-t-il lorsqu’un prince cherche à tout prix à épouser une princesse ? En passant les stéréotypes à la moulinette, les surprises se succèdent et engendrent des situations saugrenues. Du coup, les spectateurs sont entraînés d’une ambiance à l’autre en compagnie de quatre comédiens qui transmettent leur plaisir communicatif. En filigrane, ils brocardent notre monde, notre société, nos tabous et se servent des clichés pour flinguer tous azimuts. A la base, on retrouve le conte d’Andersen qu’on a laissé mijoter, puis qu’on a saupoudré d’effets de lumière, de musique et d’une chorégraphie virevoltante. Le résultat est réjouissant, fait pour plaire et addictif. Dire que les enfants adorent est un euphémisme. Comédie charmante pleine de folie douce, « La princesse au petit pois » est à applaudir le 4 octobre 2018 à 14 heures à la salle Molière. Plus de détails sur le site www.escaledunord.brussels Rue d’Aumale, 2 à 1070 Bruxelles Daniel Bastié


FÊTES ROMANES Le temps d'un week-end, Wolubilis tourbillonnera au rythme des Fêtes romanes. Vingt scènes accueilleront vingt-cinq compagnies belges et étrangères pour plus de soixante-cinq spectacles gratuits : théâtre de rue, performances, mentalisme, cirque contemporain, danse, numéros aériens, jongleries, acrobaties, théâtre d’objets, marionnettes, pyrotechnie, etc. Mais aussi un marché en plein air avec une quarantaine de créateurs, un Village des Associations, un Village Vert faisant la part belle aux initiatives environnementales, une panoplie d’ateliers et d’animations pour petits et grands. Dans ce cadre s'inscrira également « la Rencontre des Créateurs » ou marché en plein air dédié aux artisans et créateurs de talent. Les pièces présentées seront uniques ou réalisées en série très limitées, avec des travaux innovants, originaux et ouverts à toutes les portefeuilles. On y trouvera des objets utilitaires : vêtements, chapeaux, t-shirts sérigraphiés, accessoires textiles, sacs, bijoux (en argent, en tissu, en verre, eighties ou épurés), parures de têtes, vaisselles, porcelaines, carnets, petits mobiliers, luminaires, doudous, bavoirs, etc. Un événement à découvrir le samedi 29 et le dimanche 30 septembre 2018 à Wolubilis. Plus d’informations sur le site www.wolubilis.be Cours Paul-Henri Spaak, 1 à 1200 Bruxelles Willy Smedt

OPÉRA : LA FLUTE ENCHANTEE Ouvre fascinante et merveilleuse, « La Flûte enchantée » a été composée dans l’enthousiasme fiévreux par Wolfgang Amadeus Mozart quelques semaines avant sa mort. Pour les connaisseurs, elle demeure le testament lyrique d’un homme à l’apogée de son talent, servie par une débauche de motifs, une couleur unique et une poésie rarement atteinte. Basée sur le livret d’Emanuel Schikaneder, la partition se prête à de nombreuses supputations. S’agit-il d’un récit ésotérique, symbolique ou, plus simplement, d’un beau conte destiné aux familles ? Certains ont même parlé d’influence maçonnique. Sans chercher à se mettre martel en tête, le plus sage consiste à voir ce spectacle total comme une splendide allégorie des rêveries enfantines, sorte de conte destiné à émouvoir et à enchanter. Depuis sa création, des générations de spectateurs ont été fascinées par les aventures de Papageno et les déboires des jeunes amants Tamino et Pamino. Afin de se distinguer de ses prédécesseurs et faire travail personnel, le metteur en scène Romeo Castellucci s’est éloigné délibérément de la dimension narrative originale, afin d’en explorer les émotions brutes et l’essence philosophique. A ses côtés, le chef d’orchestre Antonello Manacorda nous livre une partition immortelle servie par une distribution exceptionnelle, dont la soprano Sabine Devieilhe, l’une des meilleures Reines de la nuit de notre époque. Un classique à applaudir à La Monnaie jusqu’au 3 octobre 2018. Plus de détails sur le site www.lamonnaie.be Place de la monnaie à 1000 Bruxelles Sylvie Van Laere


EXPOSITION : MAURICE FRYDMAN Pour un artiste, il existe mille manières de s’exprimer. Dans son atelier anderlechtois, Maurice Frydman (né en France) se passionne depuis toujours pour la peinture et la sculpture. Même si ses premiers travaux étaient figuratifs, il a lentement opté pour l’abstraction et la fusion des matières. Il suffit de l’écouter parler de son travail pour se rendre à l’évidence qu’il a retenu de l’humain la texture de l’épiderme, faite de plis, de rides et de crevasses, qu’il obtient grâce à un travail méticuleux sur des membranes de polyéthylène et à une technique totalement maîtrisée. Laissons-le s’exprimer : « En réduisant ce qui est réductible, en multipliant les percées vers l’insaisissable, en me hasardant dans le monde improbable des matériaux les plus ordinaires et en les détournant de leur banalité quotidienne, je tente de m’arracher à l’univers du convenu et de l’ordinaire. Ce faisant, j’ai un jour vécu l’accident de parcours qui m’a révélé un nouveau territoire : celui des surfaces plastiques ouvertes aux empreintes, aux traces, aux sédiments, aux déchirements, aux arrachements, aux abîmes du creux originel : la matrice. Les figures de mes matrices aux surfaces plastiques aléatoires étirées et animées par des tensions et torsions extrêmes et contraires sont jonchées de blessures que nulle cicatrice ne peut effacer… Elles sont des épidermes morcelés en parcelles … Chacune d’elles fourmille de nervures et de vaisseaux en un certain ordre assemblés. Paysages de chairs étalées déroulant à l’infini ses détails et ses fragments, ses reliefs et ses aspérités, ses creux et ses gorges envahis d’un jus giclé plus qu’étalé dont seule la couleur est perceptible mais pas le parcours. Construire et déconstruire, composer et décomposer, jusqu'au déchirement, aller jusqu’au plus près de l’infiniment proche, jusqu’à l’origine de l'accomplissement. C’est la remontée de l’image vers la matière, de l’arrivée de la couleur vers l’aplat, du trajet de l’accident vers la blessure ... Être l’artisan de son propre cérémonial en procédant à l’acte du recouvrement et de l’étalement. Cratères et cavités ouvertes au jus qui s’écoule et déborde, glisse et se répand, s’infiltre et trouve son chemin au long des canaux, des plis et replis, des cassures et des nervures courant sur les surfaces frémissantes, tuméfiées, auréolées. Ou irrémédiablement obturées par l’hostilité d’un film plastique rebelle à son propre détournement. Les couches se succèdent, l’une après l’autre, d’arrachement en arrachement, jusqu’à l’usure, voire jusqu’à l’anéantissement de leurs sédiments. » Maurice Frydman présente ses modulations et variations picturales et plastiques les plus récentes sur le thème du corps, du pli et de l'épiderme à la Chapelle de Boondael jusqu’au 8 novembre 2018. Plus de détails sur le site www.ixelles.be Square du Vieux Tilleul, 10 à 1050 Bruxelles


CINÉMA : EN EAUX TROUBLES Financé par un programme international d'observation de la vie sous-marine, un submersible a été attaqué par une créature gigantesque. Sérieusement endommagé, il gît désormais au plus profond de l'océan Pacifique, où son équipage est pris au piège. Il n'y a plus de temps à perdre : Jonas Taylor (Jason Statham), ancien sauveteur-plongeur expert des fonds marins, est convaincu de s'extraire de son exil volontaire par un océanographe chinois particulièrement visionnaire (Winston Chao), contre l'avis de sa fille Suyin (Li Bingbing). En effet, celle-ci est certaine de n'avoir besoin de personne pour porter secours à l'équipage. Pourtant, elle devra s'associer à Taylor pour sauver les hommes et les femmes pris au piège – et l'écosystème marin – d'une redoutable menace : un requin préhistorique de 23 m de long connu sous le nom de Megalodon. Alors qu'on le croyait disparu, le Meg se révèle bien vivant et… en chasse. Cinq ans plus tôt, Jonas s'était déjà retrouvé face-à-face avec le squale, mais personne ne l'avait cru. En faisant équipe avec Suyin, il doit à présent surmonter sa peur et risquer sa vie pour plonger de nouveau dans les profondeurs de l'océan … et accepter d'affronter une fois encore le prédateur le plus terrible de tous les temps. Jon Turtletaub signe la réalisation sur un scénario de Dean Georgaris, Jon Hoeber et Erich Hoeber, d'après le best-seller, "Meg", de Steve Alten. Lorenzo di Bonaventura (la saga « Transformers ») et Colin Wilson (« Suicide squad », « Avatar ») ont produit le film, tandis que Harry Gregson-Williams en a assuré la musique originale. Un long métrage qui fait pif et paf, bourré d’effets spéciaux et formaté pour les ados boutonneux. Sam Mas

CINÉMA : RETOUR DU FESTIVAL UFA FILM NIGHTS ! Bozar et la Cinematek sont ravis de vous convier à la sixième édition des « UFA Film Nights » qui auront lieu les 20, 21 et 22 septembre 2018. Une fois encore, ces soirées exceptionnelles vous donneront l'occasion de (re)découvrir des monuments du cinéma mondial dans les meilleures conditions possibles. En effet, cet événement propose la projection de copies minutieusement restaurées de chefs-d’œuvre du cinéma muet accompagnés de musique live. Au programme de cette année : la partition de Carl Davis (à la tête du Brussels Philharmonic Orchestra) pour accompagner les acrobaties de Harold Lloyd dans « Safety Last » (1923), les sons électroniques du projet musical Arandel pour les épisodes 2 & 3 de « Les Vampires » (1915) de Louis Feuillage, ainsi que la musique du tromboniste Uwe Dierksen interprétée par I Solisti di Francoforte pour illustrer « Der Geiger von Florenz »(1925/26), version qui inclut de nombreuses scènes qui avaient disparu depuis longtemps et réhabilitées grâce au travail des studios de restauration de la Fondation Murnau. Sponsorisé et organisé par l’entreprise internationale de médias Bertelsmann et lancé pour la première fois à Berlin en 2011, le festival « UFA Film Nights » a pour vocation de préserver les toutes premières œuvres de l’héritage cinématographique européen de la seule manière possible : en les ramenant sur les écrans et sur les scènes des salles de ciné-concert. Plus de détails sur le site www.bozar.be Willy Smedt


PORTRAIT SUCCINCT : MICHEL MARINUS Professeur de morale laïque à l’Athénée Charles Janssens d’Ixelles et ancien élève de l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles, Michel Marinus a toujours pratiqué l’art comme une respiration vitale. Plutôt que de digresser à propos de son travail, le mieux est de relire un article rédigé par notre collaborateur Jean Lhassa et d’aller découvrir les œuvres que l’artiste a postées sur son site : « La modernité devrait être le lieu de toutes les communications. Jamais l’homme n’a autant communiqué que de nos jours. Presse ordinaire, radio, télévision, sociologie, psychologie, internet, mails divers, que dire, que constater ? La communication est telle qu’on n’en connaît plus le nom. L’artiste, lui, sait que la communication n’est pas ce qu’en disent les médias. Il sait que la communication n’est pas médiatique ni médiatisable. Il sait aussi qu’avant que de communiquer avec un public quel qu’il soit, il doit communiquer avec lui-même. Connais-toi toi-même, disait l’infaillible Socrate. C’est ce que je crois comprendre à travers l’œuvre, toujours plus serrée, toujours plus parlante et communicante, quant à elle, de Michel Marinus. Le peintre a déjà derrière lui un imposant parcours d’expositions collectives et personnelles. Une qualité à épingler parmi d’autres, est certes, s’additionnant à son continuum technique, la variété thématique de ses œuvres, rassemblées d’une exposition à l’autre selon l’inspiration de l’année. On ne saurait trop encourager l’artiste à persister dans sa quête thématique et à y trouver le bonheur lié à toute vraie création. » Découvrez ses travaux récents via le site www.michelmarinus.be

Sam Mas THÉÂTRE : IVO LIVI OU LE DESTIN D'YVES MONTAND Ils n’en finissent pas de raviver la fibre de la nostalgie, les spectacles qui rendent hommage aux artistes qui ne sont plus : Brassens, Vian, Barbara, etc. Avec chaque fois une émotion qui nous rappelle le bon vieux temps où tout était tellement différent d’aujourd’hui. Mais parfois, une création réellement originale sort les spectateurs du ronron et leur délivre un pur moment de bonheur. « Ivo Livi ou Le Destin d'Yves Montand » fait partie des joyaux à découvrir pour se réconcilier avec l’existence. L’occasion de découvrir qui était la future vedette du music-hall et du cinéma, avant de troquer son patronyme pour un nom de scène et être encensé par toute la profession, et de quelle manière il a gravi tous les échelons pour aboutir au sommet d’une carrière resplendissante. On suit donc le jeune Ivo, cadet d'une famille communiste pauvre dans l'Italie fasciste de Mussolini, à travers les péripéties à peine croyables de sa vie : de l'exode raté vers les États-Unis, qui voit les siens contraints de s'installer à Marseille, en passant par ses rêves de chanson, puis de septième art, tout en évoquant les conséquences terribles qu'ont failli avoir la consonance juive de son nom, sans omettre ses rencontres avec les grands de l'époque, ainsi que les femmes de sa vie. En un peu moins de deux heures, ce spectacle fait voyager le public des quartiers malfamés du Midi de la France aux studios hollywoodiens, de Kroutchev à Kennedy, de Prévert à Costa- Gavras, de Piaf à Signoret et permet de mettre en exergue les qualités (et les défauts) d’un homme qui s’est battu pour s’imposer et garder sa place. Avec un humour décapant et en musique, Ali Bougheraba (en alternance), Benjamin Falletto, Camille Favre-Bulle, Jean-Marc Michelangeli (en alternance), Cristos Mitropoulos et Olivier Sélac ravivent une tranche du passé et rappellent la poésie, la verve unique, les triomphes éclatants, les errements, la foi, les emportements et les paradoxes d’un artiste, véritable bête de scène, amoureux fou de la vie et des femmes et qui aimait répéter : « Le devoir d’un chanteur ou d’un comédien, c’est de se faire assez plaisir pour pouvoir le communiquer aux autres ». Un spectacle à applaudir au Théâtre Le public jusqu’au 27 octobre 2018. Plus de détails sur le site www.theatrelepublic.be Rue Braemt 64-74 à 1210 Bruxelles Daniel Bastié


SPECTACLE : BIBOT DISTINGUÉE Laurence Bibot est de retour avec un nouveau stand-up décapant et, face au public, elle se livre sans tabous. Après le succès de « Bibot debout », elle prouve qu’elle fait partie de ces rares humoristes féminins qui n’hésitent pas à rire des autres autant que d’elle-même. Avec des textes ciselés, elle demeure un cas à part dans l’univers du showbusiness. Un sacré bout de femme qui n’a pas sa langue en poche et qui flingue tous azimuts. Du haut de son mètre 85, elle toise la société et la décape avec une acuité très personnelle. Toutefois, chez elle, la crudité des propos est constamment tempérée par une élégance ostensible. Libre, infiniment drôle et complètement givrée, elle ose tout, claironne ce que les autres pensent tout bas et se livre sans complexes, en prenant des allures de duchesse détachée ou de bourgeoise outrée. On se situe à des lieues de ses premiers essais qui remontent à 1993 dans le cadre de la Ligue d’Impro et de ses interventions en Miss Bricola dans feu Les Snuls (sur Canal +). En radio et à la télévision, ses admirateurs ont pu la suivre dans « Le Jeu des Dictionnaires » ou la retrouver au cinéma dans divers longs métrages, dont « Ma vie en rose ». Dès 1999, on la découvre chanteuse en compagnie de son époux Marka. Ses one-woman shows sont bien entendu la pointe de l’iceberg, là où elle excelle, seule sur les planches, prête à défendre bec et ongles ses répliques. Copine avec Nathalie Uffner, âme et corps du Théâtre de la Toison d’Or, il n’est pas étonnant de l’y retrouver chaque saison au menu de l’une ou l’autre pièce (« Cendrillon ce macho », « Cia Cia bambino », etc.) qui, toutes, se sont avérées des succès. Même si cela demeure parfaitement subjectif, elle n’a jamais été plus pertinente qu’en solo, peaufinant des personnages proches ou loin d’elle, dont certains sont devenus familiers du public (Martine et Miss B !). « Bibot distinguée » fait partie de ces moments récréatifs dont on aurait tort de se priver. Un spectacle à découvrir en avantpremière au Théâtre de la Toison d’Or jusqu’au 20 octobre 2018. Plus de détails sur le site www.ttotheatre.com Galeries de la Toison d'Or 396-398 à 1050 Bruxelles Maurice Chabot

EXPOSITION : POSITIONS POUR LA LECTURE Et vous, comment lisez-vous ? En voiture, debout dans le métro, dans le lit ou aux toilettes, le dos bien calé ou le coussin sur le ventre ? Assurément, il existe autant de manières de lire que de lecteurs. Daniel Simon, auteur-éditeur schaerbeekois qui anime des ateliers d’écriture au sein des bibliothèques communales depuis plusieurs années, a photographié plusieurs lecteurs dans leur position favorite. Une exposition qui célèbrera également la sortie du livret « Lire… tout terrain ! », reprenant toutes les photographies et les textes concomitants. Un événement à découvrir jusqu’au 4 octobre 2018 à la Bibliothèque Mille et une Pages Plus d’infos sur le site www.mabiblio.be Place de la Reine, 1 à 1030 Bruxelles Sam Mas


DIX-HUITIÈME FOIRE DU COLLECTIONNEUR : COLLECT-HIT© 2018 La collection est dans l’âme de chacun de nous. Pour la seizième édition, la Bourse internationale du jouet de collection, Collect-Hit©, prendra à nouveau ses quartiers le premier dimanche d’octobre au Brussels Kart Expo, à trois minutes de la Basilique de Koekelberg. Les trains, les voitures miniatures, les poupées de porcelaine ou mannequins, les bandes dessinées, les Comics américains, les soldats de plomb, les ours en peluche et bien d’autres jouets de collection se côtoieront à Bruxelles le temps d’un dimanche. Par la diversité des objets exposés, beaucoup de matières anciennes et nouvelles se mélangent parmi les nombreuses tables et vitrines d’exposition : le celluloïd, le bois, le latex, le fer, le plomb, l’ébonite, la résine, l’émail, le verre, la porcelaine, etc. Quelques noms connus se trouvent parmi les deux cent cinquante exposants rassemblés autour de quatre thématiques : les jouets de collection, la bande dessinée, les objets publicitaires, Barbie®, les vieux papiers. Les visiteurs dont le nombre s’agrandit d’édition en édition, viennent eux aussi, comme les exposants, des quatre coins de l’Europe et au-delà. A Collect-Hit se retrouvent de la sorte le collectionneur passionné, le grand-père nostalgique et son petit-fils, la maman ex-fan Barbie et sa fille. Tous franchissent le temps à travers les différentes périodes du XXème siècle : les années folles, les sixties, les 80’s… voire même au travers de certaines pièces centenaires rares. Le jouet reste le plaisir des petits et grands enfants que nous sommes. Peu importe la météo d’automne, le grand hall couvert (5200 m²) du Brussels Kart Expo abritera les anciens jouets et les objets publicitaires qui sont un régal pour les yeux du collectionneur et de sa famille. Sur place, deux services de restauration (sandwichs, fruits de mer, crêpes salées ou sucrées) permettront à tous de flâner jusque dans l’après-midi. A découvrir le dimanche 7 octobre 2018 à partir de 10 heures. Retrouvez toutes les informations pratiques sur www.toymarket.eu Gossetlaan 9 à 1702 Groot–Bijgaarden Sam Mas

VISITE : JOURNEES DU PATRIMOINE 2018 Les Journées du patrimoine se sont imposées au fil des ans comme le week-end incontournable du mois de septembre. L’occasion de participer à un événement qui permet de partir à la découverte de lieux peu ou mal connus du grand public et d’entrer là où les portes demeurent généralement closes. Il s'agit avant tout d'une action de sensibilisation et les établissements participants (musées, archives, bibliothèques, centres de documentation et le secteur culturel) souhaitent susciter l'enthousiasme. Outre les lieux à visiter, de nombreuses activités seront proposées sur l’ensemble du territoire bruxellois : Promenades pédestres, balades à vélo, circuits en bus, etc. Des joyaux à découvrir gratuitement le samedi 15 et le dimanche 16 septembre 2018. Plus d’informations disponibles et programme complet des visites et loisirs à télécharger gratuitement sur le site officiel de l’organisateur www.journeesdupatrimoine.brussels Sam Mas


RENTRÉE LITTERAIRE 2018 Pour la rentrée littéraire j’ai très envie de vous parler de mon nouveau recueil de poésie sensuelle, fruit de mon imaginaire et de mes nuits blanches intitulé « De soufre et de miel » (Editions Chloé des Lys) Les fées se sont penchées pour écouter les vers, ont été conquises et deux d’entre elles ont offert un cadeau. L’une, Sylvie Godefroid, a rédigé la 4ème de couverture, l’autre, Salvatore Gucciardo (les fées n’ont pas de sexe) a offert une de ses toiles pour illustrer la couverture. Cette toile qui porte le nom de L’Astre habité est en parfaite osmose avec le texte. Comment ne pas s’incliner devant les synchronicités ? Le titre, De soufre et de miel, m’a été inspiré par les hommes que j’ai aimés, de cet amour dont une aile frôle les cieux et l’autre les enfers. C’est un livre brûlant de passion, de souffrance, de sensualité. Un extrait : Uppercut Visuel Ton corps Femelle Ouvert Offert M’appelle Et je m’échoue Sur les grains De ta peau rivage Chaos Deux lectures publiques sont au programme : L’une chez Cook & Book (Place du Temps Libre 1 à 1200 Woluwe-Saint-Lambert) le 21 septembre, l’autre à la bibliothèque de NederOver-Heembeek (rue François Vekemans 6365 à 1120 Bruxelles) le 12 octobre. A 18 heures. Les poésies seront lues par Teresa Lagerwall et Serge Hervens. Leurs voix et leur charisme insuffleront vie aux mots. Le spectacle sera suivi d’une séance de dédicace. L’accès aux soirées est gratuite, mais les réservations souhaitées via mon adresse mail silvanaminchella@scarlet.be Silvana Minchella (Retrouvez les autres ouvrages romanesques ou poétiques de notre rédactrice sur le site www.ecrivainsbelges.be)


ILS ONT TUÉ LE TSAR … LES BOURREAUX RACONTENT L’assassinat planifié de la famille Romanov a eu lieu à Ekaterinbourg durant la nuit du 16 au 17 juillet 1918. Fiers de leur action, les auteurs de ce crime n’ont jamais pris la peine de se cacher et se sont même confiés pour entrer à leur tour dans l’Histoire. Il a toutefois fallu attendre leur décès pour accéder publiquement à leur témoignage. Les faits demeurent édifiants : les tirs ont lieu à bout portant. Iakov Iourovsk, le dernier commandant de la maison Ipatievi, aurait levé son arme et tiré sur Nicolas II, qui meurt sur le coup. Les autres bourreaux font feu jusqu’à ce que toutes les victimes tombent. Le tsarévitch rampe vers la porte, le commissaire bolchevik Peter Ermakov lui défonce le crâne à coups de baïonnette. Quant à Anastasia, Tatiana, Olga, et Maria, elles sont exécutées tout aussi sommairement, Mais plus que le compte-rendu d’un massacre perpétré sur ordre du gouvernement, les différents récits dévoilent aussi l’existence des bourreaux avant la révolution, leurs combats durant la guerre, leurs intérêts et leur motivation. Nicolas Ross a collationné leurs propos et s’est évertué à les replacer dans leur contexte. On sait que chacun était volontaire pour exécuter cette triste besogne et qu’aucun n’a regretté son geste. Symboliquement, il s’agissait surtout de couper la Russie de ses racines pour permettre l’édification d’un nouveau régime. Au demeurant, raser le passé pour sceller l’avenir d’un pays fort et uni ! En plus de la narration précise de la mort du tsar et de sa famille, cet ouvrage s’attache à reconstituer l’atmosphère lourde de ce début de siècle, où les rêves de certains ne pouvaient s’inscrire que dans le sang. Ed. des Syrtes – 256 pages André Metzeinger

Á LA CONQUÊTE DU CAUCASE Entremêlant histoire et géographie, Éric Hoseli met en scène une épopée captivante qui nous entraîne au carrefour des régions les plus convoitées d’Europe et qui demeure un lieu de conflits quasi- permanents, véritable poudrière prêtre à exploser. On le sait, depuis deux siècles, les grandes puissances convoitent cette terre pour ses richesses, dont le pétrole. Loin des idées préétablies, « A la conquête du Caucase » se veut un ouvrage qui révèle sources et témoignages jamais exploités jusque-là et apporte les clés d’une aventure riche et vivante aux incidences qui nous concernent tous. La force de l’écriture donne à cet ouvrage un souffle qui ne tarit jamais et permet aux images de se concrétiser devant les yeux du lecteur, sans lasser ni le prendre en otage de partis-pris. La plume se fait voix of, retenue et sobre. Comment ne pas sortir ravi de cette lecture, certes inquiétante, mais parée d’intelligence et d’élégance ? Les connaisseurs se souviennent, peutêtre, que ce livre était déjà sorti en 2006 et qu’il revient aujourd’hui en format de poche vendu à moins de dix euros. Ed. des Syrtes – 1.040 pages André Metzinger


L’ÉGOUT Dans un futur proche, la Serbie est devenue un état totalitaire. Bojan Radic n’a plus d’emploi et vivote tant bien que mal. Lorsque le chef du Service national de la Sécurité le contacte pour qu’il enseigne l’anglais à ses enfants, il demeure dubitatif. S’agit-il d’un traquenard, alors que tout le monde sait que la langue de Shakespeare a été mise à l’index par le gouvernement et que quiconque tente de l’inculquer risque de lourdes peines d’emprisonnement ? Pourtant, à mesure que leurs relations se multiplient, il se rassure et en arrive même à revoir ses positions sur le régime mis en place. Le beau rêve de félicité s’écroule toutefois lorsqu’il fréquente Vesna, une jeune femme séropositive, et il perd totalement le respect de son protecteur. Autour de lui, son univers se mue en cauchemar et correspond à une indicible descente aux enfers. Andrija Matic brosse un portrait peu amène de son pays et le projette dans ce qu’il possède de plus sombre, avec la tyrannie instaurée en système et la chasse aux libres penseurs. On songe bien sûr à « 1984 » de George Orwell, où chaque action passe sous le contrôle de l’État, où chaque mot est pesé et censuré. Comme son illustre prédécesseur, Matic se sert également de la distribution des pièces sur l’échiquier des nations et de leur découpage pour manifester une vive inquiétude par rapport à tout ce qui, lentement, bride les libertés. S’il ne s’agit pas cette fois de dénoncer le nazisme, l’auteur lance un cri d’alarme, met en garde contre tous les totalitarismes et exprime vertement sa peur d’un avenir broyé entre les mâchoires d’hommes peu scrupuleux de leurs semblables et enivrés de pouvoir. Ed. Serge Safran – 204 pages Daniel Bastié

CIRCULUS Une femme que rien ne prédestinait à vivre une aventure singulière s’embarque à la suite d’une autre pour l’aider à enfanter de jumeaux. Ensuite, à deux, elles décident de retrouver le père pour lui faire connaître les enfants. S’inspirant de la force et de la faiblesse de celles qu’elle côtoie au quotidien, Marie Rouzin raconte le périple de deux amies qui se sont rencontrées fortuitement et qui décident de mettre en commun leurs ressources et se fixer un objectif. Au fil de leur cheminement, elles croisent d’autres personnes en quête de reconnaissance, de vertu ou, plus simplement, d’amour : des frères prêts à assumer leur paternité, des ouvriers, une veuve, des artistes de cirque, etc. L’auteure livre ici des portraits chaleureux et assumés. On retient surtout une énorme tendresse pour ses personnages et une acuité qui a su relever une humanité sans failles, faite pour surmonter les obstacles, endiguer les aléas du quotidien et parler de l’existence sans oublier que le lecteur attend une bonne histoire pour se laisser séduire. Ce voyage initiatique nous parle enfin de la difficulté de garder la tête haute face aux avanies et de la violence exercée dans sa forme la plus ordinaire. Une publication qui suscite des réactions bienvenues dans un monde difficile, qui ne fait pas toujours la part belle aux femmes et qui enclenche un vrai mouvement de fond ! Ed. Serge Safran - 189 pages Daniel Bastié


LES DERNIERS AMIEL

JOURS

D’HENRI-FRÉDÉRIC

Henri-Frédéric Amiel (1821- 1881) a passé toute son existence à Genève et s’est caractérisé par la rédaction d’un journal intime particulièrement exceptionnel de plus de dix-sept mille pages. Ce n’est qu’après sa disparition que ce dernier a été découvert, pour être d’abord publié par fragments avant de faire l’objet d’une édition définitive et exhaustive. Qui était toutefois cet homme, à la fois écrivain et philosophe ? Roland Jaccard ne cherche jamais à dresser un portrait statique, mais se substitue au penseur lorsqu’il agonise et vit ses derniers instants. Par le truchement de chapitres extrêmement courts, il imagine son parcours, ses passions et y trouve maintes raisons de s’en réjouir. L’occasion de revenir sur un célibat voulu et les mille avantages de ce choix. Il s’avère qu’Henri-Frédéric était un séducteur patenté et plaisait aux dames, sans jamais convoler avec aucune d’elles. Il y a aussi le regret d’avoir perdu la belle Cécile, qui s’est suicidée alors qu’elle ne connaissait pas les bonheurs offerts par chaque matin qui se lève. Ecrit à la première personne, il ne s’agit pas d’un essai, plutôt d’une projection dans l’esprit et le corps d’un érudit de son temps, qui a notamment introduit le français et l’anglais pour les faire connaître à ses étudiants de l’Université de Genève et qui, contre vents et marées, a lutté pour imposer le bon goût et l’esthétiques tels qu’il les concevait. On pense évidemment à Bertrand Morane, personnage magistralement interprété par Charles Denner dans le long métrage « L’homme qui aimait les femmes » (1977) du regretté François Truffaut et qui affirmait que « Les jambes des femmes sont des compas qui arpentent le globe terrestre en tous sens, lui donnant son équilibre et son harmonie ». Assurément, on peut débattre de la pertinence d’une pareille affirmation … Ed. Serge Safran – 147 pages Daniel Bastié

JE FAIS DES MATHS EN LAÇANT MES CHAUSSURES Clara Grima est professeur de mathématiques et ne vit que pour cette discipline. Naturellement, elle reconnaît que l'enseignement de cette matière s’éloigne trop souvent du concret, pour se perdre dans des théories abstraites qui lâchent en chemin les étudiants qui ne comprennent pas toujours l’incidence des chiffres et des nombres dans la vie quotidienne. Après avoir géré un blog destiné à vulgariser cette science (pas si obscure que cela !), elle s’est appliquée à la rédaction d’un livre qui transforme ce précieux savoir en jeu. Au fil d’exemples choisis, elle démontre que chaque action est mathématique et que chaque décision découle d’une réflexion préalable, capable d’être mise en formule. Les algorithmes, les théorèmes, les partages de Penrose, le théorème de Bayes sont donc ici épluchés en évitant les termes ardus. Lacer ses souliers, compter les bonbons dans un bocal, faire passer un canapé dans un couloir, prévoir le temps qu’il fait … Voilà ce à quoi pourrait servir l’achat de cet ouvrage. Bien entendu, si vous aimez les mathématiques, il vous servira principalement à voyager dans les gestes ordinaires pour les rencontrer à chaque coin de rue. Maintenant, si vous êtes de ceux à ne pas aimer les cours que vous avez subis lors de votre cursus scolaire, vous apprendrez enfin qu’il y avait une autre manière de vous familiariser avec les maths. Mettez-vous à l’aise, relaxez-vous et, avec ou non une boisson à portée de la main, laissez-vous imprégner par l’idée que vous auriez pu aimer ce qui, à l’époque, vous semblait rébarbatif ou carrément indigeste. Ed. Les Arènes – 311 pages Daniel Bastié


PYGMALION On connaît le mythe. Pygmalion était un sculpteur qui est tombé amoureux de la statue née sous son ciseau et qui a imploré la déesse Aphrodite de lui donner vie, afin qu’il puisse l’épouser. Par la suite, Jean-Jacques Rousseau a conçu un drame lyrique en un acte et mis en musique par le compositeur Georg Brenda. A son tour, Sandrine Revel s’inspire de ce mélologue pour concevoir un roman graphique qui met en scène quatre sculpteurs célèbres : Camille Claudel, Ron Mueck, Auguste Rodin et Niki de Saint-Phalle qui, tour à tour, campent l’artiste en pleine gestation et en proie à un dilemme qu’il peine à partager. En parallèle, elle présente le Paris Mozart Orchestra dirigé par Claire Gibault et occupé à répéter la partition pour un concert exceptionnel qui s’est tenu en juin dernier à la Philharmonie de Paris devant un public séduit. Beaucoup de charme dans ce « Pyugmalion » inédit et qui flirte avec la poésie en plongeant le lecteur dans les coulisses de la création, en mélangeant les époques, en confondant le vrai et le faux et en appliquant le principe des vases communicants à un recueil-hommage à la fois métaphorique et pédagogique. Ed. Les Arènes – 80 pages Daniel Bastié

PSYCHOLOGIX La bédé ne sert pas qu’à distraire les masses, mais peut également§ servir de vecteur à l’apprentissage. Après s’être distingués en proposant un livre visant à vulgariser les principes du monde de l’économie, Grady Klein et Danny Oppenheimer s’attaquent au domaine de la psychologie en l’expliquant de façon claire, riche et accessible. Pas de langue de bois ni de termes volontairement complexes. Avec intelligence et drôlerie, ils suggèrent une initiation pour se familiariser avec une discipline a priori ardue et s’adressent à chacun pour aller à la rencontre de nos motivations et de tout ce qui endigue notre mental. Ce roman graphique nous aide à nous connaître nous-mêmes, à appréhender les autres et à nous ouvrir à la société dans laquelle nous vivons. Au fil des pages, le lecteur apprend de quelle façon fonctionne le cerveau, qu’est ce qui influence nos pulsions, comment éviter les refoulements ou de quelle manière sommes-nous influencés par notre entourage ? Au demeurant, un objet pédagogique qui amusera les professionnels et qui autorisera les amateurs à mettre les pieds dans une matière réservée jusqu’ici à une élite ! Il ne s’agit pas vraiment d’un résumé d’une somme de savoirs, mais presque ! Ed. Les Arènes - 224 pages Sylvie Van Laere


LE PENDU DE L’ÎLOT SACRÉ Situé dans le cœur historique de Bruxelles, l’îlot Sacré est considéré comme un village, où se multiplient les bistrots et les restaurants. Un lieu touristique, rendu piétonnier et protégé de l’urbanisme sauvage, où il fait bon musarder. C’est aussi là que se situe le légendaire théâtre de Toone, avec ses marionnettes à tiges. Alors que rien ne laissait présager le drame, un pendu est découvert. Le temps que les secours se mettent en route et débarquent, le corps a disparu. Seul Rinaldi, chef de la police de la zone Bruxelles-Ixelles, paraît capable de démêler les nœuds de cette affaire. Alors que la Nativité bat son plein et qu’un immense sapin orne la Grand-Place, il fait appel à Van Kroetsch, un ami de longue date, vrai chômeur professionnel et détective amateur doté d’une acuité à rendre jaloux Hercule Poirot et Sherlock Holmes. A deux, ils arpentent les environs à la recherche d’indices et de témoignages, tout en se frayant un chemin dans les impasses et les bars alcoolisés. Après avoir mené une investigation du côté du Bois de la Cambre, le Rouletabille de chez nous propose une balade qui ressemble à une succession de cartes postales colorées où rien n’est laissé au hasard et où le récit se saupoudre d’humour et d’érudition. L’occasion pour le lecteur bruxellois de reconnaître des adresses familières et de se laisser saisir par le coude pour un tour de ville. Le plaisir surtout de découvrir avec quels mots l’auteur décrit les enseignes, ravive les odeurs qui s’y mélangent, souligne les couleurs qui se juxtaposent ou se combinent. En somme, il nous invite à une visite nonofficielle de la capitale, en soulignant la face B d’une cité courue par les curieux venus du monde entier, appareil photographique en bandoulière et argent calé dans le fond des poches pour faire le plein de chocolat et de biscuits à ramener loin d’ici. Un parcours rock’n’roll pour un polar de qualité qui n’exclut jamais l’anecdote ni la leçon d’Histoire. Jubilatoire ! Ed. 180° Edition – 224 pages Daniel Bastié

MORIA – CHRONIQUES DES LIMBES DE L’EUROPE L’actualité nous parle sans arrêt des migrants qui traversent la Méditerranée pour trouver une terre d’accueil en Europe, avec des images qui se déversent à chaque journal télévisé, montrant des visages hagards et des corps fatigués. Mais derrière l’information se dissimule une autre réalité. Celle des camps où ils attendent qu’on statue sur leur sort. Marie Doutrepont, avocate bénévole au sein d’une ONG, s’est rendue à Moria sur l’île de Lesbos en Grèce, l’un des principaux endroits où ont été parqués ceux qui semblent avoir perdu tous leurs droits et qui, désespérément, attendent de la générosité et de l’hospitalité. Si un minimum d’hygiène est accordé à ces demandeurs d’asile (sanitaires, consultations médicales, biens de première nécessité), on se trouve à des lieues d’une zone paradisiaque. Les enfants jouent dans les immondices, les malades ne sont soignés qu’avec du paracémol et les familles s’agglutinent dans des containers ou des tentes de fortune. Le grillage leur sert d’horizon. Plusieurs peinent à s’imaginer en Europe. Le constat interpelle. Que faire ? Comment sortir d’une situation qui perdure et dont l’issue paraît bien hypothétique ? Avec les nationalismes qui s’exacerbent partout, l’Europe est en train de se métamorphoser en vaste purgatoire où l’espoir demeure le seul viatique. Voilà une chronique destinée à bousculer le ronron et à faire tomber les œillères ! Ed. 180° -158 pages Sam Mas


AVEC DES SI ET DES PEUT-ÊTRE Maxine est professeur de français et se demande quelle sera sa vie future. Elle sait qu’il importe de faire des choix, à défaut de stagner et de ne rien faire de son existence. Pour l’instant, elle vit en colocation avec Claudia, se gave de littérature et de musique et aime jogger avec sa sœur. Elle croit également aux signes de l’univers et au destin. Il faut néanmoins forcer ce dernier pour s’épanouir et ne pas rater sa chance. Si j’avais été là … Si j’avais fait ceci … Le conditionnel est le temps des peut-être et des à peu près. Certainement pas celui des certitudes ! Elle sait aussi que, à force de trop réfléchir et de tout intellectualiser, le risque peut s’avérer grand de passer à côté du bonheur et de se retrouver le nez dans l’eau à l’heure où les copines se marient ou ont des bébés. Sans se chercher une centaine d’excuses, elle sait surtout qu’elle doit y songer et sauter dans le train en marche. Carène Ponte jette un œil attendrissant sur les jeunes adultes qui entrent dans la vie active et qui se confrontent réellement au monde du travail et des sentiments. Avec humour, ce roman revisite les stéréotypes de la femme célibataire et nous vaut quelques instants de franche rigolade. Sans jamais lâcher la bride, elle nous pose également la question : quelle sera notre vie si nous refusons de la regarder en face et de remédier à nos défauts ? Voilà presque quatre cents pages de bonheur pur jus ! Ed. Michel Lafon – 375 pages Daniel Bastié

DE JOIE COULENT MES LARMES Juriste dans un cabinet d’avocats à Nice, Romy décide d’envoyer tout valdinguer pour vivre intensément ses années de jeunesse et ne pas rater les félicités qui pourraient se présenter. Sans regret et sans calcul, elle se domicilie chez sa grand-mère à Saint-Tropez et accepte un emploi de vendeuse. Sous un soleil qui flamboie, elle réapprend la sérénité des petits gestes quotidiens et le plaisir des rencontres. Elle prend également le temps de s’occuper d’elle et se souvient de son rêve passé de devenir une vedette de la télévision. Entre une clientèle faite d’habitués et de touristes, elle croise la route de Jean-Luc, médium des stars qui ne lui annonce rien de moins que l’explosion de son talent et remet ses fiançailles en question. Ce roman nous montre qu'un événement aussi banal qu'une prédiction à laquelle on ne croit pas peut néanmoins bouleverser une existence. Parce qu’une prise de conscience ébranle Romy, elle n’a pas d’autre choix que de s’emparer de sa vie pour se lancer à l’affût de ses désirs et construire son avenir. La question qui s’impose demeure celle-ci : est-elle heureuse ? Réellement ? Lena Walker présente Romy comme une jeune femme attachante, qui ne se laisse jamais abattre et sait faire front. Malgré les difficultés, elle s'accroche et cherche le bonheur. Malgré diverses rencontres dispensables, les échecs et les déceptions, elle ne renonce jamais et découvre que tout dépend de sa ténacité. Ed. Michel Lafon – 302 pages Daniel Bastié


MOI, MÉDICIS La famille Médicis a marqué de son empreinte l’histoire de Florence et, de façon plus large, de la Toscane. Originaire de la haute vallée de Sieve au Nord de la ville, elle a fait fortune dans le commerce et dès le XIIIe siècle s’est imposée comme l’un des plus puissants clans du pays. Arts, intrigues politiques, guerres, amours turbulentes et destins tragiques ont façonné sa réputation pour transmettre la renommée jusqu’à nous. Matteo Trukul retrace les premiers pas de la dynastie dans une époque tourmentée pour nous rappeler la brutalité et la vigueur créatrice de la Renaissance. Ce roman se veut également celui de la République de Florence, de son évolution et de ses combats. A la mort de Jean, ses fils Laurent et Cosme assurent sa succession à la tête de la banque. Très vite, des voix s’élèvent pour les destituer et de nouveaux complots se trament. Il s’agit d’un roman dynamique et très documenté qui nous livre maints secrets sur la complexité du pouvoir et de l’argent, avec pour corolaire un soupçon de soufre. Dès les premiers chapitres, le lecteur subodore que le drame n’est pas loin ! Ed. Michel Lafon – 398 pages Willy Smedt

MA VIE AVEC UN SCIENTIFIQUE : LA FERTILITÉ La fertilité est l’aptitude biologique des couples à obtenir une naissance vivante. La fécondité désigne le nombre d’enfants d’une femme ou d’un couple. A travers toute une série de saynètes de la vie quotidienne, India Desjardins et Bach nous plongent dans les dédales de la sexualité et des problèmes liés à la conception d’un enfant. Toutes les personnes qui sont passées par là connaissent les arcanes de la fertilité et les efforts mis en œuvre pour procréer. Le coït n’est pas que le seul élément qui entre en compte et de nombreux paramètres viennent s’ajouter au désir de devenir mère ou père. Avec énormément d’humour et d’autodérision, l’auteure et la dessinatrice proposent une bédé tonique qui bouscule les tabous et évoque les efforts entrepris par le duo d’amoureux afin de concevoir le bébé espéré. Jamais vulgaire et servi par un graphisme sympa, ce livre a avant tout été créé pour apporter la pèche au sein des ménages qui désespèrent et qui, face aux désillusions, s’étiolent. Un découpage séduisant bien dans l’air du temps donne vie à l’intimité des protagonistes et apporte un relief bienvenu dans ce qui ressemble à tout sauf à une tragédie. Un thème délicat traité avec finesse ! Ed. Michel Lafon – 78 pages Amélie Collard


MONSIEUR VIANNET Véronique Le Goaziou est sociologue et chercheuse et cela se sent dès qu’on pénètre dans le microcosme qu’est l’existence de monsieur Viannet, un homme banal de cinquante ans qui autrefois a été sportif. Il est aussi dit qu’il a été acquitté suite aux accusations de meurtre portées contre lui suite au décès de son père. Entre préventive en prison, hôtels minables et foyers d’urgence, il survit avec son passé, une vérité que lui seul connaît, le souvenir de ses enfants qu’il ne voit plus et une femme qui reste le témoin des années fantômes. Du matin au soir, il grille des cigarettes à la chaîne et écluse des bières, tout en passant des heures devant son poste de télévision qu’il n’éteint jamais. Pourtant, entre deux disputes, l’auteure distille des éléments de sa vie antérieure et dévoile les dures conditions qui l’ont mené à ce qu’il est. Un être dont les jours ont mal débuté et pour lequel le quotidien n’a jamais fait de cadeaux. Pire, elle démontre que les institutions créées pour aider les nécessiteux servent davantage à les broyer qu’à les sortir de l’ornière. Sans juger, elle parle de la pauvreté ordinaire (financière, éducative, intellectuelle) en s’accrochant à mille petits détails qui nous font saisir l’urgence d’accoucher d’une société plus équitable, où personne ne serait abandonné pour exister dans l’ombre. Entre questions et silences, elle livre une réflexion sur l’absurdité de notre système social, où l’horreur se pave de bons sentiments et d’intentions louables mais qui, jamais (ou rarement), atteignent leurs objectifs. L’appartement de monsieur Viannet ressemble à une prison sans barreaux. Métaphore d’une existence d’une rare inanité ! Ed. La Table Ronde – 215 pages Paul Huet

MATIÉRES FERMÉES Né en 1940, William Cliff a toujours été un auteur qui s’est écarté des normes et qui a mené sa barque en solitaire, se souciant peu de l’avis de la critique, cherchant à faire œuvre personnelle et affichant son homosexualité à travers maints de ses écrits. Largement autobiographiques, ses textes arpentent l’univers qu’il côtoie et le poussent à s’interroger sur ce qu’il voit, rehaussés d’instants de noirceurs ou d’émerveillements. On sait également que Raymond Queneau lui a servi de mentor et lui a ouvert les portes du monde de l’édition. Écorché vif, William Cliff est principalement réputé pour ses recueils de poésie, où son écriture virevolte et éclabousse. Sans jamais privilégier l’anecdote, il entretient le lecteur de mille préoccupations et se sert de diverses logiques pour accéder à la vérité, certes subjective, mais porteuse de raison. « Matières fermées » se veut un ouvrage semblable aux précédents, où il se sert de la matière pour réveiller le passé, faire effleurer les sentiments ou pousser des cris de colère. Du coup, chaque poésie devient fresque qui suit la précédente et s’enchaîne à la suivante pour constituer un ensemble cohérent et touffu. Comme toujours, il propose des fragments d’existence, avec une verve omniprésente. L’enfance, la jeunesse, les voyages et une kyrielle de personnages hauts en couleur se mélangent avec lyrisme, en poursuivant une tradition breughélienne de l’art de bien-vivre. Ed. La Table Ronde – 256 pages Daniel Bastié


LÁ OÚ VIVENT LES LOUPS Priam Monet est un flic atypique, sorte de caricature de ce que la police peut produire de plus rébarbatif. Avec sa masse éléphantesque et son laisser-aller vestimentaire, il assume sa vie privée vaille que vaille, incapable d’endiguer la chute qui le mènera certainement à la déglingue. Lorsque sa hiérarchie l’envoie à Thyanne, bled perdu entre les Alpes françaises et italiennes, il ne pense qu’à rentrer au plus vite chez lui. Pourtant, les indices s’accumulent et l’amènent à penser que l’enquête sera beaucoup plus longue que prévue. Chez lui, les réflexes ont la peau dure et, derrière ce qui ressemble à une simple chute d’une falaise, il subodore un meurtre. La victime était-elle un banal migrant ? Qui avait intérêt à le faire disparaître ? Quels lourds secrets cache la région ? Si les investigations servent de fil au roman, Laurent Guillaume les utilise comme prétextes à une plongée dans un microcosme. Si la question d’un décès mystérieux reste omniprésente, l’auteur la tortille pour s’interroger sur le sens de l’existence et brosser le portrait d’un officier de police à la fois misanthrope et qui tente d’échapper à ses démons. « Là où vivent les loups » est la huitième fiction d’un homme qui écrit régulièrement pour Canal + et à qui nous devons la série « Section zéro ». Ed. Denoël -302 pages Paul Huet

MÈRE TOXIQUE On ne mérite pas toujours les parents qui sont les nôtres. Depuis des années, Dahlia vit dans la résilience et peine à parler de son enfance. Devenue adulte, elle tente désespérément de se forger un avenir et à être heureuse, sans se laisser rattraper par des souvenirs honteux. Pour aller de l’avant, elle comprend qu’elle n’a pas d’autre choix que d’affronter sa mère, une femme chaotique avec laquelle elle a vécu un quotidien passé dans des hôtels miteux en espérant de meilleures conditions d’existence. Elle retrouve sa maman à Aurora, bled poisseux flanqué au milieu du Texas, et où contre toute attente, elle fera une découverte qui modifiera ses jours. Alexandra Burt signe un thriller délétère où règne une tension oppressante, voire dangereuse. A mesure que l’héroïne progresse dans ses recherches, elle exhume des mystères qui cachent des drames et des événements macabres. Sans jamais se départir du fil du récit, l’auteure tisse une enquête obsédante, aux mille rebondissements. Bien entendu, la révélation fait l’effet d’une déflagration lorsque Dahlia comprend l’origine de sa naissance et le pourquoi de ses nombreuses années à fuir d’un lieu à l’autre. Le personnage étrange de Memphis, la maman de la protagoniste, et les descriptions peu amènes de la région contribuent largement à poser un climat et à rendre ce roman vraiment addictif. De ceux qu’on ne pose pas avant d’avoir pris connaissance de l’épilogue ! Ed. Denoël – 462 pages Daniel Bastié


LA PETITE HISTOIRE DES COURTISANES Les courtisanes vendent leur corps et sont, de fait, des prostituées. Néanmoins, plusieurs d’entre elles ont inscrit leur nom dans le marbre de l’Histoire en se vautrant, certes, dans les draps de bon nombre d’hommes, mais en atteignant les plus hautes sphères du pouvoir, jouant de leur influence et de leur aura auprès des puissants. Certaines d’entre-elles sont même devenues des personnalités extrêmement passionnantes, douées pour les arts, la politique ou la diplomatie. La littérature et le cinéma se sont emparé de leur parcours, au point de vulgariser leur nom auprès des quidams. Mais qui ont-elles réellement été ? Marc Lemonnier, journaliste et auteur d’une soixantaine d’ouvrages consacrés à Paris, au septième art, à l’érotisme et au langage populaire, est allé à la rencontre des figures les plus emblématiques de leur temps et s’est efforcé de dresser un portrait de ces péripatéticiennes de luxe sans s’encombrer de romanesque et en ciblant la vérité telle qu’il a pu l’établir. Au fil des pages, le lecteur découvre Messaline, Tullia, Isabelle de Limeuil, Ninon de Lenclos, La Du Barry, La Castaglione, Marie Duplessis, Lola Montès, la belle Otero et une poignée d’autres qui ont fait commerce de leurs charmes pour s’enrichir et se libérer du sort réservé aux femmes dans un monde fait par et pour les hommes. Voici le récit des plus extravagantes qui, à l’instar de la belle Otero, ont dû se répéter : « La fortune ne vient pas en dormant … seule ». Ed. Jourdan 198 pages Daniel Bastié

TERRA INCOGNITA – RÉCITS D’EXPLORATEURS Ils sont les pionniers qui ont permis au monde de s’ouvrir à la modernité et de constater que, de l’autre côté d’une mer jusqu’ici infranchissable ou d’une forêt épaisse, se trouvaient des territoires bons à explorer. De tous temps, l’homme s’est enorgueilli du désir de savoir et de comprendre, mettant en œuvre mille stratagèmes pour pénétrer des contrées jusqu’ici inconnues. Alain Leclercq revient sur une série de personnages insignes qui, défiant les idées de leur siècle, les incertitudes et la peur, ont mené des expéditions là où aucun homme blanc n’avait jamais déposé les pieds. Bien entendu, l’Histoire telle que nous la connaissons a longtemps été écrite par les Occidaux et s’est basée sur leur seul point de vue. Christophe Colomb, Alexandre Selkirk, Bougainville, Stanley, Levingstone, Montgolfier, Horn, Mermoz et bien d’autres ont risqué leur vie pour leur pays, pour des mécènes ou pour l’avancée de la science. Conscients ou non de l’importance de l’entreprise qu’ils ont menée, ils ont détaillé dans les moindres détails chaque étape de leur aventure. Des carnets de route qui ont souvent été publiés dès leur retour à la maison. Des textes sans tabous et sans concessions. Mais surtout des documents de premier plan qui en disent long sur les mentalités de l’époque et sur les découvertes effectuées. Ce sont les plus belles pages de leurs récits que les éditions Jourdan proposent de relire aujourd’hui. Une compilation forcément subjective, mais qui en dit beaucoup sur le regard que nos ancêtres portaient sur les autres continents. Un pan du passé qui s’ouvre aux lecteurs d’aujourd’hui et qui témoigne de périples audacieux ! Ed. Jourdan – 268 pages Daniel Bastié


LES YEUX AILEURS Lauritz se sent en proie à un terrible dilemme. Comment mener une existence comme si de rien n’était avec la guerre qui fait rage de l’autre côté de la frontière et des enfants qui ont pris position pour l’un ou l’autre camp ? Son admiration pour la culture allemande, qu’il entretient depuis sa jeunesse, émousse-t-elle sa lucidité ? Même à Stockholm, les clameurs des combats commencent à se faire entendre et il devine qu’il ne pourra plus demeurer neutre bien longtemps. L’heure est à l’engagement idéologique et chaque journée le presse à saisir ses responsabilités d’homme. L’Allemagne lui a déjà enlevé un fils, officier dans la SS, tandis que sa fille prend part active à la résistance norvégienne. En son for intérieur, il sait que le drame se profile et risque de mettre à mal l’équilibre familial. Qu’il le veuille ou non, les événements ne lui permettront plus longtemps de demeurer en lisière et de faire l’autruche. Jan Guillou, l’un des écrivains suédois les plus célèbres, nous offre ici le quatrième volet de la saga « Le siècle des grandes aventures » et nous suggère un voyage fascinant au tréfonds de la conscience humaine, où un être vieillissant se retrouve confronté à des oppositions qui le taraudent. D’une écriture flamboyante, l’auteur nous plonge dans la seconde guerre mondiale, illustre son propos par une documentation richement rassemblée et s’appuie sur une mécanique rôdée pour faire de son récit une parabole sur la souffrance, le rapport à l’autre et la prise de conscience qui réveille l’humanité en chaque être debout. A une époque où les fascismes s’exhument un peu partout dans le monde, « Les yeux ailleurs » s’avère une lecture salutaire ! Ed. Actes Sud – 368 pages Daniel Bastié

DURA LEX Considéré comme l’un des plus jeunes serial-killers modernes, Kwane Diggs est écroué depuis son arrestation. Lors de son procès, il a été condamné pour le meurtre à l’arme blanche de deux femmes et de trois gamines. Or, le Code pénal de Rhode Island prévoit que tout prisonnier mineur soit relâché dès qu’il atteint l’âge de la majorité légale. Pourtant, le meurtrier ne bénéficie pas de cette relaxation et a pris de nombreuses années de détention supplémentaires pour avoir agressé des gardiens et avoir été surpris en possession de drogue. En fait un dossier monté de toutes pièces, afin de ne pas relâcher dans la nature un individu extrêmement dangereux. Personne ne semble se plaindre de ce tour de passe-passe, hormis quelques défenseurs du bon droit, qui clament que si l’administration s’autorise certaines latitudes dans ce cas précis, elle pourra opter pour le même type d’agissement avec n’importe quel autre détenu. Face à une opinion qui crie scandale, Mulligan se lance dans une course contre la montre pour éviter de libérer un des pires tueurs en série connus. Bruce Desilva tire le tapis sous les pieds de ses protagonistes et leur ménage des rebondissements auxquels ils ne s’attendent pas forcément. Suspense électrique et question éthique se coudoient sans temps morts pour oser l’inconnue que voilà : Peuton prendre des libertés avec la loi pour faire régner la sécurité dans la société ? Si le meurtrier retrouve l’air libre, chacun risque de se confronter au risque de devenir une proie. Dans le genre retors, « Dura Lex » fait fort ! Ed. Actes Sud – 488 pages Daniel Bastié


ÉTERNEL TABARLY Le 12 juin 1998, Éric Tabarly, l’un des marins les plus célèbres du monde, disparaissait en mer d’Irlande laissant derrière lui une famille inconsolable, mais aussi toute une génération de navigateurs orphelins. À l’occasion du vingtième anniversaire de son décès, Daniel Gilles et Jacqueline Tabarly proposent une nouvelle version de l’ouvrage culte déjà publié en 1999. Dans cet album qui se veut à la fois un témoignage respectueux et un livre de référence où l’on découvre l’aventurier dans ce qu’il avait de plus humain, les photographies pullulent et nous montrent un homme passionné qui embarquait à bord de son voilier comme d’autres prenaient le train ou le car. On y perçoit évidemment le lien privilégié qu’il entretenait avec la grande bleue et son amour incommensurable pour les voyages en solitaire, affrontant les éléments pour se prouver qu’il existait et relever des défis qui le poussaient à aller toujours plus loin. Ne se donnant jamais en exemple, il était devenu pour beaucoup un guide que l’on adulait et que l’on suivait pour sa philosophie de vie. Bien sûr, on ne peut pas se procurer cet ouvrage sans titiller les clochettes de la mémoire et de la nostalgie. On le sait, les clichés et la rédaction des textes sont avant tout là pour servir d’hommage et permettre de ne pas oublier une légende qui a été un pionnier dans le développement du multicoque en concevant son trimaran, un des tout premiers multicoques de course au large, confirmant la suprématie de ce type d’embarcation sur les monocoques. Ed. La Martinière -240 pages Paul Huet

LES HEURES ROUGES Les États-Unis ne sont pas la terre de toutes les promesses ! Quatre femmes domiciliées non loin de la petite ville de Salem dans l’Oregon apprennent à leurs dépens que le poids de la tradition et des tabous pèse sur les épaules de chacune d’entre-elles. Malgré la pression venue du dehors, elles osent espérer et défier les conventions séculaires. Ro, enseignante, s’affaire à achever un ouvrage sur une exploratrice irlandaise méconnue du XIXe siècle et cherche à avoir un enfant. Susan, mère au foyer, s’est lassée du ronron et aspire à concrétiser son rêve de devenir avocate. Mattie veut s’embarquer dans une carrière scientifique. Gin, vraie marginale s’est mis à dos une partie des hommes de la contrée. A travers des portraits croisés, Leni Zumas nous parle de la condition féminine, là où tout est loin d’être acquis et où de grands efforts doivent encore être entrepris en matière d’adoption, d’avortement et de sexualité libre. Elle profite d’un récit en forme de miroir pour revendiquer haut et fort que le droit des femmes se vautre encore trop souvent dans la fange d’une société fondée par les mâles et faite avant tout pour eux, où ils se singularisent par leur brutalité et leur lâcheté. Quant aux personnages féminins, ils n’apparaissent pas toujours sous leur meilleur jour, signe de toutes les frustrations, de toutes les violences et des refoulements subis. Leurs luttes résonnent en nous jusqu’au dernier chapitre, rappelant que les coutumes patriarcales endiguent l’évolution et demeurent trop souvent souffrance et tristesse. On déplore que la politique mise en place par l’actuel président Trump ne permettra pas aux choses d’évoluer. Un livre remuant ! Ed. Presses de la Cité – 403 pages Amélie Collard


LES ROSES DU MONTFORT La vie de Louise n’a rien d’une sinécure. Pourtant, elle a grandi dans un environnement superbe, entre vignobles et collines boisées. Alors qu’elle aspire à la liberté, son père la promet à Adrien, un voisin au physique insultant, en échange d’une parcelle de terrain pour accroître sa propriété. Après une tentative de suicide, elle s’abandonne dans les bras d’Henri, un ingénieur de la ville. De leur union naît un enfant, même si leur relation boite chaque jour davantage. Alors que la première guerre mondiale met l’Europe à feu et à sang, elle s’éprend d’André, un étranger venu dans les Vosges pour ne pas se laisser rattraper par le conflit mortel qui oppose les nations. Tandis qu’Henri et Adrien ont été mobilisés, André reste un des seuls jeunes hommes dans la région. Sans calcul, il se donne corps et âme pour aider lors des vendanges, mais ne parvient pas à résister lui aussi à la propagande. Pour défendre sa nouvelle patrie, il finit par se porter volontaire et rejoint un bataillon armé. Gilles Laporte signe un roman qui se caractérise par un joli souffle épique et qui gagne en intensité à mesure que le destin de Louise se love à trois hommes complètement différents, qui représentent l’amour ou ce que certains affirment qu’il devrait être. Naturellement, l’auteur prend le temps de décrire les travaux à la vigne et compose le quotidien d’une époque en équilibre entre deux siècles. Enfin, il exalte les gestes ancestraux, parle de la survie de toute une culture et du courage des citoyens arrachés à leurs habitudes par des combats fratricide qui font entrer le XXe siècle dans la modernité. Ed. Presse de la Cité – 400 pages Paul Huet

L’HÉRITIER DU SECRET De 1930 à 1940, voilà la chronique d’une famille saisie dans les affres du quotidien et amenée à redonner un élan à l’entreprise textile qu’elle gère depuis plusieurs décennies. Le récit se déroule à Nîmes alors que, non loin de là, se prépare une guerre parmi les plus sanguinaires du XXe siècle. Tandis que Jean-Christophe, le patriarche, voit ses espoirs se concrétiser peu à peu, son fils Pierre tente l’aventure aux Etats-Unis en tentant de concurrencer Levi Strauss sur le terrain de la fabrication de jeans. Quant à Alix, étudiante aux Beaux-Arts, elle se surprend à aimer éperdument un patron de galerie partiellement amnésique. Enfin, Thibaud, parti outre-Rhin à la recherche de parents éloignés, découvre avec stupeur la montée du fascisme et les discours d’Adolf Hitler. Avec l’air de ne pas effectuer un travail d’historien, Christian Laborie signe une tranche de vie tout en clair-obscur et propose un roman aux élans tourmentés, malgré un calme apparent. Il passe tour à tour du récit intime à la fresque, multipliant les détails pour nous parler d’une époque, n’hésitant jamais à se confronter aux fantômes du passé et à rendre les absents tellement présents. Voici un livre plein de fougue, rédigé d’une plume maitrisée et dont les chapitres révèlent leurs surprises en toute subtilité, loin des poncifs et des attentes. « L’héritier du secret » permet surtout de sortir de l’oubli un mystérieux personnage qui bouleverse l’existence de toute une tribu. Ed. Presses de la Cité – 569 pages Paul Huet


LE CORPS EST UNE CHIMÈRE Cinq femmes et deux hommes à l’existence étriquée vont être amenés à se croiser et à tisser des liens ténus. Tous ont en commun de ne pas aimer leur quotidien et de vouloir en détricoter les nœuds. Avec un langage vrai, Wendy Delorme trace leurs errances et leurs souhaits de délivrance. Que se passe-t-il dans la tête de sept protagonistes aussi différents les uns des autres et capables de déplacer des montagnes pour atteindre l’objectif souhaité ? Philippe abhorre son corps d’homme. Camille souhaiterait changer le monde. Ashanta sait que la chose est impossible. Maya vit de ses prestations sexuelles tarifées. Jo porte l’uniforme de flic et préfèrerait ne plus avoir à le faire. Marion vit en couple avec Elise et élève trois enfants. Sans jamais cacher leurs fragilités, l’auteure dresse un microcosme de la société actuelle et nous parle d’amour, de désir, de filiation et, sans tabous, aborde des sujets tels que l’homosexualité, l’identité sexuelle, la prostitution, l’homoparentalité, les violences ordinaires et l’utopie. Entre conflits individuels et récits croisés, elle brode des histoires hautes en couleur, accumule les anecdotes et prouve qu’aucune ambition n’est déraisonnable pourvu qu’on puisse y croire sincèrement. Du coup, on s’attache aux personnages pleins d’humanité, décalés ou proches de nous, avec leurs failles et leurs faiblesses qui, malgré les accidents de la vie, gardent le cap selon des principes bien à eux. Le dernier bébé d’une écrivaine charismatique de la scène queer ! Ed. Au Diable Vauvert – 269 pages Amélie Collard

ARGENT ANIMAL Jusqu’ici, le système bancaire se basait sur un double principe : les banques prêtent et les clients dépensent. A partir du moment où certains entendent révolutionner le système, les rouages se grippent. Cinq économistes profitent d’une conférence sur la finance en Amérique latine pour promouvoir les bases d’un nouvel ordre budgétaire, visant à endiguer la crise mondiale et à lancer un système à la fois révolutionnaire et empirique, là où le commerce aura été remplacé par la nature. Monde dans lequel chacun devra acquérir sa part de lumière et d’air, en contrepartie d’une facture mensuelle, moyennant des aménagements pour les plus démunis. L’argent animal deviendrait une nouvelle monnaie à la fois vivante et capable de se reproduire. Assurément, ils se font taxer d’utopistes, tandis que certains les blâment et les prennent carrément pour cibles. On se situe naturellement ici sur le terrain de la fiction financière, avec des idées dérangeantes et des retournements de situation qui peuvent ébranler le lecteur, mais Michael Cisco possède le don de demeurer crédible jusqu’à la dernière ligne, sans jamais perdre le fil de son récit. Les idées foisonnent, les avis se chevauchent et un minimum de connaissance en économie est requis pour apprécier complètement ce roman qui, autrement, peut paraître long et confus. Bien entendu, on se situe dans un univers spéculatif et futuriste, mais qui pourrait bien devenir le nôtre si nous n’y prenons pas garde. On constate également que les bonnes intentions pavent les rues de l’enfer et que les êtres humains contribuent beaucoup à leur propre damnation. Cela dit, l’auteur dresse des images fortes de notre société et les cisèle sans candeur, avec un chouia de méchanceté et de perversité. Enfin, l’argent animal qui se met à croître de manière exponentielle envahit la terre. Imprégné de toutes ses lectures passées (Beckett, Kafka, Burroughs), l’auteur nous balance un livre abouti à mi-chemin entre l’horreur quotidienne, la science-fiction et le surréalisme. Accrochez-vous aux accoudoirs de votre fauteuil de lecture ! Ed. Au Diable Vauvert – 704 pages Daniel Bastié


LA PESTE ET LA VIGNE Le voilà enfin le deuxième tome de la saga « Le cycle de Syffe », promis par Patrick K. Dewdney, écrivain britannique qui vit en France depuis des lustres et qui pratique la langue de Voltaire comme un maître. Avec un style bourré d’inventivité, il nous raconte de quelle manière un jeune garçon passe successivement de l’esclavage à la liberté et endosse tour à tour l’habit de vagabond, d’instructeur et de mercenaire. Pas facile de vivre dans une époque troublée par des guerres incessantes, où la famine taraude les estomacs. A travers son périple mouvementé, il traîne l’obsession de retrouver Brindille, son amour de jeunesse captive des énigmatiques Feuillus, et de passer le reste de ses jours à ses côtés. Nul doute que les séquences fortes s’accumulent pour veiller à tenir le lecteur en haleine, avec des descriptions de bon aloi, des personnages charismatiques et un découpage digne du grand écran. Quant à l’organisation de l’ordre moral, personne n’en a cure. Confronté à un univers féroce, le protagoniste n’a pas d’alternative que celle de se mouvoir avec vélocité pour survivre et atteindre son but. Ici, la société procède à un constant mouvement de balancier, changeant les règles et reléguant les hommes au rang de bêtes fauves. Lorsqu’une épidémie de peste s’abat sur le pays, le reste d’humanité se déglingue. L‘auteur signe un livre agréable, avec des méchants très méchants et un antihéros sympathique malgré ses faiblesses. On se situe dans un ouvrage de fantasy, qui se veut à la fois une aventure contée à hauteur d’épaules et une fresque épique qui, jamais, ne s’époumone en cours de narration. Ed. Au Diable Vauvert – 624 pages Daniel Bastié

LES RÉGATES DE SAN FRANCICO Né en Croatie, Pier Antonio Quarantotti Gambini a longtemps vécu à Trieste, avant de s'établir à Venise et y mourir. Avec « Les régates de San Francisco », il évoque les affres de la jeunesse et le passage de l’enfance à l’adolescence, avec un cortège d’épreuves cruelles et de déceptions qui le sont souvent autant. Face au monde mensonger des adultes, les enfants se trouvent bien dépourvus et se voient contraints, à leur tour, d’adopter les mêmes comportements que leurs aînés. Dans le port de Trieste, infiniment banal, trois garçons s’exaltent à pratiquer des jeux interdits et à apprendre à grandir. Sans surprises, ils se confrontent à la dure réalité et font de chaque étape un passage vers autre chose de tangible. Le roman a été adapté au cinéma en 1960 et devait servir à lancer la jeune Danièle Gaubert, que le producteur Raoul Lévy espérait présenter comme la nouvelle Brigitte Bardot. Si ce long métrage se présente sous une forme classique, il n’a malheureusement pas reçu l’accueil escompté tant de la part de la critique que du public. L’occasion bien sûr de se référer au roman plutôt que de tenter de se procurer le DVD dans l’une ou l’autre boutique devenue de plus en plus rare. Un classique oublié à redécouvrir en format de poche à moins de 9 euros ! Ed. Motifs – 292 pages Daniel Bastié


UN DÉMON DE PETITE ENVERGURE Fiodor Sologoub est un auteur russe né en 1863 et décédé en 1927. « Un démon de petite envergure » lui a permis d’obtenir une renommée trop vite oubliée. Il situe l’action de ce roman dans un petit village perdu au milieu de nulle part et met en scène Peredonov, un professeur obsédé par son avancement social et prêt à toutes les compromissions pour atteindre son objectif. Dès lors, il se montre hautain, se targue de son érudition et s’enferme dans un processus d’élimination en devenant un tyran domestique. L’occasion surtout de se plonger dans la complexité de l’âme humaine et d’y découvrir toutes ses noirceurs. Avec énormément d’acuité, l’auteur décrit un microcosme qui se transforme en enfer, fruit d’un ego dévorant et dévastateur et qui explique de quelle manière un minable se croit investi d’une mission et endigue tous les efforts que les autres s’efforcent d’adopter pour lui être agréable. Il s’agit essentiellement d’une parabole sur l’égocentrisme, une vie gâchée et l’art de se retrancher des plaisirs quotidiens. Un comportement qui, infailliblement, mène au meurtre. Ed. Motifs – 488 pages Daniel Bastié

LES ANNÉES FOCH Les années 90 se présentent avec panache et Pierre, vingt ans, quitte sa province pour rejoindre Anne à Paris, sa copine d’enfance. Très tôt, il se rend à l’évidence que les apparences n’ont rien de ce qu’elles devraient laisser apparaître. L’adresse à laquelle il se rend (avenue Foch) se révèle une maison close. Par la force des choses, il décide d’investiguer sur celle qu’il aimerait tellement retrouver et s’initie aux soirées privées, entre prostituées de luxe et clientèle fortunée. Après avoir rédigé une biographie intéressante sur le comédien Maurice Ronet, Jean-Pierre Montal livre ici un premier roman tout en finesse, en évitant la vulgarité et en croquant un univers dont la majorité des lecteurs ne sont pas coutumiers. Son style brille par son efficacité et se targue d’une belle fulgurance, où rien n’est laissé au hasard. Dans ce monde où tout paraît permis, le protagoniste croise des visages connus de la capitale. Relations qui lui permettront peut-être de découvrir les mystères qui sculptent Anne, beauté de plus en plus éloignée des souvenirs qu’il avait entretenus. Ce micro-roman est suivi par « 25 bis rue Jenner ». Deux récits pour le prix d’un ! Ed. Motifs – 212 pages Sam Mas


ÉLOGE DE LA VOITURE Le trafic routier a atteint ses limites et est cause d’engorgement des grandes villes et de pollution. Voilà ce qu’on peut entendre dans les médias. Pourtant, Thomas Morales refuse cet avis et préfère défendre les amoureux des quatre-roues, en célébrant le bonheur de se retrouver au volant et de circuler librement. A rebours des esprits bien-pensants, il clame ce que d’autres murmurent et n’entend pas se laisser déposséder de son automobile. Mieux, il refuse le diktat qui vise de plus en plus à interdire le diesel ou l’essence et à repenser le monde en faveur des piétons et des moyens de locomotion alternatifs. Féru de belles mécaniques, il nous entretient de sa passion pour les modèles disparus et cherche à nous prouver que les cylindrées ne se résument pas à une tonne d’acier et à un moteur. Elles font partie du patrimoine des pays industriels et ont marqué moult générations. Alors que la démagogie se propage, il résiste aux idées persistantes et refuse de voir disparaître la bagnole du paysage européen. Comment en sommes-nous arrivés là, à un tel point de dénigrement et d’ignorance ? Suffitil d’aimer bichonner une belle mécanique pour être pointé du doigt comme ennemi de l’humanité alors que, il y a encore quelques décennies, la politique prônait le tout à la voiture ? On l’oublie un peu vite mais, à la Belle Époque, l’automobile était synonyme de progrès et de liberté. Mais, on le sait, aucun avis ne reste intangible ! Ed. du Rocher – 228 pages André Metzinger

ATLAS ÉDITION 2019 GÉOPOLITIQUE MONDIAL Alors que la rentrée scolaire bat son plein, voilà un nouveau atlas de géopolitique mondiale couvrant les cinq continents et qui se veut un outil d’analyse idoine sans équivalent pour comprendre le monde d’aujourd’hui, plus complexe que celui d’hier et, sans doute, moins que celui de demain. On le voit chaque jour dans les médias, les rapports entre états changent et, sous les coups de butoir de Donald Trump, de nouvelles tensions se créent dans les deux hémisphères, mêlant nationalisme, religion, populisme et intérêts économiques. Partout la situation demeure peu stable, que ce soit en Turquie, en Russie ou en Chine, où s’érigent des régimes liberticides, dans la région du golfe assise sur une poudrière et au sein de l’Europe des vingt-sept de plus en plus sclérosée par des divisions internes. Autant de marqueurs dessinant une nouvelle carte, où les anciennes alliances sont remodelées, les vieilles certitudes ébranlées et l’avenir proche constellé de zones d’ombre Avec près de cent cinquante cartes et graphiques, ce livre constitue un outil de compréhension utile pour les étudiants, les enseignants et tous ceux qui souhaitent savoir ce qui se passe ailleurs. Précis et pédagogique, cet atlas a l’ambition de se vouloir exhaustif et de placer une matière ardue à hauteur de compréhension de tout un chacun, sans préjugés ni dogmes. Un travail qui a nécessité dix-huit mois de gestation ! Ed. du Rocher - 192 pages Willy Smedt


INTRODUCTION Á L’ANALYSE GÉOPOLITIQUE On peut résumer la géopolitique à une définition basique, même si cette dernière n’englobe pas tous les aspects de cette discipline complexe. Pour faire bref, elle est l'étude des rivalités de pouvoirs qui permettent de saisir le contrôle de territoires et celui de la population qui s'y trouve. La géopolitique se caractérise également par le fait que chaque territoire, petit ou grand, devient l'objet de rivalités de pouvoirs ou d'influences : tensions entre régimes politiques ou groupes armés plus ou moins clandestins. Tous ces antagonismes ayant pour finalité d’assurer le contrôle, la conquête ou la défense de zones parfaitement circonscrites. En refusant d’utiliser des termes techniques qui ne servent qu’à compliquer la lecture, Olivier Zajec propose un ouvrage de vulgarisation qui reprend les explications dès le début et qui définit les principaux courants intellectuels, ainsi que les fondateurs de cette discipline universitaire, tant par le truchement d’approches concrètes que d’exemples précis. Facteurs religieux, poussées économiques, influences culturelles, sensibilité émotionnelle, rien n’est laissé sur la borne d’arrêt. Afin d’éviter les digressions inutiles et de ne jamais perdre de vue l’essentiel, il utilise des graphiques et des tableaux qui, souvent, valent mieux que de longs discours académiques et soporifiques. Une introduction qui pourrait servir de manuel aux étudiants en géopolitique, mais également à ceux qui se consacrent aux sciences humaines et politiques. Ed. du Rocher – 272 pages André Metzinger

CENT FAÇONS DE NE PAS ACCUEILLIR UN MIGRANT A l’heure où l’immigration est devenue un enjeu politique sur l’échiquier des grandes nations européennes, Yves Cusset sort un abécédaire foncièrement opportuniste, qui galvaude les idées reçues et qui rue dans le politiquement correct, afin de brocarder tous les pisse-froid et les extrémistes de tous bords. Que faire face à pareille situation de délabrement de notre démocratie où se réveillent de vieux élans xénophobes ? Assurément, la situation n’a rien d’une sinécure et le défi de la classe dirigeante consiste à trouver une solution idoine pour ne pas se laisser renverser par de fausses solutions ou l’absence de toute mesure. Assurément, un combat est à mener : celui de l’intégration des nouveaux arrivants, de l’apprentissage de la laïcité, du respect de la liberté religieuse et de l’égalité entre gens de sexe opposé. Comme l’auteur le précise dans l’introduction, la publication de ce recueil a été un examen de conscience, sachant que certains tenteraient de lire entre les lignes, de prêter des idées qu’il n’a jamais formulées, de sous-entendre des propos racistes ou de provoquer pour faire le mal. A la manière des chansonniers, l’homme s’empare de l’actualité pour la tordre par le rire et en extraire le jus. Au-delà des désaccords que cet opus ne manquera pas de susciter, il se veut avant tout un outil de réflexion, basé sur des références d’intellectuels de tous bords et d’économistes réputés. Enfin, on n’aborde pas pareil propos sans utiliser l’humour. Ce livre pourrait servir de purgatif aux racistes comme aux antiracistes, qui adorent hurler des slogans en se regardant le nombril et en brillant d’une aura dont ils sont le plus souvent les seuls convaincus. Ed. du Rocher -208 pages Sam Mas


LA POLITIQUE DE LA VERTU Dans « La politique de la vertu », le théologien et philosophe britannique John Milbank, théoricien du « blue socialism », propose une alternative au libéralisme avec le retour d'une éthique des vertus et une économie sociale de marché fondée sur la coopération. Assurément, le mot libéralisme peut vouloir exprimer énormément de choses, même si tout le monde s’accorde pour affirmer qu’il s’agit de la liberté d’entreprendre, avec pour corollaire un individualisme prépondérant. Alors que la colère et le sentiment d’abandon se généralisent au sein de la population, incapable de vivre décemment et en proie à de plus en plus vives sécessions, elle se sent désemparée face à un Etat de moins en moins capable de prendre ses responsabilités sociales et qui, en France comme en Belgique, postule pour des mesures ultralibérales qui font mal au portefeuille. Pour combattre cette tendance, l’auteur prône une politique de la vertu héritée du passé et basée sur la fraternité réciproque. Au demeurant, il invite chacun à construire un monde en partant des individus isolés et détachés de tous liens et non plus comme des êtres constitués par leurs attaches aux autres ayant des finalités. Un regard qui vise à instaurer une véritable justice culturelle et un partage plus équitable des richesses. Une belle utopie, affirment certains. A vous de voir ! Ed. Desclée de Brouwer – 538 pages Sam Mas

L’ENFANT Maria Montessori bat en brèche les certitudes et nous propose une idée différente de la place de l’enfant au sein du couple et de la société. L’occasion de parler du rôle de l’éducation et de ce qu’implique chaque orientation. Très vite, elle fait voler en éclat les vieux préceptes et ose une approche nouvelle, permettant à chaque petit de s’épanouir à partir de ses qualités propres et de les déployer dès le début de son existence. Cette pédagogie ne se veut pas qu’une belle avancée destinée à booster les ventes d’un livre ni à passer à la télévision dans le cadre de débats sur la jeunesse. Elle se veut avant tout un état d’esprit et une prise de conscience qui allie sciences, retour à la nature et philosophie, en plaçant chaque garçon ou fille au centre de ses apprentissages. Son autonomie peut commencer évidemment débuter fort tôt. L’important consiste à le mettre en situation et à lui offrir les moyens d’apprendre de manière parfaitement autonome, de le rôder à la confiance en soi et de l’aider à se développer en acquérant de l’expérience par les sens. Déjà publié en 2006, il s’agit ici d’une nouvelle édition agrémentée de seize chapitres inédits et qui abordent des thèmes nouveaux tels que les rapports entre générations et les droits de l’enfant. Maria Montessori a été l’une des premières femmes médecins d’Italie et est mondialement réputée pour ses prises de position en faveur des plus petits. Son œuvre étonne par son acuité et sa capacité d’éveiller en chacun les bons gestes et les bonnes questions. Ed. Desclée de Brouwer -318 pages Amélie Collard


PÈRE JACQUES HAMEL Si le nom de ce religieux ne vous dit peut-être pas grand-chose, vous avez sans doute encore en mémoire son assassinat crapuleux en juillet 2016 lors de l’office qu’il assurait dans sa paroisse d’Etienne-du-Rouvray, victime du fanatisme et de la bêtise de deux jeunes bien décidés à tuer des chrétiens. Abdel-Malik Petitjean, dix-neuf ans, avait été abattu avec son complice Adel Kermiche par les forces de l’ordre, alors qu’ils sortaient de l’église après l’attentat. Le prêtre Jacques Hamel venait d’achever sa messe matinale lorsqu’il a été égorgé par ses bourreaux. Mais qui était ce prêtre ? Si sa mort a occulté sa vie, nous avons appris qu’il était un homme de toute confiance, épris de justice et de générosité, vivant de l’amour des autres et donnant sans compter. Deux ans après cet acte barbare, Armand Isnard a eu la curiosité d’enquêter pour dresser le portrait de celui que beaucoup regrettent dans le diocèse. Ainsi, de chapitre en chapitre, nous voilà conviés à entrer sur la pointe des pieds dans son intimité à la recherche de son enfance, de sa formation, de ses années de résistance à la souffrance, de sons sens de l’humour et de son énorme humilité. De nombreux témoignages complètent cet admirable voyage : celui de l’archevêque de Rouen, de sa sœur Roselyne Hamel et de nombreux proches. Pour certains, son immolation devrait le mener à la sanctification.

Ed. Artège – 174 pages Sam Mas

BAUDOUIN ET FABIOLA – L’ITINÉRAIRE SPIRITUEL D’UN COUPLE La foi catholique était une force vive dans l’existence du roi Baudouin de Belgique et il vivait une religiosité que personne ne trouvait exagérée. Il était de notoriété publique qu’il avait même été tenté d’entrer dans un ordre religieux. A contrecœur, il avait accepté de succéder à son père Léopold III, contraint d’abdiquer en 1951, et de prendre les rênes de la nation. Surnommé le Roi triste, il souhaitait avant tout comme épouse une bonne chrétienne, capable de l’épauler au jour le jour. Bernadette Chovelon retrace ici l’histoire d’un couple peu ordinaire, qui au cours des années de règne a su se faire apprécier par la population, et revient sur l’intimité de leur relation spirituelle comme leur action publique. Unique par son approche, cet ouvrage révèle le lien le plus fort de leur union et nous montre à quel point tous deux se sont efforcés de témoigner de leur engagement pour devenir des exemples vivants dans un cheminement ouvert à l’amour de tous. Malgré des souffrances inhérentes à la condition humaine, ils ont surmonté maints obstacles pour rayonner aux yeux du peuple et acquérir une sérénité que beaucoup leur enviaient. Outre l’idée de parler de ce binôme d’une manière inédite, l’objectif de ce livre consiste également à présenter le sacrement du mariage chrétien comme une force active et un atout pour connaître la richesse et la joie de vivre à deux.


Ed. Artège – 216 pages Sam Mas

SIMPLE « Quand je l’ai dénichée Florence, elle était allongée au milieu des pins. La gamine avait les yeux ouverts sur rien. Elle bougeait plus un orteil. J’avais beau l’appeler, elle répondait pas. Je l’ai chatouillée sous les pieds, rien, elle rigolait pas du tout ! Du coup, je l’ai secouée. Elle était molle et y avait du sang en quantité ! Me suis approché de sa bouche, lui ai enfoncé à l’intérieur un doigt voir si elle mordait, non, elle mordait pas ! J’ai gueulé à deux pas de ses oreilles et ça l’a pas dérangée. Puis, je me suis foutu à transpirer pareil que la mer, salé. Florence, elle sentait les abattoirs alors qu’avant, son parfum il était à la lavande Après, je me souviens plus. Je suis tombé à la renverse. » Julie Estève met en scène Antoine Orsini que tout le monde surnomme le baoul, expression corse qui signifie le niais, l’innocent, l’idiot du village. Ce dernier n’a pas besoin de grand-chose pour exister. Il parle à sa chaise, celles des autres et entretient des liens ambigus avec Florence Biancarelli, une adolescente du coin. Néanmoins, lorsque cette dernière est découverte morte, tous les regards se focalisent sur lui et la suspicion empoissonne le vivre ensemble. Avec des expressions métaphoriques, un chouia de poésie et l’usage d’une langue singulière destinée à faire entrer le lecteur dans le mental du protagoniste, Julie Estève donne vie à un monde soumis aux aléas de la nature, aux traditions et aux apparences. Bien entendu, lorsque la vérité éclate, rien ne sera jamais plus comme avant. Une fameuse description d’une île aux charmes si particuliers ! Ed. Stock - 204 pages Daniel Bastié

LE LIVRE NOIR DU SPORT RUSSE Depuis son ascension au pouvoir, Vladimir Poutine a encouragé la pratique du sport et en a fait une discipline d’État, allant jusqu’à confondre les deux sphères. Lui-même adepte des performances physiques et ancien judoka, il s’est entouré de gardes aux muscles saillants, faisant de chaque compétition et de chaque victoire des instruments de propagande. Malheureusement, la réalité est là pour nous rappeler que tous les coups sont permis pour montrer sa puissance et enflammer le nationalisme. Quels en sont les enjeux pour la politique et la géopolitique de Poutine et quelles autres influences cherchet-il ? Jean-Christophe Collin signe un essai qui revient sur les grands scandales qui ont maculé l’une des plus grandes puissances mondiales, avec des dopages à répétition et de la corruption à tous les niveaux. Autant qu’une analyse objective, ce livre propose une immersion dans une sphère extravagante et inquiétante au gré de destins singuliers et d’itinéraires hauts en couleur. La Coupe du Monde 2018 s’est révélée une vitrine exceptionnelle de la Russie moderne, malheureusement entachée par le hooliganisme, la prévarication et une violence sournoise à l’égard de toute forme d’opposition politique, des homosexuels et de certaines minorités, prouvant que les vieux démons du Kremlin sont loin d’être entravés. Ed. Stock – 312 pages


Willy Smedt LE DRAGON AU CŒUR DE CHOCOLAT De quelle manière une jeune dragonne peut-elle se transformer en petite fille ? Par le truchement d’une boisson chocolatée que lui fait ingurgiter un mage aux pouvoirs mystérieux pris dans ses griffes ! Du coup, Aventurine se retrouve sous des traits nouveaux et doit expérimenter son quotidien dans un univers qui lui est parfaitement inconnu. Très vite, elle découvre ses limites et doit apprendre à évoluer sans cracher des flammes ni évoluer dans les airs. Pas une sinécure lorsqu’on s’amusait à terroriser la région et qu’on se targuait d’une réputation de « méchante » ! Stéphanie Burgis signe un roman plein de magie et de fantaisie qui s’adresse aux ados amateurs de sortilèges et de contes séculaires, avec des rebondissements qui se succèdent à un rythme effréné, de l’humour et une jolie leçon de morale qui laisse entendre que l’éthique consiste à savoir se positionner face aux situations et à réagir sans perdre ses moyens. En filigrane, il s’agit également d’un récit initiatique et d’une ode au chocolat comme saveur précieuse. Arômes, odeurs et épices se combinent pour parfumer chaque chapitre et exalter l’ivresse de lire ! Ed. Gallimard Jeunesse – 320 pages Daniel Bastié

CONFESSIONS TOUJOURS PLUS CASTASTROPHIQUES Rien ne va plus ! La vie de Chloé ressemble à un naufrage et toutes ses initiatives se fracassent. Pourtant, elle refuse de demeurer sottement à s’étioler en croisant les bras et à attendre des jours meilleurs. Elle sait qu’elle devrait cesser de songer définitivement à Marc, son ex, et se mettre à chercher un amoureux qui lui ressemble, pour se sentir bien contre son torse et faire comme toutes les copines du bahut. Il y a aussi cette chipie qui accapare sa meilleure confidente, sa mère qui parle de déménager au Mexique et les répétitions du spectacle annuel qui capotent. Difficile de rester positive lorsque tout part à vau-l’eau et qu’on ne possède pas suffisamment d’expérience pour savoir que le meilleur reste à venir et que l’existence ne laisse jamais en berne une lycéenne en mal d’amour et d’amitié. Emma Chastain signe un deuxième volet aux aventures de Chloé Snow et le ponctue de notes, de mails et de textos, afin de rendre son récit vivant et addictif. Bien sûr, les adolescentes s’identifieront sans mal à l’héroïne et reconnaîtront plusieurs situations propres aux préoccupations de la jeunesse, avec toujours de l’humour et du détachement. Un journal intime pétillant de remarques lucides et d’émotion ! Ed. Gallimard – 352 pages Daniel Bastié


JOURNAL D’UNE FILLE MOTIVÉE Juliette est ce qu’on appelle une fille hyper motivée. Pour elle, pas question de fléchir les bras et de se laisser bouffer par le quotidien. A trente ans, elle sait où elle veut aller, même si rien ne se présente sous les meilleurs augures. Coincée entre un amoureux super jaloux et un ex qui ne demande qu’à la reconquérir après avoir mis une autre enceinte, le tableau n’a rien d’évident. A cela, elle est maman d’un adorable bout de chou de quelques mois et rêve d’un mariage en blanc. Enfin, que faire d’une ex-belle-mère attachante mais vraiment encombrante ? Suzy K. Quinn signe une chronique pleine de tendresse et de drôlerie et croque les habitudes des jeunes femmes qui attendent tout de l’avenir et s’emberlificotent avec les fuseaux de la routine, Le ton se veut évidemment à la décontraction, préférant rire des situations compliquées plutôt que de verser dans la mélancolie ou le drame. « Journal d’une fille motivée » permet surtout d’entrer dans un cocon rafraichissant, sans se mettre martel en tête et en se répétant que l’existence vaut mille fois la peine d’être vécue, faisant de chaque épreuve un souvenir que le présent a bien vite fait d’étioler. Une lecture positive pour toutes celles qui se sentent tristes ou qui doivent affronter l’une ou l’autre difficulté. Une pépite de désinvolture et de qui donne la pèche ! Ed. LJ – 380 pages Amélie Collard

J’AI 14 ANS ET JE SUIS DÉTESTABLE Quatorze ans : l’âge de tous les possibles et de tous les superlatifs ! Léa se sent mal dans sa peau d’adolescente et se regimbe face au reflet que lui renvoie le miroir de sa chambre. Après une énième querelle avec sa mère à propos de tout et rien, elle décide d’emménager dans le grenier de la maison et découvre que Whoo, le fantôme imaginaire avec lequel elle jouait lorsqu’elle était petite, existe bel et bien. Fort vite, elle apprend qu’il se prénomme Charles et que, depuis son suicide, il est bloqué dans la demeure. Le comble de toute chose réside dans le fait qu’il soit totalement épris d’elle et qu’il attend un signe de sa part. En tombant amoureuse de lui, la jeune fille pourrait rompre la malédiction et le libérer de ses chaînes. Alors que l’on s’attend à un récit qui brosse le portrait d’une ado en crise, il n’en est rien. Gudule signe une histoire de revenant à la Casper, tout en mettant l’accent sur Léa que tout insupporte et qui vit dans un état d’incertitude permanent (l’état de sa chambre qu’elle refuse de ranger, sa susceptibilité, son côté fleur bleue qui la rend amoureuse en un clin-d’œil). Malgré quelques clichés, ce roman jeunesse tisse le profil d’une pré-femme dont le mal-être permet à de nombreuses jeunes lectrices de s’identifier, tout en mâtinant le récit d’une atmosphère gentiment fantastique. L’écriture est pimpante, voire drôle, et ne manque pas d’idées. Un livre que je verrai bien dans les rayonnages d’une bibliothèque d’école. Ed. Flammarion Jeunesse – 128 pages Sylvie Van Laere


EÏ BEN EK, EÏ BLAAIV EK ! Après « Schieven architect », Jean-Jacques De Gheyndt nous propose de revoir les langues inventées par Hergé dans les albums de Tintin. « Si on étudie le dialecte bruxellois dans Tintin, il convient de distinguer les langues inventées par Hergé des traductions dialectales. Seuls le syldave et le bordure d’une part, l’arumbaya et le bibaro d’autre part sont de sa main et basés sur le dialecte flamand de Bruxelles, le brussels vloms. Tintin a été adapté dans plus de quatre-vingts langues, que ce soit en espagnol, anglais, chinois ou hindi, et même dans des idiomes aussi exotiques que le papiamentu. Chacune témoigne à sa manière de l’universalité de l’œuvre et du regain d’intérêt pour les dialectes. Nous ne nous intéresserons ici qu'aux seules créations du Maître. » nous dit l’auteur. De « Tintin au Pays des Soviets » à « Tintin et l'Alph-Art », Hergé recourt aux parlers bruxellois, tant pour les noms de lieux et de personnages que pour les langues de ses pays imaginaires, et ce avec une virtuosité étonnante. Les noms de personnages sont peu modifiés par rapport aux savoureuses expressions récupérées et l'interprétation rarement complexe. Les différents lieux géographiques d'une même région se répondent et forment un tout cohérent, que l'auteur illustre parfois dans les paysages. Ed. Bernardiennes – 216 pages Sam Mas

LA TRIANGULATION Stratégie du jeu scénique, comprenez cynique, quand le triangle émotionnel tourne en vase clos, tous les coups semblent permis. Cinq récits, à l'instar des doigts de la main : uniques, mais indissociables. On nage en plein paradoxe. Si tous les protagonistes de ces histoires se rencontraient en même temps, dans la même pièce, ce serait un fameux imbroglio ou peut-être un théâtre improbable où les personnages auraient quelque chose à partager...ou pas. Gaëtan Faucer, né en 1975, à Bruxelles, est dramaturge, aphoriste, poète et nouvelliste, mais c’est surtout le théâtre qui l'inspire sous toutes ses formes. Plusieurs de ses pièces ont été jouées dans divers lieux théâtraux. Souvent on éprouve cette envie : rebâtir un monde à son image, faire agir les personnages de nos vies comme s’ils étaient des personnages de papier, obéissant à nos désirs imaginatifs, devenir tout puissant. Ed. Bernardiennes – 116 pages Sam Mas


ELEVEN NOTES Méconnue, la littérature potentielle demande à son lecteur un travail d'approche. "L'Ouvroir de Littérature Potentielle" imaginé par François Le Lionnais et Raymond Queneau (entre autres, dont Georges Perec), en abrégé OULIPO, créait en 1960 une littérature d'un style nouveau. Elle est à l'expression de Flaubert et de Hugo ce que la musique sérielle est au Bel Canto : elle nécessite de l'attention. Audacieux lecteur, à votre avis, qu’est-ce qui va différencier ici, entre autres, le Godefroy du Larousse, Castor de Pollux, Caïn d’Abel, le Mort du Curé, la virtuosité de la maladresse, la petitesse de l’immensité, la pureté de la crasse, la compacité de la souplesse, la hideur de la beauté, l’attenant du lointain, le satiné du râpeux, le passé du futur, le côté pile du côté face, le vrai du faux, l’ordinaire du singulier ? Cette réponse unique, vous allez (à n’en point douter) la découvrir au sein de cet opus dans lequel défilent une suite de textes contraints assez courts et que, par défaut, on qualifiera globalement de ludiques et de poétiques, même s’ils ne sont pas que « cela ». Un travail d’orfèvre signé Pascal Weber. Ed. Bernardiennes – 150 pages Sam Mas

LA FILLE DE NICOLAS Un hameau, deux prénoms, des fragments de chanson … Fanny fit appel à ses souvenirs, mais c'était comme mélanger de minuscules touches de couleur dans une grande quantité de peinture noire et les voir disparaître, absorbées par la masse sombre. Maurice posa son regard sur la jeune femme. Plus de vingt ans avaient passé. Elle était devenue adulte, avait changé de prénom, teint ses cheveux dans cette couleur improbable, mais c'était bien elle. Une arrivée qui bouleverse les souvenir enfouis et renvoie chacun à ses responsabilités. « La fille de Nicolas » plonge le lecteur dans un microcosme rempli de non-dits et de secrets étouffés et l'entraîne, au fil d'un roman haletant, à la recherche de la vérité. Quelle vérité ? Le nouveau roman de Geneviève Rousseau est enthousiasmant de la même manière que "Dix-sept photos plus tard", publié il y a un an, a suscité bien des commentaires positifs. Des similitudes dans la thématique relient ces deux livres même si, chronologiquement, ils sont séparés par « Mots choisis », sorti en 2015. La recherche du père et le thème du handicap mental sont communs à ces deux ouvrages, bien que traités de façon très différente. « La fille de Nicolas » se déroule dans un petit village perdu de nos Ardennes, avec ses secrets, ses maudits, ses mots dits et ses mots tus. Captivant jusqu’à la dernière ligne ! Ed. Bernardiennes – 311 pages Sam Mas


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