Bruxelles Culture mars 2020.

Page 1

BRUXELLES CULTURE 5 mars 2020 Brussels Diffusion asbl Contact et abonnement gratuit : pressculture4@gmail.com

RENCONTRE : BARBARA FLAMAND


RENCONTRE : BARBARA FLAMAND Écrivaine engagée, pasionaria scintillante, auteure à la plume acerbe et tendre à la fois, poétesse virulente, pourfendeuse de l’hypocrisie, exploratrice de l’âme, Barbara Y. Flamand n’a de cesse de rédiger comme en témoigne une intense production tantôt militante ou pleine de douceur qui jette un regard sur notre société qu’elle décortique avec acuité. On sait beaucoup moins qu’elle a longtemps été secrétaire au Théâtre royal du parc, qu’elle a travaillé au Ministère de la culture et qu’elle s’est manifestée dans le secteur de l’audiovisuel. Rencontre.

A quel âge avez-vous commencé à écrire ? Vers trente ans, mais avant j’écrivais sur demande des lettres, articles et des nouvelles. Vous souvenez-vous de vos premiers écrits ? Je me souviens vaguement de mes premiers textes mais je ne les ai pas conservés. Je les trouvais un peu naïf set assez conformistes. Qu’avez-vous ressenti lors de la publication de votre premier manuscrit ? La publication de mon premier manuscrit était un recueil de poèmes « …écrasés sous pneu de jaguar ». J’en ai été assez contente parce qu’ils affirmaient ma personnalité et étaient vraiment anticonformistes. Comment pourrait-on définir votre style ? Définir mon style ? Il est en relation avec le contenu. Le style en poésie est évidemment très éloigné du style de la prose qui varie selon qu’il soutient un récit réaliste ou étrange ou un livre d’idées Que représente pour vous l’acte de créer ? Dès l’origine de l’humanité, l’être humain manifeste son besoin de créer, notamment à travers des rites, des cérémonies., et – toujours célèbres – les grottes de Lascaux témoignent de son sens artistique (18.000 ans avant leur découverte). Il faut donc conclure que l’humain ne peut pas se satisfaire d’un quotidien terre à terre. Et, sans doute, veut-il laisser une trace de son passage pour ceux qui vont le suivre. Créer est sans doute un besoin qui donne un sens à la vie. Je pense qu’il est inhérent à la nature humaine Un rituel est-il nécessaire au moment de créer ? Pour moi, un rituel n’est pas utile. L’inspiration peut survenir dans une promenade, lors de sensations et sentiment qui surgissent dans une situation banale capable pourtant de soulever votre imagination et l’orienter, des évènements auxquels je suis sensible, notamment en politique. Je me souviens du poème aux mineurs anglais du temps de Tatcher en1982, et, bien sûr, des sentiments forts, pas seulement l’amour mais surtout l’approche de la mort, la sensation de fragilité de l’être humain. Bref ! Tous les sentiments forts qui conduisent à l’épanchement, A quel moment une œuvre est-elle achevée ? Une œuvre est terminée quand, après plusieurs lectures, on peut refermer le manuscrit avec tranquillité et le savoir prêt à être confié au regard des autres.


Percevez-vous une évolution dans votre manière d’écrire ? Oui et au début, j’étais assez vite satisfaite. Par après, je suis devenue plus critique envers moi-même et plus exigeante. Surtout pour la prose. Les poèmes étaient très peu corrigés et je leur laissais leur spontanéité. Comment peut-on se représenter l’une de vos journées ordinaires ? J’accomplis mes tâches de ménagère, je sors ma caniche, souvent dans le parc du Cinquantenaire puisque j’habite en face, mais aussi dans d’autres parcs. Et pendant que Laïka (la troisième chienne du nom) renifle ou court, je chante. J’aime chanter. Je connais des dizaines de chansons et, notamment, les vieilles chansons françaises que Montand avait mises à son répertoire. De vrais bijoux de poésie ! Avec une baguette magique, quelles mesures prendriezvous pour promouvoir les artistes bruxellois ? Il faut reconnaître que tous les artistes ne sont pas de bons artistes. Je mettrais à l’avant-scène les bons, avec mes pièces de théâtre dans les mains. Et avec ma baguette magique, j’enverrais les autres en Papouasie. Il y a là un folklore varié, original, excentrique dans lequel ils pourraient trouver place. Et s’en donner à cœur joie. La chose la plus indispensable est évidemment la baguette magique. Avez-vous une anecdote à partager avec nos lecteurs ? Non, je ne veux pas partager une anecdote. Je dis qu’il n’y a pas de meilleur partage que la lecture de mes nouvelles. Et mes essais. Si quelque chose n’était plus à refaire, laquelle serait-ce ? Si quelque chose n’était plus à refaire…Je ne sais pas. Ah si ! Faire confiance aux gens qui ne le méritent pas. Même si la question risque de paraître prétentieuse, quel message ou quelle impression cherchez-vous à transmettre à travers vos livres ? Je ne dis pas que je cherche à transmettre quelque chose au moment où j’écris, mais je le fais sans le vouloir. Le lecteur comprend, je crois, que vivre demande une résistance à la douleur, au désespoir et qu’il faut donner un sens à la vie. L’amour peut lui donner ce sens ainsi que l’art et la lutte pour bâtir un monde plus humain. On a toujours dit, souvent, avec condescendance, que j’étais un écrivain engagé. Bien sûr ! Très ! Mais ma production littéraire, quel que soit le genre, s’est toujours attachée à notre condition humaine. Condition à la fois biologique que nous vivons de la naissance à la mort avec tous les événements de tous ordres qui surviennent dans ce laps de temps et ce qui est particulier à l’humain : la condition historique, donc forcément, sociale, économique, politique.


Dans quel coin de Bruxelles pourrait-on vous croiser ? Vous pouvez me rencontrer dans les parcs où je conduis ma chienne au regard éloquent pour laquelle j’ai eu un coup de foudre. Le Parc du Cinquantenaire dont je vous ai déjà parlé, le Parc de Woluwé, le Parc Léopold et, beaucoup plus loin dans l’avenue de Tervuren, le RougeCloître ». A l’association des Ecrivains belges et au Grenier Jane Tony pour le plaisir de belles rencontres. Dans les rayons du « Carrefour », du « Lidl » et du « Colruyt » que je suis obligée de fréquenter. Je fais les courses à contre cœur. Et jamais le matin ! Et en voiture ! Dans les boutiques, non ! Elles n’attirent pas mon attention. Dans le musée du cinéma, c’est possible … Retrouvez Barbara Flamand sur le site www.ecrivainsbelges.be Propos recueillis par Daniel Bastié

CONCERT : LE GRAND BLEU Pour célébrer les trente ans de « Le grand bleu » de Luc Besson, deux représentations exceptionnelles en concert ont eu lieu à La Seine Musicale en mai 2018. Fort de ce succès, le ciné-concert est parti en tournée. Eric Serra et ses musiciens nous invitent donc à redécouvrir cette œuvre incontournable du cinéma français, qu’ils interprètent sur scène à l’identique durant la projection pour une expérience immersive et exceptionnelle. Bande originale de tous les superlatifs (Victoire puis César de la meilleure musique de film, nombreux disques d’or et de platine avec plus de trois millions d’exemplaires vendus), ce score retranscrit parfaitement les sentiments les plus profonds du héros du film (Jacques Mayol), mais également ses sensations lors des plongées mémorables. La B.O.demeure un vecteur d’émotions. Il ne s’agit jamais d’une simple musique d’atmosphère (planante diront certains !), mais d’une expérience sensorielle pour inviter le spectateur à vivre des instants mémorables. Davantage qu’électronique, ce score entraîne chacun en apnée, avec des touches sonores distillées sans jamais appuyer sur les effets et qui concourent à en faire un classique du septième art. Par le truchement de ce long métrage, Luc Besson a acquis un statut de cinéaste incontournable et Eric Serra celui de compositeur bankable. Un concert à applaudir sans modération le 3 1 m a r s 2 0 2 0 à 2 0 h e u r e s . Plus de détails sur le site www.palais12.com Avenue de Miramar à 1020 Bruxelles André Metzinger


50e FOIRE DU LIVRE À BRUXELLES La cinquantième édition de la Foire du Livre de Bruxelles se tiendra, une fois encore, à Tour & Taxis du 5 au 8 mars. Elle sera consacrée cette année au « livre ensemble », où livre rime avec vivre. On y développera, à travers la lecture, les enjeux actuels de la démocratie : vivre les uns avec les autres dans le respect des différences et la pratique des ressemblances. L’invité d’honneur sera le Maroc, ouvert au dialogue des cultures. Le Maroc, qui a déjà participé aux Foires du livre de Paris, de Montréal et de la Suisse, est bien représenté à Bruxelles avec une communauté comptant 150 000 Marocains, soit 9% de la population bruxelloise. Le Maroc, on le sait, est trilingue : on y parle l’arabe, le berbère et le français, suite au protectorat que la France a exercé jusqu’en 1956. Ces langues, y compris l’espagnol entendu dans le nord du pays, sont des ouvertures au monde extérieur. Des portes ouvertes entre l’Afrique et l’Europe qui font du Maroc le pays du Maghreb le plus proche à ce jour. C’est pourquoi la Foire du Livre de Bruxelles en a fait son invité d’honneur avec une exposition – Le Maroc et l’Europe – à visiter au Pavillon marocain qui déploiera ses 260 m2 d’ouverture sur l’espace du livre. Thé à la menthe (chay bi na’na’) et sucreries marocaines seront au rendez-vous. Le Maroc se livre comme le livre : sa programmation nous permettra de rencontrer trente auteurs et autrices autour d’une quarantaine de sujets présentés par des animateurs de talent. Ils nous feront découvrir une littérature d’exception. Citons entre autres Eddy Caekelberghs qui recevra Tahar Ben Jelloun pour parler de ses deux derniers livres : La Punition et Douleur et lumière du monde (Pavillon marocain, sam. 7 mars à 14 h). D’autres rencontres seront consacrées à la littérature marocaine et à la problématique du multilinguisme au Maroc et ailleurs dans le cadre de la cinquième journée de la Traduction, avec Traduire d’une rive à l’autre (Place de l’Europe, où quarante rencontres auront lieu avec onze pays représentés). Sur quatre jours donc, c’est une immense foire du livre qui vous attend, répartie sur 17 500 m2. Mille auteurs y seront, avec 500 éditeurs représentés, 300 rencontres et débats et 230 exposants. C’est un fleuve qui est charrié. Un torrent de pages et de rencontres qui s’adressent à tous les âges, des plus jeunes aux plus vieux, de la bande dessinée aux réflexions sur le « vivre ensemble ». Toutes plumes dehors et tous yeux avides de lire s’y rejoindront. De nombreuses séances de dédicace y seront proposées, dont celle de l’incontournable Amélie Nothomb. Trois invités d’honneur Trois invités seront présents. D’abord Leila Slimani, marquée par son double ancrage en France et au Maroc, où elle est née en 1981. Chanson douce qui raconte l’infanticide commis par une nounou au service d’une famille parisienne, a obtenu le Prix Goncourt en 2016 et a révélé la jeune romancière. Son roman a été transposé à l’écran et sur les planches. Avec Le pays des autres, Leila entame une trilogie sur son histoire familiale au Maroc. Elle participera à trois rencontres sam. 7 mars à 16 h et dim. 8 mars à 13 h et 15 h (Théâtre des Mots et Pavillon marocain). Liao Yivu, poète beatnik chinois marqué, lui, par la tragédie de Tiananmen, a raconté quatre années de prison et de torture dans L’empire des ténèbres. Des balles et de l’opium scrute la Chine d’aujourd’hui. Comparé à Soljenitsyne, l’auteur poursuit dans l’exil son combat pour la liberté et la démocratie. On l’écoutera dans deux rencontres : l’une au côté de Marie Holzman, sinologue et traductrice de ses œuvres, le vendr. 6 mars à 19 h ; l’autre, le sam. 7 mars à 12 h, où il s’entretiendra avec une Syrienne dans un contexte où la parole est aussi muselée (Grand-Place du Livre).


Le troisième invité sera Alessandro Baricco, écrivain italien qui a réfléchi sur l’ère numérique dans The Game et qui poursuit sa réflexion dans des textes poétiques, intimistes, fantasques ou intellectuels. Son roman Soie l’a propulsé dans le monde entier. Pour lui, l’écriture reste un jeu qu’il nous dévoilera. Prix décernés et livres à gagner Plusieurs prix seront remis à la Foire du Livre : le Prix Première décerné par la RTBF depuis 2007, le Prix Première Victor du Livre Jeunesse, le Prix Fintro de BNP-Paribas à la recherche du meilleur polar, le Prix Libbylit récompensant la littérature de jeunesse, le Prix de la chronique et le Prix de la prison pour les récits écrits derrière les barreaux. Ou encore le Prix Atomium des enfants pour la BD éducative. La jeunesse, qui lira les livres demain, est invitée elle aussi à participer à la fête, avec les expériences numériques (stand 113), le bibiobus qui circule de ville en ville et qui sera présent aux portes de la Foire, les nombreux stands de bandes dessinées et les salons de la famille, où une pause-bébé accueillera les parents à la recherche d’une table pour langer. Accueil assuré par les baby-sitters de la Ligue des familles au stand 400. Une chasse aux pockets books sera organisée avant la foire, le dimanche 1er mars à 14 h dans le centre de Bruxelles, pour aller recueillir les vrais livres gagnés au Point Info. Mille livres ont été distribués l’an passé. Programme aussi pour les enseignants le samedi 7 mars, avec l’Association belge des professeurs de français (ABPF) qui a prêté son concours pour les ateliers d’écriture et de lecture. Toutes ces activités de la Foire sont gratuites, comme la navette qui vous y déposera depuis la gare du Nord. Cette gratuité est due au commissaire général Grégory Laurent qui a pris ses fonctions voici cinq ans. Il quitte à présent la Foire, laissant la place à Marie Noble qui lui succède. La Foire du Livre se tiendra du 5 au 8 mars 2020 à Tour & Taxis, av. du Port 86 C à 1000 Bruxelles, de 10 h à 19 h (22 h le vendredi). Programme des activités sur www.flb.be ou contact sur info@flb.be pour s’y inscrire. Tél. : 02/290 44 31 Michel Lequeux

EXPOSITION : NATURA Connue pour les éclaboussures noires qui révèlent ses états d’âme sur la toile, Pascale de Bruxelles nous convie à sa nouvelle exposition Natura, consacrée cette fois à la couleur. Dessinatrice, peintre, créatrice des Pascalligraphies qui transposent ses émotions, elle nous montre qu’elle est aussi experte dans le rendu des animaux et des paysages en couleurs. « Je présente ici des animaux peints à l’acrylique. Ce qui m’interpelle en eux, c’est leur regard. On commence à se poser cette question : l’animal ne serait-il pas doué d’intelligence, voire de sensibilité ? Cela paraît évident si vous avez un animal de compagnie. » Singe ou lion, ses animaux ont cette étincelle d’intelligence dans les yeux, parfois un peu de tendresse qu’ils nous communiquent ou nous font partager. Venez ressentir cette ode à la vie à l’Espace Épicentre où Pascale de Bruxelles exposera ses œuvres peintes du 15 février au 31 mars 2020, chaque samedi de 11 h à 19 h 30. Plus d’informations sur www.artiris.brussels ou en téléphonant à l’artiste au 0484 61 33 77. Espace Épicentre Rue des Éperonniers, 2 à 1000 Bruxelles Michel Lequeux


LE FESTIVAL ANIMA DANS TOUS SES ÉCLATS Le congé de carnaval touchant à sa fin, que faire sinon aller au Festival international du film d’animation de Bruxelles, qui vient de souffler ses 39 bougies. Il se tient à Flagey, sur le beau « paquebot », ainsi qu’au cinéma Palace du 21 février au 1er mars. Egalement au Qbic Hôtel, non loin de la place Flagey, en haut de la rue Lesbroussart, qui accueillera les invités d’Anima. Petits et grands y sont les bienvenus, de 7 à 77 ans, avec des projections pour les plus jeunes à partir de deux ans, le tout sur une bonne odeur de crêpes qui accompagnera les nombreux courts métrages à l’affiche. Voilà de quoi remplacer avantageusement, en images animées, les sports d’hiver si vous n’avez pas eu la chance de partir skier avec vos enfants. Anima, c’est le festival de tous les publics qui vont se croiser. Les familles découvriront les nouveautés de l’année, dont six longs métrages et vingt petites pépites en compétition aux côtés des meilleures reprises, comme Les Hirondelles de Kaboul qui évoquent l’amour sous la burqa, ou Pachamama, un conte pour enfant sur l’écologie dans l’Amérique précolombienne. Beauté de ces images qui nous suffoquent et de la morale qui s’en dégage. Vous serez conquis. En soirée, les talents s’afficheront dans sept programmes de courts métrages en compétition internationale (sous l’étiquette Best of Shorts) et dans quatre autres consacrés à C’est du belge (ainsi La cerise sur le gâteau et autres contes à partir de 4 ans). Les longs métrages retenus feront défiler l’actualité des écrans européens et asiatiques, comme Ride Your Wave et The Wonderland (Japon). La compétition des films en réalité virtuelle (VR) témoignera, elle, des dernières avancées technologiques en matière immersive avec cinq CM s’étendant sur cinquante minutes, dont deux premières mondiales. Les événements De nombreux événements ponctueront le festival : l’incontournable Nuit animée le samedi 29 février, une soirée humour Women in Laugh avec les films les plus drôles réalisés par des femmes le mercredi 26, les dessinateurs du journal Spirou qui seront au rendez-vous, ou les petits papiers de l’équipe de Zorobabel qui présentera aux plus jeunes les techniques d’animation. Ateliers, expositions, concerts, VJ (vidéo-jockey) et DJ (disc-jockey), animations pour les enfants et une boutique spécialisée contribueront ainsi à faire d’Anima un lieu festif, convivial et chatoyant, riche en rencontres multiples. Au total, dix jours de festival et 250 films, dont 28 longs métrages, 135 CM et cinq jurys pour récompenser tous les talents du cinéma d’animation qui regroupe le dessin animé, la manipulation d’objets en 2 D, l’animation en volume et les images de synthèse. La cérémonie se clôturera par l’avant-première du film danois Monty and the Street Party qui nous raconte l’initiative du jeune Mogen pour réconcilier ses parents dans une grande fête de quartier. Si vous n’avez pas eu l’occasion d’assister au festival en tout ou en partie, vous pourrez voir la projection des films du palmarès à l’issue de la cérémonie, le dimanche 1er mars à 22 h au studio 5 de Flagey. Rétrospective aussi des films primés dans plusieurs villes du pays en mars. Bienvenue donc à ce feu d’artifice visuel qu’est Anima. Plus d’informations sur www.animafestival.be et réservations sur ticket@flagey.be. Flagey, place SainteCroix à 1050, et Palace, 85 boulevard Anspach à 1000 Bruxelles. Michel Lequeux


EXPOSITION À ESPACE ART GALLERY Il y aura de l’éclectisme à Espace Art Gallery tout au long du mois de ce mois de mars, avec six plasticiens qui se sont fixé rendez-vous afin de confronter leurs créations ! Place à Ventili Viale, Bénédicte Notteghem, Carl Jaunay, Radek Svoboda, Claudio Cermaria et Serge Tenèze pour des éclaboussures de couleurs, des compositions abstraites, du dessin expressionniste et des sculptures. L’originalité de la présente exposition tient dans la diversité des tempéraments et dans la manifestation d’un savoir-faire acquis au cours de longues années d’apprentissage et de pratique. Nadine Fretiere alias Ventili Viale se veut une artiste qui use d’une palette chatoyante pour donner vie à une série de scènes qui évoquent Paris, Montmartre et Pigalle. Avec elle, on embarque à bord d’un train qui file à toute allure et qui acquiert de la vitesse pour décoller loin du plancher. Rouges, bleus et jaunes se combinent dans une farandole effervescente à l’écart des stéréotypes et chargée d’un côté pop galvaniseur. Installée à Nevers, Bénédicte Notteghem peint depuis toujours et puise son inspiration tout au long de ses voyages à l’étranger. Fascinée par les estampes chinoises, elle a progressivement délaissé la figuration pour ne retenir que le tempo, l’équilibre et l’harmonie, allant vers une abstraction concentrée ou minimaliste qui joue à fond la carte de l’esthétique. Chaque peinture devient objet de méditation, fruit d’une gestation qui parfois peut durer de nombreuses semaines. Souvent, ses œuvres s’inspirent de textes courts, qui les enclavent ou les mûrissent. Selon ses dires, l’art de peindre s’apparente à une sorte de yoga, technique par laquelle on lâche totalement prise pour s’unir avec les forces de l’univers et trouver une quiétude apaisante. Avec des créations atypiques concrètes et durables, Carl Jaunay révèle des patines qui témoignent de l'empreinte du temps. L’oxydation devient dès lors un allié qui rend le métal moins lourd et qui dévoile sa part d’âme. Plutôt que d’acquérir des matières nobles (bronze, or ou argent), l’artiste recycle des objets et les métamorphose pour réaliser des pièces sur-mesure ou à la demande, toujours uniques et originales. Ses sculptures se veulent à la fois décoratives et fonctionnelles (bars, tables. meubles, etc.) ou purement design. Radek Svoboda vient de Tchéquie et modèle des personnages aux jambes interminables (sorte de pattes d’araignées) qui sont à la fois membres et support des œuvres. Des travaux en 3D que nous avons déjà pu admirer à Espace Art Gallery dans le cadre d’une exposition antérieure et qui a retenu l’attention des visiteurs. Claudio Cermaria travaillait la pierre avec un talent incomparable. L’usage de l’imparfait est ici de rigueur, puisque le pédagogue et créateur nous a quittés en 2016, après avoir participé à des événements internationaux, victime d’une longue maladie qui l’avait écarté du monde des cimaises. Aujourd’hui, sa mémoire se perpétue par le biais de collections publiques et privées et d’hommages qui lui sont rendus un peu partout en Europe, grâce à la détermination de son fils. Enfin, les travaux de Serge Tenèze jouent la carte de l’abstraction, opérant une métamorphose tant psychologique qu’esthétique. Pourquoi reproduire le réel alors que la photographie le permet avec une aisance remarquable ? L’occasion de déposer le pinceau et de se remettre complètement en question, sans renier une quinzaine d’années de pratique qui traduisent des états d’âme aussi bien qu’elles reflètent une époque. Aller de l’avant, abandonner le trait, progresser en songeant à dégraisser l’ensemble et en ne retenant que le mouvement, le rythme et la couleur : voilà le challenge ! Bien sûr, simplification ne signifie jamais facilité. Chaque approche nouvelle implique de ne pas se renier et de ressentir les sensations et les passages, sans omettre le rôle prépondérant de la lumière qui veloute, qui chatoie et qui fluctue. Vous avez jusqu’au 29 mars 2020 pour découvrir ce programme à Espace Art Gallery. Voyez tous les détails pratiques sur le site officiel www.espaceartgallery.eu Rue de Laeken, 83 à 1000 Bruxelles Daniel Bastié


THÉÂTRE : COUP DE GRÂCE Trois femmes se retrouvent au chevet d’un mourant : un homme qui a dévasté leur existence. Que dire ? Comment réagir ? Régler des comptes ? Pardonner ? Anna, enfant abusée, veut exorciser son immense douleur. Clémence, épouse battue, souhaite comprendre. Iris, amante sous influence, veut résister sans compassion. S’ensuit une terrible ronde des sentiments où se combinent affrontements, rires, larmes et volonté de rendre justice à toutes les femmes victimes de l’imbécilité, de la méchanceté et de la violence des mâles. Cette pièce se caractérise par un ton bouleversant et la force des dialogues. Aussi par le besoin de poursuivre une existence simplement parce qu’il faut vivre et guérir psychologiquement des blessures passées, afin de ne jamais donner raison aux tourmenteurs et leur montrer que les proies sont capables de se relever. Enfin, pour délier des nœuds infâmes faits d’asservissement, de duperies et de manipulations autant que pour échapper à la noirceur totale, l’auteur injecte çà et là des pointes d’humour. Décalage nécessaire pour éviter l’asphyxie et poser des minutes de respiration. Sans chercher à justifier quoi que ce soit, le texte nous entraîne au cœur de l’indicible, de l’immonde. Pour servir cette thématique ultra-contemporaine, Anne Claire, Laurence D’Amelio et Babetida Sadjo forment sur scène un trio qui a décidé de briser le silence et de porter le verbe haut. « Coup de grâce » parle de révolte, de vigilance, de mise à plat et se veut un plaidoyer vibrant pour que les femmes sortent de la résilience pour crier bien fort les abus auxquels elles sont parfois soumises. Un spectacle coup de poing à applaudir jusqu’au 11 avril 2020 au Théâtre le Public. Plus de détails sur le site www.theatrelepublic.be Rue Braemt 64-70, 1210 Bruxelles Sam Mas

THÉÂTRE : MONSIEUR OPTIMISTE Décalquant l’humour d’Alain Beremboom, Christine Delmotte restitue le « Monsieur optimiste » du roman (prix Rossel 2013) avec une loyauté sans faille. Servie par deux comédiens magnifiques qui incarnent Chaïm et Rebecca en orfèvre du jeu, elle nous relate l’existence incroyable de ces personnes qui se sont tues, épargnant à leur fils le récit d’une histoire indicible, espérant faire de lui un vrai petit belge. Alain Berenboom, l’auteur, revient ici à ses racines et parle de son père, un homme aux facettes contradictoires. Ce « mauvais juif » lecteur de la bible, nostalgique d’une Pologne idéalisée, rêveur de Terre Promise et de kibboutz. Ce réfugié qui aimait tant cette Belgique qui l’avait accueilli. Ce merveilleux et indéfectible optimiste ! De ce dernier, il a longtemps gardé le souvenir d’un pharmacien de quartier installé dans une vie sans problèmes. Et cependant, à la disparition de ses parents et en rangeant leurs tiroirs, il trouve un pan de leur vie qui lui avait été caché. Derrière l’homme respectable et tranquille, le fils voit surgir l’ombre d’un résistant face au nazisme, un aventurier zélé, un Don Quichotte original et audacieux. Et une mère aussi courageuse que discrètement fantasque ! On le sait, déplier l’album de famille ou ouvrir la boîte de Pandore lâche mille surprises. Une pièce à deux voix proposée au Théâtre le Public par Daphné D’Heur et Fabrice Rodriguez jusqu’au 18 avril 2020. Si cette adaptation vous intéresse, voyez tous les détails pratiques sur le site www.theatrelepublic.be Rue Braemt 64-70, 1210 Bruxelles


THÉÂTRE : TAKING CARE OF BABY Voilà une histoire formidablement charpentée et racontée par une troupe d’artistes inspirés. Elle est la retranscription d’un fait divers. Terrible. Sordide. Une mère est accusée d’un double infanticide et les spectateurs sont conviés à la reconstitution. Témoins, protagonistes et spécialistes défilent. Tout concorde à prouver sa culpabilité. Et pourtant, au gré des témoignages et des interviews, le doute s’insinue : cette femme est-elle coupable ? Et sa mère, politicienne qui « aime tant les pauvres » ? Et ce mari qui ne répond jamais aux questions ? Et celui qui a l’air si sympa et qui pratique la vérité relative ? Les spectateurs sont appelés à mener les six enquêtes en parallèle de six personnages en quête de justice. L’auteur britannique Dennis Kelly écrit avec le tranchant d’une lame et nous retourne les sens. Cette pièce-enquête, cinglante et virtuose, nous invite à réfléchir sur notre incapacité à décrypter une réalité qui ne peut être que subjective. Une distribution parfaite, des personnages magnifiquement incarnés et le mise en scène rôdée de Jasmina Douieb servent un propos qui interpelle, choque, déstabilise et rappelle que les apparences ne sont pas forcément celles d’une première impression ou d’un avis formulé dans l’emphase de l’émotion. Une pièce défendue sur les planches par Catherine Grosjean, Vincent Lecuyer, Anne-Marie Loop, Benjamin Mouchette, Eline Schumacher et Benoît Van Dorslaer jusqu’au 4 avril 2020 au Théâtre le Public. Plus de détails sur le site www.theatrelepublic.be Rue Braemt 64-70, 1210 Bruxelles

HORTA : RESTAURATION DU JARDIN D’HIVER Le Musée Art & Histoire de Bruxelles et Total Foundation ont signé fin 2019 un accord remarquable. Il permettra de restaurer et de réassembler les éléments démontés d'un jardin d'hiver créé par Victor Horta. Au cours de l'année 2022, cette construction en acier, vitraux et marbre sera exposée dans une nouvelle salle dédiée à l'Art Nouveau et à l'Art Déco belges. Le jardin d'hiver a été conçu en 1900 pour l'avocat bruxellois Jean Cousin. Lorsque sa maison a été démolie dans les années 1960, cette construction Art Nouveau adjacente risquait, elle aussi, d'être détruite. Grâce à l'initiative d’un élève de Horta, l'architecte Jean Delhaye, cette pièce a heureusement été démontée et entreposée. L'année dernière, il a été décidé qu’elle serait installée dans la grande salle du Musée Art & Histoire, où seront exposés les arts décoratifs du XXe siècle. Le jardin d’hiver en sera l’un des chefs-d’œuvre insignes. Il mesure quatre mètres sur neuf et sa hauteur est de six mètres. Sa réhabilitation coûtera un million d'euros. Ce nouveau subside s’ajoutera à celui déjà alloué par la Banque nationale, ainsi qu’à l’offre de deux particuliers à l’occasion d'une campagne de collecte de fonds organisée par le musée en juin dernier. Enfin, BRAFA, la foire des antiquaires de Bruxelles, a décidé de vendre aux enchères un morceau du Mur de Berlin pour financer cette restauration. Affaire à suivre !


THÉÂTRE : LE PROCÈS Coller aux pas du citoyen Josef K. revient fort vite à comprendre que son destin est le miroir de celui de tout individu qui s’insurge contre le pouvoir aliénant, qu’il soit symbolique (la loi, la famille, l’art, la religion) ou concret (administration opaque et compliquée, justice corrompue ou laxiste). À l’origine de ce roman inachevé : dix cahiers laissés dans une malle que l’exécuteur testamentaire de Franz Kafka a ordonné en vue d’une publication. Cette matière (ou puzzle incomplet) a été un champ exploratoire visant à analyser la société, ses rouages, ses abus, ses absurdités et ses limites. Un matin pas moins ordinaire que les autres, Josef K. (trente ans) est arrêté au réveil par deux gardes et soumis à un interrogatoire. Il ne sait ni de quoi on l’incrimine ni pour quelles raisons. Il demeure toutefois libre de reprendre son travail et de mener sa vie comme auparavant, même si on le confine dans un labyrinthe sans issue, désorienté et plongé dans la crainte. Comique, absurde et cauchemardesque, le monde du Procès est un monde noir d’apparences trompeuses et se répétant à l’infini. Un ouvrage qui est devenu le symbole du quidam en proie à un système qui a été qualifié par la suite de kafkaïen. Une adaptation à voir jusqu’au 25 mars 2020 au Théâtre des Martyrs. Voyez davantage de détails sur le site www.theatre-martyrs.be Place des Martyrs, 22 à 1000 Bruxelles

CONCERT : BOHEMIAN ECSTASY En marge du spectacle « Le procès » de Franz Kafka, c’est à la tradition musicale du pays de ce dernier (la Tchécoslovaquie) que s’attache le troisième concert de la saison 2019 -2020 organisé au Théâtre des martyrs. Comme dans beaucoup de régions d’Europe de l’Est, la musique tzigane a eu une influence importante, y compris sur les compositeurs de musique classique. Dvorák, Janácek, Liszt, Brahms et Ravel ont tous écrit de la musique tzigane incorporée d’une manière ou d’une autre dans leur langage savant. « Bohemian ecstasy » convie les amateurs à un concert festif et coloré, en rassemblant sur scène des musiciens manouches, tziganes, mais aussi classiques pour interpréter au violon, au piano, à la contrebasse ou à la guitare des airs qui ont traversé les âges et qui se sont métissés de sonorités éparses et d’influences folkloriques entre jazz, académisme et manouche. Roby Lakatos et ses musiciens enflammeront la grande salle du Théâtre des Martyrs le jeudi 26 mars 2020 pour une représentation unique. Amateurs de bonne musique, précipitez-vous ! Voyez les détails pratiques sur le site www.theatre-martyrs.be Place des Martyrs, 22 à1000 Bruxelles


THÉÂTRE : LA MOUSTACHE L'intérêt de cette pièce revient à placer les spectateurs dans une position de témoins pour assister aux joutes qui opposent des amis de longue date. Alors que rien ne semble affecter son quotidien, Sylvain, véritable quidam qui jamais ne parle trop haut ni trop bas, décide de se raser partiellement la moustache. Sans trop réfléchir, il se retrouve avec un système pileux qui évoque celui … d’Adolf Hitler ! Une série d’éléments se précisent dans les jours (voire les heures à venir) : une rencontre avec son futur beau-père, un entretien d’embauche, etc. Jean Benguigui, Pauline Lefevre, Patrick Mille, Fabrice Donnio et Sacha Judaszko constituent une équipe de choc pour donner vie aux répliques imaginées par Sacha Judasko et Fabrice Donnio. Le texte se veut un enchaînement de quiproquos, servi par une mauvaise fois ostensible, des a priori et un homme dépassé par ce qu’il a mis en place malgré lui. Le rire se trouve bien entendu au rendez-vous, même s’il est extrêmement grinçant. L’être humain ne ressort pas grandi de ce duel entre proches, prouvant (faut-il en douter ?) que les apparences sont souvent trompeuses et nuisent à celui qui les engendre. Une comédie cynique à découvrir du 10 au 14 mars 2020 à 20 heures 30 au Centre culturel d’Auderghem. Plus de détails sur le site www.ccauderghem.be Boulevard du Souverain, 183 à 1160 Bruxelles Paul Huet

CONCERT : UN SOIR AVEC MONTAND A seize ans, Pierre Cassignard découvre Yves Montand à l’Olympia. Le choc de sa vie ! A la question : « Qu’est-ce que tu veux faire après ton bac ? ». La réponse embraie du tac-au-tac : « Je veux faire Yves Montand qui chante ! » Pour ceux que cela intéresserait : une école où l’on apprendrait à être « Yves Montand qui chante » n’existe pas ! L’alternative : devenir comédien. L’École de la rue Blanche, le Conservatoire de Paris, plus de quarante pièces de théâtre, Le Molière du meilleur acteur : les étapes se succèdent avec succès, même s’il convient de ne pas oublier ses rêves de jeunesse. A l’heure de passer aux choses sérieuses, l’artiste décide de concrétiser un projet que certains qualifient d’assez fou. Rendre hommage à la star qu’il adule et partager son amour immodéré. Pour cela, il lui faut une scène, un petit espace dans une auréole de lumière où l’on peut faire croire à tout et avec trois fois rien. Egalement quelques accessoires : un chapeau claque, un parapluie, un piano, des mains qui sculptent l’espace, des jambes qui dansent, etc. Enfin, sélectionner des chansons fédératrices, connues ou qui le sont moins : « Sir Godfrey », « Battling Joe », « Clémentine » et une vingtaine d’autres. Des classiques du répertoire. Accompagné par le pianiste Éric Ballet, « Un soir avec Montand » ravive les souvenirs d’hier et d’avant-hier, agite la madeleine de Proust et propose une soirée qui ressemble à une machine à voyager dans le temps. Un concert à applaudir le jeudi 19 mars 2020 à 20 heures 30 au Centre culturel d’Auderghem. Plus de détails sur le site officiel de l’organisateur www.ccauderghem.be Boulevard du Souverain, 183 à 1160 Bruxelles Paul Huet


THÉÂTRE : LE BLASPHÈME Changement de ton à la Comédie Volter qui monte la dernière pièce en date de Philippe Madral, l’auteur de La Colère du Tigre. Le dramaturge français a écrit ce drame à la suite des attentats qui ont frappé Charlie Hebdo et Le Bataclan à Paris, en 2015. Il y dénonce l’intolérance et l’extrémisme religieux qui continuent de se répandre dans le monde. Et il le fait à partir de « l’Affaire La Barre » qui défraya la chronique en France en 1766. Ce chevalier français issu d’une condition modeste fut en effet accusé de ne pas s’être découvert devant la procession du Saint-Sacrement à Abbeville. On lui reprocha de ne pas s‘être mis à genoux devant le cortège religieux et de détenir chez lui des livres infâmes, parmi lesquels Le Dictionnaire philosophique de Voltaire, qui prit sa défense post mortem. Car ce jeune homme de 21 ans, n’ayant pas beaucoup d’appui familial, fut finalement décapité et brûlé en place publique, après avoir subi la torture pour avouer le mal qu’il avait fait. Ce mal s’appelait le blasphème. Ce fut la dernière fois qu’on condamna à mort un innocent accusé d’avoir outragé les signes de la religion. En France, la Révolution de 1789 abolira le délit de blasphème et consacrera, à sa place, la liberté d’expression. « Parler mal de Dieu » ne concernera plus que les fidèles d’une religion et les religieux, mais échappera aux lois qui jusque-là punissaient gravement les contrevenants au nom du roi. Cela fait longtemps qu’on n’est plus poursuivi en Europe pour avoir refusé de faire le signe de croix, ou de ne pas s’être agenouillé devant une effigie religieuse. Le monde musulman conserve, lui, la notion de blasphème comme faute, dont la gravité de la sanction varie selon les pays et les régimes, allant de quelques mois de prison à la peine capitale. Les blasphémateurs, du moins ceux qui sont considérés comme tels, sont souvent les intellectuels et les artistes exprimant une pensée libre. La figure emblématique reste Salman Rushdie, toujours en proie à la fatwa décrétée par l’imam Khomeiny, en Iran. Voltaire, le chantre de la pensée libre, fit de « l’Affaire La Barre » l’éclatante démonstration qu’il fallait mettre fin à l’obscurantisme religieux dans la société et promouvoir la tolérance de l’esprit, purgé des interdits religieux. Voltaire s’appelle aujourd’hui Charlie. C’est son message que la Comédie Volter porte sur les planches avec Michel de Warzée, metteur en scène et comédien, Stéphanie Moriau, Pascal Racan, Jules Churin, Pénélope Guimas et Manuel Chemla. A voir à la Comédie Volter, qui n’a pas volé son nom, du 4 au 28 mars prochains. Plus de renseignements sur www.comedievolter.be. Avenue des Frères Legrain, 98 à 1150 Bruxelles Michel Lequeux

PRIX LITTÉRAIRE DE LA FÉDÉRATION WALLONIEBRUXELLES Depuis 1975, le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles attribue chaque année son prix littéraire qui récompense le travail d’un auteur ou d’une autrice d’expression française, illustrant la sensibilité de la Fédération ou son patrimoine culturel. En 2020, le Prix d’une valeur de 5000 euros sera consacré à la catégorie suivante : roman ou recueil de contes et nouvelles. Les auteurs francophones, belges ou non,


fourniront la preuve qu’ils résident en Belgique depuis au moins cinq ans. Ils peuvent envoyer des ouvrages déjà édités ou des manuscrits. Les éditions ne peuvent remonter avant 2016 ni avoir été couronnées par un autre prix important. Une brève notice biographique accompagnera l’envoi en cinq exemplaires pour le 16 mars 2020 au plus tard, le cachet de la Poste faisant foi, au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, 6 rue de la Loi à 1000 Bruxelles. Un accusé de réception sera envoyé à chaque candidat. Le lauréat sera désigné par un jury composé des professionnels du monde littéraire et présidé par Valérie Delporte, députée du Parlement et présidente de la Commission de la Culture et des Médias. Proclamation des résultats dans le courant du mois d’octobre 2020. Pour tout renseignement complémentaire, le secrétariat du Prix se tient à la disposition des candidat(e)s par téléphone au 02/28 28 532 ou 02/28 28 546, ou encore par courriel à l’adresse suivante : prixlitteraire@pfwb.be Michel Lequeux THÉÂTRE : RIDICULES TÉNÉBRES « Ridicules Ténèbres » est l’histoire d’un voyage. Dans cette version moderne teintée d’absurde, l’Afghanistan, l’Afrique et les Balkans succèdent au Congo de Joseph Conrad et au Vietnam de Coppola. Dans leur bateau, l’adjudant-chef Pelletier et le caporal Dorche remontent le fleuve Hindou-Kouch avec, comme mission, de retrouver le capitaine Détanger pour l’éliminer. Ce faisant, ils s’enfoncent dans une zone de crise mondialisée et y retrouvent une faune atypique : des fous de guerre, des prêtres, des réfugiés, etc. Leur embarcation, radeau de la méduse occidental, est à l’image d’un continent à la dérive qui finit par tanguer pour se retrouver face à elle-même, face à son incapacité à accepter l’autre. À l’heure où l’Europe ferme ses frontières et brade ses valeurs humaines, « Ridicules Ténèbres » nous fait entendre la voix de ceux qui combattent le repli identitaire. Voilà une fresque épique, moderne, drôle et mise en scène par Olivier Boudon avec Benoît Verhaert, Pierre Sartenaer, Jean-Benoît Ugeux, Jessica Fanhan et Lucas Meister, dont l’intention est de nous inviter à réfléchir sur notre propre condition. Une pièce engagée à découvrir du 10 mars au 4 avril 2020 à 20 heures 30 au Théâtre de Poche. Voyez tous les détails pratiques sur le site www.poche.be Chemin du Gymnase, 1A à 1000 Bruxelles Sam Mas

PARANOID SYMPHONY NR 1 DE TSREND TRABENER Cet artiste mathématicien et peintre a résidé un certain temps en Belgique, où il a réalisé une dizaine d’œuvres. Atteint d’une grave maladie mentale, il est retourné aux Etats-Unis sans laisser d’adresse ni de nouvelles. La Galerie Pappilia située près de la place Flagey à Ixelles met son œuvre en vente. Paranoid Symphony nr 1 sera vendu au prix de 300 €, versés intégralement à l’association Comiclowns qui aide les enfants dans les hôpitaux. On reconnaît sur la toile peinte en acrylique la statue du poète grec Homère, un cortège de femmes voilées qui répondent à la cécité du poète et un couple mixte campé sous des traits expressionnistes à côté de « Now you love me ». La peinture se détache sur un mur de briques rouges. Plus de renseignements chez le galeriste J.M. Ernest Bertrand par téléphone au 0475 411 601 ou par email à l’adresse : jmb@expertbertrand.be Michel Lequeux


THÉÂTRE : ACCORDS PARFAITS Marie Lafargue a tout pour elle : séduisante, dynamique, titulaire d’un job bien rémunéré. A cela, elle vit dans un immeuble de standing, entourée de voisins issus de la classe moyenne. Incapable de gérer elle-même le ménage de son appartement, elle charge la concierge de s’en occuper une heure chaque jour. Pourtant, très vite, elle découvre que cette dernière délègue le travail à un jeune homme bien sous tous rapports. Après un premier choc, le dialogue s’engage, avec forcément une série de quiproquos. De surcroît, comme le garçon s’avère extrêmement séduisant, elle ne peut que se satisfaire de la situation, avec néanmoins un grand point d’interrogation qui pointe au milieu du front. Qui est-il vraiment ? S’agit-il vraiment de son métier ? Que cherche-t-il ? En délaissant fort vite les interrogations de la belle, Louis Michel Colla mise les ressorts de sa pièce sur les petits aléas du quotidien et la pertinence des dialogues. Lorsqu’on vit en copropriété, on se trouve forcément confronté à maintes situations qui existent peu ou prou ailleurs, avec la gestion des communs, la fonction d’une chambre d’amis, les relations avec le personnel d’entretien, l’usage de l’ascenseur, la chaîne hi-fi qui, parfois, hurle à faire péter le compteur électrique, etc. Il y a surtout les relations humaines qui s’opposent parfois au vivre ensemble et au confort. Catherine Decrolier, Christel Pedrinelli, Hyuna Noben et Marc Weiss s’embarquent joyeusement dans un vaudeville moderne qui pétarade, jongle avec les stéréotypes et entraîne le public dans presque deux heures d’un feu d’artifices où rien n’est laissé au hasard. Isabelle Paternotte soigne la mise en scène avec la maestria qu’on lui connaît et propose énormément de tendresse sous un emballage de comédie douce-amère. Entre rires et émotions, elle pose un climat qui permet à chacun de s’identifier. Si elle chatouille les zygomatiques, elle parvient surtout à parler au cœur, sans chausser de gros sabots et prouve qu’elle n’est pas seulement une amuseuse, mais une véritable artiste. « Accords parfaits » égrène la mélodie du bonheur entre femmes et hommes tout en entonnant un hymne à l’amour. A découvrir au Théâtre royal des Galeries du 11 mars au 5 avril 2020. Plus de détails sur le site www.trg.be Galerie du Roi, 32 à 1000 Bruxelles Daniel Bastié


THÉÂTRE : LES CAPRICES DE MARIANNE Pièce en deux actes écrite au début des années 1830 par Alfred de Musset, « Les caprices de Marianne » a été créé sur scène en juin 1851. Qualifiée de comédie par l’auteur, elle s’apparente davantage à un drame. L’occasion surtout de brosser le portrait d’une jeune femme moderne (pour son époque !), qui entend vivre pleinement ce que lui inspire l’amour. Mariée à un homme plus âgé, Marianne s’éprend du bel Octave, libertin et beau parleur. Alors que le premier acte montre l’héroïne bardée de pudeur et de retenue, l’auteur s’amuse lentement à la nimber de pulsions, d’autant plus fortes qu’elle s’ennuie en compagnie de celui qu’elle a épousé par convention davantage que par amour. Au lieu de profiter de cette opportunité, le jeune élu louvoie et préfère envoyer Coelio, son cousin, au rendez-vous que la jeune femme lui a fixé. Subodorant l’infidélité de son épouse, le juge Claudio dépêche des tueurs afin d’éliminer l’amant impudent. Ce dernier tombe dans le piège et meurt. Conscient d’être responsable de cette tragédie, Octave se morfond de douleur et renonce à sa vie de débauche. Victime de la censure, Alfred de Musset a été invité à retravailler son texte à de nombreuses reprises. Elle lui reprochait notamment une description immorale des mœurs. Sur le plan stylique, les puristes ont dénoncé un mépris des règles d’écriture en cours, avec des changements de décor répétés et un nonrespect de l’unité de temps. Malgré des griefs venus de toutes parts, la première s’est avéré un succès, renforçant l’aura de l’écrivain, et qui a déterminé la Comédie française à mettre en scène ses pièces. Alain Leempoel (épatant Philias Fogg dans « Le tour du monde en quatre-vingts jours ») passe ici à la mise en scène avec une adaptation épatante d’un des chefs-d’œuvre d’un des plus grands auteurs romantiques du XIXe siècle. Il réunit pour la circonstance une brillante distribution servie par AnneMarie Cappeliez, Fabian Finkels, Philippe Jeusette, Tristan Schotte, Stéphanie Van Vyve, etc. Plutôt que de localiser l’action dans une demeure bourgeoise très ancien style, il fait évoluer les personnages en Corse, à l’aube des années 1990, prétextant que les comportements humains évoluent peu ou prou au fil des âges, enclavés dans la tradition et écrasés par le regard des autres. Evidemment, la jalousie demeure universelle lorsque l’orgueil ou la passion est bafoué. Le dernier acte se règle dans la vendetta, avec le sang qui coule, les regrets qui s’expriment et une cruauté intransigeante et aveugle. Malgré un titre qui annonce de la légèreté, le public assiste à une romance tourmentée et tragique. Les relations amoureuses ne sont jamais victorieuses lorsque la fatalité s’en mêle et les émotions voltigent comme une girouette saisie dans une tempête de sentiments contradictoires. Alfred de Musset signe néanmoins un texte classique, rédigé avec énormément de subtilité et qui témoigne de sa connaissance de l’humanité. Il refuse un dénouement heureux et, par ce choix, montre la complexité des culpabilités, des responsabilités et bâtit une intrigue à la fois épurée et dense. Sous le soleil poudroyant d’une petite ville flamboyante (plutôt qu’une Naples imaginaire noyée dans les fastes du carnaval !), la présente version se veut Shakespearienne. « Les caprices de Marianne » est à découvrir dans cette nouvelle version au Théâtre royal du Parc du 5 mars au 4 avril 2020. Attention, cette adaptation est déconseillée aux enfants de moins de quatre ans. Violence oblige ! Plus de détails sur le site www.theatreduparc.be Rue de la Loi, 3 à 1000 Bruxelles Daniel Bastié


OTTO UND HELMUT La société moderne a-t-elle le visage d’un monde angélique, où le partage et la fraternité s’érigent en valeurs incontournables ? Performeurs berlinois, Otto und Helmut évoquent notre mode de vie avec un humour caustique, chargé de plusieurs degrés de lecture. Pour eux, il s’agit avant tout de dénoncer un rythme hystérique et individualiste qui gère les relations entre humains, qui pousse certains au n’importe quoi et qui génère des situations burlesques, voire grotesques. Loin de se prendre au sérieux, ils enfilent le costume de personnages absurdes dans une ambiance un peu loufdingue qui dézingue tout et tout le monde, miroir de nos préoccupations (vaines) et de nos ambitions. L’ensemble dans une atmosphère friendly gay sans méchanceté et avec une bonne humeur contagieuse. La présence scénique du duo est forcément communicative et leurs interventions drolatiques. On passe en leur compagnie une soirée où se succèdent de grands éclats de rire et jamais on ne regrette le prix du billet. JeanFrançois Breuer et Aurelio Margoto sont naturellement les auteurs de leurs sketches, tandis que Natalie Uffner et Julie Deroisin ont pris en charge la mise en scène dynamique. Avec « Otto und Helmut » on se situe face à deux OVNI sûrs d’eux et jamais à court d’inspiration. Une prestation à découvrir au Théâtre de la Toison d’Or jusqu’au 21 mars 2020. Plus de détails sur le site www.ttotheatre.com Galeries de la Toison d’Or, 396-398 à 1050 Bruxelles

ADN Quelles sont mes origines ? A une époque où on parle de plus en plus de procréation assistée et de don de sperme, Myriam Leroy signe un texte composé à partir d’interviews auprès d’enfants nés d’un don de sperme anonyme. Dans un monde de plus en plus aseptisé, où les relations humaines s’étiolent, elle revient sur la notion à l’autre, sur le couple et la place de l’enfant. Elle nous parle d’un monde où 50% des citoyens seraient nés suite à une opération médicale. Un secret qu’on tait, même s’il n’est jamais bon ignorer d’où on vient. Cette pièce tient à la fois de la fiction et du documentaire. On se plonge au cœur du présent, tout en se transposant dans un futur (sans doute extrêmement proche). Julie Duroisin, Emmanuel Dell’Erba, Julien Besure et Sandy Duret s’activent sous les praticables pour donner vie à des personnages tangibles qui nous ressemblent et deviennent le reflet de nos préoccupations. Plutôt que d’agiter le spectre du pathos, l’auteure a choisi le rire et la décontraction pour traiter un sujet complexe et fort, en proposant l’opportunité de rire de la gravité et d’ôter nos œillères. « ADN » bénéficie de la mise en scène de Nathalie Uffner, directrice du lieu et toujours présente pour dynamiter les tabous. Pour la petite histoire, Myriam Leroy a remporté le prix de la Critique 2007 pour sa première pièce. L’an dernier, on a pu découvrir « Cherche l’amour », toujours au TTO. « ADN » est à applaudir sans modération du 12 mars au 4 avril 2020 au Théâtre de la Toison d’Or. Plus de détails sur le site www.ttotheatre.com Galeries de la Toison d’Or, 396-398 à 1050 Bruxelles


THEÂTRE : HAMLET Il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark ! Même si Shakespeare fait fi de toute vérité historique, il nous conte une histoire exaltée de vengeance et de folie qui anéantit tout. Pour l’une des rares fois de son métier d’écrivain, il fait intervenir un élément fantastique en la personne du fantôme, qui vient annoncer à son fils qu’il n’est pas décédé de manière accidentelle, mais a été assassiné. Si le récit est archi-connu et a maintes fois été monté à la scène et adapté au cinéma, le plaisir d’assister à une représentation de ce drame indémodable reste intact. C’est dire la puissance d’un propos intemporel, qui parle de sujets qui pourraient être autant d’actualité de nos jours qu’ils l’étaient hier et avant-hier. Force est également de rappeler que l’on a récemment célébré les cinq cents ans de la disparition du dramaturge. Le premier acte débute avec la ronde effectuée par deux soldats sur les remparts de la forteresse d’Elseneur. Le fantôme muet du défunt roi leur apparaît. Peu après, il désigne à Hamlet le nom de son meurtrier. Par le fer et le poison, le duel ou la noyade, la mort rôde désormais partout. Hamlet pleure le disparu et fait mine de souffrir de démence, afin de mieux confondre le traître. Les conjurations se multiplient et la tension va crescendo. L’écriture de Shakespeare s’avère d’une grande richesse et les répliques sont magnifiques, dont l’archi-célèbre « Être ou ne pas être ! ». On n’a pas besoin de lire le fameux auteur pour connaître son nom, être capable de citer plusieurs titres de son œuvre ou savoir réciter un ou deux extraits de son répertoire. Les larmes se mêlent à l’action, le sens de l’honneur aux trahisons les plus insupportables, la passion à la violence. « Hamlet » est aussi un triste miroir de nos ambitions et de nos lâchetés, de nos abandons et des veines tentatives de nous racheter. Cette tragédie a fait couler beaucoup d’encre et maintes thèses ont été rédigées à son propos, apportant moult éclairages, disséquant le tempérament de chaque protagoniste pour tenter d’analyser chacune de ses pensées et chacun de ses gestes. Chose qui fait oublier que nous sommes au théâtre, lieu de toutes les libertés et de toutes les audaces, où la parole est reine et où personne ne craint une ellipse ou une redondance. Evidemment, après une pareille révélation, l’épée ne peut appeler qu’à faire couler le sang. Du coup, les personnages ruminent, édifient des plans et osent des complots pour, au final, se rendre à l’évidence que rien ne se déroule comme ils l’espéraient. Le dernier acte se transforme en véritable boucherie, où chacun meurt de façon plus ou moins atroce. Cette pièce parle également de la folie. Hamlet possède-t-il toute sa raison ? Après avoir vu le spectre, il se retrouve seul face aux décisions à prendre ? Qui sera prêt à le seconder ? Qui croira un mot de son histoire ? Au point de se demander s’il n’utilise pas le subterfuge de la déraison pour éliminer ceux qui le menacent et qui tentent d’occuper le trône laissé libre par son père. Le grand talent de Shakespeare est d’emmener avec lui les spectateurs et de les balader dans les univers qu’il dessine avec minutie, évitant toujours qu’ils se posent trop de questions ou s’ennuient. Le danger, en allant découvrir une pièce rédigée voilà un demi millénaire, ne porte pas sur la beauté du texte mais sur le choix du metteur en scène de faire apparaître les comédiens flanqués d’armures, d’arc, de hallebardes et de haches ou non. Quoi de plus offensant pour le regard qu’une version contemporaine avec costume trois pièces, survêtements de training, baskets ou chapeau melon. Heureusement, le Théâtre royal du Parc respecte une tradition qui veut que chaque abonné soit ravi et en ait pour son argent. Il s’agit peut-être aussi d’un des rares lieux de représentations qui ne soient pas tenté par la modernité à n’importe quel prix et qui n’ont pas peur d’investir pour que le spectacle soit total. A l’étranger, on a déjà entendu parler d’une version de « Hamlet » défendue par un seul comédien, qui interprétait tous les rôles ! Dans cette circonstance, comment nourrir la magie visuelle ? A une époque où les sketches d’humoristes plus ou moins drôles atteignent des centaines de milliers (voire des millions !) de vues sur Youtube, Shakespeare confirme que la noirceur paie toujours. « Hamlet » est à découvrir ou à revoir seul ou en famille le lundi 23 mars 2020 à 20 heures au Centre culturel d’Uccle. Plus de détails sur le site www.ccu.be Rue Rouge, 47 à 1180 Bruxelles Daniel Bastié


LAURA LAUNE - LE DIABLE EST UNE GENTILLE PETITE FILLE Laura Laune, cette jeune et jolie blonde au visage d’ange tellement innocent, fait des ravages depuis ses débuts et ose tout. Chacune de ses apparitions engendre le rire. Avec un humour noir décapant et incisif, sa folie démonstratrice et ses personnages bourrés de paradoxes ne laissent personne indifférent. Est-elle gentille ou méchante, consciente de ses propos où simplement démente ? D’une comptine pour enfants qui part en vrille à un cortège de protagonistes animés par un décalage surréaliste, elle n’hésite jamais à se donner à fond malgré un air de communiante ou de bru parfaite. Vrai, on lui donnerait le Bon Dieu sans confession, alors que … ! Originaire de Frameries, elle est montée à Paris, la guitare en bandoulière et les carnets chargés de sketches faits pour remuer. Derrière un ton volontiers persifleur, elle dénonce les dérives de notre monde et aborde des thèmes réputés difficiles : racisme, homosexualité, violence faite aux femmes, sexisme, maltraitance, monoparentalité, etc. Après avoir tenté sa chance en 2013 dans l’émission « Incroyable talent », elle remporte la victoire en 2017, devenant subitement un visage connu de tous. Au demeurant, elle n’épargne rien ni personne et va toujours au bout des choses. Les situations s’enchaînent à un rythme déferlant et piquent là où il faut. C’est politiquement incorrect du début à la fin, mais son ton réchauffe les esprits tout en déridant les zygomatiques. Alors que l’hiver plombe la ville, son spectacle est à découvrir au Centre culturel d’Uccle le mercredi 25 mars 2020 à 20 heures. Trouvez plus de détails sur le site www.ccu.be Rue Rouge, 47 à 1180 Bruxelles

CONCERT : M. POKORA - PYRAMIDE TOUR Habitué des gros shows, M. Pokora revient avec le Pyramide Tour, certainement le concert le plus ambitieux de sa carrière. Pour ce spectacle, l’artiste sera entouré de danseurs, de musiciens et d’un décor de scène et des jeux de lumières qui feront voyager le public hors du temps. Une fois encore, il a décidé d’offrir du rêve pour que l’événement soit un régal. Trois ans après avoir rendu hommage à Claude François, il défend son propre répertoire avec des textes dans lesquels il se dévoile. L’album cartonne au hit-parade et se singularise par un son moderne, une orchestration pop et une dynamique qui parle à ses fans. En choisissant de baptiser sa tournée Pyramide Tour, il a souhaité faire passer un message. Ici, tout sera gigantesque, avec une débauche de moyens, des trucs énormes, des jeux de lumière, des artifices, une scène ample, des effets pyrotechniques, des écrans qui relaieront en grand ce qui se déroule sur les planches, de la chorégraphie. Bref : du cinéma en live ! Naturellement, pour ceux qui le suivent depuis ses débuts, il émaillera sa performance de titres plus anciens et devenus des classiques. Il sera chez nous les 27 et 28 mars 2020. Deux dates à ne pas manquer à Forest national. Voyez tous les détails pratiques sur le site www.forest-national.be Avenue Victor Rousseau, 118 à 1190 Bruxelles André Metzinger


THEATRE : VENTRE Un jeune couple au bord de la rupture. Un tandem fou d’amour à la croisée des chemins qui nous plonge au cœur d’une réflexion sur l’infidélité, l’orgueil et l’érosion des sentiments. « Ventre » met à nu deux jeunes adultes entiers, idéalistes, avides d’une vie pleine et d’un amour qui en vaut la peine. Ils voudraient se dresser contre tout ce qui plie l’échine, ce qui est mou, convenu et satisfait. N’est-ce pas le propre de la jeunesse que d’être animée par une telle soif d’absolu et de remettre en cause l’ordre établi ? Il serait facile de dire que oui, sauf qu’il faut beaucoup de courage pour s’opposer au rouleau compresseur de la norme et des idées reçues. Ces deux âmes jeunes et ébranlées cherchent moins du sens qu’un sens du sacré. Steve Gagnon, comédien et également auteur canadien, propose ici le deuxième volet d’un triptyque sur l’art de devenir adulte. Il y traite avec la même impudeur de la volonté de relier l’intime et le collectif, de liens amoureux et de relation au monde. Une analyse qui permet d’aborder l’étiolement du désir aussi bien que la culture de masse, le deuil de l’autre et la suprématie des idéaux capitalistes. Les deux personnages, Lui et Elle, sont jetés au cœur d’un spectaculaire règlement de comptes qui trouve dans une banale histoire d’infidélité un prodigieux déclencheur. Dissection du sentiment amoureux dans ce qu’il peut avoir de plus grand, de plus beau, mais aussi de plus hideux, la pièce jongle avec les formules qui ricochent, percute avec des mots durs, renvoie le reflet du quotidien et finalement nous plonge dans la psyché de nos tourments sentimentaux, avec pour conclusion que, trop souvent, on tue ce que l’on aime ! Julie Sommervogel et Clément Goethals campent les protagonistes de ce duel au Rideau de Bruxelles du 10 au 21 mars 2020. Plus de détails sur le site www.rideaudebruxelles.be Rue Goffart, 7a à 1050 Bruxelles André Metzinger

DANSE : MAKING MEN Après le succès du spectacle en 2019, la troupe revient à l’Espace Magh présenter l’édition 2020 dans un langage chorégraphique toujours aussi rythmé et puissant, mais aussi subtil et sensible. « Making Men » aborde le thème de la masculinité à travers une série de tableaux chorégraphiques qui évoquent différentes étapes que traverse un groupe d’hommes lors de son développement identitaire. Est-on vraiment libre de devenir l’homme que l’on souhaite ou celui que nous sommes réellement au plus profond de notre intimité, de notre sensibilité ? Le stéréotype de la masculinité et le rôle de l’homme tels qu’ils sont imposés encore aujourd’hui, conduisent-ils au malaise et à la violence que l’on observe aujourd’hui ? Quatre danseurs africains explorent cette thématique et nous livrent une prestation rythmée et forte, mais aussi sensible et poétique. Confrontés au doute et au trouble intérieur, ils s’expriment tantôt avec pudeur et tantôt avec rage et détermination. Un spectacle à découvrir du 11 au 14 mars 2020 à l’Espace Magh. Plus de détails sur le site www.espacemagh.be Rue du poinçon, 17 à 1000 Bruxelles


BRUEGEL, A POETIC EXPERIENCE : AN INNOVATIVE WORLD AND MIND À l’occasion du 450e anniversaire de la mort de Pieter Bruegel l’Ancien, l’Atomium propose une exposition immersive et interactive, afin de présenter des facettes connues mais aussi insoupçonnées de son œuvre et de sa personnalité. Cette exposition, réalisée par Tempora, s’inscrit dans la série consacrée à la belgitude organisée par l’Atomium depuis sa réouverture en 2006. Symbole de Bruxelles et de la Belgique, l’édifice, qui attire deux millions de curieux et 600.000 visiteurs par an, a déjà organisé avec succès des expositions sur la Sabena et le peintre surréaliste né à Lessines René Magritte. L’exposition présente sur deux étages des installations qui plongent les visiteurs au cœur du monde de Bruegel, grâce à de grandes reproductions et à une scénographie dynamique. Au niveau inférieur, une installation pop-up célèbre cinq tableaux de la célèbre série Les six saisons dans un contexte tridimensionnel, qui invite le public à se balader dans les célèbres paysages peints, ponctués de panneaux explicatifs. On apprend ainsi que l’artiste a bousculé les habitudes au niveau de la composition et du rythme, notamment à l’aide d’une vue plongeante et de la division de ses tableaux en plans successifs, ce qui crée une fascinante profondeur de champs. L’installation montre aussi que Bruegel se distinguait par une prodigieuse attention aux détails et par un jeu d’images humoriste. À l’étage supérieur, l’exposition s’attarde à éclairer la personnalité de l’homme. Si peu de détails de sa biographie nous sont connus, ses travaux recèlent mille indices précieux. À commencer par sa renommée comme peintre de la vie paysanne, le plus souvent associée à son fameux tableau Le repas de noces. Chez ses contemporains, Bruegel était en outre réputé comme le second Jérôme Bosch. Mais cette exposition prend surtout soin de montrer comment il a su se démarquer de son modèle, par exemple en intégrant dans sa Chute des anges rebelles des animaux du Nouveau Monde. Une troisième caractéristique, souvent omise, est son humanisme reconnaissable dans les sujets de ses tableaux. L’exposition Bruegel, A Poetic Experience. An innovative world and mind est à découvrir jusqu’au 13 septembre 2020. Plus de détails sur le site www.atomium.be Place de l’Atomium, 1 à 1020 Bruxelles

EXPOSITION : TOUTANKHAMON A la gare de Liège-Guillemins, Europa Expo vous emmène en Égypte Antique sur les traces de l'archéologue Howard Carter et de sa quête fascinante du tombeau de Toutankhamon. En 1922, dans la Vallée des Rois, cet archéologue britannique et son mécène, Lord Carnarvon, pénètrent, pour la première fois depuis plus de 3.000 ans, dans le tombeau de Toutankhamon. La découverte la plus mythique de l'histoire de l'archéologie est née ! Un siècle plus tard, plongez à votre tour dans la plus célèbre salle funéraire du monde et admirez-la telle qu'elle a été exhumée. Objet par objet, les trois chambres funéraires ont été reconstituées avec un niveau de précision et de fiabilité historique jamais atteint. Pour préparer la visite de cette exposition, un dossier a été conçu spécialement pour les enseignants et leurs classes. Afin d'offrir un document de qualité, il a été réalisé avec l'aide de professeurs du primaire et du secondaire, sous la supervision de Dimitri Laboury et Simon Connor, commissaires scientifiques de l'exposition et égyptologues renommés. A ce dossier s'ajoute trois carnets étudiants, mêlant B.D., énigmes, questions et « Saviezvous que » pour rendre la visite aussi pédagogique que ludique. Pour aller plus loin, une visite guidée peut être organisée. En quelles circonstances le tombeau a-t-il été découvert ? Quelle était la vie au temps du Roi ? Qu'en est-il du mystère autour de sa mort ? Toutes ces questions - et bien d'autres - trouveront leurs réponses au cœur de décors époustouflants. Une plongée dans le monde d’un des pharaons les plus célèbres à vivre jusqu’au dimanche 31 mai 2020. Sam Mas


NEWB : UNE BANQUE COOPERATIVE La Banque centrale européenne (BCE) a décidé fin janvier d'octroyer l'agrément d'établissement de crédit à la coopérative NewB, a annoncé la Banque nationale de Belgique (BNB) dans un communiqué de presse. Il s'agit d'une consécration pour la coopérative qui voulait depuis plusieurs années se muer en banque éthique et durable et devrait lancer ses activités bancaires dans le courant de cet été. Le feu vert de la BCE fait suite à un avis positif de la BNB et met un terme à la procédure d'agrément entamée il y a plusieurs mois. Dans la foulée, la Banque nationale a donc inscrit NewB sur la liste des établissements de crédit agréés en Belgique. Autre conséquence : les sommes investies lors de la campagne de capitalisation menée par NewB vont être converties en parts coopératives. Les investisseurs et investisseuses deviendront donc officiellement coopérateurs et coopératrices de NewB, annonce dans un communiqué cette dernière, qui se réjouit de devenir la première banque belge créée de toutes pièces depuis plus de soixante ans. A titre de rappel : La coopérative avait lancé le 25 octobre 2019 une campagne de levée de fonds auprès du grand public avec pour objectif de récolter en un mois trente millions d'euros, Condition sine qua non pour l'obtention d'un agrément bancaire. Au terme d'une campagne aux débuts poussifs mais terminée sur les chapeaux de roue et prolongée jusqu'au 4 décembre 2019, la coopérative est finalement parvenue à récolter trente-cinq millions d'euros, ce qui lui ouvrait la voie pour devenir une banque. Il ne lui manquait plus donc que le feu vert des autorités de supervision financière. NewB devrait mettre ses premiers produits bancaires sur le marché cet été, lesquels, a promis la coopérative, seront éthiques, transparents et 100% tournés vers la transition énergétique, avec des crédits entièrement consacrés à la mobilité douce, à la performance énergétique des bâtiments et à la petite production d'énergie renouvelable. NewB compte également commercialiser des comptes d'épargne pour les particuliers et les professionnels, des crédits à tempérament ainsi que des crédits professionnels. Actuellement, la coopérative propose déjà certains produits d'assurances et une carte de paiement prépayée. Dans le business plan transmis aux autorités de supervision, NewB évoquait 108.000 comptes à vue d'ici fin 2024 et 35.000 comptes d'épargne. La coopérative affirme compter dans ses rangs, avant même le début de ses activités bancaires, plus de cent seize mille citoyens, soit 1% de la population belge, trois cent quarante organisations de la société civile et onze investisseurs institutionnels, parmi lesquels des organismes publics wallons et bruxellois. Victor Ntacorigira

TOONE : TYL UYLENSPIEGEL « A Damme, en Flandre, quand mai ouvrait leurs fleurs aux aubépines, naquit Uylenspiegel, fils de Claes. » L’écrivain belge Charles De Coster ouvre par cette prose poétique la légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Uylenspiegel et de Lamme Goedzak sous le joug espagnol. L’écrivain flamand d’expression française exalte la terre flamande et donne à Tyl un état civil pour l’intégrer dans un cadre historique : celui des troubles politiques et religieux des Pays-Bas au XVIe. Il s’agit de notre histoire dans laquelle va fleurir un thème cher à l’auteur : la Liberté ! D’où la dimension universelle de cette œuvre. Soutenu par la passion de la belle Nele, éternelle fiancée mais aussi passionaria, le jeune héros harcèle les troupes de Philippe II, à la tête d’une armée de gueux. Lorsque le charbonnier Claes, père de Tyl, meurt sur le bûcher du duc d’Albe, c’est pour rappeler la nécessité de se libérer de la férule et de la cruauté des envahisseurs. Par la magie d’un raccourci théâtral, Toone présente sa propre version du récit, sans en trahir l’âme. Bien entendu, on rit, on tremble et on pleure. Comme dans la vraie vie ! Une pièce à applaudir à s’en rougir les paumes jusqu’au samedi 4 avril 2020. Voyez plus de détails sur le site www.toone.be Rue du Marché Aux Herbes, 66 à 1000 Bruxelles


THÉÂTRE : CERISE SUR LE GHETTO Sam Touzani est de retour avec l’humour, la tendresse et l’irrévérence qu’on lui connaît. Dans ce spectacle, il propose une série de flashbacks sur son histoire familiale, tour à tour faite du sel des larmes et des épices du cœur. Il parcourt passionnément trois générations, des montagnes du Rif marocain jusqu’au bitume de Molenbeek où il est né dans un deux-pièces chauffé au charbon. L’histoire d’une vie aux accents de vérité grinçants racontée par un artiste qui nous invite à repenser le réel à partir son vécu. Plus tard, afin d’échapper au danger du communautarisme, c’est de lui-même qu’il s’exile. Le fils d’immigrés peut enfin commencer son dialogue intérieur, entre sa culture d’origine et sa culture d’adoption, relier les rives souterraines de ses multiples identités sans les réduire à une seule... Mais, tout cela suffit-il à le sortir du cercle infernal de la culpabilité ? Celle qui ronge tous ceux qui quittent leurs terres, leurs parents, leur langue pour partir loin, très loin, là où il n’y a plus de soleil ? La réponse sur les planches de l’Espace Magh du 3 au 6 mars 2020. Plus de détails sur le site www.espacemagh.be Rue du Poinçon, 17 à 1000 Bruxelles

100% FEMME : FEMALE TROUBLE Le festival du court-métrage indépendant s’adresse à un public large, ouvert à tous, à tous les âges et genres. La mixité fait partie intégrante de la philosophie du festival, tant au niveau des spectateurs qu’au sein de l’équipe. Pour la semaine de la femme, il adresse sa programmation « Female Trouble » aux femmes bien entendu, mais aussi à leurs alliés. Il propose, entre-autres, de ne pas placer les hommes à l’opposé des femmes mais à leurs côtés, en rassemblant d’un seul bloc des films réalisés par des femmes et par des hommes mais dont le propos est résolument féministe et engagé. Un dialogue s’ouvre alors des deux côtés, l’homme est inclus dans la discussion, dans un souci d’équité et de mixité, et dans l’espoir de tempérer la radicalité sexiste générale et de créer une communion plus qu’une division, qui nous paraît nécessaire aujourd’hui, dans notre société. En première partie, cet événement invite à découvrir le showcase de la slameuse Biche de Ville. Poétesse pop, cette artiste écrit tout haut ce que tout le monde pense tout bas. Elle chante les maux de ceux qui n’osent pas et se met à nu pour éveiller les consciences. Ses poèmes exposent sans filtre sa vision du monde à travers son cœur de femme et balancent ses révoltes avec le smile. La projection sera suivie d’une rencontre avec les différentes réalisatrices présentes, animée par Celia Pouzet, curatrice de l’événement. Une soirée à vivre le 7 mars 2020 aux Riches-Claires. Voyez toutes les informations concrètes sur le site www.lesrichesclaires.be Rue des Riches Claires, 24 à 1000 Bruxelles

PARCELLES Un groupe de jeunes idéalistes a décidé de monter un spectacle anti-capitaliste. Mais encore faut-il le vendre … Sous une forme décalée, cette pièce propose une réflexion autour de la nature de l’argent et de la valeur, dans un monde mû par la récupération marchande. « Parcelles » interroge les liens qui nous unissent aux autres à l’ère du capital, les contradictions qui nous tiraillent quand l’individu se doit d’être compétitif pour exister, quand on a envie de faire autrement mais qu’on se rappelle soudain que « c’est ainsi que va le monde… ! » Une création à découvrir du 18 mars au 3 avril 2020 aux Riches-Claires. Voyez toutes les informations concrètes sur le site www.lesrichesclaires.be Rue des Riches Claires, 24 à 1000 Bruxelles


CIRQUE : FESTIVAL UP ! Biennale internationale, le Festival UP ! est l’événement phare de l’Espace Catastrophe. Il permet aux nouvelles formes de cirque de s’exprimer au cœur de la capitale, grâce à une programmation exigeante et diversifiée, belge et internationale, proposant un surprenant panorama des expressions circassiennes actuelles. Pour cette seizième édition, divers lieux bruxellois s’ouvrent aux artistes : Le 140, Bronks, la Raffinerie, le Théâtre Marni, le Théâtre Varia, le Jacques Franck, La Balsamine, la Maison des Cultures & de la Cohésion sociale, Les halles, l’Espace Delvaux, la Vénerie, La Balsamine, Wolubilis et Archipel 19. Mais le Festival UP ! ne se limite pas aux plus belles scènes de la capitale, il se décline également sous chapiteaux dans quelques lieux insolites et peut-être même qu’il pourrait prendre place chez l’un de vos voisins, affichant sans complexe toute la diversité d’un art qui a encore tant de choses à nous offrir. Cela se déroule du 19 au 29 mars 2020. Découvrez le programme complet sur www.upfestival.be

RENCONTRE : LE CORPS COMME TERRITOIRE Caroline Godart est dramaturge, auteure, enseignante et co-directrice éditoriale de la revue Alternatives théâtrales. De 2005 à 2014, elle étudie et vit aux États-Unis où elle obtient un doctorat en littérature comparée (Rutgers University). Son premier ouvrage, The Dimensions of Difference: Space, Time and Bodies in Women’s Cinema and Continental Philosophy, paraît en 2015 chez Rowman and Littlefield. De retour en Belgique, elle devient chargée de cours à l’IHECS et se plonge dans les arts de la scène. Elle élargit son terrain d’expérimentation intellectuelle et esthétique en collaborant fréquemment avec des artistes en tant que dramaturge, ainsi qu'avec des institutions comme a.pass et la Maison du spectacle de la Bellone. Elle sera présente à La Balsamine le jeudi 12 mars 2020 à 19 heures pour une rencontre ouverte avec le public. Entrée libre. Plus de détails sur le site www.balsamine.be Avenue Félix Marchal, 1 à 1030 Bruxelles

LECTURE : MON CORPS EST CHAUD, LA NUIT EST FRAÎCHE « Mon Corps est chaud, la Nuit est fraîche » est une invitation à la sensualité. Une exploration qui donne voix aux multiples facettes du désir et du plaisir féminin à travers des textes inédits et des extraits de textes d’autrices belges, spécialement rassemblés pour l’occasion. Un kaléidoscope sensuel, aphrodisiaque, percutant et sans tabou qui se déguste avec plaisir. Les textes sont signésMyriam Leroy, Adeline Dieudonne, Stéphane Bissot, Isabelle Wery, Véronika Mabardi, Joelle Sambi, Milady Renoir et Elisa Brune. Un trio de choc les interprète en live. Voyez plutôt : Stéphane Bissot, Priscilla Addade et Isabelle Wery ! Cela se déroule du 19 au 21 mars 2020 au Théâtre Poème 2. Trouvez toutes les informations pratiques sur le site www.theatrepoeme.be Rue d’Ecosse, 30 à 1060 Bruxelles


THÉÂTRE : LE CHEF EST CHEF, MÊME EN CALEÇON Dominique Bela est journaliste camerounais. En Belgique, il est assimilé à un migrant. Dans les milieux culturels, on l’appelle artiste issu de la diversité. Parfois on le qualifie d’artiste migrant. Avec « Le chef est chef, même en caleçon », il questionne la liberté d’expression et relève, avec humour, le décalage existant entre l’Europe des Droits de l’Homme et celle du traitement infligé aux migrants. Le spectacle offre au spectateur le témoignage d’un homme debout, combattif et dépourvu d’apitoiement sur lui-même : citoyen de la “Réfugie” selon son titre de séjour, Dominique Bela nous invite à appréhender le monde qui nous entoure, aux frontières nationales, mais également aux frontières de nous-mêmes. Un face-à-face avec le public qui soulève bien des interrogations et qui, derrière le rire, pointe des problèmes extrêmement sérieux du XIXe siècle. « Le Chef est chef, même en caleçon » est enfin l’histoire d’un voyage et du comment j’ai fait pour faire du théâtre ? Un one-manshow à découvrir le 27 mars 2020 au théâtre Varia. Plus de détails sur www.varia.be Rue du Sceptre, 78 à 1050 Ixelles

CONCERT COMMENTÉ : L'ORIENT EN PEINTURE ET EN MUSIQUE AU XIXe SIÈCLE Ce concert s’inscrit dans le cycle "Echos : musiques & pensées", qui met en parallèle l’Histoire de la Musique et celle de la Pensée humaine. En situant la création musicale dans le contexte des idées qui l’ont accompagnée, il a pour ambition de mieux faire comprendre la musique pour mieux l’apprécier. Avant le 19ème siècle, l’Orient est lointain et caricaturé. La campagne d’Egypte de Bonaparte en 1798, l’insurrection grecque de 1821 et la prise d’Alger en 1830 vont le rapprocher. S’ensuivra un courant pictural teinté d’exotisme (Decamps, Ingres), Théodore Chassériau, Delacroix) tandis que le compositeur Félicien David, avec ses « Mélodies orientales », inaugure un modèle orientalisant qui inspire Gounod (Medjé) et Saint-Saëns (avant 1870). Vers le milieu du siècle, l’orientalisme se veut plus authentique ; les compositeurs, à la suite de Salvador-Daniel, étudient les modes arabes et les peintres, comme Eugène Fromentin ou Gustave Guillaumet, respectent les spécificités et les valeurs locales. Si l’orientalisme « arabisant » a enrichi l’art occidental d’une nouvelle gamme expressive, l’art d’Extrême Orient, lors des salons et expositions universelles, créera le choc esthétique et inspirera les peintres comme Van Gogh, Bonnard ou Moreau tandis que Debussy saura puiser les ingrédients d’un langage plus organique dans les sonorités et structures répétitives des gamelans javanais. Pour les férus d’Pour les férus d’art et tous ceux qui ne veulent pas mourir idiot. De la vulgarisation de bon niveau à découvrir en compagnie de la mezzo-soprano Clotilde van Dieren et du pianiste Mehdi Trabelsi le mardi 17 mars 2020 à 20 heures 30 à la vénerie. Plus de détails sur le site www.lavenerie.be Rue Gratès, 3 à 1170 Watermael-Boitsfort


RENCONTRE : BERNADETTE REGINSTER Bernadette Reginster est née au Congo. Elle y vivra ses quinze premières années. À Bruxelles, où elle réside, elle a obtenu son diplôme d’architecte d’intérieur à la Haute Ecole du CAD (Private College for Advertising and Design in Brussels) et est récemment, diplômée de l’Académie des Arts de Woluwe-Saint-Pierre en Sculpture. Artiste dans l’âme depuis toujours, c’est en Afrique, continent des grands contrastes et des espaces infinis tous témoins de la mémoire ancestrale, qu’elle sent s’éveiller en elle le besoin des lignes et des couleurs. Elle débute avec une certaine timidité par des dessins à l’encre pour se lancer ensuite dans des aquarelles typiquement figuratives. Les coulées de peinture à l’eau se mêlent alors comme émanant des méandres d’une rivière … À la fin des années ’90, elle découvre une vraie passion pour le non-figuratif et, très vite, pour l’abstraction pure. Son regard s’étonne, son moi intérieur se libère, son horizon s’éloigne à mesure que son être s’autorise les représentations les plus imprévisibles du réel pour le soumettre à une métamorphose. Dans des couleurs éclatantes, la masse est maîtrisée, l’équilibre certain, l’harmonie présente. Le 11 septembre 2001 demeure une date phare dans la vie de l’artiste. Depuis longtemps, elle désirait se rendre à New-York pour voir le World Trade Center, à Manhattan. Malheureusement, Ben Laden s’est interposé entre elle et son rêve…Et depuis lors, Bernadette Reginster ne cesse de le ressusciter dans des toiles, collages ou installations du nom de WTC... C’est étrange et beau, invitant le passé à renaître à travers des techniques tout à fait contemporaines, non pas comme une réalité tangible mais à l’état de silhouettes vaporeuses. Bernadette, qui se définit comme une artiste plurielle, peint et sculpte : l’émotion première est toujours l’élément de base. Le choix du sujet, la prise de vue, l’éclairage. . . sont autant de matières qui permettent la destruction systématique en vue d’une recomposition picturale... déclare-t-elle. Artiste plurielle, elle l’est également dans la délicatesse du trait. Cela se perçoit dans ses petites encres qui mettent en exergue son grand talent de graphiste dans l’extrême finesse du rendu résultant du noir, du blanc et du rouge, obtenant ainsi un juste balancement chromatique. Entre encres et peintures, collages et matières, sculpture et textile, Bernadette Reginster est une créatrice aux multiples facettes qui, au travers de ses œuvres, se cherche constamment au détour d’une émotion, souvent véhiculée par la nécessité de la vitesse, l’envie de ne rien laisser s‘échapper. De nombreux travaux se trouvent déjà dans des collections privées aux Etats-Unis, aux Pays-Bas, en Grande Bretagne, en France et en Belgique. C’est dans sa maison « La Reverdie », située dans un coin de campagne en ville, à deux pas de la Tour Japonaise, que se trouve son atelier et qu’elle vous attend. Parlez-en à vos amis touristes ou amateurs d’art, et rendez-lui visite, car c’est aussi une ancienne maison d’hôtes au charme assuré ! Avec ses nombreuses toiles évoquant New York, Bruxelles, terres et végétaux, eau et matières, ainsi que ses petites porcelaines et ‘pierres habitées’, Bernadette a beaucoup exposé en Belgique et à l’étranger. Allez vite découvrir son site internet www.bernadettereginster.be Silvana Minchella


EXPOSITION : ARTISTES NOVATEURS Espace Art Gallery, l’une des plus belles galeries de Bruxelles, est un lieu atypique de plus de 200 m² sur trois niveaux situé dans le centre historique de la ville. Nous avons le plaisir de vous présenter pour cette exposition collective, de ce mois de février, deux artistes français dont l’un se distingue de par sa technique particulière et l’autre de par son parcours atypique d’autodidacte. Jean-François Schembari est un méditerranéen qui a su relier dans ses œuvres les influences de la Renaissance, notamment les artistes italiens (Giovanni Bellini, Léonard de Vinci) qui établirent les lois de la perspective, et les primitifs flamands du nord (Jan van Eyck, Rubens) qui inventèrent la peinture à l’huile. L’artiste choisi d’exposer treize tableaux à Bruxelles « la capitale d’alchimie et du dessin » pour s’inscrire dans la lignée de ses maîtres. Schembari se démarque par sa touche personnelle fusionniste et innove dans la créativité et le choix de ses outils (peigne, cuillère, carte de banque, couteaux). Il peint ses tableaux sur des fonds blancs par-dessus lesquels il pose une peinture directe. Il continue à associer ses deux savoirs en développant sa connaissance picturale et son talent. Ses tableaux nous montrent, par des choix de techniques diverses, une réalité vécue mêlée d’une peinture libérée des formes et des conventions dans le monde contemporain. Il crée par la lumière et la matière, ainsi que par la relecture des sujets, des tableaux d’une facture personnelle qui lui confèrent son caractère singulier. Il apparaît que nous sommes face à un artiste au potentiel interrogatif et créatif. Il remet en question l’histoire de l’art d’une façon actuelle en venant y ajouter sa touche picturale et sensible. Franck Villa peint en autodidacte, en se créant lui-même sur base de son monde imaginaire. Ses peintres référents sont Dali et Chirico, dont il ne cherche pas à reproduire la moindre idée. Par les moyens de la peinture à l’huile et de l’acrylique, il se plait à tracer son chemin dans des espaces abstraits où la lecture peut être plurivoque. Ses choix formels indiquent ses convictions personnelles et il n’hésite pas à jouer et à tromper les regards sur ses œuvres. Ses choix plastiques sont libérés de toutes contraintes plastiques et chromatiques. En revanche, il prend le parti-pris du cercle et de la courbe. Franck Villa est un artiste sincère et authentique dans sa démarche. Sa peinture interpelle par son audace et sa liberté d’expression toute personnelle. Il donne à voir à des visions intériorisées du monde qui l’entoure. Il livre une personnalité et sensibilité hors du commun et enrichit notre champ de vision, ainsi que notre monde imaginaire. Leurs travaux sont à découvrir à l’Espace Art Gallery jusqu’au 29 mars 2020 du mercredi au samedi de 11h 30 à 18h 30 et sur rendez-vous le dimanche. Voyez tous les détails pratiques sur le site www.espaceartgallery.eu Rue de Laeken, 83 à 1000 Bruxelles. Jennifer Schreiner


EXPOSITION : BEAUTIFUL LACE & CARINE GILSON À travers cette exposition, la créatrice bruxelloise dévoile ce qui l’inspire : du jardin d’Eden aux kimonos japonisants, en passant par l’Art nouveau ou les œuvres de peintres célèbres. Elle raconte ses rencontres et ses collaborations avec des artisans de haut vol. Elle décrit le processus de création de ses pièces luxueuses et sophistiquées. En filigrane, les codes de sa maison se dessinent. Car, comme pour toutes les maisons de couture, un ADN unique définit chaque pièce qui sort de son imagination. Beautiful Lace & Carine Gilson propose une rencontre étonnante entre deux temps forts de la dentelle : durant deux siècles, la guipure bruxelloise a eu le gratin international à ses pieds. Depuis trente ans, Carine Gilson crée chez nous, dans notre belle capitale, de la lingerie de couture mêlant soie et dentelle. Un échantillonnage de son travail est à découvrir jusqu’au 19 avril 2020 au Musée de la Mode et de la Dentelle. Trouvez tous les détails pratiques et sur le site officiel de l’organisateur www.fashionandlacemuseum.brussels Rue de la violette, 12 à 1000 Bruxelles

EXPOSITION: SUPER-HEROES NEVER DIE / COMICS AND JEWISH MEMO-RIES De quelle manière naissent les super-héros ? À travers plus de deux cent œuvres originales, cette exposition raconte comment la bande dessinée américaine s’entremêle, depuis ses débuts et jusqu’à aujourd’hui, aux tumultes de l’Histoire. À la veille de la Seconde Guerre mondiale, une génération de dessinateurs juifs américains, soucieux de s’intégrer au point qu’ils ont dissimulé leurs patronymes aux consonances étrangères, ont donné naissance aux plus célèbres superhéros : Batman, Superman, Captain America et, parmi plusieurs autres, Spiderman. Près d’un siècle plus tard, les super-héros restent des figures centrales de notre culture contemporaine et passent avec brio le cap du grand écran. Si les causes qu’ils défendent ont changé, les questions d’identité et d’intégration, déjà abordées dans les années 1930, s’y lisent encore, parce qu’une société en crise a toujours besoin de personnages hors-normes auxquels s’identifier. Cette exposition a vu le jour grâce à un partenariat avec le Musée d’art et d’histoire du Judaïsme de Paris et le Joods Historisch Museum d’Amsterdam. Un évènement à découvrir jusqu’au 26 avril 2020 au Musée juif de Belgique. Plus de détails sur le site www.mjb-jmb.org Rue des Minimes, 21 à 1000 Bruxelles


UN KET DE BRUSSELLES : UN DIMANCHE AU BORD DE L’EAU Mon père adorait la pêche. Pas le brugnon, pas le fruit, tu sais, la pêche aux poissons. Enfin, quand ça mordait, que ses asticots remuaient bien et que ça frétillait dans sa bourriche. Du coup, je suis aussi devenu pêcheur (avec un accent circonflexe, newo, pas avec un é) et mon arrière-petit fils sera sans doute pêcheur aussi. Les calés appellent ça l’hérédité. Si tu crois pas celle-là, je te raconterai l’histoire du petit Jésus qui vivait dans un pommier. S’il avait joué à la mijole, c’est pas pour ça que j’aurais fait la même chose, j’aurais peut-être joué du schoeiftrompet (trombone à coulisse) juste pour le faire bisquer, ara ! Donc le samedi, j’allais avec ma mère en ville à la maison Sougné chercher des asticots, des vers de vase, de l’amorce spéciale carpes etc. On se tapait un aller-retour en tram pour juste ces petites bestioles, mais voilà, la pêche, c’était sacré. Selon mon père, les poissons, ces liepe Charels, ils ne mordaient qu’aux esches de chez Sougné. Tu parles de snobs, dis ! On avait le choix du terrain de pêche : les étangs d’Ixelles (trop pollués) ceux de Groenendael ou du Rouge-Cloître (trop petits), le lac de Vossem (juste bien et poissonneux) et le canal (vraiment le summum). Mon père maniait une « baguette » de 9m de long en bambou, qui pesait une tonne et demie, et qu’il fallait démonter en petits morceaux pour atteindre l’hameçon. Tu pensais travaux forcés ? Comme ça un tout petit peu, mais il aimait bien. Moi, il m’avait acheté une petite canne de 4 mètres, tout juste pour atteindre le bord des nénuphars, et je faisais prise sur prise, alors que le père guettait toujours sa première touche. Debout depuis 7 heures du matin, tu penses qu’à onze heures le ket en avait sa claque et qu’il pensait déjà à autre chose. C’est pourquoi je préférais aller au canal. D’abord, il y avait du passage : les péniches, les gros bateaux remplis de bois scandinave, et surtout, les remorqueurs que quand ils passaient, tu ressentais les battements de leur moteur sur la peau de ton ventre comme des coups sur un tambour. Sur la rive opposée se trouvait une usine de transformation des abats de boucherie. Des montagnes de barbaque en décomposition que je voyais comme ça bouger tellement il y avait d’asticots dedans. Tu penses, les poissons avaient trouvé le coin intéressant ! On appelait l’usine « de zuûte duud » (la mort douce), sans doute que manipuler de la viande pourrie nuit à la santé, comme le tabac aujourd’hui. Dans le coin, ça ne sentait quand même pas le 5 de Chanel, je te le précise à haute voix. Mais de notre côté, juste derrière la route qui longe le canal, il y avait des anciens bâtiments effondrés où je trouvais un tas de (saloperies, je le dis tout bas) et c’était amusant d’aller fouiller dans tout ce fatras. Plus amusant en tous cas, que de toujours décrocher des poissons de mon hameçon. On y trouvait de tout, même des boîtes de cirage non entamées, par carton entier. Un régal ! Ça va seul, ça va blink (cirage), comme on disait alors. Je retrouvais mon père toujours en train d’invectiver Sougné pour ses mauvais asticots qui n’attiraient pas le poisson, son amorce qui ne valait rien, les vers de vase qui ne tentaient pas le gardon. Mais voilà, difficile de trouver à Brusselles un parcours de pêche à la mouche, et la truite Fario était plutôt rare dans les eaux troubles du canal. Quand on revenait à la maison avec une friture de petits poissons, il fallait tout écailler, éviscérer, paner et puis cuire, mais papa était content de sa journée, il avait pris deux anguilles au ver (de notre jardin, pas de chez Sougné, il tenait à le préciser) et maman allait les préparer au vert (épinard et autres). Poelink in ‘t greun, un délice. Maintenant, les seules anguilles que tu trouves encore viennent de Turquie ou de Nouvelle Zélande, pour la fraicheur tu reviendras. C’est vrai que des fois, on arrivait au bord du canal et tous les poissons flottaient le ventre en l’air. Pollution, déjà dans les années 50. Alors on remontait dans la voiture et on allait à Vossem. Entre le pont Van Praet et Vilvorde, le canal était déjà impêchable, et je te parle pas de la section de l’avenue du Port, il y avait plus de mazout que d’eau. Il fallait aller jusqu’à Pont Brûlé pour trouver des endroits pour s’installer, donc juste en face de la Zuûte Duud.


On se trouvait à deux mètres au-dessus de la surface de l’eau, et quand soudain un fort courant vers la gauche ou la droite emmenait notre ligne, on savait qu’une grosse péniche arrivait, déplaçant un énorme volume d’eau. Après son passage, on pouvait lever les pieds pour éviter la vague qui suivait. (J’exagère, mais presque pas.) Au 14e siècle à Brusselles, on pêchait le chevenne dans la Senne, aujourd’hui, tu peux y pêcher comme les Esquimaux : tu enlèves une plaque d’égout place de Brouckère (pas de danger, c’est piétonnier) et tu trempes ta ligne à l’aveugle. Quand ça tire fort c’est qu’il y a une Santiag au bout. Smoekelek ! (Bon appétit) Georges Roland Retrouvez les romans bruxellois de Georges Roland sur www.georges-roland.com Mes trois titres les plus demandés : « Le brol aux Marolles », « cartache ! du ramdam chez les rames » et « Manneken Pis ne rigole plus » sont maintenant disponibles en format poche ! Les chroniques du ket (numéro 1) sont disponibles en format ultra-poche sur le site de l’auteur. Je présente mon nouveau livre « Le libérateur de Bruxelles » (éditions Mémogrames) à la Foire du Livre de Bruxelles le 5 mars prochain à 14.00h. C’est l’histoire du peï que tu caresses son genou à la Grand Place.

LES RENCONTRES LITTÉRAIRES DE BRUXELLES : LE RETOUR ! De la bonne humeur, même du bonheur, une attention soutenue, des échanges aussi sincères que spontanés, beaucoup de sensibilité et d’émotion à l’évocation de souvenirs et autres anecdotes, c’est ce qui caractérise principalement les Rencontres Littéraires de Bruxelles qui se déroulent à l’Espace Art Gallery, à un bon jet de pierres de la célèbre place de Brouckère, celles-ci nous revenant plus légères dans la clarté du jour et non plus à l’aube du crépuscule après une brève interruption. Le 15 mars 2020, un dimanche, une nouvelle formule de rencontres sera inaugurée toujours dans cette lumineuse galerie d’Arts qui se prête également aux Lettres, les rencontres se déroulant entourées d’œuvres de peintres et autres artistes mis en valeur durant quelques semaines. A raison d’une tous les deux mois, excepté en juillet pour raison de vacances scolaires, ces rencontres vitrine de nos Lettres se vivront désormais le troisième dimanche du mois de 15h30 à 17h30 environ, mettant chaque fois à l’honneur deux écrivains, leurs parcours respectifs et un de leurs ouvrages qu’ils présenteront au public. Plus de thématique particulière, l’entrée libre et bienvenue à tous, jeunes et moins jeunes, intéressés ou simplement curieux de rencontres avec le meilleur de notre littérature. Un accueil garanti convivial dès 15h30 précédera la rencontre en elle-même qui, animée, ne dépassera point la durée d’une heure; suivront quelques annonces, la séance de signatures et un drink ouvert à tous. Contacts et synergie. Ces rencontres ne seront donc pas que littéraires. L’équipe sur le pont également à l’origine de cette heureuse et courageuse initiative ? Nous avons tout d’abord Robert Paul, son initiateur également fondateur du prestigieux réseau social Arts et Lettres, ensuite Jerry Delfosse, coordinateur et directeur de la galerie, ensuite Anita De Meyer, photographe professionnelle en charge de la médiatisation de l’événement enfin, comme chroniqueur, je prendrai en charge la gestion de ces rencontres. Ces personnes, chacune avec ses spécificités, se sont unies et continueront à s’unir pour vous concocter des après-midis dominicales aussi inspirées qu’inspirantes. Des écrivains au parcours exaltant vous attendent… Un peu de temps devant vous le 15 mars prochain ? Les invitées de ce jour seront Jacqueline Gilbert et Martine Rouhart, deux talents bien de chez nous. A vos agendas pour bloquer la date… et pourquoi pas déjà également le 17 mai ? Rue de Laeken, 83 à 1000 Bruxelles Thierry-Marie Delaunois


EXPOSITION : KEITH HARING BOZAR présente une grande rétrospective de l’artiste américain légendaire, Keith Haring. Ami et compagnon d’art à la fois d’Andy Warhol et de Jean-Michel Basquiat, Keith Haring a manifesté une présence unique dans le New York des années 1980, jouant un rôle clé dans la contre-culture et créant un style immédiatement reconnaissable. Surtout célèbre pour ses motifs iconiques (chiens aboyeurs, bébés rampants et soucoupes volantes), Haring cherchait à faire œuvre d’art public qu’il diffusait à travers son Pop Shop, les médias ou, encore, dans les métros et les espaces urbains collectifs. Puisant ses influences dans l’expressionnisme abstrait, le pop art, la calligraphie japonaise ou les travaux des grapheurs new-yorkais, son style singulier, en apparence spontané, était tout autant traversé par les énergies de son époque, du voyage dans l’espace au hip-hop et aux jeux vidéo. Une œuvre puissante, qui n’a rien perdu de son actualité à redécouvrir jusqu’au 19 avril 2020. Voyez tous les détails pratiques sur le site www.bozar.be Rue Ravenstein, 23 à 1000 Bruxelles

EXPOSITION : CLAUDE MONET – L’EXPÉRIENCE IMMERSIVE Comme pour l’exposition consacrée il y a peu à Vincent Van Gogh et qui s’est tenue à la Bourse de Bruxelles, Claude Monet – L’expérience immersive utilise les nouvelles technologies du digital pour animer les toiles de Claude Monet et vous intégrer à son univers. Ainsi des projections de plus de trois cents œuvres de l’artiste défilent à 360° et vous garantissent une aventure unique. Vous commencerez la visite par une introduction à Claude Monet, avec une explication de sa technique et de ses influences, ainsi qu’un survol de son existence. Ensuite, vous serez embarqués dans la salle immersive où défilent de manière animée, créative et surprenante les toiles de l’artiste. Un éveil des sens grâce aux coups de pinceaux virtuels et à la musique originale du compositeur belge Michelino Bisceglia. Vous assisterez à un spectacle son et lumière époustouflant ! Petit bonus avec l’Atelier Giverny, qui n’est autre que l’atelier de Monet. Vous y quitterez l’art digital pour contempler de nombreuses reproductions de toiles de l’artiste. En fin de parcours, retour à l’art digital avec une expérience VR (réalité virtuelle). Ce sera l’occasion de vous glisser dans la peau de Monet, grâce à des lunettes spéciales. Cette rencontre unique de dix minutes vous emmènera dans son atelier à Giverny mais aussi à Londres, aux Pays-Bas et en Norvège. Claude Monet – L’expérience immersive s’adresse à tout public, aussi bien aux enfants qu’aux adultes. Il s’agit d’un moment exceptionnel pour une découverte à deux, une activité de groupe, une sortie familiale ou une visite solo. Une surprise attend les âmes artistiques. Au demeurant, un événement sensitif à découvrir sans tergiverser jusqu’au 19 avril 2020. Ne manquez pas cette odyssée exceptionnelle et voyez toutes les informations pratiques sur le site www.expo-monet.be Rue du marché-aux-herbes, 116 à 1000 Bruxelles


EXPOSITION : BACK TO BRUEGEL La mythique Porte de Hal, vestige de l'enceinte médiévale de Bruxelles, s'ouvre sur l'univers du peintre Bruegel et invite à un plongeon surprenant dans une version en réalité virtuelle de ses peintures mondialement connues. Quatre œuvres prennent vie et vous entraînent dans la vie quotidienne d’il y a 450 ans. Voyagez au cœur du XVIe siècle face à d’authentiques trésors du Nouveau Monde, des armes et des armures, des instruments de musique et d’autres joyaux extraits des Musées royaux d’Art et d’Histoire. Complétez votre découverte par le toucher, l’odorat ou la manipulation. Au sommet du bâtiment, profitez également du magnifique panorama sur la capitale et laissez-vous transporter dans le passé grâce aux longuesvues virtuelles. Pour agrémenter le parcours, un audioguide gratuit est disponible en six langues : français, néerlandais, anglais, allemand, espagnol et russe. Enfin, après la visite, les enfants peuvent profiter de la plaine de jeux située à cent mètres de là. Un événement à découvrir en famille jusqu’au 18 octobre 2020. Plus de détails sur le site www.kmkg-mrah.be Boulevard du Midi, 150 à 1060 Bruxelles

EXPOSITION : PAUL DELVAUX, L’HOMME QUI AIMAIT LES TRAINS Paul Delvaux (1897-1994) a développé une œuvre magistrale qui s’inspire du monde ferroviaire. A l’occasion des 25 ans de son décès, Train World vous propose de plonger dans son univers à la fois poétique et mystérieux. Magnifiquement intégrés dans la scénographie de Train World, les tableaux du maître surréaliste entrent en écho avec l'atmosphère singulière du musée. Le temps d’une exposition, nous vous invitons à vivre cette résonnance magique et à découvrir l’œuvre de ce passionné de trains et de gares. Le parcours présente l’évolution du peintre : il débute par les premiers dessins des années 1920, se poursuit avec les aquarelles des années 1930 et continue par la découverte des pièces monumentales des années 1950-1970. Au travers d'objets personnels de l’artiste, on découvre sa passion pour l'univers ferroviaire. Une exposition magistrale et unique Une cinquantaine d'œuvres sont exposées. Les pièces présentées proviennent du Musée Paul Delvaux (SaintIdesbald) et de collections privées. Elles n’en sortent que très rarement ! On peut ainsi admirer une vingtaine de grands tableaux dont La gare forestière (1960) - une de ses œuvres phares - ainsi des toiles mettant en scène des femmes dans un paysage ferroviaire: L’âge de fer (1951), Le voyage légendaire (1974) ou encore Le Tunnel (1978). A côté des toiles, aquarelles et dessins, vous pouvez également découvrir des maquettes de trains faites sur mesure à la demande de l’artiste et visionner un film inédit. Si la fascination du peintre pour le rail reste un mystère, cette exposition vous promet un voyage empreint de rêverie et d’une certaine nostalgie … Un événement à découvrir jusqu’au 15 mars 2020 au Musée du Train. Plus d’informations sur www.trainworld.be Gare de Schaerbeek Place Princesse Elisabeth, 5 à 1030 Bruxelles


EXPOSITION : ZONES

Pour sa 26e exposition, Home Frit' Home accueille une bourlingueuse : Irène de Groot, artiste plasticienne pluridisciplinaire. Avec "ZONES", cette artiste nous immerge dans sa pratique singulière du photomontage. Car cette diplômée de l'Académie Royale des Beaux-Arts de Bruxelles (peinture et dessin, avec grande distinction) y détourne numériquement d'authentiques peintures des années 50-60, souvent qualifiées de "croûtes" et vouées à la déliquescence, en leur greffant, après les avoir sauvées de l'oubli et sublimées, les détails de quelques-unes de ses photographies récentes, capturées au gré de ses errances aux alentours de Bruxelles et au-delà en Belgique. Irène de Groot ? Long, long, le chemin... autant que ses cheveux le sont ! Une aventure. La découverte, sans cesse. La créatrice semble animée par le mouvement perpétuel. Après avoir "vécu" le monde sur plusieurs continents, elle poursuit son marathon artistique en région bruxelloise. Aujourd'hui, Irène de Groot y approfondit sa maîtrise de l'art de fixer un lieu et un instant. A travers la photographie et le travail sur l'image, empruntant tantôt aux techniques ancestrales, tantôt aux derniers développements numériques, elle privilégie donc une immobilité toute relative, puisqu'elle nous livre des visuels où la poésie exprime avec vivacité ses préoccupations. Une exposition à découvrir jusqu’au 2 mai 2020 à la galerie Home Frit’Home. Vous trouverez tous les détails pratiques sur le site www.homefrithome.be Rue des Alliés, 242 à 1190 Bruxelles

EXPOSITION : EMMANUEL LEPAGE Loin de l’image de l’auteur isolé dans son atelier, Emmanuel Lepage, né le 29 septembre 1966 à SaintBrieuc en Bretagne, incarne l’artiste avide de voyages, de rencontres, de découvertes et de partages. Il emmène ses lecteurs en Amérique du Sud via « Terre sans mal » et « Muchacho », puis se met au reportage graphique après avoir découvert l’Antarctique. De là naissent, entre autres, « Voyages aux îles de la Désolation », « Un Printemps à Tchernobyl » et « La lune est blanche ». Son goût pour l’évasion et sa curiosité pour le monde et les gens donnent forme à une œuvre colorée d’une grande finesse et chargée de sensibilité, synonyme d’exaltation, d’intensité et d’humanité. Sa palette somptueuse et ses récits nous emmènent dans un univers fascinant, qui invite à voir le monde autrement. Champion de la bédé moderne qui ne renie jamais son héritage né au fil de lectures diverses et dans la passion, il propose le plus souvent des livres engagés, qui parlent de notre siècle et qui invitent à la réflexion. L’exposition qui lui est consacrée au centre belge de la Bande dessinée s’achève le 8 mars 2020. Plus de détails sur le site www.cbbd.be Rue des sables, 20 à 1000 Bruxelles


EXPOSITION : THE WORLD OF BRUEGEL IN BLACK AND WHITE

Il y a près de 450 ans, au XVIe siècle, la Flandre était le centre de la production et du commerce des estampes. Bruegel et son éditeur, Hiëronymus Cock, y jouaient un rôle clé. Leur savoirfaire exceptionnel et leur esprit d'entreprise sont au cœur de l’événement qui se tient actuellement à Bruxelles. Avant de lancer une première édition sur le marché et de pouvoir la diffuser de par le monde, l'estampe avait déjà parcouru un long chemin. Apprenez, grâce à cette exposition, le déroulement du processus du dessin à l'estampe. Bien sûr, tout le monde connaît Bruegel en tant que peintre de renommée internationale, mais peu savent que, de son temps, il était surtout connu grâce à ses estampes. La Bibliothèque royale de Belgique conserve une collection complète et sans équivalent connu. L'exposition « Le monde de Bruegel en noir et blanc » vous entraîne dans l’univers imaginaire de ce maître flamand et est à découvrir jusqu’au 16 février 2020. Un magnifique catalogue a été publié pour l’occasion, apportant un regard innovant sur le travail graphique de cet immense génie. De récentes études ont permis d’apporter à chaque estampe un éclairage moderne, avec moult anecdotes. En parcourant les salles, les visiteurs se familiarisent avec des eaux fortes, des gravures, des épisodes bibliques, des scènes paysannes et des images humoristiques. Si cette manifestation culturelle vous intéresse, vous trouverez tous les détails pratiques sur le site www.kbr.be Boulevard de l'Empereur, 4 à 1000 Bruxelles Paul Huet

EXPOSITION : CROSSROADS On le sait, la fin de l’Empire Romain a plongé l’Europe dans une période de déclin. C'est du moins la version classique que l'on entend lorsque l'on parle du Haut Moyen Âge, cette époque située entre 300 et 1000 après J.C., également surnommée « Âge sombre ». Peuples en migration, nouvelles structures politiques, changements climatiques, conflits religieux, ... Cette période a néanmoins plus de points communs avec notre monde moderne qu’il n’y paraît. Un temps d’échanges et de contacts grâce aux voyages, au commerce, à la diplomatie et aux guerres. L'exposition « Crossroads » vous invite à reconsidérer vos certitudes et à voyager à plus de mille ans du XXIe siècle pour aller à la rencontre des Avars, des Francs, des Mérovingiens, des Byzantins, des Égyptiens et des Vikings par le truchement d’objets qui illustrent à merveille un savoir-faire et des techniques artisanales qui, toutes, témoignent d’un haut degré de civilisation. Bijoux mérovingiens, manuscrits en parchemin écrits en runes, monnaies en or des empereurs byzantins, textiles coptes aux motifs et aux couleurs étonnantes se tutoient pour proposer un fascinant dialogue qui rappelle à quel point tout changement peut devenir vecteur de nouveauté et de transformation. Loin des livres scolaires poussiéreux qui se complaisaient à parler de barbarie, la fin de l’héritage antique n’a jamais été synonyme de chaos ni d’apocalypse. Au contraire, la population a dû s’adapter à une dynamique qui a encouragé les influences réciproques entre nations pour voir naître de nouvelles identités culturelles. Le Musée du Cinquantenaire propose de réveiller l’archéologue qui sommeille en chaque visiteur jusqu’au 29 mars 2020. Plus de détails sur www.artandhistory.museum Parc du Cinquantenaire à 1000 Bruxelles


UNE SEMAINE DE SKI AU VAL D’UCCLE Au milieu d’un parc de 3,5 hectares situé en Suisse dans le Val d’Anniviers, entre Ayer et Mission, le Val d’Uccle vous accueille dans son chalet et son pavillon pour des vacances familiales, au pied des grands glaciers. C’est à 20 km de Sierre, dans le Valais. 7 heures du matin. Je me réveille dans une des 44 chambres du grand chalet. Après un brin de toilette, j’enfile mon tee-shirt à longues manches, passe mon pantalon de ski et descends au restaurant du sous-sol pour prendre un café-crème et un grand bol de céréales noyées dans du yoghourt. Le soleil commence à poindre au-dessus des pics enneigés qui dominent l’horizon. Un sommet s’illumine d’un coup. Il va faire beau aujourd’hui. Ce sera une chouette journée de glisse le long des pentes de Zinal, de Grimentz ou de St-Luc, les trois stations étant desservies par le car L’Oiseau Bleu qui vient nous prendre chaque matin à 9 heures. Je jette un coup d’œil à ma montre : 8 heures. Le temps de préparer mon pique-nique (il faut prévoir une boîte à tartines, les sacs plastiques étant déconseillés), de remonter à ma chambre pour y prendre ma veste, mes lunettes de soleil et la crème solaire, me voici prêt pour aller chausser mes bottines de ski au local du rez-de-chaussée. C’est l’opération la plus délicate avant le départ. Dernier coup d’œil à ma montre, tandis que les autres skieurs s’activent autour de moi : 8 h 45. Nous sortons à la file indienne pour monter avec nos skis sur les épaules vers le car qui nous attend sur la route, en haut du chalet. Je m’assieds enfin : le plus dur a été fait pour cette journée merveilleuse qui s’annonce sous un ciel impeccablement bleu. Le reste, ce sera le plaisir de la glisse en compagnie du moniteur qui, selon notre niveau, s’occupera de nous le matin ou l’après-midi, à tour de rôle au cours de la semaine. Il nous apprendra à mieux virer, à piquer nos bâtons dans la neige, à nous déhancher et à nous redresser dans les traversées. De mieux en mieux, de jour en jour. Mathis, le jeune moniteur suisse, est sympa et il nous accompagne avec beaucoup de cœur et d’entrain dans les jambes. Bravo, les bronzés du ski. C’est cela qui vous attend si vous venez au Val d’Uccle pour apprendre à skier ou pour le faire en toute liberté si vous êtes un mordu des pistes. Le domaine skiable de 120 km a été relié de Zinal à Grimentz par un nouveau téléphérique qui permet la traversée de la vallée. Avec le forfait Anniviers, on peut encore skier à Chandolin, St-Luc ou Vercorin, soit un total de 200 km de pistes balisées qui descendent depuis les sommets de 3000 mètres, d’où on peut apercevoir le Weisshorn et le Cervin. L’enneigement est garanti de novembre à fin avril avec des canons de neige de la dernière génération. Venez donc skier sur les traces des Anniviards, venez marcher dans les pas des chamois ou partager fondues et raclettes en découvrant la fabrication du pain de seigle ou du fromage des alpages. Venez tout simplement admirer l’authenticité des villages historiques d’Ayer, Grimentz, Vissoie, Saint-Luc. Peut-être même visiterez-vous la dernière mine de cuivre de Zinal. Randonnées pédestres en raquettes également prévues au programme. Le Val d’Uccle Depuis près de cinquante ans, le Val d’Uccle accueille les classes de neige, les classes vertes des enfants de la commune d’Uccle et des autres communes de Bruxelles.


Pendant les congés scolaires, il accueille aussi les familles, les parents et grandsparents des élèves, ainsi que les associations de jeunesse, les clubs sportifs et le parascolaire d’Uccle désirant s’initier aux plaisirs de la montagne. Le complexe du chalet et de son pavillon peut héberger jusqu’à 180 personnes, élèves, accompagnateurs et parents, dans des conditions optimales. Les chambres sont tapissées de bois, dans le style chalet, avec deux ou quatre lits superposés et un lavabo. WC et sanitaires à chaque étage. Le restaurant entièrement rénové offre deux cents places. Pour le midi, un pique-nique est fourni pour les repas aux abords des pistes. Le soir, la cuisine est assurée par un cuisinier chevronné qui vous préparera des repas sur base des produits frais (tarte au fromage, filet de saumon, ratatouille, riz Basmati, gâteau aux amandes par exemple). Le voyage s’effectue en car la nuit à partir d’Uccle. On peut aussi y aller en voiture : une nuitée supplémentaire vous sera offerte avant et après le séjour pour compenser le prix du voyage. Tout cela est financé par la commune d’Uccle qui demande une participation allant de 470 € à 610 € pour les séjours de Noël, Nouvel An, hors de saison, Carnaval, Pâques et Minitour. Ces prix comprennent le transport en car, la pension complète, le matériel de ski et les raquettes. Il faut y ajouter 25 € pour les leçons de ski et 25 € de cotisation pour les non-Ucclois, outre bien sûr les remontées mécaniques pour les adultes. Oui, mais... Le Val d’Uccle menacé de fermeture La survie du complexe est cependant menacée par le décret de la gratuité scolaire que le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles a voté en 2019. Selon ce décret, les parents ne peuvent pas débourser plus de 450 € pour l’ensemble des six années primaires. Or, le prix demandé pour le voyage de leur enfant se monte à 595 € tout compris. « On envoie par an environ 700 enfants des 5e et 6e primaires pour un voyage de 13 jours, en demandant un prix modéré aux parents », explique Jérôme Toussaint, administrateur délégué du Val d’Uccle et conseiller communal MR. Un séjour au cours duquel les élèves peuvent s’initier aux joies de la montagne, tout en ayant cours dans les salles de classe aménagées dans les deux chalets. « Même si on réduit le séjour d’un jour ou deux, on ne pourra pas couvrir tous les frais avec 450 €, rétorque Carine Gol-Lescot (MR), échevine de Tutelle. Cela pourrait signifier que les élèves à venir devront choisir entre le Val d’Uccle et d’autres excursions en l’espace de six ans. » Et dans ce cas, le Val d’Uccle qui tient ses portes ouvertes grâce aux classes de neige et aux classes vertes, devrait les fermer. En attendant, Sylvain Cochand, le directeur des deux chalets, vous attend toujours dans la bonne humeur, avec une pointe d’humour suisse, en vous réservant son programme d’animation festive : karaoké, soirée jeux, soirée déguisement, chants au coin du feu, balade aux flambeaux et boum en fin de séjour. Plus d’informations sur le site : www.valduccle.be. Secrétariat : rue Auguste Danse, 25 à 1180 Bruxelles. Tél. : 02/348 65 66 ou 02/348 67 96 Michel Lequeux


CINEMA : LE PRINCE OUBLIÉ Comédie de Michel Hazanavicius, avec Omar Sy, Bérénice Bejo, François Damiens, Keyla Fala et Sarah Gaye. France 2020, 102 min. Sortie le 19 février. Résumé du film – Djibi, papa célibataire, invente chaque soir des récits merveilleux pour endormir la petite Sofia. Mais le temps passe et à 11 ans, Sofia n’a plus envie d’écouter son papa chéri lui raconter des histoires. Elle a rejoint le collège et elle entre dans l’âge de l’adolescence. Le bon Prince va alors affronter la plus épique de toutes les aventures pour ne pas être remisé dans les oubliettes de l’histoire. Commentaire – A partir des contes merveilleux des frères Grimm et d’Andersen qui inspirent le scénario, Michel Hazanavicius nous entraîne dans une comédie où l’épique le dispute à l’intime. Le Prince oublié est son huitième film. Une scène sur deux a lieu dans les studios de cinéma qui recréent la magie des contes pour enfants, avec une certaine dose de parodie dont le réalisateur a l’habitude. Le reste, c’est la vie banale dans un petit appartement de banlieue où le Prince, héros de ses histoires, fait ce qu’il peut pour élever une enfant qui grandit trop vite à ses yeux. La petite Sofia, incarnée par deux jeunes actrices en herbe d’un naturel parfait, veut se détacher, elle, de ce père qui l’aime trop et l’empêche de grandir. Notre Prince, campé par Omar Sy au sourire éclatant de blancheur, va et vient entre les deux histoires en parallèle, laissant à la porte une belle voisine et se gargarisant des cris d’animaux qu’il répète dans le bus, à la stupeur des autres voyageurs. C’est la scène la plus drôle du film, encore que le réalisateur ne l’ait pas suffisamment exploitée. Ce que Michel Hazanavicius a bien exploité en revanche, ce sont les scènes épiques dont il fait, pour les spectateurs adultes, la métaphore visuelle des états d’âme du héros. Le mensonge de la fillette se précisant ainsi, des nuages s’amoncellent dans le ciel au-dessus des studios. Et quand le Prince découvre que Sofia a fugué la nuit pour rejoindre son jeune ami rencontré à l’école, la terre se met à trembler et tout le carton-pâte du cinéma s’effondre dans l’abîme qui s’est creusé sous les pas du héros. Tout fonctionne ainsi avec le décor qui nous rappelle les sentiments d’un Prince mis au rancart. Le problème, c’est qu’on ne sait pas à qui s’adresse cette comédie qui mélange les publics : aux parents, aux enfants, à tout le monde... Ce que le réalisateur appelle un public familial. En fait, la comédie laisse à distance un spectateur mal ciblé, qui n’arrive pas à s’identifier aux personnages, sinon pour en sourire. On y retrouve Bérénice Bejo, la voisine de palier qui joue le rôle de la femme à la porte dans les deux parties du film. Elle revient sous la direction de son mari Michel Hazanavicius, après avoir interprété les deux OSS 117, parodie des romans de gare, The Artist, The Search et Le Redoutable. Quant à l’intrigue amoureuse qui se tisse entre elle et Omar Sy, ça manque vraiment de naturel au point de paraître fort artificiel, comme le film d’ailleurs. Avis – Un conte merveilleux sur l’art de se détacher des enfants pour les laisser grandir et faire leurs propres armes. Omar Sy fait ce qu’il peut pour nous en convaincre. Mais le faut-il ? Michel Lequeux


CINEMA : THE GENTLEMEN Comédie noire de Guy Ritchie, avec Matthew McConaughey, Charlie Hunnam, Hugh Grant, Colin Farrell, Michelle Dockery, Henry Golding, Eddie Marsan et Jeremy Strong. USA/GrandeBretagne 2020, 113 min. Sortie le 26 février. Résumé du film – Quand Mickey Pearson, un baron de la drogue à Londres, laisse entendre qu’il pourrait se retirer d’un marché juteux, le monde interlope autour de lui entre en ébullition : chantage, double jeu, complots et conflits sanglants se succèdent dans sa mouvance. Chacun voudrait se mettre à la place du roi qui va abdiquer, mais le roi a encore toutes ses dents de carnassier et il est prêt à mettre en lambeaux les prétendants au trône. Surtout s’ils touchent à sa petite amie. Commentaire – The Gentlemen aurait pu s’appeler The Bush, la brousse, le titre précédent qui colle beaucoup mieux à cette comédie noire touffue, broussailleuse, qui s’emmêle les pinceaux. Ses anticipations, ses retours en arrière, ses personnages plus véreux les uns que les autres, ses bons qui sont les mauvais et vice versa, ses genres mélangés, tout nous plonge dans un bain saumâtre, qui fait des bulles. Ajoutez-y l’humour noir, cinglant et sanglant du réalisateur britannique Guy Ritchie, et vous aurez la comédie noire qu’il voulait tourner sur le modèle de ses deux premiers films, Arnaques, crimes et botanique (1998) et Smatch (2000). Il a mis deux ans pour arrêter et peaufiner le scénario. Deux ans pour arriver à ses fins. Cependant, à peine sorti de la salle, on embrouille noms et personnages, c’est tout dire. Un toilettage s’imposait donc, qui n’a pas été fait. On en ressort éreinté, l’esprit à l’envers. D’autant plus que la fin se fait attendre dans un film qui dure près de deux heures, avec plein de rebondissements qui font défiler tout le milieu de la pègre internationale. Et c’est sans compter cette fin même qui rajoute l’idée d’un scénario à transmettre au cinéma outre-Atlantique pour conclure la retraite du truand. Si la mise en abyme du film plaira aux cinéphiles, elle lassera les autres. C’est beaucoup, c’est trop pour une comédie noire qui s’épanche tous azimuts, avec de bons acteurs à l’affiche qui sont malmenés. The Gentlemen était pourtant bien parti avec un baron de la pègre pris dans le collimateur d’un tueur à gages et deux narrateurs qui mettent cette histoire en scène : l’avocat qui défend les intérêts de son client et le journaliste qui tente de le piéger au cours d’une enquête bidon. Charlie Hunnam et Hugh Grant (déjà dirigé par le réalisateur dans Agents très spéciaux en 2015) interprètent ici à qui mieux mieux les deux mentors qui nous racontent l’histoire chacun à leur manière. Quant à Matthew McConaughey, qui campe le baron de la drogue, il le fait de la manière la plus cynique et la plus crue qui soit. Comme un roi de la pègre, dans un rôle de contre-emploi qui est celui des autres personnages comme Colin Farrell, le « coach » d’une équipe de boxeurs chargés de faire le ménage dans cette galerie de crimes. Guy Ritchie a pris un malin plaisir à gauchir, à travestir chacun des acteurs qu’on a vus dans de meilleurs rôles (tel McConaughey dans Dallas Buyers Club et dans Interstellar). On préférait le réalisateur dans la trilogie consacrée au personnage de Sherlock Holmes, avec Robert Downey Jr dans le rôle-titre. Avis – Qu’ajouter de plus à cette comédie déjantée qui pisse le sang, sinon qu’elle divertira les amateurs du steak saignant, voire dégoulinant, et qu’elle fera fuir les autres. Michel Lequeux


CINÉMA : QUEEN & SLIM Drame racial de Melina Matsoukas, avec Daniel Kaluuya, Jodie TurnerSmith, Bokeem Woodbine et Chloë Sevigny. USA 2019, 132 min. Sortie le 11 mars. Résumé du film – Une avocate et un employé de bureau se sont fixé rendez-vous dans un restaurant de l’Etat d’Ohio, où la peine de mort est toujours appliquée. Ils sont Noirs. Ils vont malheureusement apprendre à mieux se connaître ce soir-là, quand la police les arrête pour une faute mineure au volant. Suite à une violente altercation, le Noir abat le policier avec l’arme de service qu’il a ramassée et dont la balle a effleuré la cuisse de sa compagne. Pas d’autre issue que la fuite pour échapper à cette justice aveugle qui fait d’eux des criminels d’avance condamnés à mort. Commentaire – La violence raciale continue d’alimenter les faits divers et le cinéma qui s’en inspire aux Etats-Unis. Surtout dans le Sud, où le Noir subit l’héritage du passé esclavagiste. S’il fuit, c’est un nègre à abattre. Même si l’agression délibérée du policier est attestée par la vidéo qui a enregistré la scène, ces deux Noirs n’ont aucune chance dans une justice acquise aux Blancs. Et quand bien même la police serait coupable d’autres faits avérés. C’est ce que prouve Queen & Slim qui nous entraîne dans une chasse à l’homme à travers l’Est américain, depuis l’Ohio jusqu’en Floride. Une chasse au couple impitoyable, qui se terminera tragiquement. Les esclaves noirs sont toujours présents dans ce drame avec les ouvriers que le couple croise dans les champs de coton, bien alignés et serviles comme dans le passé. Ou comme la scène où Slim enfourche un cheval blanc, suscitant la réflexion de sa compagne : on a peur des Noirs à cheval, peur quand on les regarde d’en bas. Ce sentiment d’infériorité est inscrit dans leurs gènes, dans leur tête. C’est en le dominant que Slim suscite le respect du pompiste, prêt à l’abattre avec l’arme qu’il lui a laissée pour montrer sa bonne foi. Et c’est l’appât du gain qui triomphera à la fin pour les arrêter plutôt morts que vifs. On s’attache à ce couple aussi bien pour l’amour qui naît entre eux que pour le road movie où ils nous entraînent dans une course infernale contre leurs poursuivants. Daniel Kaluuya est d’une sincérité désarmante. Acteur britannique remarqué dans le blockbuster à succès Black Panther, il a reçu la consécration du meilleur acteur dans Get Out, thriller d’horreur à petit budget (2017). Quant à Jodie Turner-Smith, mannequin et actrice britannique elle aussi, elle a tourné dans des vidéoclips entre 2013 et 2017 avant d’illustrer une femme noire intelligente et sensuelle, qui a tout pour nous séduire. C’est son quatrième film et c’est un régal de la voir mener le jeu dans une relation de couple aussi compliquée que chez les Blancs. Elle aussi fait l’éducation de son compagnon plus frustre, qui mange goulument. Queen & Slim est le premier film de Melina Matsoukas, réalisatrice américaine spécialisée dans les clips musicaux des chanteuses noires comme Beyonce, Whitney Houston et Rihanna. Avec des origines grecque, juive, jamaïcaine et cubaine, elle a tout pour s’attaquer à son sujet de prédilection et elle signe ici un excellent drame, tourné avec les couleurs de la nuit. Poignant et consternant à l’heure où l’on parle tellement d’égalité dans la société et de lutte contre la discrimination raciale. Avis – Un road movie qui nous tient en haleine du début à la fin, malgré ses 132 minutes qu’on ne voit pas passer. C’est tout le racisme aux Etats-Unis qui défile à l’écran. Michel Lequeux


DVD : DONNE-MOI DES AILES Christian est un scientifique visionnaire. Sa passion : étudier les oies sauvages. Pour son fils, adolescent obnubilé par les jeux vidéo, venir passer les vacances scolaires en sa compagnie s’apparente à un cauchemar. Néanmoins, malgré les conjectures, leurs retrouvailles les rapprochent. D’un commun accord, ils décident de sauver une espèce en voie de disparition. Le réalisateur Nicolas Vanier s’est fait une spécialité des films animaliers (Le dernier trappeur, Loup, Belle et Sébastien) et sait faire naître l’émotion des paysages grandioses, tout en mettant la psychologie au service des protagonistes. Ensemble, ils décident de monter à bord d’un ULM et d’entreprendre un périple aventureux. Ce long métrage parle de transmission, d’amour familial et d’engagement. A la faveur de l’été, père et fils relèvent un challenge peu probable et se targuent d’un merveilleux message sur l’émancipation, la solidarité et l’engagement. Jean-Paul Rouve apporte au personnage principal une solidité non dénuée d’humour. Bien entendu, on songe par instants à « L’envolée sauvage » (1996) de Caroll Ballard, qui revient sur un récit assez analogue. Qu’importe ! Plus de deux décennies se sont écoulées et, en partant d’un pitch un peu similaire, le réalisateur réussit ici un film foncièrement esthétique et sans facilités. De la Camargue à la Norvège, les vues sont splendides, le tempo mené tambour-battant et le casting au top. « Donne-moi des ailes » se veut une réalisation tout public qui encourage les initiatives personnelles et qui prône des valeurs écologiques bien dans l’air du temps. Un film à savourer et à voir sans se prendre la tête. Avis aux amateurs ! Daniel Bastié

ILS ONT TUÉ LEO FRANK Né en1884, Leo Frank est resté dans les annales pour une affaire qui porte son nom. Directeur d'une usine à Atlanta et de confession juive, il a été accusé du viol et du meurtre de Mary Phagan, quatorze ans en 1913, et qui travaillait pour lui. Jim Conley, un balayeur afro-américain de l’entreprise a ensuite été soupçonné, avant de désigner son patron comme ayant été son complice. La foule a naturellement exigé un coupable et la justice a eu du mal à se prononcer. Très médiatisé, le procès a fait l’objet d’une campagne antisémite. Chauffé à blanc, un commando armé s’est introduit dans la prison où Leo était enfermé, afin de l’exécuter par pendaison. Dans cette bédé tout est vrai : l’enquête, le jugement, l’emballement des médias, le racisme primaire, la violence, la vindicte de la populace et une investigation ultérieure qui est arrivée à la conclusion que le riche directeur était innocent. À la suite de l'affaire aussi nommée Mary Phagan, une partie des membres de l'association « Les chevaliers de Mary Phagan » s'est associée avec des nostalgiques du Ku Klux Klan (interdit depuis les années 1870) pour le ressusciter. En mars 1982, Alonzo Mann, qui était un petit garçon employé à l'usine de crayons, a affirmé avoir vu Jim Conley déplacer seul le corps de la petite Mary. Menacé de mort par ce dernier, selon ses dires, il s’est tu sur les conseils de sa famille et de ses proches. Alonzo Mann est décédé trois ans plus tard, affirmant avoir effectué cette démarche pour mourir la conscience tranquille. Quant à Jim Conley, il n’a purgé qu’une année de prison, avant d’avoir été arrêté pour délits divers, dont un cambriolage. Depuis 1962, il n’est plus de ce monde. Ed. Steinkis – 112 pages André Metzinger


ABÉCÉ DOORS The Doors a été un des groupes de rock mythiques, formé par le chanteur Jim Morrison, le claviériste Ray Manzarek, le guitariste Robby Krieger et le batteur John Densmore. Bien que controversée, la formation est longtemps demeurée représentative de la contreculture américaine. Elle a tiré son nom du titre du roman d'Aldous Huxley « The doors of perception », lui-même une référence à une citation de William Blake. Plutôt que de nous livrer une énième biographie, Gorian Delpâture, journaliste et chroniqueur littéraire à la RTBF et passionné de culture pop, nous suggère un abécédaire qui retrace les étapes essentielles de la trajectoire de quatre musiciens ultra-doués et ce depuis leurs débuts en 1967, multipliant les anecdotes, les secrets de coulisses, les recettes au moment d’enfanter des tubes, leur vie privée et les albums qui se sont succédé dans les bacs des disquaires. Pourquoi acheter cet ouvrage ? Simplement parce qu’il diffère complètement de ceux qui lui ont précédé, sans sens imposé de lecture et avec une organisation qui permet de papillonner d’un terme à un autre. Aujourd’hui, l’intérêt pour le groupe n’a jamais été plus vivace et Jim Morrison, entré dans la légende en mourant en juillet 1971, continue à fidéliser ses fans qui viennent apporter des gerbes de fleurs sur sa tombe au Père-Lachaise. Cette bible représente le fruit de plus de vingt années de travail, de compilation de documents, d’écriture et de réécriture. Un résultat à découvrir sans modération pour qui aime le rock ! 180° Editions - 364 pages André Metzinger

BRUXELLES LOVE Autrice de nombreux ouvrages enfantés à Bruxelles et qui traitent (un peu ou beaucoup) de la capitale, Kate Milie est une passionnée des lettres, dont la respiration devient écriture. Après plusieurs polars urbains, elle a arpenté nos quartiers pour y débusquer moult anecdotes et rédiger un recueil nuancé qui parle d’amour avec un grand A. Il s’agit à chaque fois de s’attacher à un lieu, afin d’y relater l’histoire et y exhumer les souvenirs. L’occasion de feuilleter le bel imagier du passé et de remonter à la rencontre de Maria Malibran, Charles Baudelaire, Paul Verlaine et, parmi beaucoup d’autres, Charles de Coster au fil de rues et d’avenues qui ont palpité au rythme des passions. L’opportunité également de découvrir des adresses telles que le Musée de la dentelle, le Musée de l’Erotisme et de la Mythologie, le parc Josaphat, Train World, le Clockarium, la maison Gauchie et le cimetière d’Ixelles à travers les siècles, commune par commune. Cette recension (certes non exhaustive !), se veut une promenade jalonnée d’arrêts qui ne ressemble aucunement à un guide touristique, mais qui pourrait se définir comme une nomenclature des endroits qui peuvent témoigner de transports amoureux et renvoyer dans le temps à la fois décomposé et recomposé. Soixante haltes permettent enfin de voir Bruxelles autrement ! Le présent opus a été illustré d’aquarelles signées Quentin Heroguer. 180° Editions - 120 pages Daniel Bastié


N’OUBLIE JAMAIS QU’AVANT DE TE RELEVER TU DOIS ÊTRE TOMBÉE Eva est à l’heure du bilan. Que faire de son existence ? Surtout comment réagir après que le ciel lui soit tombé sur le crâne ? Au terme de vingt longues années de précieux service, elle vient de recevoir son C4. Une tuile ! Pour émerger du chaos, elle fait appel à un coach, un homme qui la boostera et lui apprendra de quelle manière se présenter, parler, se vêtir, etc. Bref, se vendre en vue de rencontrer de futurs employeurs ! Au fil des entretiens, Eva découvre que les vraies valeurs ne sont pas forcément celles des entreprises ni de la compétitivité. Elle mesure progressivement la grandeur de chaque journée vécue, de l’air qu’elle respire et des rencontres qu’elle affectionne. Elle s’éveille également à son corps, à ses aspirations, aux émotions qui se révèlent chères et à ses centres d’intérêt. Jessica Milo, écrivaine franco-suisse, dresse un magnifique portrait de femme lâchée dans un monde qui avance à toute vitesse et qui se nourrit de technologie, mais qui perd son humanité. L’héroïne s’interroge, pose des choix, privilégie son bien-être et fonctionne selon ses états d’âme. Il s’agit surtout du récit d’une résurrection. Après avoir été au plus mal, une femme renaît ! Ce roman feel good explore enfin d’autres thématiques dont la dépendance à l’argent, l’appréhension du temps, la vie de famille, l’épanouissement au boulot et la quête de soi. En un mot : fédérateur ! 180° Editions - 208 pages Amélie Collard

NE LUI PARLE PAS D’ELLE Ann vit depuis de longues années dans la résilience. Repliée sur elle-même, elle écrit pour survivre. Un exutoire qui en vaut bien un autre, mais qui ne parvient pas à l’épanouir et à lui faire franchir le pas indispensable pour aller vers les autres. Le souvenir de sa mère défunte l’obsède, au point qu’elle lui paraît toujours vivante, spectrale, proche et en même temps éloignée. Puis, un doute surgit : quelles ont été les causes réelles de son décès ? Elle bouscule ses souvenirs à moitiééteints et décide de se mettre en route pour marcher à la rencontre de celles et de ceux qui ont connu la disparue, se faire une idée de ce qu’elle était vraiment. Naturellement, toutes les quêtes ne sont pas forcément bonnes à entreprendre et, à mesure que ses investigations progressent, le visage d’Hélène se dessine. « Ne lui parle pas d’elle » entraîne le lecteur dans une recherche de la vérité, entre présences oniriques et secrets de famille, avec forcément un côté obscur qu’il aurait peut-être fallu ne pas exhumer. Armande Rahaga signe un roman dur et touchant, qui brise certains tabous, et se nourrit d’une plume sans effets de style inutiles et qui soigne le tempo. Le lecteur éprouve de l’empathie pour l’héroïne, coincée dans une quête vitale pour son état mental. Oui, il importe de savoir pour revivre et abandonner un purgatoire immérité ! 180° Editions - 236 pages Amélie Collard


87e DISTRICT

Ed McBain et ses flics du 87e district revivent aujourd’hui grâce à une intégrale en neuf volumes qui regroupe l’ensemble des aventures des inspecteurs Carella, Meyer, Kling etc. dans les bas-fonds d'Isola. Ed McBain a mis en place de solides polars qui plairont aux plus dubitatifs, des histoires très cinématographiques et rédigées au cordeau. En une quarantaine d’années, l’auteur a étalé pas moins d’une cinquantaine de suites, permettant de mettre en place ses personnages, d’étoffer leur psychologie et d’emprunter des tangentes qui tiennent à la fois du thriller, du récit familial et qui s’étoffent d’ellipses sur les cadences d’une métropole en ébullition permanente. Présentés dans leur suite chronologique et dans des traductions révisées et intégrales, ces romans apparaissent une dizaine d’années après leur clôture définitive aussi vastes qu’une comédie humaine qui se veut un témoignage de premier plan sur la vie aux States, ses mœurs et ses habitants. En un certain sens, McBain peut être considéré comme un précurseur du récit choral, avec des enquêtes qui partent dans toutes les directions, des protagonistes qui vont et viennent, des indices qui se multiplient, des états d’âme qui se font et se défont. L’écriture est aussi belle qu’efficace, rôdée par une mécanique qui n’a rien à prouver. On le sait beaucoup moins, mais l’auteur a également rédigé sous divers pseudonymes, dont Evan Hunter, Richard Marsten, Hunt Collins, Curt Cannon et Ezra Hannon. A côté du polar, il s’est aussi distingué dans la science-fiction et des ouvrages plus littéraires. Si vous n’avez lu un de ses titres, voilà l’occasion de rattraper un retard dommageable. De son vrai nom Salvatore Lombino, Ed McBain est né le 15 octobre 1926 à New York et est décédé le 6 juillet 2005 dans le Connecticut. Son talent de narrateur et son sens du détail l’ont rendu célèbre dans le monde. On sait beaucoup moins qu’il a également signé plusieurs ouvrages sous le pseudonyme Evan Hunter, Richard Marsten, Curt Cannon et, parmi quelques autres, Ezra Hannon. Outre ses qualités novatrices (recours à la police scientifique, à la médecine légale, aux procédures d'une enquête réelle et à un découpage feuilletonnesque), la série « 87e district » se caractérise par un travail remarquable sur le temps romanesque frisant la perfection et la psychologie des personnages. Au fil des années, les lecteurs ont pu découvrir l’évolution de la brigade, passant des débuts essentiellement masculins et machismes à une ouverture en faveur de la gent féminine, afin d’imposer des collaboratrices incontournables. Ed. Omnibus – environ 860 pages par volume Paul Huet


CITY OF WINDOWS New York est paralysé par une tempête de neige particulièrement éprouvante. Une succession de crimes met en émoi les habitants. Un sniper professionnel s’en prend à une série de personnes, qu’il exécute avec méticulosité. Où s’arrêtera-t-il ? La première victime a été un agent du FBI, fauché par une balle alors qu’il conduisait son véhicule. Menée à investiguer, la police doit bien vite reconnaître son impuissance. Faute d’alternative, elle fait appel à Lucas Page, flic qui a pris ses distances avec le métier et ancien professeur d’astrophysique ravagé par le syndrome d’Asperger ou forme d’autisme. Chose qui ne l’a jamais empêché de développer un véritable talent pour interpréter les scènes de crime. Flanqué d’une acuité hyper développée, il accepte de reprendre l’uniforme et de mettre ses facultés au service de ses anciens patrons. Robert Pobi signe un polar étrange et joue avec les codes. Si le cadre se veut d’un rare classicisme (une métropole mondialement connue) et les meurtres répétitifs, il emprunte une tangente en mettant sur les rails un enquêteur dont la réalité physique n’a rien à voir avec celle de ses contemporains. Et c’est ce décalage par rapport au monde qui lui permet de se positionner afin d’observer les éléments sous un angle différent et percevoir ce que le quidam ne relève pas ! Bien sûr, après un prélude traditionnel, le récit se met en route et multiplie les indices pour mener à l’arrestation d’un tueur insaisissable. Traduit de l’anglais par Mathilde Helleu, ce roman noir de noir séduit et obsède à la fois. Ed. Les Arènes – 512 pages Paul Huet

C’EST POUR TON BIEN Aujourd’hui, on emploie le mot féminicide, une expression inconnue hier et avant-hier, même si de nombreuses femmes mourraient sous les coups d’un amant, d’un mari ou d’un frère. Patrick Delperdange nous raconte l’histoire de Camille qui vit avec Pierre et qui, un triste jour, dérape et la brutalise. Bien sûr, elle se répète que cela ne se reproduira plus. Qu’il s’agit d’une erreur dans le cheminement heureux de leur couple. Que le bonheur fera oublier ce moment fâcheux. Puis, la violence revient, avec soudaineté, sans qu’elle s’y attende. Toujours plus agressive. Désormais, elle ne reconnaît plus l’homme qui partage son lit. Que se passe-t-il ? Que lui arrive-t-il ? Elle pense à lui avant de songer à elle, incapable de saisir la décision qui la délivrera. Les câlins ne suffisent pas. Tout s’envenime jusqu’à ce que Camille disparaisse. Définitivement ? L’auteur livre ici un thriller psychologique à hauteur d’épaules et plonge le lecteur dans le monde des faux-semblants. Après « L’éternité n’est pas pour nous », œuvre noire déchirante, il se réinvente complètement avec cette angoissante trame domestique faite pour intriguer et interpeller. Le thème de la violence conjugale reste trop peu abordé en littérature, même si plusieurs ouvrages osent poser la question : Est-ce que je connais vraiment la personne avec laquelle je vis ? Ed. Les Arènes – 336 pages Amélie Collard


TCHERNOBYL La tragédie de Tchernobyl est le fait d’une erreur humaine, par laquelle tous les mécanismes de contrôle et de sûreté sont désactivés, afin d’effectuer des essais. Le 26 avril 1986 à 1 heure 22, les tests débutent et le système de sécurité automatique est mis en veille. Une minute plus tard, les opérateurs ferment les vannes d’alimentation en vapeur de la turbine. Les pompes de refroidissement se coupent une à une, alors que la puissance des réacteurs ne cesse d’augmenter (au lieu de baisser !). Des secousses se ressentent quelques secondes plus tard dans la salle de contrôle. Des observateurs entendent alors deux explosions et voient des débris incandescents propulsés dans les airs, provoquant l’incendie du bâtiment abritant la turbine. Hormis l’erreur humaine, la conception hasardeuse du réacteur se trouve également à la base du problème. Les machines utilisées à Tchernobyl diffèrent très nettement de celles exploitées en Europe et aux États-Unis en étant, par exemple, dépourvues d’une enceinte de confinement afin de les isoler de l’environnement extérieur. Après la série télévisée qui a fidélisé près de dix millions de spectateurs, voilà le livre vérité, illustré par plus de cent photographies pour se plonger au cœur de l’enfer. A l’époque, personne n’avait imaginé pareille catastrophe ! Le choc des images se veut aussi vrai que celui des témoignages … Présent en première ligne, Igor Kostine nous délivre un reportage unique et sans censure. Consternant ! Ed. Les Arènes – 238 pages André Metzinger

DONBASS Ce nom est vaguement connu des Occidentaux, même si l’Histoire l’associe à une guerre contemporaine située à moins de deux heures de vol de chez nous. Depuis 2014, la guerre du Donbass se prolonge avec plus ou moins d’intensité selon les saisons. Un conflit armé au cœur de l’Ukraine moderne et qui a débuté avec l’intervention russe après une série de manifestations pro-européennes de la part d’une immense partie de la population et l’annexion de la Crimée par le voisin Poutine. Une guerre oubliée ou tue par les médias ? Peut-on évoquer une perspective de paix ? Benoît Vitkine situe son récit sur la ligne de front. L’hiver 2018 n’est pas moins dur que les précédents et une certaine routine s’est installée entre les partis antagonistes. Les assauts ont cédé la place à des bombardements épisodiques et à moult petits trafics. Dans ce contexte tendu, le meurtre d’un enfant pousse le colonel Henrik Kavadze, chef de la police locale, à mener l’enquête. Ses investigations déplient de nombreux souvenirs, dont des fantômes dont il aurait aimé se passer. Avec ce premier roman, l’auteur nous livre un récit porté par un personnage haut en couleur, flic désabusé qui navigue entre idéalisme et dégoût, et qui en même temps est confronté à l’une des pires tragédies qui frappe son pays. L’héroïsme a naturellement cédé depuis longtemps le pas à l’instinct et à la débrouille. Dans un style direct « Donbass » parle d’une sale guerre autant que d’un sale crime ! Ed. Les Arènes – 288 pages André Metzinger


LA CATABASE La catabase : motif récurrent des épopées grecques traitant de la descente du héros dans le monde souterrain, les Enfers. Des gens fortunés, des gens haut placés, estimant qu'ils ont fait le tour des plaisirs que peut apporter leur position privilégiée, veulent placer la barre encore plus haut et c'est l'horreur pour celui qui découvre l'indicible perversion dont ils sont capables. Horreur qui participe d'une abominable schizophrénie. On en vient aux sacrifices d'êtres humains, victimes expiatoires dont les cris et les supplications ne font qu'augmenter l'excitation du bourreau et de ces riches "spectateurs". Des "spectacles" que l'on paie très cher et qui sont diffusés avec un maximum de sécurité sur le Dark Web. Je vous livre un passage édifiant sur la façon de juger l'humain ou l'humanité par un de ces riches organisateurs de snuff-movies (nom donné à ce genre de "réjouissances") : ... "Les êtres que nous sommes ne sont heureux que lorsqu'ils se détruisent. Entre eux ou seuls. Tout est toujours prétexte à la querelle, à la guerre, à la jalousie, à l'envie, à la domination. Je ne peux pas croire en une humanité qui chercherait avant tout le bien-être de son voisin. Nous sommes tous égoïstes. A part ces imbéciles niais de végétaliens, chacun, pour son propre plaisir, n'hésite pas à tuer d'autres êtres vivants pour satisfaire un estomac devenu bien trop petit pour la gourmandise du monde. Quand je vous dis que nous nous dirigeons droit vers la troisième partie du tableau, je ne plaisante pas une seule seconde. Nous avons consommé, au moment où je vous parle, toutes les ressources naturelles de notre planète et pourtant chacun continue à vivre comme si tout allait parfaitement bien. La race humaine n'est que perfidie, monsieur Dumas."... L'écriture est fluide, nerveuse, rapide et donc efficace. Le récit nous tient en haleine et le suspense est total. Des rebondissements et pas de super héros mais la réalité, rien que la réalité. Un roman dont il est difficile de sortir indemne d'autant plus qu'il est tiré de faits réels. Un roman dur, un roman choc. Un roman terrifiant qui donne le frisson et révèle les abîmes où peut sombrer l'être humain guidé par l'ennui et le fric. A noter encore que le premier chapitre est particulièrement "hard" et peut donc choquer les âmes sensibles. Il n'est pas nécessaire de le lire pour comprendre la suite du récit, dixit l'auteur lui-même et... confirmé par le lecteur que je suis... même si, ce premier chapitre je l'ai lu... et n'en suis pas sorti tout à fait indemne... Editions IFS (Phénix Noir) - 306 pages Alain Magerotte

VOUS N’AUREZ PAS MES CENDRES ! Au moment où débute le récit, Serge Malakoff connaît une perte de notoriété et cherche à rebondir. Ses livres ne rencontrent plus le succès d’autrefois. Il s’affaire à la rédaction d’une pièce qui devrait le propulser sous les feux de l’actualité. Entre son ex-femme et sa nouvelle compagne, il a du mal à se concentrer. Pourtant, rien ne doit tarder. Alors que l’absence d’inspiration le tétanise, il subit des hallucinations et se voit projeter dans l’intimité de ses personnages de fiction. Il vit également une relation houleuse avec Chateaubriand à propos de la publication de « Les Mémoires d’outre-tombe » éditées en feuilleton dans un quotidien à gros tirage. L’autrice est née à Boulogne-Billancourt en 1965 et est passionnée d’écriture. A travers une fresque virevoltante, elle exhume les souvenirs d’une époque en pleine effervescence et multiplie les détails pour donner corps aux affres de la création. Maux de tête, insomnie et hésitations assaillent le protagoniste au plus profond de son être, incapable d’accoucher d’idées fédératrices. Par son style, « Vous n’aurez pas mes cendres » s’impose par son étonnante vitalité et va plus loin qu’une simple description du XIXe siècle littéraire, période de transition entre classicisme et modernité. Ed. Serge Safran – 174 pages Daniel Bastié


LA PORTE "La Porte" est un roman de Samuel Palladino qui oscille entre le thriller psychologique et le fantastique. Samuel Palladino a bien compris tous les mécanismes inhérents à ces types de littérature. On sent aussi le passionné de Stephen King. Léo Versari a hérité de la maison de ses grands-parents de cœur. Il s'y installe avec sa compagne Anaëlle et leur fils Martino. En nettoyant la cave, il découvre une porte cachée derrière un tapis représentant un énorme éléphant au regard féroce et aux défenses saillantes. Lorsqu'il l'ouvre, les comportements de chaque membre de la famille changent. Chacun ressent de mystérieuses présences, entendent des choses que les autres ne perçoivent pas et perdent peu à peu le contrôle de soi. Chacun se sent attiré par une pièce ou un endroit de la maison : Léo, ce sera la cave, Anaëlle, le grenier et Martino, le bois situé à l'arrière de la maison. Il y a aussi les rêves, tantôt érotiques, tantôt terrifiants... Outre la fluidité de l'écriture, je dirais que la qualité première de ce roman réside dans le fait que l'auteur a évité de tomber dans le grand guignol (piège classique pour ce genre d'ouvrage) en privilégiant notamment la psychologie sur le sanguinolent ce qui rend le récit d'autant plus angoissant. Je vous livre un extrait édifiant à ce sujet : ..."Il se détourna de la fenêtre. Comment allait-il occuper son temps ? Il avait prétexté à Anaëlle qu'il avait une foule de choses à faire, mais c'était faux. En vérité, il n'avait qu'une idée à l'esprit, retourner dans la pièce, dans sa pièce. Après ce qu'elle lui avait raconté concernant la nuit précédente, il ne pouvait pas se permettre de descendre et de s'y glisser en douce. Si elle se rendait dans la cave alors qu'il s'y trouvait et entendait encore du bruit derrière le mur, elle aurait vite fait de transformer ses doutes, qu'il était parvenu à apaiser tout à l'heure, en certitude. Il savait que lorsque Anaëlle avait une idée derrière la tête, rien ni personne ne pouvait l'arrêter. Il décida d'attendre qu'elle parte, et cette attente allait être, il le savait déjà, interminable. Au-delà du plaisir qu'il éprouvait à s'y retrouver, il était également curieux de comprendre ce qui avait provoqué le bruit qu'elle avait entendu la nuit précédente."... Amateurs de frissons, je vous conseille de découvrir ce livre et... d'éviter de cultiver des plantes Datura dans votre demeure... pourquoi donc ?... "La Porte" de Samuel Palladino vous donnera la réponse... Rebelle Editions - 220 pages Alain Magerotte

LES LONGS COULOIRS Quelquefois, écrire s’apparente à un épanchement total de soi. La poésie demeure par excellence le médium nécessaire pour exprimer ce qu’on ressent au plus profond de son être. Un langage coloré qui dote les mots d’une musicalité parfaite, qui chante, sculpte et fait chatoyer les expressions. Combinaisons simples ou alambiqués, psyché d’interrogations, de méditations et de sensations, elle apporte au langage ce qui lui procure des miroitements, des souffles de chaud et de froid. Un exercice difficile, que certains apparentent à la rédaction de textes de chansons. Sylvie Godefroid fait partie de ces artistes précieux qui excellent dans la pratique de la rime, qui posent des atmosphères en soulevant le voile de la suggestion, qui couchent leur vécu en se parant d’une tunique qui dissimule leur nudité, qui abordent les sphères de l’amour et de l’érotisme sans vulgarité et qui en parlent avec un accent vrai. Ce n’est pas vainement qu’elle écrit : « Tu m’as fait l’amour. Que Gand s’en souvienne. Ouvrons les personnes. Voyage au long cours ». Que sait-on vraiment d’elle ? Derrière le masque de l’autrice se dresse une femme moderne à qui personne ne doit venir en compter. Adepte des planches, elle se produit sur scène, féministe et pleine de bon sens. Elle adore rédiger sur les comptoirs des bars, jamais loin des pavés figés de la capitale, tout en adorant les rencontres fortuites dans une rame du métro ou devant une friterie. Originaire de Charleroi, elle rend également hommage à sa région, en déployant moult métaphores qui réchauffent le cœur. Voilà une balade entre deux eaux et à l’heure entre chien et loup à déguster sans modération ! Baromètre d’une époque, « Les longs couloirs » est émaillé de photographies dues au talent de Mélanie Patris. Ed. Le Scalde -238 pages Daniel Bastié


UNE VIE ENTRE LES PAGES Sofia est une femme coincée dans une quotidienneté qui l’asphyxie. Son couple va à vau-l’eau et sa passion pour les vieux livres qu’elle relie en dilettante la sauve d’un marasme pesant. Alors qu’elle a été chargée de rafraîchir un ancien manuscrit, dont la couverture est délabrée, elle découvre entre deux cahiers une lettre de Clarice von Hamel, relieuse autrichienne au début du XIXe siècle. Une femme qui s’est battue pour davantage de liberté et d’indépendance dans un univers où certains métiers étaient exclusivement réservés aux hommes, quitte à payer son affranchissement au prix fort. Les mots lus enflamment la jeune femme qui se prend d’une empathie sincère et qui, indice après indice, décide de remonter le fil du temps, en entreprenant une quête rocambolesque à travers l’Europe. Cristina Caboni offre un roman en forme de miroir qui mélange le présent de deux femmes qui ont vécu à deux siècles d’intervalle et dans deux métropoles que tout oppose : la Vienne impériale et la Rome moderne. Elle dessine de jolis portraits d’héroïnes militantes, qui refusent de s’en laisser compter par les mâles et qui luttent pour permettre à la société d’évoluer. Il s’agit également d’un livre qui se veut la voix de toutes celles qui sont muselées et qui refusent de courber l’échine. L’écriture est ciselée, millimétrée comme du papier à musique, et apparaît comme une respiration dans un monde claustrophobe, où le matérialisme prend trop de place par rapport aux choses essentielles. La détermination de Sofia la mène à se remettre complètement en question et à s’activer sur la voie du bonheur. Une ode à la magie des livres et au courage des femmes ! Ed. Presses de la Cité – 378 pages Daniel Bastié

LA PREMIÈRE AMIE Le destin abat ses cartes là où personne ne l’attend. Pourtant, la vie paraissait radieuse à Eve et à Sarah, deux amies inséparables. Puis, le drame les a déchirées au bord du canal. La petite fille de la première est morte brutalement, alors qu’elle n’avait pas cinq ans. Est-ce le fait d’une imprudence ou de la volonté du hasard ? Toutes deux se plongent dans la résilience, contraintes de vivre malgré ce fardeau. Les questions se bousculent. Y a-t-il une coupable ? A bientôt trente ans, Eve a choisi de vivre en recluse, loin du bruit et de la foule. Elle a emménagé dans une petite maison près de l’écluse tragique et rythme ses semaines en ressassant le passé. Pour seules visites, elle tutoie son psychologue et la caissière de la superette dans laquelle elle effectue ses emplettes, malmenée par des souvenirs toujours vivaces. La recherche de la vérité pourrait-elle la sauver ? Geneviève Senger signe un beau roman au féminin qui traite de maternité, de culpabilité et de rédemption. L’écriture est fluide, bien documentée et exalte la force des sentiments. Il s’agit également d’une belle leçon de vie qui prouve qu’on doit avancer quoi qu’il arrive et que le sur-place ne fait qu’envenimer les ressentis. Le sujet est dur … à l’image des eaux grises du canal ! Ed. Presses de la Cité – 376 pages Sylvie Van Laere


ÉTRANGER DANS MON PAYS Xu Zhiyuan est un voyageur impénitent, un globe-trotter inlassable qui s’est mis en tête de traverser la Chine d’un coin à l’autre pour aller à la rencontre de ceux qui peuplent le pays. Il adore s’arrêter pour discuter avec les gens, prendre le temps de s’installer à une terrasse, regarder les paysages et contempler la vie dans ce qu’elle possède de plus merveilleux. Chaque région devient objet de découvertes, de satisfactions, d’étonnements ou de remise à zéro des compteurs. Combien de fois ne s’est-il pas senti étranger chez lui ? Alors, comme un adolescent, il apprend, s’interroge, tente de saisir l’essence des choses. L’auteur apporte ici un éclairage sur la Chine contemporaine, empreinte de traditions et plongée de plein pied dans la modernité, coincée entre les habitudes et le XXIe siècle qui exige de se tourner vers l’extérieur. Il ne s’agit pas d’un roman, mais d’un journal qui se déplie étape par étape et qui montre de quelle manière on fait un bout de chemin avec des femmes et des hommes qui ont beaucoup à raconter. Bien entendu, il y va d’avis personnels forcément subjectifs, agite la clochette de l’humour lorsqu’il le juge nécessaire, ne pontifie jamais et ne condamne à aucun moment. Au demeurant, il propose un savant mélange d’odeurs, de saveurs, d’impressions et rappelle que l’immémoriale continuité de la civilisation chinoise demeure un leurre. Comme ailleurs sur la planète, la Chine se veut multiple, encastrée dans son histoire, certes, mais résolument ouverte vers l’extérieur, avec une vitalité qui déborde sans limites et avec ce que la population est capable de produire. Portraits, notes de route, commentaires et reportages, voilà le contenu de « Etranger dans mon pays » traduit en français par Nicolas Ruiz Ed. Philippe Picquier – 319 pages Amélie Collard

L’OMBRE D’UNE VIE Alors qu’il s’apprête à jouir d’une retraite méritée, monsieur Takewaki s’effondre sur un trottoir de Tokyo, les bras chargés des gerbes de fleurs qu’on lui a offertes quelques minutes plus tôt, à l’occasion du drink organisé en son honneur pour le remercier de plusieurs décennies à son poste. Emporté illico à l’hôpital, un cortège de médecins et d’infirmières s’affairent autour de son corps meurtri. Bien sûr, les membres de la famille sont alertés. Tandis qu’il s’enfonce dans le coma, son esprit (ou âme) s’élève et se sépare de son enveloppe charnelle pour s’offrir une échappée belle loin des contingences de la civilisation humaine. Alors que les voix s’estompent progressivement, il se sent irrésistiblement entraîné à enjamber un monde inconnu. Commence pour lui une errance à la recherche de lui-même, de la vérité et d’un secret qui durant beaucoup d’années a plombé son bonheur. Asada Jiro aborde ici un thème difficile et, avec une pudeur extrême, parle de la mort et des souvenirs qu’on abandonne derrière soi. Fable ou parabole, ce récit s’attache à reconstituer le parcours d’une existence, se lance à la poursuite des chimères, des rêves mis de côté, des erreurs qu’on aurait dû corriger, des amis qui ne sont plus, des femmes qu’on a aimées et du destin qu’on a suivi les yeux fermés. Peu à peu, il prend conscience que rien n’est perdu et que s’ouvre un avenir radieux qui permet de retrouver le souffle de sa première naissance. Autrement formulé : de renaître à nouveau ! « L’ombre d’une vie » reconstitue peu à peu le sens d’une vie. Tout simplement DE LA VIE ! Ed. Philippe Picquier – 358 pages André Metzinger


ZEN COMME UN ZÈBRE Depuis des années, on parle beaucoup d’enfants HP ou à haut potentiel. Certains les considèrent comme des gosses agités et difficiles. D’autres détectent chez eux une intelligence particulière, voire supérieure. Quoi qu’il en soit, ils s’intègrent souvent avec pénibilité dans le système scolaire. Désignés comme des zèbres, ils rencontrent des difficultés d’apprentissage, s’ennuient en classe et ne parviennent pas à s’intégrer. Christel Beaurenaut prône la sophrologie, méthode encore décriée en France pour diverses raisons. Selon elle, elle peut être utilisée en complément de l'approche thérapeutique ou en solo et manifeste des résultats positifs sur certains types de patients. Aujourd’hui, elle propose un programme qui aborde plusieurs thématiques comme « Je maîtrise mon corps », « Je gère mes émotions », « Je développe mon identité » ou « Moi et les autres ». Son livre a été rédigé de manière ludique et claire et se découpe pour suivre un agenda de cinquante semaines, étape par étape, en prenant tout son temps. Il s’agit de fiches pratiques à compulser, à lire ou à échanger, sources de multiples idées et d’une réflexion née de l’expérience. Cet ouvrage s’adresse donc aux parents autant qu’aux professionnels de la santé, mais également aux éducateurs, aux enseignants et au personnel des centres PMS. Malgré des informations qui fusent tous azimuts, les enfants HP restent trop mal connus. Voilà un outil qui permet d’agir plutôt que d’être dépassé par une situation dans laquelle on s’englue sans s’en rendre compte ! Ed. Desclée de Brouwer - 242 pages Sylvie Van Laere

LES SENTINELLES D’HUMANITÉ Le XXIe siècle vit une crise profonde, de celles qui engloutissent les valeurs d’une civilisation. Le philosophe Robert Redeker s’interroge sur l’attente de certaines violences perpétrées et ressenties depuis longtemps. Dans un monde qui capote, a-t-on besoin d’héroïsme, voire de sainteté ? Selon lui, les deux vont de pair et répondent à la fois à des besoins collectifs autant que personnels. Convergent-ils, en quoi se séparent-ils et comment ont-ils été dévalués ? Les hommes d’exception n’ont rien à voir avec le surhomme ou le transhumain. Ils ne constituent pas non plus des fuites hors de l’humanité. Ils nous rappellent que nous ne sommes pas des animaux et que nous avons une mission terrestre, invitant chacun à vivre en conséquence. D’une manière plus générale, ces héros ou saints sont les gardiens de notre finitude. Ils fondent ce qui demeure en dehors d’eux, parce que leur présence répète en boucle la destinée de la terre et de celles et ceux qui l’habitent. Ainsi sont-ils, les uns comme les autres, des insoumis ou sentinelles, bâtisseurs de nations ou bâtisseurs d’humanité. Un ouvrage qui fait appel à l’intelligence et qui pousse à réfléchir. Le propre de la philosophie ! Ed. Desclée de Brouwer – 284 pages Paul Huet


LE GOÛT DE LA CONVERSATION La conversation s’est toujours avérée un échange entre plusieurs personnes, généralement traitée sur un ton familier et respectueux, pouvant porter sur un sujet précis ou s’évader dans la généralité. Il convient cependant de la différencier du dialogue et de l’entretien. Selon Pierre Sansot, auteur du présent essai, une conversation réussie se doit d’être enjouée. Il ne s’agit pas d’un simple exercice de logorrhée mais du plaisir de s’exprimer et de confronter des avis avec élégance et intelligence. La parole doit demeurer un bien liant et non devenir un vecteur de discordes ou d’aliénation. Jamais, il ne s’agit d’épater la galerie ou de faire du show. Au fil des chapitres, l’auteur se pose en observateur et dissèque ses réflexions en les nourrissant d’exemples. Converse-t-on avec tout le monde ? En eston capable ? Soutient-on une conversation avec Dieu ? De quelle manière éloigner les inopportuns, les goujats et les pédants ? En conclusion, il affirme que la conversation n’est pas qu’un passetemps aimable. Elle permet d’entrelacer notre existence à d’autres existences, en toutes libertés selon notre humeur et non point de parler droit parce qu’on nous l’a ordonné. Enfin, elle reste un hommage au langage, pétri de ressources incommensurables, et promet des flâneries merveilleuses alors que le temps se resserre toujours davantage au sein d’une société qui ne songe qu’à la rentabilité et à l’argent rapide. Voilà un essai tout frais qui plaira à celles et à ceux qui connaissent l’importance de plaire et de savoir écouter. Ed. Desclée de Brouwer – 246 pages André Metzinger

LE CIEL EST TOUT PROCHE L’Apocalypse de Saint Jean est sans doute le livre le plus complexe de la Bible. Un texte qui fascine autant qu’il suscite la mécompréhension. Pour beaucoup, le mot apocalypse se réfère à une catastrophe incommensurable. A la fin de toutes choses ! La faute sans doute au cinéma qui s’est accaparé le terme pour vendre des films d’horreur à la pelle et à la littérature qui s’est entichée de l’expression. Il n’en est pourtant rien. Le dernier ouvrage de la Bible nous raconte le retour du Christ et la victoire finale du Bien sur le Mal en vue d’instaurer le règne de Dieu. Le père Quilici a choisi de décrypter cet ouvrage à la manière d’un imagier, en reprenant chaque thème pour en expliquer la signification. Rédigé en pleine période de persécution des premières communautés chrétiennes, l’auteur ne pouvait pas ignorer la violence du quotidien. A cela, il se référait à une culture très éloignée de la nôtre et usait de références dont nous avons perdu le sens. De surcroît, jamais il n’a souhaité raconter une histoire linéaire, mais nous annoncer un message nimbé de symboles visionnaires. Ici, tout (ou presque !) possède une valeur métaphorique et, afin de saisir le sens de chaque chapitre, il convient de détenir certaines clés. Comment donc comprendre à quoi se réfèrent les mots anges, cavaliers et bêtes monstrueuses ? Sous quel angle aborder les chiffres et les nombres avancés en cours de lecture ? Quelle signification attribuer aux couleurs ? Où se situent les villes nommées ? Comment s’accrocher à la valeur de temps ? En évitant, la dogmatique et une approche trop technique, l’auteur a préféré la vulgarisation. Voilà donc quinze pistes pour lire l’Apocalypse ! Ed. Artège – 187 pages Daniel Bastié


FRÈRE LAURENT DE LA RÉSURRECTION Frère Laurent de la résurrection (1614-1691) est né Nicolas Herman à Hériménil près de Luneville dans l'actuelle Meurthe-et-Moselle. Engagé comme soldat durant la guerre de Trente Ans, il est blessé lors de la bataille de Rambervillers, avant d’abandonner un peu plus tard sa Lorraine dévastée par la famine et la peste. A Paris, il se fait embaucher comme laquais chez Gaspard de Fieubet, conseiller ordinaire du roi et chancelier de la reine. En 1642, il entre chez les Carmes et y prononce ses vœux. Là, il est employé à la cuisine et se charge du métier de savetier jusqu'à sa mort. Aujourd’hui, on retient la simplicité de ce frère convers qui, toujours, a su se montrer attentif aux autres et qui prodiguait des conseils judicieux, devenant peu à peu une référence dans la capitale. Oublié par l’église catholique, il a été redécouvert par le mouvement protestant au milieu du XXe siècle, qui s’est chargé de le rappeler à tous. Sans être canonisé, Laurent de la Résurrection est aujourd’hui considéré comme un repère de la pensée chrétienne, animé par une réflexion spirituelle accessible et lumineuse, finalement très éloignée du langage docte des théologiens de son temps. Quatre siècles plus tard, son existence est devenue un modèle à suivre pour quiconque aimerait s’engager dans les pas de Jésus. Comme tout être humain, son implication dans les ordres a été jalonnée de hauts et de bas, mais ponctuée par une foi intense qui lui a permis de surmonter les obstacles. Son rayonnement continue aujourd’hui de susciter l’admiration. L'un de ses supporters les plus assidus a été un certain abbé Joseph de Beaufort, qui a recueilli ses lettres et a transcrit ses entretiens. La publication des Maximes spirituelles en 1692, suivie des Mœurs et entretiens du frère Laurent de la Résurrection en 1694, lui ont valu une audience considérable, notamment sur le continent américain et au-delà même des frontières de la sphère chrétienne. Denis Sureau revient aujourd’hui sur cet homme humble et … exceptionnel ! Ed. Artège – 148 pages André Metzinger

L’AUDACE DE L’ÉVANGILE Notre société se désacralise et en arrive à oublier Dieu. La faute à une culture chrétienne qui se lézarde, à une planète qui se mondialise ou aux médias qui bousculent les informations et vont trop vite ? Monseigneur Jean-Philippe Nault entend inverser les valeurs et revenir à la foi primitive, celle du tout au Seigneur, sans se prendre la tête, sans chercher des preuves, en laissant loin derrière lui les sceptiques et les pernicieux. Pétri de sa formation d’ingénieur et de son esprit d’entreprise, il propose une vision missionnaire de l’Evangile et invite chacun à s’engager avec ferveur dans un processus pastoral innovant. L’annonce du Salut en Jésus se trouve naturellement à la source du Nouveau Testament et il importe, selon lui, de s’y abreuver pour vivre des jours plus confiants, afin de ne pas craindre les imprévus et de ne pas se laisser abrutir par des principes racoleurs. A partir de son expérience, il parle des nécessités à emprunter, de la route à suivre et, à force d’exemples, nous raconte de quelle manière les croyants se sont réveillés dans une paroisse rurale des Alpes de Haute-Provence, un des diocèses ruraux les plus pauvres de France. Bien entendu, il incombe de secouer les habitudes acquises, de soulever de l’ardeur et, finalement, de se rasséréner en croyant tout simplement. Un beau témoignage du renouveau de l’Église. Ed. Artège – 136 pages Sam Mas


ENRACINÉS ! Tout va à vau-l’eau ! Tout se délite ! Voilà des slogans maintes fois répétés pour parler du présent. Si plusieurs problèmes récurrents de la société moderne ne peuvent pas échapper aux observateurs, y a-t-il de réelles raisons de s’inquiéter ? Avec un regard acéré et beaucoup d’humour, Gabrielle Cluzel propose de briser les codes et de regarder dans le rétroviseur sans nostalgie. Il ne s’agit bien entendu pas de faire l’apologie du passé, mais de décrire une France vivante qui se tourne résolument vers le futur, sans éluder que celui-ci repose sur des assisses établies par nos ancêtres. Cet essai rappelle les forces qui unissent encore et toujours la nation et dont les socles se nomment langue, littérature, culture, armée, religion, etc. Il s’agit également de redécouvrir des vertus égarées dans la modernité, où tout va trop vite, de ressusciter un savoir-vivre qui a parfois été malmené et d’engranger moult efforts pour accueillir l’avenir avec optimisme, mais sans angélisme. Un monde humain reste un monde durable, dont on connaît les racines et au sein duquel on se sent bien. Chacun est héritier d’un patrimoine qui lui a été transmis et auquel il s’identifie. Sans cela, il serait orphelin. Un dicton répète que ce qui ne nous tue pas nous renforce. Malgré les avanies, la France se relève. Les coups font mal, mais fortifient. Projets herculéens ou de trois fois rien, peu importe ! Il est des effets papillon plus lourds de conséquences que de violentes révolutions ! Ed. Artège – 172 pages Paul Huet

JE VIENS VERS TOI Le deuil est une épreuve à traverser. Durant ce temps, il importe de moduler les mots idoines, de se sentir soutenu ou de savoir de quelle manière réconforter les autres affligés par ce drame. Même si les croyants savent que pour Dieu la mort n’existe pas, être séparé définitivement d’un être aimé équivaut à une déchirure profonde. Il s’agit d’une blessure, d’une souffrance authentique. L’amitié, la compassion et la sympathie représentent des baumes nécessaires. Certains cherchent un soutien en lisant la Bible. Joseph Proux est prêtre du diocèse de Limoges. Après avoir enseigné la théologie et l’histoire des religions, il s’est investi en milieu rural autant que dans les villes pour transmettre le message christique. Confronté à la douleur des fidèles, il a jugé nécessaire de commenter l’espérance chrétienne en vue d’escorter tous ceux qui accompagnent leurs proches à l’heure ultime du grand voyage vers le paradis promis. Même s’il est impossible de transmettre des homélies clé en main, le lecteur comprendra le présent ouvrage comme une proposition qui l’aidera à choisir diverses pistes pour les adapter en fonction de sa sensibilité. Il est donc indispensable que chaque personne s’approprie les textes avec la liberté de les moduler, de faire des copiés-collés, d’ajouter, de retrancher ou de compléter cet essai à sa guise. Il peut enfin arriver que les idées soumises ne correspondent nullement à la réalité vécue. Elles auront alors seulement valeur de méthode possible. Ed. Artège – 310 pages Sam Mas


LOST Claude Dussez est photographe, spécialisé dans les portraits d’artistes sur scène et dans les coulisses, maître du noir et blanc. Il a bouclé ses bagages pour aller au bout du monde et voyager aux States, pays aux mille contrastes. Bombay Beach, Slab City, Salton Sea, … deviennent des décors propices à un cadrage artistique. Avec son appareil, il capte le feu des regards, la vivacité des gestes, la fugacité des émotions. Des images immortalisées pour leur densité ou leur intérêt, faisant se succéder une série de paysages ou des humains suspendus en pleine action. Loin du catalogue touristique, il propose un traitement qui baigne dans une poésie prompte à ressusciter les films du vieil Hollywood, ceux dans lesquels se mouvaient Lauren Bacall, Humphrey Bogart, Cary Grant et autre Ray Milland, avec une sensibilité toute particulière qui soulève bien des émotions autant qu’une poussière séculaire. Sur ses clichés planent également le souvenir de Faulkner, Miller, Burroughs et Harrison. Ecrasés sous le soleil ou placés sous le poudroiement des réverbères, chaque instantané témoigne d’un instant particulier pour lutter contre l’effacement et l’érosion de la mémoire. Il est aussi question de rappeler l’état d’une civilisation, prise dans l’étau de la tradition et amenée à progresser vers un futur en proie aux technologies. Ici, le voyage prend une dimension presque spirituelle, avec des embardées sur des traces qui évoquent une kyrielle de souvenirs, qui ne laissent pas indifférent l’homme qui, hier encore, était adolescent. Ce bel ouvrage est émaillé de textes nés sous la plume de Quentin Mouron, auteur de nombreux romans salués un peu partout, dont « Vesoul » et « Notre-Dame-de-laMerci » Ed. Favre – 226 pages Daniel Bastié

L’HISTOIRE DE L’AVIATION Depuis la nuit des temps, les hommes ont imaginé devenir des oiseaux, libres dans les airs et capables de survoler maints territoire en observant d’en haut l’étendue des paysages. Icare a réalisé le défi fou de s’élever au-dessus du labyrinthe de Dédale, avec les conséquences connues. Même s’il s’agit d’un récit mythique, l’être humain n’a eu de cesse de s’imaginer en apesanteur, nanti de la force de le porter entre nuages et terre ferme. Après avoir dessiné des machines primitives et soulevé des ballons chargés d’hélium, il a conçu des avions qui, très vite, sont passés de simples curiosités à moyens opérationnels de se déplacer. Cet ouvrage écrit par Gérard Feldfzer, Michel Polacco, Carl Warner et Stephen Woolford revient sur cette extraordinaire odyssée, en remontant à ses balbutiements pour exhumer le souvenir des frères Wright (à qui on attribue le premier vol motorisé), Louis Blériot (protagoniste du premier voyage au-dessus de la Manche), l’importance stratégique de l’aviation dans la guerre 14-18, les combats (mitraillette au poing), les bombardements de tranchées, la figure légendaire du célèbre Manfred von Richthofen surnommé le Baron rouge, les allers-retours vers les States, la Belle Époque, le triomphe de Charles Lindbergh, la mise en fonction des Zeppelins, la seconde guerre mondiale, la création des porte-avions, le transport postal, la guerre froide, le Vietnam et la conquête des étoiles. Au demeurant, voilà un résumé de l’histoire de l’aviation civile et militaire traité de manière ludique et illustré de magnifiques photographies en noir et blanc. Outre une présentation de son évolution, il n’omet jamais de souligner l’importance croissante de la technologie mise à son service. Ed. Favre – 160 pages Daniel Bastié


PALMYRE : UN PATRIMOINE MUTILÉ Palmyre est une ville antique de Syrie, située à proximité d'une oasis du désert à deux cent dix kilomètres au nord-est de Damas, et dont les ruines sont adjacentes à la ville moderne de Tadmor. Depuis 1980, le site a été classé patrimoine mondial de l'UNESCO. Il y a quelques années, Daesh a délibérément saccagé l’endroit, souhaitant effacer toutes traces des divinités païennes et détourner l’attention des exactions commises dans les territoires occupés, après avoir décapité le directeur des antiquités et des musées. Patrick M. Michel et Yves Ubelmann reviennent sur l’histoire de cette cité caravanière plus de quatre fois millénaire et marquée par les conquêtes successives (perses, grecques, romaines, …). Cet ouvrage propose un voyage temporel et aligne des archives provenant de la mission archéologique suisse des années 1950 et des prises de vue captées en 2016, peu après que le monde se soit ému des ravages provoqués sur le terrain par l’Etat islamique. Sans jamais jouer la carte du catalogue touristique, ce livre richement illustré entend faire aimer une ville indissociable de la mémoire collective et rappeler son rôle de témoin essentiel afin de pérenniser le souvenir de notre Histoire commune. Celle d’hommes et de femmes qui se sont évertués à développer le commercer, à instaurer la paix et à faire progresser les arts et la science. Ed. Favre - 152 pages Paul Huet

LA VOIE DE LA TORTUE Nous habitons la terre et elle est notre maison. Notre mission consiste à l’entretenir et à la transmettre à nos enfants sans l’endommager, en père de famille exemplaire. Alors qu’elle va vraiment mal, les questions d’écologie s’imposent au fronton de l’actualité. Néanmoins pour agir, il importe d’être soi, de se sentir bien dans sa tête et dans son corps. « La voie de la tortue » s’inscrit dans le mouvement actuel d’écospiritualité, qui consiste à honorer le vivant au quotidien et d’éveiller notre esprit à notre réalité qui résonne à travers les traditions et nos engagements. Les rêves initiatiques et spirituels peuvent aider à ouvrir la brèche qui mène au chemin de la vraie nature. Peu à peu, chacun peut parvenir à se connecter au sentiment d’unité qui lie toutes choses avec, pour conséquence, de modifier notre rapport à ce qui nous entoure, à voir les gens différemment et à acquérir une sérénité enviable. La terre est à aimer, à protéger, à redécouvrir ... mais pas isolément ! Disons : de concert. Ensemble ! Cet ouvrage rédigé par Denise Kikou Gilliand se clôt par une série de témoignages vivifiants et des statistiques qui aident à cerner le problème. Ed. Favre - 164 pages André Metzinger


LA FILLE À MA PLACE Voilà un roman noir qui montre à quel point l’amour peut transformer une personne et la mener à commettre l’irréparable. En réalisant la trahison de l’homme qu’elle chérit, Nin voit son univers s’écrouler. Sans vraiment prendre conscience de la gravité de son geste, elle le tue. Débute alors une fuite en avant pour échapper à la justice autant que pour partir à la recherche d’elle-même. Au fond, qui est-elle ? Elle a vécu l’abandon d’un père, les abus de celui qui a ensuite occupé une place à côté de sa mère. Dans sa cavale, elle multiplie les astuces, se travestit, change d’identité et traverse les frontières. Identifier ses failles et faire tomber le masque réclame énormément de courage. Au contact de ceux qu’elle croise, elle ressuscite lentement et met de la distance par rapport au sentiment de culpabilité qui la tétanisait jusqu’alors. Même si sa vie ne sera plus ce qu’elle a été, elle refuse la résilience. A mesure que les chapitres s’égrènent, l’autrice fait apparaître l’ombre d’une sœur jumelle, longtemps tenue cachée, et qui émerge avec soudaineté, comblant un vide et apportant des réponses au sentiment de mal-être perçu par l’héroïne. Bien entendu, dans son voyage introspectif autant que physique, Nin multiplie les approches, s’allie des adjuvants et renaît pour devenir forte et stable. En montrant par la fiction les fêlures qui entravent le bonheur, Catherine Le Goff illustre parfaitement que jamais rien n’est totalement acquis ni perdu. Ed. Favre – 192 pages Sylvie Van Laere

SUR LES BALCONS DU CIEL L’adolescence est un passage obligatoire pour chacun. Un moment où tout se bouscule, au cours duquel le corps se modifie et où les esprits s’échauffent. Vadim est un jeune semblable à ceux de sa classe, intuitif et dynamique. Néanmoins, il peine à surmonter la mort de son père. Lorsque son amie meurt à son tour, son quotidien s’effondre. Paralysé par la douleur, il brosse les cours, refuse de retourner au collège et s’isole. Pour seule échappatoire, il musarde sur le toit de l’immeuble qu’il occupe. Rien ne peut sembler le sauver de la mélancolie qui le terrasse. Au hasard d’une chute, il croise le regard d’Alma, une jeune fille de son âge. Avec un style direct, Sophie Henrionnet raconte l’histoire de deux solitudes qui s’amadouent, s’épaulent, se heurtent et finissent par s’apprécier. Entre rire et larmes, elle nous propose un récit à hauteur d’épaules, sans fioritures inutiles et dans un langage oral qui fait mouche. Les dialogues s’imprègnent d’une véritable authenticité et vont directement au cœur. « Sur les balcons du ciel » est son cinquième roman, écrit pour la jeunesse mais qui ne déplaira pas aux aînés. Ed du Rocher – 206 pages Daniel Bastié


ENFIN LIBRE ! Asia Bibi est cette chrétienne pakistanaise qui a ému le monde. L’affaire a rapidement pris une ampleur incroyable lorsque son pourvoi en appel de 2014 a confirmé la sentence prononcée en 2009 : à savoir, la peine de mort pour motif de blasphème contre l’Islam ! Regard dans le rétroviseur. Cette ouvrière agricole née en 1971 participe chaque année à une cueillette de fruits pour le compte d’un propriétaire musulman. Déshydratée sous un soleil de plomb, elle décide d’aller chercher de l’eau et d’en apporter à ses compagnes, après en avoir bu un gobelet. L’une de ces dernières refuse le récipient qu’elle tend et affirme qu’elle a corrompu le puits, parce qu’une personne qui lit la Bible est impure. Asia tente de s’expliquer et postule que jamais le prophète Mohamed n’a tenu de pareils propos. S'ensuit un échange plutôt vif, auquel s’ajoutent d’autres partenaires qui l’accusent : « Comment une non-musulmane ose-t-elle parler du Coran ? » Il est clair que, à leurs yeux, elle vient de commettre un blasphème ! La police intervient pour la protéger de la vindicte du groupe, avant qu’une plainte ne soit déposée. Dès lors, tout s’emballe : la fautive est arrêtée et écrouée, tandis que sa famille doit vivre dans la clandestinité. Le juge la condamne à la pendaison. Son avocat interjette appel de la décision et un mollah promet une énorme récompense financière (équivalente à 4.500 euros) à quiconque tuerait l’infidèle. Le pays s’embrase et les islamistes manifestent pour que la condamnation soit maintenue, tandis que l’homme de loi chargé de défendre sa cliente subit des pressions de partout et préfère fuir le territoire. En 2019 et suite à maintes actions internationales (dont la diplomatie et des pétitions d’associations diverses), Asia est acquittée et accepte la proposition de venir vivre en France. Anne-Isabelle Tollet a travaillé la main dans la main avec Asia pour raconter son calvaire. Sans travestissements, il est ici question d’un témoignage à la première personne, rappelant que le droit de tous n’est pas garanti partout dans le monde et que les extrémismes religieux plongent certaines sociétés dans l’obscurantisme moyenâgeux, vecteurs de ségrégation et de haine. Bien entendu, au fil des pages, on découvre que le Pakistan s’est vu fortement divisé et qu’une partie des citoyens s’est prononcée pour la réprobation des lois coraniques. Ed. du Rocher – 206 pages Amélie Collard

LE CORPS DE SANKARA L’Afrique noire n’est pas qu’une succession de paysages de cartes postales ni le territoire de toutes les possibilités. Daurat traîne un vécu que peu d’hommes lui envient. Divorcé trois fois et amer, il vient de décrocher un contrat au Burkina Faso. A un âge où d’autres songent à préparer leur retraite, il accepte de relancer une mine d’or. De son côté, Lucie, toujours aux études, vient de rejoindre une association humanitaire à Ouagadougou, afin d’y préparer son doctorat en sciences de l’environnement. A cela, elle se remet péniblement d’une rupture sentimentale. Dans un pays où rien ne va, tous deux lient de solides liens d’amitié tandis que, autour d’eux, la société dégénère et le peuple se soulève. Ce roman plein de fureur raconte le cheminement de deux déracinés en proie à leurs démons et confrontés à une réalité bien plus terrible encore. A des lieues de tout ce qu’ils imaginaient en préparant leurs valises et en montant à bord d’un avion, ils s’opposent à un monde d’une rare violence, plombé par un climat tropical de type soudano-sahélien et où la sécurité ne tient qu’à un fil. Agnès Clancier est une romancière férue de beaux projets et dotée d’une plume talentueuse. A la perfection, elle restitue ici une atmosphère pesante qui rend chaque journée incertaine, où la politique part en vrille, où les forces de l’ordre pratiquent la corruption et où le quotidien s’assimile à un baril de poudre prêt à exploser. Emotions, aventures, sentiments et descriptions se mélangent pour servir un récit tour à tour documentaire et à lire comme une fiction. Ed. du Rocher – 278 pages Paul Huet


LE LIBÉRATEUR DE BRUXELLES – HOMMAGE À L’ÉCHEVIN T’SERCLAES Roeland van der Borght est un poète imaginaire, et clerc de l’Amman de Bruxelles en 1388. Il raconte ici la tragédie de Éverard t'Serclaes, le Libérateur de Bruxelles, lâchement assassiné, et vengé par les Bruxellois. Lorsque l’on s’aperçoit que l’assassinat de t’Serclaes est décrit dans les « Brabantse Yeesten » par Jan van Boendale (1279-1361) avec la précision d’un témoin oculaire, alors que ce chroniqueur de l’abbaye de Groenendael était mort depuis vingt-sept années au moment des faits, on est enclin à se poser des questions sur la véracité de son récit. Sans doute son successeur n’a-t-il pas jugé bon de signer la suite de son propre nom, préférant le sillage illustre sans se soucier de la chronologie et de la vraisemblance. On nage donc bien dans la fiction. Cependant, un cul-de-lampe sur la façade de l’Hôtel de Ville illustre l’agression. Alors, Éverard t’Serclaes, une figure historique ? Une légende ? Mais si la fiction se glisse quelquefois dans le présent récit, jusqu’à bousculer une vérité historique qui lui paraît néanmoins illusoire, l'auteur a cherché à rendre au Libérateur de la ville de Bruxelles une justice qui ne lui semble plus pleinement reconnue aujourd’hui. Bien sûr, on caresse le genou d’un gisant dans la rue Charles Buls, mais sait-on que c’est à cet endroit précis qu’il mourut dans d’atroces souffrances au lendemain de Pâques 1388, là où se trouvait en ces temps le rez-de-chaussée de la Maison de l’Étoile, bureau de l’officier ducal, dit Amman de Bruxelles ? L’auteur a cherché à regrouper dans le roman les signes, événements et monuments distinctifs de sa ville : Manneken Pis, l’iris, le lambik, l’Ommegang, etc. en se focalisant non sur le coup d’éclat que fut la libération de Bruxelles par Éverard t’Serclaes, mais bien sur l’attentat dont il fut victime, en proposant un autre point de vue sur ces faits. Tous les personnages et faits ont sans doute existé, mais rien n’indique leur authenticité. Traité en trois temps, les circonstances, le crime, la vengeance, le roman se lit comme un policier, mais se base sur une longue recherche facilitée par les archives du corps d’Arbalétriers de St Georges de la ville de Bruxelles. Éditions Memogrames - 260 pages Sam Mas

LES BEAUX JOURS Annette est persuadée que sa vie s’arrêtera à la puberté. Une certitude formulée par une de ses grandsmères. Durant ses années de jeunesse, elle appréhende l’instant fatidique, craint pour sa vie, anticipe ce qu’elle ne parvient pas à imaginer. Que se passera-t-il à l’heure définie ? Son existence basculera-t-elle vraiment ? Chercher à comprendre l’a aidée à voir se déplier les semaines. Contrairement à sa cousine Jeannette, enferrée dans la certitude d’être promise à l’enfer, la jeune fille se regimbe et refuse de se soumettre à des superstitions d’une autre époque. Prix RTL-TVI pour son premier roman, Annie Préaux raconte le parcours d’une lycéenne a priori ordinaire, plutôt studieuse et amicale, coincée dans un monde où l’influence de certains aînés endigue tous projets d’avenir. L’occasion surtout de dénoncer le fanatisme religieux et des préceptes bibliques tels que toute femme qui perd du sang est impure. Sans railler qui que ce soit, elle parle d’un temps qu’on espère révolu, même si on sait qu’une mauvaise interprétation des textes sacrés peut mener à des extrêmes fâcheux. Puis, malgré les menaces et les prédictions, la vie se poursuit et mène les adolescentes d’hier à un âge vénérable, rythmé par la beauté des jours et la force qui permet de voir, avec ténacité et courage, à travers l’obscurité profonde. Ed. M.E.O. – 145 pages Sylvie Van Laere


BAIE SAINT-PAUL Lorsque John Mac Dolan a débarqué à Shortfalls, une bourgade flanquée aux confins du Yuko (Canada), personne ne s’est intéressé à lui, un peu comme si son passé n’existait pas ni son présent. Néanmoins, il faisait partie des légendes de la région depuis la fameuse ruée vers l’or et de laquelle les habitants feignaient avoir tout oublié. Que venait-il chercher ? Du métal précieux ? Des souvenirs ? Une quête à réaliser ? De nombreuses années plus tard, Camille Dorchamp, hôtesse de l’air française, découvre une lettre d’un improbable shérif. Titillée par la curiosité, elle se lance à la poursuite d’un homme qu’elle n’a pas connu. Jean-Manuel Saëz signe ici son premier roman et nous emporte dans des paysages interminables pétris d’une neige épaisse. On songe forcément aux livres de Jack London et on espère y voir surgir Croc-Blanc, des traineaux tractés par des chiens et des tavernes où l’alcool coule à flot. L’auteur a l’intelligence de s’écarter des poncifs et nous parle d’héroïsme, d’insouciance et d’oubli, tout en brossant un magnifique portrait de femme entraînée à errer dans des traces qui ne sont pas les siennes. Ed. M.E.O. – 175 pages André Metzinger

LE CHOIX DE MIA Le jour des funérailles de Mia, Jean relève à tous sa liaison avec celle qu’on inhume. Une mère de famille exemplaire, une enseignante appréciée et une épouse fidèle. Son aveu déclenche la colère des proches, qui crient à l’insulte. Une échauffourée s’engage et oppose le veuf à l’amant. L’intervention de la police calme les deux parties. Relaxé après une courte garde à vue, il se remémore sa liaison intense et, jusque-là, tenue secrète. Le film du passé se libère devant ses yeux et lui livre une série d’images ardentes. Il revoit surtout ces chambres d’hôtels anonymes, où tous deux pouvaient donner libre cours à leurs désirs, loin du regard des autres et sans craindre une dénonciation. Chaque porte fermée derrière eux représentait un commencement, un renouveau, une étape supplémentaire mise au service d’un amour illicite. Malgré le deuil, le protagoniste sait que l’existence se poursuit quoi qu’il advienne et que personne ne peut dénouer ce qui a été attaché. Il évoque les moments de félicité, son statut d’ami de la famille, un père autoritaire et une mère mêle-tout. Dans son crâne, tout se met subitement à s’agiter, à se reconstituer comme un puzzle aux mille pièces égarées çà et là. Jean-Pierre Balfroid propose une mosaïque un brin nostalgique et qui se parfume d’effluves d’autrefois. « Le choix de Mia », son premier roman, louvoie en permanence entre tension dramatique, non-conformisme et humour aux confins du non-sense. Ed. M.E.O. – 282 pages Sam Mas

ON NE COUPE PAS LES AILES AUX ANGES S’agit-il déjà des effets du réchauffement climatique ? Une canicule s’abat sur la région et déclenche mille contradictions. Ecrasés sous une chaleur de plomb, les habitants ne savent plus vers quel dieu se tourner. Néanmoins, la société doit continuer de fonctionner, en s’adaptant, en espérant que la météo se montrera rapidement clémente. Chacun hurle que Cela ne peut pas se prolonger ! Dans ce contexte particulièrement oppressant, Arno, jeune homosexuel, subit une agression peu banale. S’enclenche une onde de choc qui impacte à la fois son partenaire Bastian, ainsi que l’inspecteur chargé de débusquer les fautifs. Claude Donnay signe un roman apocalyptique qui mélange les genres et fait le grand écart entre le polar et l’essai, afin de rappeler l’urgence de revoir notre façon d’exploiter la terre. Nos repères sont-ils vraiment en train de fondre ? Nos digues, que nous pensions infranchissables, disparaitront-elles sous l’écume ? Pire ! Comment l’être humain s’adaptera-t-il ? Ne faut-il pas craindre que, pressé par les difficultés, il surgisse de lui ce qu’il y entretient de pire ? L’auteur est régulièrement repris au catalogue des éditions M.E.O. et s’est manifesté à d’innombrables reprises avec des recueils de nouvelles, des plaquettes de poésies et a suscité l’unanimité des lecteurs avec ses deux premiers romans. Ed. M.E.O. – 282 pages


L’ÉCUME DES LAMES Jean-Marie Quéméner nous plonge en plein XVIIIe siècle, sous le règne de Louis XV, période particulièrement chaude au cours de laquelle les nations européennes se livrent des guerres ininterrompues. Une époque pas moins pire que la nôtre, où tous les coups sont permis pour s’enrichir ou briguer davantage de pouvoir. Yann Kervadec est de retour avec pour mission officielle de convoyer du café volé dans les jardins botaniques du monarque vers la Martinique. Chemin faisant, il sait qu’il devra affronter la flotte hollandaise même si, pour tous, il doit retrouver un diamant passé entre les mains des Espagnols. Ce roman sent l’embrun et le vent du large, avec des combats épiques, du sang et de l’amour. Pour accoster aux Antilles, il aura besoin de tout son équipage, de Médeline son épouse et ancienne esclave, de Finn son meilleur ami et d’Ann Bonny et Mary Read, farouches et sauvages femmes de tête, ainsi que d’Abiola le colosse noir. Ce volume fait naturellement suite à « La république des pirates », paru il y a peu chez le même éditeur. Même si les comparaisons valent ce qu’elles valent, il y a un peu de Robert Louis Stevenson et de Daniel Defoe dans cette aventure qui jongle à fond avec les codes du genre. La force du récit et la truculence des personnages en font un livre qu’on découvre sans ennui et qui nous propose une vision cinématographique du crépuscule de la piraterie. Assurément, la série télé « Black Sails » n’est pas loin et cela est dû au fait que les protagonistes de « L’écume des lames » passent par les mêmes endroits que ceux traversés par le capitaine Flint et sa bande. Fougue, action et humour sont au rendez-vous ! Ed. Plon -232 pages Paul Huet

LA SECONDE VIE DE RACHEL BAKER Vivre dans la résilience vaut-il mieux que la mort ? Rachel Baker a été traumatisée et sait qu’elle n’a pas d’alternative que celle d’avancer dans un monde de brutes. Serveuse dans un établissement perdu au fond de l’Alabama, elle menait jusque-là une existence sans histoires. Ni excellente ni exécrable. Le ronron ! Puis, un soir parmi tant d’autres, trois hommes armés ont fait irruption sur son lieu de travail et ont ouvert le feu. Un vrai carnage. Plus une seule personne debout. Toutes marinant dans leur propre sang. Sauf elle ! Pourquoi ? Qu’est-ce qui les a poussés à ne pas l’abattre, à lui laisser une chance ? Elle a beau s’interroger, elle ne comprend pas. Depuis, elle dérive, incapable de regarder en arrière, profondément stigmatisée par cette tragédie. Ses choix l’amène à croiser la route de Follers, un flic bourru et sans illusions, mais également des femmes fortes dont le témoignage lui redonne la force de rebondir. Lucie Brémeault propose un magnifique roman au féminin, qui sculpte les états d’âme et montre à quel point les atrocités peuvent pousser quelqu’un à aller de l’avant, à chercher en soi la petite étincelle qui permet de ne pas fléchir et de s’ouvrir aux autres. Il s’agit du premier roman d’une photographe autrice. Une playlist Spotify peut être écoutée durant la lecture. Pour ce faire, abonnez-vous à « La seconde vie de Rachel Baker ». Ed. Plon – 276 pages Daniel Bastié


ÉCHOGRAPHIE DU VIDE Emmanuelle a tout pour vivre heureuse. Un bon job, une famille aimante, un boy-friend charmant. Oui, mais … Contrairement à beaucoup de filles de son âge, elle ne souhaite pas avoir d’enfant. Elle ne s’en sent pas l’envie. Pire, le besoin ! Alors, pour profiter un maximum du confort, elle décide d’opérer un choix irréversible : se faire ligaturer les trompes. Elle a déjà pris rendez-vous à l’hôpital et a tout planifié. L’opération devrait est planifiée dans quatre mois. Le temps de voir venir et, surtout, d’annoncer la nouvelle à ses proches. Pourtant, malgré des phrases préconstruites, elle appréhende leur réaction. Elle entend déjà les reproches : procréer est un bonheur. Que nenni ! Et certainement pas pour elle ! Débute alors un compte à rebours. Camille Bonvalet va à l’encontre des valeurs actuelles et présente l’enfantement comme une douleur qui bride les libertés. Avec Emmanuelle, elle façonne le portrait d’une battante qui refuse de se laisser rattraper par le système et qui, sous un jour un peu compliqué, se révèle une femme adorable et attachante. Ira-t-elle jusqu’au bout ? « Échographie du vide » est le premier roman d’une autrice née en 1992 et qui scrute le monde en prenant soin de le regarder sans œillères. Edifiant d’authenticité ! Ed. Autrement – 183 pages Amélie Collard

LE DÉFI Revoilà enfin en français le roman longtemps censuré de Vita Sackville-West, épuisé depuis un quart de siècle et écrit à quatre mains avec son amante Violet Trefusis, jeune aristocrate anglaise. Un livre qui se veut une ode à l’amour libre et qui a défié la morale de son époque. A titre de rappel, ce manuscrit a été publié en 1925 et s’est directement opposé à l’ordre établi. Avec le recul de plusieurs décennies, le style a perdu de sa virulence et se contente de proposer le reflet de la société britannique de l’entre-deuxguerres, avec une hypocrisie consensuelle et des convenances à respecter. On songe ici un peu à l’anathème qui a frappé « L’amant de Lady Chatterley », foudroyé par le scandale avant d’être encensé pour ses valeurs littéraires. Que sait-on des deux autrices. Vita et Violet se sont croisées lorsqu’elles étaient gamines. Quatorze ans après cette première rencontre, elles ont réalisé que leur amitié se teintait également d’une puissante attirance physique. Bien que mariées, elles ont décidé d'abandonner tout et tout le monde et de s'installer en France pour vivre leur amour à l’abri du regard des leurs. Mais elles ont été retrouvées par leurs maris respectifs qui ont usé de mille stratagèmes pour mettre un terme à cette idylle et les ramener dans le giron de la société. Pour ceux que cela intéresse, la réalisatrice Chanya Button a mis en scène l’écrivaine sous les traits de la comédienne Gemma Arterton et raconte sa relation saphique avec l’écrivaine Virginia Wolff (une autre relation charnelle). Le long métrage a été distribué sous le titre « Vita et Virginia » (2020). Tout un programme ! Ed. Autrement – 418 pages André Metzinger


UN AMOUR À WATERLOO Attention, il ne s’agit pas d’un roman, mais d’un assemblage de six nouvelles dues à la plume de François Bott, ancien rédacteur en chef des pages littéraires de L’Express et fondateur de Le Magazine littéraire ! Père de trente-cinq ouvrages, il maîtrise les rouages de l’écriture et sait peser sur les mots afin de les organiser de manière idoine. Le lire équivaut à un réel plaisir. Plus que les récits eux-mêmes, ce recueil est l’opportunité de dresser des portraits faits de chair et d’esprit, de raconter des femmes et des hommes épris de passion pour les belles choses et engagés dans la voie du beau et du bon. Assez vite, on remarque que chaque protagoniste évolue au fil de ses désirs et de ses souvenirs, prolonge ce qu’il a entrepris depuis longtemps. Il y a aussi l’ombre de personnages historiques insignes qui pèse sur le vécu de chacun et qui rythme ses actions, autant que ses pensées. L’écrivain utilise ici l’Histoire pour faire jaillir la poésie, le romantisme et l’humour de situations a priori extrêmement banales. Au fil des pages, les noms défilent : Chateaubriand, Zweig, Mallarmé, Dumas, Stendhal, Burgess, etc. Toutefois, il ne faut pas se défier, l’écriture reste fluide, d’une grande précision et jamais empreinte de forfanterie. François Bott se veut un écrivain d’une rare culture et jamais il n’appuie sur le moteur des références pour nous offrir du didactisme ni une leçon de lettres. Au fil des avancées, on embarque pour des coups de foudre, du désir, des âmes à raccommoder et une humanité tangible, sans super-héros ni dons destinés à faire fondre les cœurs. Ed. La Table Ronde – 116 pages Daniel Bastié

L’INVITATION À LA VIE CONJUGALE Finement observé, « L’invitation à la vie conjugale » est une pépite d’humour british qui retrace le quotidien de plusieurs couples de la middle class et d’âge moyen. Dans le cadre d’une invitation, plusieurs ménages seront amenés à se côtoyer. Passé ce pitch de départ, l’autrice s’amuse à entrer dans le foyer de chacun pour y relever les bonheurs et les travers, procédant par cercles concentriques. On y découvre l’art de vivre à l’anglaise, avec des mœurs qui diffèrent des nôtres, une manière de penser à des lieues de celle de la Belgique et de la France séculaires. Une fois les acteurs cernés, elle prend plaisir à les préparer au fameux moment vers lequel tous convergent. Mais on le devine, le propos est ailleurs. Sans railleries, elle épingle l’ego, la routine ou les lâchetés et nous offre un miroir de notre quotidien car, bien que situé de l’autre côté de la mer, chacun peut se retrouver ci et là. Jamais caricatural, ce roman est jubilatoire et est fortement déconseillé aux jeunes mariés. Voilà un extrait en guise d’apéritif : « Rachel cligna des yeux, sèchement. Dans le temps, ses yeux étaient dorés. On l'avait présentée à Thomas comme la seule fille d'Oxford aux yeux authentiquement dorés. C'était en 1961. Presque trente ans plus tard, elle était maintenant la seule femme de sa connaissance à Londres aux yeux couleur d'eau de vaisselle. C'était bien ça, une espèce de brun foncé crémeux. Incolores comme des flocons d'avoine, mouchetés d'un safran terne. Ces pensées méchantes firent sourire Thomas ». Ed. La Table Ronde – 364 pages Amélie Collard


L’AN 40 – LA BATAILLE DE FRANCE La bataille de France reste gravée dans les mémoires comme étant l’invasion allemande de mai 1940. Un véritable rouleau-compresseur destiné à faire capituler la nation agressée. Malgré une farouche résistance, les troupes nationales n’ont pas pu opposer une résistance optimale. Néanmoins, chaque bataillon engagé dans le combat a su faire preuve de courage et de ténacité. Eric Teyssier, chroniqueur pour la revue « Historia », revient sur les semaines terribles vécues par cinq braves aux commandes d’un char lourd B1 bis, blindé méconnu et même supérieur aux tanks de la Wehrmacht. A hauteur d’épaules, il raconte le quotidien de Boissier, Mérindol, Ziegelmeyer, Dumas et Vermotte enfermés dans le ventre d’acier de la machine de guerre, passant de Sedan à Montpellier, de Compiègne à Orléans. Au passage, il suggère trois visions (du point de vue du gouvernement, des militaires présents sur le terrain et des civils) de l’offensive ennemie et signe une fresque humaine dans laquelle il ravive les gestes quotidiens, les émotions, les peurs, les moments de courage et repense l’Histoire par l’anecdote, en prenant grand soin de ne jamais écorner la vérité et en rendant hommage aux soixante mille Français qui ont tenu tête à l’armée régulière venue de l’autre côté du Rhin. L’auteur s’est naturellement inspiré de moult témoignages pour étayer son récit et nous faire vivre un huis clos dans la carcasse du fameux engin métallique. Tous les exploits relatés ici ont été retrouvés dans les carnets de bord des tankistes ou ont fait l’objet d’articles dans des journaux. Ed. Michalon – 464 pages Paul Huet

LE CANTIQUE DU TOUNGOUSE On nomme Toungouses ou Toungouzes un groupe de peuples de Sibérie et du Nord-Est de la Chine, dont font partie les Evenks. Il s’agit d’une communauté mal connue chez nous et qui représente près de soixante mille âmes. Par une froide nuit d’hiver, le jeune Michka Maltchakitov est poursuivi par des hommes. Il tente de leur échapper en longeant le lac Baïkal. Quel sort lui réservent-t-ils ? Rien de bon, puisqu’il est soupçonné d’avoir bouté le feu à un bâtiment ! Chemin faisant, il revient sur les lieux de son enfance. Elevé à l’école de la Taïga, le fugitif incarne des valeurs trop souvent absentes du monde moderne. Il sait communier avec la nature et connaît la valeur des bonheurs simples. Sans le savoir, il est progressivement invité à pratiquer une quête de soi pour remonter à l’origine de ses souvenirs, en n’omettant jamais la méditation et l’action. Oleg Ermakov signe un hymne à la beauté du monde et déclare un amour immodéré à sa région. Avec une écriture romanesque, il livre un récit qui mélange les genres et qui devient parabole ou fable. Bien entendu, ce choix narratif pourrait déstabiliser certains lecteurs non-avertis. Mais a-t-on besoin de mise en garde ou de préface ? Un livre se découvre seul, en prenant le temps et en se laissant porter par le tempo ou les ciselures souhaitées par l’auteur. Tour à tour poétique, méditatif et rythmé, « Le cantique du Toungouse » se veut l’histoire du gouffre qui s’ouvre entre traditions et modernité. Une incursion dans un univers bien éloigné du nôtre. Dépaysement garanti ! Ed. des Syrtes – 336 pages André Metzinger


MAMMA MARIA Nous possédons toutes des souvenirs d’une Italie parfumée et radieuse. Un pays où le farniente a été établi en précepte. Un monde frappé sous un soleil poudroyant. Des assiettes remplies de pâtes et de sauce servie à volonté. Aussi, de délicieux vins à déguster sous une feuillée ! Serena Giuliano est bien sûr italienne, mais elle possède la particularité de rédiger en français. Après un premier roman remarqué (« Ciao Bella »), elle revient pour un deuxième tour de piste et nous présente Maria, celle qui mène tout le monde à la baguette comme une mamma ou une nonna. Celle que personne ne peut ne pas aimer et qui le rend bien. Après avoir quitté Paris, la narratrice est revenue là où elle a vécu, afin de revivre des instants bénis et retrouver celles et ceux qui ont marqué sa jeunesse. L’occasion de se lancer dans une évocation des heures heureuses, d’observer dans le rétroviseur et de comparer. Au fil des chapitres, on comprend à quel point l’enfance marque le présent et influe sur le parcours de chacun. Il ne s’agit pas à proprement parler d’un roman révolutionnaire, mais d’un livre qui fait chaud au cœur, qui interroge sur les choses simples et rassurantes, qui permet de s’identifier, qui prône un retour aux sources, qui dédramatise, qui parle avec les mains et qui fait adorer la mer et les villages aux ruelles étriquées. Voilà un extrait en guise d’apéritif : « Ici, on vient échanger quelques mots, partager un apéro, esquiver la solitude ou écouter Adriano Celentano. Moi, je viens pour me persuader que j’ai bien fait de quitter Paris … et l’autre abruti. Il fait quand même meilleur ici. » Les pages 233 et 234 proposent une série de titres de chansons à écouter en dévorant « Mamma Maria ». Certo, rien que du … Celentano ! Ed.Cherche Midi – 238 pages Amélie Collard

UN DÉVELOPPEMENT TRÈS PERSONNEL La vie de Sophie est bouleversée par la fulgurance du succès. Ancienne coach en développement personnel, elle vient de publier un livre que les lecteurs s’arrachent. Du coup, son quotidien bascule et, en quelques semaines, elle fait la une des médias, court d’une interview à l’autre, multiplie les conférences et est happée par mille sollicitations. Pas facile au début de se frayer un chemin dans l’univers du vedettariat car les concurrents peuvent se révéler atrocement jaloux et semer des ornières pour faire chuter la star nouvellement proclamée. Avec son tempérament de winneuse, Sophia refuse de s’en laisser compter et fonce deux fois plus vite, avec le risque avéré de perdre la notion de réalité. Mais qui tournerait le dos à pareil triomphe ? Puis, lentement, certaines valeurs la ramènent sur terre. Pourquoi son mari a-t-il démissionné d’un job bien rémunéré ou, plus simplement, pour quelles raisons s’est-il barré avec la caisse de la société ? C’est aussi à ce moment que leur fils envisage d’aller poursuivre ses études aux States. Les avatars obligent la jeune femme à redistribuer les cartes, en se répétant que les éléments extérieurs ne conditionnent pas sa vie. Avant tout, elle est actrice de son présent et son rôle consiste à veiller sur les siens. Si la gloire est un miroir aux alouettes, elle engendre parfois bien des contrariétés, de la fatigue et du désespoir. Comment n’a-t-elle pas vu sa famille s’étioler ? Elle souhaiterait pleurer à s’en arracher la peau des joues. Heureusement, Sabrina Philippe nous propose une histoire qui se conclut de manière positive. Et quant à ce que l’Univers veut pour les protagonistes, personne n’en possède la moindre idée ! Un verset de la Bible est référencé au début de chaque chapitre. Voilà un livre résolument positif qui délivre un message profond, nourri et enthousiaste sur la vie ! Ed. Flammarion – 288 pages Amélie Collard


J’AI UN PROJET : DEVENIR FOU C'est le "Journal" pas vraiment intime d'un écrivain tantôt en proie au doute, tantôt sûr de lui avec, dans les deux cas, l'obsession d'être édité. Une vieille amie écrivaine de talent m'a dit un jour "Il y a beaucoup d'écrivant mais très peu d'écrivains", ce à quoi lui rétorqué-je "Mais quelle est la différence ?" Elle me répondit "L'écrivain a un style, une "patte" reconnaissable entre toutes"... Il est indéniable qu’Eric Neirynck fait partie de cette catégorie et tant pis si, en lisant ces lignes, l'auteur se moquera ou s'irritera quelque peu, lui qui dans ce "Journal" s'en réfère à Bukowski (une de ses icônes) lorsqu'il s'agit de définir ce fameux "style" : "Le style est un bon outil pour dire ce que tu as à dire, le style est une pine qui bande mou devant le con mirobolant de l'univers". Donc, ce grand admirateur de Bukowski et de Céline est bien un écrivain. Un écrivain au style direct, un écrivain qui ne s'embarrasse pas de fioritures et qui écrit "juste". Un écrivain qui possède une perception aigue des êtres et des choses qui l'entourent. Un "Journal" que tout écrivain (débutant ou pas) devrait lire car il est certain qu'il découvrirait au hasard des pages des réflexions, des doutes, des déceptions ou encore des espoirs qui lui sont propre... Extraits : "... Mais voilà... on ne choisit pas sa vie, c'est elle qui vous choisit. Enfin, c'est ce que disait mon père. Sans doute pour se convaincre qu'il n'avait pas raté la sienne..." "... J'ai passé la journée à poil à zapper sur mon vieux poste de télé. Que le monde est triste. Quand je pense que certains n'ont rien d'autre dans leur vie que cette soi-disant fenêtre sur le monde, j'ai envie de pleurer..." Un "Journal" jouissif où le politiquement correct et les codes imposés sont malmenés. Extrait : "... Des mecs comme Céline, Rey ou Houellebecq me parlent, mais à part eux et quelques autres, la littérature francophone contemporaine est avant tout de la masturbation intellectuelle. Un fouillis inutile de textes prétentieux et sans intérêt... Céline en parlant de Proust disait avec finesse : "Trois cents pages pour faire comprendre que Tutur encule Tatave, c'est trop." Et je ne peux lui donner tort sur le fond, quel besoin ont tous ces auteurs de décrire ses scènes sur des dizaines de pages ?..." Un "Journal" où il est aussi beaucoup question de sexe. L'auteur y va franco, sans tabou avec des passages crus et parfois crades. Et là aussi, des moments joyeux et d'autres moins... bandant ! Ne considérons que les premiers... Extrait : "... Je suis encore sur le cul de ses paroles : " Putain j'aime tes couilles ! Elles sont superbes ! " C'est bien la première fois qu'une femme me faisait une telle déclaration ! On m'avait déjà dit, quand j'avais la trentaine, que j'avais un cul pas trop moche, mais de belles couilles, ça jamais ! ..." Et à propos de couilles, dans ses remerciements, l'auteur ne manque pas de remercier l'éditeur Eric Lamiroy qui en a eu pour publier son "Journal". Il est somme tout réconfortant de savoir qu'il y a des éditeurs qui n'hésitent pas à sortir des livres sortant des sentiers battus. Un "Journal" où l'humour est également présent mais ne dit-on pas qu'il est la politesse du désespoir ? Même si le mot "espoir" convient mieux à l'écrivain Eric Neirynck ... l'espoir quasi certain de le voir un jour accéder à son rêve de vivre de sa plume ! A lire d'urgence ! Editions Lamiroy - 120 pages Alain Magerotte


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.