Pour une culture de l’autorité démocratique en Polynésie française

Page 1

Pour une culture de l’autorité démocratique en Polynésie française Christian MORHAIN

(IA-IPR EVS)

L’École

est à la fois le lieu de la transmission des connaissances et celui de l’apprentissage de la citoyenneté et du partage des valeurs de la République telles que la liberté, l’égalité, la fraternité, la laïcité, le refus de toutes les discriminations1 ... La « vie scolaire » irrigue le fonctionnement quotidien des écoles et des établissements du second degré : elle rythme et cadre la vie des élèves dans et en-dehors de la classe. À l’école

primaire, commence à se forger la conscience de l’appartenance à une société et aux règles de vie en commun. Dans les collèges et les lycées, l’éducation à la citoyenneté doit pleinement trouver sa place. Elle ne peut relever de la seule compétence du conseiller principal d’éducation et de son équipe. Elle fait partie intégrante des missions d’enseignement, et doit, à ce titre, être l’affaire de tous, à l’instar de ce qui se fait dans les écoles. De manière générale, la finalité poursuivie à

l’école à travers l’éducation à la citoyenneté est de préparer les jeunes à participer le mieux possible à la vie démocratique, en assumant et en exerçant leurs droits et leurs devoirs, leur autorité de futur citoyen, et en les préparant au « vivre ensemble ». Cela nécessite fatalement qu’enseignants et enseignés puissent, selon la belle formule d’Edgar MORIN, se lire dans le regard de l’autre, pour exercer réciproquement leur autorité dans un espace démocratique : une autorité démocratique à l’Ecole.

L’autorité à l’école, un héritage culturel ? Dans l'établissement scolaire, l'autorité des adultes sur les enfants procède de la connaissance que les adultes ont du monde et de son héritage culturel, des valeurs et de la loi, tant juridique que morale, qu'il leur revient de transmettre aux enfants et aux jeunes.

La loi juridique et morale que l'école doit transmettre ne peut se fonder que sur les droits et les devoirs universels de l'homme. C'est en s'appuyant sur cette connaissance et sur leur professionnalité en ce domaine que les adultes feront autorité et feront comprendre aux enfants les limites dans lesquelles ceux-ci peuvent exercer les droits qui leur sont reconnus, notamment la liberté d'expression2. En Polynésie française, si Robert LEVY3 montre dans ses recherches sur la question de l’autorité dans la famille polynésienne, que l’enfant est éduqué dans un système qui diffuse l’autorité et provoque une distance considérable entre parents et enfants, c’était dans la Polynésie d’autrefois. Rien ne se faisait sans l’accord des dieux et de leurs représentants, les arii (ou chefs) et les tahu’a (certains étaient

chargés des rites religieux). Les lieux étaient emplis d’entités agissantes et les interdits en scandaient l’usage. Les Polynésiens étaient éduqués dans la discipline et dans le respect absolu de leurs dieux et de leurs chefs. Ce respect des interdits reposait sur les craintes ancestrales liées à l’autori té de tout ce qui était sacré. :

La religion des insulaires […] était fondée sur la terreur et la crainte des dieux, et son observance provenait de cette source4.

_________________ 1 LOI n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République. 2 Rapport n°2011-049 de l’IGEN – Principe pour l’élaboration d’une politique éducative d’établissement – mai 2011. 3 LEVY R., Tahitians, mind and expérience in the society island, U.C.P, 1979. 4 DAVIES J., in BARE J-F., Tahiti, les temps et les pouvoirs, ORSTOM, Paris, 1987, p.115.


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.