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Dakira

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Islam

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Editorial La diaspora marocaine à la croisée des chemins

Depuis les années 60 le Maroc officiel n’a pas cessé d’encourager l’émigration vers l’Europe en particulier. Actuellement, notre diaspora compte plus de 3 millions de personnes sans compter les clandestins. Les deux tiers de notre communauté ont moins de 25 ans et plus de 50 % sont des femmes. Pour le Maroc, l’enjeu économique, politique et social est de taille, mais aussi pour l’Europe.

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Après les échecs de la politique d’intégration des pays comme la Belgique, la Hollande et la France le Maroc n’a pas su ni put profiter de l’occasion pour ramener tout ce monde au bercail. Au contraire, après plusieurs déceptions et rendez-vous ratés notre communauté se trouve actuellement au croisement des chemins.

Depuis son installation en Belgique, notre communauté a pu procréer des multitudes de petits leaders de petite envergure au niveau des quartiers mais aucun n’a pu sortir de la mêlée pour faire fonction d’un vrai dirigeant charismatique pouvant hisser le drapeau du pays d’origine ou celui d’un des pays d’accueil. Car individualistes ils sont rongés par l’orgueil et l’égoïsme.

Les trois pays, l’Espagne, la Grèce et le Portugal, anciennement sous régime dictatorial ont pu faire retourner beaucoup de citoyens dans leurs pays respectifs après avoir installé des régimes démocratiques. Malheureusement, même si le Maroc a tourné la page des années de plomb il n’a pas pour autant rempli son contrat vis-à-vis de sa diaspora pour lui permettre de retourner dans de bonnes conditions.

Je reconnais, et personne ne peut le nier, depuis l’intronisation de Sa Majesté Mohammed VI, le Maroc est auteur de plusieurs réformes structurelles visant à développer notre pays, dans les domaines économique, politique et social. Une nouvelle lueur d’espoir ouvre de nouvelles perspectives pour un vrai développement du pays.

Il faut reconnaître aussi, qu’après quarante ans de colonisation et quarante ans d’immobilisme le Maroc aura certainement des difficultés à rattraper le retard sur les pays développés. Par conséquent, le nouveau dynamisme entamé par le Maroc et les multiples chantiers lancés à travers le Royaume ne fait que combler le manque d’infrastructure de base.

Pour assurer un vrai progrès socio-économique le Maroc doit accélérer la cadence et augmenter sensiblement son budget d’investissement. Les 76 milliards prévus par le secteur public pour 2006 ne pourront pas réduire le gouffre qui ne cesse d’augmenter. Le taux de croissance de 3,7 % est loin derrière celui de la Turquie qui a atteint les 7 %.

Depuis quarante ans que notre communauté participe activement à une progression nette de l’épargne nationale et une amélioration des réserves de change et de la position extérieure du Royaume. Ainsi, grâce à notre dynamisme, le Maroc affiche un solde excédentaire dans la balance des paiements.

Malheureusement, malgré notre contribution positive à l’économie du pays et, malgré les bonnes performances le Maroc conjoncturel n’a pas encore rempli toutes les formalités nécessaires pour assurer un retour dans de bonnes conditions de sa diaspora en Europe et ailleurs.

Aujourd’hui, nous sommes devant un dilemme, côté cour nous aimons un Maroc qui nous repousse et côté jardin nous flirtons avec la Belgique qui veut nous assimiler avec une pleine citoyenneté. L’enjeu est de taille et le moment des choix, de l’évaluation et du bilan est arrivé. Nous ne sommes pas encore au pied de mur, mais devant une croisée de chemins.

Quelle direction allons-nous prendre ? Qu’avons-nous à gagner et qu’avons-nous à perdre ? Qu’allons-nous suivre, le cœur ou la raison ?

La décision de ne pas permettre aux citoyens marocains à l’étranger de participer aux élections de 2007 a sonné le glas. (Voir éditorial Dounia News 526). Au lieu de confronter les urnes, le gouvernement et les partis politiques trouillards, sécurité oblige, ont eu peur d’un probable raz-de-marée islamiste venu des pays de liberté et de démocratie.

Pour essayer de masquer la politique de l’autruche, annuellement le Maroc organise avec tam-tam une campagne de slogans vides de tout contenu tel « Vous êtes ici chez vous » comme si nous ne le savions pas ou comme s’ils s’adressent à des étrangers. En tout cas, c’est la seule et unique action palpable et concrète entreprise soi-disant en notre faveur, mais qui nous tape sur les nerfs à chaque fois que nous voulons visiter notre chère patrie.

Dans ce contexte, qu’allons-nous choisir le romantisme ou le réalisme ? Une chose est sûre, notre diaspora ne doit pas laisser le piège se refermer sur elle, elle a beaucoup à perdre, avec comme conséquence des nouvelles générations sacrifiées.

Sarie Abdeslam

sarie@pandora.be (cet email n’existe plus)

Bruxelles, le 9 juillet 2006

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