JA3119 du 29 novembre 2022 Cover L'Afrique qui gagne

Page 1

Allemagne 9€ ‱ Belgique9€ ‱ Canada12,99$CAN Djibouti 12 €‱Espagne 9€ ‱ France 7,90 € ‱ DOM9€ Italie 9€‱Maroc 50 MAD ‱ Mauritanie 200MRU Pays-Bas9,20€‱Portugal9€ ‱ RD Congo 10 USD Suisse 15 CHF‱Tunisie8TDN TOM1 000 XPF Zone CFA4 800 FCFA ‱ISSN1950-1285 www.jeuneafrique.com NO 3119 –DÉCEMBRE 2022 RD CONGO Tshisekedi, «chef de guerre » malgrĂ© lui SAHEL Le mystĂšre Iyad Ag Ghaly DJIBOUTI Contre vents et marĂ©es 20 PAGES DĂ©mocratie,justice,lutte contre la corruption, environnement, Ă©galitĂ©, innovation
 Des pionniers plus ou moins reconnus se battent, chacun dans son domaine,pour faire bouger les lignes et tirer le continent vers le haut. Portraits. :HIKLTD=[U\^U^:?n@b@b@t@a M01936-3119-F:7,90 E -RD 30 QUI FONT L’AFRIQUE DE DEMAIN LES MAROC-ALGÉRIE LA FACE CACHÉE DU POLISARIO CÔTE D’IVOIRE AUTOUR DE GBAGBO,LEGRAND MÉLI-MÉLO DAKAR SPÉCIAL 20 PAGES

VOSGRANDES IDÉES DEVRAIENT ET VONT SE RÉALISER AVEC NOUS ÀVOS CÔTÉS

SociĂ©tĂ©GĂ©nĂ©rale, Banque de l’annĂ©eenmatiĂšre de dĂ©veloppementdurable* , vous apportedes solutionsfinanciĂšresinnovantes pour rĂ©pondre Ă vos ambitionsd’unavenir plus durable DĂ©couvrez commentnousaidonsnos clients Ă atteindreleurs objectifsRSE

CONSEIL BANQUED’INVESTISSEMENT FINANCEMENT MARCHÉS BANQUETRANSACTIONNELLE MÉTIERTITRES FINANCEMENT D’ÉQUIPEMENTS MOBILITÉ ET GESTIONDEFLOTTEAUTOMOBILE
*PrixdĂ©cernĂ©parl’InternationalFinancing Review pourl’annĂ©e2022.SociĂ©tĂ©GĂ©nĂ©rale,S.A.aucapitalde1062354722,50€-552120222RCSPARIS-SiĂšgesocial: ew 29,bdHaussmann,75009Paris.DĂ©cembre2022.

L’édito

Marwane Ben Yahmed

Si vilain que ça, le petit Qatar?

Ce devait ĂȘtre un motif de fiertĂ©, le point d’orgue d’une stratĂ©gie de soft power et de dĂ©veloppement Ă©conomique baptisĂ©e « National Vision 2030 ». L’organisation par le Qatar de la 22e Ă©dition de la Coupe du monde de football, la premiĂšre disputĂ©e en terre arabo-musulmane, obtenue il y a douze ans au dĂ©triment des États-Unis, n’en finit pourtant pas de susciter des polĂ©miques. De son obtention, donc, toujours contro versĂ©e, car nimbĂ©e d’un Ă©pais voile de suspicion de corruption, Ă  son coĂ»t faramineux (6 milliards d’euros pour la seule construction des huit stades nĂ©cessaires), en passant par les conditions de travail des milliers d’ouvriers venus d’Asie du Sud et d’Afrique, le non-respect des droits de l’homme (en particulier concernant les homosexuels) ou le non-sens Ă©cologique de l’édition la plus Ă©nergivore de l’histoire de la compĂ©tition. La tempĂȘte de protesta tions soulevĂ©e en Occident a atteint un niveau jamais Ă©galĂ© Et les appels au boycott n’ont jamais Ă©tĂ© aussi nombreux. Conclusion logique de

l’émir du Qatar : « Mon pays a Ă©tĂ© la cible d’une campagne de dĂ©nigre ment qu’aucun autre pays hĂŽte n’a subie »

L’émirat a-t-il mĂ©ritĂ© ce traite ment? Si nombre de critiques sont fondĂ©es et auraient mĂ©ritĂ© une autre rĂ©ponse de la part des dirigeants qataris qu’un dĂ©ni hautain, on ne peut que constater leur virulence et la sĂ©lectivitĂ© d’une indignation essentiellement occidentale. Les accusations de corruption? C’est le lot de toutes les Ă©ditions de la Coupe du monde et des jeux Olympiques aussi d’ailleurs –, comme l’attestent le Fifagate et les multiples scandales qui ont Ă©maillĂ© l’histoire contempo raine de l’institution, dont seule la partie Ă©mergĂ©e de l’iceberg a donnĂ© lieu Ă  des condamnations. Imaginer que les États-Unis, la Russie, le BrĂ©sil ou la plupart des autres candidats n’ont jamais essayĂ© d’obtenir de maniĂšre illicite les faveurs des « dĂ©cideurs » Ă  Zurich ou ailleurs confine Ă  l’hypocrisie Les morts sur les chantiers? Sans nier les faits et encore moins le drame humain que

cela reprĂ©sente, il est tout de mĂȘme Ă©trange qu’un chiffre sorti de nulle part les 6 500 morts Ă©voquĂ©s Ă  l’origine par le journal britannique The Guardian, en fĂ©vrier 2021 soit Ă  ce point repris et martelĂ© partout dans les mĂ©dias en Occident, comme s’il Ă©tait parole d’évangile. Mais comme le ridicule, lui, ne tue pas, le comitĂ© chargĂ© de la construction des stades au Qatar Ă©voque
 trois dĂ©cĂšs directement dus Ă  des accidents de travail sur les chantiers
 Les droits humains? Étrangement, la question s’est focalisĂ©e sur la non-recon naissance des droits des personnes LGBTQ+. La marque d’un fossĂ© entre deux mondes l’Occident et le Sud, pour caricaturer qui n’ont pas les mĂȘmes prioritĂ©s Mais le premier veut Ă  tout prix imposer les siennes au reste de l’humanitĂ©. Le sort des homosexuels, par exemple, est-il plus important que celui des femmes? Aucun dĂ©luge de critiques similaires en matiĂšre de droits de l’homme ne s’est abattu sur la Chine ou sur la Russie lors des JO d’hiver 2022 ou de la Coupe du monde 2018. Les deux ne sont pourtant guĂšre des parangons

JEUNE AFRIQUE N°3119 DECEMBRE 2022 3

de vertu dans ce domaine. « Deux poids, deux mesures », pense une partie de la rue arabe qui, elle, exalte sa fiertĂ© de voir un « pays frĂšre » organiser l’évĂ©nement sportif le plus populaire de la planĂšte.

Si leur ressentiment Ă  l’égard du traitement infligĂ© Ă  la « Coupe du monde des Arabes », comme l’avait appelĂ©e l’émir Tamim Al Thani lors du passage de tĂ©moin avec Vladimir Poutine, en 2018, est rĂ©el et en partie fondĂ© tant les critiques peuvent sembler excessives, condescen dantes, hypocrites et, dans certains cas, tout simplement racistes, les « frĂšres » arabo-musulmans du petit Ă©mirat gazier doivent cependant pousser leur rĂ©flexion un peu plus loin. Le Qatar mĂ©rite-t-il vraiment leur soutien pour d’autres raisons que le pavlovien rĂ©flexe de fiertĂ© identitaire? Pas vraiment
 DĂ©jĂ , Ă  l’occasion de ce fameux Mondial, les autoritĂ©s de Doha, qui n’ont pas vraiment de problĂšmes de fin de mois ni de trĂ©sorerie, auraient pu inviter des ressortissants de la rĂ©gion et du Maghreb, a fortiori parmi les suppor teurs des nations qualifiĂ©es pour la phase finale ou Ă  tout le moins leur proposer des tarifs plus accessibles. Des jeunes, des Ă©tudiants, des fans de foot, ceux qui n’ont pas les moyens de voir jouer leurs idoles, des dirigeants et des cadres de clubs modestes, des orphelins, que sais-je. C’était le moment d’ouvrir les bras, de faire preuve de solidaritĂ© et de prouver que cette Ă©dition Ă©tait bien celle de tout un peuple, de Rabat Ă  Bagdad. RĂ©sultat : walou, comme on dit chez nous


Au-delĂ  de cet acte manquĂ© ponctuel, et donc cette occasion gĂąchĂ©e de faire montre d’empa thie Ă  l’égard des siens, le Qatar a Ă©galement largement dĂ©montrĂ© depuis plus d’une dĂ©cennie qu’il ne pouvait incarner un exemple et un soutien pour le monde arabe. Si le troisiĂšme dĂ©tenteur de rĂ©serves gaziĂšres au monde, aux moyens quasi illimitĂ©s, s’est efforcĂ© d’imposer sa « marque » en investissant massivement dans le sport (Paris Saint-Germain, BeIN Sports, Coupe du monde), dans

les villes les plus chics et leurs palaces (Paris, Londres, New York
) ou dans les grandes entreprises (Accor, EADS, Volkswagen, Total, Lagardùre, Rosneft
), portant à prùs de 500 milliards de dollars les actifs

Humour

Pour réfléchir ou sourire, chaque mois, notre sélection des citations les plus marquantes, les plus intelligentes ou les plus drÎles. M.B.Y.

Le monde appartient aux optimistes, les pessimistes ne sont que des spectateurs François Guizot

de son fonds souverain, force est de constater que son empreinte dans le monde arabe est presque nulle, pour ne pas dire nĂ©gative. L’émirat avait fait des Printemps arabes la matrice de sa supposĂ©e volontĂ© d’accompagner la dĂ©mocratisation de la rĂ©gion. Il en est finalement arrivĂ© Ă  participer financiĂšrement et militairement au renversement de Mouammar Kadhafi en Libye, avec les consĂ©quences que l’on connaĂźt, et Ă  appuyer les mouve ments islamistes un peu partout dans le monde, notamment les FrĂšres musulmans en Égypte et Ennahdha en Tunisie. En revanche, quand il s’est agi d’aider ces deux derniers États, et non la formation politique de leur choix, Ă  gĂ©rer des transitions dĂ©mocratiques dĂ©licates ou Ă  les accompagner financiĂšre ment pour sortir de la crise, fĂ»t-ce par des prĂȘts, rien du tout. Idem en Libye. Pis, les « frĂšres » palestiniens, dont la plupart des dirigeants arabes parlent Ă  longueur de discours pour Ă©voquer le drame qui les accable et la nĂ©cessaire solidaritĂ© dont ils devraient ĂȘtre l’objet, n’ont jamais rien vu venir de Doha.

Si le Qatar ne mĂ©rite sans doute pas l’avalanche de critiques qui s’est abattue sur lui Ă  l’occasion de cette Coupe du monde, il ne mĂ©rite pas non plus le soutien d’un monde arabe qui visiblement ne lui importe guĂšre plus que la derniĂšre lubie de Neymar ou l’achat d’un Ă©niĂšme immeuble dans le 8e arrondissement de Paris


On ne secoue pas un sac de piment lorsqu’on ne connaüt pas la direction du vent Ligeor Nsongola

Un jour l’amour a dit Ă  l’amitiĂ© : « Pourquoi existes-tu puisque je suis lĂ ? » L’amitiĂ© lui a rĂ©pondu : « Pour amener un sourire lĂ  oĂč tu as laissĂ© des larmes » Friedrich Nietzsche

Chaque parole a une conséquence. Chaque silence aussi. Jean-Paul Sartre

Les émotions les plus belles sont celles que tu ne sais pas expliquer Charles Baudelaire

AucundĂ©lugede critiquessimilaires nes’estabattusur laRussieen2018ou surlaChineen2022.
C’est une triste chose de songer que la nature parle et que le genre humain n’écoute pas.
Victor Hugo
On a deux vies. Et la deuxiĂšme commence le jour oĂč l’on se rend compte qu’on en a qu’une. Confucius
et sagesse
JEUNE AFRIQUE N°3119 DECEMBRE 2022 4 L’ÉDITO

PREMIER

3L’édito Marwane Ben Yahmed
12
POLITIQUE 62 CĂŽte d’Ivoire LaurentGbagbo,letemps du dĂ©senchantement? 68 RD Congo Tshisekedi, «chef de guerre »malgrĂ© lui 72 Cameroun LaprospĂ©ritĂ© est dans le prĂ© 76 Mali Iyad Ag Ghaly, l’homme qui ne meurtjamais 82 Maroc-AlgĂ©rie Laface cachĂ©e
Polisario ENQUÊTE 30 Les 30 qui font l’Afrique de demain 62 82 JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 6 SOMMAIRE Dans JeuneAfrique et nullepartailleurs
PLAN 8L’homme du mois Franck Biya
Dixchoses Ă savoir sur
 Jaynet Kabila 14Lematch MahamatIdriss DĂ©by Itno vs Moussa Faki Mahamat 16Lejour oĂč Sara Sabryest allĂ©e dans l’espace 18L’actu vuepar
 Michel Gohou 20L’Ɠil de Glez GuinĂ©eĂ©quatoriale, et de six! 22Ledessousdes cartes PlanisphĂšre :l’Afrique rapetissĂ©e 24Parti pris Doumbouya,DĂ©by Itno et les fantĂŽmesdeHollywood, par François Soudan 28 Force majeure, par JoĂ«l TĂ©-LĂ©ssia Assoko
du
BankoftheYear2021 BENIN BankoftheYear2021 CAMEROON BankoftheYear2021 CHAD BankoftheYear2021 CONGO-BRAZZAVILLE BankoftheYear2021 BURKINA FASO BankoftheYear2021 COTE D’IVOIRE BankoftheYear2021 LIBERIA BankoftheYear2021 NIGERIA BankoftheYear2021 SENEGAL BankoftheYear2021 SIERRALEONE BankoftheYear2021 ZAMBIA BankoftheYear2021 GABON BankoftheYear2021 GUINEA BankoftheYear2021 AFRICA

Fondateur:Béchir Ben Yahmed, le 17 octobre 1960 àTunis bby@jeuneafrique.com

ÉditĂ© par Africa Media Group SiĂšge social:57bis, rue d’Auteuil –75016 Paris TĂ©l.:+33 (0)1 44 30 19 60 Fax: +33 (0)1 45 20 09 69

Courriel:redaction@jeuneafrique.com

Directeur général:AmirBen Yahmed Vice-présidents:Danielle Ben Yahmed, FrançoisSoudan

Directeur de la publication: Marwane Ben Yahmed mby@jeuneafrique.com

Directeur de la rédaction: François Soudan f.soudan@jeuneafrique.com

Directeur exécutif de la rédaction : Amir Ben Yahmed aby@jeuneafrique.com

La rĂ©daction et l’équipe de Jeune Afrique sont Ă retrouver sur www.jeuneafrique.com/qui-sommes-nous/

Diffusion et abonnements

Ventes:+33 (0)1 44 30 18 23

Abonnements:Service abonnements Jeune Afrique, 235, avenue le Jour se LÚve 92100 Boulogne Billancourt Tél.:+33 (0)1 44 70 14 74

Courriel: abonnement-ja@jeuneafrique.com

Communication et publicité DIFCOM (Agence internationale pour la diffusion de la communication)

S.A. au capital de 1,3 million d’euros RĂ©gie publicitaire centrale de Jeune Afrique Media Group 57 bis, rue d’Auteuil, 75016 Paris TĂ©l.:+33 (0)1 44 30 19 60 Fax: +33 (0)1 45 20 08 23 +33 (0)1 44 30 19 86

Courriel:regie@jeuneafrique.com

Imprimeur:Siep–France

Commission paritaire:1026 D80822 DépÎt légal:àparution ISSN 1950-1285

OBJECTIF DAKAR 97 Macky Sall casse les prix CULTURE 174 Musique
Kuti, l’unique Black President 178MĂ©moire Comment dĂ©coloniser la VillaMĂ©dicis? 182CinĂ©ma Leretour des panthĂšres noires GRAND FORMAT 185 Djibouti Contre vents et marĂ©es JEUNE AFRIQUE &VOUS 224 Le tour de la question 225 Ce jour-lĂ  226 Post-Scriptum ÉCONOMIE 130 Glencore L’ondedechoc 136Lagalaxie de Gagan Gupta 138Data centers LesAfricains dans les pas de Google et d’Amazon 142Paiement Transactions sans frontiĂšres 144Transports Alstom, ceux qui l’aiment prendront le train DOSSIER EMPLOI &FORMATION 146 AccrĂ©ditations Lesbusiness schools africaines dans la cour(se) des grands FOCUS VILLES &URBANISATION 162 Alimentation Commentnourrir les centres urbains 130 Abonnez-vousĂ  DĂ©couvreztoutesnos offresd’abonnementsur jeuneafrique.com ou contactez-nousau +33(0)144701474
FelaAnikulapo
Entrez dans les coulissesdupouvoir. Abonnez-vous Sans engagement dĂšs 9,99 €/mois Avec Jeune Afrique Digital, profitezde: Tous les articles en illimitĂ© Le magazine en version numĂ©rique en avant-premiĂšre Une offre de newsletters enrichie 5 annĂ©es d’archives pour revivreles tempsforts de l’histoireducontinent DĂ©couvrez nos offres en scannant le QR Code

Jaynet Kabila

La sƓur jumelle de l’ancien prĂ©sidentcongolais,qui jouit d’une grande influence auprĂšsde son frĂšre, s’estlivrĂ©e Ă une attaqueenrĂšgle contre Kigalidevant le Parlement panafricain.

1 Aßnée

«Elle estnĂ©e le mĂȘme jour que Joseph, mais avant lui », souligne l’un desintimesdelafamille Kabila. Jaynet esteneffet la premiĂšredes jumeaux Ă voirlejour le 4juin 1971, Ă HewaBora, dans le Sud-Kivu. Ils sont depuis toujoursextrĂȘmement proches.

2 Fille de

Parmi lesseptenfants, c’était la seule que Laurent-DĂ©sirĂ©Kabila «craignait », selon le terme d’un membredeson entourage. Petite, elle Ă©tait le plus souvent Ă©pargnĂ©e par la colĂšre–etles punitions –de sonpĂšre.

3 Fervente protestante

Elle joue le rĂŽle de cheffedefamille auprĂšs de ses frĂšres et sƓursetde leursenfants. C’estelle qui acrééla

fondation Laurent-DĂ©sirĂ©Kabila et qui s’occupedes affaires familiales. Ferventeprotestante, elle ne se dĂ©place jamais sans une Bible et n’a jamais Ă©tĂ©mariĂ©e.

4 Combattante

NĂ©edans le maquis, elle aĂ©tĂ© formĂ©e dĂšsl’enfance Ă l’usage desarmes. Elle afait une grande partie de soncursus scolaireenTanzanie, oĂč elle aĂ©galement effectuĂ© son service national. En 2019, alors qu’il forme une coalition avec le camp Tshisekedi, Joseph Kabila la choisit pour prĂ©sider la Commission dĂ©fenseetsĂ©curitĂ©del’AssemblĂ©e nationale

5 DiscrĂšte

Elle estdĂ©critecomme une femme complexemais discrĂšte. Sesprises de parole sont rares,elle atoujours refusĂ©decirculer en convoietne s’ de gardesducorps.

(FCC). Lors desréunions du parti, elle esttrÚsécoutée.

8 «Mauvaise foi »rwandaise

«Nousavons certes120 groupes armĂ©sauCongo, maisleplus grand problĂšme,c’est le Rwanda, qui soutient le M23»,a-t-elle assĂ©nĂ© dĂ©but novembredevant le Parlement panafricain, en Afrique du Sud. «Les FDLR [ForcesdĂ©mocratiquesdelibĂ© ration du Rwanda] ont tuĂ© beaucoup plus de Congolais que de Rwandais. C’estdelamauvaisefoi [de la part du Rwanda] de continuer Ă parler de cettehistoire», a-t-elle poursuivi, alorsque Kigali, accusĂ©par la RDC de soutenir le M23, reproche Ă  Kinshasad’aider lesFDLR.

9 Communicante

sonprĂ©sident de ticipĂ©aux lĂ©gisla ans la circonscrip Kalemie.Personne n’apu se prĂ©senterde 2018.Elle estdonc l’une desreprĂ©sen nganyika, dont sonfrĂšre erneur avant d’ĂȘtre 21

Ă©coutĂ©e eillĂšrelaplus influente seph Kabila lorsqu’il au pouvoir,elle continue Ă jouer un rĂŽle majeur auprĂšs de lui comme au sein du Front commun pour le Congo

Elle estla copropriĂ©tairedeDigital Congo, chaĂźne de tĂ©lĂ©vision fondĂ©e en 2005 pour soutenir la campagne de Joseph Kabila en vue de la prĂ©sidentielle de 2006.Elle asuivi desĂ©tudesdecommunication, notamment en Namibie,oĂč elle aobtenuundoctorat.

10 Panama Papers

Elle aĂ©tĂ© citĂ©e en 2016dans l’enquĂȘte desPanama Papers. Selon celle-ci, elle acrééune sociĂ©tĂ©offshorebasĂ©e dans le Pacifique sud, dĂšsl’arrivĂ©e au pouvoir de sonjumeau, en 2001. Elle codĂ©tenait cettesociĂ©tĂ©avecun proche,Kalume Nyembwe Feruzi, le fils de l’ancien patron de l’Agence nationale de renseignement (ANR), Didier Kazadi Nyembwe. Elle aaussi Ă©tĂ©indexĂ©e par CongoHold-Up, une enquĂȘteselon laquelle sa famille s'est enrichie de plusieursdizaines de millions de dollarsdurant la prĂ©sidence de Joseph Kabila.

Anna Sylvestre-Treiner

10 choses àsavoir sur

JUNIOR D. KANNAH/AFP PREMIER PLAN

SÉROPOPSTAR

Aujourd’hui, avec lestraitements, une personne sĂ©ropositivepeutavoir desenfants sans transmettreleVIH. Plusd’infos sur QuestionSexualitĂ©.fr

RĂ©alisĂ© dans le respect des protocolessanitaires. Continuons de respecterles gestes barriĂšres Continuons de porter un masque partoutoĂčilest recommandĂ©par lesautoritĂ©s scientifiques.

Joël Té-LéssiaAssoko

Forcemajeure

surviennent des«cas de force majeure»,des «actes de Dieu ». Entendez :des dĂ©cisions des Occidentaux.Ilsedit que les dĂ©boires d’Accraont Ă©tĂ©exacerbĂ©s par lesagences de notation occidentales. Des financiers africains pourtant bien informĂ©s adhĂšrent Ă lathĂšse selon laquelle une application irraisonnĂ©edes critĂšres ESG(environnementaux,sociaux et de gouvernance) explique la dĂ©gradation de la notation du pays, qui aurait par ricochet aggravĂ© la dĂ©prĂ©ciation du cĂ©di, l’inflation et le malheur despopulations locales.

«Carcan monétaire »

Les autoritĂ©s Ă©conomiques et monĂ©taires françaises auraient pu nous Ă©pargner l’incongru moment d’autosatisfaction enduréàlami-novembre, Ă lasortiedudernier rapport Ă©conomique et financier sur la coopĂ©ration avec leszones monĂ©taires africaines. «Imaginez, si le Mali ou le Burkina Faso,en proieĂ des successions de crises politiquesetsĂ©curitaires,avaient leur propremonnaie.Celles-ci s’effondreraient face aux devises internationales, avec comme consĂ©quence la “dollarisation” desĂ©conomies»,ont-elles indiquĂ© Ă  Jeune Afrique.Est-il sage de relancer le dĂ©bat sur le franc CFA, alorsque l’habituel chƓur dĂ©nonçant la «servitude monĂ©taire»semble dĂ©passĂ© par lesĂ©vĂ©nements? Peut-ĂȘtre. DepuisledĂ©butdel’annĂ©e, le cĂ©di acĂ©dĂ©57%face au dollar amĂ©ricain, contre8,6 %pour le francCFA. DucĂŽtĂ©d’Accra, l’inflation aatteint 37,2 %en septembre, soit quatrefois la limitesouhaitĂ©e parles autoritĂ©s monĂ©taires.Etcela malgrĂ©les interventionsdĂ©sespĂ©rĂ©es de la Banque du Ghana,qui arelevĂ©son taux directeur de 11points depuis un an. Le Nigeria s’en sort mieux, si l’on peut dire,avecune inflation de 20,8 %seulement, soit deux

fois Ă peinelalimite supĂ©rieure souhaitĂ©e par la CBN. Entre temps, elle resteau-dessous de 8% dans la zone Uemoa, et de 4,1% dans la Cemacselon la BCEAO. Lescontempteursdufranc CFA souhaitent-ils Ă ces pays le sort du Ghana? «Ils diront que leschiffres publiĂ©snesont pas vrais et que la population ghanĂ©ennevit bien J’ai dĂ©jĂ  entendu cela », regrette un financier abidjanais

La France peut se dĂ©fendre–ou s’enfoncer –touteseulequand il s’agit de ses relations avec sesanciennescolonies. Mais le fait estqu’il n’yanimiracle ni malĂ©diction en matiĂšrede politique Ă©conomique.Hormis pour ceux qui persistent Ă croire que lesdĂ©cisions prises parles Étatsafricains n’ont aucune consĂ©quence,que catastrophes et rĂ©ussites adviennent comme

Personne n’aobligĂ© le gouverne ment d’Accra Ă accroĂźtresadette extĂ©rieure, Ă 82%du PIBen2021, quand Abidjan maintenait ce ratioautour de 51 %, au-dessous de la limitede70% imposĂ©e par le «carcan monĂ©taire»,c’est-Ă direles critĂšres de convergence Ă©conomique de la zone Uemoa. Pense-t-onvraiment que les autoritĂ©s ivoiriennesn’auraient passouhaitĂ©obtenir plus de financements? Et qui abien pu «contraindre »legouvernement du prĂ©sident Nana Akufo-Addo de recourir Ă des endettementsdecourtterme aussi onĂ©reux?Ils sont estimĂ©sĂ  plus de 16 %deladetteexterne, soit quatrefois le niveau observĂ© en CĂŽte d’Ivoireetplusdecinq fois celui du Cameroun.Qui peut croireque c’estl’expertise Ă©conomique desimpayables autoritĂ©s militaires de Bamako qui aconvaincu le marchĂ© rĂ©gional de prĂȘter 12 milliards de FCFA (18,2 millions d’euros)au Mali au dĂ©but de novembre, au taux extraordinairede6,6 %pour une maturitĂ©deseptans?C’est Ă  peine 1point de plus que le taux exigĂ©par lesinvestisseurspour la CĂŽte d’Ivoire. Et ce alorsque la detteghanĂ©enne d’une maturitĂ© similaireatteint un taux d’intĂ©rĂȘt de 40 %. La soliditĂ©dufranc CFA estaucƓur de cesdiffĂ©rencesde traitement. CQFD.

Rédacteur en chef adjoint à JeuneAfrique
JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 28 PARTIPRIS
Le fait estqu’il n’yanimiracle ni malĂ©diction en matiĂšredepolitique Ă©conomique.

SÉROPOÉTIQUE

Aujourd’hui, avec lestraitements, une personne sĂ©ropositivepeutvivrepleinement et en bonne santĂ© sans transmettre le VIH. Plusd’infos sur QuestionSexualitĂ©.fr

RĂ©alisĂ© dans le respect des protocolessanitaires. Continuons de respecterles gestes barriĂšres Continuons de porter un masque partoutoĂčilest recommandĂ©par lesautoritĂ©sscientifiques.

Que retenir de cette annĂ©e qui s’achĂšve ? Dans la continuitĂ© de 2020 et de 2021, le sentiment le plus perceptible est l’inquiĂ©tude ; le constat le plus objectif, la rĂ©gres sion. Coups d’État militaires et transitions tronquĂ©es au Mali, en GuinĂ©e, au Tchad, au Soudan et au Burkina. Propagation du jihadisme au Sahel. Guerre civile tragique en Éthiopie. RĂ©surgence du conflit qui mine l’est de la RD Congo et menace d’embraser la rĂ©gion des Grands Lacs Croissance en berne Pis, l’Afrique est confrontĂ©e Ă  de puissants vents contraires et Ă  des

crises dont elle n’est pas respon sable : Covid-19, rĂ©chauffement climatique, guerre en Ukraine, creusement des inĂ©galitĂ©s, hausse sidĂ©rante du coĂ»t de la vie, affres d’un systĂšme financier international qui la pĂ©nalise.

Les adeptes de la mĂ©thode CouĂ© pourront toujours Ă©voquer cette formidable rĂ©silience qui fait que l’édifice ne s’effondre pas malgrĂ© les lĂ©zardes qui se multiplient. Ils n’auront pas tout Ă  fait tort Mais serrer les dents, faire le dos rond en priant de voir poindre le bout du tunnel ne fait pas office de stratĂ©gie pour en sortir, ni, surtout, pour prĂ©parer l’avenir

L’Afrique de demain, plus moderne, plus juste et fiĂšre d’elle-mĂȘme car elle exploiterait enfin de maniĂšre souveraine ses ressources inouĂŻes et ce potentiel

que tout le monde lui reconnaĂźt, se construit aujourd’hui. HĂ©las ! ce n’est pas grĂące Ă  nos dirigeants, qui, dans leur grande majoritĂ©, ne brillent pas par la sagesse de leur gouvernance ou par leur vision. « Le politicien pense Ă  la prochaine Ă©lection. L’homme d’État, Ă  la prochaine gĂ©nĂ©ration », Ă©crivait le thĂ©ologien amĂ©ricain James Freeman Clarke. Nous avons donc affaire Ă  des politiciens


Courage et détermination

En revanche, dans la plus grande discrĂ©tion mais aussi dans le plus criant manque de reconnaissance –, de nombreux Africains s’efforcent de changer notre continent, refusant la fatalitĂ© de l’inertie Chacun dans leur domaine, grĂące Ă  leur dĂ©termination et Ă  leur courage, ils font bouger les lignes, secouent le cocotier, s’évertuent Ă  briser les multiples plafonds de verre et les carcans qui freinent le progrĂšs ou excluent des pans entiers de nos populations, en particulier les femmes et les jeunes. Ils se battent pour la justice, l’État de droit, la dĂ©mocratie, la prĂ©servation de l’environnement, l’innovation et la recherche, une finance plus accessible et plus solidaire, l’émergence d’indus tries culturelles et crĂ©atives. Et tentent de mettre fin Ă  la corruption, aux conservatismes en tout genre, aux systĂšmes politiques qui secrĂštent tant d’inĂ©galitĂ©s ou de gabegie.

Nous avons choisi de consacrer l’« EnquĂȘte » de ce mois, le dernier de l’annĂ©e, Ă  ces hĂ©ros plus ou moins anonymes qui mĂ©ritent d’ĂȘtre encouragĂ©s, soutenus et reconnus. Ils incarnent ce que l’Afrique a de meilleur, cette Ă©nergie et cette inventivitĂ© qui essaiment dans chacun des cinquante-quatre pays qui la composent, notamment parmi les plus jeunes d’entre nous. EspĂ©rons qu’ils susciteront de trĂšs nombreuses vocations


JEUNE AFRIQUE N°3119 DECEMBRE 2022 30
ENQUÊTE

POLITIQUE

DANIÈLE DARLAN ET MARTHA KOOME UN SEUL CREDO : LE DROIT

Le bras de fer Ă©tait perdu d’avance,maiselle aura menĂ© la bataille jusqu’aubout. EnvoyĂ©e Ă laretraite par FaustinArchangeTouadĂ©ra (FAT), et donc littĂ©ralement Ă©jectĂ©e, le 25 octobre, de sonposte de prĂ©sidentedelaCourconstitutionnelle de la RĂ©publique centrafricaine,qu’elleoccupait depuis 2017,DaniĂšle Darlan restera dans lesmĂ©moires comme la magistratequi aosĂ© direnon auprĂ©sident. EngagĂ© depuis desmois dans un projet de rĂ©formeconstitutionnelle qui lui permettrait de briguer, en 2025,untroisiĂšmemandat, FAT s’estheurtéàune damedefer.

Durant lescinq annĂ©es qu’elle apassĂ©es Ă latĂȘtedelaplus hautejuridiction du pays,cette ex-enseignante en droit public de l’universitĂ©deBangui s’était dĂ©jĂ  distinguĂ©e Ă  plusieurs reprises.EnaoĂ»tdernier,par exemple, elle s’étaitopposĂ©e

au projet re Ă l’adoption la cryptomon naie,soutenu parTouadĂ©r DaniĂšleDarl pasdavantag cadeaux Ă l En dĂ©cembr avait invalid de l’ancienp BozizĂ©,aum l’objet de poursuites judiciaires.

S’agissant de l’actuel projet de rĂ©formedelaConstitution, la magistratesesavait attendue au tournant,aussi bienpar l’opposition que par la majoritĂ©. L’examen de la requĂȘtedevant laCourconstitutionnelle s’est d’ailleursdĂ©roulĂ©dans un climat dĂ©lĂ©tĂšre, entremenacestĂ©lĂ©phoniques, communiquĂ©sde presse incitant Ă laviolence et manifestations devant le siĂšge de l’institution. Pour avoirrefusĂ© de cĂ©der,Darlan afinalementĂ©tĂ© remplacĂ©epar un intĂ©rimaire, jugĂ© proche de TouadĂ©ra.

Attendue au tournant, Martha Koomel’était elle aussi. En qualitĂ©deprĂ©sidente de la ur suprĂȘme du Kenya, il lui combait de trancher le conteneux opposant William Ruto,le e-prĂ©sident,Ă  sonrival, Raila inga.Cedernier contestait les sultatsde la prĂ©sidentielledu oĂ»tdonnant Ruto vainqueur avec Ă peine 233000 voix d’écart.

Tous lesregards se sont donctournĂ©sversMartha Koome.Cettemagistrate a succĂ©déàDavid Maraga, entrĂ©dans l’histoire du paysunjour de septembre2017aprĂšs avoirprislacoura geusedĂ©cision d’invalider lavictoire

chef face plus hauteinstitution du pays en exemplepour lecontinent, et ajoutédela pression sur lesépaules de la successeusedujugeMaraga.

Àl’origine,Martha Koome n’était paspressentie pour ce poste.Avant sa nomination, en mai 2021,cette avocatede formation s’était surtout illustrĂ©e dans la dĂ©fensedenombreux opposantsemprisonnĂ©ssous le rĂ©gimedeDaniel arap Moi. Raila Odinga en faisait partie Ce passĂ©aux cĂŽtĂ©sdecelui que certains surnomment «Baba» n’apas empĂȘchĂ© la magistrate de retoquer,enmarsdernier, le projet de rĂ©formeconstitu tionnellequ’il promouvait avec Kenyatta.

Cettefois-ci, la juriste Ă©tait parfaitementconscientede l’impactque reprĂ©sentaitsa dĂ©cision dans un pays encore traumatisĂ© parles violences postĂ©lectoralesde2007-2008 Odinga avait d’ailleursannoncĂ© la couleur en faisantdecette nouvelle bataille judiciaire«un combat pour la dĂ©mocratie et la bonnegouvernanceface aux cartels de la corruption ». Martha Koomen’a pasflĂ©chi. Le 5septembre, elleavalidĂ© l’élection de William Ruto.Une dĂ©cision finalement«respectĂ©e» par Raila Odinga Romain Gras

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 31 ENQUÊTE

AHMED RAHHOU

LE M. LOYAL DE LA CONCURRENCE

Pas un gendarme.Unarbitre. C’estainsi qu’Ahmed Rahhou voit sa nouvelle fonction de prĂ©sident du Conseil de laconcurrence du Maroc. À64ans, cet ingĂ©nieur originairedeMeknĂšs, diplĂŽmĂ© de l’École polytechnique de Paris en 1980,fait partie de ceshauts commis de l’État polyvalentsdont Mohammed VI aime Ă s’entourer.PassĂ© parRoyal Air Maroc, LesieurCristal, ou encore le CrĂ©dit immobilierethĂŽtelier,qu’il asauvĂ© de la faillite et transformĂ© en l’une des banquesles plus compĂ©titivesdupays, Ahmed Rahhou aensuitevĂ©cuentre Bruxelles et Rabat, Ă lasuitedesanomination, en fĂ©vrier2019, au posted’ambassadeur du Maroc auprĂšs de l’Union europĂ©enne.

En mars2021, le roile place Ă latĂȘteduConseil de la concurrence.Créée en 2009,l’institution est chargĂ©e d’assurer la transparencedes relations Ă©conomiquesetdeveiller Ă leurĂ©quitĂ©. Le profil Ă©clectique et l’intĂ©gritĂ© de Rahhou –ilnetraĂźne aucune casserole –fontdelui la personne idĂ©ale pour occuper ce postesensible

Sonemploi du tempsest particuliĂšrement chargĂ©. Depuis la libĂ©ralisation du marchĂ© des hydrocarbures,en2015,les entreprises du secteur sont en effetrĂ©guliĂšrementaccusĂ©esdeprofiter de la hausse desprix pour rĂ©aliser d’énormes bĂ©nĂ©fices. Aziz Akhannouch,l’actuelchefdu gouvernement,est d’ailleursactionnairedel’une d’elles,Afriquia.

Àlafind’avril 2022,alorsque la guerre en Ukraine aaccentuĂ©l’inflation et que lesaccusations de conflitsd’intĂ©rĂȘts envers le gouvernement sont Ă leur paroxysme,leConseil de la concurrence s’autosaisit du sujet. Objectif :vĂ©rifier lesconsĂ© quencesdel’inflation «sur le fonctionnement concurrentieldes marchĂ©snationaux ».

L’avis qu’il Ă©met, le 31 aoĂ»t, estsans appel:«Les marchĂ©sdugasoil et de l’essencesont fortement concentrĂ©s,aussi bienenamontqu’en aval, et ce malgrĂ©l’arrivĂ©edenouveauxopĂ©rateurs, dont la taille, lesmoyens et l’originen’ont paspermis d’insuffler une nouvelle dynamique concurrentielle au sein de ces marchĂ©s. »

En thĂ©orie,les prĂ©rogativesduConseil, renfor cĂ©es en 2014, lui confĂšrent un pouvoir de sanction Ahmed Rahhou troquera-t-il sonmaillotd’arbitre pour un uniformedegendarme? SoufianeKhabbachi, Ă Casablanca

ASMAOU

DIALLO

LA CONSCIENCE DE LA GUINÉE

DouzeannĂ©esdurant, Asmaou Diallo,accompagnĂ©e d’autres victimes, acommĂ©morĂ© le massacredustade de Conakry,survenu le28septembre2009.«Pour se faire entendre»,malgrĂ©tout, d’un gouvernement qui,sous AlphaCondĂ©, ne manifestait pas la moindreintention d’ouvrir un procĂšs.

En 2022, cetteGuinĂ©enne vit l’aboutissementde ses longuesannĂ©esdelutte:onzegradĂ©s au pouvoirĂ  l’époque,dont Moussa DadisCamara,l’ancien prĂ©sident de latransition, comparaissent devant un tribunal. Ce funestejourde2009,lefils aĂźnĂ© d’Asmaou Diallo, Ali, professeur d’histoire, Ă©tait allĂ© manifester contre la candidatureducapitaine putschiste, quibriguaitlamagistraturesuprĂȘme.IlaĂ©tĂ© tuĂ©,ainsi que 156 protestataires,

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 32 ENQUÊTE

Despas auDacieux, un granD objectif

RencontRezlescRĂ©ateuRs delanouvellegĂ©nĂ©Ration quisontlesfutuRsleadeRs, poRte-paRoleet successeuRsdel’afRique.

Cettehistoirecommence en 1820 avec un garçonde ferme dans une petiteville d’Écosse.IlseprĂ©nommait John Walker.Iln’avait pas beaucoup de ressourcesmatĂ©rielles, mais il avait une Ă©tincelle dans les yeux, une passion dĂ©bordanteetun esprit innovateur.Ilvoulait ĂȘtre un grandhomme d’affaires et pour se lancer dans cette aventure, il vendit la ferme de sonpĂšreetyouvrit une Ă©picerie. Une fois cela accompli, il avu l’opportunitĂ©decrĂ©er et de mettre en bouteille un mĂ©lange unique de whisky pour le vendreĂ ses clients. Au fil des ans, le petit hobbyde John dans l’arriĂšre-boutique s’est transformĂ© en une gigantesque distillerie Ă©cossaiseetilcommença le voyage avec sesfils pour crĂ©er ce que nousconnaissons aujourd’hui comme l’emblĂ©matique Johnnie Walker

Aujourd’hui encore, le scotch whisky primĂ© Johnnie Walker recherche activement et cĂ©lĂšbreceux dont l’esprit ne recule jamais. Johnnie Walker,encollaboration avec Trace Africa, acommencĂ©son voyage au dĂ©but de l’annĂ©e pour trouver les 30 meilleurscrĂ©ateursafricains de la prochaine gĂ©nĂ©ration dans les domaines de la musique, de la mode, de l’art, des mĂ©dias et du cinĂ©ma. Ces crĂ©ateurssontdes ambitieux, ceux qui dĂ©fient le statu quo et repoussent les limites de ce qui pourrait ĂȘtre.Allons Ă larencontrede ceux qui continuent Ă marcher

De Kinshasa et MaputoĂ  Addis et Abidjan, cescrĂ©ateursont fait avanc er leur carriĂšreendisant “oui” aux opportunitĂ©s qui se prĂ©sentaient Ă  eux. Pour beaucoup d’entreeux, la dĂ©cision de fairelepremier pas aĂ©tĂ© prise.

Une fois ce premier pas franchi, tout le restesemet en place. Pour l’Ivoirienne LafalaiseDion, crĂ©atricedemode, cela acommencĂ© par une vocation crĂ©ativeetle choix de suivrecette voie.Lafalaise utilisedescaurispourcrĂ©erdesbijoux complexes, mais ce sont plusque de simples Ɠuvres d’art -c’est aussiune dĂ©claration de prospĂ©ritĂ©, de spiritualitĂ©etdestatut. Comme l’explique Lafalaise, “la missionquejem’engage Ă mener Ă bien estpersonnelle, intime et collective. [...] C’est un devoir d’honorer mon hĂ©ritage et d’éleverlavoix de mes ancĂȘtresafin de briser les idĂ©es fausses qui entourent les pratiques ancestrales africaines. Je crois qu’il est important de dĂ©couvrir,d’apprendreetdepartager l’expertise des artisans africains Ă travers le monde.”

Le masque facial en cauris de Lafalaise, appelĂ© Lagabaja, aĂ©tĂ© portĂ©par la reine de la musique populaire, BeyoncĂ©. Àson tour,cela aeuunimpactsur la carriĂšrede Lafalaiseetsur sonobjectif audacieux.

Cependant, emprunter le chemin de l’invincibilitĂ©est souvent semĂ© d’embĂ»ches. Pour la plupart des membres du Top30, seule la dĂ©termination Ă rĂ©ussir les guide. C’est le cas d’Evelyne Ily, rĂ©alisatriceetactrice, originairedela CĂŽted’Ivoire. AprĂšs avoir acquis de l’expĂ©riencedevant et derriĂšrelacamĂ©ra, Evelyne acréésa propresociĂ©tĂ©,Yevedi Production, qui viseĂ former les jeunes femmes souhaitant rejoindrel’industrie du divertissement. Il est difficile pour une femme d’ĂȘtrepriseausĂ©rieux dans l’industrie du divertissement et Evelyne veut dĂ©fier ce stĂ©rĂ©otype en montrant que les femmes peuvent

ĂȘtre des productrices, des camĂ©ramans et des narratrices audacieuses.

Non loin d’Evelyne, l’artistevisuel Obou Gbais achoisi de considĂ©rer la pandĂ©mie du COVID comme une bĂ©nĂ©diction plutĂŽt que comme un dĂ©fi. Comme il le dit lui-mĂȘme, “la pandĂ©mie aaffectĂ© ma crĂ©ativitĂ© de maniĂšreproductiveetpositive. J’aisoudaineuplusdetemps seul chez moi pour me concentrer sur montravailetessayerdenouveaux Ă©lĂ©mentsetmĂ©thodes. Beaucoup degens ont dĂ» se limiter au mini mumpendantcettepĂ©riode,cequi peut ĂȘtre unesource d’inspiration, surtoutpourlesartistes.”

Obou acanalisĂ©sacrĂ©ativitĂ© dans des piĂšces qui parlaient d’identitĂ©, de traumatisme et de la condition humaine. Ses Ɠuvres ont Ă©tĂ© reconnues pour leur impact Ă©motionnel dans le monde entier et luiont valu plusieurs expositions.

On peut affirmer que lorsque le Top 30 dĂ©cidĂ© d’aller de l’avant, il le fait Ă grands pas. Ils deviennent inar rĂȘtables, persĂ©vĂ©rantsetfĂ©roces. Ils brisent les attentes et tirentle meilleur parti de chaque situation, qu’il s’agisse d’un dĂ©fi ou d’une opportunitĂ©.

Que peut apprendreleTop 30 à ceux qui veulent repousser les limites ?Ehbien, pour reprendre les motsdeJohnWalker,“Keep Walking!”

Consultez la listecomplĂšte du Top30deKeep Walking Africa sur afRicatop30.tRace.tv

ListedeSource: BubblegumClub OkayAfrica Obou Gbais CatĂ©gorie :Art Lafalaise Dion CatĂ©gorie :Mode Evelyne Ily CatĂ©gorie :CinĂ©ma L’abus d’alcool est dangereuxpour la santĂ©, Ă consommer avec modĂ©ration

tandis qu’une centaine de femmes Ă©taient violĂ©es par desmilitaires desforcesdedĂ©fenseetdesĂ©curitĂ©.

PrĂ©sidentedel’Association desvictimes, parents et amisdu28septembre(Avipa), qu’elle afondĂ©epeu aprĂšs,Asmaou Diallo s’estbattue sans relĂąche pour que lesresponsablessoient traduitsenjustice.Un«combat laborieux », menĂ© sous le rĂ©gime de transition de SĂ©kouba KonatĂ©, puis sous la prĂ©sidence d’Alpha CondĂ©.

C’estfinalement un militaire, Mamadi Doumbouya, l’actuel dirigeant de latransition, qui apermisque le procĂšsait enfin lieu. «Il Ă©tait tempsd’ouvrirles yeux desGuinĂ©ens sur ce qu’il s’estpassĂ© ce jour-lĂ , se fĂ©licite Asmaou Diallo.Cenesont que quelquesmilitaires qui sont devant lesjuges.Pourtant, si le procĂšs se dĂ©roule bien, c’estlaGuinĂ©equi gagnera. Lesgens saurontqu’il n’estplus possiblede commettreles mĂȘmeserreurs. »

Prix Martin-Ennals (l’équivalent du Nobeldes droits de l’homme) en 2015,Asmaou Diallo se bat aussi pour que lessurvivantsdecedrame soient reconnus et indemnisĂ©s,notamment les femmesviolĂ©es,dont beaucoup ont Ă©tĂ©rĂ©pudiĂ©es par leur famille aprĂšs le drameetlivrĂ©es Ă elles-mĂȘmes. Pour la prĂ©sidentede l’Avipa, letravail de l’association se poursuivra aprĂšs le procĂšs,mais diffĂ©remment. «J’aiperdu mon fils, je ne pourrai jamais le retrouver. Mais, lorsque justice aura Ă©tĂ©rendue, j’aurailaconscience tranquille», conclut-elle.

ALIOUNE TINE

FAISEUR DE PAIX

Bien malgrĂ©lui,Alioune Tine, 73 ans, sera encoreune fois sur le devant de la scĂšnepourdissuader un chef d’État sĂ©nĂ©galais–Macky Sallenl’occurrence –debriguer un troisiĂšmemandat.Si, Ă quatorze mois de la prĂ©sidentielle,ce dernier n’atoujourspas clarifiĂ© ses inten tions, sonsilence susciteuncertain embarraschez plusieursacteurs de la sociĂ©tĂ©civile,dontAlioune Tine. «Jesuis trĂšs gĂȘnĂ© de me tenir Ă nouveau auxcĂŽtĂ©s desjeunes,dix ans aprĂšs[avoirvĂ©cuune situation similaire], pour reparler de cette question », confiele militant des droitshumains, qui, le 27 octobre, alancĂ© avec desONG l’initiative «JĂ mm aGĂ«n 3e mandat»(«Mieux vaut la paixqu’un troisiĂšme mandat»).

L’ex-directeur rĂ©gional d’Amnesty International pour l’Afrique de

KARIM EL AYNAOUI INFLUENCE PUISSANCE 10

Connudepuisune vingtaine d’annĂ©es dĂ©jĂ , Karim El Aynaouifait toujours autant parler de lui. Le prĂ©sident exĂ©cutif de l’un desthink tanks lesplusinfluents du moment, le Policy Center for the NewSouth (PCNS), sis Ă Rabat, estinvariablement dĂ©crit comme «l’undes profils lesplus prometteursdesagĂ©nĂ©ration ».Ilcumule ce rĂŽle,entre autres,aveccelui de membre de conseils stratĂ©giquesouscientifiques auprĂšs de nombreuses institutions, comme l’AutoritĂ© marocainedumarchĂ© descapitaux ou encore l’Institut français desrelations internationales (Ifri).

Mais, depuis2014, Karim El Aynaouiest surtout doyendelaFacultĂ©degouvernance,sciences Ă©conomiquesetsociales(FGSES) de l’UniversitĂ© Mohammed-VIPolytechnique (UM6P). Il ahĂ©ritĂ©dece poste lorsque l’École de gouvernance et d’économiede Rabat, dontil Ă©taitle directeur, aĂ©tĂ© intĂ©grĂ©eĂ l’UM6P.

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 34 ENQUÊTE

l’Ouestetl’Afrique centrale s’était en effet dĂ©jĂ  opposĂ©,en2011-2012, Ă une troisiĂšme candidatured’Abdoulaye Wade (le prĂ©sident sortant s’était finalement inclinĂ© dans lesurnes). «Aujourd’hui, il serait incongru quejem’exclame “Macky dĂ©gage!” alorsqu’avec lesdirigeantsactuels nous avions militĂ©pour le dĂ©partde Wade », explique Alioune Tine,par ailleursexpertindĂ©pendant, chargĂ© par l’ONU d’évaluer la situation des droitsdel’homme au Mali.

Depuisplus de trenteans, ce docteur en linguistique qui aforgĂ© sa conscience politique, Ă lafindes annĂ©es 1970,ausein de la Ligue dĂ©mocratique (LD/MPT) s’efforce d’apaiser lestensions en Afrique de l’Ouest. En juin, il acontribuĂ© Ă dĂ©samorcer lacrise entrele gouvernement sĂ©nĂ©galais et les leadersdeYewwi Askan Wi (la principalecoalition de l’opposition), qui rĂ©clamaient le rĂ©tablissement de leur liste de candidatstitulaires aux lĂ©gislativesdu31juillet, invalidĂ©e parleConseil constitutionnel.

Un an plus tĂŽt, le fondateur d’AfrikajomCenter,unthink tank spĂ©cialisĂ©dans lesquestions de gouvernance,avait fait la navette entrelaprĂ©sidence,les leaders religieux et l’opposition pour obtenirla fin desmanifestations dĂ©clenchĂ©es,enmars2021, par l’arrestation d’Ousmane Sonko. Violemment rĂ©primĂ©es,elles avaient fait quatorze morts.

Alorsque le climat politique risque de se tendre d’iciĂ laprĂ©sidentielle,Alioune Tine appelle Ă lalibĂ©ration de dĂ©tenus politiquesetplaide po que Karim Wade et l’ex-maired Dakar,KhalifaSall, frappĂ©s d’ peine d’inĂ©ligibilitĂ©, recouvrent leursdroitsciviques(ils ont respectivement Ă©tĂ© condamnĂ©sĂ six et cinq ansdeprison, et Ă de fortesamendespour «enrichissement illicite» et «escroquerie portant sur

desfonds publics »). Le plaidoyer d’Alioune Tine semble avoir Ă©tĂ©entendu. Le 28 septembre, le chef de l’État ademandĂ© Ă son ministredelaJustice «d’examiner dans lesmeilleursdĂ©laisunschĂ©ma d’amnistie pour despersonnes ayant perduleur droit de vote ». HermannBoko

Depuis que MoulayHassanest entréàlaFGSES,en 2020,Aynaoui estl’interlocuteur privilĂ©giĂ© pour ce quiatrait au parcoursacadĂ©mique du prince hĂ©ritier Un rĂŽle sensible,qu’il honoreenĂ©tant en contact rĂ©gulier avec le prince, rapporteunproche.

En plus d’ĂȘtrel’une destĂȘtes d’affiche du monde universitaire marocain, ceconseiller privilĂ©giĂ© de Mostafa Terrab (le patrondugroupeOCP) estavant tout Ă©conomistedeformation. Titulaired’undoctorat en Ă©conomie de l’UniversitĂ©deBordeaux,passĂ© parla Banquemondiale et par labanque centrale du Maroc (Bank Al Maghrib),ilatout du parfait haut commis de l’État. Taiseux et discret, Karim El Aynaoui estaussi avareensorties mĂ©diatiquesqu’il estdotĂ©d’unimpres sionnant rĂ©seau relationnel, commeentĂ©moigne la liste desinvitĂ©s de marque qu’il reçoit aux Atlantic Dialogues, la confĂ©rence annuelle du PCNS. Dans ce thinktank,conçu pour ĂȘtreun« outil d’influenceĂ 

l’échelle internationale », Aynaoui,spĂ©cialiste reconnu de l’économie marocaineet de la macroĂ©conomie despaysĂ©mergents, passe pour un fervent dĂ©fenseur de la coopĂ©ration Sud-Sud.À ce perfectionniste qui aplusieurscordes Ă son arcon prĂȘtedeplusgrandes ambitions:remplacer Abdellatif Jouahri Ă latĂȘtede Bank AlMaghrib ou AhmedLahlimi Alami Ă celledu Haut-Commissariat au Plan.«Des projetsrĂ©alistes, maispas pour tout de suite»,commententles uns; «des plans sur la comĂšte », rĂ©torquentles plus sĂ©vĂšres, qui,sans remettreenquestion ses compĂ©tences,lui reprochent d’ĂȘtreune personnalité«controversĂ©e» et «peu diplomate».Lui dĂ©ment touteambition politique,son uniqueobjectifĂ©tant de «continuer Ă  travailler dansledomaine despolitiquespubliques, de la rĂ©flexionacadĂ©mique et sur lesdĂ©fis du dĂ©veloppement du Marocetdunouveau Sud ».

RymBousmid

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 35 ENQUÊTE

JULES ALINGETE LE ROBIN DES BOIS CONGOLAIS ?

Lorsqu’il estnomméàla tĂȘte de l’Inspection gĂ©nĂ©rale desfinances (IGF)delaRDCongo,en2020, qui connaĂźt JulesAlingeteKey? Cetexpert-comptableamenĂ©sa carriĂšreĂ l’ombre de cetteagence, puis au sein de plusieurscabinets ministĂ©riels,jusqu’à celui de l’Éco nomie nationale,oĂčilest directeur adjointlorsque FĂ©lix Tshisekedi le choisit.

Pour cet homme de 57 ans, originaireduMaĂŻ-Ndombe(ouest du pays), la mission s’annonce aussi largeque pĂ©rilleuse :Ă  lui de lutter contre la corruption, une des promesses phares du prĂ©sident.

Alingetes’y attaque tous azimuts, rĂ©volutionnant la mĂ©thode.SanglĂ© dans sonabacost Ă la Mobutu, sourcils froncĂ©s, il rĂ©pond volontiersaux questions desjournalistes et rend publicslaplupart de ses rapports.Les entreprises publiques sont auditĂ©es; lessommes provenant de certaines taxes, dĂ©cortiquĂ©es.Certains mastodontes congolais jusque-lĂ  intouchables

sont missur le bancdes accusĂ©s. Du «contrat du siĂšcle »concluen 2008 avec la Chine Ă lagestion de la GĂ©camines, l’em blĂ©matique sociĂ©tĂ© miniĂšre, sous Albert Yuma (2010-2021), l’IG dĂ©noncelaperte de de dollarsdurant la dencedeJosephKabi

LesrapportsparaphĂ© Alingetefontaussi tomber des figures de la viepolitique.Comme Matata Ponyo,l’ancien Premier ministre, misencausedans le scandale Bukanga-Lonzoetun tempsinquiĂ©tĂ©par la justice;ou Eteni Longondo,ex-ministre de la SantĂ©etsecrĂ©taireadjoint de l’Union pour la dĂ©mocratie et le progrĂšs social (UDPS),mis en causepour dĂ©tournementsde fonds destinĂ©s Ă laluttecontrele Covid-19.Mais lesdeuxhommesfinissent parĂȘtre blanchis et libĂ©rĂ©s.ÀlaGĂ©camines,

rsonne t finalement inquiĂ©tĂ©, stion stĂšres celle ses ont pas fondamentalement roche de r, et de dĂ©mo cratiquesduCongo(AFDC), du prĂ©sident du SĂ©nat Modeste BahatiLukwebo,Alingetes’est toujoursdĂ©fendu d’avoirappartenu Ă une quelconquechapelle.Reste queson agence estdirectement rattachĂ©eauchefdel’État,avecqui il Ă©changerĂ©guliĂšrement.Alorsque la RDC entredans une annĂ©eĂ©lectorale au coursdelaquelle le candidat Tshisekedi fera campagne, Jules Alingetetient l’occasion de fairela preuve de sonindĂ©pendance. Anna Sylvestre-Treiner

Entrez dans les coulissesdupouvoir. Abonnez-vous Sans engagement dĂšs 9,99 €/mois DĂ©couvrez nos offres en scannant le QR Code ENQUÊTE

LeCameroun,paysbilingued’Afrique centraleestsituĂ©aucƓurduGolfede GuinĂ©e;sasuperïŹcie,475000km2 pour unepopulationdeplusde27millions d’hommesetdefemmesauxtraditions richesetvariĂ©es.

Destinationtouristique,leCameroun prĂ©senteunegrandediversitĂ©de ressourcesdueĂ lavariĂ©tĂ©desonrelief, desonclimat,desafaune,ainsique desaïŹ‚ore.LeCamerounc’estĂ©galement unaccĂšsĂ lamer,debellesplagesvierges etsurtout,plusieursPortsdontun, eneauprofonde.

LaforĂȘtcamerounaiseconstituel’undes atoutsmajeursdupays;ellereprĂ©sente, Ă elleseulel’ensembledelaforĂȘt Ă©quatorialeducontinent,etrenferme desessencesfortrecherchĂ©es.

LeCamerounc’estĂ©galementune agriculturericheetdiversiïŹĂ©equifait decepays,legrenierdel’Afriquecentrale. IlestprĂ©sentĂ©commeunscandale gĂ©ologiquedufaitdesonsous-sol richeauxmineraisdivers.

LeCameroun,c’estaussi,unejeunesse bienformĂ©e,unpaysautauxdescolaritĂ© supĂ©rieurĂ lamoyenneenAfrique subsaharienne.

LeCameroun,c’estĂ©galementunclimat desaïŹ€airesfavorabledufaitd’uncadre juridiqueetrĂ©glementairesincitatif.

LeCamerounc’estsurtoutunpaysaux institutionssolides,unestabilitĂ© politiquequirassure.

C’estceCameroundynamique,paciïŹque etïŹerquis’ouvreĂ tous,etdontlaporte d’entrĂ©eestl’AgencedePromotion desInvestissements.

AGENCE DE PROMOTION DES INVESTISSEMENTS CAMEROUN

B.P.:20771 Yaoundé www.investincameroon.net

SCIENCES, RECHERCHE, INNOV AT ION

MARAM KAIRE

L’AFRIQUE SUR ORBITE

MaramKaireavait dĂ©jĂ  la tĂȘte dans les Ă©toileslorsqu’il n’était qu’ungamindeDakar, s’échappant aprĂšs le dĂźner pour observer le ciel.Enmai 2021,ilya inscrit sonpatronyme en devenant le premier SĂ©nĂ©galais Ă donner son nom Ă unastĂ©roĂŻde.

Quand l’objetcĂ©leste 35462est dĂ©couvert par le Français Alain Maury, en 1998,MaramKaire n’aque 20 ans.AprĂšs Polytechnique Dakar,il entame ses Ă©tudesd’ingĂ©nieur Ă Paris,etila «rangĂ© dansune boĂźte» sa passion d’enfance: l’astronomie.«Tout avait commencĂ©en 1986,quandj’avais apprisaux informations que la navetteamĂ©ri caine Challenger s’était dĂ©sintĂ©grĂ©e. Avantcela, je ne savais mĂȘme pas ce qu’était l’espace», raconte-t-il. Il dĂ©vore alorsles livres des

astrophysiciensHubert Reeves et Robert Jastrowet, à14ans, construitson premier télescope, àpartir de planchesdécoupéeset de lentillesdejumelles.

«Une phrasedemon pĂšre rĂ©sonne encore dans ma tĂȘte.Quand je lui ai dit que je voulais ĂȘtreastronome,ilm’a rĂ©ponduque je n’aurais jamais de travail au SĂ©nĂ©gal,qu’ici ça n’existait pas. Ça aĂ©tĂ© un dĂ©clic :j’avais le choix entreabandonner ma passion etĂȘtrecontraint de vivreĂ l’étranger. J’ai dĂ©cidĂ© de mebattre pour queles autres, aprĂšs moi, n’aient pas Ă  choisir.»

Le virage estpris en dĂ©cembre2005. Celuiqui estalors ingĂ©nieur en France rentre Ă Dakar afin de «vulgariserl’astro nomie».IlcrĂ©eAfrica Space,constructeur

de microsatellites et fournisseur d’imageries satellitaires.Surtout, il lance l’Association sĂ©nĂ©galaisepour la promotiondel’astro nomie,qui propose aux SĂ©nĂ©galais« de 4Ă  99 ans »des «baladessous lesĂ©toiles »ouĂ bordde Spacebus.

S’ensuivral’organisation de trois missionsauSĂ©nĂ©gal, sous la houlettedela Nasa.« Uneprouesse dans un pays quine

compte pas d’astronomesprofessionnels! Pour n’importequi,ça aurait Ă©tĂ©infaisable, mais Maram l’afait!» s’exclame l’astrophysicienÉric Lagadec, qui a participéàdeuxdeces missions.

UnedĂ©termination rĂ©compensĂ©e lorsque lesastrophysiciens français qui ont travaillĂ© avec Maram Kairedemandent que l’astredĂ©couvert par Mauryporte sonnom

LBACHIR BENMOHAMED L’ENNEMI DES PANDÉMIES

Directeur du laboratoirederecherche en immunologie de l’UniversitĂ©deCalifornie-Irvine,ce chercheur marocain natif de Tagante(villageamazigh situéà18kmde Guelmim) estlacoqueluche desmĂ©dias amĂ©ricains depuis qu’il abrevetĂ© un vaccin universel efficacecontre toutes lesformes de coronavirus. Car, tient-il Ă rappeler, la pandĂ©mie de 2020 estloind’ĂȘtrela derniĂšre.

Lbachir BenMohameds’apprĂȘtedonc avec sonĂ©quipe de neuf chercheurs Ă lancer lesessais cliniques de ce vaccin, pour lequel lesÉtats-Unis ont investi19millions de dollars(4millions pour sondĂ©veloppementet 15 millions pour les essais cliniques). GrĂące Ă ses travaux

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 38 ENQUÊTE

«Tuhonores l’astronomie, il estnormal qu’elle t’honore», Ă©crira ce dernierĂ  Kaire quandildonnerason nomaucorpscĂ©leste de 10 km de diamĂštrequi graviteautour du Soleil, entreMarsetJupiter. Ce fut une «immense surprise, que j’ai reçue avec beaucoup d’humilitĂ© », commente l’intĂ©ressĂ©.

«Cettereconnaissance,Maraml’a amplement mĂ©ritĂ©e, mais ellevaau-delĂ de sa personne, ellevaut pour tout le SĂ©nĂ©gal », estime Éric Lagadec.

Pour Maram Kaire, l’enjeu estbien lĂ  :«Je veux que lesjeunes de mon pays puissent devenir astronomesou astrophysicienss’ils le souhaitent. Ce sera possible le jour oĂč le SĂ©nĂ©galsera devenu une nation spatiale. »

Manon Laplace

PATRICK ELOUNDOU PHARMA AFRICA

Dansunenvironnement trÚs concur rentiel et encore largement dominé parles laboratoires pharmaceutiques étrangers, Patrick Eloundou afait le pari de fabriquer dans sonpays, le Cameroun, desmédicaments dequalité, conformes aux normes internationales.

Un dĂ©fi qui aprisforme en 2019 avec la crĂ©ation de Tebimosa Pharmaceuticals.SituĂ©eĂ Mfomakap, danslabanlieue de YaoundĂ©, l’usine s’étend sur 3000m2.Elle produit quotidiennement 2millionsde comprimĂ©scontrelepaludisme,les mycoses et lesversintestinaux, ainsi que desgels dĂ©sinfectants.

L’entrĂ©e de Tebimosa sur le marchĂ© desanticancĂ©reux,en2020, arendu cesmĂ©dicaments disponibles,Ă  un coĂ»t sept foisinfĂ©rieuraux prix usuels–fruit d’une collaboration avec le laboratoiretunisien Cytopharma, qui en dĂ©tient les brevets.

Patrick Eloundou et Tebimosa Pharmaceuticals pourraient-ils ravir au sous-continentindien sa premiĂšreplace d’exportateur sur le marchĂ© africain du mĂ©dicament? Pour l’anciendirecteur desfilialesde

Delpharm, Unither et PetersSurgical, ce marchĂ©,aujourd’huiĂ©valuĂ© Ă prĂšs de 500milliards de FCFA (environ 762millions d’euros), estentoutcas une aubaine pour lespaysafricains, qui pourraient en fairel’undes piliers deleurdĂ©veloppement.

DiplĂŽmĂ© de la facultĂ©depharmacie deGrenoble (France), Eloundou envisagedecrĂ©er un laboratoire exclusivement consacréà l’étude des plantesutilisĂ©esdans la mĂ©decine traditionnelleafricaine,d’oĂčsorti raientdes mĂ©dicaments manufacturĂ©s.Pour ce faire, lesbĂ©nĂ©fices de TebimosasontrĂ©investis dansla recherche et le dĂ©veloppement.Pour Patrick Eloundou, le cap estclair : «L’Afrique ne doit plus dĂ©pendrede l’étrangerpour se soigner. » Franck Foute, Ă YaoundĂ©

et Ă ses recherchessur l’herpĂšs simplex,le scientifique figure, en 2022, sur la liste desnominĂ©sduprixWarren Alpert, quedĂ©cernent chaque annĂ©elaHarvard Medical School (Ă  Boston)etlaWarrenAlpertFoundation.

Rien ne prĂ©destinait pourtant ce ouldchaab (« fils du peuple »), nĂ© en 1968 au Marocdans un milieu populaire–son pĂšre aĂ©tĂ© berger,puis mineur dans le norddelaFranceavant d’ouvrir une petiteĂ©picerie Ă Guelmim–,Ă  devenir une star de l’immunologie,Ă  la tĂȘte de l’undes laboratoires de recherche lesplus importantsd’AmĂ©rique du Nord

AprĂšs une licence en biologie Ă lafacultĂ©des sciences d’Agadir, puis un doctorat Ă l’Institut Pasteur,Ă  Paris,

le chercheur fait un postdoctorat Ă l’UniversitĂ©de Californie (États-Unis), dont il agravitousles Ă©chelons. Aujourd’hui, il espĂšre crĂ©erauMaroc le premier institut d’immunologie d’Afriqueafin d’aider lespays du continentĂ affronter lesĂ©pidĂ©miesinfectieuses, prĂ©sentes et futures:« Au coursdeces vingt derniĂšres annĂ©es,beaucoup d’entreelles, commeEbola, ont dĂ©butĂ©enAfrique,souligne-t-il. Je suis prĂȘt Ă faire bĂ©nĂ© ficier le Marocdemes vingt-cinqannĂ©es d’expĂ©rience, acquisesenEuropeetaux États-Unis, pour fairedupays la locomotive de l’AfriqueenmatiĂšre de recherche,de dĂ©veloppement etdeproduction de vaccins. »

FadwaIslah

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 39 ENQUÊTE

RACHID YAZAMI CHARGÉ ÀBLOC

À69ans, cet ingĂ©nieur diplĂŽmĂ© de l’Institut national polytechnique de Grenoble (INPG),issud’une famille modestedeFĂšs,areçudenombreuses rĂ©compenses, dont le prix Charles-Stark-Draper (Ă©quivalent du Nobel pour lesingĂ©nieurs) pour ses travaux de recherche sur les batteriesrechargeables. Un symposium sur la fabrication et le recyclagedurablesdes batteriessecondaires portant sonnom amĂȘme Ă©tĂ©organiséàlafindenovembre, en ThaĂŻlande,enprĂ©sence de neuf Prix Nobel.

Sa dĂ©couverte de l’anode graphitepour la batterie lithium-ion, qui estaucƓur de la transition Ă©ner gĂ©tique,a rĂ©volutionnĂ© le monde.Lescientifique marocain ne compte pass’arrĂȘter lĂ  :avecson Ă©quipe, Ă Singapour, il aprĂ©sentĂ©, en septembre, uneinnovation permettant de recharger lesbatteriesĂ©lectriques de voitures en moins de six minutes.Une performance qui aĂ©tĂ© au cƓur desdĂ©batslorsducongrĂšs international BatteriesEvent,enoctobre.

Rachid Yazami –qui vit entreSingapour,Grenoble et le Maroc–reste fidĂšle Ă ses racines.Il afondĂ©,Ă FĂšs, un Centre d’excellence sur lesbatteries(CEB), qui apour but deformerdes ingĂ©nieurscompĂ©tentsdans ce domaine, et afait don de plusieursbrevets Ă son

TTribune YannGwet

A

alyste politique Ces Africains qui bousculent eprĂȘt-Ă -penser

LestandardRSS.Les licences «Creative Commons ». La fameuseplateformeReddit. Toutes cescrĂ©ations, et d’autres encore, portent la marque d’Aaron Swartz. Cettefigure de l’internet libre, qui,en2013,s’est donnĂ©la mortĂ l’ñge de 26 ans, encourait une peine de trente-cinq ans de prison et une amende de 1million de dollarsaumomentdesamort. Soncrime ?Avoir misencirculation plus de 4millions d’articles universitairesillĂ©galementtĂ©lĂ©chargĂ©s surlesite(payant) de la bibliothĂšque numĂ©riqueJSTOR.

Au-delĂ  de sontalent, de son engagement et de ses rĂ©alisations, deux choses frappent chez cet informaticienprĂ©coce : soncouragemoral et sonindĂ©pendance d’esprit. Dans une

interview,en2010,ilexpliquait le sentiment de frustrationqu’avait suscitĂ©chez lui un systĂšme Ă©ducatif qu’il jugeait rigide,autoritaire, dĂ©pourvu d’ambition.

S’il fait peudedouteque «l’École »enaaliĂ©nĂ©plusd’un, la maniĂšre dont Aaron Swartz rĂ©agissait Ă cette frustration Ă©tait Ă©loquente:« Je me suis misĂ lire deslivressur l’histoiredel’éducation, la maniĂšredont le systĂšme Ă©ducatif fut dĂ©veloppĂ©,des alternativesĂ cesystĂšme,lamaniĂšre dont lesgens pourraient vĂ©rita blement s’instruireplutĂŽt que de simplement rĂ©pĂ©tercequ’on leur aenseignĂ©.Cela m’aconduit Ă m’interroger et Ă dĂ©construire tout. AprĂšs la remise en cause de l’écoledans laquelle j’étais,jeme penchai surlasociĂ©tĂ©dontcette

Ă©cole Ă©tait le produit,les entreprises danslesquellesl’institution scolaire enverrait ses Ă©lĂšves,et enfinl’État qui avait Ă©difiĂ© toute cette infrastructure. »

Passage révélateur de la densité intellectuelle du personnage, mais aussideson caractÚresubversif. Avec lesaffaires Snowden et Assange, le grand public adécouvert le sort réservéàceux qui persistent àpenser hors des sentiers battusetqui ont le talent de traduireleursidées en actes.

Car«changer leschoses », c’estremettre en causel’ordre Ă©tabli, contesterlalĂ©gitimitĂ©des institutions de pouvoir.Quel que soit le domaine –scientifique, culturel, artistique –, et quelle que soit l’intention desdissidents, toutedĂ©marchedont l’issue

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 40 ENQUÊTE

pays natal. «AveclatransitionĂ©nergĂ©tique,l’industrie marocaine aura un gros besoin de main-d’ƓuvreformĂ©e Ă ces technologies, qui connaisse le fonctionnement des batteries, le circuit de fabrication ainsi que lesnormes de sĂ©curitĂ©,explique-t-il. Le CEB permettra de rĂ©pondre Ă cettedemande.»

Le chercheur discutepar ailleursavecdiffĂ©rents partenaires de laconstruction,auMaroc,d’une usine GigaFactory de production de batteriesetdesystĂšmes derechargeultrarapides. S’il se rĂ©alisait, ce projet permettraitauroyaume de devenir un hub pour le continentafricain, oĂč, pour le moment, aucun pays ne produit de batteriesaulithium.

FadwaIslah

conduitĂ fairetable rasedel’ordre dominant estfondamentalement politique et avocation Ă susciter une rĂ©ponseforte destenantsdu statu quo.

Uneépoque étrange

Lesexemplesabondent. D’une certaine maniĂšre, d’ailleurs, le test ultime pour distinguer lespersonnalitĂ©s vĂ©ritablement «rĂ©volutionnaires »des autres,c’est l’attitude desautoritĂ©s Ă leur endroit.Il seraitnaĂŻf de penser que tous ceux qui sont dans le collimateur du pouvoirsont nĂ©cessairement porteursd’un«vraichangement », certes. Mais il ne fait aucundoute que ceux qui sont adoubĂ©s par lesstructuresdepouvoir sont jugĂ©s hautement «compatibles ». Imagine-t-on Edward Snowden ou Julian AssangeinvitĂ©s Ă la Maison-Blanche,rĂ©compensĂ©s par le gouvernement amĂ©ricain ?

L’Afrique ason patrimoine de game changers. Ceux-ciont souvent Ă©mergéàdes pĂ©riodes oĂč l’HistoireĂ©tait en mouvement (indĂ©pendances, luttes pour le multipartisme,etc.). AprĂšs la guerrefroide, l’Histoires’est figĂ©e –lechercheur en sciences politiquesamĂ©ricain Francis Fukuyama pensant alorsqu’elle Ă©tait terminĂ©e.EnAfrique,les classesĂ©duquĂ©es se sont «professionnalisĂ©es»:prioritéàla

carriÚreetausuccÚsindividuel. La mondialisation aencouragé cettetendance,offrant visibilité, statureetlauriersaux profils les plus lisses, lesplusdociles, lesplus inoffensifs.

Dansces conditions, Ă quoi bon «changer leschoses »?Lecynisme estd’époque.Une Ă©poque Ă©trange, oĂč lessupposĂ©s« leaders »africains, de demain ou d’aujourd’hui, sont cooptĂ©s, misenbouteille et

Africains qui refusedepasser sa vie entreNetflix et TikTok et s’obstine àfaireentendre une voix politiquement incorrecte.

L’émergence despuissancesque lesstratĂšgesamĂ©ricainsqualifient de «rĂ©visionnistes »est fascinante pour deux raisons. D’abord, ces puissancescontestent l’ordre dominant. Sans surprise, ellessont fĂ©rocement combattues, ce qui confirme qu’ellesincarnent bien une possiblealternative Ă l’ordre actuel. Ensuite, leur existence crĂ©e un espace.Toutd’uncoup, desoptions existent,denouvelles alliancessenouent, desidĂ©es qui avaient disparu de l’ordre du jour rĂ©apparaissent dans les discussions, un nouvelhorizon se dessine.

proposĂ©s au public par diverses structures dont la raison d’ĂȘtre est la dĂ©fensedel’ordre en place.

Nous en Ă©tions lĂ  jusqu’à ce que, contre touteattente, l’Histoirese remetteenmouvement. Il yaeu l’émergencedelaChine,del’Inde, et d’autres puissancesdĂ©termi nĂ©es Ă s’imposer sur la scĂšne internationale et Ă redĂ©finir l’ordre mondial, le rĂ©veil d’une Russie que l’Occident croyait avoir enterrĂ©e aprĂšs l’effondrement de l’URSS, et l’arrivĂ©esur le devant de la scĂšne d’une gĂ©nĂ©rationdejeunes

«Lemonde ancien se meurt, le monde nouveau tarde Ă apparaĂźtre, et dans ce clair-obscur surgissent lesmonstres », avait prĂ©venu le philosopheet thĂ©o ricien du marxisme Antonio Gramsci. Lestempsqui viennent seront troublĂ©s. Mais il yafortĂ  parier que,dans cettepĂ©riodede bouillonnement historique, de nouvellesfigures Ă©mergeront en Afrique,dĂ©terminĂ©es,indĂ©pendantes d’esprit,capablesdepenser un monde complexeetdecrĂ©er les conditions de ruptures libĂ©ratrices. Aujourd’hui, comme hier, chacun saura lesreconnaĂźtre.

Unegénération de jeunesrefuse de passer sa vie sur Netflix ou TikTok.
JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 41 ENQUÊTE

LUTTE CONTRE LE CONSERV AT ISME, DROIT DES FEMMES MARIE-PAULE OKRI

LA VOIX DES VIES BRISÉES

Elle passe unegrandepartiedeses journĂ©es, et parfoisdeses nuits, les yeux rivĂ©ssur sesmessages ou suspendue au tĂ©lĂ©phone.Elle rĂ©pond aux questions de parentsdontunenfant aĂ©tĂ© abusĂ©, Ă©coute lestĂ©moignagesd’adolescentes violĂ©es ou ienrassureune femmeque sonmari violente tente, tant bien quemal,delamettreĂ l’abri –laCĂŽted’Ivoirenedispose quedehuitplaces d’accueil pour femmes battues, et desstructures privĂ©es sont en cours de crĂ©ation ÂgĂ©e d’àpeine 30 ans, Marie-Paule Okri recueille sans faiblir tous cesrĂ©citsde viesfracassĂ©es.Cofondatrice de la Ligue ivoirienne desdroitsdes femmes, ou Ligue225,nĂ©e sur lesrĂ©seaux sociauxen avril 2020 et qui compte environ 200 bĂ©nĂ©voles,elle incarne un fĂ©minisme

SONIA TERRAB SUR LES TRACES DE SIMONE DE BEAUVOIR

Sa tribune danslemensuel Femmes du Maroc, lorsqu’une Marocaine avait Ă©tĂ©arrĂȘtĂ©e pour «avortementillĂ©gal », en 2019, avait dĂ©frayĂ© la chronique.Sur le modĂšle du «Manifeste des 343»(paru en 1971 dans Le Nouvel Observateur Ă l’initiative de Simone de Beauvoir et appelant Ă lalĂ©galisation de l’avortement en France), SoniaTerrab s’étaitnotammentassociĂ©eĂ la romanciĂšre LeĂŻlaSlimani et avait rassemblĂ© 490 signatures.

Trois ans et demi plus tard, le Collectif 490, dit MoroccanOutlaws, qu’elle acofondĂ©,vient de dĂ©poserĂ laChambre desreprĂ©sentants une pĂ©titiondemandant unemodification de l’article 490ducodepĂ©nal, qui punit d’emprisonnement lesrelations sexuelles horsmariage. Ce dĂ©pĂŽt,symbolique,«est dĂ©jĂ  une victoireen soi, qui montreque tout estpossible », explique la jeune femme,qui, en plus d’accompagner lesactions coup-de poing, gĂšre la stratĂ©gie digitale du Collectif 490. Ainsi,enseptembre, quand le dĂ©cĂšsd’une adolescenteĂ lasuited’un avortement clandestin avait soulevĂ©une vague d’indignation, SoniaTerrab avait dĂ©crĂ©tĂ©une

journée de deuil avec,commemot de rallie ment,lehashtag #Meriem,prénomleplus donné au Maroc.

RentrĂ©edans sonpaysen2014aprĂšs avoir vĂ©cu en France,laMeknassie se dĂ©mĂšne sur tous lesfrontspourfaireĂ©voluer lois et mentalitĂ©s.AprĂšs une brĂšvecarriĂšredejournaliste, elle estaujourd’hui tout Ă lafois militantedes droitsdes femmes, romanciĂšreetrĂ©alisatrice Pourtant, elleavoue n’avoirdĂ©couvert le combat fĂ©ministe qu’en2017,lorsdelarĂ©alisation d’une sĂ©riedocumentaireproduitepar le programme Jawjab, incubateur de la sociĂ©tĂ©deproduction de Nabil Ayouch. La sortie de Marokkiates, oĂč la rĂ©alisatricedonnait la parole Ă des Marocaines sur dessujetstabous, coĂŻncidait avec la naissance du mouvement #MeToo :«J’ai commencĂ© Ă penser ma fĂ©minitĂ©,j’airepassĂ© le film de ma proprevie,etje me suis souvenue desparolesdefemmesqui me racontaient des histoires terribles.»

Avec cette nouvellepĂ©tition contre la pĂ©nali sation desrelations extraconjugales, l’objectif estde«rassembler tous lesargumentsdes

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 42 ENQUÊTE

combatif et n’hĂ©site pas interpeller lesresponsablespolitiquespour queles dossiers desvictimes ne soient pasmis de cĂŽtĂ© parl’administration ou parlajustice.

La Ligue s’estrapprochĂ©ed’autresassociations ivoiriennesdeluttecontreles violencessexistes. Ellesforment aujourd’hui un largecollectif. «Nous travaillons en synergie,pourdonnerplus de poids Ă notre action », se rĂ©jouitMarie-Paule Okri,qui multiplie aussi lesvoyages dans la sous-rĂ©gion pour rencontrer d’autres associations fĂ©ministes. Elle compte mĂȘme se prĂ©senteren candidateindĂ©pendanteaux Ă©lections lĂ©gislativesde2026. L’AssemblĂ©enecompte que 12 % de femmes. «Jesais ce que ça fait de ne pas ĂȘtre Ă©coutĂ©e », sourit-elle FlorenceRichard

conservateursetdeles retournercontreeux ». Pour SoniaTerrab,l’article490 n’estque le premier d’une longue liste de textes Ă revoir ou Ă  abroger.«Onest continuellement et quotidiennementsujettesĂ des discriminations,rappelle t-elle.Onn’est pas lĂ pour fairelalibĂ©ration sexuelle,maispour changertoutesles lois liberticidesrelativesaux droitssociĂ©taux.»

LAETITIA KY AFROFÉMINISTE ÀTOUT

CRIN

En 2022, Laetitia Ky aĂ©tabliunrecorddu monde.Celui du plus grand nombredesauts rĂ©alisĂ©s en moinsde30 secondesau-dessus de ses propres cheveux, modelĂ©sencorde Ă sauter.Unrecordinsoliteet, dit-elle,«un honneur ». Mais cetteIvoirienne de 26 ans aunmessage plus politique Ă fairepasser depuis qu’elle s’estfait connaĂźtresur les rĂ©seaux sociaux grĂące Ă ses impressionnantes sculptures capillairesrĂ©alisĂ©essur sa tĂȘte avec du fil de fer –une idĂ©einspirĂ©e de certaines coiffures africainesremontant Ă lapĂ©riode prĂ©coloniale.

Devenue cĂ©lĂšbreen2017, Laetitia Ky a rapidement comprisque l’utilisationdeses cheveux commemoded’expressionlui offrait d’infiniespossibilitĂ©s pour faire entendre sa voix.Luttecontreles violencessexuelles, droit Ă l’avortement, cĂ©lĂ©bration de la beautĂ© desNoires–etdeleurscheveux,Ă©videmment –, Laetitia Ky dĂ©fend sa pensĂ©e fĂ©ministe sur diffĂ©rentes plateformes(6,2millions d’abonnĂ©s sur TikTok,prĂšsde500000 sur Instagram).

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 43 ENQUÊTE

Qu’elle fasse naĂźtreautour de sonvisage un voile fait de cheveux tissĂ©s pour dĂ©fendrela cause desIraniennesoubien qu’elle se photographie,les cuisses couvertes de peinture rouge, pour revendiquer le droit Ă l’hygiĂšne menstruelle,l’artiste dĂ©construit lesnon-dits liĂ©sĂ lacondition de la femme

Pour sa premiĂšreexposition, Laetitia Ky a reprĂ©sentĂ©son pays Ă laBiennale de Venise, en avril Au mĂȘme moment sortait son premierlivre, Love and Justice, qui retrace sonparcoursetprĂ©senteses Ɠuvres.«L’un desmoyens lespluspuissantspourlutter

ENQUÊTE

contre la violenceest d’utiliserlepouvoir de la parole.Nos voix peuvent changer desvies», a fait savoir l’artiste,qui apartagĂ©seizehistoires d’agressionssexuellesconfiĂ©es pardes anonymes. Savoir s’accepter, dĂ©fier lescanons de beautĂ© en refusant l’épilation ou le port du soutien-gorge, lutter contre lesprĂ©jugĂ©s, protĂ©gerles femmes de la violence de genre: autant de thĂšmes sur lesquels elle revient sans cesse–toujoursenutilisant ses cheveux commeoutil politique.Ouvrant ainsi la voie Ă  desdĂ©batssur dessujetsencoretabous. MariĂšme SoumarĂ©

SALIMA MUKANSANGA SIFFLET ET BALLON ROND

SurWhatsApp, elle vous accueille avec gentillesseavant de conclureles salutations d’usage par un « Fine,al-hamdou lillah! », ce qui n’est pas si courant au Rwanda. En ce 26 octobre, Ă l’approche du Mondialdefootball au Qatar (20 novembre-18 dĂ©cembre), Salima Radhia Mukansanga devient une femme pressĂ©e. À peine le contactĂ©tabli, la voici qui Ă©numĂšreles activitĂ©s qui l’attendent avant ce rendez-vous crucial :« Tests de fitness,sessions et tests thĂ©oriques, examens mĂ©dicaux » Pas question de fairelamoindre entorse Ă ladisciplineque ce dĂ©fi lui impose.AuQatar,cette Rwandaisefera en effet partie d’un trio inĂ©dit. Avec la Française StĂ©phanie FrappartetlaJaponaiseYoshimi Yamashita, elle sera l’un des105 arbitres que la Fifa aretenuspour la compĂ©titionreine.Elles seront sixfemmes, dont trois arbitres assistantes :une premiĂšredans une Coupedumonde masculine Àl’occasiondeladerniĂšreCouped’Afrique desnations (CAN), au Cameroun, Salima Mukansanga avait dĂ©jĂ  marquĂ© l’histoiredu ballon rond en arbitrant la rencontreentrele Zimbabwe et la GuinĂ©e,le18 janvier,Ă YaoundĂ©

La jeune femme avait pourtant commencĂ© sa carriĂšresportive par le basket-ball, avantd’abandonner sonrĂȘvedepratiquer ce sport en professionnelle fautedestructures adĂ©quates dansson pays. InitiĂ©eaufootball par sonpĂšre, elleafinalement optĂ© pour l’arbitrage, et, depuisl’obtention de son diplĂŽme, en 2008,a participĂ© Ă nombredecompĂ© titions internationalesfĂ©minines:Mondialdes moins de 17 ans, CAN,Jeux olympiques
 Digne reprĂ©sentante d’un pays qui afait de l’égalitĂ©homme-femme l’un de ses mantras, elle dĂ©clarait au quotidien français L’Équipe, au lendemain de la CAN :« Je voudrais ouvrir d’autres portes,etmontrer auxAfricainesqu’elles peuvent yarriveraussi.»Le20novembre, elle aura gagnĂ© sonpari. Mehdi Ba

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 44

ÉCONOMIE

MIKA DIOL LE TEMPS, C’EST DE L’ARGENT

La guerredes prixdumobile money fait rageauSĂ©nĂ©gal et en CĂŽte d’Ivoire, pour le plus grand plaisir desconsommateurs, qui, Ă lafaveur desbaissestarifaires et en particulier depuis que Wave acassĂ© lesprix destransactions, s’estiment lesgagnants de cetteconcurrence acharnĂ©e. Teln’est paslecas desagentsde distribution du mobile money, qui gĂšrent lesquantitĂ©s d’argent liquide Ă©changĂ©esquotidiennement et qui constituent donc le centrenĂ©vralgique du secteur.Depuisplusieursmois, ces intermĂ©diaires n’hĂ©sitent plusĂ  exprimer leur mĂ©contentement face Ă l’effondrement destaux de commissions, qui leur permettaient jadis de vivre. C’estce manque Ă gagner que l’entrepreneur sĂ©nĂ©galais Mika Diol, 45 ans, pensepouvoir combler en proposant Ă ces agentsdedevenir desfranchisĂ©s de sa sociĂ©tĂ©, KaliSpot.

Créée en 2019, la start-up alevĂ©des fonds, en aoĂ»t dernier, auprĂšs de 500 Global, un investisseur rĂ©putĂ© de la Silicon Valley. Objectif :installer un rĂ©seau de distributeurs automatiquesdebillets de banque au SĂ©nĂ©gal, en CĂŽte d’Ivoire, puis dans la sous-rĂ©gion de l’Ouestetdu Centre.ConnectĂ©s Ă l’internet mobile en 3G et raccordables Ă des panneaux solaires,les guichetsdeKaliSpot sont disponiblesĂ touteheure,ettous les joursdelasemaine. Surtout, ils sont compatiblesavec lessystĂšmesdes principaux acteursdumobile money,cequi permet Ă tout dĂ©tenteur d’un portefeuille OrangeMoney, Wave ou autrederetirerde l’argent lorsqu’il le souhaiteet indĂ©pendamment deshoraires d’agence.

Pour installer rapidement ses distributeursdebillets en Afrique de l’Ouesteten Afrique centrale,Mika Diol espĂšre convaincreles agents du mobile money qu’investir dans desappareils KaliSpot leur apportera un complĂ©ment de revenu. De quoi rĂ©tablir un certain Ă©quilibredans la chaĂźne de valeur d’une industrie qui pĂšse 701milliards de dollars sur le continent et dont le SĂ©nĂ©galais compte capterune partsignificative.

NELLYCHATUE-DIOP REINE DU CRYPTO

Éduquer lesAfricains et leur diaspora Ă lafinance en utilisant la cryptomonnaie :c’est l’ambitieux dĂ©fi que s’estfixĂ© la Franco CamerounaiseNellyChatue-Diop en 2019. Conçue comme une plateforme financiĂšre, Ejara permet d’épargner et d’investir soit en actions, soit dans desmatiĂšres premiĂšres,soit en cryptomonnaies grĂące Ă unportefeuille mobile money.L’entrepriserapproche ainsi le monde descryptomonnaies (connectĂ©ausystĂšme bancaire, puisqu’il faut un compte bancairepour en acheter) despopulations nonbancarisĂ©es.

Avant de regagner le Cameroun, en 2020,cetteingĂ©nieureen informatique et tĂ©lĂ©communications, formĂ©eenFrance, avait construit l’essentiel de sa carriĂšreenEurope. Experteenanalysede donnĂ©es,elle aoccupĂ©des postes de conseil, de management et de direction au sein desgroupes Darty, Casino ou encoreBetclic Àmesureque la pĂ©nĂ©tration du bitcoin et de sesdĂ©rivĂ©s progresse, Ejara permet aux utilisateursdecrĂ©er un portefeuille crypto-dĂ©centralisĂ©. Sur un continent oĂč 80 %delapopulation n’estpas bancarisĂ©e,mais oĂč l’adoption du mobile money

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 46 ENQUÊTE

connaĂźt une croissance annuelle Ă deux chiffres, nombreux sont ceux qui voient dans cettealternative au secteur financier traditionnel une menace.Ils sont tout aussi nombreux Ă considĂ©rer qu’elle peut contribuer Ă  l’intĂ©gration Ă©conomique du continent.

Fortedecetteperspective, Ejara adĂ©jĂ  levĂ©2 millions de dollarsen2021etobtenu une licence de prestataire de servicessur actifs numĂ©riquesauprĂšs de l’AutoritĂ©

LAUREEN KOUASSI-OLSSON STRATÈGE DU LUXE

françaisedes marchésfinanciers. En octobre, la jeune pousse aconclu un deuxiÚme tour de table àhuit chiffres. Elle compte de nombreux spécialistesdes cryptomon naiesparmi sesinvestisseurs, dont leslondoniens Anthemis Group et CoinShares,ainsi que Pascal Gauthier, fondateur de la start-up françaiseLedger, leader mondial de la conservation et de la protection descryptoactifs.

«Vous avez desbombes crĂ©ativesdevant vous, et vous n’en faites rien!»LorsduCreative Africa Nexus (Canex), en septembre, Laureen Kouassi-Olssonn’a pasmĂąchĂ©ses mots devant la ministreivoirienne de la CultureetleprĂ©sident d’Afreximbank. Il yadeuxans,cette trentenaire, quiaconnu une premiĂšre vie dans le private equity chez Lehman Brothers,Proparco et Amethis, s’estdonnĂ© une mission :aider lescrĂ©ateursducontinent Ă entrersur le marchĂ© mondialduluxe, considĂ©rĂ© parbeaucoup comme inaccessible. En unmot :sublimer l’exception africaine.

Depuis la fondation de sa sociĂ©tĂ©, Birimian, en avril 2021,cebourreau de travail adĂ©jĂ soutenu une vingtaine d’entrepreneursgrĂąceĂ son «programmed’accĂ©lĂ©ration », qui portesur lesvoletsfinancement et conseil. Sept autres entrepreneursl’ont Ă©tĂ©par le biais de sa collabora tionavecOrangeBank Africa, lancĂ©eenseptembrelorsd’unĂ©vĂ©nement Ă Abidjan auquel aassistĂ© la directrice gĂ©nĂ©rale du gĂ©ant destĂ©lĂ©coms, ChristelHeydemann :signeque LaureenKouassi-Olsson, alumni de l’EM Lyon et de la Harvard BusinessSchool, cibleles acteursdepremier plan. Sa stratĂ©gie :multiplier lespartenariatspour consolider le rĂŽle de Birimian dans le paysageduluxeencorebalbutiant en Afrique.

En quelquesmois, l’entrepreneusefranco-ivoirienneaconvaincu XavierMarin, l’ancienpatron d’Eurazeo (32,5 milliards d’euros d’actifs sous gestion),delarejoindre. Elle apar ailleursĂ©toffĂ©son comitĂ© d’investissement de pointures tellesque Frannie LĂ©autier,associĂ©ede SouthBridge, Thomas Delattre,de l’Institut françaisdelamode, ou encore FrĂ©dĂ©ricMaus,patrondeWSN,qui promeut de nouveaux crĂ©ateurslorsdes FashionWeeks. CettefinanciĂšre pourtantpeu prolixequand il s’agit de parlerdes rĂ©sultats de sa sociĂ©tĂ©s’affaireaupremier tour de table de irimianVentures, sonfonds de 30 millions de dollars.L’occasiond’accueillir un nouvel investisseur institutionnel,panafricain cette fois, pour renforcer l’ADN continentalde Birimian, dont lesĂ©quipes sont installĂ©es Ă Abidjan.RĂ©solument tournĂ©e vers le continentqui l’avue grandir et qu’elle a retrouvĂ© en 2016, LaureenKouassi-Olsson Ă©largir rapidement sonchamp tion au Ghana et au SĂ©nĂ©gal. De renforcer encoreletissu crĂ©atif cain.

Aurélie Benoit

ALEX ASSANVO LE ZORRO DU CACAO

Il estl’undes visages du combat que mĂšnent Abidjan et Accrapour unemeilleure rĂ©munĂ©ration de leurscacao culteurs. ÀlatĂȘtedel’Initia tive cacao CĂŽte d’Ivoire-Ghana depuis le dĂ©but de 2021,Alex Assanvo, Ivoirien originairede Treichville, coordonne l’action desdeuxpays, respectivement premier et deuxiĂšme producteursmondiaux d’or brun, pour rééquilibrer le rapport desforcesauseindelafiliĂšre cacaoyĂšre.Cen’est pasune minceaffaire. L’industrie mondialisĂ©e du chocolat, qui reprĂ©sente130 milliards de dollarsdeventes par an et fait intervenir une multitude d’acteurs(producteurs, broyeurs, traders,

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 48
ENQUÊTE

Pouvez-vous vous présenter ?

HPS est un groupe créé en 1995 Ă Casablanca (Maroc) et spĂ©cialisĂ© dans l’édition de solutions de paiements. Nous proposons aux acteurs du monde des paiements (Ă©metteurs de cartes, banques, clients,entitĂ©s ïŹnanciĂšres, etc.) PowerCARD,unensembledesolutions via une plateforme digitalequi permetderĂ©aliser des transactionsdemaniĂšresimple, ïŹ‚uide et sĂ©curisĂ©e. Notreplateforme est utilisĂ©e par plus de 450 entitĂ©s dans plus de 90 pays. L’essentielde notrechiffred’affaires (plusde90%) est rĂ©alisĂ© Ă l’international (Afrique, Moyen-Orient, Asie, Europe et AmĂ©rique du nord). HPS compte parmi ses clients8des 25 premiĂšres banques mon diales. Le groupe est prĂ©sent sous la forme de ïŹliales dans plusieurs pays (Afrique du sud,Émirats Arabes Unis, France,Maurice et Singapour) et emploie plus d’un millier de collaborateurs, dont 85 %sont Africains.

Comment l’activitĂ© a-t-elle Ă©voluĂ© au cours de la pĂ©rioderĂ©cente ? Comme dans le reste du monde, la pandĂ©mie du Covid-19 aeupour effet d’accĂ©lĂ©rer la moderni sation des systĂšmes de paiementenAfrique. Les paiements sanscontact et lee-commerce enregistrent des croissances trĂšs rapides. Lestaux de progression varient selon les pays mais le phĂ©nomĂšne concerne dĂ©sormais le continentdans son ensemble. Un autrephĂ©nomĂšne intĂ©ressant concerne la mise en place par les banques centrales de plusieurs pays africains de dispositifs d’interopĂ©rabilitĂ© entreleMobile Money dĂ©ve loppĂ© par les opĂ©rateurs de tĂ©lĂ©communications et le Mobile Banking opĂ©rĂ©par les banques. CetteinteropĂ©rabilitĂ© est un facteur d’inclusion ïŹnanciĂšre. EnïŹn, on constate queles nouveaux usages ont aussi malheureusement stimulĂ© le dĂ©veloppement de la fraude.Les banques doivent se prĂ©munir de façon de plus en plus efïŹcace pour contrer les fraudeurs.

Comment intervenez-vous ? HPS propose des solutions technologiques globales pour accompagner nos clients,qui incluent la protection contrelafraude. Nous sommes en mesure d’installernotrelogiciel dans leurs data center mais nous proposons aussi un modĂšle «SoftwareasaService »(SaaS). Dans l’offreSaaS, HPS est responsable de toutes les questions relativesaulogiciel,Ă  l’hĂ©bergement, Ă lamaintenanceetĂ lasĂ©curitĂ©. C’est unesolution avan tageuse pour le client :lecoĂ»t d’investissement est rĂ©duit car le client souscrit un abonnement;

des services supplĂ©mentaires peuvent ĂȘtreintroduitsaisĂ©ment; et l’équipe informatique peut se concentrer sur d’autres projets de natureplus stratĂ©gique

Quelle est votrevision en matiÚre de Responsabilité Sociétale et Environnementale (RSE) ?

La RSE est au cƓur de la stratĂ©gie de dĂ©veloppement du groupe. Nous avons Ă©tĂ© certiïŹĂ©s par la ConfĂ©dĂ©ration GĂ©nĂ©rale des Entreprises du Maroc (CGEM) et nous souhaitons obtenir une certiïŹcation internationale d’ici 2024. L’engagement du groupe se traduit par une sĂ©rie d’actions concrĂštes via la Fondation HPS et au sein du groupe (maison mĂšreet ïŹliales). Nous sommes trĂšs attachĂ©s Ă laquestion du genre. Actuellement, 35%denos collaborateurs sont des femmes. Le conseil d’administration comprend trois femmes sur les dix membres. Notre objectif est d’atteindrelaparitĂ© aux diffĂ©rents Ă©chelons au sein du groupe.

Quels sont vos projets en Afrique ? Nous allons poursuivrenotredĂ©veloppement en Afrique et Ă©tendrenotreprĂ©sence gĂ©ographique. Notreobjectif est d’ĂȘtreprĂ©sent dans tous les pays d’Afrique Ă brĂšve Ă©chĂ©ance et nous Ă©tudions actuellement des projets d’acquisition. La dynamique de modernisation des systĂšmes de paiement en Afrique va se poursuivre Ă unrythme accĂ©lĂ©rĂ©. Nous entendons continuer Ă ĂȘtreunacteur de cette transformation.

«Nous souhaitons installer notre plateforme digitale de paiements dans tous les pays d’Afrique»
bdeslam Alaoui Smaili, o-fondateur et directeur général du groupe HPS HPS
-Casablanca NearshorePark, Shore1 -1100, boulevardAlQods -Sidi MaĂąrouf ,20270 Casablanca -Maroc communication@hps-worldwide.com
Mobile Money
e »
SoftwareasaService
COMMUNIQUÉ
Entretien : A c JAMG -P HOT OS DR

chocolatiers
), s’esten effet dĂ©veloppĂ©e au dĂ©triment desplanteurs. Maillon faible de la chaĂźne,ces derniersne touchent que 6%environ des revenus du secteur,unpour centageenbaisse constante depuis lesannĂ©es 1970.

Pour changer la donne,les deux voisins ont nouĂ© une alliance, «l’Opepducacao », qui, depuis 2019, impose une prime de 400dollarsla tonnedecacaoensus du prix fixĂ©sur lesmarchĂ©s Ă terme lorsdel’achat desfĂšves.Une dĂ©marche dont le bilanest mitigĂ©:s’ilslasoutiennent sur le papier,les acheteursont trouvĂ© desmĂ©canismespour contourner la prime tout en recourant Ă d’autresfournisseursenAfrique (Cameroun et Nigeria), mais aussien AmĂ©rique du Sud.

ParallĂšlement Ă cettebataille pour une meilleurerĂ©munĂ© ration desplanteurs, tous les acteurs, publicsouprivĂ©s, gĂ©ants(Mars,Mondelez, Barry Callebaut,Olam,Cargill
) ou entreprises de tailleplus modeste (CĂ©moi,coopĂ©ra tives
),s’efforcent de rendre la cultureducacao plus durable en luttant contre la dĂ©fores tationetcontreletravail des enfants. Un enjeu majeur en CĂŽte d’Ivoire, qui aperdu la majoritĂ©deson couvert forestierdepuis les annĂ©es1960 et oĂč prĂšs de 800000 enfants mineurstravaillentdans la cacaoculture.

PassĂ© par la GIZ (l’agence allemandedecoopĂ©ration), puis par l’organisme de certification Fairtrade,puis par Mondelez et Mars avant de rejoindre l’Initiative CĂŽte d’Ivoire-Ghana, Alex Assanvo croitaux vertus du dialogue pour faireprĂ©valoirl’intĂ©rĂȘt desplanteurs. L’Initiative,qui arĂ©cemment haussĂ© le ton, compte aussi sur la future adhĂ©sion de YaoundĂ© et d’Abuja pour se renforcer. Le plus dur resteĂ faire. Estelle Maussion

ZIED ET OMAR GUIGA SUR LA ROUTE DU SUCCÈS

LesTunisiens ZiedetOmar Guiga ne sont pas lespremiersĂ avoir eu l’idĂ©e de construiredes voitures made in Africa. Mais Wallyscar,qu’ils ont fondĂ©e en 2006,est l’une desrares entreprises africainesĂ  concevoir,fabriquer, vendre, exporteretassurer un service aprĂšs ventesur d’autres continents–jusqu’à l’üle Saint-Martin, aux CaraĂŻbes,oĂčles deux frĂšres ont vĂ©cu dans leur enfance.

La carrosserie en fibredeverredumodĂšle de rĂ©fĂ©rence,leSUV Iris, ne surprend plus lesautomobilistestunisiens. Elle sĂ©duit jusqu’auMoyen Orient, oĂč Wallyscar rĂ©alise30% de sonchiffre d’affaires,qui aatteint 21 millions d’euros en 2021.

Zied(42 ans), «fan »demotorisation, et Omar(37 ans), «fondu »dedesign, proposent desvĂ©hiculesbon marchĂ©,aux contoursaffirmĂ©s, comme la Wallys 619, au style rĂ©tro, la moins chĂšredumarchĂ© (moins de 10 000 euros). «Onaime ou on dĂ©teste,mais on ne restepas indiffĂ©rent », lance l’aĂźnĂ©. Wallyscar sortira trĂšs prochainement cinq nouveaux modĂšlessur autant de segmentsdiffĂ©rents.

Pour pĂ©renniser leur entreprise, qui procure120 emplois, directs et indirects,les frĂšres Guiga misent sur la frugalitĂ©. PrĂšs de 60 %des piĂšcesdu modĂšle Iris sont ainsi fabriquĂ©es en Tunisie.Les entrepreneursregardent de loin la frĂ©nĂ©sie desmoteurs Ă©lectriques:«Latechnologie Ă©lectrique est plus polluantequ’un moteur essence sur une petitecitadine,assurent-ils. Il faut beaucoup d’eaupour extrairelelithium, indispensable aux batteries. Or le continent manque d’eau. »Cela ne signifie pas pour autant qu’il faille fabriquer desvoitures surles modĂšlesd’il yaquaranteans. ZiedGuiga est trĂšs attentif au progrĂšsdes moteursĂ hydrogĂšne,une vision qui asĂ©duit le KIA (fonds souverain koweĂŻtien), actionnairedepuis 2019.

Le choix d’une production en sĂ©rie mais en petitequantitĂ©(1800 vĂ©hicules par an) ne permet pas une expansion infinie,ceque lesfrĂšresGuiga ne recherchent d’ailleurspas. Mais ils lorgnent horsdes frontiĂšres tunisiennes et commencent Ă intĂ©resserlemarchĂ© international. Des entrepreneurs et desfinanciersmoyen-orientaux ont fait appel Ă leur expĂ©rience pour dupliquer la rĂ©ussitedeWallyscar chez eux.

Ziedaime Ă rappeler la genĂšse du projet. En 2004, sur lesĂźlesdeWallis et Futuna, il tombeenarrĂȘt devant une Jeep Grandin Dallas, cĂ©lĂšbrevoiture de plagesans toit et Ă lacarrosserie minimaliste.Les jourssuivants, il discute avec sonconcepteur,RenĂ© Boesch. Quatreans plus tard, le prototypeIzis, voituredeplagedeWallyscar,crĂ©elebuzz au Mondial de l’automobile,Ă  Paris. Quatorze ans plus tard, lesfrĂšresGuiga ont acquis une renommĂ©e internationale

MathieuGaltier,Ă  Tunis

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 50 ENQUÊTE

CUL TURE

BAUDOUIN MOUANDA LA VIE EN COULEURS

De la sĂ©riephotographique sur lessapeursde Brazzaville,qui le fit connaĂźtreen2008, le Congolais Baudouin Mouanda agardĂ© la joie,l’énergieetla couleur.Son exposition Ă laScam (Ă  Paris, jusqu’au 17 mars2023) et Ă laCOP27 s’attaque,certes, Ă un sujet bien plus dramatique –lerĂ©chauffement climatique –, mais sans pathos, jouant Ă lafois sur la dynamique desteintes vivesetsur l’élĂ©gance de poses soigneusement mises en scĂšne.

N’ayantpuaccĂ©der,pendantles inondations, aux rues et auxquartiersbrazzavillois envahispar la pluie et encombrĂ©s de cĂąbles Ă©lectriques arrachĂ©s, Baudouin Mouandas’est rendusur place aprĂšs coup,invitantles habitantsĂ poseraveccertains de leursbiens dans un sous-sol inondĂ©. Composant avec lesreflets d’une eaucalme, l’artistepropose, avec Cieldesaison, une sĂ©rie de portraits Ă lafois sereins et annonciateursdedĂ©sastres Ă venir. «Ces photographies rappellent Ă tout un chacun la

nĂ©cessitĂ©deprĂ©server et de respecterl’environne ment,sous peine de [subir des] reprĂ©saillesnaturelles»,indique l’artiste,qui areçupour ce travail le prix Roger-Pic –lejurysaluant «untravail remarquable,nĂ©cessaire, documentant et interrogeant le rĂ©el avec humanitĂ©, singularitĂ© et humour ». Les connaisseursy liront aussides rĂ©fĂ©rences stylistiquesaux grands peintres populaires desdeux Congos.

ENQUÊTE

Photouin, comme il estparfoissurnommĂ©,a commencĂ© sa carriĂšreen1993etn’a depuis cessĂ©de s’intĂ©resserĂ l’histoiredeson pays, ycompris Ă ses heures lesplus sombres.ExposĂ©aux Rencontres de Bamako (Mali) et aux Rencontres internationales de la photographie d’Arles(France), il areçude nombreux prix et collaborerĂ©guliĂšrement avec la presse,dont Jeune Afrique. Membre du collectif Afrique in Visu, Mouanda estaussi unpasseur qui s’engageauquotidien, utilisant sonart comme un levier de dĂ©veloppement. Il s’implique notamment

Ă Madibou, un arrondissement de Brazzaville,oĂčil crĂ©e Classpro-culture, un centre culturel destinĂ© Ă  «contribuer Ă l’épanouissement despopulations » parlebiais de «lieux de loisirstels qu’une biblio thĂšque,une salle de cinĂ©ma, une salle de spectacle, une galerie photo ». Ce centre, qui devrait ouvrir en juillet prochain, travaillera en Ă©troiteliaison avec douzeĂ©tablissementsscolaires sur lethĂšme de l’environnement. Il se veut aussi un lieu de vie pour l’ensemble deshabitants

YAMEN MANAÏ IL ÉTAIT UNE FABLE


NĂ© en 1980 Ă Tunis, Yamen ManaĂŻest un homme de prix Auteur de quatre romans (La Marchedel’incertitude,La SĂ©rĂ©nade d’Ibrahim Santos, L’Amas ardent et BelabĂźme), il aremportĂ© huit rĂ©compenses littĂ©raires.Avec L’Amas ardent, unesuperbefable Ă©cologique sur la disparition desabeilles, l’auteur aobtenu,en2017, le Comard’or, le GrandPrix du roman mĂ©tis et le Prix descinq continents de la Francophonie. Pour BelabĂźme, il s’estvu attribuer le Prix Orange du livreenAfrique en 2022.

Certes,lavaleur d’un livre ne se mesurepas aunombre de rĂ©compenses reçues.Il n’empĂȘche :YamenManaĂŻ estunauteur Ă suivre. Son Ă©criture,vive, prĂ©cise, portĂ©e parune sainecolĂšrecontreles injustices,l’hypocrisiesociale ou lesatteintes Ă l’environnement, estmiseauservice d’histoiresoriginales et de personnages attachants.

Adepte de contes philoso phiques, ce Tunisien estun

lecteur Ă©clectique.Parmi ses auteursfavoris,ilciteaussi bienNaguib Mahfouz que DanielDefoe, Tawfiq al-Hakim qu’Émile Zola, Amin Maalouf que J.M.G. Le ClĂ©zio

S’ilafait desĂ©tudes scientifiques, iln’a jamaisoubliĂ© cettenouvelle,Ă©criteaulycĂ©e, qui lui avait valu lesencoura gementsdeses professeurset une premiĂšrepublication dans le journal de l’établissement. Il s’estlancĂ© dans l’écriture Ă  l’ñgede24 ans, Ă lafindeses Ă©tudes d’ingĂ©nieur,pour faire entendreune voix singuliĂšre. «Paradoxalement,cesont les moins bons livresqui m’ont encouragéàécrire.Je me suis dit qu’il yavait une place entre le chef-d’Ɠuvre et la mĂ©dio critĂ©, souffle-t-il en riant. Les grands auteursme coupent

dansmon élan :il me suffit de reliredeux paragraphes de Cent ans de solitude pour que je revienne sur terre. Ils me donnent juste enviedeme prosterner!»

Modeste malgrĂ© le succĂšs de ses derniersromans,le jeune hommeneplaceque de mincesespoirs dans l’avenir de lalectureetde l’écriture,y compris dansson paysnatal, quesaprose Ă©gratigne.«Une dictature n’apas vocation Ă  renforcerlalecture, dit-il. Au fil desans,j’aivules librairies et lesbibliothĂšquesfermer, j’ai constatĂ©unrecul, affreux, du lectorat. Un Tunisienlit en moyennedeux livres dans sa vie,etle dernier c’estau lycĂ©e! »Raison de plus pour dĂ©couvrir sonƓuvre. Nicolas Michel

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 52 ENQUÊTE

de

Centrale

Le marchĂ© des valeurs du TrĂ©sor de la CEMACaenregistrĂ©ses premiĂšres Ă©missions (Cameroun et RĂ©publique Centrafricaine) en novembre2011. GrĂące aux rĂ©formes engagĂ©es par la Banque Centrale, le marchĂ©s’inscrit aujourd’hui dans une dynamique d’approfondissement de ses compartiments primaireetsecondairemaisaussi de son environnement.

Avec l’entrĂ©e progressive des autres États de la CEMACsur ce marchĂ©, la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC) a engagĂ© dĂšs 2017 des actions de plusieurs ordres visantĂ dynamiser le marchĂ© et amener la zone vers les objectifs assignĂ©s au projet d’institution d’un marchĂ© rĂ©gional des titres publics. En parallĂšle, la BEACaĂ©galement ïŹnalisĂ© en 2018la rĂ©forme de sa politique monĂ©taire.

Réajustement du corpus réglementaire

Parlasuite, la Banque Centrale, avec le concours de l’ensemble des acteurs, s’estinscrite dans une dynamique d’approfondissement du marchĂ© des valeurs du TrĂ©sor de la CEMACĂ travers le rĂ©ajustement du corpusrĂšglementaire.Cela s’est traduit par :

-L’élargissement du statut de SVTaux sociĂ©tĂ©s de bourse.

-LarĂ©vision desdroits et obligations des SVT. -L’élaboration des Instructions portant sur les nouvelles opĂ©rations de marchĂ© :Ă©mission des titres par syndicationĂ  domicile, rĂ©ouvertures de lignes de titres, institution d’un Cadreper manent de concertation des six TrĂ©sors publics de la CEMAC, etc.

-L’implĂ©mentation du dispositif informationnel (Calendriers trimestrielsdes Ă©missions, Bul letinTrimestriel du MarchĂ© des Titres Publics, Statistiques mensuelles du marchĂ© des valeurs

du Trésor,Tableaux hebdomadaires du marché des valeurs du Trésor,etc.).

Forte hausse du volume des titres en circulation

Une dĂ©cennie aprĂšs ces premiĂšres Ă©missions, la dynamique d’approfondissement est per ceptiblesur le marchĂ© primaire avec uneforte hausse du volume des titres en circulation. À ïŹnnovembre 2019, l’encours du marchĂ© des valeurs du TrĂ©sor aatteint la barresymbolique de 2000 milliardsdeF CFA(2001,44 milliards de FCFA).

En outre, l’analyse de l’évolution de l’encours des valeurs du TrĂ©sor de la CEMACpar rapport au PIB montreque les États ont de plus en plus recours au marchĂ© pour ïŹnancer leurs besoins. Au 31 aoĂ»t 2022, l’encours destitres Ă©mis reprĂ©sente 7,8 %duPIB de la CEMACcontre2,8 %en dĂ©cembre2018(lors de la mise en Ɠuvredu nouveau cadredepolitique monĂ©taire) et 0,1 % en dĂ©cembre2011.

IntĂ©rĂȘt du secteur privĂ© non bancaire

Pour ce qui est du marchĂ© secondairedes valeurs du TrĂ©sor,l’encours s’est Ă©galement inscrit sur une tendance haussiĂšre. En outre, les placements des investisseurs institutionnels et des personnes physiques reprĂ©sentent 15,4 %de l’encours des titres Ă  ïŹnaoĂ»t 2022 contre0,1%

lors de la miseenƓuvredunouveau cadrede politique monĂ©taire. CetteĂ©volutiondĂ©note l’intĂ©rĂȘt croissant du secteur privĂ© non bancaire pour ce marchĂ©, eu Ă©gardnotamment aux perspectives de rendement offertes,aumĂ©canisme de gestion de risque de crĂ©dit mis en place par la BEAC, Ă lanĂ©gociabilitĂ© des OTAetBTA,Ă  leur admission en collatĂ©ral au compartiment des interventions de la Banque CentraleetĂ leur utilisation comme garanties des opĂ©rations interbancaires. La rĂ©partition de l’encoursdes titres par naturedes dĂ©tenteurs ïŹnaux montre qu’au 31 aoĂ»t 2022, les SVTetautres banques dĂ©tiennent 78,8 %des valeurs du TrĂ©sor en cir culation, contre99,9 %enjuin 2018.

Le marchĂ© des valeurs du TrĂ©sor de la CEMAC engagĂ© dans une dynamique d’approfondissement
COMMUNIQUÉ
Banque
États
TYPE D’OPÉRATIONS (Mds de FCFA) 2020 Janvier 2022 -AoĂ»t 2022 Nombre d’opĂ©rations Valeur espĂšces Valeur nominale Nombre d’opĂ©rations Valeur espĂšces Valeur nominale Achat-ventes de titres 272 559,8 559,5 19 1667,4 1658,6 Pensions-livrĂ©es interbancaires 102 418,4 -33,2 1536,4 Transferts franco de titres 195 -1 208,9 29,6 -3 457,7 Évolution des Ă©changes sur le marchĂ© des valeurs du TrĂ©sor de la CEMAC Encours global des valeurs du TrĂ©sor de la CEMAC/ PIB CEMAC(en %) 0 1 2 3 4 5 6 7 8 2011 0,1 0,1 0,4 0,5 1,0 1,9 1,8 2,1 3,8 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 juin-21 avr-22 aoĂ»t-22 6,3 7,1 7,5 7,4 BP 1917 -YaoundĂ©,Cameroun TĂ©l.:(+237) 222 23 40 30/ 222 23 40 60 Fax:(+237) 222 23 34 68 Email :communication@beac.int JAMG -P HOT OS DR SOURCE :C RCT/BEAC
BEAC
des
l’Afrique

KOYO KOUOH DE L’ART DE GÉRER UN MUSÉE

Depuis 2019, Koyo Kouoh dirige l’un desplusimportantsmusĂ©es d’Afrique,le Zeitz Mocaa, au Cap (Afrique du Sud), sur le front de mer,dans d’ancienssilosrĂ©novĂ©s. Auparavant,cetteCamerounaise, nĂ©een1967,avait multipliĂ© les missions de commissaired’exposition un peupartout sur la planĂšte.

CĂ©lĂšbrepouravoir créé et, pendant longtemps, animĂ© le centred’art RawMaterial, Ă Dakar, elle s’estillustrĂ©epar deschoix curatoriauxoriginaux et pointus danslecadredeplusieursĂ©vĂ©ne ments de dimension internatio nale :laContemporaryAfrican Art Fair 1-54 (Ă  Londres), la Biennale internationale EVA(en Irlande), et,plus rĂ©cemment, la Triennale de la photographie de Hambourg (enAllemagne). Auparavant,elle avait participĂ©aux grands rendezvous culturels africains que sont lesRencontres de Bamako et la Biennale de Dakar.

Lorsqu’elle aprislatĂȘteduZeitz Mocaa, Koyo Kouoh adĂ»affronter deux crises majeures :celledela pandĂ©mie de Covid-19, dansunpays oĂč le confinement aĂ©tĂ© particuliĂšrement strict,etdes problĂšmes

de gestion interne.Contraintede rĂ©duiredemaniĂšredrastique la programmation du musĂ©e,elle enaprofitĂ©pour en rĂ©former la gouvernance.«Laparticipationau nouveau conseil d’administration estdevenue payantepour quesoit garanti un apport financier autogĂ© nĂ©ré»,nous confie l’intĂ©ressĂ©e.«Le conseil s’estpar ailleursdiversifiĂ©e accueillant de nouveaux membres tels queHasnaine Yavarhoussen, le collectionneuretphilanthrope malgache,Atose Aguele, un indus triel et collectionneur nigĂ©rian aussi puissant que discret, et Jody Allen, une philanthropeamĂ©ricaine.Gavin Jantjes, un artistesud-africain quiaune longue expĂ©rience en matiĂšred’institutions d’art, ysiĂšge Ă©galement.Nous avonsenoutre créé un GlobalCouncil, qui rĂ©unit descollectionneurs, desartistes et desprofessionnelsdĂ©sireux de contribuer Ă l’essor du musĂ©e.Les plasticiennes Julie Mehretu et Wangechi Mutusontmembres de ce GlobalCouncil,que prĂ©side le collectionneurcamerounais Acha Leke.»

Pour fairefonctionner le musĂ©e, Koyo Kouoh s’appuie dĂ©sormais sur

trois piliers:leconseil d’administration,censĂ©apporterletiersdes ressources;les revenus internes (billetterie,restaurant, boutique, Ă©vĂ©nements privĂ©s);enfin, l’argent gĂ©nĂ©rĂ© par lespartenariatspassĂ©s avec desONG,des fondations ou dessponsors. Ce modĂšle pourrait inspirer lesinstitutionsappelĂ©es Ă  fleurir sur le continent.

Quoi qu’il ensoit, le Zeitz Mocaa fera parler de lui cette annĂ©epuisqu’il propose,jusqu’en septembre2023, une exposition ambitieusesur la figuration noire: When We SeeUs:ACenturyof BlackFiguration in Painting, qui rassemble 207Ɠuvres, rĂ©alisĂ©espar 67 artistes issus de 28 pays.

ALICE

DIOP LA VIE TIENT ÀUNFILM

En mars2020, Ă lacĂ©rĂ©monie descĂ©sars, l’actrice AĂŻssa MaĂŻga dĂ©nonçaitlemanque dediversitĂ©dans lesmilieux du cinĂ©mafrançais. Deux ansetdemi plus tard, une rĂ©alisatrice française d’origine sĂ©nĂ©galaise redessine lescontoursduseptiĂšme art, sans coups de gueule ni prises de position chargĂ©esd’émotion.C’est en utilisant le langagedelacamĂ©ra qu’Alice Diop(43 ans) se distingue.

Àla Mostra de Venise,elle aobtenu le Liond’argent Grand Prix du jury pour sonpremier long-mĂ©trage, Saint-Omer, qui reprĂ©sentera la France aux Oscars.Une France oĂč, sous sonregardacĂ©rĂ©,une jeune Noirepeut

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 54 ENQUÊTE

DIÉBÉDO FRANCIS KÉRÉ ARCHI-ÉCOLO

CrĂ©ativitĂ©, durabilitĂ© et fonctionnalitĂ©.Trois mots qui caractĂ©risent le travail de l’architecte burkinabĂš DiĂ©bĂ©do Francis KĂ©rĂ©,installĂ© Ă Berlin,enAllemagne.

SesconstructionsĂ©cologiques–écoles, hĂŽpitaux, lieux de culture,bĂątimentspublics–,adaptĂ©es auxbesoins actuels et pour lesquellesilutilise des matĂ©riauxlocaux,sont, pour la plupart, rĂ©alisĂ©esavec l’implication descommunautĂ©s quienseront bĂ©nĂ© ficiaires.Cettevision, engagĂ©e,deson mĂ©tier avalu Ă  Francis KĂ©rĂ© d’obtenir,enmars, la plus prestigieuse rĂ©compensedesadiscipline :leprixPritzker.«Il Ă©mancipeettransforme descommunautĂ©spar le biais de l’architecture», ont estimĂ© lesmembres du jury.

Si cettedistinction asoudain placĂ© le discretFrancis KĂ©rĂ© sous la lumiĂšredes projecteurs, il faisait dĂ©jĂ  la fiertĂ©duBurkina Faso,oĂčilconstruitdes infrastruc tures dansdes villages depuis une vingtaine d’annĂ©es.Il estĂ©galementsollicitĂ© Ă travers le continent, duMali au Kenya, et aobtenu de nombreuses rĂ©compenses,dont le GlobalAward forSustainable Architecture, en 2009.

NĂ© en 1965 Ă Gando,dans le centre-estdupays, KĂ©rĂ© Ă©tudie Ă l’UniversitĂ©technique de Berlin. C’estlĂ , au coursdesaderniĂšreannĂ©ed’études, qu’il rĂ©aliseson premier projet d’envergure, qui guidera la suitede sa carriĂšre. En 2004, grĂące Ă une levĂ©e de fonds et Ă laparti cipation deshabitants, il construit une Ă©cole primaire dans sonvillagenatal, ce qui lui vaut, la mĂȘme annĂ©e, le prixAga-Khan d’architecture. Plusieursprojets suivront, au Burkina Faso,comme le village-opĂ©ra de Loango, Ă  quelqueskilomĂštres de Ouagadougou, dont l’édification acommencĂ© en 2010,Ă l’appel du cinĂ©aste allemand Christoph Schlingensief (dĂ©cĂ©dĂ© cetteannĂ©e-lĂ ). Le

projet, qui attireles touristes, prĂ©voit la rĂ©alisation d’un opĂ©ra entourĂ©d’habitations, d’un dispensaireetd’une Ă©cole.Cette derniĂšre, dĂ©jĂ  fonctionnelle,est construite avec desbriques de terre, et sontoit surĂ©levĂ©permet Ă  l’air de circuler,rafraĂźchissant naturellement lespiĂšces. L’énergie estĂ©conomisĂ©e grĂące Ă lalumiĂšredujour.De larges auventsservent d’abris pour rĂ©sisterĂ  destempĂ©raturessouvent trĂšs Ă©levĂ©esetfaireface aux intempĂ©ries. En 2020,KĂ©rĂ©aachevĂ©laconstruction de l’Institut de technologie,Ă Koudougou.

L’architecte enseigne par ailleursenAllemagne,en Suisse et aux États-Unis.En2017,il aconçu un pavillon d’étĂ© pour laSerpentineGallery, Ă Londres.Unexercice auquel d’autres architectesrenommĂ©s, tels que Zaha Hadid et Oscar Niemeyer,s’étaient pliĂ©s.

Parmi ses chantiers en cours figurent le Benga Riverside Residential CommunityProject, au Mozambique,constituĂ© d’un ensembledelogementset d’une Ă©cole (depuis 2014), le GƓthe-Institut de Dakar (lancĂ© en 2018),etl’AssemblĂ©enationale du BĂ©nin(en 2019)

AĂŻssatou Diallo

ĂȘtre universitaireets’exprimerdans unfrançaischĂątiĂ©. VoilĂ , en partie, ce quedĂ©peintcefilm inspirĂ© de l’histoire vraiedeLaurenceColy, une NoireĂ©duquĂ©e et lettrĂ©e,accusĂ©e d’avoirtuĂ© sa fille, et qui comparaĂźt devant une cour d’assises sous lesyeux d’une autre jeune femmenoire, romanciĂšre, enceinte. En redistribuant lescartesetles rĂŽles, Alice Diop asuimposer descorpsnoirsĂ l’écran, leur redonnerchair pour atteindrel’universel.

Lorsque cettenative d’Aulnay-sous-Bois, Ă la pĂ©riphĂ©rie de Paris –oĂčelle agrandijusqu’à ses 10 ans, Ă l’ombredes grands ensembles de la CitĂ© des 3000 –, pose sa camĂ©radans lesbanlieuesfrançaises, elle ne filme pas les quartiers et lesviolences qui font lemieldes extrĂȘmes. Elle s’attarde plutĂŽt sur leurshabitants,pour explorer leur complexitĂ©, leur

diversitĂ©etleur intimitĂ©,loindes stĂ©rĂ©otypes sociaux ou raciaux auxquels on lesrĂ©duit trop souvent. Dans Vers la tendresse (CĂ©sar du meilleur court-mĂ©trage en 2017), la rĂ©alisatrice dĂ©construitlamasculinitĂ©des hommesdes citĂ©s pour se concentrer sur le rapport Ă l’amour de quatre jeunes garçons auxquels tout un chacun peut s’identifier. Lorsque,cinqans plus tard, elle signe Nous, sonquatriĂšmedocumentaire–autitre fĂ©dĂ©rateur –, Alice Diop dresse un portrait de laFrance desbanlieues en suivantletracĂ© du RER B, ligne de train quirelie le nord et le suddeParis
etqu’elle a empruntĂ© une bonnepartiedesa vie.Parce quec’est bien d’un trajet au long cours qu’ilest question dans sonƓuvre.Avec, pour pointdedĂ©part,l’intime; et pour destination, l’universel.

ÉvaSauphie

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 55 ENQUÊTE

Tribune

Fouad Laroui Écrivain marocain

Pour un Africain, consulter les classementsinternationaux desuniversitĂ©s s’apparente Ă unactedepur masochisme. Qu’il s’agisse du fameux palmarĂšs de Shanghai ou de celui du Times HigherEducation (THE), il lui faut patienter pour voir apparaĂźtreune universitĂ©qui ne soit pas amĂ©ri caine,europĂ©enne ou asiatique. Tout au plus peut-il s’amuser, maigreconsolation, Ă constater que l’ordren’est pas le mĂȘme vu d’Asie ou d’Angleterre. Shanghai proclame Harvard meilleureuniversitĂ©du monde depuis vingt ans alorsque le THE la classe deuxiĂšmederriĂšre
 Oxford. Et nous?Nousregardons les trains passer.

Bien sĂ»r,ces classementssont parfois contestĂ©s, surtout par ceux qui yfigurent en mauvaiseplace. Il esteffectivement curieux qu’une institution comme l’ENS de la rue d’Ulm, Ă Paris, qui forme la crĂšme de la crĂšme deschercheursfrançais, ne soit pas dans le pelotondetĂȘte. Cela estdĂ»aux critĂšres choisis : Shanghai comptabilise, entre autres,lenombred’articlespubliĂ©s dans lesrevues Natureet Science, ce qui pĂ©nalisela«petite »etfranco phone ENS.

«Vol

»des cerveaux

Quoi qu’il en soit, lesuniversitĂ©s africainesont fortĂ fairepour se hisser dans cesclassements ou simplement yapparaĂźtre. En rĂ©alitĂ©, le problĂšme estdouble PremiĂšrement, comment attirer leschercheursles plus brillants –autrement dit, comment

concurrencerl’Europeetles ÉtatsUnis?Pour le moment, c’estmission impossible.DeuxiĂšmement, comment retenir leslocaux lesplus prometteurs? Leur formation coĂ»te beaucoup d’argent Ă des pays aux ressourcesfinanciĂšres limitĂ©es. Des milliersdemĂ©decins et d’ingĂ©nieurs quittent chaque annĂ©el’Afrique pour s’installer en Europeouen AmĂ©rique.Cetransfertnet d’argent –cequ’acoĂ»tĂ©leur formation –ne figuredans aucune statistique. Il s’agit pourtant de centainesde millions de dollars.

d’élite?

En maidernier,leprĂ©sident amĂ©ricain JoeBiden avait autorisĂ© desmilliersdeRusses Ă entrer et Ă s’installeraux États-Unis sans formalitĂ©s –c’étaitdit explicite ment –àcondition qu’ils soient titulaires d’un masteroud’un doctoratensciences,enparticulier en physique nuclĂ©aireouenintel ligence artificielle. Cetteinitiative sensationnellen’était que la conti nuationdelaguerrepar d’autres moyens :enl’occurrence, par le «vol »des cerveaux de l’adversaire. En consultant la liste deslaurĂ©ats du prix Abel, le Nobeldes mathĂ© maticiens,ons’aperçoit que sur lesdix dernierslamoitiĂ© sont des

AmĂ©ricains naturalisĂ©s de fraĂźche date. Quel paysafricain pourrait concurrencer lesStates dans ce jeu oĂč lesmises sont faramineuses?

Harvard dispose Ă elle seule d’un capital(endowment)deprĂšsde 60 milliards dedollars, plus que le produit intĂ©rieurbrut du Ghana ou de la CĂŽte d’Ivoire


Deux solutions

L’affaireest-elle donc dĂ©sespĂ©rĂ©e? Pas nĂ©cessairement. Contrevents et marĂ©es, plusieurspaysafricains se sont donnĂ© comme but l’excel lence en matiĂšred’enseignement supĂ©rieur et de recherche.Certaines universitĂ©s sont de vĂ©ritables game changers dans ce domaine :elles font desefforts Ă©nergiquespour promouvoir leursĂ©lĂ©mentsles plus prometteursetpourfairerevenir ceux qui font de bellescarriĂšres Ă l’étranger

Àcourtterme,deuxpolitiques peuvent ĂȘtremises en place. La premiĂšre consisteĂ  se concentrer sur desdomainespertinentspour le pays. Par exemple,leNigeria pourrait ambitionner un rĂŽle de leaderdanslarecherche en pĂ©tro chimie,leMaroc danslafiliĂšredu phosphate, la RDCdans lesfiliĂšres mĂ©tallurgiques. La deuxiĂšme politique seraitdecrĂ©er un statut de chercheurs «associĂ©s» :ceux-ci resteraient Ă l’étranger maisvien draientrĂ©guliĂšrement enseigner ou diriger desthĂšses dans leur pays natal. CombinĂ©es,ces deux approchespourraientconstituer un premier pas dans la conquĂȘtede l’excellence
 et desclassements.

BientÎt des universités
JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 56 ENQUÊTE
Comment attirer les chercheurs lesplus brillants et retenir les profils prometteurs ?

AVIS D’EXPERT

Dans une perspectivederelance et de diversification de l’économie,une nouvelle loirelativeĂ  l’investissement aĂ©tĂ© publiĂ©e le 28 juillet 2022. Le nouveau texte prĂ©voit de nouveaux rĂ©gimes d’incitation Ă l’investissementetlarĂ©organisation du cadreinstitutionnel. L’ambition de ce nouveau texte est de promouvoir les secteurs d’activitĂ© Ă forte valeur ajoutĂ©e, de valoriser l’innovation et le dĂ©veloppementdurable et davantagerenforcer la capacitĂ© d’exportationdel’économie algĂ©rienne.

Desdispositifs d’incitation plus lisibles

LesinvestissementsĂ©ligibles peuvent dĂ©sormaisbĂ©nĂ©ficier de rĂ©gimes d’incitation dans certainsdomainesd’activitéà l’instar des secteursdes mines, des Ă©nergies renouvelables ou encore des technologies de l’information et de la communication. En outre, il estmis l’accent sur deszones gĂ©ographiques auxquellesl’Étataccorde un intĂ©rĂȘtparticulieroudans le contexte d’investissements dits «structurants », Ă haut potentiel de crĂ©ation de richesses et d’emplois. L’objectif est clair :adapter le cadrejuridique des investissements Ă l’environnementĂ©conomique actuel et palier auxinsuffisances du cadrelĂ©gislatif ayantjusqu’ici freinĂ© l’intĂ©gration de l’économiealgĂ©rienne aux chaĂźnes de valeurs.

Que cela soit en phase de rĂ©alisation ou d’exploitation, lesinvestissements Ă©ligibles bĂ©nĂ©ficieront d’exonĂ©rations de droits de douane, de TVA, d’impĂŽtsur les sociĂ©tĂ©soudetaxefonciĂšre. La durĂ©e des avantages, et afortioriles dĂ©laisderĂ©alisation de l’investissement, sontfixĂ©s de trois Ă cinq ans en phase de rĂ©alisation et de cinq Ă dix ans en phase d’exploitation. Ces durĂ©es ne pourrontĂȘtreprorogĂ©es qu’exceptionnellementd’un an ou deux lorsque la rĂ©alisation de l’investissementdĂ©passe un certain tauxd’avancement. Surcedernier point,onpeutsaluer la prise en compte de la rĂ©alitĂ© bureaucratique algĂ©rienne bien que lesdĂ©lais rĂ©els d’achĂšvement desphases de rĂ©alisation des projets en AlgĂ©rie dĂ©passenttrĂšssouvent les 5annĂ©es.

Uncadreinstitutionnel amélioré

La principale rĂ©forme de ce nouveau cadrelĂ©gislatifrĂ©side dans le remaniement des prĂ©rogativesdes institutionsenchargede l’investissement et du renforcementdeleur rĂŽle d’accompagnementdes investisseursavecnotamment la rĂ©surrection des

LPA-CGR avocats

136 av.des Champs-Elysées 75008 Paris Tél.:33(0)1 53 93 30 00 paris@lpalaw.com

Samir Sayah

LPA-CGR avocats

«Laprincipale rĂ©forme de ce nouveau cadrelĂ©gislatifrĂ©side dans le remaniement des prĂ©rogatives des institutions responsables de l’investissement et la rĂ©surrection des “guichets uniques”afinde tenter d’en finir avec les lourdeurs administratives locales. »

«guichets uniques»afindetenterencoreune fois d’enfiniravec les lourdeursadministratives. Ainsi les formalitĂ©s administratives devraient-elles ĂȘtrefacilitĂ©esaveclerenforcement de l’Agence nationaledepromotion de l’investissement qui se voit attribuer de nouvelles missions. L’Agencejouera notamment le rĂŽle de guichet unique pour les investissements structurants ainsi que pourl’ensemble des investissements Ă©trangers. Le dispositif s’appuieraĂ©galementsur des guichetsdĂ©centralisĂ©s permettantunsuivi des investissements au niveau local.

La rĂ©forme s’appuie Ă©galementsur l’institution d’une haute commission nationaledes recoursliĂ©s Ă l’investissement, chargĂ©e de statuer,dansundĂ©lai d’un mois, sur les recours introduits par les investisseurs.

On notera enfin la volontĂ© rĂ©affirmĂ©e de l’Etat de stabiliser le cadrejuridique des investissements Ă travers une disposition prĂ©munissantles investisseurscontreles abrogations et les modifications du rĂ©gime sous lequel ils ontrĂ©alisĂ© leursinvestissements. Pour autant, le cadrelĂ©gislatif et rĂšglementaire des investissements aĂ©tĂ© modifiéà de nombreuses reprises depuis 2001. Ilconviendradoncd’ĂȘtreattentif Ă laportĂ©e rĂ©elle de cette disposition.

COMMUNIQUÉ
Réforme du cadrejuridique desinvestissements en Algérie JAMG -P HOT OS DR
Avocat Associé

DÉFENSE DE L’ ENVIRONNEMENT

IRÈNE WABIWABETOKO ET SANDRA IDOSSOU DAMES NATURE

D’un cĂŽtĂ©,les Ă©tendues menacĂ©es du deuxiĂšme poumon vert de laplanĂšte. De l’autre, lesloquesdeplastiques qui parsĂšment lespaysages bĂ©ninois. IrĂšne Wabiwa Betoko (RD Congo) etSandra Idossou (BĂ©nin) ne se connaissent pas. Àquelque2000 km l’une de l’autre,ellesmĂšnent pourtant un mĂȘme combaten faveur de la prĂ©servation de l’environnement.

Unecausepour laquelle IrĂšne Wabiwa Betoko arejoint l’ONG Greenpeace il yaplusdedouze ans. Pour elle, la luttepasse par la sauvegarde du bassin forestier du Congo, deuxiĂšme forĂȘttropicaleaumonde aprĂšs l’Amazonie. Sonengagement acommencĂ©sur lesbancsde l’UniversitĂ©deKinshasa, quand elle Ă©tudiait le droit international. «MapremiĂšremotivation, en tant qu’avocate, Ă©tait de dĂ©fendreles droitsdes communautĂ©s locales,qui n’ontpas la possibilitĂ©desefaireentendre. La sauvegarde de l’environne ment en fait partie », explique t-elle.À peine diplĂŽmĂ©e, la Congolaisefonde,en2008, avec descamaradesd’école,le

Conseilpour ladĂ©fense environnementale par la lĂ©galitĂ© et la traçabilitĂ© (Codelt). «Il s’agissait de voir si la lĂ©gislation nationale Ă©tait adaptĂ©eaux enjeux en matiĂšredeprotectiondelaforĂȘt et, lorsqu’elle ne l’étaitpas, de soumettre des propositions de lois », prĂ©cisela militante-juriste.

Deux ans plus tard, elle rejoint Greenpeace et ferraillecontre la coupedeboisillĂ©gale et la prĂ©dation fonciĂšre.«J’airĂ©alisĂ© qu’auseind’une structure comme celle-lĂ  desenjeux locaux pouvaient avoir un Ă©cho national et international», assure-t-elle.

Sandra Idossou, elle,se bat horsdetoutechapelle, convaincueque «chacun peut agir Ă son Ă©chelle et faireĂ©voluer la sociĂ©té».LedĂ©clic survient en 2017.«J’avais vĂ©cu pendant dix ans au Rwanda, oĂč la prĂ©servation de l’environnement est prisetrĂšsausĂ©rieux. Je m’imaginais que c’était la norme.À mon retour au BĂ©nin, j’ai rĂ©alisĂ©que le rapportĂ lanaturedeKigali Ă©tait l’exception », raconte-t-elle. Elle lance d’abordune pĂ©tition visantĂ interdirel’emballage

desalimentsdansdes «sachets plastiquestoxiques ». Puis lĂšve des«armĂ©es de bĂ©nĂ©voles»afin de collecter le plastique qui se dĂ©verse partout dans la capitale bĂ©ninoise. Ils sont quelques dizaines, lorsdes premiĂšres mobilisations,en2017.Cinqans plus tard,plusde500 volontaires se mobilisent Ă l’occasion de la JournĂ©e mondialedu nettoyage.

«Jen’aijamais vraiment dĂ©cidĂ© d’ĂȘtremilitante,mais que fairequand un gouvernement ne faitpas appliquer ses propres rĂšgles?AuBĂ©nin, il suffitde regarder autour de soi. La loi interdisant lessachets plastiquesnon biodĂ©gradablesn’a strictementrien changĂ©!»

Le constat d’IrĂšne Wabiwa Betoko n’estpas moinssĂ©vĂšre. «Quand deshectares de forĂȘt sont toujoursmonnayĂ©scomme une vulgairemarchandise, le combat se mĂšne Ă©videmment contrel’État. Il faut ĂȘtrelucide : en RDC, ce sont les autoritĂ©s censĂ©esprotĂ©gernos espaces naturels etfairerespecter la loi qui la violent impunĂ©ment et bradent nosforĂȘts. »

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 58 ENQUÊTE

RÉSEAUX SOCIAUX

CRAZY SALLY VLOGUEUSE EN VOGUE

OĂč sont les Noirs?.C’est le titredudocumentairedelajournalist militante RokhayaDiallo,sorti en 2020.Lemanque de reprĂ©sen tivitĂ©des personnesnoiresetracisĂ©es touche,enFrance,tousle aspects de la vie publique etartistique.Cevide, l’influenceuse Salima JeannePoumbga,connue sous le pseudonyme Crazy Sally(ou juste Sally),ledĂ©nonce depuis la crĂ©ation de sa chaĂźne YouTube, en 2018.

e t s

SespremiĂšres vidĂ©os s’adressent avant tout Ă un publicfrançais afrodescendant. Elle ydonne des astucespoursoigner descheveux crĂ©pus et Ă©voque les problĂšmes liĂ©s Ă son ethnicity tag –les sempiternellesquestions qu’on lui pose sur sesorigines(sa mĂšre estmarocaine;son pĂšre,camerounais). «Cela renvoieĂ  l’idĂ©ereçue –etdĂ©bile–selon laquelle ĂȘtremĂ©tisse estunavantage, explique-t-elle.CettesociĂ©tĂ©fait tout pour nous fairecroirequ’on estplusbeauquand on estmĂ©tisparce qu’ona la peau plus claire. »

La vlogueuses’attaque aussi, Ă travers un prisme juridique,Ă des sujetspluspolitiques, comme lesdiscriminations envers lesNoirsoucomme le blackface –tout en dĂ©veloppant un contenu plus divertissant surles rĂ©seaux sociaux,comme l’influence,«massive et souvent trop oubliĂ©e»,delaculturenoiredans la mode.

L’artoratoireest la matrice de la vidĂ©aste depuisses Ă©tudesdedroit Ă l’UniversitĂ©deStrasbourg.En2018, elle yavait remportĂ© un concoursd’éloquence sur le thĂšme «Faut-il fairedesavie uneƓuvre d’art? ».

À26ans, Sallycompte prĂšs de 900000 abonnĂ©ssur compte Instagram et s’estlancĂ©edans l’entrepreneuriat d’influence.Son dernierprojet:montrer, Ă travers desdocumentaires portant sur sesvoyages en Afrique,que le continent ne se rĂ©duit pas aux images de pauvretĂ© et de guerreque propagent lesmĂ©dias occidentaux.Les deux premiersĂ©pisodes de sa sĂ©rie Motherland, tournĂ©sauSĂ©nĂ©gal et en CĂŽte d’Ivoire, ont Ă©tĂ©diffusĂ©s sur YouTube, et le troisiĂšme,tournĂ© au Cameroun,sur la plateforme françaiseBrutX.Unautre opus, consacréàlaRDduCongo,sortira prochainement.

KHABY LAME LE MUTIQUE DE TIKTOK

CetItalien d’origine sĂ©nĂ©galaiseest devenu une star d’internet sans direunmot.Samarque de fabrique :des vidĂ©os muettes,qui tournent dĂ©rision desastucespas toujourssiastucieus et plutĂŽt ridicules, publiĂ©es sur internet.Àla fin de chaque parodie,lejeune homme hausse lesĂ©paulesavecunsourireironique et dĂ©sabus paumestournĂ©esversleciel. Un gestequi l’ar cĂ©lĂšbre.

Depuisjuin, KhabyLame(22 ans) estl’internautele plus suividurĂ©seau TikTok,avecplus de 151 millions d’abonnĂ©sdans le monde.Lejeune homme agrandiĂ  Chivasso, dans la banlieue de Turin, en Italie,lorsque sa famille aquittĂ©leSĂ©nĂ©gal,oĂč il estnĂ©etoĂčilapassĂ© la premiĂšreannĂ©edesavie.Avant le confinement imposĂ© lorsdelacriseliĂ©eauCovid-19,ilenchaĂźnait lespetits boulots.Puis, auchĂŽmageetdans un pays calfeutrĂ©, il a diffusĂ©ses premiĂšresvidĂ©osdepuis sa chambre.

Depuis l’ouverturede soncompte TikTok,le 15 mars2020, sa vie achangĂ© Celui que l’Italie surnomme fenomeno vit dĂ©sormais de nactivitĂ©d’influenceur. ÉgĂ©rie marque HugoBoss, il aĂ©tĂ© éàlaMostra de Veniseen2021, Festival de Cannes en 2022. Une npour le jeuneItalien qui ntactĂ© par Hollywood. Son nt luiafacilitĂ©l’obtention de la ienne.« Il n’estpas justequ’une ans ce pays depuis autant d’annĂ©es, qui agrandi dans la cultureitalienne et n’ajamaisenfreintlaloi n’ait toujourspas droitĂ la citoyenneté»,avait-il dĂ©clarĂ©peu de tempsauparavant.

L’influenceur arĂ©cemment adoptĂ©des positions plus politiques. Il apostĂ© un message antiraciste aprĂšs que descris de singe ontĂ©tĂ© adressĂ©s Ă des joueursdel’équipe de football de Napleslorsd’unmatch, et s’estaffichĂ© aux cĂŽtĂ©sdelamilitanteougandaiseVanessa Nakate. MariĂšme SoumarĂ©

JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 59 ENQUÊTE

GRUPO

PEFACO –LYDIA LUDIC

LE NUMÉRO 1 DES JEUX EN AFRIQUE

Cetinvestissementpour l’AfriqueĂ©taitjugĂ©trĂšs audacieux. Avec mes associĂ©s, nous l’avons tenu sur nos fondspropres, avec une foi inĂ©branlable dansle dĂ©veloppement de ce grand ContinentetunefermevolontĂ© d’offrirdesopportunitĂ©sd’une vie meilleure au plus grand nombre.

En Ă©tant un percepteurd’un impĂŽt volontaire qui n’existait pas auparavant, nous participonsĂ  la croissance du pays. En crĂ©ant desmilliers d’emplois, nous soutenons la population.EnintensiïŹantnos investissements, nous pĂ©rennisons notre Groupe

En cette annĂ©e d’anniversaire, je souhaite remercier de façon spĂ©cialelesAutoritĂ©sduTogoqui nous ont accordĂ©notrepremiĂšre licence,celles de tous lesautres paysqui nous ont faitconïŹance parlasuite,notreïŹdĂšleclientĂšle, nos collaborateurs dĂ©vouĂ©s qui depuisvingt-cinqansparticipent pleinement Ă larĂ©ussite de notre Groupe.

LemĂȘmeenthousiasme,lamĂȘme vigueur et la mĂȘme rigueurs’appliquent aujourd’hui dans la modernisation de nos filiales, l’accueil d’une nouvellegĂ©nĂ© rationdeclient et la formation de la relĂšve d’encadrementpour conforternotreplacedenumĂ©ro1 des jeux en Afrique.

Donation de Lydia Ludic au proïŹtd'unorphelinat.

Vuedelafaçade d’une salle de jeux de Lydia Ludic. VueintĂ©rieured’une salledejeuxdeLydiaLudic.
Notre Groupeala capacitĂ©humaine, managĂ©riale, ïŹnanciĂšre et technologique pour aborder lesvingtcinq prochaines annĂ©es avec la sĂ©rĂ©nitĂ©nĂ©cessaire pour renforcer sa prĂ©senceenAfrique.

Cela faitvingt-cinq annĂ©esque mon Groupeinvestit en Afrique. Dans les annĂ©es 1990, ma vision de notre dĂ©veloppement Ă©tait claire :crĂ©er un grandGroupe avec desïŹliales citoyennes, socialement responsables, dynamiques, sĂ©rieuses et modernes. Aujourd’hui, Grupo Pefaco estl’un des plusgrands groupesaumonde danslesecteur desjeux.

AVEC LE CONCOURS LYDIA LUDIC TALENTS

LES ARTISTES AFRICAINS ÀL’HONNEUR !

En rĂ©ponse auxconsĂ©quencesĂ©conomiquesetsociales de la crise sanitaireduCOVIDde2020,lesïŹlialesLydiaLudicdeGrupoPefaco ont multipliĂ© les initiatives de soutien aux populations les plus dĂ©favorisĂ©es. Dans les ïŹliales d’Afrique de l’Ouest, le PrĂ©sident FrancisPerezainitiĂ©leconcoursLydiaLudicTalentspourvaloriser et favoriser la crĂ©ation artistique. Avec la premiĂšre saison, la peinture Ă©tait Ă l’honneur. Voici les peintres gagnants :

BÉNIN :

‱Ogoudjobi Attere Lionel (1er)

‱Kakpodjo Aissi AlbĂ©ric (2e)

‱BalloO.Yannick (3e)

BURKINAFASO :

‱Ouedraogo Moussa (1er)

‱SiĂ© Palenfo (2e)

‱Maïga Moussa (3e)

CÔTED’IVOIRE :

‱GnohitĂ© (1er)

‱GueuGoneti(2e)

‱Ange KouamĂ© (3e)

TOGO :

‱LatĂ©MĂ©liLawson-Hellou(1er)

‱TĂ©yiEnyonam Lawson (2e)

‱Daona Deotanta (3e)

« Il est de plus en plus demandĂ©aux entreprises d’engagerleurs responsabilitĂ©s sociales dans leur gestion au quotidien. En redistribuant les bĂ©nĂ©ïŹces de l’entreprise Ă lacommunautĂ©, la sociĂ©tĂ© Lydia Ludic et Jack se rejoignent immanquablement. Ils partagentlesmĂȘmesvaleurssociales », fait savoir GnohitĂ© avant d’ajouter quel’artistequ’il est, Ă traversson Ɠuvre va en croisade contrelesprĂ©jugĂ©sconcernantlesjeuxduhasard.«C’estvraique dansl’imageriepopulaire,cesjeuxontunemauvaiserĂ©putation.En tant qu’artiste,ilest possibled’inverser la tendance en valorisant ces jeuxqui en dĂ©ïŹnitiveparticipent Ă laprospĂ©ritĂ© ïŹnanciĂšre des citoyens dĂšs lors que celaneconstituepas un actedĂ©lictueux» (Extrait articleparudans rezoivioire.net).

La deuxiÚme saison avalorisé la création musicale dont les artistes gagnantssont :

BÉNIN :

‱Agbado Serdinos(1er)

‱Adonon Cyrus (2e)

‱Adebiaye Charles(3e)

BURKINA FASO :

‱Kodombo Rosine (1er)

‱GuigmaPCamilleMelkior(2e)

‱Lompo LamourdiaJacques

Dit Le Parolier (3e)

CÔTE D’IVOIRE :

‱Nin Wlou (1er)

‱Max Melo (2e)

‱ThibaultDally (3e)

TOGO :

‱KodjoviEtouassignon(1er)

‱Akouvi Kewou(2e)

‱Kassigni Kotchiadjo Fanidji (3e)

Oeuvre« Jack » de l’artiste GnohitĂ©.

2e édition
King Mensah, parrain du jeux concours Lydia Ludic Talents Togo TALENTS
COMMUNIQUÉ
Francis PEREZ Président fondateur de Grupo Pefaco-Lydia Ludic

Le tour de la question

COP27

Que restera-t-il du sommet de Charm el-Cheikh?

Les militantes ougandaises Vanessa Nakate et Joan Namaggwa, aux cĂŽtĂ©s d’autres activistes Ă©cologistes du monde entier, en marge de la COP27, Ă  Charm el-Cheikh, en Égypte, le 11 novembre.

Paroles d’abonnĂ©s

En GuinĂ©e, au procĂšs du massacre du 28-Septembre, Toumba DiakitĂ©, l’ex-aide de camp de Moussa Dadis Camara, a reconnu les faits, mais il Ă©carte toute responsabilitĂ© personnelle. Est-il crĂ©dible?

NON 35 %

OUI 65 %

OUI : 65 %

MitigĂ© : le mot revient dans tous les commen taires sur la derniĂšre ConfĂ©rence des parties sur le climat, dont la 27e Ă©dition s’est tenue Ă  Charm el-Cheikh, en Égypte. Alors que le sommet cristallisait les espoirs du continent africain, il est temps de compter les points.

Du cĂŽtĂ© des annonces officielles, les envolĂ©es ont Ă©tĂ© rares. Les chefs d’État qui se sont succĂ©dĂ© Ă  la tribune, les 7 et 8 novembre, n’ont rien livrĂ© de transcendant. Ce que rĂ©sume cet internaute : « Le dĂ©but de la COP27 a donnĂ© le coup d’envoi du festival annuel des prises de position de personnes qui ne pensent pas rĂ©ellement que le changement clima tique soit un problĂšme. »

Certes, les dirigeants africains ont appelĂ© les pays riches Ă  verser les financements promis. Mais ce sont les promesses des pays du Nord qui Ă©taient scrutĂ©es, en vain. Et mĂȘme la sociĂ©tĂ© civile n’a pu meubler ce silence Interdits de manifester dans les rues de la citĂ© Ă©gyptienne, les acti vistes du climat ont Ă©tĂ© cantonnĂ©s Ă  des Ă©vĂ©nements parallĂšles. Comme la militante ougandaise

Vanessa Nakate, qui a Ă©pinglĂ© les diri geants mondiaux pour leur soutien Ă  de nouveaux projets d’exploitation d’énergies fossiles « malgrĂ© les aver tissements de la science ».

RemĂ©dier Ă  la double peine Pourtant, des engagements signi ficatifs ont bel et bien Ă©tĂ© pris pour remĂ©dier Ă  la double peine des pays pauvres. Faiblement industrialisĂ©s, ces pays contribuent peu au rĂ©chauf fement climatique, mais en subissent fortement les consĂ©quences. Ainsi de l’« historique » accord sur les pertes et dommages, avec la crĂ©ation d’un fonds destinĂ© Ă  compenser les dĂ©gĂąts climatiques que subissent les pays en voie de dĂ©veloppement. Mais aussi de l’encourageante annonce de Joe Biden au sujet du doublement de la contribution amĂ©ricaine pour l’adaptation des pays africains au dĂ©rĂšglement climatique. Ou de celle du Royaume-Uni, qui a dĂ©cidĂ© de tripler ses financements d’ici Ă  2025. Ne comptant plus sur l’Occident pour financer le sacro-saint principe de pollueur-payeur, la BAD a Ă©galement lancĂ© son projet de « Green Bank » . AurĂ©lie M’Bida

Il n’a jamais variĂ© dans ses dĂ©clarations malgrĂ© les tentatives de dĂ©stabilisation des parties adverses.De plus, ses dires ont Ă©tĂ© corroborĂ©s par des victimes. Lamine Sylla CĂŽte d’Ivoire

NON : 35 %

Au cƓur du systĂšme, comment peut-il arguer en ignorer le fonc tionnement? CrĂ©dibilitĂ© zĂ©ro.

NOTRE RÉPONSE

C’est Ă©vident, Toumba a secouru les leaders politiques au stade. Et, lors du procĂšs, il s’est montrĂ© convaincant et coopĂ©ratif. En revanche, il apparaĂźt comme un militaire aux mĂ©thodes brutales. S’il a facilitĂ© l’accession de Dadis au pouvoir, il a fini par ĂȘtre mis Ă  l’écart. Il n’est pas exclu que cette disgrĂące l’ait dissuadĂ© de se battre pour Dadis le 28 septembre 2009 Il faudrait donc des preuves plus solides pour attester de son implication dans le massacre.

REUTERS/EMILIE
MADI
JEUNE AFRIQUE N°3119 DECEMBRE 2022 224
JEUNE AFRIQUE & VOUS

30 dĂ©cembre2006 Saddam, le destin au bout d’unecorde

ArrĂȘtĂ© par les AmĂ©ricains en dĂ©cembre 2003, le raĂŻsdĂ©chu, jugĂ© par un tribunal spĂ©cial irakien, est exĂ©cutĂ©trois ans plus tard. Voici le rĂ©cit qu’en fit alors Cherif Ouazani dans JA.

Saddam Hussein est en pyjama quand les AmĂ©ricains le remettentĂ  despoliciers en civil. Les nuitssont fraĂźches, il garde son Ă©pais manteau. DĂšs sonarrivĂ©esur leslieux,une violentealtercation verbalel’oppose Ă ses nouveaux et Ă©phĂ©mĂšres geĂŽliers, qu’il traitede terroristesetdevaletsdel’occupant. Un haut fonctionnaires’enprend Ă lui :«Tout ceque nous endurons aujourd’hui estdetafaute! Tu nous as dĂ©truits. Tu nous as accablĂ©sde misĂšreettunous as fait vivredans le dĂ©nuement.

–J’aidĂ©truit vosennemis, iraniens et amĂ©ricains. Je vous aisauvĂ©sdela misĂšreetsortis du dĂ©nuement.

–Droit vers l’enfer! –Dieutemaudisse!»

En montant sur la plate-forme oĂč estdressĂ©e la potence,Saddam n’a rien perdudeson orgueil.«L’Irak n’estrien sans moi!» lance-t-il Ă  un responsable,leseulparmi les personnesqui l’entourent Ă ne pas porter de cagoule.Durantla diffusion desimages tournĂ©es par une camĂ©ra «officielle », sonvisage sera floutĂ©.

Saddam estenchaĂźnĂ©,pieds et poingsliĂ©s. DĂšs qu’il gravit les marchesleconduisant Ă lapotence, il ne prĂȘteplusattention Ă cequi l’entoure. « Ya Allah! »implore-t-il. Aucune crainten’est perceptible sur sonvisage. DĂ©tail :iln’y apas un seul bourreaumaiscinq. Saddam refusedemettreunbandeau sur lesyeux.Les images officielles

s’arrĂȘtent quand il estplacĂ© debout sur la trappe, la corde au cou.

Un clercpsalmodie quelques versetsduCoran. Saddam récitela profession de foi desmusulmans,

–Moqtada!Moqtada!Moqtada! crient en chƓur desmembres de l’assistance

Hayaroujoula! », rĂ©torque Saddam, que l’on pourrait traduire par «C’est comme ça que vous ĂȘtes deshommes? », dans le sens bĂ©douin du terme.

«L’homme estentraind’ĂȘtre exĂ©cuté»,lance Mounqidh al-Faroun, le procureur qui avait requis la peine de mort lorsdu procĂšs.Ilmenace de quitter la salle, ce qui provoquerait la suspension de l’exĂ©cution. Le conseiller national Ă lasĂ©curitĂ©, Mouwaffaq RoubaĂŻ, le raisonne.

Saddam entame Ă nouveau la chahada :«Iln’y adeDieu que Dieu et Mohammed »Latrappes’ouvre. On ne luiaura pas laissĂ© le temps d’achever la formule.Les images de l’agonie sont furtivesetfloues. Un plan fixemontrelecadavredans un linceul. Le visageest tumĂ©fiĂ©. ConsĂ©quence de la pendaison?

la chahada.Quatreflashs crĂ©pitent. Lesphotosprises pard’autres tĂ©lĂ©phonesportablesferont la une desjournaux de la planĂšte. Alorsque le clercĂąnonne,uncri fuse:«Pour MohamedBaqer Sadr[un grand ayatollah, oncle de Moqtada Sadr, pendupar Saddam en avril1980 pour «intelligence avec l’Iran»].

Tracesdecoupspost-mortem, fruit de l’acharnement d’une partie de l’assistance sur la dĂ©pouille?Les circonstancesdel’exĂ©cution sont accablantes pour le gouvernement irakien et ses protecteursamĂ©ri cains. MĂȘme si l’exĂ©cution aeu lieu avant l’aube, la communautĂ© sunniteretiendraque l’ex-dictateur aĂ©tĂ© exĂ©cutĂ©unjour sacrĂ©[AĂŻd el-KĂ©bir]. Elle aĂ©tĂ© le reflet de la justice qui aprononcĂ© la sentence, caractĂ©risĂ©epar un amateurisme criant. Uneparodie de procĂšs et une exĂ©cution comme on en voit dans les mauvais westerns.

Pieds et poings liĂ©s, il refuse de mettreunbandeau sur lesyeux. Ce jour-là
 H K TD U UU ? M01936 -2400 F: 3,00 ÉDITION GÉNÉRALE ‱F 3 € ‱Afrique du Sud 29,95 ds (taxinc.) ‱AlgĂ©rie 150 DA All 4 € 5$ Ăšge ay gal yaum ,9 5, HE BD OM AD AI RE IN TE RN AT ION AL IN D ÉP EN DA NT Du 7au13janvier 2007 n°2400 -47 annĂ©e .jeu afriq Justiceetbarbarie RD CONGO La mĂ©thode Gizenga REPORTAGE Mogadiscio, la chute DOCUMENT Quereste-t-il d’Ibn Khaldoun? PANORAMA 2007,annĂ©e de tous lesdangers ExĂ©cution de l’ex-dictateur irakien SaddamHussein, le30dĂ©cembre 2006. SpĂ©cial12pages JEUNE AFRIQUE –N°3119 –DECEMBRE2022 225 JEUNE AFRIQUE &VOUS

TRAINING &ENGINEERING GROUP -TEG

TRAINING &ENGINEERING GROUP ou TEG, est non seulement une histoirederĂ©ussite, il fournit un exempleĂ©diïŹant d’une expertise de haut niveau et Ă forte valeur ajoutĂ©e mise Ă ladisposition des clients du groupe. Àlafaveur d’une offred’expertise diver siïŹĂ©e, ce bureaud’études pluridisciplinaireaacquis une dimension internationale et unerĂ©putation reconnues. Une notoriĂ©tĂ© qu’il doit au professionna lisme de ses Ă©quipes et Ă laconduitedeprojets en matiĂšred’éducation en gĂ©nĂ©ral et de sĂ©curitĂ© des examens nationaux, en particulier.Cederniersecteur stratĂ©gique est l’un des chantiers sur lesquels TEG s’attĂšle en prioritĂ© Ă l’heureactuelle. Manifestement ce domaine revĂȘt pour des raisons objectives une importancecruciale. D’abord, du fait de la mobilisation par la majoritĂ© des pays africains d’importantes dotations budgĂ©taires pour ce secteur nĂ©vralgique. Ensuite, pour assurer un dĂ©roulement optimal des examens dans toutes leurs Ă©tapes. EnïŹn, pour garantirla ïŹabilitĂ©dusystĂšme Ă©ducatif et notamment la qualitĂ© des diplĂŽmes dĂ©livrĂ©s.

Le General Manager de TEG, Nidhal CHAAWA, tireaujourd’hui unegrande satisfaction par le savoir-faire acquis par le Groupe et sa capacitĂ© reconnue en matiĂšredepilotage d’importants projets dans ce domaine. Une mission complexe et stratĂ©gique que TEG

CONTACT:

est en mesuredes’acquitter avec aptitude, s’agissant de la supervision du processus des examens nationaux, de AĂ  Z. Pour garantir des diplĂŽmes de qualitĂ©, la sincĂ©ritĂ© des Ă©preuves et lutter contretoutes formes de fraude, TEG met Ă proïŹtson expertise, ne laissant rien au hasard. La conduite de ce genrede projets est loin d’ĂȘtreune sinĂ©cure. Elle reprĂ©sente pour le Groupe TEG un vĂ©ritablechallenge, un objec tif de haute importance, qu’il doit accomplir confor mĂ©ment aux standards internationaux

SĂ©curiser les examens nationauxetassurer le dĂ©veloppement du systĂšmenational d’examens implique l’assurance de missions interdĂ©pendantes, Ă commencer par la participation Ă laconception, Ă  la prĂ©paration et Ă l’organisation des exame passant par Ă lasĂ©curisation de toutes les opĂ© qui se rapportent Ă laprĂ©paration matĂ©rielle prĂ©paration pĂ©dagogique des examens nation

Pour rĂ©ussir dans ses missions,leGroupe TE puie sur une Ă©quipe de plus de 900 experts q optĂ© pour une approche inĂ©dite de relation dont les caractĂ©ristiques essentielles sont le re pect strict des engagements, une volontĂ© san faille d’établir desrelations sur le long terme, e uneexpertisedetrĂšshaut niveau.

Email : bureau.teg@gmail.com www.etudes.tegcenter.com

Entretien express avec M. Nidhal CHAAWA, General Manager de TEG,

de haut niveau et sans faille.

Quels sont les atouts sur lesquels TEG compte le plus ? N.C. : je suis persuadĂ© que notre pointfort trouve sonreïŹ‚et dans notresouci d’ĂȘtre en phaseavec les standards internationauxles plus strictesetd’ĂȘtreĂ l’écoute de desideratas de nosclients dans les diffĂ©rents domaines d’intervention. Aujourd’hui on est parvenu Ă construireune conïŹance et un label. Qui plus est, 80 %de nos clients noussollicitent pour d’autres projets et 76 %denos clients nous recommandent Comment expliquer votre implication dans la conduite de projets complexescomment la sĂ©curisation des examens ? N.C. : NotrebureauseprĂ©vaut d’un savoir-fairereconnu dans ce domaine stratĂ©gique et dĂ©licat. Il est bien outillĂ© pour piloter ce genredemissions parce que ses Ă©quipes sont animĂ©es par un esprit de responsabilitĂ© et de rigueur.Ce domaine d’interventionnous com mande l’assurance d’une expertise dh i ens, en rations et Ă la naux. Gs’apqui ont n client esns et

La sécurisation des examens nationaux : LA MARQUE DE FABRIQUE DE
TRAINING &ENGINEERING GROUP Tél: 0021696750077
COMMUNIQUÉ
éducation
JAMG -P HOT OS DR

Post-Scriptum Fawzia Zouari

De la nĂ©gritude Ă  l’africanitĂ©

Dans son dernier livre, Entretiens avec AimĂ©CĂ©saire (HC Ă©ditions, Bordeaux, 2022), la journaliste et Ă©crivaine martiniquaise MarijosĂ© Alie offre un Ă©clairage intime sur la vision du monde du cĂ©lĂšbre poĂšte. Mais ce n’est pas tout. Elle raconte Ă©galement l’amitiĂ© qui a liĂ© le couple mythique AimĂ© CĂ©saire-LĂ©opold SĂ©dar Senghor.

On voit les deux hommes, cheminant cĂŽte Ă  cĂŽte dans le Paris d’avant-guerre, discuter de leur condition de dominĂ©s et se chercher une identitĂ© culturelle commune Ils avancent le concept de « nĂ©gritude ». CĂ©saire dĂ©clare que seul ce concept est capable de le sortir du statut de colonisĂ© auquel il est rĂ©duit au regard du monde, lui, le Martiniquais « Ă  l’identitĂ© indĂ©finissable ».

Senghor Ă©coute et sourit. Il est enracinĂ©, lui, dans le continent comme un baobab. Pas de doute sur son appartenance Il accepte toutefois de porter avec son ami le concept de « nĂ©gritude » pour reven diquer le fait d’ĂȘtre noir, pour faire reconnaĂźtre le destin d’un « peuple noir », uni et solidaire.

Mais la nĂ©gritude suffit-elle Ă  dĂ©finir le continent? Senghor lui-mĂȘme craignait que ce concept ne soit une « tour » ou une « muraille » s’il impliquait que l’on rompe les

liens culturels avec le monde occi dental. Quid des liens avec l’Afrique du Nord? Puisque, s’il jette un pont au-dessus de l’Atlantique, le concept de nĂ©gritude oublie d’évoquer les passerelles qu’il faut bĂątir Ă  l’intĂ©rieur mĂȘme du continent.

Vous l’aurez compris, c’est une MaghrĂ©bine qui parle. Et qui rĂ©clame qu’un mouvement plus large que la nĂ©gritude permette de cimenter le continent d’un bout Ă  l’autre; une idĂ©e nouvelle qui dĂ©signerait l’Afrique dans sa totalitĂ© nĂ©groberbĂšre; qui refuserait de faire l’impasse sur une histoire et une gĂ©ographie communes, et sortirait tout autant les Subsahariens de leur condition de Noirs que les MaghrĂ©bins des appartenances arabes et orientales dans lesquelles ils se sont enfermĂ©s.

Oui. On attend celui ou celle qui viendrait « recoudre » le continent, du cap Bon tunisien au Cape Town sud-africain; qui déclinerait la palette entiÚre des couleurs, des peaux,

des idiomes, traditions, religions et coutumes; qui rappellerait que l’Afrique, c’est le Noir, le Blanc et le Brun, le swahili, le kabyle et le haoussa, les contes des griots et les saillies de Jha, l’olivier et le dragon nier, Élyssa et la reine Nzinga, l’émir Abdelkader et Amadou HampĂątĂ© BĂą, les palabres et les fdawis,le malouf, la kora et le N’goni, les femmes en boubou, en mĂ©lia et en minijupe; celui ou celle qui dira : « Quand le monde voudra assumer toute sa diversitĂ©, il s’appellera l’Afrique. »

Reconjuguer l’avenir

Cette conscience, nouvelle, que le continent doit ĂȘtre considĂ©rĂ© dans son intĂ©gralitĂ© nous est plus que jamais nĂ©cessaire. Elle pourrait proposer une sortie de l’histoire actuelle, celle d’un monde tourmentĂ©, Ă©goĂŻste et dĂ©shumanisĂ©, dĂ©sorientĂ© par un systĂšme Ă©conomique mondia lisĂ©. Elle pourrait rebattre les cartes et reconjuguer l’avenir.

Il ne s’agit pas de prĂȘcher la thĂ©orie du « Tout-monde » chĂšre Ă  Édouard Glissant. Je parle d’un continent d’avant le monde, d’un continent d’avant les continents. De l’Afrique, par qui adviennent les naissances et s’écrivent les chants premiers. Celle qui parle la langue de la sagesse millĂ©naire et qui sait vĂ©nĂ©rer la nature. Celle qui lĂ©gitime les diffĂ©rences et les unit dans un mĂȘme creuset de valeurs fondamentales. L’Afrique berceau de toutes les identitĂ©s, et donc la seule Ă  pouvoir imposer l’idĂ©e d’une « identitĂ© universelle ». Tout cela peut s’appeler : l’africanitĂ©.

Voilà. Je crois que nous sommes sur la voie


Onattendceluiqui viendrait«recoudre» lecontinent,ducapBon àCapeTown. JEUNE AFRIQUE N°3119 DECEMBRE 2022 226
ABUS
L’
D’ALCO OL EST DA NGEREUX PO UR LA SANTÉ, ÀC ONSOM MER AV EC MODÉR AT ION.

Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.