DH Magazine 124 - Février 2009

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Le détachement de Keynes C’est la crise. Cela n’aura échappé à personne. Tout va mal, ou presque, et ça va encore aller plus mal. On peut être optimiste quant à l’avenir du pessimisme.

Les journaux, qu’ils soient écrits ou parlés, nous annoncent des lendemains qui déchantent. Comme pour certains avocats ou directeurs d’hôpital, il y a des économistes qui se sont spécialisés en apparition dans les médias pour jouer les Cassandre. Ca va aller encore plus mal. Le libéralisme aurait failli. Il y en a même pour en appeler aux mânes de Keynes pour taper sur la main invisible du marché chère à Adam Smith. Il faudrait, il faut, relancer la consommation. Et chacun d’y aller de sa proposition. Qui en pariant sur une relance par la demande en soutenant la consommation et l’emploi, qui en souhaitant une politique de grands travaux. Les hôpitaux me paraissent être le terrain par excellence d’une telle politique. L’état de vétusté de nombre d’établissements justifierait que les hôpitaux soient inclus dans cette politique de grands travaux. Ainsi le Bâtiment irait mieux et « nos » bâtiments également, dans l’intérêt de ceux qui y sont accueillis et de ceux qui y travaillent. En outre cela permettrait d’améliorer la performance de nos structures. Simple, non ? Trop simple ? Simpliste ? Et le personnel ? Comment faire alors que la tendance est plutôt (litote) à la suppression de postes ? Ce qui bien sûr (?) va à l’encontre des préconisations des syndicats qui mettent les difficultés stigmatisées par nos « redoutables » médias sur le compte de moyens, entre autres en personnel, insuffisants. La solution, iconoclaste - je le reconnais volontiers - par les temps qui courent, serait de créer le détachement en retraite. Il s’agirait de permettre aux agents qui le désirent, dès lors qu’ils auraient 37,5 ans de cotisation à leur actif, d’être détachés mais dans la seule position de retraité. Avec pour rémunération le dernier salaire corrigé du coefficient correspondant aux droits acquis en matière de retraite. Rémunération soumise à toutes les cotisations usuelles, comme tout détaché, y compris celles afférentes à la CNRACL (dans l’exemple qui nous intéresse, à savoir celui de la fonction publique hospitalière). Certes cela représente une perte de revenus pour les agents concernés mais il serait la conséquence d’un choix personnel. En adeptes de l’économie quaternaire où l’on passe d’une économie de « l’avoir plus » à une économie de « l’être mieux ». Néanmoins les agents dans cette position, comme chaque détaché, verraient leur déroulement de carrière continuer et avanceraient dans leurs échelons jusqu’à la mise en retraire effective avec une pension de retraite ainsi augmentée et bonifiée par les années de cotisation dans cette position. Les établissements auxquels ces agents seraient rattachés (leur dernier employeur) seraient financés par la CDC et auraient pour obligation de pourvoir au remplacement desdits agents. Les avantages me paraissent multiples : 1) qualité de vie pour les agents qui feraient ce choix et qui pour certains ne se reconnaissent plus dans le système hospitalier tel qu’il évolue, voire sont considérés au mieux comme des poids morts par certains décideurs, au pire comme des obstacles lestés de leur pensée hospitalière néanderthalienne. 2) réduction du nombre de demandeurs d’emploi et des dépenses sociales qui vont avec. Par ailleurs ceux-ci deviendraient ces consommateurs dont on a et dont on va avoir tant besoin (revoilà Keynes) qui cotiseraient auprès des organismes d’assurance maladie et de retraite. 3) coût nul pour les établissements, voire dégagement d’une marge de manœuvre si, ce qui sera le plus souvent le cas, l’agent en fin de carrière est remplacé par un nouvel entrant dans le monde hospitalier. Certes il faudra donner les moyens à la CDC de financer les établissements. Mais l’histoire récente nous montre que l’on sait trouver des ressources pour répondre à des besoins que l’on qualifiera, par charité, de moins évidents. Cette idée aura-t-elle l’heur de plaire aux décideurs, aux syndicats et avant tout aux premiers concernés, à savoir les agents ? Je l’espère. Est-elle finançable ? Nos brillants économistes le diront. Mais je reste convaincu qu’elle mérite d’être étudiée. L’annus horribilis qui nous attend, sans parler des suivantes, doit nous obliger toutes et tous à apporter notre pierre à l’édifice. Avec modestie voire utopie. Loin de ces think-thanks où règne une certaine forme d’endogamie intellectuelle. Car comme il est écrit dans le supplément « Economie » du Monde daté du 20 janvier 2008, il faut savoir admettre que les bonnes idées ne viennent pas seulement d’en haut et croiser les regards. Ainsi ceux qui nous gouvernent et décident pourront le faire en connaissance de cause. D. Hache

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