ledelit_20060307

Page 15

délit | 7 mars 2006 16 xle www.delitfrancais.com

Arts&Culture

nous sommes les ac/dc du cd/bd MALAJUBE Trompe-l’oeil

L

a formation montréalaise de rock absurde surprend avec ce Trompel’œil. Dès l’intro, savamment intitulée «Jus de canneberges», on flotte entre les voix en harmonie qui lancent les cinquante minutes de festivités. «Montréal -40˚C», le simple qui tourne autant sur les radios universitaires que commerciales, enchaîne rapidement avec le côté ludique du groupe accompagné de Pierre Lapointe. La voix de Julien Mineau s’enchevêtre à des échanges musclés entre les instruments. Les paroles sont tout simplement exquises. Comme par exemple : «Pour controller ma sensibilité/J’ai couvert mon cœur d’une pâte filo/Qui me protège de toi/Et de ta libido.» Pour les plus virils, l’abrasion ne manquera pas sur cette nouvelle offrande «malajubienne». «Casse cou» débute de façon trompeuse sur un riff lugubre, avant de vous emporter dans un tourbillon tumultueux. Toutefois, la perle de l’album est sans conteste la cinquième piste, «Monogamie». À plusieurs reprise, les musiciens

parviennent à changer de cadence, le tout sans perdre le fil. Le groupe montre son aisance magistrale à la composition en passant de complexes mélodies à des séquences mono-instrumentales simples en un tour de main. Les claviers de Thomas Augustin rappellent vaguement le rock clownesque de Mike Patton, schizophrène mélodique par excellence. On se délecte également de la participation de Loco Locass à «La Russe» et des influences brit pop sur «Étienne d’août», un croisement original entre Mogwai et Coldplay. Un chef-d’œuvre à part entière, Trompe-l’œil confirme la vague pop rock locale qui ne cesse de déferler depuis quelques années. Après The Arcade Fire chez nos confrères anglophones, Malajube n’aura aucun mal à exporter ses mélodies et faire goûter au monde entier le rock ludique à la sauce québécoise. Parlant d’exportation, le groupe parcourra la Scandinavie cette année. À nous le monde! (Dare To Care, www.malajube.com)

Alexandre de Lorimier

OLIVIER G. BOISCOMMUN Psaume 3 «Anges»

U

ne prestation graphique. Un régal pour les yeux! Le Psaume 3 des «Anges» propose un dessin fin et pimpant, un peu trop rond pour être vraiment coquin, mais avec une tournure et une patine très unies sans que l’on perde du détail. Le travail de la couleur, des ombres et des ambiances rouge et noir est remarquable: nous sommes en Enfer, indéniablement. Dans les premiers tomes –que les lecteurs de séries se rassurent, chacun des volumes est relativement indépendant des autres–, le dessin suivait une technique de coloriage direct sans encrage, ce qui suppose beaucoup plus de précision, technique à laquelle Boiscommun avait déjà fait appel pour certaines planches de «Trolls». Avec le troisième tome, Boiscommun relaie Dieter à la barre au scénario, continue au dessin et relègue les couleurs à Christelle Moulart, qui maîtrise la technique de façon phénoménale: difficile de discerner la transition! Par contre, côté scénario, c’est beaucoup plus maigre. Si la chute est mignonne, le reste

de l’histoire demeure très cliché et très mince: Om et Jéliel, anges pas parfaitement angéliques («saleté d’emplumés», dirions-nous du côté des Enfers), reçoivent de Bouddha, qui remplace Dieu pour l’occasion, la mission d’aller contrer les plans du diabolique (c’est normal, c’est un démon) Azazel. Ils auront besoin de l’aide de Yésod, démon malin mais pas démoniaque et un peu paranoïaque (mais c’est parce que sa douce moitié est jalouse) et de La Grippe, démon laborantin. Autrement dit, Bien contre Mal et ça s’arrête à peu près là. Puisqu’on nous annonce la «fin du premier cycle», on ne peut qu’espérer que Boiscommun s’adjoigne à nouveau un scénariste aux intrigues plus étoffées (comme dans le charmant premier tome qui se déroulait dans Notre-Dame-deParis), histoire que le lecteur puisse se mettre la dent sur autre chose que des prouesses chromatiques... En bref, du petit fantastique léger, scénaristiquement trop gringalet pour pouvoir passer de «mignonnet» à «drôle», mais graphiquement impeccable. (Humanoïdes associés)

Laurence Bich-Carrière


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.