Core Magazin 2025/26 FR

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core

Le magazine de Coop Protection Juridique

«Être superstitieux est stupide,mais nepasl’être porte malheur.»

L’HISTOIRE DE LA SUPERSTITION

Seul dans un château hanté

Les avantages, dangers et formes actuelles de la superstition

Les rituels de Lara Stalder, capitaine de la Nati

Un quiz différent: testez vos superstitions

Éditorial

Bienvenue au no 13!

Chère lectrice, cher lecteur,

Non, je ne suis pas superstitieux. Pas le moins du monde (ou, du moins, je me le fais croire). Et pourtant, ce sujet me fascine. La superstition est aussi vieille que l’humanité. Même chez Coop Protection Juridique, elle surgit régulièrement. Cette édition de core – la 13e – était tout indiquée pour traiter de cette thématique.

J’espère que son menu vous enthousiasmera autant que moi.

Nous avons reconstitué une affaire criminelle réelle dans laquelle la superstition a joué un rôle central (page 14). Le prestigieux psychologue médico-légal Jérôme Endrass nous révèle en quoi la superstition présente des risques (page 17). Nous avons envoyé un auteur courageux passer une nuit dans un château hanté (page 52) et brossons le portrait de la capitaine de la Nati de hockey, Lara Stalder, qui a mis en place des rituels pour contrôler l’agitation des jours de match (page 44).

Nous nous sommes en outre intéressés au pouvoir culturel et poétique de la superstition (page 40) et aux raisons pour lesquelles les algorithmes accentuent celle-ci (page 60).

Qui dit superstition dit aussi chats noirs, miroirs brisés et trèfles à quatre feuilles: nous nous sommes penchés pour vous sur l’origine de ces croyances (page 30).

Je vous souhaite une lecture inspirante!

SA

core – le magazine de Coop Protection Juridique SA, Entfelderstrasse 2, Case postale, CH-5001 Aarau, tél. +41 62 836 00 00, info@cooprecht.ch. Direction de projet: Petra Huser, Sibylle Lanz (Coop Protection Juridique SA); Rédaction: Matthias Mächler, Patrick Tönz (diemagaziner.ch); Direction artistique: Adrian Hablützel (artdepartment.ch); Traduction: sprachweberei.ch; Impression et expédition: merkur medien ag, Langenthal; Tirage: F 3500/D 14 000 exemplaires; core paraît une fois par an; Commandes: petra.huser@cooprecht.ch. Les informations concernant des prestations de service et des produits publiées dans ce magazine ne constituent pas des offres commerciales au sens juridique du terme.

Ce qui vous attend: Tous pour une chose

6 Mémo

Bribes du quotidien de Coop Protection Juridique (CPJ).

14 Un cas réel

C omment une voyante a cherché à soutirer des aveux.

17 Chances et dangers

«L a superstition rassure», selon le psy Jérôme Endrass.

20 La mystique au quotidien

C outumes et superstitions: sept exemples européens.

30 Pourquoi donc

L’ABC de la superstition et de ses origines.

40 Les fondements historiques et une ode à la magie des mystères insondables.

44 Les rituels dans le sport

C omment Lara Stalder, capitaine de la Nati, confronte le chaos.

52 Dans le château hanté

N otre auteur se demande s’il est vraiment seul, ici.

60 Superstitions des temps modernes

C omment apparaissent-elles? Et que font les algorithmes?

64 Porte-bonheur

C inq collaborateurs/trices de CPJ et leurs talismans.

68 Suis-je superstitieux?

Faites-vous une idée à l’aide de notre quiz (pas trop sérieux).

74 Le dernier mot

A rchives: une seconde pour une heure de vie en plus.

Les autrices, auteurs, photographes et illustratrices suivants ont contribué à ce numéro:

Denise Battaglia

Elle aime autant disséquer méthodiquement des réalités complexes que jardiner en dilettante: dans son article (page 40), elle explore l’histoire de la superstition.

Christian Fichter

Plus le monde est complexe, plus les solutions simples sont tentantes: le psychologue économique décrit la rapidité avec laquelle nous versons dans la superstition, surtout dans le contexte numérique (page 60).

Christof Gertsch

Dans le sport, c’est en premier lieu la psychologie qui fascine ce journaliste primé: il a rencontré pour nous Lara Stalder, capitaine de l’équipe nationale de hockey, pour s’entretenir avec elle de ses rituels presque compulsifs (page 44).

Christian Grund

Les photos qu’il a réalisées de Lara Stalder à l’aide d’un drone semblent truquées – un régal pour les yeux (page 44). Il les a prises après que la capitaine, respectant ses rituels, s’est préparée à monter sur la glace.

Adrian Hablützel

Lors de la saison des châtaignes, notre directeur artistique doit ramasser la première qu’il trouve sous peine d’attirer la malchance. À propos de pressentiment: il a illustré l’histoire sur «L’éloge du sixième sens» (page 40).

Pourquoi casser de la porcelaine porte-t-il chance? Que cache le chiffre 7? Dans son ABC de la superstition, la journaliste élucide l’origine de nos croyances. Ce qui l’a ébahie? Que le chat qui salue ne salue en fait pas (page 30).

Kooni

Elle est jeune, audacieuse, dynamique et pleine de tendresse pour ses personnages. Sous son pseudonyme, l’illustratrice bâloise associe d’une façon très personnelle des bonshommes stylisés qui donnent le sourire (page 68).

Max Küng

Évidemment qu’il ne croit pas aux esprits: il a accepté, tout sourire, d’être enfermé dans un château hanté (page 52). Mais il ne s’est pas senti aussi seul qu’il l’aurait cru. Étaitce dû au chevalier Kuoni, autrefois emmuré vivant dans l’édifice?

Matthias Mächler

Des pois chiches?! C’est avec ça que la police voulait confondre le suspect d’un crime? Cette affaire réelle (page 14) a surpris le directeur de notre rédaction, qui a alors interrogé le psychologue médicolégal Jérôme Endrass (page 17).

Maya et Daniele

Ils se sont effectivement rencontrés un 7 (ce qui ne peut être qu’un bon présage!) Depuis, ils font cause commune, y compris en tant qu’équipe photo. Pour core, ils ont illustré l’article portant sur les formes actuelles de la superstition (page 60).

Ses illustrations ont paru dans les périodiques New York Times, Harper’s Bazaar ou NZZ am Sonntag. Sa première contribution à core nous donne le ton de l’affaire réelle extraordinaire que nous vous présentons (page 14).

Svenja Plaas

Ses images laissent toujours poindre quelque chose, un esprit scénique, comme s’il allait soudain se passer un truc. L’illustratrice a étudié le design graphique et le montage, vit entre Zurich et Vienne et a mis notre «Mémo» (page 6) en images.

Elle a un talent certain pour capturer les âmes et les ambiances: la photographe est restée stoïque lorsque, par une chaleur étouffante, elle a mis en scène le personnel de Coop Protection Juridique et leurs talismans (page 64).

L’auteure culte fait à nouveau honneur à sa réputation: son quiz «Suis-je superstitieux?» (page 68) et les résultats de celui-ci se lisent avec délectation… et ne sont bien entendu pas à prendre au pied de la lettre.

Julia Heim
Lina Müller
Valentina Verdesca

Future Work Prendre le pouls de l’avenir

Que nous réserve l’avenir sur le lieu de travail? Quelles tendances sontelles pertinentes pour CPJ? Pendant un mois, nous nous sommes penchés sur une expérience particulière.

Le monde du travail poursuit sa mutation – CPJ a tenté de découvrir c omment le façonner activement. Un groupe interdisciplinaire composé de huit collaborateurs/trices a étudié, sous la direction de l’experte Barbara Josef, comment transposer les tendances professionnelles du futur aux besoins de CPJ.

Un hackathon était notamment intitulé «Faire carrière ne signifie pas seulement devenir chef – quel est le parcours de développement optimal pour toi?» Un atelier a mis en évidence que les réunions sont souvent trop longues, trop inefficaces ou trop nombreuses! Nous nous sommes demandé quels procédés ou outils pourraient rendre le quotidien plus efficace, plus agréable ou plus créatif. Dans le cadre d’exposés de sensibilisation et de formats d’échange créatifs, les collaborateurs/trices ont testé, discuté, rejeté et approuvé des pistes pendant un mois.

Le mois «Future Work» ne signifie aucunement la fin du projet – il ne fait que commercer. Les résultats sont à présent implémentés. H uit dimensions ont été définies. Elles sont censées marquer le futur monde du travail chez CPJ. Chaque dimension comprend des c hamps d’action concrets – de «gains rapides» réalisables d’emblée jusqu’à des projets ambitieux à plus long terme.

Illustration: Svenja Plaas

Trois questions à...

Barbara Josef, qu’apporte réellement un tel projet?

Si nous anticipons les changements dans notre monde intérieur et extérieur, nous sommes en mesure de contribuer au façonnage de notre avenir – en saisissant les opportunités de manière ciblée ou en tentant de nous protéger des dangers.

Pour ce qui est de CPJ, quels ont été les enseignements clés?

À titre personnel, le fait que les conditions correspondantes sont déjà réunies. Les collaborateurs/ trices ont une perception prononcée de leurs propres capacités, les cadres font preuve de réflexion et bien des thèmes sont déjà abordés dans une optique d’innovation – le projet nous a permis d’offrir une plateforme aux efforts individuels, de renforcer l’initiative personnelle et de vraiment concentrer nos forces.

La jurisprudence n’est pas réputée particulièrement courageuse ou innovante. Comment avez-vous vécu la disposition au changement du personnel?

(Rires.) L’image que j’avais des juris tes a complètement changé. J’admire à quel point le facteur humain est ancré dans la culture de CPJ. On sent que toutes les personnes qui travaillent chez CPJ témoignent un réel intérêt pour leur vis-à-vis – et également pour la clientèle.

BARBARA JOSEF est cofondatrice de la société 5–9 AG et accompagne des entreprises et des organisations dans leur transformation.

Coop Protection Juridique et l’IA

Bonjour, CORA!

CPJ aspire à faciliter l’accès au droit pour ses clientes et clients et, à cet effet, s’intéresse de près aux thèmes de l’innovation et de l’intelligence artificielle. Le partenariat avec l’ETH AI Center et la plateforme d’IA CORA, un développement maison, la soutiennent dans cette démarche.

Une motivation animale

Certes, Maya appartient offici ellement à Stéphanie Decroux, la responsable adjointe de CPJ L ausanne. Mais en réalité, elle assume le rôle de mascotte pour toute l’équipe de l’avenue de la Gare 4. Cela a bien sûr pour conséquence que la plupart de nos 22 collaborateurs/trices r ivalisent d’éloges, de caresses et tentent même parfois de la s oudoyer avec quelques friandises pour s’attirer les faveurs de Maya. La chienne Yorkshire Terrier a donc fort à faire - et elle participe é galement à toutes les séances de sa maîtresse en gardant scrupuleusement confidentiel toutes les i nformations échangées - elle peut donc se retrouver parfois assez fatiguée lorsque, vers le soir, il est l’heure de rentrer à la maison.

Apprenties et apprentis chez CPJ

Ces sept-là nous tiennent à cœur

Idéalement, nous souhaiterions qu’ils ne nous quittent jamais! Ces apprenties et apprentis ainsi qu’une stagiaire effectuent leur formation chez nous (état: juin 2025):

Rangée du haut, de gauche à droite: Leandro Talerico (3e année, agent relation client CFC), Shkurte Ajrizi (3e année, employée de commerce CFC), Michelle Hunziker (3e année, employée de commerce CFC), Nathanael Gelzer (2e année, employé de commerce CFC), Lara Istuk-Banic (stagiaire commerciale).

Rangée du bas, de gauche à droite: Mathieu Hediger (1re année, employé de commerce CFC), Meron Ermias (2e année, agente relation client CFC).

Nous vous remercions de votre confiance et vous souhaitons plein succès dans votre parcours!

Photo: Valentina Verdesca

ENQUÊTE

La Suisse est-elle juste?

Soutenu par CPJ, le bimensuel «Beobachter» a établi, pour la première fois, un baromètre de la justice. Les résultats font réfléchir.

La justice constitue le ciment de notre société. Mais qu’en est-il de ce fondement, au juste? 5500 personnes interrogées ont évalué 18 thèmes qui font actuellement l’objet d’un débat en rapport avec la justice. Le résultat offre un aperçu intéressant du ressenti national et révèle à quel niveau l’injustice est perçue dans notre pays, mais également les fossés qui ont tendance à se creuser au sein de notre société.

Bien qu’une petite majorité estime que la vie en Suisse est fondamentalement juste, les résultats font état d’une ins atisfaction à l’égard de l’État, de la politique et de l’économie. En réponse

à la question ouverte portant sur les plus grandes injustices en Suisse, les inégalités salariales ainsi que les salaires trop bas ont été le plus souvent cités. L’inégalité de la répartition des richesses (le décalage c roissant entre riches et pauvres), se place en deuxième position. La fiscalité, que beaucoup jugent injuste, a également été fréquemment citée. En revanche, les personnes sondées ont jugé fort équitable la démocratie et son droit de vote et d’élection, le système scolaire et les possibilités de formation, le système social ou encore le système juridique.

Dans l’ensemble, il transparaît que la justice est une question de point de vue. C e que l’on trouve injuste est fortement tributaire de l’âge, du sexe, du statut social et de la situation professionnelle. Les valeurs personnelles et l’orientation politique influent également sur la perception de l’injustice.

Sont de cet avis...

43%

«Les femmes fournissent beaucoup plus de travail (ménager) non rémunéré et sont désavantagées au niveau du salaire et de la prévoyance.»

36%

«Les grands groupes s’octroient des bénéfices, tandis que la durabilité est laissée pour compte.»

22%

«L’augmentation de la bureaucratie rend la vie quotidienne de plus en plus compliquée.»

14%

«La réglementation de l’aide sociale varie en fonction des cantons et des communes.»

27%

«C’est sur mon lieu de travail que je fais l’objet du traitement le plus injuste.»

Ce code QR vous permet d’accéder à l’enquête du bimensuel «Beobachter» (en allemand).

Symposium Weissenstein

L’engagement porte ses fruits

La success-story se poursuit: le troisième WESYM aura lieu en octobre.

La société CPJ souhaite s’engager en faveur de meilleures conditionscadres légales et ouvrir le débat sur les situations juridiques insatisfaisantes. Il s’agit d ’induire des changements qui profitent à la société tout entière.

Voilà pourquoi CPJ a initié le Symposium Weissenstein en 2021. Il favorise un échange interdisciplinaire et réunit des leaders thém atiques et des spécialistes qui, se fondant sur des connaissances acquises scientifiquement, élaborent des solutions réalisables dans le cadre d’un échange constructif. Lors de la première édition du WESYM, CPJ a abordé l’accès équitable aux prestations d’invalidité. Durant la deuxième, l’accent portait sur l’évaluation de l’incapacité de travail et de gain, sujette à controverse. La troisième manifestation aura lieu en octobre 2025 et s’articulera autour de stratégies visant une mise en œuvre réaliste des enseignements ac quis jusqu’ici.

En quelques années, un réseau imp ressionnant a pu être mis en place. Pour le projet actuel, CPJ travaille en étroite coll aboration avec le Centre suisse des paraplégiques (CSP), l’ASIM et des offices AI. À noter: l’initiative du conseiller national S idney Kamerzin, «Pour une prise en consi dération des possibilités d’emploi réelles des personnes atteintes dans leur santé», a récemment été adoptée à l’unanimité au Palais fédéral – précisément le thème qui avait été traité lors du premier WESYM. L’engagement de CPJ porte ses fruits!

En savoir plus sur le WESYM? C’est par ici: www.wesym.ch (en allemand).

Illustration: Svenja Plaas

Entretien

«Une contribution utile à la société»

Thomas Gächter, vous vous engagez en faveur du Symposium Weissenstein avec des contributions scientifiques conséquentes. Pourquoi?

Le WESYM réunit des praticiens et des théoriciens de plusieurs secteurs. Et cela, sur un terrain neutre, car il est financé de façon impartiale par Coop Protection Juridique. Il ne s’agit donc pas de s’assurer une part du gâteau, mais de trouver de véritables solutions, d’apporter une contribution utile à la société.

Cette année, le WESYM portera notamment sur les stratégies d’évaluation de l’incapacité de travail et de gain. Pourquoi ce thème est-il d’une actualité brûlante?

Si ce thème a toujours été pertinent, il a jusqu’ici été éclipsé par des thèmes encore plus importants. Après les deux derniers symposiums, particulièrement efficaces et ayant obtenu des résultats étonnants en très peu de temps, la suite logique est d’en élaborer des stratégies réalisables.

Comment évaluez-vous les possibilités de développement et le potentiel du Symposium Weissenstein?

Je vois surtout un potentiel si l’on continue a y apporter autant de soin et à rester au plus près du sujet – tout en osant marquer un temps d’arrêt en l’absence de thématiques pressantes. Mais, de manière générale, le Symposium Weissenstein a nettement plus d’impact sur la politique et la pratique que bon nombre d’autres manifestations. Je dirais même plus: le WESYM illustre, de façon exemplaire, comment aborder des problèmes sociétaux urgents par l’initiative privée, voire comment mettre en œuvre la responsabilité entrepreneuriale avec pertinence.

PROF. THOMAS GÄCHTER est doyen de la Faculté de droit de l’Université de Zurich.

Service Excellence

La clientèle en point de mire

De l’apprenti au CEO: CPJ envoie tout son personnel en formation de communication.

Coop Protection Juridique traite plus de 48 000 cas juridiques par an et s’engage en faveur de sa clientèle avec conviction et des solutions i ndividuelles. À cet égard, la communication avec les assurés, mais aussi avec les autorités, les parties adverses et les avocats, constitue un défi de taille. En effet, il s’agit de répondre à tous les besoins et de véhiculer les difficultés juridiques de façon respectueuse et compréhensible. Dans cette communication, CPJ vise le qualificatif «Service Excellence». En d’autres termes: CPJ aspire à offrir le meilleur service clientèle. Voilà pourquoi l’ensemble des collaborateurs/trices suivent une formation en communication, y compris l’équipe informatique et la comptabilité. Ils y acquièrent notamment la technique d’entretien et la capacité à établir un lien personnel et émotionnel avec leurs interlocuteurs. Toujours dans l’intérêt de la clientèle.

CPJ numérique

En bref

Le blog CPJ éclaire des questions juridiques du quotidien – notamment dans les d omaines du droit du travail, du droit des baux et des contrats, des voyages et d’Internet.

Une attention particulière est é galement accordée aux questions juridiques pour les PME, qui ont besoin d’informations pratiques.

Les lecteurs/trices profitent de conseils pratiques, d’exemples d e cas formulés de façon compréhensible, d’entretiens avec d es spécialistes ainsi que d’aperçus intéressants du monde de CPJ.

Suivez-nous!

CPJ est présente sur ces canaux: cooprecht.ch

Fiche signalétique

Nouvelle série: CPJ expose...

Valentina Verdesca (1985), photographe de Kölliken, se

présente en premier.

Photo préférée: actuellement, la photo de l’escalier. J’aime cette ambiance surréaliste. Quand je l’ai prise, un passant m’a demandé pourquoi je photographiais cet escalier anodin, alors qu’il y avait de plus beaux sujets plus loin, comme une prairie fleurie. Ces retours me font plaisir, car ils démontrent que l’extraordinaire n’est pas perçu par tous.

Sujet préféré: je peux photographier aussi bien une chaise au bord de la route que des nuages ou des personnes. Dans une ambiance particulière, les choses les plus banales deviennent extraordinaires.

Humeur préférée: la mélancolie! Le mélange de langueur, de songerie et de nostalgie relie ce qui a été à ce qui est maintenant.

Format préféré: j’aime tous les formats, mais je photographie bien plus souvent en format vertical.

Chanson préférée pour l’exposition: «This must be the Place», des Talking Heads.

À l’accueil et dans les salles de réunion de son siège à Aarau, CPJ présente, pendant plusieurs mois, des objets et des photographies (à acheter) d'artistes argoviens.

Jour de paie

Carrière chez chez CPJ?

C’est vrai: nous nous faisons des idées sur notre rôle d’employeur. L’équité, la flexibilité et la promotion des femmes constituent des valeurs vécues chez CPJ. Nous aspirons à une cohabitation respectueuse.

66% du personnel de CPJ sont des femmes. 57%

du personnel sont des juristes, hommes et femmes. 44% du personnel travaillent à temps partiel.

36 ans est l’âge moyen du personnel 5 ans

C’est le temps que les collaborateurs/trices restent en moyenne chez CPJ, en tenant c ompte des apprentis et des stagiaires.

Les données sont arrondies.

Nouveau site Web carrières

Un nouveau look, de vrais aperçus: notre site Web carrières e st en ligne! Après des mois de planification intensive, nous s ommes ravis du résultat. Sur jobs.cooprecht.ch, nous s ouhaitons présenter une image honnête de ce que signifie travailler chez CPJ – en toute proximité, sans artifices ni fioritures. Vous y trouverez des vidéos a uthentiques, des commentaires réels de collaborateurs/trices ainsi qu’un aperçu des différents métiers. jobs.cooprecht.ch

De concert avec la voyante

Ce fut l’opération d’espionnage la plus sophistiquée de Suisse: les superstitions d’un suspect ont été utilisées pour le confondre. Une enquête digne d’un film!

PAR Matthias Mächler ILLUSTRATION: Lina Müller

Bien que le dossier remplisse désormais 39 classeurs fédéraux, que sept personnes aient été arrêtées puis relâchées, que 250 personnes aient été entendues comme témoins et que des centaines de conversations téléphoniques aient été écoutées et traduites, l’affaire n’est toujours pas résolue. Christine Brand, qui l’a suivie en 2018 en tant que journaliste judiciaire pour le quotidien NZZ et et enquêté sur elle dans les moindres détails pour son best-seller «Wahre Verbrechen» (non traduit), raconte: «Si ce n’était pas une telle tragédie, on devrait rire de l’imagination de la p olice. Elle a fait preuve d’une créativité peu commune.»

L’histoire commence le 19 octobre 2009 à 5 heures 30 du matin dans une rue calme de Zurich-Oerlikon, lorsque Nasrin, une Bengali de 41 ans, est exécutée de cinq balles à bout portant devant son domicile alors qu’elle se rendait à son travail. Comme ni argent, ni clés, ni papiers d’identité n’ont été dérobés, la police table sur un crime passionnel. Tout porte à croire que Humayun, le mari de Nasrin, est le coupable. Ce dernier clame son i nnocence avec véhémence.

Le fakir du Bangladesh

Il prétend que Nasrin et lui ont vécu un mariage heureux. C’est faux: il s’avère que Nasrin avait une liaison avec un banquier suisse et que Humayun le savait. La sœur de Nasrin a également déclaré que Nasrin voulait la rejoindre aux États-Unis avec ses enfants.

Mais un mensonge ne suffit pas pour accuser un suspect et est loin de constituer une preuve de délit. Malgré un énorme déploiement de forces de police, on ne trouve ni l’arme, ni aucun autre indice du crime. A près sept mois de détention préventive, Humayun doit être libéré faute de preuves.

L a police n’abandonne pas. Elle le suit, met son appartement sur écoute et écoute ses conversations téléphoniques. Dans celles-ci, il se rend suspect, non pas par ce qu’il dit, mais par ce qu’il tait: dans ses conversations avec ses proches et ses connaissances, il dit du mal de sa femme, mais ne se demande jamais qui a bien pu la tuer. En outre, il semble avoir peur de son avenir et de celui de ses enfants. Craint-il d’être d émasqué malgré sa libération? Il parle régulièrement au téléphone avec un homme du Bangladesh, un fakir qui prétend voir l’avenir. Celui-ci enjoint Humayun de porter une chaîne protectrice, de suspendre des talismans et

de les plonger dans l’eau trois fois par jour, ce qui aiderait à éloigner le mauvais œil. Au Bangladesh, les superstitions font partie de la culture. Les enquêteurs y voient le talon d’Achille d’Humayun et élaborent un p lan d’une complexité presque ubuesque. Nous le simplifions donc ici et le résumons au strict nécessaire. Dans l’entourage d’Humayun, un agent sous couverture venu d’Allemagne se fait passer pour un négociant en pierres précieuses et gagne la confiance du Bengali, notamment en lui parlant de son propre mariage raté, qui présente des parallèles avec le sien. Il trouve des p etits boulots à Humayun. Lorsque Humayun commence à lui faire confiance, il fait intervenir une voyante néerl andaise. Il lui raconte qu’elle l’a aidé à surmonter une crise et lui a prédit des choses incroyables. D’abord, Humayun est sceptique puisqu’il a son fakir, mais il se demande de plus en plus si la voyante peut l’aider lui aussi. Au bout de plusieurs semaines, il est prêt à la rencontrer. Bien entendu,la voyante est, elle aussi, une agente sous couverture. Elle «voit» que des choses h orribles pèsent sur Humayun et que s’il ne s’en déb arrasse pas, il vivra des choses terribles. Ses enfants, en particulier, se détourneront de lui et tomberont dans la drogue.

Des pois chiches comme preuves

La voyante «sent» également qu’une troisième personne e st présente sous la forme de l’esprit d’une femme du nom de Poppi (le surnom de Nasrin) qui désire s’excuser de tout ce stress. Elle dit qu’elle l’aime toujours et lui enverra des signes. Lorsque Humayun trouve une empreinte de main ensanglantée sur sa voiture (apposée par un policier) après sa rencontre avec la voyante, tout bascule. Paniqué, il est prêt à faire tout ce que dit la voyante. Pour protéger ses enfants, il avouerait même le crime qu’il n’aurait en réalité pas commis.

Les enquêteurs font preuve d’imagination pour obtenir des preuves concrètes du délit. Lors d’une rencontre ultérieure, la diseuse de bonne aventure remet à Humayun, perplexe, des pois chiches qu’il doit placer à des endroits où se seraient produits des événements décisifs liés au crime: deux spécialement identifiés là où le pistolet a été acheté et où il a été

Il se rend suspect par ce qu’il tait.

caché après le crime. Humayun s’exécute, dépose un p ois chiche devant un magasin de la Langstrasse et le second sur une armoire dans une cave. Mais le plan ne fonctionne pas: la principale preuve, l’arme, d emeure introuvable. Malgré la faiblesse des preuves, l’accusation est portée et Humayun est condamné à 14 ans de prison pour le meurtre de sa femme. Il c ontinue de clamer son innocence. Ses enfants en sont également convaincus. Son défenseur fait avancer l’affaire.

Jugement: la pression psychologique n’était pas autorisée

De fait, la Cour suprême du canton de Zurich déclare le jugement nul et non avenu, se référant à une décision du Tribunal fédéral de 2017 selon laquelle une enquête sous couverture ne peut en aucun cas a nnuler le droit au silence de tout suspect. En intimidant Humayun à outrance et en lui faisant croire à des dangers dévastateurs, on l’a soumis à d’énormes pressions pour qu’il parle. Cela n’est pas autorisé. Cette fois, c’est le Ministère public qui fait avancer l’affaire. En 2022, le Tribunal fédéral rend une décision d’acquittement allant dans le sens de la Cour suprême. À ce jour, le procès a coûté 1,6 million de francs, dont 800 000 francs de dommages et intérêts et de p retium doloris pour Humayun. Un arrière-goût en reste à l’auteure Christine Brand: «Normalement, au c ours d’un procès, on développe un feeling pour les accusés, pour le contexte, pour les motifs et aussi pour la question de la culpabilité. Mais dans cette affaire, j’ai toujours eu un mauvais pressentiment. À la fin, j’étais désemparée.» Elle ne pense pas qu’Humayun a lui-même commis le meurtre, mais elle ne veut pas exclure qu’il l’ait commandité. «De trop nombreuses déclarations de sa part sont sujettes à caution. De plus, il n’a jamais d emandé au fakir ou à la voyante qui avait réellement tué sa femme.»

S ’il y a une chose qui réjouit Christine Brand dans cette affaire, c’est bien celle-ci: «La police aurait pu se contenter de dire: ‹une étrangère a été tuée, nous ne trouvons pas de preuves, c’est comme ça, basta›. Mais elle a voulu résoudre cette affaire avec tous les moyens à sa disposition et n’a pas lâché prise. En ce sens, cette affaire donne tout de même l’espoir que les personnes sont toutes égales devant nos lois.»

Les détails figurant dans ce texte sont issus du bestseller de Christine Brand «Wahre Verbrechen. Die dramatischsten Fälle einer Gerichtsreporterin» (non traduit) et ont été mis à notre disposition par l’auteure. Nous vous recommandons vivement de lire l’original!

«La superstition rassure»

Dans les périodes difficiles, la propension à la superstition augmente: Jérôme Endrass évoque les théories irrationnelles et leur rapport avec les crimes violents.

Jérôme Endrass, pourquoi sommes-nous superstitieux?

Parce que l’évolution a montré que dans un monde dangereux, il était plus intelligent de croire une fois de trop à une situation menaçante que le contraire. L’évolution nous a poussés à développer des théories sur les choses qui nous entourent et à croire en certaines corrélations.

Quand sommes-nous particulièrement enclins à la superstition?

Des études montrent que plus l’être humain se sent m enacé, plus il croit à des théories irrationnelles. S’il est extrêmement stressé sur le plan psychologique, il peut détecter des messages dans des dessins à motifs ou entend des voix dans le simple grésillement d’une radio.

Y a-t-il un lien entre la religiosité et la superstition?

O ui: dans les deux cas, on est prêt à croire quelque chose que l’on ne peut pas prouver

de manière causale. Dans la religion, il s’agit d’un ordre supérieur, alors que dans la superstition, c’est plutôt c oncret, comme le chat noir qui porterait malheur. De fait, les personnes croyantes sont plus enclines à croire en quelque chose de non d émontrable, y compris en dehors de leur religion.

Les gens commettent-ils souvent des délits du fait de leurs superstitions?

Bien au contraire, la super stition classique conduit rarement à un délit, y compris dans notre étude de cas: ici, le suspect a pu être arrêté grâce à sa superstition, mais le meurtre lui-même n’a pas de lien apparent avec cette dernière. Toutefois, il existe des formes de croyances irrationnelles qui nous inquiètent.

Par exemple?

Les théories du complot jouent un rôle important dans le domaine de la recherche sur l’extrémisme. Ils sont un

«Les complotistes préfèrent la contradiction au fait de ne rien croire du tout»: Jérôme Endrass

moteur de radicalisation et le lien central entre une attitude extrémiste, qui n’est pas dangereuse en soi, et la propension à agir de manière v iolente. Il est également intéressant de constater que les personnes qui croient à une théorie du complot sont r apidement prêtes à en croire une autre, même si celle-ci est en contradiction avec la p remière. Les complotistes préfèrent la contradiction au fait de ne rien croire du tout.

Est-ce un phénomène de notre époque?

Non, les théories du complot ont toujours existé, elles sont très solides: la chasse aux sorcières, l’antisémitisme de l’Église au Moyen-Âge, etc. Ici aussi, dans les phases de crise, la propension à croire à ces théories, à se laisser entraîner, à s’agiter, voire à commettre des attentats, a toujours augmenté.

Lorsque la société allait mieux, elles tombaient de nouveau dans l’oubli.

Pourquoi les théories du complot sont-elles d’actualité en 2025?

Actuellement, nous vivons dans un biotope rêvé, grâce aux réseaux sociaux qui rassemblent tous les cons pirationnistes de la planète en un seul clic. Ces derniers o btiennent vite confirmation et estime, entretenant leur vision fermée du monde, qui explique tout de manière triviale. C’est très confortable. Sur le principe, cela fonctionne comme u ne secte.

Que peut faire l’entourage si un proche se retrouvait dans un tel cercle d’influence?

Pas nécessairement parler du contenu de ces théories. On peut se dispenser de cette

«Dans un État de droit,tous les accusés ont le droit de mentir au tribunal.»

discussion. Il faut plutôt soigner la relation avec la personne, l’inviter, entreprendre des choses avec elle. C’est le sentiment d’appartenance que ces personnes trouvent si attrayant dans leurs cercles. Si elles font l’expérience d’une a utre communauté, elles sont plus disposées à se défaire de leurs idées.

Quelles sont les théories irrationnelles les plus répandues dans le système pénitentiaire?

De nombreux criminels construisent des liens qui n’existent pas. Ils en ont besoin pour être en accord avec euxmêmes. Chez les délinquants s exuels, le classique est de prétendre que si une femme dit non, elle veut en réalité dire o ui. Ou, chez les pédophiles: «Ce n’est pas vrai que la sexualité nuit aux enfants, les enfants sont, eux aussi, des êtres sexuels.» On retrouve ici le parallèle avec la superstition: la superstition rassure. Elle donne l’impression d’avoir le contrôle. Et ce besoin est énorme chez nous, les humains, a fortiori en période de stress.

Dans notre étude de cas, le suspect a passé un temps considérable en détention provisoire et a été interrogé

moult fois. Le besoin d’avouer ne devient-il pas incommensurable?

Ne devrait-on pas admettre qu’il n’est effectivement pas le meurtrier?

C’est très variable. Il y a des criminels pour qui il est im portant d’avouer leur crime afin d’avoir la paix. Et d’autres qui n’avouent pas leur crime jusqu’au bout. Ni nous ni la justice n’avons le droit de faire pression, et ce, à juste titre! Dans un État de droit, tous les accusés ont le droit de mentir au tribunal, cela n’est pas puni.

Comment peut-on garder un tel secret pour soi des années durant?

Il existe plusieurs formes d’autosuggestion, des personnes qui peuvent se persuader de quelque chose jusqu’à y croire elles-mêmes, et d’autres qui en souffrent. Il faut noter que c e trait de caractère est sans rapport avec le fait que les criminels récidivent ou non: les personnes qui avouent n’ont pas un meilleur pronostic que les menteurs, notamment parce que les gens mentent pour des raisons très diverses. Certains criminels trouvent leur acte tellement horrible qu’ils ne peuvent pas faire autrement que de le nier, y compris à leurs propres yeux.

Que se passe-t-il si un suspect avoue son crime pendant l’examen psychologique?

À c e stade, il faut interrompre l’entretien et informer le Ministère public. Il réentendra la personne en présence de son avocat. Nous ne sommes pas tenus au secret professionnel. La personne doit donner son accord avant le début de l’entretien pour que celui-ci soit utilisé dans le cadre de la procédure. Il faut toutefois préciser qu’en tant qu’expert, on n’a jamais une fonction d’enquêteur. La vérité sur le déroulement des faits est du seul ressort du tribunal. Nous ne faisons que clarifier l’état mental de la personne au moment des faits.

Nous avons beaucoup parlé des théories irrationnelles. Existe-til aussi des convictions soi-disant rationnelles mais fumeuses c oncernant les crimes violents?

Les jeux de tir! En Suisse, des millions de personnes sont massacrées chaque jour v irtuellement sur ordinateur. Et pourtant, nous ne voyons pas de lien significatif entre la consommation de ces jeux d e tir et la violence. C’est comparable pour la consommation de contenus pornographiques: celle-ci ne semble g uère influencer la disposition à l’agression sexuelle chez la grande majorité des hommes.

JÉRÔME ENDRASS (né en 1970) est professeur de psychologie médico-légale et directeur a djoint de l’Office d’exécution des peines et de réinsertion du canton de Zurich.

Hormis l’Afrique,

l’Amérique du Sud ou l’Inde, la superstition est bien vivante de par chez nous. La preuve en sept exemples

européens.

Espagne: la San Juan

Pendant la nuit de la SaintJean, du 23 au 24 juin, l’Espagne s’enflamme: pour fêter le solstice d’été, les habitants allument de gigantesques feux sur les plages. Les jeunes hommes, surtout, bondissent par-dessus ces brasiers, bravant la pluie d’étincelles pour se purifier et brûler le malheur de l’année écoulée. À minuit, on pique une tête dans la mer, à la lumière des feux d’artifice et des torches. Spectaculaire!

Photo: Manuel Bruque

Italie: le cornicello

L’origine de la «corne portebonheur» napolitaine remonte au Néolithique. À l’époque, on représentait déjà les cornes, symboles de la fertilité, sous la forme de piments aphrodisiaques.

À Naples, cette amulette reste prisée: on suspend des piments séchés ou fabriqués dans des matériaux tels que le plastique, la céramique ou le bronze dans tous les c oins. Mais, attention, le bonheur ne s’achète pas: un co rnicello ne déploie ses effets protecteurs que lorsqu’il est offert en cadeau.

Photo: Lorenzo Dalberto / Alamy

Turquie: le nazar

S’il est connu en Grèce, c’est en Turquie que le nazar boncuğu («perle du regard») est devenu un objet culte. Généralement fabriquée en pâte de verre, cette amulette protège contre les énergies négatives, la jalousie et le mauvais œil. On en accroche aux rétroviseurs, aux p ortes, aux poussettes, aux porte-clés, aux bracelets… Aujourd’hui, cet œil bleu a conquis le monde en se faisant a ccessoire de mode. Il a même un émoji à son effigie depuis 2021.

Islande: le Huldufólk Certes, on ne voit pas les elfes, les trolls, les esprits de la nature, les géants ou les nains, mais, en Islande, ce «peuple caché» trouve son audience. Plus de la moitié des habitants de l’île n’excluent pas son existence. Ils ne veulent pas le fâcher, ils le prennent en considération, surtout en planifiant un projet de construction. Résultat: les routes font parfois des détours saugrenus p our contourner les lieux sacrés des elfes ou les rochers et collines censés servir d’habitat au H uldufólk

Écosse: la bruyère blanche

Heureux celui qui trouve de la bruyère blanche dans les Highlands. Selon la légende, c’est aux larmes de Malvina, héroïne celte, que l’on doit la couleur de ces fleurs: alors qu’elle pleurait son fiancé, Oscar, ses larmes ont transformé la bruyère, habituellement violette, en une marée blanche. De nos jours encore, la bruyère blanche s’invite aux mariages: les mariés en portent un brin dans leur bouquet ou à leur boutonnière pour demander à Malvina de leur accorder bonheur, protection et beauté.

Autriche: les Raunächte

Pour combler la différence entre le calendrier solaire (365 jours) et le calendrier lunaire (354 jours), les Celtes ont ajouté onze jours intercalaires. Cette période trouve encore un écho en Autriche et en Bavière: pendant les Raunächte (du 25 décembre au 6 janvier), on y chasse les mauvais esprits des maisons en les purifiant avec de la fumée d’herbes et d’encens. Les rêves gagnent en importance durant ces nuits. Des créatures amicales –le s Schön perchten – ou terrifiantes – les Schiachperchten ou Krampusse – participent également aux festivités pour y semer le chaos.

Hongrie: le locsolkodás

Bien qu’elle semble d’une autre époque, la coutume pascale de l’aspersion est populaire dans la Hongrie rurale, mais aussi en Pologne et en Slovaquie. Les hommes récitent des poèmes et aspergent les femmes, vêtues de tenues folkloriques, d’eau ou, dans une variante plus moderne, d’eau de Cologne, pour qu’elles rayonnent à jamais. En remerciement pour ce «sortilège de fertilité», les hommes reçoivent des œufs de Pâques peints ou un verre de pálinka .

Pourquoi donc

Au fil des siècles, des croyances populaires se sont installées dans notre quotidien. Mais que se cache-t-il derrière ces bizarreries qui nous sont chères?

TRINQUER

C’est l’heure de l’apéritif? Tchintchin! Mais pourquoi trinquonsnous? Au Moyen-Âge, les empoisonnements étaient fréquents. Pour s’en protéger, on choquait vigoureusement les verres entre eux pour que le liquide en déborde et se mélange à la boisson des autres.

FONDRE DU PLOMB

FUMIGATION

Répandre de la fumée dans les pièces, les maisons et les cours est une pratique séculaire. En Égypte ancienne, chez les Amérindiens, dans les régions rurales de l’Autriche ou en Asie, la sauge blanche, l’encens et le palo santo sont réputés chasser les énergies négatives, purifier et protéger du malheur.

Au temps de la Rome antique, on cherchait à prédire l’avenir à partir des formes que prenait le plomb qu’on avait fondu. Cette coutume persiste encore au moment de la nouvelle année. Mais, pour des raisons de santé, l’étain et la cire ont remplacé le plomb.

PAIN ET SEL

Vous pendez votre crémaillère? On vous offrira peut-être du pain et du sel. Ce duo, considéré comme un cadeau du ciel dès le Moyen-Âge, est censé garantir la prospérité, le bonheur et la santé aux habitants d’un nouveau logis.

TREIZE

Un rendez-vous important un vendredi 13? Vaut mieux pas. La rangée 13 dans un avion? Introuvable dans certains appareils. Le nombre est aussi parfois omis comme numéro d’étage, du moins dans les ascenseurs. Dans plusieurs cultures, il porte en effet malheur. On suppose que cette valeur négative est liée au christianisme. Judas, qui a trahi Jésus, est, dit-on, la 13e personne arrivée à la Cène.

TENIR LES POUCES

Pour souhaiter bonne chance à quelqu’un, on lui tient les pouces. Ce geste remonte probablement au temps des gladiateurs romains. À l’époque, les pouces du public des jeux décidaient de la vie et de la mort des vaincus. Si les spectateurs voulaient gracier un gladiateur, ils levaient le poing avec le pouce replié à l’intérieur, celui-ci représentant le glaive qui ne devait plus être utilisé.

ÉLÉPHANT

Considéré comme sage, doux et particulièrement fort, le pachyderme symbolise la pureté s pirituelle en Thaïlande et est sacré en Inde. Dans diverses cultures asiatiques ou africaines, il est associé à la chance… pour a utant qu’il ait la trompe relevée. Car on raconte que la chance sort de l’animal si sa trompe est d irigée vers le bas.

FER À CHEVAL

Plusieurs théories expliquent pourquoi le fer à cheval est un porte-bonheur populaire. La légende de saint Dunstan, patron catholique des forgerons, est l’une d’elles. Dunstan aurait accepté d’enlever au diable le fer qu’il avait fixé à son pied fourchu contre la promesse qu’il n’entrerait jamais dans une maison à laquelle un fer à cheval était accroché. L’orientation du fer a elle aussi une signification: fixé avec l’ouverture vers le h aut, tel un U, le fer à cheval conserve la chance. Dans l’autre sens, il la répand.

ONGLES

Si l’on en croit une superstition japonaise, se couper les ongles pendant la nuit porte m alheur. L’origine de cette croyance est incertaine. On suppose qu’elle date d’une époque où il était encore rare de s’éclairer à l’électricité et q u’on risquait donc de se blesser en s’occupant de ses ongles de nuit.

COCHON

Bien ancrée dans les régions germanophones, la tradition du cochon porte-bonheur remonte, elle aussi, au Moyen-Âge. À l’époque, pour se moquer des perdants des compétitions, on leur remettait un cochon. Lequel, très fertile, se révélait, en fait, être une véritable aubaine.

LES PAUMES QUI DÉMANGENT

Vous avez les paumes qui fourmillent? Selon une croyance, c ela pourrait être un signe d’abondance financière… si, du moins, c’est votre main gauche qui picote. Si c’est la droite, prenez garde: vous risquez de perdre de l’argent.

«Décrocher le cochon» signifie «avoir de la chance».
Le corbeau a été considéré comme un mauvais présage.

UN CORBEAU SUR LE TOIT

Si un corbeau se perche sur le toit d’une maison, il apporte la maladie à ses habitants. S’il se perche sur le toit d’un malade, celui-ci m ourra. Le corbeau a été associé au malheur et à la souffrance dès le Moyen-Âge.

RAMONEUR

En nettoyant les âtres et les conduits de cheminée, les ramoneurs acco mplissaient autrefois une tâche essentielle pour les maisons et leurs habitants: pour être opérationnelles et sûres, les cheminées devaient être exemptes de saleté, de poussière et de suie. En ce sens, l’homme vêtu de noir apportait la chance dans les foyers.

COCCINELLE

Les coccinelles rouges à sept points sont celles qui portent le plus bonheur, le chiffre 7 étant associé à des bienfaits dans nombre de cultures. Mais celles qui en ont moins sont aussi très appréciées: dévorant les pucerons, elles ont été vues comme une bénédiction divine dès le Moyen Âge. Serait-ce de là que ces petits insectes tirent leur s urnom de bête à bon Dieu?

PASSER SOUS UNE ÉCHELLE

Avec le mur auquel elle est appuyée et le sol, une échelle forme un triangle. Malheur à ceux qui franchissent cette figure! Comme souvent, l’origine de cette croyance se trouve dans la spiritualité et la religion. Le triangle est une forme sacrée dans bien des cultures (la Trinité dans le christianisme, les triangles entrelacés de l’étoile de David dans le judaïsme). Mieux vaut donc éviter de profaner un triangle intact si l’on ne veut pas s’attirer des calamités.

GUI

Le gui est un symbole de chance, de fertilité et d’amour. Il est donc d’usage, lors des Fêtes, d e s’embrasser sous un rameau de gui. Cette tradition romantique tire sans doute son origine de la déesse germanique de l’amour, Frigg, dont la plante sacrée était le gui.

ÉTERNUER

Maintes croyances entourent les éternuements. En Asie, si vous éternuez bruyamment à plusieurs reprises, c’est que quelqu’un pense à vous. En Arménie, éternuer montre qu’on atteindra ses objectifs, et une série de trois éternuements annonce un événement important. En Italie, en revanche, ce sont les éternuements des chats qui portent chance.

OUVRIR

LA FENÊTRE À L’ÂME

Cette coutume est touchante: en ouvrant la fenêtre de la pièce où une personne vient de mourir, on permet à son âme de trouver le chemin qui la mènera en haut, au ciel. Qu’elle soit d’origine religieuse ou non, la croyance selon laquelle l’âme quitte le corps au moment du décès est très répandue.

ATTRAPE-RÊVE

SOUS-VÊTEMENTS ROUGES

Dans le Sud de l’Europe, hommes et femmes portent des sous-vêtements rouges à la Saint-Sylvestre pour s’assurer amour et passion pour l’année à venir. Pour que cela fonctionne, ces dessous doivent toutefois leur avoir été offerts. Cette coutume remonterait à l’empereur romain Auguste, pendant le règne duquel les sousvêtements rouges étaient censés porter bonheur.

CASSAGES DIVERS

COLLIER DE PERLES

Au Moyen-Âge, les perles étaient vues comme les larmes des anges rebelles. La superstition idoine la plus connue remonte cependant à l’époque victorienne: on disait alors que les perles représentaient les larmes que les m ariées verseraient au cours de leur vie conjugale. Les épouses peuvent conjurer cette malédiction en achetant les perles à la personne qui les leur offre pour un petit m ontant.

Les attrape-rêves trouvent leur origine chez les peuples indigènes d’Amérique de Nord. Avec leur filet, leurs plumes et leurs perles, ces objets mystiques souvent confectionnés à la main sont censés laisser passer les beaux rêves et capturer les énergies négatives, les esprits et les cauchemars. Ils sont aujourd’hui appréciés aux quatre coins du monde.

Casser de la porcelaine ou de la terre cuite porte bonheur. Casser un miroir, en revanche, est signe de malheur à venir. On prête d’innombrables origines à ces d eux croyances. On pensait, par exemple, que le bruit retentissant provoqué par la céramique qui vole en éclats chassait les mauvais e sprits. En ce qui concerne les miroirs, en revanche, leur bris entraînerait celui de l’âme de la personne qui s’y reflétait, et qu’il fallait à celle-ci sept ans pour se régénérer.

CHAT NOIR

Croiser un chat noir est un funeste présage. Si tant est que le chat se déplace de la gauche vers la droite, le côté gauche étant considéré comme néfaste dans la Bible. S’il se dirige vers la gauche, en revanche, cette rencontre est censée porter chance. Les choses sont plus simples en GrandeBretagne: dans les M idlands, en particulier, les chats noirs sont considérés comme de bon augure et constituent un cadeau de mariage apprécié.

de la porcelaine fait fuir les esprits.

Guigne? Chance? Casser

Faire pousser le bonheur? Avec des trèfles à quatre feuilles!

TRÈFLE À QUATRE FEUILLES

Cette petite plante verte a séduit les humains. Dans le christianisme, ses trois feuilles symbolisent la Trinité. Mais il arrive que des trèfles, porteurs d’une mutation, arborent quatre feuilles. Du fait de leur rareté, en trouver un est perçu comme un coup de chance. Cela a donné des idées lucratives à certains, qui ont commencé à cultiver des oxalis àquatre feuilles, une espèce de plante q ui ressemble beaucoup au véritable trèfle et fait fureur comme cadeau au Nouvel An.

HIBOU

De tout temps, les hiboux ont été craints des humains en raison de leur cri plaintif, de leur activité nocturne et de l eur taille. Réputés augurer le m alheur, l’échec et la maladie, ils ont été surnommés «oiseaux d e la mort» dès l’Antiquité. Cette superstition, encore vivace au XXe siècle, a entraîné une forte d iminution de la population de hiboux.

LE CHAT QUI SALUE

Stricto sensu, le «chat qui salue» ne salue pas. Cette statuette japonaise populaire baptisée maneki-neko existe en plusieurs couleurs. La fonction qu’elle remplit diffère selon son apparence et la position de la patte. Le mouvement de la patte, que l’on interprète comme un salut, est une invention moderne du marketing: il permet tout simplement d’attirer l’attention des clients. Cette variante animée du manekineko se rencontre donc souvent dans les magasins et les restaurants.

EN CROIX

Dans bon nombre de cultures, croiser des couteaux porte malheur. De même, croiser les verres lorsque l’on trinque ou d’autres bras lorsque l’on se serre la main serait un mauvais présage. L’origine de cette croyance n’est pas claire. La religion a peut-être, comme souvent, joué un rôle, cette fois en y voyant un lien avec la symbolique de la sainte Croix.

CHIFFRE 7

Sept jours dans la semaine, sept océans, sept Merveilles du monde, la création du monde en sept jours, les bottes de sept lieues, Blanche Neige et les sept nains, le septième ciel: astrologie, religions, c ultures et nature, le chiffre 7 revêt une importance particulière. Symb olisant la perfection et l’illumination, il porterait chance.

Éloge du sixième sens

À l’ère des Lumières, sommes-nous réellement plus heureux sans «superstitions»? Notre auteure ne le croit pas. Une ode à la magie des mystères insondables.

Peut-être avez-

vous eu une grand-mère qui voyait des symboles partout, qui avait toujours un dicton météorologique sous la main, qui parlait aux fleurs de son jardin et aux photos de ses chers disparus? Une grandm ère qui invoquait saint Antoine quand elle ne retrouvait plus l’argent caché, qui avait des remèdes pour chaque bobo et qui voyait quand une maison était «triste»? Une grand-mère qui croyait aux anges gardiens et qui avait une confiance inébranlable dans la vie, nourrie par la foi et par la conviction qu’elle n’avait pas son destin en main? Alors, réjouissez-vous! Votre grand-mère vous a ouvert les portes d’un monde enchanté, peuplé de vivants et de morts, de plantes, d ’animaux et d’objets animés, de saints patrons, d’anges gardiens et de figures fantasmagoriques.

C es grands-mères-là s’éteignent peu à peu, emportant avec elles un précieux savoir. Mais aussi des rituels qui visaient à transmettre des connaissances accumulées au fil des millénaires, à d onner un sens aux choses vécues, aux phénomènes et aux coups du sort, mais surtout à atténuer la peur de la mort et à renforcer la cohésion au sein de la communauté. Avec ces grands-mères, c’est un r apport sensible au monde qui disparaît, l’acceptation de l’imprévu, le don de l’émerveillement.

La deuxième porte

Dans son livre «Sensuous Knowledge», Minna Salami qualifie ce mode de perc eption de «savoir sensoriel». Comme à travers un kaléidoscope, cette vision du monde révèle un univers empreint de magie. Pour la journaliste d’origine nigériane et finlandaise, les humains avaient i nitialement deux moyens d’appréhender la réalité: la faculté rationnelle et la faculté émotionnelle. Dans la cosmogonie de la civilisation yoruba en Afrique de l’Ouest, on appelle ces deux portes «ogbon-ori» et «ogbon-inu»: le «savoir de la tête» et le «savoir du ventre».

Or, dans notre monde voué à la technique, seul compte encore le «savoir de la tête», un savoir logique, dissécable et utile à l’humain moderne. Ce qui ne rentre pas dans ce dogme rationnel est nul et non avenu, dévalué ou rejeté. Dans ce champ de connaissances «europatriarcal», comme l’écrit Minna Salami, la vision binaire supplante le kaléidoscope. Le monde est noir ou blanc.

Le savoir sensoriel

Le flou, l’étrange, l’ambigu, le contrad ictoire, ce qui échappe au corset de la norme, tout ce cortège de sensations, d’impressions, de perceptions ou de pressentiments qui échappent à l’explic ation et à la causalité, se voient, dans le meilleur des cas, relégués au monde de l’art. Et pourtant, l’humain est avant tout un être de sens et de chair, comme l’écrit le professeur de géographie culturelle Werner Bätzing dans son livre «Homo Destructor». Il y relate comment l’homme européen a détruit la nature, un phénomène étroitement lié au mépris dont le «savoir du ventre» a fait l’objet, relégué au rang de superstition. La notion de superstition

désigne une croyance irrationnelle en des forces surnaturelles, fondée sur des représentations erronées. L’apparition de ce mot au début de l’ère moderne ne doit rien au hasard. L’homme européen entendait ainsi s’affranchir de l’obscurantisme d u Moyen Âge. Et dans un même élan, il manifestait son mépris pour les peuplades «primitives» et non chrétiennes, ces populations colonisées qui vénéraient des a rbres millénaires, pouvaient s’identifier à des animaux ou considéraient les fleuves, les montagnes et les paysages comme des entités inspirant le respect. Or, le respect freinait la conquête. En adoptant un rapport froid, rationnel et technique à l’autre (que ce soit à l’humain ou à la nature), on crée une mise à distance émotionnelle qui facilite l’exploitation et la destruction. De très nombreux essais ont été publiés à ce sujet ces dernières années

Pensée magique

Et pourtant, sous nos latitudes aussi, la vision sensible du monde a été l’égale de la vision logique pendant des millénaires. Dans son «Histoire de la culture moderne», où il tenta de réhabiliter le Moyen Âge, le philosophe Egon Friedell qualifiait cette perception de «pensée magique». Il y dépeignait un Moyen Âge non pas o bscurantiste, mais lumineux et plein de mystères. Chez l’homme médiéval, é crivait-il, «tout est prétexte à symboles. L’immensément grand et l’infiniment petit, nos pensées et nos actes, l’amour et la haine, ce que nous mangeons et buvons, la naissance et la mort. À chaque objet créé, à chaque maison bâtie, à chaque chant entonné, à chaque cérémonie célébrée, l’homme médiéval savait insuffler cette symbolique profonde qui inspire la félicité en même temps qu’elle protège et libère.»

Ainsi, les hommes prémodernes communiquaient avec les défunts, qu’ils ne considéraient pas comme absents, mais comme invisibles. Selon eux, les morts avaient le pouvoir d’entendre, de percevoir et de châtier les vivants si ces derniers ne leur témoignaient pas le

«Ce qui ne rentre pas dans ce dogme rationnel est nul et non avenu.»

respect qui leur était dû. De même, l’expérience de la mort a certainement poussé les humains à développer des pratiques mentales, spirituelles et sociales pour y faire face. Ils étaient traversés par la conviction qu’«il arrive toujours autre chose que ce que l’on croit», comme l’écrit le philosophe Peter Sloterdijk.

Des animaux cités à comparaître Les hommes prémodernes étaient étroitement reliés à la nature à travers leurs sens. Ils considéraient les animaux comme «des frères qui leur semblaient parfaitement égaux», écrivait Egon Friedell. Au Moyen Âge, ils étaient souvent vus

comme des personnes juridiques à part entière, pouvant être appelés à la arre des tribunaux comme témoins ou criminels. Au XVe siècle, à Bâle, un procès ut intenté contre un coq accusé d’avoir pondu, contre nature. Le verdict ne fut pas clément, puisqu’il finit décapité. Les nimaux étaient également vénérés comme des héros, par exemple lorsqu’un chien sauvait un enfant des flammes. Aujourd’hui, cette façon de considérer les animaux prête à rire. D’un autre côté, l’homme prémoderne aurait été outré de savoir que, jusqu’en 2003, notre Constitution féderale c onsidérait les animaux comme de simples «choses».

Dans certains pays, on reconnaît à nouveau une valeur intrinsèque à la nature non humaine, au vu de son état actuel.

L’Équateur, par exemple, a inscrit la reconnaissance de droits propres à la nature dans sa constitution. La rivière Whanganui de Nouvelle-Zélande, en 2017, et la lagune salée Mar Menor dans la province espagnole de Murcie, en 2022, ont été é levées au rang d’entités juridiques dotées d’intérêts propres.

La mort, une tare de la nature

Pour de nombreux scientifiques, la démystification de la nature qui a marqué l’entrée dans l’ère moderne et son ass ervissement dans le but de satisfaire nos besoins sont liés à l’immense peur de la mort provoquée par la peste au XIVe s iècle. Ce traumatisme européen a fait naître une soif de sécurité sans précédent. On commença à voir dans la mort une tare de la nature qu’il convenait de corriger, en nous rendant «comme maîtres et possesseurs de la nature», ainsi que

le préconisait l’influent philosophe René Descartes au XVII e siècle.

D escartes pensait que l’homme ne pouvait pas faire confiance à ses sens et qu’il ne pouvait se fier qu’à sa seule r aison. Le choix de l’une au détriment des autres. Depuis, nous sacrifions à une vision: créer, grâce à la rationalité technologique, une autre nature qui serait meilleure et nous préserverait de la maladie et de la mort. Si on savait, j usqu’au Moyen Âge, qu’«il arrive toujours autre chose que ce que l’on croit», le but du nouveau dogme est que les choses a rrivent «comme les hommes l’avaient pensé», selon la conclusion laconique de Sloterdijk.

Le «savoir du ventre», c’est-à-dire l’intuition, a surtout été dénigré à l’époque d es Lumières, où la pensée rationnelle devait l’emporter sur tout. Mais depuis quelques années, de plus en plus de penseurs de la culture européenne ou des communautés autochtones rappellent l’importance de ce savoir des sens, participatif et empathique. Ou, pour le dire avec les mots du philosophe Blaise Pascal qui, au XVIIe siècle, répondait à René Descartes: «Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point.»

DENISE BATTAGLIA (1971) a étudié la philosophie et la pédagogie à Bâle. Elle est professeure d’éthique à la HES du nord-ouest de la Suisse à Olten et journaliste indépendante. Elle vit à Zurich.

Des rituels

L’emploi du temps apparemment obsessionnel de Lara Stalder, capitaine

PAR Christof Gertsch PHOTOS Christian Grund

pourcalmer ses nerfs

de l’équipe nationale, tente de garder une longueur d’avance sur le hasard.

Lara Stalder enfile d’abord son patin gauche. Toujours. S’il lui arrive d’enfiler d’abord le droit par mégarde, elle s’en rend compte et recommence du début. Idem pour les chaussettes, les protège-tibias, les coudières: le côté gauche précède le droit. L’ordre est fixé, tout écart la déstabilise.

Bizarre? Peut-être. Mais pour Lara Stalder, née à Lucerne en 1994, l’une des meilleures joueuses de hockey sur glace de Suisse, ces rituels ne sont pas de la superstition. Ils sont une tentative de s’armer de certitudes contre la grande incertitude d’un jour de match. Les rituels lui donnent un instant d’ordre dans une journée chaotique.

Elle prouve depuis des années que cela fonctionne. Cette attaquante a déjà participé trois fois a ux Jeux olympiques avec l’équipe nationale et remporté la médaille de bronze à Sotchi en 2014. Aux États-Unis, elle est devenue une joueuse universitaire hors pair, et en Suède une figure marquante de la plus haute ligue, l’une des meilleures ligues féminines au monde. Elle est de retour en Suisse depuis deux ans, et pas seulement pour participer: une nouvelle ère du hockey s ur glace féminin suisse a commencé à l’EV Zug. Celui-ci poursuit un objectif double: gagner en professionnalisme et en visibilité.

Lara Stalder n’y est pas seulement cheffe d’équipe sur la glace, mais fait également partie de l’équipe de direction stratégique: elle participe à l’organisation, s’occupe des structures et des projets les plus divers. Lors de sa première saison, elle a permis à son équipe d’accéder directement à la plus haute ligue, la PostFinance Women’s League. Lors de sa seconde saison, elle a atteint la finale des play-off, mais été battue par le CP Berne. Ses objectifs pour la saison 2025/26 sont clairs: un titre de championne avec l’EVZ. Et sa deuxième médaille olympique pour sa quatrième participation. C’est un projet ambitieux, car l’élite du hockey sur glace féminin international s’est élargie. Mais Lara Stalder n’est pas rentrée en Suisse pour prendre son temps. Elle veut aller de l’avant.

Les rituels qui l’ont accompagnée jusqu’ici lui serviront encore un bon moment. Mais pourquoi y a-t-il autant de rituels dans le sport?

Qu’apportent-ils? Et en quoi diffèrent-ils des routines?

Les routines se créent par la répétition. Ce sont des actes que nous effectuons régulièrement et de manière automatique, sans y prêter une grande attention. Souvent, on ne les remarque que lorsqu’on les oublie: se laver les dents, fermer la porte à clé, mettre sa ceinture de sécurité. Ils sont ancrés dans le quotidien. Au début, beaucoup ne l’étaient pas. C’est comme lorsqu’on apprend à conduire: ce qui demande au début concentration et volonté devient un jour une évidence. En anglais, on parle de habit bu ilding : transformer quelque chose en habitude jusqu’à ce que cela se fasse tout seul. Dans le sport aussi, on rencontre de nombreux autom atismes de ce genre. C’est le cas d’un programme d’échauffement, qui est aussi bien établi q ue la séquence de mouvements lors du tir.

Des automatismes profondément ancrés

Les rituels sont, quant à eux, des actes répétitifs que nous chargeons délibérément de sens. Ils peuvent être spirituels (prière d’avant-match, signe de croix, remerciement muet), mais aussi très personnels: un enchaînement particulier pour enfiler son équipement comme pour Lara Stalder, un proverbe, un morceau de musique, un porte-bonheur. Leur force ne réside pas dans l’automatisme, mais dans la symbolique. Les rituels aident à se poser et à se centrer. Ils structurent les transitions: du quotidien à la compétition, de la préparation à la performance.

Dans le sport, ces deux sphères, routine et rituel, se recoupent souvent. Une routine peut devenir un rituel. Ce qui devait être un rituel peut se réduire à une routine. La différence réside dans l’importance accordée à l’acte et dans l’attention avec laquelle il est accompli.

Rafael Nadal donne un bon exemple de ce chevauchement. Ses mouvements méticuleux avant chaque service (ajuster la ceinture de son short, ranger ses bouteilles d’eau, éviter les lignes de côté) relevaient de la routine: des automatismes profondément assimilés qui permettent de se concentrer. Ils relevaient également du rituel: ils avaient une signification pour lui, étaient un ancrage, voire chargés de superstition. Ils ont également montré l’effet stabilisateur de cette synergie entre habitude et signification.

Capitaine de l’équipe nationale suisseet de l’EV

Zug: les jours de match, Lara Stalder fait une micro-sieste de très exactement 21 minutes, mange une assiette de pâtes à la sauce tomate et enfile touson patin gauche avant le droit.

Lara Stalder

est née à Lucerne en 1994, a fait des études de Marketing Analytics aux États-Unis et un master de Strategy and Management in International Organizations en Suède. Elle a joué au hockey universitaire dans le Minnesota, puis pendant plusieurs années dans la plus haute ligue suédoise. Depuis 2023, elle est de retour en Suisse comme figure de proue de l’EVZ. Elle y est employée à 40% comme joueuse de hockey sur glace et à 60% au siège, où elle s’occupe du programme «Women & Girls» et des questions de durabilité. Lara Stalder est considérée comme une pionnière de la création d’une ligue féminine professionnelle en Suisse et est capitaine de l’équipe nationale s uisse.

Les

rituels l’aident pour

lapréparation, mais pendant le match, elle veut voler .

Les rituels sportifs peuvent être répartis en quatre catégories principales:

P remièrement: les rituels fonctionnels. Ils servent à se préparer mentalement et p hysiquement à la compétition, comme chez un skieur qui, avant le départ, donne d eux coups de bâton et se balance en rythme pour se concentrer et relâcher la tension.

Deuxièmement: la superstition. Ce sont des rituels qui n’ont pas de but fonctionnel direct, mais qui reposent sur la croyance qu’une action particulière peut porter chance ou conjurer le mauvais sort, comme chez Serena Williams, qui portait toujours les mêmes chaussettes pendant un tournoi (soi-disant sans les laver), convaincue que si elle ne le faisait pas, elle perdrait.

Troisièmement: les rituels sociaux. Ils renforcent la cohésion au sein d’une équipe et créent une sécurité collective, à l’image d ’une équipe de handball qui se rassemble en cercle avant un match. On peut également y classer des coutumes bien ancrées: le fait d’essuyer la sciure collée à la chemise du vaincu dans la lutte suisse ou de lancer symboliquement du riz avant un combat de sumo.

Quatrièmement: les rituels liés aux croyances ou à l’origine. Ils associent une performance à une pratique spirituelle ou à une identité c ulturelle, à l’image des footballeurs qui se signent en entrant sur le terrain, des lutteuses qui portent une amulette ou des «All Blacks» néo-zélandais qui dansent le haka, la danse rituelle des Maoris, avant le coup d’envoi.

Certains rituels sont inclassables; ils mélangent fonction, superstition et habitude. Le nageur américain Michael Phelps se mettait dans l’ambiance avant chaque compétition en écoutant Eminem avant de balancer ses bras de manière caractéristique sur le bloc de départ. Parfois, les rituels deviennent des tics, des rituels pervertis, comme chez la joueuse de volley qui ne peut pas jouer sans avoir une c ertaine peluche dans son sac.

Qu’en est-il de Lara Stalder?

Sa journée de match commence la nuit précédente. «Il me faut neuf heures de sommeil», d it-elle, «moins, ça me fait perdre le rythme». À midi, avant le match, elle mange des pâtes à

la sauce tomate. L’après-midi, elle fait une m icro-sieste de très exactement 21 20, pas 22. 21 est un de ses nombres préférés, parce que c’était son numéro aux USA. D’autres nombres importants pour elle: 7, 15, 25, 33 et 51. Chacun correspond à quelque c hose. Le 7 était son numéro de maillot dans l’équipe nationale des moins de 18 elle portait le son père, décédé prématurément. Le numéro de son frère et celui de Petteri Nummelin, un défenseur finlandais qui a joué pour Lugano pendant leur enfance et derrière la légendaire ligne d’attaque de Saku Koivu, Jere Lehtinen et Ville Peltonen. Le son père.

à s’échauffer. Lara Stalder masse d’abord ses plantes de pied à l’aide d’une balle Lacrosse. Ensuite, elle fait des exercices oculaires, jongle avec des balles de tennis, utilise un pistolet de massage pour les muscles, fait du stretching dynamique, des sprints et, pour finir, enfile son équipement. Dans cet ordre précis, bien entendu.

s’arrêtent. «Je veux être libre quand le match commence», raconte-t-elle. Les rituels l’aident pour la préparation, mais pendant le match, elle veut voler en oubliant tout autour d’elle. Vraiment tout. Sur la glace, le meilleur état est celui où elle se sent en transe. Quand elle marque et qu’elle a du mal à dire après coup comment elle a fait.

effet, sur la glace, on ne contrôle presque rien. Les coéquipières, les adversaires, les arbitres, le déroulement du match: il y a trop d’impondé rables à la fois. Lara Stalder le sait.

rer avec les rituels. Elle l’a vécu. À l’époque, elle était presque prisonnière de ses propres routines, raconte-t-elle. Si elle oubliait un exercice pendant l’échauffement, elle devenait nerveuse. Si, lors d’un match à l’extérieur aux États-Unis, il n’y avait que des bagels à la place des pâtes à la sauce tomate, elle se prenait la tête. Elle a dû apprendre que ce ne sont pas les détails qui comptent, mais le feeling qu’ils procurent.

intransigeante.

l’équipe adverse est déjà sur la glace.

Legauche, puis le droit

Dans un château hanté

Notre auteur passe une nuit au château de NeuBechburg, tout seul, dans un froid humide. Et il pense à Kuoni, le chevalier brigand emmuré.

Max Küng (texte et photos)

Juché sur les hauteurs d’Oensingen, le château de Neu-Bechburg semble habité par autre chose que des oiseaux empaillés.

Une nuée d’oiseaux noirs chassent autour de la tour de pierre. La nuit tombe. À 20 heures précises, Jakob, le valet du château, me serre la main pour me dire au revoir et referme les lourdes portes derrière lui. D’abord une, et puis l’autre. Il regagne sa voiture et emprunte la route sinueuse qui descend vers Oensingen. Jakob s’occupe de tout ce qui touche au château de Neu-Bechburg depuis un quart de siècle. Il en est le gardien, mais s’en considère comme le valet et se consacre entièrement à la vieille bâtisse.

Les feux arrière de la voiture de Jakob disparaissent dans la forêt. Me voilà seul au château. Ou peut-être pas. D’aucuns affirment en effet que le château est hanté. C’est pour cela que je suis là. Pour Kuoni. Si l’on en croit la légende, au XIVe siècle, un chevalier ainsi n ommé a été emmuré vivant dans une tour. Les uns rapportent que c’était un vil brigand. Les autres, un pestiféré. Mais tous affirment que, depuis lors, le fantôme de Kuoni hante les lieux. Il veut qu’on le voie et qu’on l’entende. Dit-on. Une bonne raison de passer une nuit au château

Notre auteur passe par des hauts et des bas: l’ascension de la tour de défense est raide, les oubliettes s’ouvrent sur les ténèbres.

Est-ce cette horloge qui sonne à des heures impossibles, et toujours au moment où l’on parvient enfin à trouver le sommeil?

de Neu-Bechburg, seul, avec l’espoir (ou la crainte) timide que Kuoni daignera se montrer.

Sur le conseil de Jakob, j’installe mon campement dans la cuisine et déroule mon sac de c ouchage sur l’imposante table en bois, près de l’âtre. Impossible de trouver plus confortable en ces murs. Deux lits anciens sont certes exposés dans une chambre au loin, mais ils sont si courts qu’on les croirait conçus pour des demi-personnes. Autrefois, m’a expliqué Jakob, on ne d ormait pas allongé: cette position était réservée aux défunts gisant dans leur cercueil. On d ormait assis de peur de ne pas se réveiller le lendemain matin. Même d’un point de vue chiropratique, le Moyen-Âge était une période sombre. Cela dit, outre un espace suffisant pour dormir, la cuisine offre un avantage sur le plan psychologique: on y trouve des couteaux, de l’ail et d’autres objets avec lesquels on peut tenir esprits et fantômes à distance.

Face à face avec les oubliettes

Bien sûr, je sais que les fantômes et les esprits n’existent pas. Le centre de la raison de mon cerveau en est absolument certain. Puisque la science ne leur a trouvé aucun fondement, ils n’existent pas. Point final. Mais, dans mon cerveau, le centre de la peur s’anime lui aussi, et il se veut volontiers bravache. Et puis mes s ouvenirs de tous les films d’épouvante ou d’horreur que j’ai vus (quelle idée!), de «Dracula» au «Blair Witch Project», sont venus me tenir compagnie dans ma mansarde garnie de toiles d’araignée.

21 heures 50: le moment est venu de faire une ronde de nuit. Le château est immense, i mposant, et les murs pleins de recoins. Je descends des escaliers, j’en gravis aussi, raides à donner le vertige, jusqu’en haut de la tour de défense. Il est facile de se perdre dans ce dédale. L’aile dans laquelle Kuoni aurait été emmuré abrite aussi les oubliettes: une salle creusée dans le sol rocheux du donjon, accessible uniquement par un trou percé dans son plafond et fermé par une grille en fer. C’est là qu’on jetait naguère les gens que l’on entendait punir, pour quelque raison que ce soit. Un c achot plutôt repoussant. À une époque plus tardive (et plus humaine), on utilisait cet espace comme chambre froide pour la viande et les autres denrées fraîches. Aujourd’hui, ce n’est plus qu’un trou sombre sur le sol bas duquel

Ici,

il fait sombre même de jour; de nuit, l’atmosphère est pesante.

«Je sais d’expérience que le silence n’existe pas.»

brille quelques pièces de monnaie jetées par des visiteurs probablement superstitieux. Après ce tour d’inspection, au cours duquel j’ai également examiné, accrochés aux murs, des bois de cerfs, une tête de sanglier arborant un sourire mauvais et des yeux morts et un miroir au cadre doré, je me retire dans la cuisine pour lire en attendant l’heure des fantômes. Si Kuoni finit par venir, ce sera sans doute entre minuit et 1 heure du matin. Malheureusement, le livre que j’ai emporté, «Nattskolen» («L’école de la nuit», non traduit en français) de Karl Ove Knausgård se révèle trop lugubre pour être lu dans un château hanté. L’histoire agit comme un catalyseur de pensées anxiogènes. Je décide de me coucher. Je suis dans le noir, à l’affût des bruits.

Je sais d’expérience que le silence n’existe pas. J’ai grandi dans une vieille maison en bordure d’un village. La nuit y était parcourue de mille bruits: les animaux qui se baladaient d ans le grenier, les poutres qui craquaient, les canalisations qui gémissaient, le vent qui secouait les volets. Des bruits qu’on pouvait aisément mésinterpréter. Au château de NeuBechburg, j’entends surtout résonner le murmure de la fontaine installée dans le vaste hall. Il ressemble à un chuchotement lointain dont je

Une gentille plaisanterie
d’une classe qui a visité le château: le fantôme dans les combles.

ne sais s’il devrait me réconforter ou m’effrayer. Soudain, une sonnerie retentit. Pourquoi?

Jakob aurait-il oublié quelque chose d’important? L’heure est certes avancée, mais il y a prob a blement une explication plausible à tous les sons. Je m’extirpe de mon sac de couchage, ouvre la porte de la cuisine, tends l’oreille. Je n’entends rien, si ce n’est le doux murmure de la fontaine. J’ouvre la fenêtre qui surplombe l’entrée, regarde en bas. Personne. Même les oiseaux noirs semblent dormir, blottis dans leur nid. Je ne perçois que le lointain ronflement des voitures et des camions sur l’A1, je vois les lumières d’Oensingen, une localité à l’habitat épars dotée d’une vaste zone industrielle qui ne remportera jamais le Prix Wakker, même de nuit.

Les secrets des armoires

Peut-être ai-je simplement rêvé cette sonnerie?

Le cerveau est une fabrique de chimères qui aime nous jouer des tours. On voit ce qu’on voit, on entend ce qu’on entend, mais on voit et on entend aussi ce qu’on imagine voir et entendre.

C’est à ce moment que des paroles de Jakob me reviennent en tête: il y a, dans les combles, des armoires qu’on n’a jamais ouvertes car on n’a pas trouvé de clés adéquates. Jakob n’a pas voulu les forcer: mieux vaut laisser certains s ecrets dans l’ombre. C’est ce qu’il m’a dit.

Je me lance donc une nouvelle exploration du château plongé dans l’obscurité. J’ai beau être

courageux, je ressens une crainte sourde. Cette peur familière qui remonte à l’enfance. Un dernier regard aux oubliettes, puis je passe d evant les armoires sans clés et leurs secrets. Aucune trace de Kuoni. Je dévale les escaliers pour revenir à la cuisine. Je me suis à peine glissé dans la chaleur mon sac de couchage que la sonnerie tinte à nouveau. Le même son q u’avant. Il doit s’agir d’une horloge qui, dans une salle quelconque, sonne l’heure, mais au mauvais moment. Il y a une explication à tout! Et, alors que l’heure des fantômes touche à sa fin, vaincu par la fatigue, je sombre dans le sommeil. À l’aube, je suis réveillé par le froid, qui s’est insinué dans mon sac de couchage trop léger. Les choucas, dont une colonie niche au château depuis plus de 100 ans, ont repris leur vol en essaim noir autour de la tour en poussant force cris. Ai-je rêvé durant mon sommeil? La nuit a sans doute été trop courte et trop tourmentée pour cela. Dormir sur une table de cuisine (sans en tomber) demande un peu d’habitude. En tout cas, je me sens quelque peu lessivé. Je suis content d’entendre frapper à la porte. Et de trouver derrière Jakob, et non un fantôme. Avant de m’en aller, je demande au valet s’il a jamais vu le fantôme de Kuoni. Il réfléchit, prend une i nspiration, s’apprête à parler. Mais il se ravise et hausse les épaules, avec un sourire entendu.

Entretien

«La chair de poule est une réaction naturelle»

Eberhard Bauer, les esprits existent-ils?

Disons que les esprits «existent» dans la mesure où des gens rapportent des expériences qu’ils décrivent comme «esprits», peut-être faute d’avoir trouvé un meilleur terme. Quant à savoir s’il existe des esprits transcendants, au sens de défunts, il s’agit d’une question de croyance qui échappe à la science empirique.

À quel point faut-il se fier à notre chair de poule si une peur inexplicable nous saisissait alors que l’on est seul dans un château sinistre?

La chair de poule est une réaction physiologique naturelle du corps au froid, à la peur, au dégoût ou à l’excitation. Il ne faut pas la prendre comme le signe d’une présence surnaturelle. Le paranormal surgit souvent quand on ne s’y attend pas.

Votre institut a-t-il déjà pu contribuer à une enquête criminelle?

Le psychologue et médecin Hans Bender, qui a fondé notre institut en 1950, a régulièrement été consulté pour des évaluations et a tenu des conférences au sujet des escroqueries liées à l’occultisme devant la police. Notre institut est aussi spécialisé dans la catégorisation, par l’analyse cognitive normale, des ressentis des personnes particulièrement sensibles.

EBERHARD BAUER est membre du comité de l’institut des domaines frontières de la psychologie et de la santé mentale (IGPP) de Fribourg-en-Brisgau.

Une lecture peu idéale pour un séjour dans un château hanté: «Nattskolen».

Cela ressemble à un chuchotement lointain dont je ne sais s’il devrait me réconforter ou m’effrayer.»

Hasard, vous avez dit hasard?

Comment naissent les superstitions modernes? Et quel rôle jouent les algorithmes? Notre psychologue fait le point.

Vendredi 13, et les cours de la Bourse dégringolent. Un nouveau m aillot pour l’équipe de foot et, soudain, elle enchaîne les défaites. Une célébrité meurt, et les journaux parlent de «mauvais présage». Un hasard? Non, si l’on en croit notre cerveau.

Notre cerveau est une machine à raconter des histoires, dont la fonction est de trouver des schémas et des explications aux choses. Une fonction jadis essentielle à la survie: dans la savane, celui qui e ntendait un bruit venant des buissons et s’enfuyait avait plus de chances de s’en sortir que celui qui ignorait certains signes. Mieux vaut établir trop de liens de cause à effet que pas assez – un principe qui s’est solidement ancré dans nos structures cognitives.

Seul hic: cette hypersensibilité nous invite parfois à détecter des schémas où cela n’a pas lieu d’être. Nous percevons des visages dans les nuages, identifions une mécanique dans le tirage du loto et associons certains rituels à la réussite professionnelle.

Pourquoi ne pouvons-nous pas simplement «désactiver» cette fonction? Parce q ue notre cerveau est fait de deux systèmes: l’un, rapide, qui est responsable d es émotions et des réflexes et l’autre, lent, qui nous sert à réfléchir et à planifier.

L’identification de schémas s’opère dans le système rapide, où ils se parent instantanément d’une charge émotionnelle qui leur confère une vraie force de persuasion.

Par-delà les continents et les époques

Le cerveau humain fonctionne de la même manière dans le monde entier, d’où l’existence de superstitions dans toutes les c ultures et à toutes les périodes. Les Romains interprétaient le vol des oiseaux pour orienter leur action politique, l’Europe médiévale craignait les sorcières et les démons. Les croyances populaires font également florès dans les montagnes suisses, sous forme de dictons paysans ou de prophéties météorologiques, telles c elles des «prophètes du temps» de la vallée de la Muota dont les prédictions, bien que régulièrement erronées, reposent, à chaque fois, sur les mêmes mythes. L’ancrage perpétuel et universel des superstitions montre que le besoin de contrôle et de prévisibilité coule dans n os veines, à tel point qu’une preuve irréfutable du contraire ne suffit pas toujours à refouler ce sentiment.

Les superstitions 2.0

Ce qui constituait autrefois un avantage en matière d’évolution revêt aujourd’hui une autre dimension. Le fer à cheval et les chats noirs ont été transposés à l’ère numérique: les algorithmes des réseaux sociaux renforcent notre propension à établir certaines corrélations, en nous présentant des contenus souvent apparentés. Il suffit de taper «phases de la lune

«Nous percevons des visages dans les nuages et identifions une mécanique

dans le tirage du loto.»

et marchés boursiers» pour être inondé d’articles, de vidéos et de témoignages qui corroborent ce lien.

O r, les superstitions se retrouvent aussi dans le monde du travail: pour ses négociations, un manager revêtira le veston qui lui a porté chance, une architecte utilisera le crayon porte-bonheur qui lui a réussi par le passé et, selon la phase de la lune, une obstétricienne pronostiquera un accouchement plus ou moins facile.

Prophéties autoréalisatrices

Nous sommes tentés de privilégier les informations qui confirment des expériences passées ou des idées préconçues («confirmation bias»), une tendance que les bulles de filtres qui éclosent dans les chambres d’écho viennent encore renforcer. Résultat: les gens vont donner du c rédit à des explications simples même lorsque la réalité, plus complexe, les contredit. Certains vous diront ainsi que le rôle joué par les facteurs géopolitiques, les stratégies commerciales et la psychologie de marché dans l’économie mondiale n’est que secondaire par rapport à l’impact de... l’astrologie en la matière. Le risque est que nous nous laissions entraîner dans une spirale de simplification dont les explications et les schémas nous s emblent plausibles malgré l’évidence des preuves empiriques. C omme il est pénible de se confronter à des informations complexes et contradictoires, on choisira la facilité et on se résoudra à l’idée que le nouveau patron a porté la poisse à l’entreprise. Les théories complotistes fonctionnent selon le même principe: elles résument la complexité du monde avec un narratif basé sur des coupables évidents et des causes limpides L’émergence de fake news aux messages clairs, chargés d’émotion, n’était qu’une question de temps: des slogans comme «la crème solaire est plus dommageable que le soleil!» ou «le dentifrice, c’est nocif, et l’industrie pharmaceutique s’en met

plein les poches!» seront forcément plus accrocheurs que «la réalité est bien p lus complexe; il existe divers facteurs et effets secondaires, chacun réagit d ifféremment».

Le monde de la finance, qui n’en est pas moins complexe, a lui aussi ses schémas. Même si l’adage boursier «Sell in May and go away» n’est statistiquement plus v iable, il continue à influencer des investisseurs, dont les décisions finissent par se m uer en «prophéties autoréalisatrices».

L’effet placebo

On aurait tort de penser que la superstition se contente d’induire en erreur: elle remplit une fonction psychologique et nous donne un sentiment de contrôle dans les moments d’incertitude. Un footballeur se sentira plus sûr de lui en réalisant un geste routinier avant le match. Avant une décision importante, un dirigeant se sentira a paisé de toucher un objet porte-bonheur.

Il s’agit là d’un effet placebo. Même si un rituel n’a, objectivement, aucune influence sur les événements, il peut renforcer subjectivement la confiance en soi, ce qui peut avoir des effets bénéfiques. En des temps troublés, les superstitions ont donc le vent en poupe: les gens se raccrochent à tout ce qui les rassure.

Morale de l’histoire

La superstition est un symptôme de notre quête instinctive de sens et de contrôle. Notre psychisme ne croit pas au hasard et aux coïncidences, il les enrobera toujours d’un récit. Avoir conscience de ce biais cognitif est la première étape pour le surmonter. Et le fait que vous ayez lu cet article jusqu’au bout est assurément de bon augure pour la suite!

Commentaire

Droit et croyances, c’est compliqué Vendredi 13: le jour où il faut minimiser les risques et renoncer, par exemple, à prendre une décision concernant le personnel. Pure superstition? Évidemment. Pourtant, chez Coop Protection Juridique, nous avons constaté que ces schémas de pensée font partie de notre quotidien (juridique).

Être crédule, faire fausse route sur des actions prétendument prédéterminées ou se sentir, à tort, en sécurité – autant d’aspects qui peuvent avoir des conséquences insoupçonnées et coûter cher: un supérieur hiérarchique qui renonce à adresser un avertissement écrit au collaborateur en cause «parce que l’incident est clos et qu’un avertissement ne ferait qu’envenimer la situation» ou une patronne qui cède, sans rédiger de contrat de vente, la voiture de fonction au collaborateur qui quitte l’entreprise «parce qu’il a promis verbalement de prendre en charge les éventuels défauts».

Bien que compréhensible en partie sur le plan humain, de telles approches décident souvent de l’issue d’un litige, avant qu’il n’émerge. À la question de savoir si l’on peut intenter une action en justice, notre réponse est généralement: «Oui et non.» «Oui» parce que, en théorie, on peut faire valoir ses droits. «Non» parce que, en pratique, ceux-ci ne sont pas applicables.

Au travail, il est important d’agir de manière réfléchie et en assurant ses arrières. Prendre des décisions uniquement sur la base de son expérience ou de son intuition, c’est risquer de se prendre les pieds dans le tapis juridique. Car ce n’est pas parce qu’on est dans son droit qu’on obtient forcément gain de cause.

Verdict: obtenir gain de cause n’est ni le fait de croyances ou de chance, mais une question de préparation. Prendre les bonnes dispositions en amont, notamment en consultant préalablement la protection juridique, ne protège certes pas des litiges, mais de leurs conséquences.

CHRISTIAN FICHTER (né en 1971) est psychologue économique et directeur de recherche à la Haute école spécialisée Kalaidos, à Zurich.

SIMON CANAY est juriste chez Coop Protection Juridique.

Bracelet d’énergie positive

«J’ai toujours eu tendance à trop m’en faire, surtout lors d’examens. Ma maman m’a donc offert ce bracelet au gymnase pour que je sache qu’elle pense à moi et qu’elle me donne de la force. Depuis, je l’ai avec moi à chaque échéance importante et, à travers lui, ma maman aussi. Et lorsqu’il me gêne pour écrire, et que je ne le porte pas, il est sur ma table de nuit et veille sur moi quand je dors.»

Tamara Milojevic, chargée de front office, gestion des clients et des produits

pouvoirs

Ils donnent de la force, du courage, du réconfort: coup de projecteur sur les porte-bonheur de cinq collègues de CPJ.

Pour la vie

«Il y a des moments où l’on se retrouve, par exemple, dans une salle d’attente en se demandant ce que sera la vie après les résultats de l’IRM. Dans de telles situations, je me raccroche à mon alliance et je la fais tourner. Cela me ramène sur Terre, me rassure. Bien que je ne l’enlève que pour essuyer les grands verres à bordeaux, un jour, la bague a disparu, et mon é pouse m’a bien remonté les bretelles. Deux ans plus t ard, j’ai sorti un dossier poussiéreux pour une histoire d’assurance, et qu’est-ce qui a refait surface? L’alliance! Je me suis dit: ‹Ouah, c’est le b onheur retrouvé!›»

Coup de cœur

«On dit de l’amazonite qu’elle confère harmonie et paix intérieure. Du moins, c’est ce qu’on dit. Et s’il n’y a qu’un effet placebo, ça me suffit. Le cœur m’accompagne depuis bientôt 15 ans, d epuis le jour où mon épouse me l’a offert lors d’un séjour bien-être à Serfaus. Je l’emporte dans les moments importants, par exemple pour mon anniversaire ou une négociation déterminante. Ce cœur est chargé de bonnes ondes, ce qui semble également aider notre fille: elle étudie le droit à Bâle et emporte parfois le cœur avec elle quand elle a des examens.»

M arkus Ganzke, responsable de l’équipe responsabilité civile/droit des assurances

Boule de douceur

«Ce que ce porte-clés a de plus insolite, c’est son emplacement: il se trouve dans l’armoire de toilette de la salle de bain, juste à côté des parfums de mon mari. Je ne me souviens pas de sa dernière sortie, mais il nous accompagne depuis l’année de notre rencontre, en 1997. Mon mari avait pris l’habitude de me le donner lorsque je me rendais à une formation ou à un examen. Et moi, je le mettais dans ses affaires quand il partait en congrès. Un petit geste qui voulait dire: ‹Tu vas y arriver, je suis avec toi!› Une fois l’examen en poche, on oubliait le petit mouton et, trois semaines plus tard, on le retrouvait au fond de son sac et, instantanément, on ressentait son é nergie positive qui nous faisait dire que tout allait bien!»

Petra Huser, responsable communication

Fidèle mascotte

«Le 2 mai 1991, je recevais ma toute p remière voiture. L’adorable souris Diddl a tout de suite trouvé sa place sur le pare-soleil côté passager, parcourant plus de 425 000 km à bord de ce qui est, entre-temps, ma quatrième voiture. Que ce soit pour aller au travail, dans les embouteillages, les cols de montagne ou les voyages à l’étranger, elle reste zen même quand ça se complique ou lorsqu’une patrouille de police vous fait signe de vous arrêter. D’ici à ce que j’atteigne la limite d’âge pour conduire, j’aurai parcouru encore au moins autant de kilomètres. Jamais je ne l’abandonnerai c ar, pour une raison totalement irrationnelle, je suis convaincue que Diddl veille sur moi à chaque trajet pour qu’il ne m’arrive rien.»

Sibylle Lanz, responsable grands comptes et spécialiste marketing

LE QUIZ

Vous êtes plutôt rationnel, ouvert aux signes subtils? Ou un pro absolu de la communication avec l’univers? Découvrez-le!

Suis-je superstitieux?

Par Michèle Roten Illustrations Kooni

1

En pleine nuit, vous regardez votre réveil numérique: il est 3 h 33. Que pensez-vous?

a Super, ça fait 71 minutes, et je dois déjà retourner aux toilettes.

b Demain, je vais acheter des granules contre les insomnies.

c Hum, 3! La troisième lettre de l’alphabet est le C, comme Clara, le deuxième prénom de ma grand-mère. Mamie, c’est toi?

2

Un chat noir croise votre chemin. Comment réagissez-vous?

a Je freine, évidemment! Quelle question!

b Je voudrais bien le caresser, mais j’aligne d’abord notre niveau énergétique pour lui demander la permission.

c S’il arrive de la gauche: je frotte mon talisman, je crache trois fois par terre, et je croise les doigts.

3

Pourquoi le vendredi 17 est-il associé au malheur en Italie?

a Aucune idée, le vendredi est toujours un bon jour.

b En numérologie, le 17 est rarement associé à l’optimisme et à l’espoir.

c 17 s’écrit XVII en chiffres romains, soit l’anagramme de VIXI («j’ai vécu»), donc: «je suis mort».

5

Quelqu’un vous offre un bouquet de fleurs pour votre anniversaire. C omment réagissez-vous?

4

On vous offre un couteau pour votre anniversaire. Comment réagissez-vous?

a Sympa, c’est un couteau japonais pliant? Ça coûte cher!

b J’associerai désormais cette personne à un objet «pointu et rigide», mais ça passera peut-être avec un peu de méditation.

c Si je suis content de couper les liens avec cette personne, je l’accepte.

a Je préfère le couteau.

b Je fais semblant de me réjouir, mais je devrai purifier ensuite la pièce avec de la sauge blanche. Les fleurs coupées sont des organismes morts!

c Je les compte. S’il y en a 13, je dois en jeter une.

6

Vous brisez un miroir. Comment réagissez-vous?

a Je peste, je ramasse et j’en commande un nouveau.

b À mon avis, c’est un signe que je dois travailler sur mon image. Est-ce que je m’aime assez?

c Soit je réduis les morceaux en poussière et laisse le vent les disperser. Soit je garde un morceau et j’attends la prochaine pleine lune. Par sécurité, je jette aussi du sel par-dessus mon épaule gauche.

7

Savez-vous ce que l’on fait en Italie pour écarter la malchance?

a C’est sûrement en lien a vec la mafia.

b Prier.

8

Il y a une pie. Que faites-vous?

a Je m’assure qu’aucun bijou ne traîne.

b Dans le chamanisme, elle incarne un profond changement. Je réfléchis à quel niveau je pourrais embrasser une transformation.

9

Il pleut à votre mariage. Trouvez-vous cela terrible?

a C’est affreux! Pour le maquillage, les robes et les vidéos Instagram!

b Tant que la lune n’est pas descendante (sinon le bonheur en pâtit aussi) et que l’on se dit «oui» avant midi parce que le soleil couchant est moins favorable à la bonne étoile.

c Pas du tout, il y a un dicton qui dit: mariage pluvieux, mariage heureux.

11

Que signifie le mot «manifester»?

a Se montrer d’une certaine façon, se rendre reconnaissable, Exprimer quelque chose.

10

Jetez-vous des pièces dans les fontaines?

a Jeter de l’argent?!

b Oui, et je fais un vœu à destination de l’univers. .

c Bien sûr, mais peu de gens savent que cela n’a d’effet que si on les jette par-dessus l’épaule.

c Une seule pie? Ce n’est pas bon du tout. Je dis rapidement: «Good morning, Mister Magpie. How is your lady wife today?» pour chasser la malchance. J’ai appris ça en Angleterre.

b Je ne vois pas le lien avec la superstition, il s’agit de physiqe quantique. Par la manifestation, ma propre force créatrice divine dessine la réalité!

c Si on dit par exemple: «Je ne suis jamais malade» et que l’on ne touche pas du bois trois fois, le malheur se manifestera sous forme de maladie.

12

Que ne faut-il pas faire quand on trinque en Italie?

a Ne jamais associer du vin blanc avec des spaghettis à la bolognaise.

b Ne jamais trinquer avec une boisson non alcoolisée.

c Poser le verre sur la table après avoir trinqué; boire directement porte malheur.

13

En Égypte, pourquoi ne faut-il jamais dire «Oh, comme il est mignon» quand on voit un bébé?

a Soupçons de pédophilie.

b Parce que tous les bébés et les êtres humains sont égaux, peu importe leur physique.

c Parce qu’on attire les mauvais esprits sur le bébé et qu’on suscite la jalousie.

14

15

Que vous inspirent les araignées?

a Beurk!

b C’est mon animal-totem!

c L’araignée du matin porte malheur en France; au Japon, elle porte chance, mais elle porte malheur le soir (gare aux voleurs). Et en Suède, tuer une araignée apporte le mauvais temps.

17

Pourquoi ne doit-on pas porter de vert à un mariage écossais?

a Les mariages écossais ont souvent lieu à l’extérieur. Avec les nombreuses prairies, les invités pourraient s’égarer.

b Dommage, la couleur verte est la représentation spirituelle de la nature!

c Ne fâchons pas les elfes; le vert, c’est leur couleur.

Au Brésil, laisser tomber un couteau est synonyme de dispute imminente. Comment peut-on l’éviter?

a S’excuser auprès de toute personne pendant trois jours.

b Faire un nettoyage de l’aura.

c Faire une croix au sol avec le couteau.

16

Votre interlocuteur a un cil sur la joue. Que faites-vous?

a Une pichenette, et c’est réglé.

b Les poils des autres, ce n’est pas mes affaires. Tout le monde est beau!

c Je le pose sur mon doigt, puis la personne doit faire un vœu tout en soufflant dessus.

18

Quelqu’un vous demande si vous êtes prêt pour votre examen le lendemain. Vous répondez: «Oui, j’ai un bon pressentiment.» Et après?

a La discussion s’arrête là.

b Je me visualise en train d’apprendre que j’ai réussi l’examen.

c Je touche du bois trois fois.

19

Pourquoi «tient-on les pouces» à quelqu’un?

a Au regard de l’évolution, le pouce est notre principal doigt, d’où la nécessité de le protéger particulièrement.

b Dans les mudras bouddhistes, le pouce symbolise le pouvoir divin, qui s’active sous l’effet de la pression.

c Le pouce symbolise les démons qui nous veulent du mal. En tenant les pouces, on empêche les démons d’agir.

20

Que se passe-t-il si l’on souhaite un joyeux anniversaire à quelqu’un en avance?

a Le calendrier s’actualise instantanément.

b Rien de grave! L’essentiel, c’est que la personne sache qu’on pense à elle.

c Cela porte malheur.

21

Pourquoi cela porte-t-il malheur de passer sous une échelle?

a Quelque chose pourrait nous tomber sur la tête.

b L’échelle symbolise le chemin vers le ciel, et donc la mort.

c Le triangle symbolise la Sainte Trinité que nul ne doit franchir.

22

Pourquoi dit-on «Toi, toi, toi»?

a Cela vient du français et signifie que toi seul es responsable de la chance que tu as.

b Cela vient du mot «diable» que l’on souhaite éloigner. Mais prononcer le mot en entier porte malheur.

c En souhaitant «Bonne chance!», on attire les mauvais esprits, qui saboteraient alors notre chance. «Toi, toi, toi» imite, par analogie linguistique, le fait de cracher trois fois.

RÉSULTAT

Davantage de A: vous avez un esprit rationnel et en êtes fier. Les signes, les pressentiments et les rituels ne sont q ue pure invention. Une nuée de coccinelles? Très peu pour vous. Vous ne croyez que les choses sensées, preuve empirique à l’appui. La science, c’est votre religion. Les faits avérés vous font chaud au cœur.

Davantage de B: vous avez, disons, une ouverture d’esprit pour les signes subtils, la métaphysique, l’inexplicable, les p ersonnes semblant avoir des réponses, les points de vue alternatifs et les coïncidences non fortuites. Vous cherchez sans cesse à trouver votre place dans ce monde et une certaine rationalité. Et vous n’avez rien contre les licornes.

Davantage de C: vous êtes un pro absolu. Pas de place au hasard, vous connaissez toutes les astuces utilisées par l’univers, Dieu ainsi que les forces du bien et du mal pour communiquer avec vous, et vous savez vous y prendre pour vous attirer leurs faveurs. Superstition pour certains, vous appelez cela du contrôle.

À une longue vie!

Chaque seconde passée sur la planche prolonge la vie d’une heure – selon un dicton de surfeurs. S’il est légitime de mettre en doute cette croyance, il est résolument plus amusant d’y croire. Pourquoi cette superstition est-elle précisément associée au surf? Peut-être parce que l’on n’y obtient rien par la force. C’est en subordonnant son ego à la nature que l’on récolte des secondes de planche.

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Mauro Ladu/Alamy Stock
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