Des champs numérisés, de 1991 à 2022

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Cultures

Imaginez le scénario. Vous plantez des pommes de terre. Quelques semaines après, pour évaluer le développement de vos champs, vous faites prendre des photos aériennes à l ' infrarouge. Le lendemain , quand vous recevez les photos, vous y distinguez une zone dans un champ où le développement foliaire apparaît nettement moins avancé. C'est une zone assez étroite qui s'étend sur quelques centaines de mètres. Bon, c ' est une surprise et ce n'en est pas une. A !'oeil, en parcourant le champ à pied , vous aviez déjà noté la présence d 'une anomalie, mais il vous était difficile d'en évaluer l'ampleur avec précision Avec la photo à l'infrarouge , la situation est claire, et le problème paraît plus sérieux que vous le pensiez.

Reste à trouver la cause du problème. Après avoir parcouru le champ et discuté, le représentant de votre coopérative et vous-même en arrivez à la conclusion que c'est le sol qui est en cause; vous écartez la possibilité qu'il s ' agisse d'une maladie, d'un insecte ou d'un autre facteur. Vous faites analyser des échantillons de sol et constatez que le pH du sol dans cette zone est beaucoup plus élevé qu'ailleurs. Il faudra donc en tenir compte lors du prochain épandage de chaux.

Fiction? Pour le moment, oui. Mais cela pourrait un jour devenir réalité. Aux États-Unis et dans certains pays d'Europe, la photo à l'infrarouge est déjà employée dans certaines cultures , notamment pour évaluer les rendements. Chez nous, des essais sont en cours C'est le cas notamment chez Nutrinor où, avec le support financier du gouvernement fédéral, un projet de recherche a été entrepris . La photo qui apparaît ci-contre a d'ailleurs été prise chez l'un des trois producteurs de pommes de terre qui collaborent au projet. Ce projet vise essentiellement à explorer le potentiel de ce nouvel outil. Un potentiel qui va de l'optimisation de l'usage des fertilisants à la détection des maladies en passant par l 'évaluation des populations d ' insectes nuisibles.

Cinq fois plus d'information

Très vastes, donc, les applications possibles des ondes infrarouges. «C'est que, explique l'agronome Thérèse Munger, représentante chez Nutrinor et responsable du projet , alors que les ondes lumineuses ont une réflectance de huit pour cent, les ondes infrarouges en ont une de 40 pour cent. En termes simples, cela revient à dire que les infrarouges fournissent cinq fois plus d'information que

Pour y voff clair

PAR ANDRÉ PIETTE

les ondes lumineuses .«D'un point de vu e agronomique, cela signifie que le stre! s subi par une plante est détectable beamcoup plus tôt et plus clairement. Quelle que soit la cause de ce stress: insect e ravageur, carence minérale, maladie, sécheresse, etc.

C'est en lisant un article sur le sujet dans un magazine agricole américain q J e Mme Munger a eu l'idée de s'y intéress d r. Elle a contacté un chercheur de l 'Unive 'rsité du Québec à Chicoutimi qui travaillait déjà sur l'infrarouge. René Verreault te ~~ tait d'en faire un outil utile dans l'aménagement des bleuetières. M. Verreault est propriétaire , par ailleurs, d'une entreprise spécialisée dans la télédétection aérienn k.

L'approche de ce chercheur a ceci de particulier qu ' elle mise sur l'emploi d'u ri e caméra vidéo plutôt que sur la prise de photos proprement dites. L' avantage, c'e st qu'il n'y a pratiquement pas de délai de développement. Car le délai est le tai d n d 'Achille de la photo à l'infrarouge. 11.e développement en laboratoire demande plusieurs jours. Avec la caméra vidéo, d n ramène ce délai à une seule journée, le temps simplement de traiter la pellicule par ordinateur. «La vidéographie infrk rouge n'est pas un outil parfait, reconnaît Thérèse Munger. Mais elle est bien pl ili s pratique que la photographie infraroug L

Au stad e initial

Le projet, qui doit durer trois ans, n'en est encore qu'au stade initial. Un monta h t total de 122 000 dollars y sera investi, lè s deux tiers provenant des gouverneme 9 ts et le dernier tiers, de Nutrinor. «La coop é rative croit qu'elle peut aider à dévelo p per un outil utile aux producteurs«, d é clare Mme Munger.«

Des champs de pommes de terre photographiés à l'infrarouge avec une caméra vidéo.

Trois producteurs apportent leur support au projet. Ces producteurs de pommes de terre de semence fournissent des informations sur les 350 hectares qu'ils cultivent. Ce n'est pas par hasard s ' il s'agit de producteurs de pommes de terre «La télédétection, explique Mme Munger, présente un intérêt plus marqué dans les cultures intensives.«

Le projet que mène cette agronome avec l' aide d'un autre représentant , Russel Bouchard, débute et ses objectifs se précisent. Ainsi, c ' est d'abord au plan de la fertilité et de la conservation du sol qu'on espère en retirer des bénéfices. Les maladies et les insectes viennent pour le moment au second plan. «Les maladies sont importantes, juge Mme Munger, mais les producteurs de pommes de terre de semence ont déjà des moyens de les prévenir et de leur faire la lutte; il est plus important de travailler sur la conservation du sol: érosion, compaction, etc.« Concrètement, l' équipe de Mme Munger doit multiplier la prise de photos et les observations au champ afin de développer une grille d'interprétation des images. Mais tout d'abord, il s 'agit d'apprendre à maîtriser la vidéo. «Présentement, ditelle, les résultats obtenus avec la caméra vidéo ne sont pas parfaits , mais ils sont excellents pour une première année d ' essai.«

Pas de doute , donc, que l' infrarouge est un outil prometteur. Ses possibilités paraissent multiples . Où Mme Munger et son équipe en seront-elles rendues après trois ans de travail? ,Je ne me risquerais pas à le prédire, répond celle-ci. Mais on aura fait un bout de chemin.« o

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Le coopérateur agricole/juin-juillet 1991

Dès cette année, le mouvement coopératif innove avec un tout nouveau concept d'analyse de sol. Ce nouveau concept, programme d'analyse de sol de précision, s'appelle PASSION. Ce programme est offert à tous les agriculteurs soucieux d'optimiser ou d'accroître leurs productions végétales dans leur entreprise

Ce programme permet de tracer le profil fertile des champs en produisant des cartes de fertilité des sols. En plus du pH et de la CEC, les éléments majeurs phosphore et potassium, le magnésium, ainsi que les principaux oligo-éléments sont analysés par PASSION.

Pour accroître les performances productives d'une culture dans un champ défini, il est nécessaire de connaître la fertilité de l'endroit où la culture sera implantée. Mais attention, il s'agit de connaître avec précision cette fertilité. Pour augmenter cette précision, il est nécessaire de connaître la valeur fertilisante de chacun des endroits du ch a mp dont il est question. Pour ce faire, un échantillon de sol couvrant la superficie de chaque hectare du champ sera analysée en laboratoire, de là toute l'importance du système de navigation par satellite.

Afin de couvrir systématiquement chaque hectare du champ lors de la prise des échantillons de sol, il est impératif de disposer d'un système de positionnement. Ce système de positionnement indique l'endroit précis où l'échantillon de sol doit être prélevé. La position est déterminée grâce au système de navigation par satellite. Ce système de navigation permettra à PASSION de tracer une carte géoréférencée du champ en y superposant chacun des découpages de un hectare. PASSION intégrera à ces découpages les valeurs prove-

pH

test de sol K test de sol P

pH 7.0+ 6.5à6.9

À titre d'exemple, cartes typiques d'analyse de sol.

nant des analyses de laboratoire propres à ces hectares. Par la suite, une carte par élément analysé sera produite, c'est-à-dire que si 12 éléments sont analysés, 12 cartes seront produites.

PASSION révélera la fertilité de chaque endroit du champ. Avec le représentant de votre coopérative locale, vous pourrez déterminer de façon exacte et précise les endroits à améliorer pour optimiser vos productions végétales Les bénéfices sont autant agronomiques, économiques qu ' environnementaux. Tous y gagneront.

En 1995, des travaux préliminaires ont été réalisés avec le système de navigation par satellite. Le pH d'un champ de 35 acres a été géoréférencé à la manière de PASSION. À la suite de ces analyses, le pH de ce champ variait de 5,8 à 7,1. Si l'analyse de

ce champ s'était faite avec un se ul échantillon, il aurait ét é impossible de voir ces variations. Un e recommandation de chaulage aurait pu être faite pour t o ut le champ basée sur un seul résultat d 'ana l yse. Avec les analyses produites géoréférencées, il a été possible d e chauler les endro it s qui en demandaient seulement. On a a insi évité un surchaulage des a utres région s

Se joindr e à PASSION démontre le so uci de particip er à l' agriculture de de main: une agriculture de préci sion qui intègre la base de la fertilisation à une gestion optimale de nos productions végétales. Cec i pour répondre à la d eman d e alimentaire mondiale qui se fait sans cesse grandi ssan te o

* L'auteur est conseiller technique au Secteur des productions végétales de la Coopérative fédérée de Québec

Production végétale
agronome* ! / J• \r 11 1" \ 1 , , 1 i .._, )+-- \ i f !\' 1\\-/' 1 • "1 ·'N1 l \ : '. • 1 ,;:;: ', , " \ · I ,,Ji\ " ,.,, /. ·t > • ' ·, 1 \ 'Ïï.;; ~;, _·,, ~'. ~~\.,' \-JI , , 1. ---.' , \· '( '• \ '. 3 1_ \ \ • \l • • \ , • ' 1:"\ "SF, ' 1 , • 1' 1 \ \ 1 , __.k"' '\'/i/, li- l \ 1
Par Éric Dagenais,
Depuis quelque temps déjà, nous entendons fréquemment parler de GPS. Nous savons tous de façon générale que ce terme réf ère à un système de navigation par satellite ou au géopositionnement par satellite. Mais qu'en est-il vraiment?
LE COOPÉRAIEUR JUILLET-AOÛT 1996 29

ION, le Programme d'Analyse de Sol récision, connaît un très vif succès Et satisfaire le plus grand nombre de producteurs possible, nous avons mis sur pied une deuxième unité mobile d'échantillonnage au cours de la dernière saison. En plus d'effectuer l'échantillonnage, nous collaborons à la réalisation des cartes de rendement.

L'agriculture de précision est une approche qui consiste à «connaître» et à «comprendre» la «variabilité» du sol et de l'environnement en unités homogènes simples afin de «maximiser » les résultats tout en «minimisant » l'impact environnemental.

La connaissance de la variabilité du sol et de l'environnement peut se faire par l'entremise de la cartographie des analyses de sol, grâce à Passion notamment, de même que par les cartes de rendement.

Ces deux moyens requièrent l'utilisation du système de navigation par satellite (SNS) ou, en Anglais, GPS pour Global Positioning System Ce système permet non seulement de rendre l'opération possible mais aussi d'économiser temps et argent.

Dans le but d'améliorer nos connaissances, nous nous sommes associé à Agriculture et Agroalimentaire Canada, au groupe conseil PRISME (Production en régie intégrée du Sud de Montréal enr.), à la société Hauts-Monts, une entreprise

Agriculture de précision

Un premier bi an

Par l'entremise de leur coopérative locale, plus d'une soixantaine de producteurs ont bénélicié du programme de géopositionnement permettant de cartographier les résultats d'analyses de sol.

spécialisée en photographie aérienne, ainsi qu'à la Société coopérative agricole du Sud de Montréal dans l 'élaboratiton et la réalisation d'un ambitieux projet de recherche baptisé GeoPhyte. Amorcé en juillet 1996, le projet s'échelonnera sur 3 ans Le projet GeoPhyte regroupe des chercheurs de diverses disciplines: géographes, malherbologistes, spécialistes en numérisation d ' image, en télédétection et en fertilisation. L'objectif du projet consiste à intégrer l'ensemble des nouveaux outils offerts dans le cadre de l'agriculture de précision afin de poser de meilleurs diagnostics.

Les cartes de rendement permettent de quantifier les variations. Pour interpréter ces informations avec succès, il est nécessaire d'accumuler des données sur une période de trois ans. Plusieurs études universitaires démontrent qu'il est très hasardeux de tenter d'expliquer les variations à partir d'une seule carte. Toutefois, lorsque l'on est confronté à un problème évident tel un patron de champ au pH nettement inférieur à la normale, il faut agir le plus rapidement possible. En agriculture de précison, tout comme en agriculture conventionnelle, il faut commencer par la base pour ensuite évoluer en poussant plus loin le diagnostic.

Dans le cadre du projet GeoPhyte, nous avons analysé un champ nivelé au laser depuis plus de 10 ans et dont le pH était considéré satisfaisant depuis toujours (figure 1). Les résultats de l'analyse ont démontré qu'en réalité le pH variait de 5,7 à 7,4 (figure 2) et que le rendement en maïs, quant à lui, oscillait de 5,6 à 9,6 tonnes à l'hectare (figure 3).

L'agriculture de précision permet d'aller au delà de la simple évaluation visuelle puisque les données démontrent des variations dès la première année de collecte d'information.

L'agriculture de présision permet de maximiser la profitabilité, le rendement, l'usage des intrants et les nouvelles techno-

logies. Les premiers essais américains , en cours depuis plus de trois ans, démontrent qu'il est possible d'intervenir pour diminuer sensiblement la variabilité au champ. Est-ce l'objectif de l'agriculture de précision ? Certains diront que l'objectif de l'agriculture de précision consiste à optimiser les différentes sections d'un champ. Les objectifs de la plupart des producteurs américains se résument à accroître la profitabilité ou le rendement.

Pour réellement bénéficier de cette technologie, nous recommandons de récolter et de compiler des données pendant au moins trois ans afin de hausser la précision des analyses et des recommandations.

En novembre 1996, Richard B. Ferguson, chercheur à l' Université du Nebraska, aux États-Unis, faisait état de données fort intéressantes issues d'un projet visant à diminuer la présence de nitrate dans l'eau Après une année d'e ssais, les résultats démontrent qu'une application d'engrais à taux variable sur un champ cartographié depuis 3 ans a entraîné une augmentation de rendement de l'ordre de 7 % sur l'ensemble du champ ainsi qu'une diminution de 10 % des nitrates présents dans les eaux souterraines.

L'agriculture de précision a bel et bien pris forme. Pour certains, elle est déjà un "département" de l'entreprise. De nouveaux outils et façons de travailler sont maintenant disponibles. Elles s uscitent questions et intérêts. Par exemple: À quel rythme dois-je investir dans cette nouvelle technologie? Chaque situation demeure un cas particulier. Il importe de tenir compte de vos intérêts, de l'état général de la ferm e, de vos objectifs à moyen terme et de vos ressources. Travail et gros bon sens permettront aux adeptes de cette nouvelle approche de faire des expériences et découvertes fort intéressantes. o

L'auteur est directeur du service technique au secteur des productions végétales à la coopérative fédérée.

3
LE COOPÉRATEUR J ANVI ER 1997 19

Geophyte

Objectif

Identifier, en partant des données de l 'expérience, les causes des variations de rendement mesurées par les capteurs de rendement installés sur les équipements de récolte.

Commentah•es

L'agriculture de précision en est encore à ses premiers pas et c'est pourquoi nous connaîtrons probablement des changements importants au cours des vingt prochaines années. La puissance des ordinateurs, la génération des nouveaux logiciels facilitent l'utilisation de la gestion de l'information géoréférencée.

Le mouvement COOP a déjà un programme commercial d' agriculture de précision appelé PASSION (Programme d'Analyse de Sol de préciSION). Les cartes de rendement permettent à des producteurs québécois de se familiariser avec l'agriculture de précision. Les questions et commentaires reçus à ce jour sont fort intérressants et pertinents:

L'influence des intéractions;

La fertilité vs le drainage;

La fertilité, le drainage et mauvaises herbes;

La fertilité, la texture et les variétés/hybrides.

Voilà quelques scénarios d'analyses où le travail génère présentement plus de questions que de réponses .

C'est pour tenter d'éclaircir ces questions que le projet GeoPhythe a été mis en place. Il regroupe entre autres, Agriculture et Agroalimentai-

re Canada, la Coopérative fédérée de Québec, Hauts-Monts (une entreprise spécialisée en photographie aérienne), PRISME (Production en régie intégrée du Sud de Montréal enr.) et la Société cooopérative agricole du Sud de Montréal. Par ailleurs, les scientifiques engagés proviennent de différents secteurs d'activités tels que la pédologie , la fertilisation, la malherbologie,

la géographie et la numérisation d'image. Nous croyons que les photos aériennes et images satellites méritent d'être intégrées aux cartes de fertilité et de rendement et d'observations des producteurs. Si nous réalisons l'intégration de cette information, les diagnostiques en seront améliorés. En 1996, nous avons recueilli beaucoup de données. Cependant, les analyses ne font que débuter. Nous vous tiendrons au courant de nos futurs résultats.

Photographie infrarouge couleur acquise le 5 mai 1996, quelques jours après de fortes pluies. La végétation apparaît en rouge. Les variations de couleur des sols sont dues aux conditions d'humidité (les réseaux de drainage sont très évidents) et à des variations de type de sol (les sols organiques apparaissent en noir et les sols minéraux sont plus pâles) Photographie couleur normale acquise le 2 juillet 1996. Plusieurs champs apparaissent nus car le semis a été retardé par les pluies abondantes du printemps.
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LE COOPÉRATEUR PRODU CTION VÉGÉTA L E FÉVRIER 1997

Producteurs maraîchers d'envergure dans la ré gion du Lac-Saint-Jean , Denis Legault et son épouse Agathe Boivin, de Saint-Gédéon, mis e nt sur l'agriculture de pr écision pour obtenir le rendement maximal de leurs champs.

Leur entreprise, Le Potager Grandmont, compte près de 127 hectares de ter re La gourgane brune et blanche occupe vingt-quatre hectares de la superficie totale; dix hectares sont attribués à la culture de la carotte; dix au chou; huit au brocoli; six au rutabaga; près de cinq au chou fleur; trois à la laitue en feuilles et 61 hectares sont cultivés

d'orge pour permettre principalement de faire la rotation des cultures.

La grande part des légumes récoltés sont vendus sur le marché local sous la marque Légunord, qui est également le nom de l'entreprise formée de quat r e producteurs et mise sur pied pour faciliter la

L E COO PÉRATEU R JANVIER 1998 33

commercialisation de leurs produits. «En ~e regroupant, souligne le maraîcher, on est en mesure d'offrir des · volumes importants aux acheteurs des chaînes d'alimentation. Aussi, on met en commun les idées et les capitaux afin de s'outiller adéquatement pour le conditionnement des légumes, tels que la carotte.»

Pour ce qui est de la gourgane, elle est vendue à l'usine de congélation de Saint-Bruno qui prend en charge le traitement et la commercialisation de cette légumineuse.

UNE PREMIÈRE

C'est à l'automne 1996 que Denis Legault a fait sa première expérience en agriculture de précision. La technique consiste à élaborer des cartes de fertilité positionnées à l'aide d'un système de navigation

moins j'effectue de passages. Ainsi, passer deux fois plutôt que cinq, comme il a déjà été nécessaire de faire, c'est beaucoup plus rentable.»

«Dans trois ans, il fera prélever d'autres échantillons dans la même parcelle, déclare Isabelle Dubé. Ainsi, on pourra prendre connaissance de l'impact que l'intervention aura créé sur le sol et ajuster l'épandage de fertilisants selon les nouvelles données.»

Au Potager Grandmont, en 1997, on a fait faire la cartographie des sols de deux autres champs dont la superficie totale est près de 13 hectares. Denis Legault compte de cette façon implanter graduellement l'agriculture de précision. Isabelle Dubé nous signale qu'il en coûte 15 $ l'acre (37 $ l'hectare) pour effectuer un programme complet, soit l'échantillonnage des sols, l'élaboration d'une carte de sol pour chaque élément et les conseils nécessaires à l'application de la

par satellite (GPS) et des analyses de sol prises à chaque hectare dans la parcelle à cartographier. «J'ai d'abord commencé par une prairie où je voulais cultiver des crucifères, souligne le producteur. Avant de labourer, j'ai voulu connaître la fertilité exacte du champ. Les cartes obtenues ont clairement démontré une carence en phosphore dans la partie supérieure, alors que dans la partie centrale c'est le niveau de potassium qui était trop bas.» Pour corriger ces carences, Isabelle Dubé, agronome chez Nutrinor, coopérative agro-alimentaire du Saguenay-Lac-St-Jean, a délimité les zones déficientes et déterminé les besoins en engrais dans chacune de ces zones. «Et à l'aide de mon épandeur, indique Denis Legault, j'ai appliqué l'engrais approprié entre les jalons installés à cet effet.»

«L'équipement en agriculture de précision s'améliore de jour en jour, poursuit le producteur. Bientôt nous disposerons d'épandeurs à taux variables contrôlés par un système GPS. Il sera donc possible d'effectuer la programmation de l'épandage des engrais et de la chaux selon les zones identifiées grâce aux cartes de fertilité.»

«Actuellement, nous devons mesurer les rendements visuellement, affirme Denis Legault. La machinerie servant à mesurer le rendement lors de la récolte n'est pas encore à point en production maraîchère.» Celui-ci était d'ailleurs ravi de constater que la récolte 1997 affichait des résultats très satisfaisants dans le champ qui avait fait l'objet de la cartographie en 1996. «Bien sûr, prévient-il, la belle saison a aidé à l'obtention de cette bonne récolte, mais je prétends que la combinaison d'une fertilisation judicieuse et précise et le temps favorable ont tous deux contribué à ces résultats intéressants.»

«L'agriculture de précision me permet de corriger la fertilisation d'un élément là où la teneur en est pauvre et j'évite de surfertiliser là où les éléments sont déjà contenus en quantité suffisante», ajoute-t-il.

«J'optimise donc mes rendements grâce à une utilisation judicieuse et précise des fertilisants et à une diminution du nombre de passages au champ lors de la cueillette. Plus la maturité est uniforme

technique. La représentante estime que cet investissement est facilement récupéré par l'augmentation des rendements et par l'économie potentielle reliée à l'utilisation des fertilisants. Plus une culture possède une valeur élevée, ajoute-t-elle, plus il est rentable d'investir dans l'agriculture de précision.

Notons que l'exercice permet de mesurer le taux d'éléments majeurs tels le phosphore, le potassium et l'azote; les éléments secondaires tels le calcium, le magnésium et le soufre et les principaux oligo-éléments tels le fer, le zinc, le bore, le cuivre, le manganèse etc. Il permet aussi de mesurer le pH du sol, le taux de matière organique, l'indice en chaux, etc.

Nutrinor possède les équipements servant à effectuer les échantillons de sol géopositionnés par satellite. Actuellement, les cartes de fertilité sont produites par le Secteur des productions végétales de la Coopérative fédérée de Québec à l'aide du programme PASSION. Toutefois, Nutrinor prévoit se munir du logiciel au courant de l'hiver.

«Cela prend environ une heure pour prélever l'échantillonnage de dix hectares de terre, nous indique la représentante. C'est par l'entremise d'une antenne située à Rivière-du-Loup que l'on peut, ici au Lac-Saint-Jean, établir le positionnement de chaque échantillon par rapport à l'ensemble du champ. À l'automne 1997, j'ai échantillonné près de 250 hectares de sol chez des producteurs de pommes de terre et de céréales. Il faut donc, pour ce faire, utiliser des outils performants.»

À ce jour, vingt-deux coopératives ont fait appel au programme d'agriculture de précision PASSION pour tracer les cartes de sol de leur clientèle. C'est donc dire que cette nouvelle technologie de pointe connaît de plus en plus d'adeptes.

Pour sa part, Denis Legault conclut que: «L'agriculture de précision est une solution d'avenir pour la rentabilité de son entreprise et la qualité de ses champs.» ,tJ8

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34 LE COOPÉRATEUR JANV I ER 1998

une technologie d'aide à la

Les capteurs de rendement avec GPS ont fait leurs premières apparitions au Québec au milieu des années 90 Où en sommes-nous avec cette technologie? Comment peut-on valoriser les cartes de rendement? Est-ce rentable d'avoir un GPS sur mon capteur de rendement? Mon expert-conseil peut-il m'aider dans l'analyse de mes données? Voilà plusieurs questions que les producteurs agricoles se posent en ce moment.

Après plusieurs années de prise de données , les producteurs ayant déjà un capteur de rendement avec GPS se sentent souvent submergés par une quantité impressionnante de cartes et de fichiers. Il ne faut surtout pas céder à la panique. t:information recueillie avec le capteur de rendement est d'une qualité et d'une utilité qui vous

aideront à faire une gestion raisonnée de vos champs. Le fonctionnement et l'utilisation du capteur de rendement lors des battages ne sont que les premières étapes du processus. Bien que la cueillette d'information soit primordiale, l'analyse des données demeure l'étape cruciale pour atteindre le plein potentiel de votre équipement et obtenir un accroissement des rendements.

UN CAPTEUR BIEN CA LIBRÉ DIMINUE LES ERREURS

Il existe plusieurs types de capteurs de rendement et chaque compagnie a ses particularités bien distinctes en ce qui a trait au calibrage et aux composantes. Par contre, il y a des normes à respecter pour obtenir le meilleur calibrage possible

GRANDES CULTURES
40 Le Coopérateur agricole I SEPTEMBRE 200B

:décision

Il · d 'd · · ,gul. d l 1 , importe e proce er a un SUlVl re 1er e a precision du capteur de rendement en foncti dn de la culture et des conditions de récolte. Lors du cali brage, il faut vérifier la vitesse d'avancement et la largeur de récolte. Il faut s'assurer de l'humidité du grain avec un testeur calibré. Il est très important de ne pas calibrer le capteur de rendement avec le pourtour du champ. Les erreurs les plus fréquemment retrouvées dans l'utilisation du capteur de rendement sont la largeur de récolte non chl ibrée, l'ajustement du délai, les erreurs GPS, l'arrivée d' un bouchon dans la batteuse et la perte de grain.

UNE CARTE DE RENDEMENT PRÉCISE: UN SIGNE DE RÉUSSITE

Il faut bien travailler ses cartes de rendement pour avoir une information juste et pertinente. Malgré les précautions prises lors du travail au champ , il se glisse malheureusement des erreurs qui peuvent influencer la précision de la carte. Tout d'abord, il est nécessaire d'effectuer un bon nettoyage des données. Un fichier brut de rendement est constitué de milliers d'informations. Le nettoyage consiste à enlever les données qui viendraient fausser l'interprétation de la carte. Saviez-vous qu'une carte non nettoyée peut entraîner une erreur de diagnostic dans 50 % des cas? Dans un fichier brut provenant du capteur de rendement, il peut y avoir jusqu' à 15 % de données erronées.

Avant de sortir la carte de rendement, les principaux points à vérifier et à corriger dans le fichier brut de données sont les délais de fonctionnement , les délais de départ et d' arrêt, la largeur de coupe lors du dernier passage et les données de rendement aberrantes. Il est aussi nécessaire de séparer les différents hybrides positionnés dans un même champ et éliminer les points de trop bas rendement situés dans les tournants ainsi que quelques points de fort rendement. Il est également important de transformer les valeurs en rendement sec.

L'ANALYSE DES CARTES DE RENDEMENT, LE CHIFFRE TROIS UN MINIMUM

Il n' est pas toujours simple de travailler avec des cartes de rendement. Il est très hasardeux de poser un diagnostic ou de planifier un patron d'échantillonnage de sol en se basant sur une seule année. Les champs n'ont pas tous un rendement stable et les zones, bonnes ou mauvaises, peuvent changer d'une année à l'autre Les facteurs climatiques et le type de sol sont quelques-uns des facteurs qui peuvent jouer un rôle important et influer sur les résultats. Par exemple, lors d' une saison sèche les zones de bon rendement peuvent être localisées dans des endroits différents de ceux de l'année précédente où les conditions météorologiques étaient pluvieuses

Pour pallier ces facteurs et réussir un bon diagnostic , une carte pluriannuelle de rendement est requise (voir la figure 1 dessous) . Pour produire ce type de carte, il faut avoir au moins trois années de rendement consécutives. Les données doivent être classées en fonction de la moyenne, pour chacune des années. Une fois cette étape réalisée , nous produisons une carte qui permet de visualiser les zones de variabilité à l'intérieur du champ. C'est à partir de cette carte que nous pouvons maintenant réaliser une analyse exhaustive du champ. Il est important lors de l'analyse de ne pas hésiter à demander l'aide de votre expert-conseil. Celui-ci vous apportera l'expertise nécessaire à l'élaboration d'un plan adapté à votre exploitation

Lors de l'analyse de la carte pluriannuelle, on doit déterminer les différentes sources qui influencent le rendement et les classer en deux catégories. La première catégorie contiendra les sources de variabilité causées par les pratiques agricoles (ex. : compaction, date de semis, hybrides , erreur d' équipement, drainage, les applications, etc.) . La deuxième compilera les variables naturelles (ex. : topographie, météo, types de sol , infestation d'insecte et mauvaises herbes, écoulement des eaux, etc ). Après une bonne analyse, il faut établir un plan qui permettra de rendre le champ plus uniforme de manière à atteindre un meilleur rendement. C'est à partir de cette carte pluriannuelle de rendement que vous pourrez établir un patron d'échantillonnage de sol, réaliser la fertilisation puis ajuster les semis et les applications d' azote, et ce, à taux variable.

Fig Année en haut de la moyenne • Osur3 D 1 sur3 • •
SEPTEMBRE 200 s I Le Coopérateur agricole 41

Figure 1 Fraction du couvert végétal

0.23- 0.30 0.30- 0.38 0.38 0.45 0.45- 0.53 0.53 0.60 ..,

% Surface 0.3 0.7 3.2 18.8 39.1 34.8 2.4 0.7 % Surface 0.1 0.3 0 3 0 8 1.3 8.2 84.5 4.5

MATÉRIEL ET MÉTHODES

Depuis 2007, nous étudions la possibilité d'utiliser la télédétection pour faire le suivi des champs en grandes cultures et en cultures maraîchères. Pour l'année 2009, le projet incluait 1125 champs en grandes cultures dans la région de Saint-Hyacinthe et Saint-Damase ainsi que 116 champs de cultures maraîchères dans la région de Sherrington.

Nous avons utilisé le satellite Formosat 2 pour nos images. Les avantages de ce satellite viennent du fait qu'il passe chaque jour au-dessus du Québec. Une prise d'image sur plusieurs jours consécutifs nous permet de produire une mosaïque qui couvre l'ensemble des parcelles et d'être le moins possible influencés par un couvert nuageux. Le satellite a une résolution de huit mètres en multi spectral. Il dispose également de quatre bandes soit bleu, vert, rouge et proche infrarouge. La grandeur de l'image est de 24 km sur 24 km.

Pour le projet de suivi des cultures, nous avons pris trois images à des stades différents de la culture pour visualiser la progression de la croissance (voir la figure 1).

Deux paramètres ont été cartographiés pour le projet, soit la fraction du couvert végétal et l'indice de chlorophylle.

RÉSULTATS

Beaucoup de paramètres peuvent être détectés sur les images selon la période d'acquisition. Des problèmes de mauvaise herbe, de maladie, de drainage, d'effets de sol et autres. Ce qui est intéressant d'observer, c'est la limite que notre œil peut détecter par rapport au satellite qui, lui, a un meilleur angle de vue.

Ce que nous percevons lors des visites au champ sont des problèmes facilement observables. Par contre, la zone d'influence qui est indétectable par l'œil donne un aspect différent de la situation

0 B J E C T 1 F
Évaluer le potentiel technique et commercial du suivi des cultures avec la technologie de télédétection par imagerie satellitaire .
Maïs
Maïs : 17
.................. .................
: 23 juin 2009
juillet 2009 Fraction de couvert vert rr .. ..... ..
~o::~06~1 Î Fraction de couvert vert
Maïs : 2 septembre 2009 IT ,Il [11 1 , 1 111 ,,. 11 ilR&D 2 008 Recherche et développement en product ions végétales

au champ. Comme vou s pouvez le constater à la figure 2, la superficie visible au champ par le producteur est de 1 ,77 ha et la zone d' i nfluence détectée par le satellite couvre une superficie de 6 ,8 2 ha

Pour plusieurs champs , les images ont une bonne corrélation avec les données de conductivité électrique des champs réalisée avec l'appareil VERIS. Selon les champs, les données de su r face et de profondeur étaient identiques à la fraction du couvert végétal. Pour la figure 3, les lectures de données de conductivité électrique ont perm i s de délimiter des types de sols multiples à l'intérieur de la parcelle. L'image satellite démontre bien l 'i nfluence des différents types de sol sur la cro is sance de la culture

Nous avons également comparé les images satellites avec les données de rendement provenant des capteurs de rendement GPS des producteurs participants au projet (voir la figure 4) Dans la majorité des cas , l'image satellite prise au début septembre était comparable aux ca r tes de rendement des producteurs , et ce, autant pour le maïs que le soya Donc , il serait possible à partir des images satellites de produire une carte de rende ment relative à partir de la moyenne de rendement d'un champ.

Un producteur utilisant cette technologie pourrait avoir un portrait assez juste de la variation de rendement de ses champs , et ce , m ême sans avoir à faire l 'achat d ' un capteur de rendement GPS.

La télédétection par satellite est très prometteuse pour le futur Les années antérieures avaient permis de confirmer que cette technologie peut-être accessible à n'importe quelle cultu r e comme , par e x emple , les céréales , le canola et autres C'est un beau moyen de démocratiser l'agriculture de précision en la rendant accessible à tous les producteurs . Par contre, il faut être conscient que le coût de cette technologie ne peut pas être absorbé que par un groupe restreint de producteurs agricoles. Pour rentabiliser cet outil, il faut un regroupement de plus i eurs producteurs agricoles dont les fermes sont incluses dans la délimitation de l'image.

Plusieurs produits peuvent être tirés de ce projet. En plus du suivi des cultures en cours de saisons , il serait possible de produire des cartes de rendement et de rentabilité relative. Des cartes comparatives annuelles peuvent également être réalisées afin d'estimer pour un même champ et une même culture l'avancement de la couverture végétale par rapport aux années antérieures. Après un minimum de trois années de suivi , il est possible

Fraction de couvert vert % Surfac e Il 0 0-0 11 0.0 Il 0 11 0.23 0.5 11 0 23 0.34 1 7 t' . 0.34 0.46 5.0 0.46 0.57 14.8

0 57 0.68 27.2 1 0.68 0 80 47.5 11 0 80 0.91 3.4

de délimite r des zones de gestion à l'intérieur des parcelles. Cette démarche permet par la suite de proposer des plans d'échantillonnage de sols ainsi que de sortir des cartes pour les semis et les applications à tau x variable

Voici seulement quelques idées sur les possibilités que peut offrir cet outil d'agriculture de précision Il est à noter que toutes les données sont géo référencées et en format compat i ble avec n' importe quelle machinerie agricole Une technologie d 'avant-garde pour le producteur d'aujourd ' hui

Figure
2
:,-
Carte de rendement Soya 2009 Rcndl!ITl('n t$0ya k g/h ;i •if - 641 1086 .' 1532 .~ 1977 2423 2868 Ill 3313 • 3759 4204 • 4650 R&D 2009 Recher che et déve loppem ent en productions végéta e s •
Figure 3 Image satellite (maïs 2 septembre 2009) Lecture de conductivité électrique Figure 4 Télédétection - Soya 2009

Conseiller spécialisé, agriculture de précision et pulvérisations à forfait la Coop fédérée alain.brassard@lacoop.coop

'Lagriculture de précision est une science relativement jeune. Elle a évolué de façon constante au Québec au cours des 16 dernières années, en laissant sa marque auprès des producteurs cherchant à maximiser et à rendre beaucoup plus efficaces l'analyse, la fertilisation et les travaux au champ. Depuis le tout début, l'accent a été mis sur la machinerie agricole. Les outils, comme les systèmes de guidage par GPS, ont permis à énormément de producteurs agricoles de faire un premier pas réussi vers l'agriculture de précision.

Que nous réserve l'avenir? Les producteurs agricoles devront faire un choix. Selon un récent sondage, 56 % des producteurs agricoles en Amérique souhaitent intégrer l'agriculture de précision à la ferme au cours des prochaines années. À la lueur de ce sondage, il est évident que ces technologies sont là pour de bon et que la croissance sera grande dans les années à venir. Leur intégration passe-t-elle par des investissements majeurs à la ferme? Pas nécessairement. Il faut faire les bons choix et respecter les étapes.

Parmi celles-ci, il y en a une qui est encore trop souvent négligée par la majeure partie des producteurs agricoles : obtenir de l'information détaillée sur leurs champs. Il est en effet primordial de se bâtir une banque de données sur la variabilité intraparcellaire.

Le capteur de rendement GPS est probablement un des meilleurs outils qui soit pour débuter en agriculture de précision. Par contre, il faut pouvoir traiter les données qu'il génère et de calibrer adéquatement l'appareil, ce qui ne semble pas évident pour la plupart des producteurs qui font l'acquisition d'un tel capteur! La grande majorité n'utilise pas tout le potentiel des techniques de traitement des données qui

permettent d'en obtenir une information juste et précise et n'accorde pas tout le temps nécessaire pour maîtriser les logiciels.

Une solution abordable et clé en main s'offre maintenant aux producteurs agricoles. La Coop fédérée élabore, depuis 2007, par l'entremise de son Centre d'expertise en agriculture de précision, une façon novatrice d 'amasser de l'information rapidement sur les fermes grâce aux images satellite Cette technologie est accessible à tous les producteurs agricoles, quelle que soit la grandeur de leur ferme. En prenant des images satellite à des stades clés, on peut visualiser et quantifier le développement de la végétation en saison de croissance et produire une analyse cartographique des champs en fin de saison . Donc, un premier diagnostic peut être réalisé en cours de saison L'information étant géoréférencée, il est facile pour le conseiller et le producteur de cibler les endroits qui posent problème et qui nécessi tent une visite sur le terrain ainsi qu'une analyse plus approfondie. La carte de développement de la végétation est un outil de suivi de la culture réalisé deux fois en saison (figure 1).

Figure 1 : Exemple de carte de développement de la

végétation

Coop

36 Le Coopérateur agricole I JUILLET·AOOT 2011
Producteur : Ferme La
Champ : 154 Culture: Soya Surface : 29.1 ha Année : 2010 OàlO 11à20 21à30 31 à40 41650 5 1 à60 14.11 6là70 14 0 71à80 81à90 91 à 100

En plus des images en saison de croissance , le producteur aura accès, à la fin de la saison , à trois outils de diagnostic qui lui permettront de mieux évaluer ses champs. Le premier outil est la carte relative de rendement (figure 2). Tout comme une carte de rendement provenant d'un capteur GPS, cette carte quantifie les rendements de chacune des parties du champ . Elle permet également au producteur de comparer les hybrides et de les positionner selon le potentiel des champs.

Figure 2 : Exemple de carte relative de rendement

Le troisième outil se présente sous la forme d 'une carte économique de rendement (figure 4). Cette carte donne une idée juste des zones rentables du champ et de celles qui le sont moins. L'information aide notamment à décider quel champ il faut analyser en priorité et quels sont les travaux d'amélioration à réaliser.

Figure 4 : Exemple de carte économique de rendement

Le deuxième outil est une carte qui procure une segmentation du champ en zones de gestion (figure 3). L'information fournie permet de visualiser le rendement associé à chacune des zones et l'écart entre celles-ci. Cette carte offre la possibilité d'évaluer l'indice de variabilité des champs et donne une bonne idée des zones à haut et à faible potentiel de rendement. Cette carte sera valorisée chaque année afin de produire une carte pluriannuelle de rendement. Avec cette dernière , il est plus facile par la suite de déterminer les différentes zones où , par exemple, effectuer des semis à taux variable, produire un plan d'échantillonnage de sol, réaliser la fertilisation à taux variable ou analyser le nivellement et le drainage.

Figure 3 : Exemple

de

carte de zones de gestion

En plus de procurer une banque de données précieuses , ces outils de diagnostic très abordables , regroupés en un seul produit, permettront aux nouveaux utilisateurs d'intégrer graduellement l'agriculture de précision de façon gagnante. Quant aux plus expérimentés, ils pourront maximiser leur temps et leurs équipements déjà en place

Les plus grands avantages , pour les producteurs, à utiliser cette technologie viennent du fait qu'aucune manipulation de données n'est nécessaire et qu'ils n'ont pas à faire de cartographie. Cela évite donc les possibilités de pertes de données et maximise le temps qu ' ils peuvent consacrer à l'analyse . Il s'agit d 'un produit clé en main qui procure une information incomparable et une mémoire de l'exploitation qui permettront aux producteurs d'évoluer avec les nouvelles technologies , et ce, avec succès. La technologie existe pour la plupart des cultures au Québec.

Qui de mieux placé que le réseau La Coop pour offrir aux producteurs agricoles cette technologie d'a v ant-garde! C'est justement grâce à la force de ce réseau que nous pouvons la proposer. Pour en savoir plus, communiquez avec votre expert-conseil. ['il

l a Coop.. _ Rendement • so ya 201 0 Légend e kg/ha"'' - 145 1liilll D "" D ,,,, D ~" D- "" Moyenne 2952 kg/ ha Trul • 85 894 kg
Producteur : Ferme La Coop Champ : 154 Culture : Soya Surface 29. 1 ha Année 2010 Zones de gestion Rendement en soya 2010
Producteur : Fe rm e La Coop Ch a mp : 154 Cu ltur e : So ya Surface; 29.1 ha Ann ée 2010 carte économ ique Rendement en soya • Nonrentable(9%) Superficie : 2 67 h a Pertes: 393 $ Pertes/ha : 147 $/ha Rendement: 1317 lcg/ha • Ren ta bili té mo yenne ( 47 % ) Superficie : 13 59 ha Profi ts: 5150 $ Profits/ ha : 379 $/ ha Rendement 2 584 k g/ha • Rentabili t é sup érieure (44 %) Supe rfic ie 12 86 ha Profits: 9 29 1 $ Profi ts/h a: 722 $/h;:, Rend em ent : 3 705 kg/h a
JU I LLET-AO ÛT 2011 I Le Coopérateur agricole 37
Énergies Sonic et Gaz Métro Unpartenariat pourdes stationsmultiénergie Lait Les bienfaits d’un état dechairadéquat La Chine D’exportatriceà importatrice La technologie façonne une nouvelle planète agricole SEPTEMBRE 2013

LA TE C HNO L OGIE FAÇONNE UNE

L’arrivée du GPS est une des plus grandes révolutions technologiques en agriculture depuis que les tracteurs ont remplacé les chevaux, au début des années 1920. En réduisant le nombre de passages des tracteurs, semoirs, épandeurs, pulvérisateurs sur des millions d’hectares, cette invention peut avoir un effet sur le portefeuille des agriculteurs grâce à des économies d’engrais, de pesticides et de carburant. Et elle est un fabuleux toast à la santé des rivières et de l’environnement!

l’aide des systèmes de dosage automatique, le GPS transforme aussi les semoirs ou les pulvérisateurs en engins d’agriculture de précision : « La bonne dose, au bon endroit, au bon moment. » Installés sur les moissonneuses-batteuses, les capteurs de rende ment permettent de dresser des cartes sur les zones les plus ou les moins productives des champs. D’autres capteurs de mesure de la chlo rophylle des plantes ou de la matière organique contenue dans le sol renchérissent l’information. Au moyen de cette quincaillerie sophistiquée, céréaliers et maraîchers peuvent dorénavant gérer les zones d’un champ, un peu comme un producteur laitier gère chacune de ses vaches. Ce dernier nourrit ses bêtes en fonction du volume de production, du taux de protéines du lait, détecte une maladie en se basant sur le compte de cellules somatiques, etc. Son robot de traite lui fournit assez d’information pour tapisser tous les murs de l’étable.

Fabricants d’équipement agricole, sociétés de consultants, institutions financières, ils sont nombreux à tenter de mettre au point des logiciels

capables d’interpréter ces milliards d’octets pour faciliter une meilleure gestion de la ferme. Très bientôt, un producteur pourra entièrement gérer son entreprise à partir de son téléphone intelligent. Déjà, il peut prendre et transmettre une photo d’un insecte ou d’une plante malade dans son champ de céréales ou de pommes de terre. Et dans les minutes qui suivent, recevoir une prescription de son conseiller assis dans un bureau à des kilomètres de la ferme.

Tout comme la télémédecine, la téléagro nomie est née! L’évolution foudroyante des technologies, y compris celle de la communica tion sans fil, va redéfinir le métier d’agriculteur comme celui d’agronome1. Mais plusieurs freins bloquent l’adoption massive de l’agriculture de précision, dont le coût des systèmes GPS et les connaissances agronomiques. Malgré cela, les astres semblent alignés pour qu’on franchisse ce passage. Assistera-t-on à la naissance d’une nouvelle planète agricole?

1 La ferme de l’avenir ressemblerait à cette vidéo produite par John Deere : www.youtube.com/watch?v=jEh5-zZ9jUg. À bien des égards, la technologie présentée est déjà utilisée sur le terrain.

À
Texte et photos de Nicolas Mesly
46 Le Coopérateur agricole | SEPTEMBRE 2013
agricole
Dossier Technologie

Les cartes de rendement permettent aux producteurs d’affiner leur gestion des champs en choisissant des cultivars en fonction du potentiel de la terre et en appliquant des intrants à taux variable. Très bientôt, ils pourront gérer toute leur entreprise à partir d’une tablette ou d’un téléphone intelligent.

UNE NOUVE LL E P L ANÈTE AGRI CO L E

Isabelle Brouillette : dans l’œil d’un satellite

« Les cartes par zones de gestion de mes terres me permettent de prioriser les travaux aux champs et de mieux administrer la ferme », dit Isabelle Brouillette. Depuis trois ans, la Ferme Jam-Mi-Li, à Joliette, est dans l’œil d’un satellite. Deux fois par été, l’engin photographie le dévelop pement des cultures des champs de soya, de maïs et de blé. Aucun des 283 hectares de l’entreprise n’échappe à cet espion situé dans l’espace : zones trouées, uniformes, mal semées. En un coup d’œil, la productrice peut déterminer les zones les plus ou les moins productives de ses champs par la couleur des cartes. « Rouge, c’est un signal d’alarme! » dit-elle.

Attablée au bureau de la ferme, un ancien parc d’engraissement de 2000 bœufs, Isabelle Brouillette examine les cartes de ses champs en compagnie de Pierre-Luc Brouillette (aucun lien de parenté), conseiller en agricul ture durable à La Coop Profid’Or. « Ces cartes donnent une vue d’ensemble de la santé des champs. Et elles permettent de détecter les zones problématiques que l’on ne soupçonnerait pas au sol », dit-il. Une fois les zones rouges détectées, l’enquête sur le terrain commence.

Les causes de baisse de rendement des cultures peuvent être nombreuses. Mais les cartes provenant du ciel aident à cibler les bobos. Est-ce

un problème de maladie? Est-ce un problème de structure du sol? De compaction? De drains bouchés? Ou de fertilité? Les problèmes peu vent varier d’un champ à l’autre et même d’une zone de champ à l’autre. Cette carte va faciliter l’échantillonnage des analyses de sol, l’analyse du nivellement, le drainage ou encore l’application de semis ou de fertilisation à taux variable.

Mais pour mieux comprendre « les zones rouges », il faut que le satellite-espion travaille à long terme, dit Pierre-Luc Brouillette. « L’année dernière, on a eu un printemps et un été secs. Cette année, les champs sont noyés. C’est impor tant de voir comment la terre se comporte dans des conditions météorologiques opposées. L’historique des champs nous permet d’affiner les diagnostics et de voir si un problème est récurrent », dit-il.

Les cartes de zones de gestion permettent aussi d’élaborer des cartes de rendement écono mique. Celles-ci incorporent les coûts de pro duction et le prix de vente des grains. « Je vois immédiatement où sont les zones les plus ou les moins rentables », dit Isabelle Brouillette, une femme d’affaires aguerrie. Celle-ci cogérait une entreprise de construction avec son père, décédé tragiquement il y a sept ans. L’entrepreneur s’était lancé dans l’élevage de bœufs de boucherie « pour

Isabelle Brouillette et Pierre-Luc Brouillette
SEPTEMBRE 2013 | Le Coopérateur agricole 47

Technologie agricole

Les systèmes GPS seront plus ou moins précis en fonction des besoins. Leur prix oscille entre 1000 et 45 000 $.

CARACTÉRISTIQUES DES DIFFÉRENTS SYSTÈMES GPS

GPS DGPS WASS RTK 3 m 1 m 1 m 2 cm

Satellites Satellites Garde côtière

15 à 20 cm entre chacun des passages +- 1 m répétable

Omnistar 7 à 12 cm entre chacun des passages +-20 cm répétable

Échantillonnage de sol Échantillonnage de sol Contours de champ Guidage Autoguidage Semis Fertilisation

Satellites Base au sol

Satellites Antenne RTK radio Réseau antenne cellulaire

15 à 20 cm entre chacun des passages +- 1 m répétable

2 cm entre chacun des passages

2 cm répétable d’année en année

Échantillonnage de sol Contours de champ Guidage Autoguidage Semis Fertilisation

Échantillonnage de sol Contours de champ Guidage Autoguidage Microtopographie Nivellement Semis Fertilisation

réaliser un rêve ». Sa fille gère aujourd’hui les deux entreprises, sans compter sa famille, deux gar çons âgés de 6 et 10 ans.

Cet accès aux cartes de rendement et les services-conseils de La Coop Profid’Or « sont un moyen économique de faire de l’agriculture de précision », juge Isabelle Brouillette. L’entre preneure a abandonné l’élevage de bœufs, une décision d’affaires, pour se consacrer unique ment à la culture. Et pour ne pas avoir à investir dans de la coûteuse machinerie, elle fait faire ses pulvérisations et ses battages à forfait.

Lancé en 2011, ce service clés en main de « cartes de rendement – services-conseils » permet de « démocratiser la technologie », estime Alain Brassard, conseiller spécialisé en agriculture de précision à La Coop fédérée. Tous les producteurs ou entrepreneurs à forfait ne possèdent pas une moissonneuse-batteuse équipée de capteurs de rendement géoréfé rencés. Ces capteurs peuvent facilement coûter 20 000 $ et la rapidité du progrès technologique les rend désuets en quelques années, selon lui. « Dans plusieurs champs, les cartes de rende ment élaborées grâce aux photos satellite ont été comparées avec celles produites à partir d’une

moissonneuse-batteuse équipée d’un capteur de rendement géoréférencé. Le résultat s’est avéré très similaire », dit-il.

De plus, croit Alain Brassard, la grande majo rité des producteurs ne calibrent pas adéquate ment leur capteur de rendement. Et surtout, ils n’utilisent pas à leur plein potentiel l’information fournie par ce capteur. Le coût annuel du service offert par le réseau La Coop varie entre 900 et 1200 $ selon la superficie de la ferme. En tout, plus de 100 000 hectares situés dans la plaine du SaintLaurent, de la frontière ontarienne jusqu’à Rivièredu-Loup, sont scrutés à la loupe. Mais à partir de cette année, ce service est offert dans toute la province.

À la Ferme Jam-Mi-Li, le travail d’espion nage du satellite commence à porter ses fruits. Isabelle Brouillette et Pierre-Luc Brouillette sont en train d’examiner avec attention les cartes de zones de gestion lorsque Sylvain Rocheleau, le gérant de la ferme, fait irruption dans le bureau. Et il prédit : « Le champ Lafortune, que l’on a nivelé l’année dernière, eh bien je m’attends à pratiquement le double de rendement à la prochaine récolte de maïs. » Quelque part, il faut remercier le ciel.

48 Le Coopérateur agricole | SEPTEMBRE 2013
(Source : Alain Brassard, La Coop fédérée)

Danny Messier à bord de sa pulvérisatrice automotrice. Bientôt, au lieu d’avoir plusieurs écrans d’ordinateur pour commander différentes machines dans une cabine, il n’y aura qu’un seul écran GPS, permutable d’un tracteur à l’autre. Il n’est pas exclu que ce soit une tablette iPad ou même un téléphone intelligent.

Danny Messier : le patenteux de système GPS

Le Québec agricole a été fortement arrosé de la mi-mai à la fin juin 2013, une saison parmi les plus exécrables. Dans de telles conditions, il faut jouer contre la montre pour réaliser des travaux aux champs. « Le système GPS nous a permis d’appliquer de l’azote avec précision, de jour comme de nuit. En 48 heures, avec deux tracteurs, on en a appliqué 50 000 gallons sur 607 hectares de maïs. Il y a 10 ans, ça nous aurait pris plus d’une semaine », raconte Danny Messier. Ce producteur de Saint-Pie de Bagot cultive 809 hectares de terres familiales, réalise des semis et de l’épandage d’azote à forfait sur 1456 hectares, sans compter des activités de pulvérisation sur 3642 hectares.

Rapidité d’exécution, précision, meilleure gestion des intrants, Danny Messier ne jure plus que par le GPS. « Le GPS, c’est débile! Si tu l’utilises bien. » Son initiation remonte à 1998, à l’achat d’une moissonneuse-batteuse équipée d’un capteur de rendement géoréférencé. Les cartes de ses champs qu’il obtient grâce à cette technologie naissante lui donnent une bonne idée des zones les plus et les moins productives. Et il entreprend les correctifs de nivellement et de drainage des terres.

L’année suivante, il équipe un tracteur d’un système GPS avec guidage manuel pour la

pulvérisation. Et en 2007, il équipe un tracteur d’un système de guidage automatique. Fini les rangs de maïs semés en zigzag et les chevau chements. Aujourd’hui, les six tracteurs de son entreprise sont tous équipés d’un système GPS avec guidage automatique, « ce qui enlève un formidable stress sur les épaules du conducteur. Quand il n’y a pas de bogues ou de pannes! » dit-il. Il achète tous ses tracteurs d’occasion, âgés de deux à quatre ans, avec 800 à 2500 heures sous le capot, et il prolonge leur vie utile à plus de 10 000 heures.

« Je préfère investir dans la technologie à taux variable que dans la machinerie neuve. Ce n’est pas long que tu mets 50 000 $ sur un semoir », dit-il. Ce diplômé en grandes cultures de l’ITA de Saint-Hyacinthe (1994) est devenu un patenteux de haute technologie. Comment? En suivant des cours d’anglais, pour mieux éplucher les manuels d’instructions des appareils vendus sur le marché.

Il a ainsi équipé son semoir usagé de commandes GPS d’engrais liquides. Il s’agit de petites boîtes noires remplies de fils électriques qui agissent comme un système nerveux. Celui-ci règle avec précision la dose d’engrais azotée déposée près de la semence de maïs et la dose de démarreur liquide déposée sous le grain. Prochaine étape : doter le semoir d’une commande de pression

SEPTEMBRE 2013 | Le Coopérateur agricole 49

Technologie agricole

Jean-François Messier conduit le vieil épandeur d’engrais converti en applicateur moderne et à taux variable de potasse ou de ray-grass.

pneumatique pour semer les grains à la profon deur désirée selon la texture du sol.

Ces commandes sont toutes liées à l’écran GPS, un ordinateur situé dans la cabine du trac teur qui tient lieu de cerveau. Et chaque machine – semoir ou pulvérisateur, par exemple – équivaut à un disque dur logé dans cet ordinateur. « C’est un peu plus compliqué que de programmer la machine vidéo du salon », dit Danny Messier, sou rire en coin. Son tout dernier bricolage : la conver sion d’un vieil épandeur d’engrais, âgé d’une

Danny Messier dit ne pas utiliser moins d’intrants sur ses terres. Mais il bichonne celles qui sont plus productives et réduit ses applications dans les champs qui le sont moins. En cette journée venteuse, le producteur ajoute un produit pour alourdir les gouttelettes lors de l’application de Roundup, afin de ne pas arroser le champ de soya voisin. Avec la venue de l’agriculture de précision, Danny Messier croit que le Québec devrait s’inspirer des États-Unis pour redéfinir sa politique agroenvironnementale. « Le Québec a une approche punitive. Alors que les États-Unis récompensent financièrement les producteurs qui ont de bonnes pratiques de conservation », croit-il.

trentaine d’années, en un applicateur moderne et à taux variable de potasse ou de ray-grass. L’engin est calibré pour épandre 28 kg/ha (62 lb/ha) de ray-grass et entre 84 kg/ha et 875 kg/ha de potasse.

Danny Messier insiste : une machine mal calibrée sème de l’argent aux quatre vents. Le patenteux estime le coût de son épandeur maison à 7500 $. Neuf, selon lui, il vaudrait près de 60 000 $. « La technologie, oui, mais pas à n’importe quel prix », conclut-il.

50 Le Coopérateur agricole | SEPTEMBRE 2013

Les tracteurs cultiveront-ils seuls les champs d’ici 15 à 25 ans?

Dans une vidéo diffusée sur YouTube1, on voit un tracteur tirer un semoir à maïs. Mais la cabine est vide! Le producteur, lui, est confortablement assis sur une chaise au bout de son champ. Bouteille d’eau en main, il regarde sa machi nerie robotisée effectuer toute seule un virage juste en face de lui. En tournant, le tracteur a soulevé le semoir, avant de lui faire toucher terre à nouveau pour reprendre le semis.

Les fabricants mettent rapidement au point l’autopilotage par GPS du parc de machinerie agricole. Pour pallier un manque criant de maind’œuvre, d’une part. Et pour enlever du stress au conducteur, de l’autre. Conduire un tracteur ou une moissonneuse-batteuse de 10 à 12 heures par jour n’est pas de tout repos. Mais le jour où l’agriculture se fera sans humain n’est pas pour demain. Pour des raisons de sécurité, entre autres : si la machine devient folle, comment l’arrête-t-on? Et pour des raisons juridiques. « En cas d’acci dent, qui serait tenu responsable? Le producteur? Le concessionnaire? Le fabricant? » demande Josué Hétu, consultant chez Lagüe/John Deere. Chose certaine, les fabricants planchent sur l’autonomie et une meilleure communication entre les machines. Par exemple, à partir de sa moissonneuse-batteuse, un producteur pourra prendre la commande d’un tracteur et de son chariot à grains pour y transborder du maïs ou du soya sans crainte de collision, et ce, sans s’arrêter ni ralentir. La précision des systèmes GPS, au centimètre près, fait que l’opération se fera en respectant les distances sécuritaires entre les machines. Cette technologie de commande totale d’équipement sera offerte au Québec dès cet automne. À l’avenir, à partir d’un tracteur ou d’une moissonneuse « maître », un producteur pourra faire fonctionner plusieurs engins.

Sous la pression réglementaire, les fabricants ont mis les bouchées doubles pour concevoir des moteurs diésels ultrapropres. Ces mêmes

fabricants mettent au point des moteurs fonction nant avec des carburants de rechange au coûteux et polluant pétrole. CASE mise sur le biodiésel fabriqué avec du soya. La société compte aussi substituer à l’huile actuelle un produit à base de soya pour actionner les systèmes hydrauliques. « Nous mettons au point un tracteur muni d’un moteur à hydrogène destiné au marché européen », indique pour sa part Abe Hughes, représentant de New Holland. D’ici 10 ou 15 ans, il n’est pas impos sible de voir carburer des tracteurs à l’électricité!

Tous les fabricants s’entendent pour sonner le glas du gigantisme des tracteurs, des semoirs et des moissonneuses-batteuses. Ceux-ci ont atteint leurs limites, en raison des problèmes de compaction du sol. Les futures machines seront plus légères et plus rapides. Le but : effectuer un maximum de travail dans un laps de temps très court sur de plus grandes superficies. Cette contrainte du temps est exacerbée par les change ments climatiques, car les périodes de beau temps pour semer, arroser ou récolter sont irrégulières et imprévisibles. Toutes ces opérations sont déjà une course contre la montre, avec comme enjeu la rentabilité de l’entreprise.

Les fabricants promettent aussi que le futur parc de machinerie agricole sera offert à un prix abordable. Peu importe la couleur de l’équipe ment, il reste fabriqué par l’homme. Combien coûtera la pièce sophistiquée défectueuse? Combien de temps prendra la réparation, vu qu’une panne survient toujours au mauvais moment? C’est là qu’intervient la révolution du transfert de données sans fil. Certains fabricants offrent déjà, par l’entremise de leurs concession naires, un service d’entretien préventif du parc de machinerie de leurs clients. En ayant accès à l’ordinateur de l’engin, le technicien peut récu pérer les dossiers de diagnostics et repérer les anomalies, ce qui permet d’éviter de coûteuses réparations. À suivre. u

1 www.youtube.com/watch?v=zU4liQvrcm4
SEPTEMBRE 2013 | Le Coopérateur agricole 51

Technologie agricole

Selon le Pr Viacheslav Adamchuk, le prix de la technologie GPS va diminuer pour qu’elle soit davantage accessible aux plus petites fermes. Il importe pour les agriculteurs, dit-il, de bien choisir les systèmes GPS en fonction de leurs besoins et de bien calibrer leur machinerie. Mal calibrée, un pulvérisateur nécessite deux fois plus d’eau.

Le Québec est-il en retard en matière d’agriculture de précision?

Diplômé en ingénierie de l’École nationale d’agronomie d’Ukraine et titulaire d’une maîtrise et d’un doctorat de l’Université Purdue, en Indiana, aux États-Unis, le professeur Viacheslav Adamchuk a enseigné pendant 10 ans l’agriculture de précision dans les grandes cultures à l’Université du Nebraska, où il faisait également partie du service d’extension en la matière auprès des agriculteurs. En 2010, il s’est joint au Département de génie agricole du Campus Macdonald (Université McGill). Le Coopérateur l’a rencontré.

Le Coopérateur agricole

Où se situe le Québec dans l’adoption de techniques d’agriculture de précision?

Viacheslav Adamchuk

Un des premiers éléments de l’agriculture de précision est le drainage des terres. Le Québec est un des premiers endroits en Amérique du Nord à avoir soulevé ce problème. Heureusement, car il a été pas mal arrosé en 2013!

CA Y a-t-il un retard par rapport aux États-Unis?

VA Oui, sur le plan des pratiques de conservation du sol, c’est-à-dire la culture sans labour. Au Nebraska, 80 % des producteurs cultivent sans labour, dont 30 % en semis direct. Au Québec, selon un sondage de 2007, 38 % des producteurs pratiquent une forme de travail réduit du sol. C’est dire que 62 % des producteurs québécois labourent leurs champs, une pra tique désuète reconnue pour causer de l’érosion et de la pollution.

CA Y a-t-il des raisons à cela?

VA Oui. Les fermes québécoises produisent en majorité des animaux, sans grand volume de céréales. Par contre, les céréaliers et maraîchers québécois adoptent l’agriculture de précision. En ce sens, le Québec se compare plus aux États du Vermont et de New York.

CA L’agriculture de précision va-t-elle changer le métier d’agriculteur?

VA Oui. Elle va faire de l’agriculteur un chef d’entreprise, au même titre qu’un propriétaire de magasin à grande surface, surtout sur le plan de la traçabilité des produits. Ce dernier gère avec précision l’origine de ses produits, ses stocks et ses expéditions par rayon, ses employés, son parc de camions, etc.

52 Le Coopérateur agricole | SEPTEMBRE 2013

La technologie défie les connaissances agronomiques

« Il y a un fossé entre la quincaillerie technologique et les connaissances agronomiques », dit Nicolas Tremblay, président de la Commission de la chimie et de la fertilité des sols et responsable du Guide de référence en fertilisation, du CRAAQ.

Au premier chef, le spécialiste en régie et en nutrition des cultures d’Agriculture et Agroalimentaire Canada remet en question les connaissances actuelles sur l’application de l’azote, engrais vital pour faire pousser la nourriture sur le globe. « On a toujours cru que plus il y avait de matière organique dans un sol, plus il y avait d’azote disponible pour les plantes. Or il y a des situations où c’est complètement l’inverse », dit le chercheur.

« On dispose aujourd’hui de technologies précises, mais si les recommandations ne sont pas adéquates pour ce niveau de précision, on peut manquer le train! » dit Athyna Cambouris, présidente de la Commission sur la géomatique et l’agriculture de précision (CGAP) et chercheuse en agriculture de précision et fertilisation des agrosystèmes à Agriculture et Agroalimentaire Canada. Outre la texture du sol, le climat influence la disponibilité de l’azote selon que l’année est pluvieuse ou sèche. « Il faut savoir dans quelles conditions climatiques notre champ baigne pour mieux comprendre la vie du sol et les besoins des plantes ».

Les deux chercheurs planchent sur de nouvelles grilles de fertilisation du CRAAQ de concert avec le MAPAQ. Avec l’introduction de l’agriculture de précision, au lieu de se fonder sur une moyenne d’application hétérogène, les recommandations vont plutôt tendre au « cas par cas ».

La présidente de la CGAP1 organise la tenue d’un colloque sur l’agriculture de précision le 25 novembre 2014 à Victoriaville. Il réunira des experts en géomatique (mariage des sciences de la terre et de l’informatique), en chimie des sols et en agrométéorologie ainsi que des agriculteurs.

1 Athyna Cambouris travaille également à un projet de formation continue en agriculture de précision de concert avec l’Ordre des agronomes du Québec.

Les freins à l’agriculture de précision

Selon une étude publiée en 20101, le taux d’adoption des technologies d’agriculture de précision est de 70,2 % dans les plus grandes fermes du Québec. Parmi les freins à son développement : pour les agriculteurs; et les connaissances agronomiques; pour l’agriculteur; dans les établissements québécois d’enseignement (universités, cégeps et ITA) pour les agronomes et les techniciens; et vers l’agriculture de précision.

1 « Les facteurs qui influencent l’adoption des technologies d’agriculture de précision des agriculteurs au Québec », mémoire de maîtrise, Jonatan Grimaudo, HEC Montréal, janvier 2010

Liste de sites Web en agriculture de précision

Precision Ag : precisionag.com

AgTalk : newagtalk.com

Precision Pays : precisionpays.com

ACES Precision Ag : alabamaprecisionagonline.com

Avis aux producteurs sur l’utilisation responsable des caractères

Monsanto Company est membre du groupe Excellence Through StewardshipMD (ETS). Les produits de Monsanto sont commercialisés conformément aux normes de mise en marché responsable de l’ETS et à la politique de Monsanto pour la commercialisation des produits végétaux issus de la biotechnologie dans les cultures de base. L’importation de ce produit a été approuvée dans les principaux marchés d’exportation dotés de systèmes de réglementation compétents. Toute récolte ou matière obtenue à partir de ce produit ne peut être exportée, utilisée, transformée ou vendue que dans les pays où toutes les approbations réglementaires nécessaires ont été accordées. Il est illégal, en vertu des lois nationales et internationales, d’exporter des produits contenant des caractères issus de la biotechnologie dans un pays où l’importation de telles marchandises n’est pas permise. Les producteurs devraient communiquer avec leur négociant en grains ou acheteur de produit pour confirmer la politique de ces derniers relativement à l’achat de ce produit. Excellence Through StewardshipMD est une marque déposée de Excellence Through Stewardship.

VEUILLEZ TOUJOURS LIRE ET SUIVRE LES DIRECTIVES DES ÉTIQUETTES DES PESTICIDES.

Les cultures Roundup ReadyMD possèdent des gènes qui leur confèrent une tolérance au glyphosate, l’ingrédient actif des herbicides RoundupMD pour usage agricole. Les herbicides Roundup pour usage agricole détruiront les cultures qui ne tolèrent pas le glyphosate. La technologie du traitement de semences AcceleronMD pour le maïs est une combinaison de quatre produits distincts homologués individuellement qui, ensemble, contiennent les matières actives métalaxyl, trifloxystrobine, ipconazole et clothianidine. La technologie du traitement de semences AcceleronMD pour le canola est une combinaison de deux produits distincts homologués individuellement qui, ensemble, contiennent les matières actives difénoconazole, métalaxyl (isomères M et S), fludioxonil, thiaméthoxam et Bacillus subtilis. Acceleron et le logoMD, AcceleronMD, DEKALB et le logoMD, DEKALBMD, Genuity et le logoMD, les symboles Genuity, GenuityMD, Refuge Intégral et le logoMD, Refuge IntégralMD, Roundup Ready 2 Technologie et le logoMC, Roundup Ready 2 RendementMC, Roundup ReadyMD, Roundup TransorbMD, Roundup WeatherMAXMD, RoundupMD, SmartStax et le logoMD, SmartStaxMD, TransorbMD, VT Double PROMD, YieldGard VT Chrysomèle/RR2MC, YieldGard Pyrale et le logo et YieldGard VT TripleMD sont des marques de commerce de Monsanto Technology LLC. Utilisation sous licence. LibertyLinkMD et le logo de la goutte d’eau sont des marques de commerce de Bayer. Utilisation sous licence. HerculexMD est une marque déposée de Dow AgroSciences LLC. Utilisation sous licence. Respectez Les Refuges et le logo est une marque déposée de l’Association canadienne du commerce des semences. Utilisation sous licence. ©2013 Monsanto Canada Inc.

Avant d'ouvrir un sac de semence, vous devez lire, comprendre et accepter les pratiques d'utilisation responsable, incluant les règles applicables aux refuges pour la gestion de la résistance des insectes des caractères biotechnologiques exprimés dans la semence, tel que stipulé dans l'Entente de gestion responsable des technologies de Monsanto que vous signez. En ouvrant le sac et en utilisant la semence qu'il contient, vous acceptez de vous conformer aux principes d'utilisation responsable en vigueur.

Date: June 27/2013 Production Artist: Sheri App: Indd CS5 Due Date: ? Urban & Co. Inc. 905-403-0055
RESPECTEZ REFUGE S LES MD
Semer des refuges. Préserver la technologie
SEPTEMBRE 2013 | Le Coopérateur agricole 53

Agriculture de précision et sécurité alimentaire

Préoccupations mondiales, solutions globales

Chaque année, 105 millions de tonnes d’azote sont épandues sur les sols agricoles dans le monde. Pourtant, 65 millions ne sont pas utilisées par les plantes.

Rajiv Khosla est professeur d’agriculture de précision à l’Université d’État du Colorado, boursier du prestigieux Jefferson Science Fellowship Program – qui l’a amené à tra vailler au Département d’État sur la politique alimentaire internationale des États-Unis – et ex-président de la Société internationale d’agri culture de précision. Ce scientifique de réputation mondiale est convaincu que l’agriculture de pré cision peut grandement contribuer à accroître les rendements et la rentabilité des cultures partout sur la planète, et aider, par le fait même, à résoudre les problèmes de faim dans le monde tout en pré servant l’environnement.

La sécurité alimentaire, la dégradation de l’environnement, les changements climatiques de même que la conservation de l’eau et de l’énergie

sont au cœur des préoccupations de toutes les économies du globe. Comment feront-elles face à ces enjeux? L’agriculture de précision fera partie de l’arsenal qu’il sera nécessaire de déployer, croit le P r Khosla.

Pour lui, l’agriculture de précision s’exprime sous le vocable des cinq R (rightinput,righttime, right amount, right place, right manner), que l’on peut traduire librement par « le bon produit, appliqué au bon moment, en bonne quantité, au bon endroit et de la bonne façon ». Bref, une agri culture écologiquement intensive. La technique des cinq R permet, dit-il, de produire plus avec moins en faisant un usage plus efficace des res sources (éléments nutritifs, eau, semences, pesti cides, main-d’œuvre, investissement, machinerie,

PHOTO UNIVERSITÉ D’ É TAT D U COLORADO
technologie, information). Rajiv Khosla est professeur d’agriculture de précision à l’Université d’État du Colorado Les excès d’azote épandus dans le monde proviennent principalement des cultures de blé, de riz et de maïs dans les exploitations de Chine, d’Inde et des États-Unis.
54 Le Coopérateur agricole | SEP TEMB RE 2013 Réflexion

Pas juste pour les riches

« L’agriculture de précision ne s’applique pas qu’à l’agriculture intensive et à grande échelle, et elle n’est pas nécessairement coûteuse et com plexe », enseigne celui qui travaille à rendre cette façon de faire accessible au plus grand nombre. « Elle peut se pratiquer en mode high tech avec GPS ou encore low tech, c’est-à-dire à la main et à l’aide d’équipement simple, en utilisant des marqueurs par exemple, tels que des drapeaux de diverses couleurs, pour indiquer les endroits où l’application d’un intrant doit varier. La techno logie diffère, mais le principe des cinq R demeure le même. Ce qui importe, c’est de définir quel est le facteur limitant dans le sol. »

« On peut donc mettre en place cette forme d’agriculture dans des exploitations ne faisant qu’un hectare ou même moins », poursuit-il, en précisant du même souffle que plus de 50 % des terres arables de la planète sont cultivées à petite échelle. « Il faut donc coupler le potentiel humain avec l’équipement, et non pas se concentrer uni quement sur la technologie. Ce qui importe, c’est d’abord d’accroître la production, l’efficacité et la rentabilité des entreprises, car le niveau de sécu rité alimentaire est étroitement lié à la pauvreté. »

Les exemples qui viennent étayer ses dires sont multiples. Au Zimbabwe, au Mozambique, en Afrique du Sud, au Mali, au Burkina Faso et au Niger, des essais de microdosage de fertilisants,

appliqués à la main ou à l’aide d’un équipement modeste, ont littéralement fait bondir les rende ments de sols autrefois improductifs et la qualité des cultures qu’on en a tirées. Au Zimbabwe, dans certaines régions, le simple fait de semer au moment approprié a permis d’accroître consi dérablement la production de maïs (de 0,3 t/ha à 1,6 t/ha). Dans la plaine indo-gangétique – une région s’étendant dans le nord et l’est de l’Inde, sur une partie du Pakistan et sur tout le Ban gladesh –, on a accru les rendements de blé de plus de 16 %, et ce, avec 50 % moins d’irrigation que dans les pratiques d’agriculture tradition nelles, grâce au nivelage des sols effectué à l’aide de techniques d’agriculture de précision et de cultures sur billons.

Soulignons que La Coop fédérée poursuit les mêmes objectifs avec son programme d’agri culture de précision et qu’elle a élaboré au fil des ans des services, comme l’imagerie satellite, qui donnent un accès économiquement rentable à cette façon de faire à tous les producteurs.

« Pour que les nouvelles technologies agri coles, telles que l’agriculture de précision, se répandent à l’échelle du globe, l’agriculture a besoin du même type de révolution qui a touché les téléphones cellulaires et qui en a fait des outils aujourd’hui toujours plus accessibles », croit le P r Khosla.

L’azote

Près de la moitié de la population de la planète n’existerait pas s’il ce n’eût été de l’abondante quantité de nourriture produite grâce à la fertilisation azotée. Ses avantages n’ont pourtant pas encore profité à tous. Dans les pays subsahariens, où 239 millions de personnes souffrent de la faim chaque année, les cultures pâtissent dans des sols dépourvus d’éléments nutritifs, et les producteurs agricoles n’ont pas les moyens de se payer des engrais. Ailleurs, leur sur-utilisation pollue les cours d’eau et émet des gaz à effet de serre.

Source : National Geographic http://ngm.nationalgeographic. com/2013/05/fertilized-world/ nitrogen-flow-graphic

Pour en savoir plus : http://soilcrop.colostate.edu/ khosla/index.html

Indice de risque pour la sécurité alimentaire, 2010

LIBERIA R

Légende Risque extrême Risque élevé Risque moyen Risque faible Aucune donnée

Cet indicateur évalue les risques d’approvisionnement en aliments de base dans 163 pays. Une douzaine de critères, élaborés en collaboration avec le Programme alimentaire mondial, sont pris en compte pour évaluer le classement, notamment l’état de santé et nutritionnel des populations, la production et l’importation de céréales, le produit intérieur brut par habitant, les désastres naturels, les conflits et l’efficacité des gouvernements.

LL U STRATION : HTT P :// M A P LE C ROFT. C O M /A B O U T/NEWS/FOOD-SE CU RITY.HT M L
SEP TEMB RE 2013 | Le Coopérateur agricole 55
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Source : Maplecroft http://maplecroft.com/about/ news/food-security.html ANGOLA
CONGO
ZIMBABWE BURUNDI ÉRYTHRÉE
AFGH ANIS TAN TCHAD SOUDAN ÉTHIOPIE

Cette caméra améliore la précision des sarclages dans le maïs et le soya. Elle est plus longue à installer que le sarcleur lui-même !

Sarcler est une nécessité chez les Gauthier, à raison de 400 à 500 heures par année, car ils produisent en mode biologique. Or, quand on sarcle à 14 km/h même en mode RTK (autoguidage du tracteur), les disques s’approchent parfois trop près des plants. Étienne Gauthier a donc installé une caméra sous deux sarcleurs pour visualiser l’efficacité du désherbage du maïs et du soya, effectué deux fois en saison. D’une pression tactile sur l’écran, il peut ainsi mieux contrôler la distance disques-tiges, à 2,5 cm près. La caméra tout terrain, qui reçoit en plein objectif feuilles, terre et eau, n’est autre qu’une caméra antivandalisme montée sur un bras métallique fait maison, reliée de manière filaire à un ordinateur portable fixé sur un bras articulé.

BELVACHE ET LA RÉSEAUTIQUE

PAS DE PANIQUE

!

MÉGAHERTZ, MÉGAOCTETS ET MÉGAPIXELS : AUX FERMES BELVACHE, ON JONGLE AVEC LES TECHNOLOGIES SANS FIL NON PAS POUR ÉPATER LA GALERIE, MAIS POUR EXCELLER ET AMÉLIORER LA QUALITÉ DE VIE. DES TECHNOLOGIES POUR RÉPONDRE À DES BESOINS, NI PLUS NI MOINS !

Au sortir de Sainte-Anne-des-Plaines se profile la ferme des Gauthier, avec ses larges bâtiments, d’innombrables tracteurs, trois silos verticaux et un enchevêtrement de tuyaux constituant un élévateur à grains qui surplombe le tout. Les installateurs de systèmes d’Internet sans fil par microondes

le confirmeront : c’est l’endroit rêvé où ins taller une antenne pour envoyer ou recevoir de l’information sous forme ondulatoire.

C’est justement ce qu’a fait, pour quelques milliers de dollars, l’expert en réseautique Jean-Louis Dupont, de l’en treprise RésotX solutions, à Terrebonne.

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TEXTE ET PHOTOS D’ÉTIENNE GOSSELIN, AGRONOME, M. SC.
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Les Gauthier désiraient utiliser Internet dans leur étable, leurs garages et leurs résidences ainsi que faciliter le branche ment sans fil d’un camping situé à sept kilomètres de la ferme et qui n’était pas desservi par la haute vitesse. Même leur érablière, qui se trouve à un kilomètre, est maintenant branchée sans fil !

« Je ne fais que de l’agricole, car ce sec teur est laissé vacant par la majorité des entreprises de réseautique, qui préfèrent se concentrer sur d’autres industries plus rentables et géographiquement plus concen trées », affirme Jean-Louis Dupont, joint alors qu’il faisait la promotion de ses services au dernier Salon de l’agriculture.

TÉLÉPHONIE ET TÉLÉMESURE

Le premier besoin que les Gauthier vou laient satisfaire était celui de simplifier leurs communications cellulaires. « Avec la trentaine de téléphones que nous utili sons, nous payions presque autant de frais de télécommunications que d’électricité ! »

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dit, mi-sérieux, mi-blagueur, l’un des neuf copropriétaires de Belvache, Réal Gauthier. L’entreprise a ainsi mis en commun les forfaits cellulaires, ce qui a grandement diminué les coûts. Cette année, on envi sage de passer à la téléphonie IP, accessible quand les utilisateurs sont à portée des émetteurs présents dans la ferme, ce qui leur permettrait de contracter des forfaits moins onéreux auprès de leur fournisseur de téléphonie cellulaire.

La disponibilité d’un réseau hybride avec fil/sans fil (Wi-Fi) permet de relier les sept caméras IP dispersées partout dans la ferme (réservoir d’eau d’érable, réservoirs de carburant, parcs de vêlage, cour, etc.) à un enregistreur central, auquel tous ont accès à distance. L’ordinateur des robots de traite qui enregistre les données des vaches est lui aussi relié, par Wi-Fi, aux téléphones des vachers.

Dans l’avenir, ce que les Gauthier aime raient bien réseauter, ce sont les tracteurs, pour transmettre et enregistrer en temps

1. Les Fermes Belvache comptent neuf actionnaires, d’autres membres de la famille et de nombreux employés. Ici, Étienne et Olivier Gauthier, deux des plus maniaques de technologie du clan Gauthier.

2. Étienne Gauthier, c’est l’homme chargé de concevoir les plans de drainage. La ferme dispose de tous les équipements nécessaires pour drainer des terres argileuses naturellement mal drainées (gleysol Sainte-Rosalie).

3. Les Fermes Belvache utilisent la réseautique sans fil ou Wi-Fi pour faciliter les communica tions, éviter des déplacements (grâce à la vidéosurveillance) et être plus performantes.

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1. Une cabine branchée ! Tableaux de bord, écrans GPS, caméra de recul, téléphone, tablette pour Internet et le divertissement : le tracteur articulé des Gauthier impressionne, avec sept écrans et un clavier! Notons que malgré les cellulaires, les Gauthier utilisent encore la radio HF.

2. Autoration, distributeur automatique d’aliments, robots de traite, caméras IP : l’étable des Gauthier est high-tech, et ce, même si on compte beaucoup de bras disponibles ! L es technologies permettent aux actionnaires de ne jamais travailler plus d’une fin de semaine sur quatre.

3. L’antenne qui surmonte l’élévateur reçoit son signal d’un câble réseau provenant de la maison. Par cette antenne, on alimente sans fil d’autres émetteurs, qui recomposent un signal Wi-Fi dans les nombreux bâtiments.

réel les passages au champ, d’autant plus que la ferme cultive en mode biologique, ce qui l’oblige à rendre des comptes à son organisme certificateur. Ce genre de ser vice, actuellement proposé par les conces sionnaires (comme John Deere), est jugé trop onéreux par les Gauthier. Réal Gau thier exprime même quelques réticences à partager ses données, ne sachant pas trop si elles demeurent sa propriété. Pour l’ins tant, on utilise donc la « bonne vieille » clé USB pour transférer les données recueillies lors des opérations culturales.

WI-FI POUR LES NULS

Comment distribuer un accès sans fil sur l’ensemble de la ferme ? D’abord, un câble réseau part de la maison principale et ali mente des antennes non Wi-Fi (protocole TDMA, pour time division multiple access), qui, à leur tour, distribuent le réseau aux autres maisons, aux bâtiments de ferme et à l’éra blière. Dans chaque construction, on trouve donc une ou plusieurs antennes à faible ou moyenne portée, qui recréent le signal Wi-Fi pour le rediffuser de manière plus propre, de façon à éviter les congestions, les inter férences et les interruptions. « La technolo gie TDMA utilisée est “intelligente”, en ce sens qu’elle détecte automatiquement les données voix ou vidéos pour leur donner la préséance », explique Jean-Louis Dupont. Cette connectivité à relais est préférable à l’émission d’un seul signal Wi-Fi à fort débit lancé tous azimuts, assure Jean-Louis Dupont, car ce signal peut être affecté entre autres par les objets métalliques, nombreux dans les fermes. Ainsi, les utilisateurs qui circulent à la ferme passent d’une antenne à une autre (interconnectivité) sans s’en rendre compte, ce qui est possible grâce au protocole TDMA, aussi appelé « multiplexage

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