Options 579 - sept 2012

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Le pirate prend aujourd’hui la figure du pirate somalien qui, à bord d’embarcations légères et rapides, les skiffs, met le cap sur des bateaux navigant dans le golfe d’Aden, au large des mille huit cents kilomètres de côte somalienne, pour les piller.

OPTIONS N° 579 / SEPTEMBRE 2012

39 en 2011. Egalement très touchée, la pêche artisanale locale a vu son activité chuter de 46 % en deux ans. Cartographier la menace et, surtout, en mesurer l’exacte intensité : au fil de l’histoire, le dilemme s’est souvent posé. Professeur d’histoire à l’université de Provence, Colette Dubois a ainsi décrit comment Français et Italiens y ont été confrontés, en mer Rouge, à la fin du xixe siècle, ces derniers « instru­ mentalisant la piraterie, à partir de 1898, pour prendre pied sur les côtes de l’Arabie au détriment de l’Empire ottoman ». Mais, au final, tout le monde en paie le prix, directement ou indirectement : « Un phénomène d’insécurité dans une région du monde a nécessairement un coût pour la société », a souligné Renaud Bêlais, responsable des études économiques au sein d’une grande entreprise. Et notamment pour les armateurs, qu’ils affrètent des navires marchands ou des bateaux de pêche. Un de leurs représentants a ainsi dressé une typologie des coûts que ces derniers doivent supporter. Ce sont d’abord des coûts énergétiques, les bateaux devant naviguer plus vite pour déjouer ou prévenir les tentatives d’attaque. Ce sont aussi des efforts financiers pour former les équipages, payer des salaires attractifs et modifier la structure des bateaux

avec abris et postes de tir. A cela, il faut ajouter des surprimes d’assurances pouvant atteindre quatre à cinq fois le montant de la prime annuelle ; mais aussi des coûts plus exceptionnels comme le paiement des rançons, parfois pris en charge par les assureurs via la garantie « Kidnap and Ransom ». Un « business » en plein essor et très lucratif : en 2005, le montant moyen d’une rançon était de 150 000 dollars ; il a atteint 5,3 millions de dollars en 2010. Au total, 238 millions de dollars de rançons auraient été versés en 2011, alors que la seule Afrique de l’Est a connu 470 prises d’otages, toujours selon les chiffres du Bureau maritime international.

Près de 60 000 euros le passage ! Le business est aussi très lucratif pour les sociétés militaires privées, de plus en plus présentes sur les zones de piraterie, sociétés qui factureraient, toujours selon un armateur, plusieurs dizaines de milliers d’euros le passage. Il n’est pas ici question de ce que l’on appelle les équipes de protection embarquées (Epe) sur les navires battant pavillon français et sillonnant l’océan Indien, mises à disposition par la marine nationale depuis 2008. Mais des sociétés privées, pour la plupart anglo-saxonnes, 47


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